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Faculté des Sciences Sociales
Sainte-Anne-de-Beaupré. P.Q.
François Chabot
Mémoire
présenté pour
l'obtention
du grade de maître es arts (M. A.)
École des gradués
Université Laval
Avr i l 1989
© droits réservés de François Chabot
Résumé:
Ce document vidéo se veut une description ethnographique des
célébrations de la fête de sainte Anne à
Sainte-Anne-de-Beaupré. Le mémoire vidéo s'intéresse aux
visiteurs en scrutant les différentes dimensions de la vie
religieuse, touristique et ethnique lors d'une visite estivale au
Sanctuaire. Les visiteurs participent aux événements religieux
dans un contexte de fête populaire, la visite touristique voisine
les rassemblements ethniques. Ainsi le pèlerinage devient un
vaste "happening" où chacun se retrouve en groupe sous la
protection de la grand-mère de tous: sainte Anne.
Méthode
Le tournage de.ce documentaire anthropologique à Sainte-Anne-de-
Beaupré se déroula successivement durant l'été 1987 et l'été 1988. A
l'été 1987, après plusieurs visites au sanctuaire afin de rencontrer des
visiteurs et après avoir obtenu des Pères Rédemptoristes l'autorisation
de filmer, le tournage a débuté durant la Grande Neuvaine précédant la
fête de sainte Anne le 26 juillet. J'ai effectué également quelques
entrevues après la fête de sainte Anne. Mes nombreuses visites m'ont
permis de développer une relation de confiance avec le Père Real Gingras
(directeur du pèlerinage) qui devint par la suite un informateur-clé.
En décembre 1987, en faisant le bilan de cette première étape de
tournage, je disposais de séquences de tourisme, de piété populaire et
différentes entrevues avec des visiteurs. J'avais également réalisé une
entrevue d'une heure avec le directeur du pèlerinage, i l m'avait fallu six
mois pour établir un lien de confiance avec cet informateur-clé. Ainsi,
l'expérience de tournage de l'année 1987 permettait une première
approche du phénomène pèlerin. Je constatais également qu'il me fallait
aller au-delà de ce qu'on appelle l'observation participante en
anthropologie. Jean Rouen, un des pionniers du film ethnographique,
prétend que l'utilisation d'un support visuel menant à la construction
d'une ethnographie exige une perception différente de la réalité et une
attitude moins casanière sur le terrain. Je pris donc les dispositions pour
entreprendre è l'été 1988 la seconde phase du tournage. Je me rendis à
Sainte-Anne-de-Beaupré pour le pèlerinage des autochtones lors de la
dernière fin de semaine de juin, mais des pluies abondantes rendirent
impossible le tournage. Toutefois, deux semaines plus tard, j'entrepris de
m'installer sur le terrain de stationnement de la grève pour la période de
la Grande Neuvaine et de la fête du 15 au 27 juillet.
Ensuite, j'ai eu plusieurs rencontres avec mes informateurs
potentiels avant de passer à l'enregistrement d'une entrevue comme telle,
sauf en ce qui concerne les véritables touristes où l'entrevue devait se
faire presque immédiatement. Car le touriste recherche la nouveauté et
ne revient pas sur ses pas le lendemain pour se confier en entrevue.
D'autre part, mes rencontres avec des membres des différents groupes
ethniques tel les Montagnais, les Naskapis, les Mie Mac et les Gitans
allaient permettre de préparer des entrevues qui allaient mettre en relief
la problématique centrale de cette recherche. Comment des groupes
ethniques dissemblables vivent-ils une expérience religieuse, culturelle
et touristique semblable?
Plus les jours passaient, plus les différents membres des groupes
ethniques pouvaient voir la différence entre le tournage d'un
documentaire anthropologique et un reportage télé. Les reporters sont à la
recherche du flash et de l'événement, les prises de vues et les entrevues
doivent être réalisées sur-le-champ et très rapidement. L'anthropologue
est à la recherche de propos plus substantiels selon une problématique
plus globale du phénomène. Par ailleurs, les membres des groupes
ethniques me faisaient confiance peut-être pour deux raisons. Ils me
voyaient parmi eux, dans les mêmes conditions quotidiennes, et avec un
enfant comme de nombreuses familles en pèlerinage. Deuxièmement,
j'organisais des entrevues mais je n'étais pas pressé de les enregistrer
illico, «Je passerai vous- voir demain», sans préciser l'heure ou le moment
de la journée. Il faut tenir compte du fait qu'on a affaire à des gens qui
sont d'abord en vacances. Il fallait donc respecter leur organisation
variable du temps. Rouch traduit cette expérience de terrain par un
concept qu'il nomme "l'anthropologie partagée" (1971: 543). Selon lui,
l'ethnologue n'est plus un simple observateur de la réalité quotidienne, il
«ethno-regarde», «ethno-pense», et les ethnographié(e)s qui se
retrouvent en confiance en face de lui et de la caméra, «ethno-montrent»,
«ethno-parlent» et «ethno-pensent». En conclusion, Rouch (1971:
529-543) résume cette démarche en la nommant «ethno-dialogue
permanent» où l'ethnographe et les ethnographié(e)es se rencontrent par
le biais d'une anthropologie partagée. Par ailleurs, Sorenson parle de
comment-
Dans la dernière décennie se sont
développées une instrumentation
moderne, une théorie et une
méthodologie nouvelles, qui ont permis
l'élaboration et l'utilisation dans le
domaine des sciences humaines de
documents visuels concernant les
activités humaines spontanées.
Sorenson 1979:125
Sorenson catégorise sa méthode selon quatre types qu'il nomme:
l'information indifférenciée, l'information structurée, les intuitions
personnelles et les constantes spatiales et temporelles.
L'information indifférenciée est un type de donnée que l'on ne peut
prévoir recueillir à l'avance. Lors du pèlerinage, plusieurs manifestations
de foi s'organisent souvent de manière spontanée, comme les prières
individuelles, les déambulations devant des reliques ou des statues. Ces
données correspondent à la tradition gestuelle des pèlerins et lorsque je
recueille des séquences de ces activités, je découvre inévitablement des
observations non prévisibles qui seront analysées en salle de montage. Un
documentaire anthropologique doit chercher é comprendre et la seconde
catégorie d'information de la méthode Sorenson est l'information
structurée, qui se situe dans cette perspective. Lorsqu'un anthropologue
entreprend le tournage de cette catégorie d'informations, i l doit bien
comprendre le contexte et les enjeux de sa recherche. Cette
compréhension permet d'arriver à formuler des questions simples, claires
et précises. Chaque ethnographie témoigne des motifs profonds du sens de
sa visite au sanctuaire et ainsi chaque entrevue construit les modèles
culturels des visiteurs en pèlerinage. Le troisième élément de la méthode
Sorenson se nomme les «intuitions personnelles», qui doivent s'inspirer
simultanément d'un point de vue d'auteur lié à une perspective
anthropologique sur le phénomène. Finalement, les constantes spatiales et
temporelles, quatrième élément de la méthode Sorenson, permettent de
situer l'événement dans le temps et dans son lieu d'origine, car le
document visuel change la durée réelle de l'événement. Cette dernière
question nourrit des inquiétudes particulières chez Sorenson, mais
l'ensemble de ses commentaires fournit un guide méthodologique pour la
réalisation de films anthropologiques scientifiquement crédibles. Enfin,
l'analyse de ces données consistait d'abord à cerner les sphères
d'activités religieuses, ethniques et touristiques durant le pèlerinage.
Ensuite, il a fallu choisir parmi les données recueillies lors du tournage
afin de créer un montage descriptif de ces facettes majeures des visites
à Sainte-Anne-de-Beaupré.
En ce qui concerne les entrevues, il s'agissait de procéder à une
analyse élémentaire de leur contenu afin d'y repérer les signes
d'expériences caractéristiques de la foi religieuse, de l'appartenance
ethnique ou encore du simple touriste pour ensuite y rechercher les
dénominateurs communs.
L'équipement utilisé se composait de deux caméras Panasonic: la
G100 avec magnétoscope intégré et la WV-3230-12x avec un
magnétoscope, le NV-8410.
Pour les plans d'ensemble, le son fut capté à partir du micro sur
caméra. Lors des entrevues, j'ai utilisé un micro Sony F-V50 relié à la
caméra, et les cassettes de tournage étaient des T-120 Scotch 1/2". Pour
les besoins de l'éclairage, j'ai utilisé des quartz de 650 watts alimentés
à l'électricité. Le montage s'effectua sur une table NV-A500 pouvant
programmer les images jusqu'à 1 /30e de seconde. La table de montage
programmant les séquences est composée de deux enregistreuses: la
Panasonic A6-6300 (où la cassette s'installe pour enregistrer la séquence
programmée) et la NV-8500, où se complète l'enregistrement de la
séquence. Le montage s'est fait en deux phases principales: un
pré-montage amassant les séquences déterminantes suivi d'un montage
final classant et analysant les différentes sphères de l'événement selon
un point de vue anthropologique.
L'équipement utilisé pour la réalisation de ce documentaire est de
type semi-professionnel. Il faut donc tenir compte du fait qu'avec de tels
outils, i l est impossible d'arriver è une qualité de son et d'images
"broadcast*. Ainsi le son a été refait presque entièrement en studio. Il
était impossible d'épurer le son de tous les bruits parasites (par exemple
lors de l'entrevue avec un Mie Mac). Au niveau des images, quelques plans
extérieurs sont instables (en particulier lors du sacrement de l'onction
des malades) è cause de la légèreté de la caméra et de l'objectif d'une
qualité réduite. Cependant, l'ensemble du document ne souffre pas trop de
la qualité réduite de l'équipement.
8
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