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Académie d’Orléans-Tours
Université François Rabelais
FACULTÉ DE MÉDECINE DE TOURS
Année 2012 N°
Thèse
pour le
DOCTORAT EN MEDECINE
Diplôme d’État
Par
Melle WEISS Aurélie
Née le 11/01/1985 à Clermont-Ferrand (63)
Présentée et soutenue publiquement le 1er Octobre 2012
LES TROUBLES DE LA PERSONNALITÉ SONT-ILS ASSOCIÉS AU
DÉVELOPPEMENT ULTÉRIEUR DE TROUBLES ANXIEUX ET DÉPRESSIFS
CHEZ DES PATIENTES ATTEINTES DE CANCER DU SEIN NON MÉTASTASÉ ?
Jury
Président de jury : Monsieur le Professeur Philippe GAILLARD
Membres du jury : Monsieur le Professeur Vincent CAMUS
Monsieur le Professeur Jean-Louis SENON
Monsieur le Professeur Christian RÉVEILLÈRE
Madame le Docteur Isabelle SUZANNE
Directeur de thèse : Monsieur le Docteur Paul BRUNAULT
6
Remerciements
A Monsieur le Professeur Philippe GAILLARD Professeur des Universités – Praticien Hospitalier Psychiatrie d’adultes
Vous m’avez fait l’honneur d’accepter la présidence de cette thèse.
Je vous remercie pour la qualité et la richesse de votre enseignement dont j’ai pu
bénéficier au cours de mon internat.
Veuillez recevoir ici l’expression de ma plus sincère gratitude et de mon plus profond
respect.
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A Monsieur le Professeur Vincent CAMUS
Professeur des Universités – Praticien Hospitalier
Psychiatrie d’adultes
Vous me faites l’honneur d’accepter de juger cette thèse.
Vous avez en grande partie contribué à ce travail en ayant coordonné la réalisation
de l’étude présentée et je vous en remercie.
Je vous remercie également pour la qualité de votre enseignement dont j’ai pu
bénéficier au cours de mon internat.
Veuillez recevoir ici l’expression de ma plus sincère gratitude et de mon plus profond
respect.
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A Monsieur le Professeur Jean-Louis SENON
Professeur des Universités – Praticien Hospitalier
Psychiatrie d’adultes
Vous me faites l’honneur d’accepter de juger mon travail.
Vous avez participé à la réalisation de l’étude présentée dans cette thèse et je vous
en remercie.
Je vous remercie également pour la qualité de votre enseignement dont j’ai pu
bénéficier au cours des regroupements inter-universitaires à Rennes.
Veuillez recevoir ici l’expression de toute ma gratitude et de mon plus profond
respect.
9
A Monsieur le Professeur Christian RÉVEILLÈRE
Professeur de Psychologie
Vous me faites l’honneur de porter de l’intérêt à ce travail et d’accepter de le juger.
Veuillez recevoir ici l’expression de ma plus sincère gratitude et de mon plus profond
respect.
10
A Madame le Docteur Isabelle SUZANNE
Psychiatre
Vous me faites l’honneur d’accepter de juger mon travail.
Vous avez coordonné l’ensemble de la réalisation de l’étude présentée ici, sans votre
investissement, ce travail n’aurait pas existé.
Veuillez recevoir ici l’expression de ma plus sincère gratitude et de mon plus profond
respect.
11
A Monsieur le Docteur Paul BRUNAULT
Psychiatre – Praticien Hospitalier
Psychiatrie d’adultes
Tu as accepté de diriger cette thèse.
Je ne te remercierai jamais assez pour ton encadrement d’excellente qualité ton
investissement, ta disponibilité, ta gentillesse, ta patience...
Reçois ici l’expression de toute ma gratitude et de tout mon respect.
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A l’Institut National du Cancer (INCa) pour avoir participé au financement de
l’étude ESPOIR qui a permis la réalisation de ce travail.
Aux comités départementaux de la Ligue contre le Cancer de la Vienne et de
l’Indre-et-Loire, pour avoir participé au financement de la fin de l’étude ESPOIR qui
a permis la réalisation de ce travail.
Aux psychologues : Mme Aurélie DUBUISSON (Tours) et Mme Marie-Alexandra
KASOLTER-PERE (Poitiers) qui ont participé au recrutement des patientes et à
l’enregistrement de toutes les données.
Au Docteur Isabelle SUZANNE, au Professeur Vincent CAMUS, au Pr Gilles
BODY, au Pr Olivier LE FLOCH et au Pr Emmanuel RUSCH, au Pr Claude
LINASSIER pour le CHU de Tours, au Pr Jean-Louis SENON, au Pr Alain
DABAN, au Pr Guillaume MAGNIN et au Dr Nathalie Papet pour le CHU de
Poitiers et toutes les personnes ayant participé à la réalisation de l’étude
ESPOIR pour leur investissement dans ce travail.
Mme A. Fayault, attachée de recherche clinique, qui a été mandatée par le CHRU
de Tours, promoteur, pour s’assurer de la bonne réalisation de l’étude.
M. Christophe GABORIT, Ingénieur statisticien dans le service d’Information
Médicale du CHU de Tours.
La direction de la Recherche du CHU de Tours (Mme Jocelyne Marlière, Chef de
projet).
Peggy Mercier, du réseau Oncocentre
A toutes les patientes qui ont participé à cette étude.
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DEDICACES
A mon Papa, tu m’as toujours guidée dans les bonnes directions et apporté tout
l’amour nécessaire pour que je puisse continuer sans toi. Ce travail t’est dédié.
A Benjamin, merci pour ton soutien sans faille et tout le bonheur que tu m’apportes.
Avec tout mon amour.
A notre petite fille qui arrive bientôt et qui aura déjà partagé de grandes émotions…
A ma Maman, pour m’avoir toujours portée, supportée et tellement apporté.
Avec tout mon amour.
A Hélène et Sonia pour leur amitié et tous les bons moments passés ensemble.
A Anne-Laure, Donca, Géraldine et Mathieu pour leur amitié, leur soutien, leur
présence.
A ma grand-mère pour le courage qu’elle nous transmet à tous.
A mes grands-parents pour leur soutien tout au long de mes études.
Aux familles Prévoteaux et Boulanger, pour m’avoir accueillie aussi
chaleureusement.
A toutes les équipes soignantes des services dans lesquels j’ai travaillé pour leur
bonne humeur et leur expérience.
Enfin, je remercie le Docteur Bertrand MICHEL, le Docteur Laurence JOLY et le
Docteur Emmanuelle PAPAZOGLOU, ainsi que tous les médecins avec lesquels j’ai
eu la chance de travailler, de m’avoir transmis la passion de ce métier.
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SERMENT D’HIPPOCRATE
En présence des Maîtres de cette Faculté,
de mes chers condisciples
et selon la tradition d’Hippocrate,
je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur
et de la probité dans l’exercice de la Médecine.
Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent,
et n’exigerai jamais un salaire au-dessus de mon travail.
Admis dans l’intérieur des maisons, mes yeux
ne verront pas ce qui s’y passe, ma langue taira
les secrets qui me seront confiés et mon état ne servira pas
à corrompre les mœurs ni à favoriser le crime.
Respectueux et reconnaissant envers mes Maîtres,
je rendrai à leurs enfants
l’instruction que j’ai reçue de leurs pères.
Que les hommes m’accordent leur estime
si je suis fidèle à mes promesses.
Que je sois couvert d’opprobre
et méprisé de mes confrères
si j’y manque
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Résumé
Contexte : Les troubles anxieux et dépressifs chez les femmes atteintes de
cancer du sein sont actuellement sous-diagnostiqués et sous-traités. Une meilleure
connaissance des facteurs précoces associés à ces troubles permettrait un meilleur
dépistage et une meilleure prise en charge pour ces patientes.
Notre étude a pour but de déterminer l’impact des troubles de la personnalité
sur la survenue ultérieure des troubles anxieux (dont le trouble anxieux généralisé) et
dépressifs (épisode dépressif majeur) en fin de première phase de traitement de
cancer du sein non métastasé.
Méthode : 120 patientes ont été recrutées au sein de l’étude ESPOIR (Early
Screening for Psycho-Oncological Intervention Research). Cette étude longitudinale
prospective multicentrique (CHU de Tours et Poitiers) comportait trois temps
d’évaluation : au moment du diagnostic (T1), à 3 mois (T2) et à 7 mois (T3 : fin de la
première phase de traitement). Nous avons mesuré à T1 et à T3 : les variables
socio-démographiques, celles liées au cancer et au traitement, les troubles anxieux
et dépressifs évalués de manière catégorielle (MINI) et les stratégies de coping
(Brief-COPE). Les troubles de personnalité ont été évalués de manière catégorielle
(VKP) à T2.
Résultats : Les patientes présentant au moins un trouble de personnalité
avaient significativement plus de trouble anxieux généralisé, de trouble panique et
d’épisode dépressif majeur à T3. L’absence de trouble de personnalité réduisait le
risque de trouble anxieux et d’épisode dépressif majeur à T3. Certains troubles de
personnalité (paranoïaque, borderline, évitante, dépendante, obsessionnelle-
compulsive et dépressive) étaient significativement associés au trouble anxieux
généralisé à T3, indépendamment de la présence d’un trouble anxieux généralisé à
T1.
Conclusion : Cette étude met en évidence l’association significative entre les
troubles de la personnalité et le développement ultérieur des troubles anxieux et
dépressifs chez les patientes prises en charge pour un cancer du sein. Il conviendrait
de pouvoir aider les équipes soignantes dans le dépistage précoce de ces troubles
afin de mieux identifier les patientes à risque.
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Abstract
Are personality disorders risk factors for later major depressive disorder and
anxiety disorders in non metastatic breast cancer patients?
Background and objective: Although anxiety disorders and depressive disorders
are prevalent in breast cancer patients, they remain underdiagnosed and
undertreated. A better understanding of the early factors associated with these
disorders could help to better screen and treat these patients.
Our study aimed to determine whether personality disorders were predictors
for later anxiety disorders (e.g., generalized anxiety disorder), or depressive
disorders (major depressive disorder) in non metastatic breast cancer patient at the
end of the treatment phase.
Method: We recruited 120 patients from the ESPOIR study (Early Screening for
Psycho-Oncological Interview Research). In this prospective, longitudinal, multicenter
(University Hospital of Tours and Poitiers) study, we assessed all patients at three
time points: immediately after diagnosis (T1), three months later (T2) and seven
months after T1 (T3: end of the first treatment phase). At T1 and T3, we assessed
socio-demographics characteristics, cancer and treatment-related variables, point
prevalence for anxiety disorders and depressive disorders according to DSM-IV
criteria (using the MINI) and coping style (Brief-COPE). We assessed personality
disorders with a categorical approach at T2 using the VKP.
Results: Patients with at least one personality disorder had higher point prevalence
for generalized anxiety disorder, panic disorder and major depression at T3. Patients
with no personality disorder were at lower risk for later anxiety disorders or major
depression at T3. Some personality disorders (paranoid, borderline, avoidant,
dependent, obsessive-compulsive and depressed) were significant predictors for
generalized anxiety disorder at T3, independently of the existence of generalized
anxiety disorder at T1.
Conclusion: This study underlines the association between personality disorders
and later anxiety disorders and major depressive disorder in breast cancer patient.
We should help heath care professionals in the early screening of these patients.
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Mots-clés :
Psycho-oncologie, cancer du sein non métastasé, épisode dépressif majeur, troubles
anxieux, trouble anxieux généralisé, facteurs prédictifs, troubles de personnalité,
coping
étude longitudinale prospective multicentrique.
Keywords:
Psycho-oncology, non metastatic breast cancer, major depressive disorder, anxiety
disorders, generalized anxiety disorder, predictive factors, personality disorders,
coping,
longitudinal prospective multicenter study.
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SOMMAIRE
INTRODUCTION .......................................................................................................20
I. CANCER DU SEIN ET TROUBLES PSYCHOLOGIQUES .................................22
A. ADAPTATION et COPING........................................................................... 22
1. Définitions .................................................................................................... 22
B. EPIDEMIOLOGIE ET DEFINITIONS ........................................................... 26
1. Troubles de l’adaptation .............................................................................. 26
2. Troubles dépressifs ..................................................................................... 27
3. Troubles Anxieux ......................................................................................... 28
4. Evolution des troubles au cours de la maladie cancéreuse ......................... 29
C. FACTEURS ETIOLOGIQUES ..................................................................... 31
1. Facteurs liés à la maladie et au traitement .................................................. 31
2. Facteurs individuels ..................................................................................... 35
D. CONSEQUENCES DES TROUBLES PSYCHIATRIQUES ET
PSYCHOPATHOLOGIQUES ................................................................................ 38
1. Sur le cancer ............................................................................................... 38
2. Sur la qualité de vie ..................................................................................... 39
3. Conséquences générales ............................................................................ 40
II. ETUDES .............................................................................................................41
A. LES TROUBLES DE PERSONNALITE SONT-ILS ASSOCIES AU
DEVELOPPEMENT ULTERIEUR DES TROUBLES ANXIEUX ET DEPRESSIFS
CHEZ DES PATIENTES ATTEINTES DE CANCER DU SEIN ? .......................... 41
1. INTRODUCTION ......................................................................................... 41
2. MATERIELS ET METHODES ..................................................................... 43
3. RESULTATS ............................................................................................... 51
4. DISCUSSION .............................................................................................. 63
19
B. QUELS SONT LES TROUBLES DE PERSONNALITE ASSOCIES AU
DEVELOPPEMENT D’UN TROUBLE ANXIEUX GENERALISE CHEZ DES
PATIENTES ATTEINTES DE CANCER DU SEIN ? ............................................. 73
1. INTRODUCTION ......................................................................................... 73
2. MATERIEL ET METHODES ........................................................................ 75
3. RESULTATS ............................................................................................... 81
4. DISCUSSION .............................................................................................. 89
CONCLUSION ...........................................................................................................97
ANNEXES .................................................................................................................98
BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................... 106
20
INTRODUCTION
Le cancer du sein représente actuellement un véritable problème de santé
publique, il s’agit du cancer le plus fréquent chez la femme, avec une incidence
estimée à environ 50°000 nouveaux cas par an en France et une mortalité s’élevant
à 11°500 décès par an (Institut National du Cancer (INCa) 2009). Les progrès dans
la prise en charge ont été importants, avec notamment une généralisation du
dépistage et une amélioration des traitements curatifs. Grâce à ces progrès, le taux
de survie à 5 ans après un cancer du sein a progressivement augmenté au cours des
années quatre-vingts, atteignant un taux de 85% en France (INCa, 2009). De plus,
du fait du vieillissement de la population, le nombre de patientes ayant survécu à un
cancer du sein s’accroît, tout comme le nombre de patientes survivantes à long
terme d’un cancer du sein (Ganz, 2003) (défini comme toute patiente encore vivante
plus de 5 ans après le diagnostic de cancer) (American Cancer Society, 2010).
En dépit de ces améliorations cliniques et thérapeutiques, cette maladie
représente toujours un bouleversement dans la vie d’une femme, d’une part par la
menace existentielle qui y est associée, par les changements dans la vie quotidienne
qui vont intervenir mais également par l’atteinte d’un organe hautement symbolique
en terme de féminité (ANAES, 2000 ; Razavi & Delvaux, 2002). Face à une telle
épreuve, les réactions psychologiques vont être diverses, et aller de l’absence de
détresse émotionnelle à des réactions s’inscrivant dans le champ de la pathologie,
avec une souffrance importante.
Depuis plusieurs années, et notamment depuis le plan cancer 2003-2007, la
prise en charge des patients atteints de cancer a évolué, plaçant le patient au centre
des soins et avec une attention particulière à la dimension psychologique (Plan
Cancer 2003-2007). Se sont ainsi créés des dispositifs telle la consultation
d’annonce, ou encore le renforcement du soutien social et la possibilité d’une prise
en charge psycho-oncologique.
Ainsi, afin de pouvoir au mieux répondre aux besoins des patientes, nous
nous sommes intéressés à la prévalence des troubles anxieux et des troubles
dépressifs chez des patientes atteintes de cancer du sein au cours de la première
phase de traitement, période qui débute lors du diagnostic et qui se poursuit souvent
21
par la chirurgie et l’initiation de traitements adjuvants comme la chimiothérapie, la
radiothérapie ou encore l’hormonothérapie. Notre population a été choisie à partir de
l’étude initiale ESPOIR (Early Screening for Psycho-Oncological Intervention
Research), qui a réalisée au CHU de Tours et de Poitiers grâce à un financement de
l’INCA et des Ligues Départementales contre le Cancer d’Indre-et-Loire et de la
Vienne. Au travers de ces études, nous avons cherché à repérer certains facteurs
prédictifs du développement de troubles psychiatriques (troubles anxieux et troubles
dépressifs), afin de pouvoir repérer au plus vite les patientes vulnérables et leur
permettre de bénéficier d’un soutien adéquat.
Avant de présenter l’étude ESPOIR et les deux études réalisées dans cette
thèse, nous développerons des généralités relatives aux spécificités
psychopathologiques dans le cancer du sein. Nous détaillerons ainsi quelles peuvent
être les manifestations psychopathologiques dans les suites d’un cancer du sein et
quels peuvent en être les déterminants. Il a en effet été démontré au cours de
certains travaux (notamment ceux de Bardwell et al., 2006) que la dépression chez
les patientes atteintes de cancer du sein était moins associée aux caractéristiques de
la maladie et son traitement qu’aux caractéristiques individuelles de ces patientes.
Ainsi, notre intérêt s’est porté sur les troubles de personnalité, afin de connaître leur
impact sur le développement des troubles anxieux et des troubles dépressifs.
Enfin nous verrons quelles peuvent être les conséquences des troubles
psychiatriques évoqués, tant sur le devenir du cancer du sein que sur le plan de la
qualité de vie de ces patientes.
22
I. CANCER DU SEIN ET TROUBLES PSYCHOLOGIQUES
A. ADAPTATION et COPING
1. Définitions
Le cancer va représenter à la fois une menace existentielle, mais aussi un
bouleversement de la réalité quotidienne de la patiente. Son environnement, sa
position sociale, ses habitudes vont être modifiées. La maladie va alors agir comme
un « stress », ce dernier se définissant comme « une transaction particulière entre un
individu et une situation dans laquelle celle-ci est évaluée comme débordant ses
ressources et pouvant mettre en danger son bien-être » (Lazarus & Folkman, 1984).
Selon, l’individu, l’événement, l’environnement, la situation peut avoir un impact
différent, c’est pour cela qu’est apparue la notion de « stress perçu ». Face à ce
stress, l’individu va devoir mobiliser certaines ressources pour « s’adapter ».
L’adaptation constitue un équilibre entre un individu et son environnement,
variant selon les événements de vie et l’état interne du sujet. Ce concept peut être
défini comme le résultat final d’une phase de transition entre deux états séparés par
une crise existentielle et régi par le processus constant d’autorégulation ou
d’homéostasie qui permet à l’individu de faire face aux situations difficiles, chez un
sujet sans atteinte psychopathologique (Ronson, 2005). L’adaptation psychologique
vise à préserver l’intégrité physique et psychique. A chaque stade de la maladie, des
réactions psychologiques vont survenir, en intégrant les expériences passées, la
situation actuelle et les menaces futures. Ces réactions peuvent conduire soit à une
adaptation, soit à un échec et entraîner alors une détresse émotionnelle (Razavi &
Delvaux, 2002).
Cette adaptation est sous-tendue par des « processus » ou « stratégies
d’adaptation » autrement appelés coping (issu du terme anglais : « to cope » : faire
face à). Ce concept de coping, décrit pour la première fois par Lazarus et Folkman
en 1966, désigne un ensemble de réactions et stratégies élaborées par les individus
pour faire face à des situations stressantes.
23
Ce terme est admis dans le vocabulaire français depuis 1999, désignant les
réponses et réactions que l’individu va élaborer pour maîtriser, réduire ou simplement
tolérer la situation aversive (Bruchon-Schweitzer, 2002). Le coping peut prendre la
forme de cognitions (évaluation de la situation stressante, plan d’action…), d’affects
(expression ou répression de peur, colère, détresse…), de comportements
(résolution de problèmes, recherche d’information, de soutien…). Ceci permet au
sujet confronté à l’adversité de tenter de transformer la situation ou se modifier lui-
même pour la rendre plus tolérable.
Le coping est défini selon une approche transactionnelle, il s’agit de processus
impliquant des actions réciproques entre l’individu et son environnement. Le coping
est donc dynamique et s’inscrit dans un processus séquentiel. Ainsi, l’individu va
d’abord évaluer la situation stressante (évaluation primaire) puis ses ressources pour
y faire face (évaluation secondaire) (Bruchon-Schweitzer, 2002) avant de pouvoir
utiliser une (ou des) stratégie(s) de coping donnée(s).
a) Différentes stratégies de coping
Lazarus et al. ont déterminé deux fonctions au coping : soit modifier la
situation à l’origine du stress, soit agir sur les réponses émotionnelles suscitées par
le problème et donc agir sur soi. Deux grands types de stratégies de coping sont
donc décrits : le coping centré sur le problème et le coping centré sur l’émotion. Ainsi
le coping centré sur le problème va donc viser à « réduire les exigences de la
situation ou augmenter ses propres ressources pour mieux y faire face » (Bruchon-
Schweitzer, 2002). On retrouve dans ces stratégies la recherche d’information, la
recherche de soutien social, l’élaboration de plan d’action, l’affrontement direct de la
situation. Le coping centré sur l’émotion comprend les « diverses tentatives de
l’individu pour réguler les tensions émotionnelles induites par la situation » (Bruchon-
Schweitzer, 2002). Ainsi on peut retrouver des stratégies telles la minimisation, le
déni, la réévaluation positive, l’auto-accusation, l’impuissance-désespoir, l’évitement
émotionnel ou comportemental cognitif (distraction, désengagement…) ou encore
l’hostilité.
24
b) Déterminants du coping
Le coping étant un processus dynamique, il est déterminé à la fois par des
facteurs dispositionnels de l’individu comme ses traits de personnalité, ses
antécédents, ses croyances et par des facteurs en lien avec l’environnement et la
situation (nature de la situation menaçante, contrôlabilité, soutien social
disponible…). Le coping va également être déterminé par des processus
transactionnels, notamment par l’évaluation que le sujet va faire de la situation. Cette
évaluation va notamment varier en fonction de plusieurs éléments dont le « contrôle
perçu » qu’il peut avoir sur la situation. Il a été mis en évidence un effet protecteur
sur le plan psychique et somatique dès lors que l’individu perçoit la situation
stressante comme « contrôlable », de même un fort soutien social perçu peut
majorer l’aspect « contrôlable » de la situation et favoriser l’adaptation.
La résultante des processus de coping va se ressentir sur l ’état de santé
physique du patient et sur son bien-être ressenti, subjectif (ex : qualité de vie,
bonheur). Bruchon-Schweitzer a élaboré un modèle intégratif et multifactoriel visant à
rendre compte de l’adaptation d’un individu dans un contexte donné, l’adaptation
pouvant par exemple être définie en termes d’état de santé physique, de bien être
subjectif ou de qualité de vie (cf. Figure 1).
25
Figure 1. Modèle intégratif et multifactoriel des stratégies de coping, aspects processuels et déterminants (Bruchon-Schweitzer, 2001).
26
B. EPIDEMIOLOGIE ET DEFINITIONS
Depuis quelques années, la prise en charge du cancer ne s’est plus
uniquement consacrée à faire régresser la maladie cancéreuse, les équipes se sont
intéressées à la dimension psychologique et au bien-être des patientes. Ainsi, en
témoignent les recommandations de l’ANAES pour le suivi psychologique des
patientes ayant été traitées pour un cancer du sein non métastasé (ANAES, 2000).
Dans cet objectif, plusieurs travaux ont été menés et ont pu répertorier les
différents troubles présentés par les patientes atteintes de cancer du sein. Une étude
faisant référence en matière de psycho-oncologie, menée par Derogatis et al. en
1983 sur 250 patients atteints de cancer a mis en évidence une prévalence de
troubles psychiatriques de 47% dans cette population, avec une majorité de troubles
de l’adaptation, de troubles anxieux et de troubles dépressifs. Nous allons alors nous
concentrer sur ces troubles.
1. Troubles de l’adaptation
a) Définition
Selon le DSM-IV-TR (Manuel Diagnostique et Statistique des troubles
mentaux 4ème version révisée) (American Psychiatric Association (APA), 2004), ils
sont définis par plusieurs critères :
- Le développement de symptômes dans les registres émotionnels et
comportementaux, en réaction à un ou plusieurs facteur(s) de stress
identifiable(s), au cours des trois mois suivant la survenue de celui (ceux)-
ci.
- Ces symptômes ou comportements sont cliniquement significatifs, comme
en témoignent : soit une souffrance marquée, plus importante qu’il n’était
attendu en réaction à ce facteur de stress ; soit une altération du
fonctionnement social ou professionnel.
- Ces symptômes ne sont pas en lien avec un autre trouble psychiatrique, ni
avec un deuil.
27
- Une fois le facteur de stress disparu, les symptômes ne persistent pas au-
delà de 6 mois.
La pathologie cancéreuse implique une perte d’autonomie, une obligation de
soumission à différentes investigations et traitement, une atteinte du rôle social, il
semble donc difficile de déterminer une limite objective entre ce qui peut être
considéré comme « normal » ou « attendu ». Cependant, il est important de ne pas
négliger ces troubles faute de quoi ils peuvent considérablement altérer la qualité de
vie des patientes. (Razavi, 2002), et peuvent également majorer le risque de
tentative de suicide (ANAES, 2000).
b) Epidémiologie
Une étude faisant référence de par ses qualités méthodologiques est celle de
Derogatis et al. (1983), portant sur 250 patients atteints de cancer. Il y est rapporté
32% de patients souffrant de troubles de l’adaptation. Okamura et al. (2005)
retrouvent une prévalence des troubles de l’adaptation de 20%.
2. Troubles dépressifs
a) Définition
Il s’agit de bien distinguer un trouble dépressif, d’une tristesse passagère et
réactionnelle.
Les classifications actuelles DSM-IV TR et CIM-10 distinguent l’épisode
dépressif majeur, l’humeur dysthymique, ou encore l’épisode dépressif majeur avec
caractéristique mélancolique. L’épisode dépressif majeur est le plus étudié chez les
patientes atteintes de cancer du sein.
L’épisode dépressif majeur est défini, selon les critères du DSM-IV-TR comme
suivant :
- Au moins 5 des symptômes suivants doivent avoir été présents sur une
durée minimale de 2 semaines et avoir représenté un changement par
rapport au fonctionnement antérieur : humeur dépressive, diminution
marquée du plaisir ou de l’intérêt pour toutes ou presque les activités,
perte ou gain de poids, insomnie ou hypersomnie, agitation ou
28
ralentissement psycho-moteur, fatigue ou perte d’énergie, sentiment de
dévalorisation ou culpabilité excessive, diminution de l’aptitude à penser ou
à se concentrer, pensées de mort récurrentes.
- Les symptômes induisent une souffrance cliniquement significative ou
altération du fonctionnement social, professionnel ou autres domaines
importants.
- Symptômes non imputables aux effets physiologiques directs d’une
substance ou d’une affection médicale générale (ex : hypothyroïdie).
- Symptômes non expliqués par un deuil.
Ces critères permettent de diagnostiquer un épisode dépressif majeur, qui doit
alors traité de manière précoce.
b) Epidémiologie
Une méta-analyse effectuée par Reich et al. (2008) retrouve une prévalence
de l’épisode dépressif majeur mesuré selon les critères du DSM-IV variant entre
4,7% (Menhert et al., 2006) et 38% (Ell et al., 2005), à noter une étude de Kissane et
al. (2004) qui retrouve une prévalence de 9,6% chez des patientes traitées à un
stade précoce de la maladie et une prévalence de 6,5% chez des patientes
présentant un cancer à un stade avancé. Dans une méta-analyse réalisée par
Mitchell et al. (2011) portant sur des sujets suivis en cancérologie ou hématologie, on
retrouve une prévalence de l’épisode dépressif majeur (selon les critères DSM-IV) de
14,9%.
3. Troubles Anxieux
a) Définition
Une fois encore, il existe un continuum entre l’anxiété « normale » ressentie
par toutes personnes recevant le diagnostic d’une maladie pouvant menacer le
pronostic vital, et les troubles anxieux correspondant à un état pathologique à
l’origine d’une souffrance importante et altérant le fonctionnement de la personne.
29
Les classifications actuelles distinguent plusieurs troubles anxieux : le trouble
panique avec et sans agoraphobie, l’agoraphobie sans trouble panique, la phobie
spécifique, la phobie sociale, le trouble obsessionnel-compulsif, l’état de stress post-
traumatique et l’anxiété généralisée. Chaque trouble répond à des critères
diagnostiques précis (cf. Annexe 1). Certains troubles sont préexistants à la maladie
cancéreuse : ils peuvent alors évoluer indépendamment ou se majorer, d’autres
troubles peuvent apparaître et se développer au cours de la maladie et du traitement.
L’anxiété peut également être évaluée de façon dimensionnelle, ainsi, cela
permet un repérage rapide dès lors que cette anxiété affecte la vie du patient et
altère son fonctionnement.
b) Epidémiologie
Les troubles anxieux sont souvent évalués de manière dimensionnelle. Ainsi
on retrouve une prévalence de l’anxiété (évaluée par l’échelle Hospital Anxiety and
Depression scale) à 20-25% (Bottomley et al., 1998), des travaux de Hopwood et al.
(2010) retrouvant une anxiété chez 32,4% des patientes atteintes de cancer du sein
au moment du diagnostic puis 30,8% après 6 mois. Les évaluations catégorielles
sont plus rares, on retrouve une étude de Manzanera et al. (2003) qui décrit une
prévalence de l’agoraphobie de 15%, du trouble anxieux généralisé de 9% et du
trouble panique de 6%, une étude de Dausch et al. (2004), menée sur 207 patientes
dans les 3 semaines suivants le diagnostic de cancer du sein, retrouve une
prévalence de l’anxiété généralisée de 2,4%, du trouble panique (avec ou sans
agoraphobie) de 2,8%, de phobie spécifique de 2,4%, de phobie sociale de 1,9% et
de 5,3% pour l’état de stress post-traumatique. La prévalence de l’état de stress
post-traumatique a été également évaluée aux alentours de 8% (Tjemsland et al.,
1996 ; Cordova et al., 1995). La méta-analyse réalisée par Mitchell et al. (2011)
retrouve une prévalence des troubles anxieux (selon critères DSM-IV) de 10,3% chez
des patients suivis en cancérologie.
4. Evolution des troubles au cours de la maladie cancéreuse
Selon la revue de la littérature effectuée par l’ANAES ente 1987 et 1997, il
semble que la prévalence des troubles psychiatriques tende à diminuer durant la
première année après la chirurgie (ANAES, 2000). Ces résultats sont confirmés par
30
l’étude de Burgess et al. (2005), menée sur 222 femmes pendant 5 ans. Ainsi les
prévalences cumulées de l’épisode dépressif majeur, d’au moins un trouble anxieux
ou des deux étaient de 48% la première année, 25% la seconde, 23% la troisième,
22% la quatrième et 15% la cinquième. De même, dans l’étude d’Hopwood et al.
(2010) menée sur 5 ans chez plus de 2000 femmes traitées pour cancer du sein à un
stade précoce, la prévalence de l’anxiété (évaluée de manière dimensionnelle) est
de 32,4% avant le traitement : elle décroît lentement jusqu’à 28,5% à 5 ans. La
prévalence de la dépression est quant à elle évaluée à 12% au début de la prise en
charge et décroît pour atteindre 11,1% à 5 ans. Epping-Jordan et al. (1999)
constatent une prévalence de l’anxiété de 40% au moment du diagnostic, puis 17,5%
à 3 mois et 21,3% à 6 mois et de la dépression de 33,7% au moment du diagnostic,
de 28,7% à 3 mois et 26,3% à 6 mois, pour des prévalences dans la population
générale de 24,2% pour l’anxiété et 28% pour la dépression. Les résultats suivent
des évolutions similaires dans une étude menée par Schwarz et al. (2008) sur 367
patientes. Vahdaninia et al. (2010), constatent quant à eux une augmentation de la
prévalence de l’anxiété à 3 mois par rapport au moment du diagnostic avant de
constater une diminution après 18 mois.
Les évaluations des troubles anxieux (évaluations catégorielles) et de
l’épisode dépressif majeur sont plus rares, on retrouve l’étude menée par Burgess et
al ; (2005), qui souligne une prévalence élevée des troubles anxieux et de l’épisode
dépressif majeur au moment du diagnostic puis une diminution progressive pendant
les cinq années de l’étude.
Ces résultats indiquent une décroissance progressive un an après le début de
la prise en charge, les chiffres de prévalence de l’épisode dépressif majeur
rejoignent ceux retrouvés en population générale. Cependant on constate toujours
une prévalence élevée des troubles anxieux, supérieure à celle de la population
générale (Schwarz et al., 2008).
31
C. FACTEURS ETIOLOGIQUES
Nous avons vu que les troubles psychiatriques étaient fréquents chez les
patients atteints de cancer. Il est nécessaire de connaître les facteurs prédictifs de
ces troubles afin de pouvoir les dépister rapidement, de les prendre en charge de
manière précoce, et de pouvoir les prévenir.
Parmi les facteurs prédictifs de développement de troubles psychiatriques, on
peut considérer deux catégories : les facteurs en lien avec le cancer du sein lui-
même, et ceux propres à l’individu.
1. Facteurs liés à la maladie et au traitement
a) Facteurs liés au cancer
L’annonce d’un cancer est toujours un bouleversement dans la vie d’un
patient, comme l’a dit Nicole Alby, citée par O. Bézy (2007) : « Le cancer reste ce
qu’un médecin n’a pas envie de dire à un patient qui n’a pas envie d’entendre ». Le
cancer reste donc un stress en soi, cependant, il semble que le stade de
développement de la maladie et les variables objectives influencent peu la détresse
psychologique.
La plupart des études retrouve un impact des manifestations somatiques liées
au cancer ou au traitement sur la détresse psychologique. Ainsi Bardwell et al.
(2006) constatent, au cours d’une étude menée sur 2495 patientes atteintes de
cancer du sein non métastatique, un impact sur la dépression des troubles
vasomoteurs et gastro-intestinaux. La fatigue et la douleur sont également
fréquemment retrouvées comme facteurs prédictifs de dépression ou anxiété
(Pédrizet-Chevallier et al., 2008 ; Gandubert et al., 2009 ; Stark et al., 2002 ; Agarwal
et al., 2010). Okamura et al. (2005) mentionnent également l’effet de la perte
d’appétit et des nausées, ou encore les troubles du sommeil. Ainsi, certains auteurs
suggèrent un impact indirect, de par les symptômes somatiques et les limitations
fonctionnelles induites par la maladie et/ou le traitement (Scheier & Hegelson, 2006).
Toutefois, Bardwell et al. (2006) ont montré dans l’étude sus-citée que les variables
objectives liées au cancer (variables liées à la sévérité de la tumeur et aux
caractéristiques des traitements) n’expliquaient que 1,5% de la variance totale de la
32
dépression contre 20-25% concernant l’influence des variables psychosociales. Ces
résultats ont été confirmés par Scheier et al. (2006). On retrouve des résultats
similaires dans une étude de Burgess et al. (2005) qui sur une cohorte de 222
femmes atteintes de cancer du sein suivies sur 5 ans constatent qu’il n’y a pas
d’association entre les facteurs cliniques du cancer et le développement de troubles
anxieux ou dépressifs. Chen et al., (2009) dans une étude menée sur 1400 patientes
à tous les stades du cancer, ne retrouve ni d’influence du stade de la maladie, ni de
la présence ou non de récepteurs hormonaux.
b) Facteurs liés au traitement
(1) Chirurgie mammaire
La chirurgie du cancer du sein peut prendre plusieurs formes : une
tumorectomie (ablation de la tumeur en préservant le sein) et mastectomie (ablation
complète de la glande mammaire). Le sein est associé à une représentation
symbolique de la féminité, la chirurgie peut être alors vécue comme un acte mutilant
et traumatisant. Cependant, il est aujourd’hui proposé des chirurgies de
reconstructions mammaires afin de ne pas négliger cet aspect esthétique et
symbolique.
Il semble cependant que le type de chirurgie n’ait pas d’influence significative
sur les troubles psychiatriques (Ganz et al., 1992 ; Fallowfield et al., 1990).
Une étude de Den Oudsten et al. (2008) constate même qu’une chirurgie
conservatrice est plus à risque d’entraîner des troubles dépressifs. Nissen et al.
(2001) retrouvent une prévalence des troubles de l’humeur plus élevée et une moins
bonne qualité de vie chez les patientes ayant subi une mastectomie suivie d’une
reconstruction mammaire que chez celle ayant subi seulement une mastectomie.
Le type de chirurgie peut cependant avoir une influence variable selon l’âge
de la patiente : ainsi, chez les patientes de moins de 50 ans, la chirurgie
conservatrice semble moins pourvoyeuse de détresse émotionnelle, alors que chez
les patientes de plus de 50 ans, il semble que la crainte de la rechute est plus
importante en cas de chirurgie conservatrice et entraîne plus de troubles
psychologiques (Razavi & Delvaux, 2002 ; De Haes et al., 2002).
33
Dans la revue de littérature effectuée par l’ANAES (2000), il apparaît que les
femmes ayant subi une tumorectomie ne présentent pas moins de détresse
psychologique que les femmes ayant subi une mastectomie. Néanmoins, elles
présentent moins d’atteinte de l’image de soi et de troubles de la sexualité que celles
ayant subi une mastectomie.
(2) Chimiothérapie adjuvante
La chimiothérapie peut donner lieu à des effets secondaires inconfortables tels
les nausées et vomissements, l’alopécie ou la fatigue. Il apparaît fréquemment une
anxiété anticipatoire précédant les séances de chimiothérapie et pouvant donner lieu
à des vomissements (Razavi et Delvaux, 2002).
Des études indiquent une augmentation du risque de troubles psychiatriques
chez les patientes traitées par chimiothérapie. Ainsi Hopwood et al. (2010)
remarquent une augmentation de la prévalence et de la sévérité de la dépression
chez les femmes suivant une chimiothérapie, ceci étant le seul facteur en lien avec la
maladie ou son traitement ayant une influence significative et ayant été relevé par
cette étude. De même, Manzanera et al. (2003) retrouvent une prévalence des
troubles de l’humeur de 55,6% chez les femmes traitées par chimiothérapie (plus ou
moins suivie de radiothérapie) contre 19,4% chez les femmes traitées uniquement
par radiothérapie. Lim et al. (2011) mentionnent, après une revue de littérature une
association de la chimiothérapie avec l’anxiété (hors anxiété anticipatoire).
Cependant, les données concernant l’influence de la chimiothérapie dans le
développement de troubles anxieux et/ou dépressifs restent controversées (Bardwell
et al., 2006, Chen et al., 2009).
(3) Radiothérapie adjuvante
Un traitement par radiothérapie implique de nombreux effets secondaires
lourds (vomissements, nausée, fatigue, asialie…) qui peuvent induire une souffrance
psychologique. Il n’a cependant pas été retrouvé d’association significative entre
d’une part, la dépression et l’anxiété et, d’autre part, un traitement par radiothérapie
adjuvante (Brunault et al., 2011 ; Lim et al., 2011).
34
(4) Hormonothérapie
L’hormonothérapie est recommandée dans le traitement des cancers du sein
en présence de récepteurs aux œstrogènes, soit comme traitement palliatif du
cancer mammaire métastasé, soit comme traitement hormonal adjuvant du
carcinome mammaire primitif invasif. Les effets indésirables connus de ce traitement
sont le risque de complication thrombo-embolique et de transformation maligne de
l’endomètre. La question d’une augmentation du risque de dépression ou troubles
psychologiques a été soulevée. Une étude rétrospective sur 2943 patientes (Lee et
al., 2007) n’a pas mis en évidence de risque significatif de développer une
dépression chez les patientes traitées par Tamoxifène (traitement hormonal).
c) Facteurs liés à l’arrêt du traitement
Lors de l’arrêt du traitement, le patient va subir une nouvelle rupture ; en effet
le sentiment de sécurité induit par la prise en charge par les spécialistes, par une
équipe médicale va se terminer et peut laisser le sujet avec un sentiment d’abandon
et de vulnérabilité accrue (Bézy & Jalenques, 2007). Dans un premier temps, le
terme de rémission est utilisé et une surveillance régulière est nécessaire, laissant
présent le risque de rechute. Plusieurs auteurs ont décrit le « syndrome de
Damoclès » caractérisé par des affects anxieux et dépressifs, une peur continuelle
de la rechute et un sentiment de vie écourtée. De plus, le patient ayant survécu à
une maladie grave n’est pas forcément dans une situation aisée face à lui-même ou
face à son entourage : le « syndrome de Lazare » a également été décrit et désigne
« l’ensemble des difficultés auxquelles se trouvent confrontées les personnes en
rémission d’un cancer et principalement la difficulté de reprise de relation avec
l’entourage » (Bézy & Jalnques, 2007).
La phase de rémission va donc consister en un long processus de
réadaptation et réhabilitation pour lequel le patient devra être accompagné.
35
2. Facteurs individuels
(1) Facteurs socio-démographiques
Parmi les facteurs socio-démographiques associés à une augmentation de la
détresse psychologique, l’âge jeune est mentionné dans un nombre important
d’études. En effet, les patientes jeunes développent plus de troubles anxieux et
dépressifs que les patientes plus âgées (Burgess et al., 2005 ; Hartl et al., 2010 ;
Hopwood et al., 2010).
Un bas niveau socio-économique, ainsi qu’un bas niveau d’étude ou un statut
professionnel précaire sont parfois recensés comme des facteurs de vulnérabilité
(Hopwood et al., 2010 ; Agarwal et al., 2010 ; Bardwell et al., 2006). L’habitat en
zone rurale semble également entraîner une augmentation du risque de troubles
anxieux ou dépressifs (Manzanera et al., 2003).
Le soutien social est également à prendre en considération, une revue de
littérature citée dans les recommandations de l’ANAES constate que les patientes qui
confient leurs peurs et leurs préoccupations à leur conjoint ou à leurs proches vont
mieux émotionnellement (ANAES, 2000) ; l’importance de relation de confiance est
confirmée par Burgess et al. (2005). Une étude d’Akechi et al. (1998) met également
en évidence une meilleure adaptation psychologique des patientes ayant une
perception satisfaisante du soutien de l’équipe soignante.
(2) Antécédents psychiatriques
Les antécédents personnels de dépression ou de troubles anxieux sont des
facteurs favorisants le développement de la détresse psychologique et des troubles
psychiatriques au cours de la maladie cancéreuse (Christensen et al., 2009 ;
Burgess et al., 2005).
(3) Personnalité et coping
La personnalité peut être définie de façon catégorielle, comme le présente le
DSM-IV-TR avec une liste de personnalités pathologiques, qui caractérisent le
fonctionnement cognitif, comportemental et émotionnel du sujet avec son
environnement. La personnalité peut également être décrite selon des traits de
36
personnalité, évalués de façon dimensionnelle, caractérisant certains types de
réactions du sujet, d’autant plus que l’intensité du trait est marquée. A l’heure
actuelle, le modèle prédominant et de référence pour rendre compte des principales
dimensions de la personnalité est le modèle en cinq facteurs ou Big Five (John et al.,
1999). Selon ce modèle théorique, la personnalité peut être décrite selon les cinq
facteurs suivants :
1) L’extraversion (approche enthousiaste du monde extérieur avec sociabilité,
action, affirmation de soi et émotions positives) versus l’introversion ;
2) L’agréabilité (comportement pro-social et communautaire) versus
l’antagonisme ;
3) Le caractère consciencieux (idée de contrôle qui favorise également
l’atteinte du but fixé) versus l’impulsivité ;
4) Le névrosisme (émotions négatives, nervosité et humeur inégale) versus la
stabilité émotionnelle ;
5) L’ouverture (aux idées, aux expériences nouvelles, à la complexité de la vie
mentale) versus le conformisme.
Un auto-questionnaire facile d’utilisation et rapide (46 items) a récemment été
validé en français pour évaluer ces cinq dimensions de personnalité : le Big Five
Inventory français (Plaisant et al., 2010).
D’autres modèles ont été proposés pour évaluer certains traits de personnalité
de manière dimensionnelle, notamment l’anxiété-trait (proche du névrosisme),
l’optimisme ou le pessimisme.
Les traits de personnalité peuvent influencer les réactions à la maladie et les
stratégies de coping et le développement de troubles anxieux et/ou dépressifs.
Parmi les traits de personnalité pouvant induire une vulnérabilité à la détresse
psychologique, on retrouve un névrosisme élevé (Van der Steeg et al., 2010 ; Den
Oudsten et al., 2009), mais également un score bas au facteur « agréabilité ».
L’anxiété-trait apparait également comme facteur de risque (Bleiker et al., 1999 ;
Ando et al., 2011). Enfin le pessimisme est décrit comme facteur de risque et
37
l’optimisme comme protecteur face à la détresse psychologique (Mazanec et al.,
2010 ; Zenger et al., 2010).
Ces traits de personnalité peuvent influer (comme vu précédemment) sur les
stratégies de coping utilisées, bien qu’il s’agisse d’un processus en interaction
constante avec le contexte et l’environnement.
Parmi les stratégies de coping, il en existe certaines qui vont être corrélées
avec une bonne adaptation psychologique et d’autres pouvant être associées à une
majoration de la détresse émotionnelle. Ainsi, une revue de la littérature a été
effectuée par Heim et al. (1991). Cette dernière identifie les stratégies corrélées à
une bonne adaptation : l’attention et le soin, la position d’attaquant, l’analyse de
problème, la dissimulation de la gravité, l’acceptation, la diversion dans l’action,
l’optimisme, la relativisation et la valorisation ; et les stratégies corrélées avec une
mauvaise adaptation : la résignation, le fatalisme et la dissimulation de la gravité.
L’impact du déni et de la dissimulation de la gravité est controversé : une étude
menée par Deimling et al. (2006) constate une augmentation de la dépression et de
l’anxiété dans les situations de déni. Drageset et al. (2005) soulignent l’importance
de l’environnement pour l’orientation du coping : il constate qu’une personne
entourée et avec un niveau d’éducation plus élevé va davantage avoir recours à la
recherche de soutien social et instrumental. Les stratégies actives, optimistes
apparaissent plus « protectrices », a contrario des stratégies passives, résignées et
pessimistes qui entraîneraient davantage de détresse psychologique (Avery &
Weisman, 1987). Cependant, le caractère contrôlable ou non de la maladie : ainsi
par exemple la présence ou non de métastase reste à prendre en considération.
Ainsi des stratégies de coping centrées sur l’émotion pourront s’avérer plus efficaces
lors de situations non contrôlables et des stratégies centrées sur le problème
lorsqu’un contrôle de la situation reste possible.
38
D. CONSEQUENCES DES TROUBLES PSYCHIATRIQUES
ET PSYCHOPATHOLOGIQUES
1. Sur le cancer
Plusieurs études, dont un consensus international ayant réuni psychiatres et
oncologues (Ballenger et al., 2001), s’accordent pour confirmer l’existence d’un lien
entre les troubles psychologiques et le pronostic du cancer.
Le rôle des troubles psychologiques dans l’initiation du cancer reste
controversé et non scientifiquement démontré (Lemogne et al., 2010). Cependant,
plusieurs études indiquent une péjoration du pronostic chez les sujets souffrant de
dépression ou de troubles anxieux. Ainsi, Watson et al. (1999) retrouvent une
diminution de la survie d’environ 5 ans chez les patientes avec un score élevé de
dépression, Falagas et al. (2007) dans une revue de littérature, constatent un impact
négatif de la dépression et de la répression des émotions sur la survie mentionnée
dans 31 études.
Plusieurs hypothèses sont formulées : ainsi l’impuissance / désespoir pourrait
avoir une influence en augmentant le stress et donc l’activité de l’axe corticotrope et
une diminution de l’immunocompétence (Bruchon-Schweitzer, 2002). En effet, une
étude longitudinale menée sur plus de 11 ans sur 227 patientes atteintes de cancer
du sein menée par Andersen et al. (1989) a montré les effets bénéfiques en termes
de baisse du risque de rechute et d’amélioration de la survie chez les patientes ayant
bénéficié d’un suivi psychologique au long cours. L’hypothèse formulée est celle
d’une réduction du stress par la psychothérapie, qui entraînerait une diminution de la
réaction inflammatoire chronique liée au cancer. Les patientes ayant rechuté avaient
un taux de cortisol (hormone du stress) plus élevé, ainsi qu’une élévation du nombre
de cellules de l’inflammation (lymphocytes, cellules NK…).
Ainsi, selon ces hypothèses, le cancer et son traitement entraîneraient une
modification des réponses immunitaires, une élévation de la réaction inflammatoire et
une altération endocrinienne, ce qui entraînerait une vulnérabilité aux troubles
anxieux et dépressifs qui eux-mêmes maintiendraient ce phénomène et
diminueraient la survie, mais aussi la qualité de vie (Ballenger et al., 2001 ; Pedrizet-
39
Chevallier et al., 2008). Cependant, le lien entre les troubles psychiatriques et
l’impact sur la maladie doit encore être investigué au cours d’études ultérieures.
Les implications thérapeutiques tirées de ces conclusions sont la nécessité de
repérer et traiter ces troubles psychiques, ne pas être trop tolérant face à une
tristesse ou anxiété considérées comme « normales » qui pourraient faire négliger la
présence de véritables souffrances psychologiques.
Les recommandations par rapport au traitement soulignent l’importance des
psychothérapies, quelque soit la médiation utilisée (musicothérapie, art-thérapie…).
Le traitement pharmacologique reste à évaluer selon la balance bénéfices-risques,
car les interactions médicamenteuses entre antidépresseurs et traitement du cancer
doivent être prises en considération. Ainsi l’association entre certains
antidépresseurs et le Tamoxifène est interdite ou déconseillée (fluoxétine, paroxétine
et venlafaxine). En effet ces antidépresseurs sont des inhibiteurs enzymatiques du
cytochrome P450 (en particulier de l’iso-enzyme CYP2D6) et réduisent l’efficacité du
tamoxifène (par réduction de concentration de son métabolite actif) (Reich, 2011 ;
AFSAPPS, 2010). Un autre antidépresseur est donc à préférer. Il est parfois proposé
un traitement de courte durée par benzodiazépines en cas d’anxiété aiguë ou un
traitement par bêta-bloquants (Ballenger et al., 2001). L’important est également de
développer des unités de psychiatrie de liaison dans les services d’oncologie afin de
pouvoir aider ces patients à mieux comprendre et faire face à leur détresse, tout en
aidant les soignants à comprendre les manifestations psychopathologiques que les
patients présentent et pouvoir les aider.
2. Sur la qualité de vie
La qualité de vie a été définie en 1993 par l’OMS (Organisation Mondiale de la
Santé) de la manière suivante : « la qualité de vie est définie comme la perception
qu’un individu a de sa place dans la vie, dans le contexte de la culture et du système
de valeurs dans lequel il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes
et ses inquiétudes ».
La qualité de vie fait actuellement partie des objectifs principaux dans la prise
en charge des patients de cancérologie, notamment depuis le plan cancer 2003-
2007 où cette notion apparaît comme centrale. Des échelles d’évaluation de la
40
qualité de vie ont donc été utilisées, dont certaines sont spécifiquement destinées
aux patients atteints de cancer, voire de cancer du sein (ex : QOL-BC : Quality Of
Life-Breast Cancer, Ferrel, 1996).
Les troubles anxieux et dépressifs entrainent plus de fatigue, de troubles du
sommeil, des difficultés de concentration ou de prise de décision (Bottomley et al.,
1998), toutes les études concluent à une altération de la qualité de vie consécutive
aux troubles anxieux ou dépressifs (Hartl et al., 2010 ; Ell et al., 2005 ; Kim et al.,
2008).
3. Conséquences générales
La présence d’un épisode dépressif majeur ou d’un trouble anxieux chez un
patient atteint de cancer peut avoir un impact dans plusieurs domaines. Outre
l’impact sur la qualité de vie, on constate chez ces patients une plus grande
sensibilité à la douleur (Spiegel et al., 2003), des difficultés d’observance voire un
refus du traitement, des difficultés à communiquer avec l’entourage et les soignants,
une charge majorée pour les proches et des hospitalisations plus longues (AFSOS,
2011). Il apparaît donc comme un enjeu majeur de reconnaître et traiter les troubles
psychiatriques chez les patients atteints de cancer.
Nous allons maintenant aborder l’impact des troubles de personnalité sur le
développement des troubles anxieux et dépressifs chez des patientes atteintes de
cancer du sein au travers de deux études.
41
II. ETUDES
PREMIERE ETUDE
A. LES TROUBLES DE PERSONNALITE SONT-ILS
ASSOCIES AU DEVELOPPEMENT ULTERIEUR DES
TROUBLES ANXIEUX ET DEPRESSIFS CHEZ DES PATIENTES
ATTEINTES DE CANCER DU SEIN ?
1. INTRODUCTION
Le cancer du sein représente environ 28,9% (Reich et al., 2008 ; Schwarz et
al., 2008) de l’ensemble des cancers, l’incidence est d’environ 50 000 nouveaux cas
par an en France (INCa 2009) et la mortalité dans notre pays est environ de 11 500
décès par an. Les progrès réalisés ces dernières années dans le dépistage et dans
la prise en charge du cancer du sein ont permis une réduction considérable de la
mortalité. Cependant, l’annonce d’un diagnostic de cancer représente toujours un
bouleversement dans la vie de la patiente et la perspective d’une réalité nouvelle à
laquelle il va falloir s’adapter. La période du diagnostic et de la première phase de
traitement sont des périodes de vulnérabilité où une adaptation psychologique est
nécessaire, pendant laquelle des troubles psychiatriques peuvent se manifester
(ANAES, 2000 ; Razavi & Delvaux, 2002). Plusieurs travaux ont montré une
prévalence élevée des troubles anxieux et dépressifs au cours de la prise en charge
du cancer du sein (Christensen et al., 2009 ; Payne et al., 1999 ; Hopwood et al.,
2010). Ces troubles psychiques vont retentir sur la qualité de vie (Stark et al., 2000 ;
Miovic et al., 2007), mais aussi sur les symptômes somatiques associés (douleurs,
fatigue…) (Ell et al., 2005 ; Kim et al., 2008), sur l’adhésion aux soins ; ceci ayant
pour conséquences des prises en charge plus difficiles (pour les équipes et pour les
patients) (Brintzenhofe-Szoc et al., 2009 ; Pedrizet-Chevallier et al., 2008). Les
conséquences sur la longévité, le risque de rechute sont discutées : Goodwin et al.
(2004) relatent une augmentation du risque de décès chez les sujets dépressifs,
Lemogne et al., (2010) exposent des conclusions plus mitigées sur l’impact de la
dépression sur le processus cancéreux. Ces conclusions ont amené les équipes de
42
soins à chercher à améliorer la prise en charge des troubles psychiques pour les
patients atteints de cancer.
Dans les études proposant une évaluation catégorielle de ces troubles
psychiatriques, les résultats obtenus sont variés : prévalence de l’épisode dépressif
majeur de 4,7% (Menhert et al., 2007) à 33% (Burgess et al., 2005), la prévalence
des troubles anxieux se situant environ à 30% (Bottomley et al., 1998), 24% de
symptômes anxieux et 11,7% de troubles anxieux avérés pour Brintzenhohe-Szoc et
al. (2009), jusqu’à 38% pour Menhert et al. (2007). Du fait de la prévalence
importante des troubles anxieux et dépressifs dans cette population, nous nous
sommes intéressés à leur prévalence lors du diagnostic puis à la fin de la première
phase de traitement.
Plusieurs facteurs induisant une détresse psychologique chez les femmes
atteintes de cancer du sein ont été identifiés : l’âge jeune (Ell et al., 2005 ; Burgess et
al., 2005), le niveau socio-économique (Macleod et al., 2004), le soutien social
(Menhert et al., 2007), les manifestations somatiques (Bardwell et al., 2006 ; Reich et
al., 2008). Les facteurs objectifs directement liés à la maladie cancéreuse n’ont pas
montré d’influence sur le développement de troubles anxieux ou dépressifs (Bardwell
et al., 2006 ; Scheier et al., 2006 ; Hartl et al., 2010). Selon ces auteurs, la
symptomatologie dépressive est associée plus fortement aux caractéristiques
individuelles des patientes qu’aux caractéristiques liées à la maladie ou à son
traitement. Le fonctionnement antérieur de la personne et donc sa personnalité sont
donc des facteurs pouvant avoir un impact non négligeable sur l’adaptation
psychologique au cancer (Razavi et al., 2002 ; Hyphantis et al., 2010 ; Christensen et
al., 2009). Plusieurs travaux ont cherché à étudier l’impact de certains traits de
personnalité sur le devenir psychiatrique après un cancer du sein. Ainsi l’impact
péjoratif de l’anxiété-trait (Ando et al., 2009 ; Bleiker et al., 1999), du caractère
pessimiste (Mazanec et al., 2010 ; Zenger et al., 2010) ou encore d’un
« névrosisme » élevé (Den Oudsten et al., 2009 ; Van der Steeg et al., 2010) a été
constaté sur le développement de troubles anxieux et de troubles dépressifs.
A notre connaissance, peu d’études ont évalué l’influence des troubles de la
personnalité sur le développement ultérieur de troubles anxieux et dépressifs chez
les femmes atteintes de cancer du sein. Nous avons donc décidé d’étudier leur
43
impact et d’observer quels troubles de personnalité étaient associés à la survenue
ultérieure d’un trouble anxieux ou dépressif.
L’objectif principal de cette première étude était de déterminer si certains
troubles de la personnalité étaient associés à l’existence ultérieure d’un épisode
dépressif majeur ou d’un trouble anxieux chez des patientes en fin de phase initiale
de traitement d’un cancer du sein non métastasé. L’objectif secondaire était de
déterminer l’évolution de la prévalence des troubles dépressifs et des troubles
anxieux chez ses patientes.
Notre hypothèse principale était qu’une association existait entre certains
troubles de la personnalité et la présence d’un épisode dépressif majeur ou d’un
trouble anxieux en fin de première phase de traitement chez des patientes atteintes
de cancer du sein non métastasé.
2. MATERIELS ET METHODES
a) Déroulement de l’étude
Il s’agit d’une étude prospective multicentrique longitudinale qui s’est déroulée
entre mai 2006 et novembre 2007 au sein des services de gynécologie des Centres
Hospitalo-Universitaires de Tours et Poitiers. Cette étude a été financée par l’Institut
National du Cancer (INCa) à hauteur de 87 990 Euros et par les comités
départementaux de la ligue contre le cancer d’Indre-et-Loire et de la Vienne à
hauteur de 14 000 Euros.
Le protocole de recherche a été présenté aux patientes dans un premier
temps lors d’un entretien médical (avec un médecin coordonnateur de l’étude) ayant
lieu après l’annonce diagnostic. Le recueil des données a ensuite été effectué par
des psychologues expérimentées, attachées spécifiquement à ce projet de
recherche. Trois évaluations ont eu lieu pour chaque patiente :
Une première évaluation après le diagnostic et avant le début du
traitement (T1). Ce premier entretien a été effectué par la psychologue
de chaque centre, au cours d’entretiens cliniques réalisés dans le
service de gynécologie, après avoir présenté le protocole à la patiente,
et recueilli son consentement. Cette première phase comprenait le
44
recueil de données socio-démographiques, médicales, la passation du
MINI (Mini International Neuropsychiatric Interview), de l’HAD (Hospital
Anxiety and Depression scale), mais aussi de l’échelle de Rosenberg
(évaluation de l’estime de soi), le Brief-COPE (évaluation des stratégies
de coping), évaluation de la douleur physique (QDSA : questionnaire
Douleur de Saint-Antoine) et morale et évaluation du soutien social des
patientes (SSQ6 : échelle abrégée de Soutien Social de Saranson). .
Une seconde évaluation a eu lieu après l’intervention chirurgicale 3
mois après l’inclusion (T2). Elle se déroulait lors d’un entretien clinique
avec la psychologue, soit à l’occasion d’une séance de radiothérapie ou
de chimiothérapie, soit après avoir fixé un rendez-vous avec la patiente.
Cette visite comprenait la passation de la VKP (Vragenlijst voor
Kemmerken van de Persoonlijkheid), soit au moyen d’un ordinateur,
soit en version papier.
Le troisième temps d’évaluation à 7 mois de l’inclusion, était réalisé à la
fin de la première phase de traitement (T3). Les patientes étaient
contactées par la psychologue pour fixer un rendez-vous ; elles ont
ensuite été à nouveau reçues lors d’un entretien clinique. Ce dernier
temps d’évaluation comprenait la passation du MINI, de l’HAD, de
l’échelle de Rosenberg, du Brief-COPE, l’enregistrement du parcours
de soins (données relatives aux modalités de prise en charge du
cancer et aux autres traitements ou suivis dont a bénéficié la patiente)
et l’évaluation de la qualité de vie avec le questionnaire QLQC-30-
BR23.
b) Population étudiée
La population étudiée était constituée de patientes chez lesquelles avait été
diagnostiqué un cancer du sein non métastasé et devant bénéficier d’une
tumorectomie. Les patientes ont été incluses au sein des services de gynécologie
des Centres Hospitalo-Universitaires de Tours et Poitiers entre mai 2006 et
novembre 2007.
45
Pour remplir les critères d’inclusion, les patientes devaient être de nouvelles
patientes atteintes de cancer du sein, maîtriser le français et signer un consentement
éclairé.
Les critères de non-inclusion étaient les suivants : patientes présentant des
métastases ou présentant une récidive d’un cancer du sein déjà traité, patientes
présentant un second cancer du sein, patientes présentant ou ayant présenté un
cancer d’un autre organe, gêne à la compréhension de l’étude ou des instruments
d’évaluation et refus de la patiente.
Initialement, 141 patientes ont été recrutées au sein du protocole ESPOIR
selon les critères d’inclusion et de non inclusion. Ensuite, 16 patientes sont sorties de
l’étude (3 suite à une évolution métastatique de leur maladie, 6 par retrait de
consentement et 7 perdues de vue) : 125 patientes restaient alors éligibles. Parmi
ces 125 patientes, seules les patientes ayant rempli complètement les
questionnaires : MINI et VKP, ont été incluses dans l’analyse statistique. Les
données de 5 patientes étaient incomplètes et n’ont pas été prises en compte. Les
analyses statistiques ont donc été réalisées au sein d’une population de 120
patientes.
Figure 2. Population de l’étude
46
c) Variables mesurées
Le déroulement de l’étude et les variables mesurées sont résumées dans le
tableau 1.
Tableau 1. Tableau récapitulatif du déroulement de l’étude (en gras : variables utilisées dans cette étude)
ECHELLES Avant traitement
T1
A 3 mois
T2
A 7 mois
T3
MINI
HAD
QDSA
Souffrance morale :
EVA
QLQC-30-BR23
SSQ6
Scores EPICES
Index de zone IRIS
Parcours de soin
Echelle de Rosenberg
Brief-COPE
VKP
(MINI : Mini International Neuropsychiatric Interview, HAD : Hospital Anxiety and
Depression scale, QDSA : Questionnaire Douleur Saint-Antoine abrégé, EVA : échelle Visuelle
Analogique ici pour étudier la souffrance psychologique, QLQ - C 30 – BR 23 : Quality of Life
Questionnary, SSQ6 : échelle abrégée de Soutien Social de Saranson, score EPICES :
Evaluation de la Précarité et des Inégalités de Santé dans les Centres d’Examens de Santé,
VKP : Vragenlijst voor Kenmerken van de Persoonlijkheid)
A T1, ont été mesurés : les caractéristiques socio-démographiques avec,
outre les renseignements administratifs, le score EPICES et l’index de zone IRIS
(permettant une évaluation standardisée des conditions sociales et d’accès aux
soins), la douleur physique avec le questionnaire QDSA, la souffrance morale avec
l’échelle visuelle analogique, le soutien social avec le questionnaire SSQ6, l’estime
de soi avec l’échelle de Rosenberg et les stratégies de coping avec l’échelle Brief-
COPE.
47
A T2, les troubles de personnalité ont été mesurés de manière catégorielle
avec l’échelle VKP et le parcours de soins a été enregistré.
A T3, les troubles anxieux et de l’humeur sont à nouveau évalués de man ière
catégorielle avec le MINI et dimensionnelle avec l’HAD, l’estime de soi, les stratégies
de coping, la douleur physique ainsi que la souffrance morale ont été à nouveau
mesurés.
Dans cette étude, nous avons utilisé uniquement les variables suivantes :
caractéristiques socio-démographiques, parcours de soins, évaluation catégorielle
des troubles anxieux et des troubles de l’humeur avec le MINI et évaluation des
troubles de la personnalité avec le questionnaire VKP.
(1) Caractéristiques socio-démographiques (T1)
Les caractéristiques socio-démographiques étaient mesurées de manière
standardisées par enregistrement d’informations telles que : l’âge, le statut marital, le
nombre d’enfants, le niveau d’études, la situation professionnelle. Ce recueil de
données était effectué dans chaque centre par la psychologue attachée à la
recherche.
(2) Parcours de soins, types de traitement, gravité de
la maladie
Pour chaque patiente, la gravité de la maladie étaient évaluée par la
classification internationale TNM : le T correspond à la taille de la tumeur (T0 :
tumeur non palpable, T1 : tumeur < 2cm, T2 : < 5cm, T3 : > 5cm et T4 : extension à
paroi et/ou peau), le N correspond aux adénopathies (N0 : pas de ganglions
palpables, N1 : adénopathies axillaires homolatérales mobiles, N2 : adénopathies
axillaires homolatérales fixées et N3 : adénopathies mammaires internes) et le M
correspond aux métastases (M0 : pas de métastases, M1 : présence de
métastases).
La psychologue a également enregistré, à chaque visite, le parcours de
soins de la patiente : c'est-à-dire les données relatives au(x) type(s) de prise(s) en
charge du cancer (chirurgie par tumorectomie ou mastectomie, chimiothérapie,
radiothérapie,…), au(x) autre(s) type(s) de traitement(s) reçu(s) (traitement
48
antalgique, antidépresseur et/ou anxiolytique, suivi psychologique ou psychiatrique
éventuel), ainsi qu’au suivi social et aux antécédents médicaux, chirurgicaux,
psychiatriques.
(3) Evaluation catégorielle des troubles anxieux et des
troubles dépressifs (T1 et T3) :
Les troubles anxieux ont été évalués de manière catégorielle avec le MINI
(Mini International Interview French Version). On distingue alors, selon les critères du
DSM-IV, le trouble panique actuel, le trouble panique avec et sans agoraphobie, la
phobie sociale, le trouble obsessionnel compulsif, l’état de stress post-traumatique et
l’anxiété généralisée. Cette évaluation s’est déroulée à T1 et T3, soit en début et en
fin de la première phase de traitement.
L’état dépressif majeur a également été évalué de manière catégorielle avec
le MINI ; les diagnostics étant posés selon les critères du DSM-IV.
(a) MINI (Mini International Neuropsychiatric Interview
French Version 5.0.0.)
Il s’agit d’un entretien structuré administré par un clinicien expérimenté
(psychologue expérimentée dans notre étude) qui permet d’élaborer les diagnostics
catégoriels des principaux troubles psychiatriques selon l’axe I du DSM-IV.
Il a été conçu en 1992 par Lecrubier et al., (1992) pour la version française et
en 1998 par Sheehan et al. (1998) dans sa version anglaise. Il est destiné à la
population générale.
Ce questionnaire comprend seize modules, chaque module correspondant à
une catégorie diagnostique. Il comporte 120 questions, dont des questions filtres qui
permettent le dépistage des symptômes, des questions supplémentaires sont posées
si la réponse est positive à ces premières questions. Le diagnostic est alors confirmé
ou invalidé.
Deux études de validation ont été menées aux Etats-Unis et en France sur un
total de 636 patients en comparaison avec le SCID-P (Structured Clinical Interview
for DSM-IV-Patient version) (pour la population américaine) et avec le CIDI
(Composite International Diagnostic Interview for ICD-10) (sujets français). Selon le
49
trouble étudié, la sensibilité varie entre 45 et 96%, la spécificité varie entre 86 et
100% et le coefficient de concordance (kappa) entre 0,43 et 0,90.
Pour les troubles anxieux, on retrouve une sensibilité variant entre 62 et 88%,
une spécificité entre 86 et 93% et un coefficient kappa entre 0,50 et 0,80 (avec pour
l’anxiété généralisée une sensibilité à 91%, une spécificité à 86% et un kappa à 0,70)
(Sheehan et al., 1998).
Pour l’épisode dépressif majeur, la sensibilité est de 96%, la spécificité de
88% et le kappa de 0,84.
(4) Troubles de la personnalité (T2) : évaluation
catégorielle
Les troubles de personnalité sont évalués de manière catégorielle à l’aide du
questionnaire VKP (Vragenlijst voor Kemmerken van de Persoonlijkheid)
(a) Instrument d’évaluation des troubles de personnalité :
VKP (Vragenlijst voor Kemmerken van de Persoonlijkheid)
en version française :
Il s’agit d’un auto-questionnaire basé sur l’International Personality Disorder
Examination selon les critères du DSM-IV et de l’ICD-10, utilisé pour étudier les
troubles de la personnalité. Le VKP-4 a été élaboré par Duijsens et al. (1999), qui
avaient précédemment développé le VKP-3, fondé sur les critères des troubles de
personnalité établis selon le DSM-III et l’ICD-10. Cette nouvelle version (VKP-4),
constituée de 197 items, permet 4 possibilités de réponse (vrai, faux, impossible à
déterminer, non applicable). Les sujets doivent répondre sur ce qui les caractérise le
mieux sur les cinq dernières années. Sept domaines sont explorés : le travail, l’image
de soi, les relations inter-personnelles, les affects, le sens de réalité, le contrôle de
l’impulsivité et le comportement dominant jusqu’à l’âge de 15 ans.
Les réponses aux items déterminent la présence ou l’absence des différents
critères requis pour le diagnostic de chacun des troubles de la personnalité. De plus,
cet outil permet le calcul d’un score pour chaque catégorie (en fonction du nombre
de réponses « vraies » correspondant au trouble), reflétant ainsi l’intensité du trait.
Cet instrument permet donc une évaluation à la fois catégorielle et dimensionnelle.
50
Selon Swinkels et al. (2006), la validité et la fiabilité de cette échelle sont
satisfaisantes.
Dans notre étude, nous ne prenons en compte que l’évaluation catégorielle en
rapport avec les critères établis selon le DSM-IV. La version française utilisée a été
récemment validée (Thèse Enfoux Aurore, 2011).
d) Analyse statistique
Les analyses descriptives sont effectuées avec des variables qualitatives,
exprimées sous forme de pourcentage et des variables quantitatives exprimées sous
forme de moyenne et écart-type.
Nous avons comparé la prévalence des principaux troubles psychiatriques
entre T1 et T3 (trouble anxieux généralisé, trouble panique avec ou sans
agoraphobie, phobie sociale, état de stress post-traumatique, trouble obsessionnel
compulsif et épisode dépressif majeur) à l’aide d’un test de Chi-deux de Mac Nemar.
Nous avons réalisé des analyses de régression logistique univariées afin de
rechercher d’éventuelles association(s) statistique(s) entre l’existence de trouble
anxieux (au moins un trouble anxieux, existence d’un trouble anxieux généralisé,
d’un trouble panique avec ou sans agoraphobie, d’une phobie sociale, d’un trouble
obsessionnel compulsif et d’un état de stress post-traumatique) ou de trouble
dépressif à T3 (épisode dépressif majeur) et la présence de troubles de la
personnalité (TDP) (absence de TDP, présence d’un TDP, au moins deux TDP, zéro
TDP, et présence d’au moins un TDP selon le cluster A, B ou C).
Les résultats sont donnés avec la valeur du chi ², par le calcul d’odds-ratio
avec un intervalle de confiance à 95% et par la valeur du p correspondant. L’odds-
ratio n’est précisé que lorsque le p est significatif.
Pour toutes les analyses statistiques, nous avons retenu le seuil de
significativité α=0,05 (bilatéral).
Le logiciel utilisé était le logiciel Statview version 5.0.
51
e) Ethique
Cette étude a obtenu l’avis favorable du comité d’éthique du CHU de Tours et
du Comité Consultatif de Protection des Personnes se prêtant à la Recherche
Biomédicale de Tours le 28 / 03 / 2006.
Pour chaque patiente incluse dans l’étude, la signature d’un consentement
éclairé a été recueillie.
3. RESULTATS
a) Statistiques descriptives
(1) Caractéristiques de l’échantillon
Les caractéristiques socio-démographiques, les éléments de gravité de la
maladie cancéreuse, les différents traitements et suivis reçus par les patientes, les
résultats au MINI et à l’échelle VKP sont présentés dans le tableau 1.
En ce qui concerne le traitement chirurgical, il a consisté en une tumorectomie
pour 75% des patientes et une mastectomie pour 36,7% d’entre elles (le total étant
supérieur à 100% car certaines patientes ont eu successivement les deux types de
prise en charge chirurgicale).
L’ensemble des résultats est présenté dans les tableaux suivants.
Tableau 2. Caractéristiques socio-démographiques, gravité de la maladie cancéreuse et type de prise en charge de l’échantillon
Moyenne (±DS)
Nombre de patientes (%)
Caractéristiques socio-démographiques :
Age lors de l’étude 56,4 (± 10,8)
Situation familiale
Vivant seule 37 (30,8%)
Niveau d’études
Ecole primaire 47 (39,2%)
Ecole secondaire 26 (21,7%)
52
Moyenne (±DS)
Nombre de patientes (%)
Etudes supérieures 47 (39,2%)
Caractéristiques cliniques
Liées au cancer
Stade TNM
T (tumeur) :
T = 0 16 (13,3%)
T = 1 56 (46,7%)
T = 2 37 (30,8%)
T = 3 5 (4,2%)
T = 4 3 (2,5%)
Absence de données 3 (2,5%)
N (adénopathies)
N = 0 100 (83,3%)
N = 1 17 (14,2%)
Absence de données 3 (2,5%)
M (métastase)
M = 0 120 (100%)
Récepteurs Hormonaux (présence) 98 (81,7%)
Liées au traitement
Mastectomie 44 (36,7%)
Tumorectomie 90 (75%)
Curage ganglionnaire 68 (56,7%)
Chimiothérapie avant chirurgie 8 (6,7%)
Chimiothérapie après chirurgie 66 (55%)
Irradiation externe 108 (90%)
Curiethérapie 0 (0%)
Hormonothérapie 54 (45%)
La prise de traitement psychotrope, ainsi que les suivis psychologiques dont
les patientes ont éventuellement suivis sont également enregistrés lors des
différentes visites. Leurs prévalences sont notées dans le tableau 3.
53
Tableau 3. Type de traitement psychotrope et suivi psychologiques des patients
Moyenne (±DS)
Nombre de patientes (%)
Traitement psychotrope (présence) à T1 35 (29,2%)
Anxiolytique 24 (20%)
Antidépresseur 16 (13,3%)
Neuroleptique 1 (0,83%)
Traitement psychotrope à T2 38 (31,7%)
Anxiolytique 27 (22,5%)
Antidépresseur 18 (15%)
Neuroleptique 1 (0,83%)
Traitement psychotrope à T3 35 (29,2%)
Anxiolytique 22 (18,3%)
Antidépresseur 18 (15%)
Neuroleptique 1 (0,83%)
Suivi psychologique avant T1
Avec un psychiatre 27 (22,5%)
Avec un psychologue 7 (5,8%)
Suivi psychologique entre T1 et T2
Avec un psychiatre 7 (5,8%)
Avec un psychologue 11 (9,2%)
Avec un infirmier psychiatrique 25 (20,8%)
Suivi psychologique entre T2 et T3
Avec un psychiatre 6 (0,2%)
Avec un psychologue 10 (8,3%)
Avec un infirmier psychiatrique 20 (16,7%)
(2) Prévalence des troubles anxieux et de l’épisode
dépressif majeur dans la population
La prévalence des troubles anxieux (au moins un trouble anxieux, le trouble
anxieux généralisé, le trouble panique avec ou sans agoraphobie, la phobie sociale,
le trouble obsessionnel compulsif et l’état de stress post-traumatique) et de l’épisode
dépressif majeur actuel à T1 (soit moment du diagnostic) et à T3 (soit à environ 7
mois de la première visite) est présentée dans le tableau 4.
54
Tableau 4. Prévalence des troubles psychiatriques (troubles anxieux et épisode dépressif majeur) : résultats MINI (Mini International Neuropsychiatric Interview)
Moyenne (±DS)
Nombre de patientes (%)
Evolution des troubles anxio-dépressifs
(évaluation catégorielle – MINI)
Au moins un trouble anxieux
A T1 42 (35%)
A T3 42 (35%)
Trouble anxieux généralisé actuel
A T1 17 (14,2%)
A T3 23 (19,2%)
Trouble panique actuel avec agoraphobie
A T1 4 (3,3%)
A T3 6 (5%)
Trouble panique actuel sans agoraphobie
A T1 2 (1,7%)
A T3 3 (2,5%)
Phobie sociale
A T1 7 (5,8%)
A T3 5 (4,2%)
Trouble obsessionnel compulsif
A T1 2 (1,7%)
A T3 1 (0,8%)
Etat de stress post-traumatique
A T1 5 (4,2%)
A T3 3 (2,5%)
Episode dépressif majeur
A T1 19 (15,8%)
A T3 13 (10,8%)
(a) Significativité de l’évolution des troubles
psychiatriques entre T1 et T3
Nous nous sommes intéressés à l’évolution des troubles anxieux et dépressifs
selon les diagnostics MINI à T1 et à T3. Nous avons évalué la significativité de cette
évolution au moyen d’un test chi 2 Mac Nemar. Les résultats sont présentés dans le
tableau 5.
55
Tableau 5. Test de comparaison de pourcentage en population dépendante Chi 2 Mac Nemar entre T1 et T3 pour Episode Dépressif Majeur (EDM), Trouble Anxieux Généralisé (TAG), Trouble Panique (TP) avec et sans agoraphobie, phobie sociale, Trouble Obsessionnel Compulsif (TOC) et Etat de Stress Post-Traumatique (ESPT).
Pourcentages comparés Chi 2 Mac Nemar Degré de Liberté (ddl) Valeur de p
EDM T1 / EDM T3 3,00 1 0,083
TAG T1 / TAG T3 1,385 1 0,239
TP sans agoraphobie T1 / T3 0,333 1 0,564
TP avec agoraphobie T1 / T3 1,00 1 0,317
Phobie sociale T1 / T3 0,667 1 0,414
TOC T1 / T3 0,333 1 0,564
ESPT T1 / T3 2,00 1 0,157
Malgré l’absence de significativité de l’évolutivité de ces troubles, on constate
une forte prévalence de certains troubles comme le trouble anxieux généralisé avec
une évolution de 14,2% à 19,2% entre T1 et T3.
(3) Prévalence des troubles de la personnalité
La prévalence des différents troubles de personnalité dans la population
étudiée obtenue grâce à l’échelle VKP est notée dans le tableau 5.
Tableau 6. Prévalence des troubles de la personnalité (échelle VKP) dans la population étudiée
Moyenne (±DS)
Nombre de patientes (%)
Troubles de la personnalité (évaluation
catégorielle – VKP)
Cluster A
Paranoïaque 18 (15%)
Schizoïde 8 (6,7%)
Schizotypique 5 (4,2%)
56
Moyenne (±DS)
Nombre de patientes (%)
Cluster B
Antisociale 1 (0,8%)
Borderline 8 (6,7%)
Histrionique 1 (0,8%)
Narcissique 0
Cluster C
Evitante 22 (18,3%)
Dépendante 5 (4,2%)
Obsessionnelle-compulsive 12 (10%)
Personnalité hors DSM-IV
Dépressive 9 (7,5%)
Passive-agressive 5 (4,2%)
Au moins un TDP DSM-IV 41 (34,2%)
2 ou plus TDP DSM-IV 14 (11,7%)
b) Personnalité comme facteur associé ?
Nous avons cherché à explorer le lien possible entre trouble de personnalité et
la survenue ultérieure de troubles anxieux ou de troubles dépressifs. Nous avons
également voulu explorer l’influence du type de trouble de la personnalité sur la
présence ultérieure d’un trouble anxieux ou dépressif.
(1) Lien entre trouble(s) de la personnalité et troubles
anxieux en fin de première phase de traitement
Les troubles de personnalité ont été mesurés à T2 (grâce au questionnaire
VKP). Pour l’évaluation des troubles anxieux, nous nous basons sur l’évaluation
catégorielle par le MINI à T3. Lors de l’analyse statistique, on ne prend en
considération que les troubles de personnalité des clusters A (personnalités
paranoïaque, schizoïde et schizotypique), clusters B (personnalités antisociale,
borderline, histrionique et narcissique) et clusters C (personnalités dépendante,
évitante et obsessionnelle-compulsive).
57
(a) Troubles anxieux et trouble de personnalité
Notre étude a montré que les patients avec un trouble de personnalité étaient
plus à risque que les autres de développer un trouble psychiatrique. Les résultats
indiqués dans le tableau 7 indiquent la prévalence de troubles anxieux et dépressifs
en fonction de la présence ou non d’un trouble de personnalité. On peut ainsi se
représenter la part de patientes avec au moins un trouble de personnalité qui va
développer un trouble dépressif ou anxieux au cours de la première phase de
traitement de son cancer.
Tableau 7. Nombre de patientes ayant un trouble anxieux ou dépressifs en fonction de la présence ou non de trouble de la personnalité
Prévalence parmi les
patients sans TDP (n=79)
Prévalence parmi les patients
ayant au moins un TDP (n=41)
Existence d’au moins un
trouble anxieux à T1 26,6% (n=21) 51,2% (n=21)
Existence d’au moins un
trouble anxieux à T3 26,6% (n=21) 53.7% (n=21)
Existence d’un trouble
anxieux généralisé à T1 12.7% (n=10) 17.1% (n=7)
Existence d’un trouble
anxieux généralisé à T3 7.6% (n=6) 41.5% (n=17)
Existence d’un épisode
dépressif majeur à T1 8.9% (n=7) 29.3% (n=12)
Existence d’un épisode
dépressif majeur à T3 3.8% (n=3) 24.4% (n=10)
Les patientes ayant au moins un trouble de la personnalité représentent :
- 50% des patientes ayant au moins un trouble anxieux à T1,
- 50% des patientes ayant au moins un trouble anxieux à T3,
- 41,2% des patientes ayant un trouble anxieux généralisé à T1,
58
- 73,9% des patientes ayant un trouble anxieux généralisé à T3,
- 63,2% des patientes ayant un épisode dépressif majeur à T1,
- 76,9% des patientes ayant un épisode dépressif majeur à T3.
On constate que les patientes présentant un trouble dépressif ou anxieux sont
majoritairement des patientes ayant au moins un trouble de personnalité.
Les tableaux suivants présentent l’association entre les différents troubles
anxieux à T3 et les troubles de la personnalité.
Tableau 8. Analyse en régression logistique visant à montrer l’association entre la présence d’au moins un trouble anxieux à T3 (variable dépendante) et l’existence d’un ou de plusieurs troubles de personnalité (tdp) à T2 (variable indépendante)
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Au moins un trouble anxieux
Zéro tdp 8,29 0,004 0,31 [0,14 – 0,69]
Au moins un tdp 8,29 0,004 3,2 [1,45 – 7,06]
≥2 tdp 9,74 0,002 8,48 [2,22 – 32,46]
1 tdp cluster A 5,96 0,015 3,27 [1,26 – 8,49]
1 tdp cluster B 6,92 0,009 8,57 [1,73 – 42,49]
1 tdp cluster C 9,19 0,002 3,92 [1,62 – 9,5]
Tdp : trouble de personnalité. Cluster A : personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; Cluster B :
personnalités histrionnique, narcissique, borderline et antisociale ; Cluster C : personnalités évitante, dépendante
et obsessionnelle-compulsive.
Tableau 9. Analyse en régression logistique visant à montrer une association entre la présence d’un trouble anxieux généralisé à T3 (variable dépendante) et l’existence d’un ou de plusieurs troubles de personnalité (tdp) à T2 (variable indépendante)
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Trouble anxieux généralisé
Zéro tdp 16,52 <0,0001 0,12 [0,04 – 0,33]
Au moins un tdp 16,52 <0,0001 8,62 [3,05 – 24,35]
59
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
≥2 tdp 19 <0,0001 17,89 [4,89 – 65,41]
1 tdp cluster A 17,72 <0,0001 9,49 [3,33 – 27,06]
1 tdp cluster B 9,11 0,003 8,21 [2,09 – 32,19]
1 tdp cluster C 18,55 <0,0001 9,22 [3,36 – 25,35]
Tdp : trouble de personnalité. Cluster A : personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; Cluster B :
personnalités histrionnique, narcissique, borderline et antisociale ; Cluster C : personnalités évitante, dépendante
et obsessionnelle-compulsive.
Tableau 10. Analyse en régression logistique visant à montrer l’association entre la présence d’un trouble panique à T3 (variable dépendante) et l’existence d’un ou de plusieurs troubles de personnalité (tdp) à T2 (variable indépendante)
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Trouble panique
Zéro tdp 6,25 0,012 0,13 [0,03 – 0,64]
Au moins 1 tdp 6,25 0,012 7,93 [1,57 – 40,16]
≥2 tdp 12,31 0,0005 14,17 [3,22 – 62,3]
1 tdp cluster A 7,2 0,0073 6,91 [1,68 – 28,39]
1 tdp cluster B 6,16 0,013 7,43 [1,52 – 36,19]
1 tdp cluster C 10,45 0,0012 15 [2,9 – 77,47]
Tdp : trouble de personnalité. Cluster A : personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; Cluster B :
personnalités histrionnique, narcissique, borderline et antisociale ; Cluster C : personnalités évitante, dépendante
et obsessionnelle-compulsive.
60
Tableau 11. Analyse en régression logistique visant à montrer l’association entre la présence d’un trouble obsessionnel compulsif à T3 (variable dépendante) et l’existence d’un ou de plusieurs troubles de personnalité (tdp) à T2 (variable indépendante)
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Trouble Obsessionnel Compulsif
Zéro tdp 0,001 0,97
Au moins un tdp 0,001 0,97
≥ 2 tdp 0,002 0,97
1 tdp cluster A 0,002 0,97
1 tdp cluster B 0,001 0,98
1 tdp cluster C 0,001 0,97
Tdp : trouble de personnalité. Cluster A : personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; Cluster B :
personnalités histrionnique, narcissique, borderline et antisociale ; Cluster C : personnalités évitante, dépendante
et obsessionnelle-compulsive.
Tableau 12. Analyse en régression logistique visant à montrer l’association entre la présence d’un état de stress post-traumatique à T3 (variable dépendante) et l’existence d’un ou de plusieurs troubles de personnalité (tdp) à T2 (variable indépendante)
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Etat de stress post-traumatique
Zéro tdp 0,001 0,97
Au moins 1 tdp 0,001 0,97
≥2 tdp 0,002 0,96
1 tdp cluster A 0,002 0,97
1 tdp cluster B 6,68 0,0097 27,25 [2,24 – 333,89]
1 tdp cluster C 0,002 0,97
Tdp : trouble de personnalité. Cluster A : personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; Cluster B :
personnalités histrionnique, narcissique, borderline et antisociale ; Cluster C : personnalités évitante, dépendante
et obsessionnelle-compulsive.
61
Tableau 13 Analyse en régression logistique visant à montrer l’association entre la présence d’une phobie sociale à T3 (variable dépendante) et l’existence d’un ou de plusieurs troubles de personnalité (tdp) à T2 (variable indépendante)
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Phobie sociale
Zéro tdp 3,52 0,06
Au moins 1 tdp 3,52 0,06
≥ 2 tdp 3,29 0,07
1 tdp cluster A 1,49 0,22
1 tdp cluster B 4,95 0,026 8,92 [1,3 – 61,32]
1 tdp cluster C 5,68 0,017 15,17 [1,62 – 142,07]
Tdp : trouble de personnalité. Cluster A : personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; Cluster B :
personnalités histrionnique, narcissique, borderline et antisociale ; Cluster C : personnalités évitante, dépendante
et obsessionnelle-compulsive.
(2) Association entre trouble de personnalité et
épisode dépressif majeur en fin de première phase de
traitement
(a) Trouble de personnalité et Episode dépressif majeur
De la même façon que pour les troubles anxieux, nous étudions le lien entre
les troubles de personnalité et la présence d’un épisode dépressif majeur à T3.
Tableau 14. Analyse en régression logistique visant à montrer l’association entre la présence d’un épisode dépressif majeur à T3 (variable dépendante) à partir de l’existence d’un ou de plusieurs troubles de personnalité (tdp) à T2 (variable indépendante)
Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Zéro tdp 9,22 0,002 0, 12 [0,03 - 0,48]
A u moins 1 tdp 9,22 0,0024 8,17 [2,11 – 31,72]
≥ 2 tdp 12,54 0,0004 10,61 [2,87 – 39,2]
1 tdp cluster A 6,55 0,0105 4,88 [1,45 – 16,4]
62
1 tdp cluster B 12,12 0,0005 12,75 [3,04 – 53,46]
1 tdp cluster C 12,92 0,0003 10,42 [2,9 – 37,41]
Tdp : trouble de personnalité. Cluster A : personnalités paranoïaque, schizoïde et schizotypique ; Cluster B :
personnalités histrionnique, narcissique, borderline et antisociale ; Cluster C : personnalités évitante, dépendante
et obsessionnelle-compulsive.
63
4. DISCUSSION
a) Influence des troubles de la personnalité sur les troubles
anxieux
Il apparaît, au travers des résultats obtenus dans cette étude, qu’il existe un
lien significatif entre la présence d’au moins un trouble de personnalité et la présence
d’au moins un trouble anxieux chez les femmes atteintes de cancer du sein à la fin
de la première phase de traitement (OR = 3,2 [1,45 – 7,06] ; p=0,004). On constate
également que quelque soit le cluster de personnalité, le risque de survenue d’un
trouble anxieux à T3 est majoré. Les troubles de personnalité seraient donc des
facteurs associés significativement à la survenue d’un trouble anxieux à distance du
diagnostic (7 mois environ après le diagnostic). On peut déduire de ces résultats un
possible impact péjoratif des troubles de personnalité sur le développement des
troubles anxieux. L’absence de trouble de personnalité est quant à elle associée à
une diminution du risque de développement d’un trouble anxieux (au moins un
trouble anxieux et absence de trouble de personnalité : OR = 0,31 [0,14 – 0,69] ; p =
0,004) et pourrait donc être considérée comme un facteur protecteur.
Ces résultats concordent avec des études déjà menées en population
générale : Sanderson et al. (1993) ont montré que 35% des sujets avec au moins
un trouble anxieux présentent un trouble de personnalité, contre une prévalence des
troubles de la personnalité en population générale variant entre 6 et 13%
Lenzenweger et al. (1997). De même, une étude prospective longitudinale, réalisée
par Johnson et al. (2005), menée sur 658 adolescents et jeunes adultes entre 14 et
22 ans, puis cette même population à 33 ans met en évidence une influence
significative de certains troubles de personnalité, présents chez les sujets jeunes
adultes, sur la survenue de troubles anxieux chez les sujets à l’âge de 33 ans, ceci
étant d’autant plus significatif si le sujet ne présentait pas de trouble anxieux à l’âge
de 22 ans. Ainsi : 6% des sujets non anxieux et sans trouble de personnalité à 22
ans ont développé un trouble anxieux à 33 ans, alors que 17% des sujets qui à 22
ans ne présentaient pas de trouble anxieux mais présentaient un trouble de
personnalité, ont développé un trouble anxieux à 33 ans.
64
Plusieurs hypothèses peuvent être formulées pour rendre compte de ce lien.
En effet, le trouble de personnalité peut être préexistant au trouble anxieux : il est,
par définition, une anomalie de la manière d’être au monde du sujet en influant ses
pensées, ses sentiments et ses modes de relation aux autres. Le trouble de
personnalité va alors agir comme un facteur de vulnérabilité au développement de
troubles anxieux ou dépressifs, notamment lorsque le patient est confronté à une
situation de stress. Ce trouble de personnalité peut également avoir été
paucisymptomatique jusqu’alors et être exacerbé en situation de stress, ses
manifestations surviendraient alors concomitamment au trouble anxieux.
Ces résultats induisent plusieurs implications pratiques éventuelles : face à un
trouble anxieux, il conviendrait de rechercher un trouble de personnalité. De même,
un dépistage précoce des troubles de personnalité pourrait s’avérer utile pour
prévenir ou dépister précocement également les troubles anxieux. Ces dépistages
précoces, ainsi que la sensibilisation des équipes soignantes pourraient être
effectués par des équipes de psychiatrie de liaison ou de psycho-oncologie.
A notre connaissance, cette étude est la première qui mette en évidence le
lien entre troubles de la personnalité (évalués de façon catégorielle) et présence de
trouble anxieux.
b) Troubles anxieux associés principalement aux troubles de
personnalité
On constate que parmi les troubles anxieux, ceux retrouvés comme associés
aux troubles de personnalité sont : le trouble anxieux généralisé, le trouble panique
et la phobie sociale. Ces troubles sont également les plus fréquemment représentés
dans notre échantillon et en population générale. On comprend donc la significativité
de l’association entre les troubles de personnalité et au moins un trouble anxieux.
En effet, on constate que l’absence de trouble de personnalité est protectrice
et diminuerait la probabilité de développer un trouble anxieux généralisé (OR = 0,12
[0,04 – 0,33] ; p<0,0001). On constate également qu’un trouble de personnalité du
cluster A (OR = 9,49 [3,33 – 27,06] ; p<0,0001) est significativement associé à la
survenue d’un trouble anxieux généralisé, tout comme l’existence d’au moins un
trouble de personnalité du cluster B (OR = 8,21 [2,09 – 32,19] ; p = 0,003) ou du
65
cluster C (OR = 9,22 [3,36 – 25,35] ; p<0,0001). La présence de 2 troubles de la
personnalité ou plus est également associé avec la présence d’un trouble anxieux
généralisé à T3 (OR = 17,89 [4,89 – 65,41] ; p<0,0001).
Au vue de ces résultats, on peut en déduire que la présence d’un trouble de la
personnalité est un facteur de risque de développement d’un trouble anxieux
généralisé ultérieur.
De même pour le trouble panique : l’absence de trouble de personnalité
apparait comme un facteur protecteur (OR = 0,13 [0,003 – 0,64] ; p = 0,012), un
trouble de la personnalité cluster A est associé significativement au trouble panique
(OR= 6,91 [1,68 – 28,39] ; p = 0,0073), de même pour au moins un trouble de
personnalité cluster B (OR = 7,43 [1,52 – 36,13] ; p = 0,013) et pour au moins un
trouble de personnalité cluster C (OR= 15 [2,9 – 77,47] ; p = 0,0012). La présence de
deux troubles de personnalité ou plus entraîne une augmentation de la probabilité de
développer un trouble panique à T3 (OR = 14,17 [3,22 – 62,3] ; p = 0,0005).
En ce qui concerne la phobie sociale : on retrouve un lien significatif
uniquement avec au moins un trouble de personnalité cluster B (OR = 8,92 [1,3 –
61,31] ; p = 0,026) et cluster C (OR= 15,17 [1,62 – 142,07] ; p = 0,017).
On ne retrouve pas de lien significatif entre les troubles de la personnalité et la
présence de trouble obsessionnel compulsif ou état de stress post-traumatique à la
fin de la première phase de traitement chez des patientes atteintes de cancer du
sein.
L’étude menée en population générale par Johnson et al. (2005) évaluant
l’influence des troubles de personnalité au début de l’âge adulte sur la survenue de
troubles anxieux vers 33 ans, montre une prévalence plus élevée pour tous les
troubles anxieux chez les sujets ayant au moins un trouble de personnalité. Il
apparaît une influence spécifique de certains troubles de personnalité sur certains
troubles anxieux. Ainsi, le trouble anxieux généralisé est principalement en lien avec
les personnalités des clusters A et C, le trouble panique avec agoraphobie étant
associé avec les troubles de personnalité du cluster C, la personnalité borderline et
la personnalité schizotypique (Johnson et al., 2005). Une étude menée par Gamez et
al. (2007), montre que parmi les troubles anxieux, le trouble anxieux généralisé et
66
l’état de stress post-traumatique sont ceux qui sont le plus fréquemment associés et
influencés par les facteurs de personnalité.
Différentes hypothèses étiologiques peuvent être formulées pour expliquer
cette influence des troubles de personnalité sur la survenue de troubles anxieux,
notamment en situation de stress chronique (maladie cancéreuse). Il peut ainsi être
considéré l’existence d’un spectre commun entre certains troubles de personnalité et
certains troubles anxieux, par exemple la phobie sociale et la personnalité évitante
ou la personnalité obsessionnelle-compulsive et le trouble obsessionnel-compulsif.
D’autre part, la personnalité d’un sujet va conditionner ses interactions
comportementales, cognitives et émotionnelles avec son environnement, le caractère
pathologique de la personnalité étant défini par des modalités de comportement
profondément enracinées et durables consistant en des réactions inflexibles à des
situations personnelles et sociales de nature très variée. Cela peut donc contribuer à
expliquer la survenue de difficultés d’adaptation lors de situation(s) stressante(s) telle
une maladie chronique. Les stratégies du patient pour s’adapter à la maladie (ou
stratégies de coping), dont l’issue peut être incertaine, vont en partie dépendre des
traits de personnalité des sujets. Ainsi, les personnes ayant des personnalités
pathologiques pourront dans certains cas utiliser des stratégies rigides, stéréotypées
ne favorisant pas la résilience et favorisant le développement de certains troubles
anxieux.
Cette association entre les troubles de personnalité et les troubles anxieux
justifie que l’on puisse dépister ces patientes de manière précoce. Le parcours de
soins de ces patientes est surtout concentré dans les services d’oncologie et/ou
gynécologie, il est donc important que le personnel soignant de ces services puisse
être sensibilisé à ces troubles. Une information pourrait être effectuée afin que les
membres du personnel puissent repérer rapidement ces patientes vulnérables. Il est
également important d’éviter une stigmatisation excessive et de considérer le trouble
de personnalité comme un élément de vulnérabilité face au stress et à
l’environnement et non forcément comme un trouble psychiatrique. Des outils
simples de dépistage pourraient être élaborés et mis au service des équipes de
soins. De plus l’intervention d’équipes de psychiatrie de liaison paraît indispensable à
la fois pour repérer précocement les troubles et pouvoir orienter les patientes vers
une prise en charge optimale. Une collaboration entre soins somatiques et prise en
67
charge psychologique et/ou psychiatrique est essentielle. Cela permettrait en outre
une confiance des patientes qui pourraient alors s’engager dans un suivi.
Un soutien auprès de l’entourage est également important. En effet, le cancer
va intervenir comme un événement bouleversant pour la patiente et peut réactiver
certaines émotions enfouies, les réactions de la patiente peuvent alors ne pas
toujours être comprises par les proches qui vont en être témoins et se trouver
démunis. Les groupes de parole pour les conjoints ou les familles peuvent alors
s’avérer utiles et réconfortants.
c) Influence des troubles de personnalité sur l’épisode
dépressif majeur
On constate également, et de manière logique compte-tenu des résultats
précédents, un effet protecteur de l’absence de trouble de personnalité sur la
survenue d’un épisode dépressif majeur à la fin de la première phase de traitement
chez les patientes de notre étude (OR = 0,12 [0,03 – 0,48] ; p=0,002). De plus, la
présence d’au moins un trouble de personnalité (OR = 8,17 [2,11 – 31,72] ; p =
0,0024] ou de deux ou plus troubles de personnalité (OR= 10,61 [2,87 – 39,2] ;
p=0,0004) augmentent la probabilité d’avoir un épisode dépressif majeur à T3.
L’association entre les troubles de personnalité et la survenue d’un épisode dépressif
majeur à T3 est également constatée quelque soit le cluster de personnalité (au
moins un tdp cluster A : OR = 4,88 [1,45 – 16,4], p = 0,0105 ; au moins un tdp cluster
B : OR = 12,75 [3,04 – 53,46], p = 0,0005 et au moins un tdp cluster C : OR = 10,42
[2,9 – 37,41], p = 0,0003).
L’influence des traits de personnalités sur l’apparition d’épisode dépressif
majeur avait été évoquée dans des études précédentes, notamment la tendance à
ne pas exprimer ses émotions (Wong-Kim et al., 2005), une faible estime de soi, une
faiblesse du soutien émotionnel (Montazeri et al., 2000) ou une tendance au
pessimisme (Zenger et al., 2010). Notre étude confirme l’influence des troubles de
personnalité évalués de manière catégorielle.
68
d) Prévalence des troubles anxieux et dépressifs
(a) Troubles anxieux
Les résultats obtenus lors de l’évaluation par le MINI mettent en évidence une
prévalence d’au moins un trouble anxieux chez 35% des patientes au moment du
diagnostic et chez 35,8% d’entre elles à la fin de la première phase de traitement.
Cette prévalence importante de troubles anxieux dans la population concorde avec
les résultats obtenus lors d’une étude menée par Manzanera et al. (2003) à Poitiers
chez des patientes atteintes de cancer du sein, la prévalence retrouvée pour tout
trouble anxieux à l’échelle MINI était de 30%.
On constate une augmentation non significative de certains troubles anxieux
entre le moment du diagnostic et la fin de la première phase de traitement : c’est le
cas du trouble anxieux généralisé : 14,2% à T1 et 19,2% à T3 ; du trouble panique
avec agoraphobie : de 3,3% à T1 et 5% à T3 et du trouble panique sans
agoraphobie : 1,7% à T1 et 2,5% à T3.
0
5
10
15
20
Nombre de
patientes (%)
TAG TP avec
Agoraphobie
TP sans
agoraphobie
Prévalence troubles anxieux à T1 et à T3
T1
T3
Figure 3. Troubles anxieux avec une prévalence augmentant entre T1 et T3 (TAG : Trouble Anxieux Généralisé, TP : Trouble Panique)
A l’inverse, on constate une diminution de la prévalence d’autres troubles
anxieux entre T1 et T3 comme la phobie sociale : 5,8% à T1 et 4,2% à T3 ; le trouble
obsessionnel compulsif : 1,7% à T1 et 0,8% à T3 et l’état de stress post-
traumatique : 4,2% à T1 et 2,5% à T3. Cependant, la faiblesse de notre échantillon
dans certains troubles anxieux ne permet pas une significativité des résultats
obtenus.
69
0
1
2
3
4
5
6
Nombre de
patientes (%)
Phobie
sociale
TOC ESPT
Prévalence troubles anxieux à T1 et à T3
T1
T3
Figure 4. Prévalence des troubles anxieux diminuant entre T1 et T3 (TOC : Trouble Obsessionnel Compulsif, ESPT : Etat de Stress Post-Traumatique)
Nous avons également constaté la forte prévalence des troubles anxieux chez
les patientes présentant au moins un trouble de personnalité (en effet : 50% des
patientes présentant au moins un trouble anxieux à T1 et à T3 avaient au moins un
trouble de personnalité, 41,2% des patientes avec un trouble anxieux généralisé à
T1 avaient au moins un trouble de personnalité, et la proportion se majorait encore
pour le trouble anxieux généralisé à T3 où 73,9% des patientes avaient au moins un
trouble de personnalité). Cependant, les patientes ayant un trouble de personnalité
n’ont pas systématiquement de trouble psychiatrique.
Une étude menée par Gandubert et al. (2009) chez des patientes atteintes de
cancer du sein, met en évidence une prévalence du trouble anxieux généralisé de
15,3%.
(b) Episode dépressif majeur
Nous retrouvons une prévalence de l’épisode dépressif majeur actuel de
15,8% à T1 et 10,8% à T3.
Les précédentes études menées chez des patientes atteintes de cancer du
sein mettent en évidence une prévalence de l’épisode dépressif majeur variable :
Menhert et al. (2007) retrouvent une prévalence de 4,7% après la chirurgie, Burgess
et al. (2005) une prévalence de l’épisode dépressif majeur de 33% au moment du
diagnostic et 24% à 3 mois, Christensen et al. (2009) de 13,7% à 3 mois environ du
diagnostic, Pedrizet-Chevalier et al. (2008) une prévalence de 32%, enfin l’étude de
Gandubert et al. (2009) met en évidence une prévalence de l’épisode dépressif
majeur de 16% au moment du diagnostic (contre 7,2% dans le groupe contrôle de
70
sujet non malade du cancer). Dunn et al. (2011) évoquent quatre « trajectoires
évolutives » de la dépression chez ces patientes avec principalement une
décélération lente de la dépression (pour 38,9% des patientes) ou intermédiaire
(pour 45,2% d’entre elles) au cours des 6 mois suivant la chirurgie.
Un nombre important d’études mesurent la dépression au moyen d’une
évaluation dimensionnelle avec notamment l’échelle HAD (Hospital Anxiety and
Depression scale). Ainsi Montazeri et al. (2008) retrouvent une prévalence de la
dépression de 38% chez les patientes suspectées d’être atteintes de cancer du sein
mais avant le diagnostic et de 36% à 3 mois après le diagnostic. Les travaux menés
par Schwarz et al. (2008) sur 369 patientes mettent en évidence une prévalence de
38,4% au moment du diagnostic et de 25,4% à 6 mois. Ramirez et al. (1995)
retrouvent une prévalence de troubles de l’humeur de 41% en pré-opératoire, de
29% 3 mois après l’opération et 25% à 12 mois.
Plusieurs facteurs de risque de dépression ont été identifiés, parmi lesquels :
l’âge jeune des patientes, le faible niveau socio-économique (Burgess et al., 2005 ;
Reich et al., 2008), l’isolement social, l’importance des symptômes physiques
(douleur…), l’atteinte de la fonction de reproduction (Gorman et al., 2010) ou encore
le sentiment de désespoir (Brothers et al., 2009). Selon Christensen et al. (2009), les
facteurs de risques d’Episode Dépressif Majeur sont en lien avec les caractéristiques
pré-morbides du sujet (ex : statut social, âge, antécédents psychiatriques) plutôt
qu’avec les caractéristiques liées à la maladie cancéreuse. Considérant cela, nous
avons voulu montrer l’influence des troubles de personnalité sur la survenue de
troubles dépressifs. Ainsi, l’absence de trouble de personnalité protègerait de la
survenue d’un épisode dépressif majeur (OR = 0,2 [0,03 – 0,48] ; p = 0,002) et une
personne ayant deux (ou plus) troubles de la personnalité aurait un risque augmenté
de développer un épisode dépressif majeur (OR = 10,61 [2,87 – 39,2] ; p = 0,0004).
L’association entre les troubles de personnalité, évalués de manière catégorielle, et
la survenue d’épisode dépressif majeur chez des femmes atteintes de cancer du sein
n’avait, a priori, pas été démontrée jusqu’alors.
e) Limites de l’étude
Notre étude a permis non seulement de confirmer la prévalence importante de
troubles anxieux et de troubles dépressifs au cours de la première phase de
71
traitement chez des patientes atteintes de cancer du sein, mais elle a également mis
en évidence le lien entre les troubles de personnalité et l’apparition ultérieure des
troubles anxieux et des troubles dépressifs. A notre connaissance, aucune étude
n’avait au préalable observé l’impact des troubles de la personnalité (évalués de
manière catégorielle) sur les troubles psychiatriques ultérieurs. Il est vrai cependant
que certains troubles de personnalité sont faiblement représentés dans notre
échantillon, ce qui peut limiter la puissance statistique de certains résultats, de
même, la sensibilité de l’échelle VKP entraîne une légère surestimation de la
prévalence de certains troubles. Toutefois, on observe parfois une association
statistique significative malgré un faible effectif.
Notre étude a permis de mettre en évidence le lien significatif entre les
troubles de personnalité et la présence de troubles anxieux et dépressifs en fin de
première phase de traitement, cependant pour confirmer l ’impact des troubles de
personnalité sur le développement de ces troubles psychiatriques, il serait
nécessaire d’utiliser une méthodologie différente avec comparaison de groupes avec
et sans trouble de personnalité et observer l’évolution.
L’évaluation unique des troubles de personnalité à T2 peut également être
discutée : en effet, le trouble de personnalité est censé être stable dans le temps,
cependant, une évaluation à distance pourrait être intéressante pour vérifier cette
stabilité. De plus, on peut se demander devant la forte comorbidité constatée, si le
trouble de personnalité n’est pas un marqueur de trouble anxieux.
La réalisation des entretiens par des psychologues expérimentés peut
apparaître comme un soutien psychologique et représenter un biais dans l’évaluation
de troubles anxieux ou dépressif. Cependant, les résultats obtenus sont comparables
aux précédentes études, et la passation d’hétéro-questionnaires standardisés limite
ce biais. De plus, certaines patientes ont été exclues par refus de participer à l’étude,
on peut s’interroger sur la représentativité de ces patientes : sont-elles comparables
aux patientes de l’étude, ou la prévalence des troubles de personnalité est-elle plus
élevée dans ce groupe ? Cependant, ces patientes restent très minoritaires.
72
f) Généralisation
Il apparaît au travers de cette étude que la phase de traitement est une phase
de vulnérabilité pour les patientes, étant donné la forte prévalence des troubles
anxieux et dépressifs. Une vigilance particulière des équipes soignantes, avec un
repérage des personnes en difficulté, par exemple avec des outils simples, pourrait
être bénéfique pour la prise en charge de ces patientes en souffrance.
La vulnérabilité induite par certains troubles de personnalité a été démontrée
dans cette étude, d’autres investigations pourraient être réalisées afin d’établir la
compréhension de ce lien : sont-ce les stratégies de coping utilisées par les patientes
souffrant de personnalités pathologiques qui induisent des troubles anxieux et / ou
dépressifs ? Il est nécessaire de poursuivre les recherches dans cette voie afin de
pouvoir repérer et aider au mieux les patientes concernées.
73
DEUXIEME ETUDE
B. QUELS SONT LES TROUBLES DE PERSONNALITE
ASSOCIES AU DEVELOPPEMENT D’UN TROUBLE ANXIEUX
GENERALISE CHEZ DES PATIENTES ATTEINTES DE CANCER
DU SEIN ?
1. INTRODUCTION
Le cancer du sein est une maladie répandue actuellement, on recense environ
50°000 nouveaux cas par an en France (INCa, 2009) et 11°500 décès. Malgré les
progrès en matière de traitement et l’amélioration du pronostic, le cancer va toujours
représenter pour la patiente une menace existentielle et une incertitude ; il va s’agir
d’un bouleversement dans sa vie avec la nécessité de s’adapter à une réalité
nouvelle.
Depuis 2003, avec l’instauration du plan cancer (Plan cancer 2003-2007), la
prise en charge du patient s’est modifiée avec une considération pour la qualité de
vie et la souffrance psychologique. Ainsi, la possibilité de soutien psychologique a
été favorisée et des dispositifs tels celui de la consultation d’annonce sont apparus.
Avec ces nouvelles perspectives, de nombreuses équipes ont alors axé leurs
recherches sur la qualité de vie et la détresse psychologique des patients atteints de
cancer.
Notre étude s’inscrit dans cette démarche et vise à connaître plus précisément
les troubles psychiatriques rencontrés chez des patientes atteintes de cancer du sein
ainsi que leurs facteurs prédictifs. Ainsi, un repérage précoce des patientes en
difficultés par les équipes de soins pourraient permettre une prise en charge adaptée
et entraîner une amélioration de la qualité de vie de ces patientes.
Dans l’étude précédemment réalisée, nous avons constaté une forte
prévalence du trouble anxieux généralisé au moment du diagnostic et une
prévalence encore plus importante à la fin de la première phase de traitement, ce
trouble étant le trouble psychiatrique le plus fréquemment rencontré dans la
74
population étudiée. Nous avons donc décidé de nous concentrer cette seconde
étude sur ce trouble.
L’annonce d’un cancer engendre inévitablement un état d’anxiété. Il s’agit
alors d’une réaction adaptative normale. Cependant, il existe des situations où cette
anxiété devient pathologique. Plusieurs critères permettent de distinguer l’anxiété
dite « normale » de l’anxiété pathologique : à la fois l’intensité des symptômes, les
conséquences de ce trouble mais aussi la durée. Il est admis qu’une anxiété
réactionnelle puisse durer jusqu’à 7 -10 jours mais doit ensuite disparaître (Stark et
al, 2000 ; Stark et al, 2002). Nous nous sommes intéressés aux personnes
présentant une anxiété généralisée, définie dans le DSM-IV-TR (American
Psychiatric Association, 2004) (cf. annexe 1).
Afin de permettre une amélioration du dépistage et de la prise en charge, il est
important de connaître les facteurs associés et prédicteurs de ce trouble. Nous avons
vu dans l’étude précédente que les troubles de personnalité étaient fortement
associés au développement du trouble anxieux généralisé. Il s’agit dans cette
seconde étude de définir précisément quels sont les troubles de personnalité
impliqués spécifiquement. De plus, il semble important de connaître quels sont les
autres facteurs prédictifs du trouble anxieux généralisé et de déterminer l’impact de
chacun.
L’objectif principal de cette deuxième étude était donc de déterminer quels
troubles de la personnalité étaient associés à l’existence ultérieure d’un trouble
anxieux généralisé chez des patientes en fin de phase initiale de traitement d’un
cancer du sein non métastasé. L’objectif secondaire était de déterminer l’influence
d’autres variables, telles les stratégies de coping, les variables socio-
démographiques, les variables liées à la maladie, ou la présence de troubles
psychiatriques en début de traitement sur le développement d’un trouble anxieux
généralisé à la fin de la première phase de traitement.
Notre hypothèse principale était qu’il existait une association entre certains
troubles de la personnalité et la présence d’un trouble anxieux généralisé en fin de
première phase de traitement chez des patientes atteintes de cancer du sein non
métastasé.
75
2. MATERIEL ET METHODES
a) Déroulement de l’étude
Il s’agit d’une étude prospective multicentrique longitudinale qui s’est déroulée
entre mai 2006 et novembre 2007 au sein des services de gynécologie des Centres
Hospitalo-Universitaires de Tours et Poitiers. Cette étude a été financée par l’Institut
National du Cancer (INCa) à hauteur de 87°990 Euros et par les comités
départementaux de la ligue contre le cancer d’Indre et Loire et de la Vienne à
hauteur de 14°000 Euros.
Le protocole de recherche a été évoqué aux patientes dans un premier temps
par le gynécologue qui les prenait en charge, le recueil des données était ensuite
effectué par des psychologues, attachés spécifiquement à ce projet de recherche.
Trois évaluations ont eu lieu pour chaque patiente :
une première évaluation après le diagnostic et avant le début du
traitement (T1). Ce premier entretien a été effectué par la psychologue,
au cours d’entretiens cliniques réalisés dans le service de gynécologie,
après avoir présenté le protocole à la patiente, et recueilli son
consentement. Cette première phase comprend le recueil de données
socio-démographiques, médicales, la passation de la MINI (Mini
International Neuropsychiatric Interview) et évaluation des stratégies de
coping avec l’échelle Brief-COPE.
Une seconde évaluation a eu lieu après l’intervention chirurgicale à
environ 3 mois de l’inclusion (T2). Elle se déroulait lors d’un entretien
clinique avec la psychologue, soit à l’occasion d’une séance de
radiothérapie ou chimiothérapie soit après fixé un rendez-vous avec la
patiente. Cette visite comprend la passation de la VKP (Vragenlijst voor
Kemmerken van de Persoonlijkheid), soit au moyen d’un ordinateur,
soit en version papier.
Le troisième temps d’évaluation à 7 mois de l’inclusion, à la fin de la
première phase de traitement (T3). Les patientes ont été contactées
par la psychologue pour fixer un rendez-vous, elles sont ensuite à
nouveau reçues lors d’un entretien clinique. Ce dernier temps
76
d’évaluation comprend la passation de la MINI et évaluation des
stratégies de coping avec l’échelle Brief-COPE.
b) Population étudiée
La population étudiée est la même que présentée dans l’étude 1.
Figure 5. Population de l’étude
77
c) Variables mesurées
Les variables mesurées sont résumées dans le tableau 1, dans l’étude 1,
récapitulatif du déroulement de l’étude.
Nous avons mesuré les variables suivantes à T1 : caractéristiques socio-
démographiques, parcours de soins (enregistrement des modalités de prise en
charge de la maladie cancéreuse et des autres traitements éventuels reçus par la
patiente), évaluation catégorielle des troubles anxieux et troubles de l’humeur avec le
MINI et évaluation des stratégies de coping utilisées avec l’échelle Brief-COPE.
A T2, nous avons mesuré les troubles de personnalité de manière catégorielle
avec l’échelle VKP.
A T3, les troubles anxieux et de l’humeur sont à nouveau évalués de manière
catégorielle avec le MINI et les stratégies de coping avec l’échelle Brief-COPE.
(1) Caractéristiques socio-démographiques (T1),
Parcours de soins, types de traitement, gravité de la maladie
Ces variables sont définies dans l’étude 1.
(2) Evaluation catégorielle des troubles anxieux et des
troubles dépressifs (T1 et T3) :
L’échelle utilisée pour ces évaluations (MINI) est détaillée dans l’étude 1.
(3) Troubles de la personnalité (T2) : évaluation
catégorielle
Les troubles de personnalité sont évalués de manière catégorielle à l’aide du
questionnaire VKP (Vragenlijst voor Kemmerken van de Persoonlijkheid), cette
échelle est décrite dans l’étude 1.
(4) Stratégies de Coping
Le coping est un concept décrit initialement par Lazarus et Wolkman,en 1966
puis développé en psychologie de la santé et défini comme « les réponses, réactions
que l’individu va élaborer pour maîtriser, réduire ou simplement tolérer la situation
78
aversive » (Bruchon-Schweitzer, 2001). Les individus vont développer une série de
réactions cognitives, émotionnelles et comportementales pour évaluer les difficultés
et pouvoir y faire face (Razavi & Delvaux, 2002). Les travaux menés sur le coping ont
conduit à définir deux grandes catégories de coping : celui centré sur le problème :
qui vise à réduire les exigences de la situation ou augmenter ses propres ressources
pour mieux y faire face et celui centré sur l’émotion qui vise à gérer les réponses
émotionnelles induites par la situation.
Le coping semble trouver ses déterminants dans les caractéristiques
dispositionnelles de la personne (génétique, traits de personnalité, croyances…),
dans la nature de l’événement et de l’environnement et enfin dans les transactions
entre le sujet et son environnement (évaluation de la situation, stress perçu, lieu de
contrôle perçu…).
Dans l’étude, les stratégies de coping employées par les patientes sont
mesurées lors des visites du temps 1 (T1) et du temps 3 (T3) à l’aide du Brief-COPE.
(a) Brief-COPE
Il s’agit d’une version abrégée du COPE, de 28 items, validée théoriquement
et empiriquement. L’instrument du COPE a été développé par Carver en 1989 et
l’échelle Brief-COPE en 1997 (Carver, 1997) et ils sont largement utilisés en
recherche pour évaluer les stratégies de « coping » ou « faire face ».
Des études de validation de cet instrument ont été réalisées et trouvent des
coefficients de consistance interne satisfaisants, il a également été validé auprès de
population de patientes atteintes de cancer du sein (Bussell et al., 2010), avec un
coefficient alpha de Cronbach de 0,90. Ce questionnaire a également été validé en
version française par Müller et al. (2003), mettant en évidence de bonnes qualités
psychométriques, sa structure factorielle apparaît congruente avec celle proposée
par Carver. Selon leur étude, le Brief-COPE possède également une bonne validité
externe (corrélations avec autre instrument évaluant l’équilibre psychologique
montrant des résultats cohérents).
Une autre étude a permis sa validation en version française, elle porte sur une
population de femmes atteintes de cancer du sein et traitées par radiothérapie (Fillion
et al., 2002) : elle met en évidence une bonne fiabilité (coefficient de consistance
79
interne entre 0,69 et 0,89 selon les dimensions avec une moyenne à 0,77, coefficient
test-retest similaire à celui de l’échelle initial non abrégée, la COPE. La corrélation
avec deux échelles validées (CHIP : The Coping with Health Injuries and Problems et
POMS : Profile of Mood States) a été effectuée et est satisfaisante.
Un des intérêts de cette échelle réside dans le temps de passation réduit qui
permet une souplesse d’utilisation.
La Brief-COPE évalue 14 dimensions de coping, de 2 items chacune. Il existe
quatre possibilités de réponse (de 1 « jamais » à 4 « toujours ») pour chaque item,
les scores des 2 items correspondant à la même dimension doivent être additionnés,
les scores varient de 2 à 8 (plus le score se rapproche de 8, plus le sujet utilise cette
stratégie de coping). Un score est donc obtenu pour chaque dimension.
Les dimensions évaluées sont : le coping actif, la planification, la recherche de
soutien social instrumental, la recherche de soutien social émotionnel, l’expression
des sentiments, le désengagement comportemental, la distraction, le blâme, la
réinterprétation positive, l’humour, le déni, l’acceptation, la religion et l’utilisation de
substances.
d) Analyse statistique
Les analyses descriptives sont effectuées avec des variables qualitatives,
exprimées sous forme de pourcentage et des variables quantitatives exprimées sous
forme de moyenne et écart-type.
Nous avons comparé la prévalence des principaux troubles psychiatriques
entre T1 et T3 (trouble anxieux généralisé, trouble panique avec ou sans
agoraphobie, phobie sociale, état de stress post-traumatique, trouble obsessionnel
compulsif et épisode dépressif majeur) à l’aide d’un test de Chi-Deux de Mac Nemar.
Nous avons réalisé des analyses de régression logistique univariées afin de
rechercher l’association statistique entre l’existence de trouble anxieux généralisé à
T3 et les critères socio-démographiques, les différents traitements, la présence de
troubles de la personnalité et le type de trouble de la personnalité, les différentes
stratégies de coping, l’estime de soi, les résultats au MINI à T1 et T3 et les résultats
à l’HAD à T1 et T3.
80
Une analyse de régression logistique multivariée a permis de déterminer les
facteurs prédictifs de trouble anxiété généralisée à T3 (variable dépendante), en
étudiant notamment l’impact des différents troubles de la personnalité (variable
indépendante) après ajustement sur l’anxiété généralisée à T1 (variable
dépendante).
Les résultats sont donnés avec la valeur du chi ² et par le calcul d’odds-ratio
avec un intervalle de confiance à 95%. L’odds-ratio n’est précisé que lorsque le p est
significatif.
Pour toutes les analyses statistiques, nous retiendrons le seuil de
significativité α=0,05 (bilatéral).
Le logiciel utilisé est le logiciel Statview.
e) Ethique
Cette étude a reçu l’avis favorable du comité d’éthique du CHU de Tours et du
Comité Consultatif de Protection des Personnes se prêtant à la Recherche
Biomédicale de Tours le 28/03/2006.
Pour chaque patiente incluse dans l’étude, la signature d’un consentement
éclairé a été recueillie.
81
3. RESULTATS
a) Caractéristiques de l’échantillon
(1) Caractéristiques socio-démographiques, gravité de
la maladie, type de prise en charge
Ces résultats sont présentés dans le tableau 1 dans la première étude.
Les résultats à l’échelle Brief COPE sont présentés dans le tableau 15.
Tableau 15. Evaluation des différents styles de coping dans la population (scores obtenus à l’échelle Brief-COPE) et score moyen obtenu à l’échelle de Rosenberg : estime de soi.
Moyenne (±DS)
Nombre de patientes (%)
Styles de coping (évaluation Brief-COPE)
Coping actif 4,82 (±1,94)
Planification 4,68 (±2,08)
Soutien Instrumental 4,94 (±1,97)
Soutien Emotionnel 4,82 (±1,99)
Expression des sentiments 4,7 (±1,77)
Réinterprétation positive 5,07 (±1,83)
Acceptation 6,19 (±1,79)
Déni 3,46 (±1,88)
Blâme 2,83 (±1,32)
Humour 2,69 (±1,35)
Religion 3,05 (±1,66)
Distraction 3,86 (±1,96)
Utilisation de substances 2,26 (±0,83)
Désengagement comportemental 2,38 (±0,79)
b) Caractéristiques associées à un trouble anxieux
généralisé à T3
Nous avons testé les liens entre les caractéristiques socio-démographiques,
les variables associées au cancer et son traitement, les résultats au MINI concernant
82
les troubles anxieux et dépressifs, les troubles de personnalité, les stratégies de
coping et l’estime de soi et la présence d’une anxiété généralisée à T3.
(1) Facteurs prédictifs de Trouble Anxieux Généralisé à
T3
Dans un premier temps, nous effectuons des analyses univariées afin de
confirmer l’hypothèse d’une influence de certains facteurs sur le TAG à T3.
(a) Caractéristiques socio-démographiques
La présence d’un trouble anxieux généralisé à T3 n’est pas significativement
associée au fait que la patiente vive seule (p=0,34).
Le niveau d’études n’est pas non plus associé significativement à la présence
du trouble anxieux généralisé à T3 : niveau école secondaire (p=0,18) et niveau
étude supérieure (p=0,78).
(b) Caractéristiques liées au cancer et au traitement
Dans notre étude, nous ne retrouvons pas de lien significatif entre le stade du
cancer et le TAG à T3 (pour score TNM : T : p = 0,09 ; N : p = 0,35).
Nous ne retrouvons pas d’association significative entre la présence d’un
trouble anxieux généralisé à T3 et le type de traitement chirurgical du cancer :
tumorectomie (p=0,35),
mastectomie (p=0,49).
On ne constate pas non plus d’association significative entre le traitement
adjuvant et le trouble anxieux généralisé à T3 :
curage ganglionnaire (p=0,16),
chimiothérapie (avant chirurgie : p=0,67, après chirurgie : p=0,44),
radiothérapie (p=0,33),
hormonothérapie (p=0,28).
83
(c) Troubles anxieux et dépressifs (diagnostics
MINI- évaluation catégorielle) à T1
Certains diagnostics MINI sont associés de manière significative à la présence
d’une anxiété généralisée à T3. Les résultats sont résumés dans le tableau 16.
Tableau 16- Analyse par régression logistique des diagnostics MINI à T1 prédicteurs potentiels d’un trouble anxieux généralisé à T3. (TAG = trouble anxieux généralisé)
Diagnostic MINI à T1 Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
TAG 5,64 0,0176 3,81 [1,26 – 11,47]
Trouble Panique avec agoraphobie 5,1 0,024 14,4 [1,42 – 145,67]
Trouble panique sans agoraphobie 1,06 0,304
Phobie sociale 2,42 0,12
TOC 1,06 0,304
ESPT 4,31 0,038 7,13 [1,12 – 45,46]
EDM actuel 17,37 <0,0001 10,20 [3,42 – 30,4]
Le risque de présenter un trouble anxieux généralisé (TAG) à T3 est
statistiquement associé à la présence d’un TAG à T1 (OR = 3,81 [1,26 – 11,47],
p=0,018), mais aussi à la présence d’un trouble panique avec agoraphobie à T1
(OR= 14,4 [1,42 – 145,67], p=0,024) et d’un état de stress post-traumatique (ESPT)
à T1 (OR = 7,13 [1,12 – 45,46], p=0,038). Cependant, on n’observe pas
d’association significative entre les autres troubles anxieux (trouble panique sans
agoraphobie, phobie sociale, trouble obsessionnel compulsif) à T1 et le TAG à T3.
On retrouve également une association significative statistiquement entre la
présence d’un Episode Dépressif Majeur (EDM) à T1 et la survenue d’un TAG à T3
(p<0,0001).
(d) Stratégies de coping
Nous avons cherché l’existence d’une association entre les stratégies de
coping utilisées à T1 et à T3 avec la présence d’un trouble anxieux généralisé à T3.
84
Tableau 17. Analyse en régression logistique de l’association entre stratégies de coping à T1 et TAG à T3
Style de coping Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Coping actif 0,03 0,85
Planification 0,38 0,53
Soutien instrumental 2,69 0,1
Soutien émotionnel 0,93 0,34
Expression des sentiments 2,7 0,1
Réinterprétation positive 2,12 0,15
Acceptation 4,49 0,034 0,76 [0,60 – 0,98]
Déni 4,95 0,026 1,3 [1,03 – 1,63]
Blâme 2,99 0,084
Humour 1,17 0,28
Religion 0,01 0,91
Distraction 1,1 0,29
Utilisation de substances 2,17 0,14
Désengagement comportemental 3,6 0,058
Tableau 18. Analyse en régression logistique de l’association entre stratégies de coping à T3 et TAG à T3
Style de coping Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Coping actif 0,21 0,64
Planification 0,001 0,98
Soutien instrumental 3,73 0,053
Soutien émotionnel 2,3 0,12
Expression des sentiments 2,2 0,14
85
Réinterprétation positive 2,55 0,11
Acceptation 11,65 0,0006 0,65 [0,51 – 0,83]
Déni 11,66 0,0006 1,86 [1,30 – 2,67]
Blâme 12,4 0,0004 1,79 [1,30 – 2,48]
Humour 0,82 0,36
Religion 0,01 0,91
Distraction 1,11 0,29
Utilisation de substances 4,64 0,031
Désengagement comportemental 5,79 0,016 1,76 [1,11 – 2,79]
(e) Troubles de personnalité et trouble anxieux généralisé
à T3
Il apparaît une association statistiquement significative entre certains types de
personnalité pathologique et l’anxiété généralisée à T3.
Les résultats sont représentés dans le tableau 19.
86
Tableau 19- Analyse en régression logistique de l’association entre troubles de personnalité et le trouble anxieux généralisé à T3
Trouble de personnalité (tdp) Chi 2 Valeur de p Odds Ratio CI (à 95%)
Cluster A
Paranoïaque 18,54 <0,0001 11,79 [3,83 – 36,23]
Schizoïde 1,73 0,19
Schizotypique 0,002 0,96
Cluster B
Antisociale 0,001 0,98
Borderline 7,81 0,0052 8,70 [1,91 – 39,71]
Histrionique 0,001 0,98
Narcissique
Cluster C
Evitante 17,72 <0,0001 9,49 [3,33 – 27,06]
Dépendante 6,88 0,0087 20,21 [2,14 – 191]
Obsess.-comp. 6,98 0,0082 5,35 [1,54 – 18,58]
Non DSM-IV
Passive-agres. 1,34 0,25
Dépressive 12,86 0,0003 20,78 [3,96 – 109,13]
Au moins un tdp cluster A 17,72 <0,0001 9,49 [3,33 – 27,06]
Au moins un tdp cluster B 9,11 0,0025 8,21 [2,09 – 32,2]
Au moins un tdp cluster C 18,55 <0,0001 9,22 [3,36 – 25,35]
Zéro tdp 16,51 <0,0001 0,12 [0,04 – 0;33]
Au moins un tdp 16,51 <0,0001 8,62 [3,05 – 24,4]
Deux tdp 6,52 0,0107 10 [1,71 – 58,6]
Trois tdp 0,09 0,76
87
(2) Impact des troubles de la personnalité évalués
après ajustement sur le trouble anxieux généralisé à T1
A la suite des résultats précédents, les variables apparaissant comme
significativement associées au trouble anxieux généralisé à T3 sont les troubles de
personnalité, certaines stratégies de coping et certains troubles anxieux et dépressifs
à T1. Afin de déterminer l’impact des troubles de personnalité, nous avons voulu le
mesurer en ajustant statistiquement sur le trouble anxieux généralisé à T1. Nous
avons choisi cette variable (TAG à T1) car elle était statistiquement liée au TAG à T3
et cela nous apparaissait comme un facteur associé puissant a priori.
Cette analyse a permis de mesurer l’impact indépendant de ces valeurs sur le
développement d’un trouble anxieux généralisé.
Tableau 20. Analyse en régression logistique multivariée : influence comparées des troubles de personnalité (tdp) et du trouble anxieux généralisé (TAG) à T1 sur le TAG à T3 (variable dépendante)
Variables indépendantes Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Au moins un tdp 16,03 <0,0001 9,12 [3,09 - 26,89]
TAG à T1 5,07 0,024 4,33 [1,21 - 15,47]
Au moins 1 tdp cluster A 16,30 <0,0001 9,21 [3,13 – 27,09]
TAG à T1 4,04 0,045 3,57 [1,03 – 12,36]
Au moins 1 tdp cluster B 8,85 0,003 8,52 [2,08 – 34,97]
TAG à T1 5,36 0,021 3,97 [1,24 – 12,73]
Au moins 1 tdp cluster C 16,44 <0,0001 8,42 [3,01 – 23,58]
TAG à T1 2,93 0,08
Zéro tdp 16,03 <0,0001 0,11 [0,04 – 0,32]
TAG à T1 5,07 0,024 4,33 [1,21 – 15,47]
Au moins 2 tdp 16,75 <0,0001 10,38 [3,38 – 31,82]
TAG à T1 1,44 0,23
Personnalité Paranoïaque 17,43 <0,0001 11,88 [3,72 – 37,96]
TAG à T1 4,48 0,034 3,87 [1,11 – 13,52]
Personnalité Schizotypique 0,002 0,96
TAG à T1 1,92 0,17
88
Variables indépendantes Chi 2 Valeur de p Odds-Ratio CI (à 95%)
Personnalité Schizoïde 1,27 0,26
TAG à T1 5,2 0,023 3,66 [1,2 – 11,14]
Personnalité Borderline 7,15 0,008 8,44 [1,77 – 40,32]
TAG à T1 4,90 0,027 3,7 [1,16 – 11,78]
Personnalité Antisociale 0,001 0,98
TAG à T1 5,54 0,019 3,76 [1,25 – 11,34]
Personnalité Histrionique 0,001 0,98
TAG à T1 6,12 0,013 4,06 [1,34 – 12,33]
Personnalité Narcissique
TAG à T1
Personnalité Evitante 14,72 0,0001 8,17 [2,79 – 23,88]
TAG à T1 2 0,16
Personnalité Dépendante 5,89 0,015 17,13 [1,73 – 169,9]
TAG à T1 3,99 0,046 3,31 [1,02 – 10,73]
Personnalité Obsessionnelle-
Compulsive
7,01 0,008 5,71 [1,57 – 20,72]
TAG à T1 5,68 0,017 4,05 [1,28 – 12,82]
Personnalité Passive-agressive 0,61 0,44
TAG à T1 4,95 0,026 3,57 [1,16 – 10,93]
Personnalité dépressive 10,67 0,001 16,79 [3,09 – 91,23]
TAG à T1 2,16 0,14
89
4. DISCUSSION
Notre étude recherche les facteurs influençant le développement d’un trouble
anxieux généralisé à T3, soit à la fin de la première phase de traitement.
a) Influence des troubles de la personnalité
Dans un premier temps, le but de notre étude était d’étudier l’influence des
troubles de personnalité sur la présence du trouble anxieux généralisé en fin de
première phase de traitement (T3).
On observe un risque augmenté de développer un trouble anxieux généralisé
à T3 chez les sujets ayant les personnalités pathologiques suivantes : dans le cluster
A, seule la personnalité paranoïaque apparaît comme associée significativement (OR
= 11,79 [3,83 – 36,23] ; p<0,0001), dans le cluster B, la personnalité borderline a une
influence significative (OR = 8,7 [1,91 – 39,71] ; p = 0,0052), ce qui n’est pas le cas
des personnalités histrionique, antisociale et l’absence de cas de personnalité
narcissique dans notre échantillon ne nous permet pas de conclure sur le risque
entraîné. Enfin une association significative est constatée pour toutes les
personnalités du cluster C avec la présence du trouble anxieux généralisé à T3 :
personnalité évitante : OR = 8,7 [1,91 – 39,71] ; p<0,0001, personnalité dépendante :
OR = 20,21 [2,14 – 191] ; p = 0,0087 et personnalité obsessionnelle-compulsive : OR
= 5,35 [1,54 – 18,58] ; p = 0,0082. La personnalité dépressive, qui n’appartient plus à
la classification DSM-IV-TR, mais a été étudiée, est associée également de manière
significative au risque de présenter un TAG à la fin de la première phase de
traitement du cancer du sein (OR = 20,78 [3,96 – 109,13] ; p = 0,0003).
De plus, l’absence de trouble de personnalité apparaît comme protecteur vis-
à-vis du développement du TAG à T3 (OR = 0,12 [0,04 – 0,33] ; p<0,0001).
L’analyse en régression logistique multivariée nous permet de constater la
puissance de l’impact des troubles de la personnalité sur le développement ultérieur
du trouble anxieux généralisé. En effet, l’association entre certains troubles de
personnalité et le TAG à T3 reste significative après ajustement sur la présence d’un
trouble anxieux généralisé à T1.
90
Ces résultats confirment que les troubles de personnalité sont un facteur
prédictif fort de développer un trouble anxieux généralisé en fin de première phase
de traitement de cancer du sein.
Ainsi, lorsque l’on compare ces facteurs, l’influence sur le TAG à T3 d’au
moins un trouble de personnalité cluster C, d’au moins 2 troubles de personnalité
(tous clusters confondus), de la personnalité évitante et de la personnalité
dépressive est si forte que l’influence du TAG à T1 n’est plus significative.
Dans cette analyse multivariée, le TAG à T1 reste significativement associé au
TAG à T3 mais son influence est inférieure aux troubles de personnalité lorsqu’il
s’agit des personnalités paranoïaques, borderline, dépendante et obsessionnelle-
compulsive, ou plus généralement dès lors qu’on retrouve au moins un trouble de
personnalité ou un trouble cluster A ou cluster B.
L’influence du TAG à T1 reste supérieure à celle des personnalités
histrionique, antisociale, schizoïde et passive-agressive.
L’association du TAG avec les personnalités du cluster C ou personnalités
anxieuses (personnalités évitante, dépendante et obsessionnelle-compulsive) peut
se comprendre comme un continuum, une vulnérabilité à l’anxiété exacerbée. La
personnalité dépressive correspond à un terrain favorable au développement de
troubles psychiatriques, notamment à l’épisode dépressif majeur qui est
fréquemment une comorbidité du TAG. L’association avec la personnalité borderline
peut être expliquée par une perturbation émotionnelle et relationnelle forte avec des
difficultés d’adaptation au stress. Enfin, la personnalité paranoïaque est caractérisée
notamment par une psychorigidité et une probable difficulté à s’adapter face à des
événements de vie stressants. Ces troubles de personnalité sont donc ceux à
repérer préférentiellement. Les personnalités dites « anxieuses » et la personnalité
dépressive sont très fortement associées au TAG, il est donc important de le dépister
précocement. Une information du personnel quant aux caractéristiques spécifiques
de ces personnalités ou un outil de dépistage simple et rapide pourrait être bénéfique
pour favoriser la prise en charge de ces patientes.
Il n’a pas été retrouvé d’étude présentant une observation du lien entre les
troubles de personnalité (évalués de façon catégorielle) et le trouble anxieux
91
généralisé. Cependant, des travaux mettent en évidence l’influence de certains traits
de personnalité avec une altération de la qualité de vie ou une augmentation de la
détresse psychologique chez des patientes atteintes de cancer du sein. Ainsi, Van
der Steeg et al. (2010) ont étudié l’impact de la personnalité, évaluée de manière
dimensionnelle (cinq facteurs : névrosisme, agréabilité, ouverture, extraversion et
caractère consciencieux, auxquels ils ont rajouté la dimension anxiété-trait), leurs
travaux mettent en évidence une altération de la qualité de vie en lien significatif
avec des scores élevés de névrosisme et d’anxiété-trait, un an après le début de la
prise en charge des patientes atteintes de cancer du sein. De même, Den Oudsten et
al. (2009) ont montré que les troubles psychiatriques comme la dépression un an
après la prise en charge chirurgicale sont influencés par des traits de personnalité :
notamment chez les sujets ayant un score élevé de névrosisme et bas en agréabilité.
Zenger et al. (2010), ont montré que la détresse émotionnelle et l’anxiété au cours du
traitement du cancer du sein était corrélée au pessimisme, de même Schou et al.
(2004) ont les mêmes conclusions quand à l’influence du pessimisme sur la détresse
psychologique. Mazanec et al. (2010) montrent quant à eux l’impact protecteur de
l’optimisme face à la détresse psychologique.
Ces résultats mettent en évidence une vulnérabilité des sujets ayant des
personnalités pathologiques en situation de stress. La personnalité peut intervenir
dans les stratégies de coping utilisées par les patientes. En effet, nous avons vu que
le coping est en partie déterminé par les caractéristiques dispositionnelles du sujet,
dont sa personnalité.
b) Influence du coping
Notre étude montre que les stratégies de coping utilisées par les patientes
peuvent avoir une influence sur l’anxiété généralisée. Deux évaluations du coping
ont été réalisées (à T1 et T3).
Ainsi on observe une majoration du risque de développer un TAG à T3 chez
les patientes ayant une stratégie de déni à T1 (OR=1,3 [1,03 – 1,63] ; p = 0,026) et à
T3 (OR=1,86 [1,3 – 2,67] ; p = 0,0006), par contre, l’acceptation apparaît comme un
facteur protecteur sur le TAG à T3, à la fois lors de l’utilisation de cette stratégie à T1
(OR=0,76 [0,6 – 0,98] ; p = 0,034) et à T3 (OR=0,65 [0,51 – 0,83] ; p = 0,0006). Il
apparait également une augmentation du risque de TAG à T3 lors d’utilisation de
92
stratégies telles le blâme à T3 (OR=1,79 [1,3 – 2,48] ; p = 0,0004) ou le
désengagement comportemental à T3 (OR=1,76 [1,11 – 2,79] p = 0,016) (leur
influence n’étant pas significative lorsque ces deux stratégies sont utilisées à T1).
Il apparaît probable qu’un lien entre trouble de personnalité et stratégie de
coping existe et explique le lien significatif avec la présence d’un trouble anxieux
généralisé à T3. En effet : on constate que les stratégies dites « protectrices » sont
des stratégies actives ou d’adaptation, ce qui pourrait rejoindre certains traits de
personnalité. De même les stratégies augmentant le risque de développer un trouble
anxieux généralisé (déni, blâme, désengagement comportemental) pourraient être
utilisées préférentiellement par des patientes présentant certains types de
personnalité pathologiques. Ces liens entre stratégies de coping et troubles de
personnalité pourraient être étudiés au cours d’études ultérieures.
Plusieurs études ont été menées sur le lien entre coping et détresse
psychologique chez des patients atteints de cancer, ainsi, Avery & Weisman, (1987)
ont défini des profils de « bons » et « mauvais copers », où la détresse
psychologiques seraient nettement moindre chez les « bons copers ». Ces sujets
seraient plus optimistes, confiants en eux, avec utilisation de stratégies actives
(confrontation, recherche d’information, de solution, partage d’expériences…) tout en
conservant une lucidité sur l’avenir et la maladie. A contrario, les « mauvais copers »
ont un profil plus hétérogène, avec des stratégies plutôt passives et de soumission,
un pessimisme, avec parfois des mises en danger, une auto-accusation ou encore
un déni de la réalité de la situation. On retrouve dans ces définitions les résultats de
notre étude où l’acceptation apparaît comme protectrice et le déni, le blâme ou le
désengagement comportemental entraîne une vulnérabilité au développement d’un
trouble anxieux généralisé. De même, les travaux de Burgess et al. (1987) montrent
que les sujets utilisant des styles de coping du type « impuissance/désespoir » ont
une anxiété importante contrairement aux sujets « positifs », usant de stratégies
actives. Bussell et al. (2010) et Malcarne et al. (1995) ont constaté que les stratégies
telles le désengagement comportemental, le déni et le blâme étaient positivement
corrélées avec une détresse psychologique lors de la période de traitement alors que
l’acceptation et la reformulation positive sont associées à moins de détresse. Epping-
Jordan et al. (1999) ont montré une influence d’un faible optimisme et des stratégies
de désengagement sur la survenue de troubles anxieux et dépressifs à 6 mois du
93
diagnostic. L’impact du déni est controversé, Razavi et al. (1990) évoque un meilleur
contrôle des affects anxieux et dépressifs, cependant il apparaît dans plusieurs
travaux que le déni est un facteur de risque de détresse psychologique et d’anxiété
importante (Deimling et al., 2006 ; Avery & Weisman, 1987). Des études menées en
population générale (patients non atteints de cancer) et montrent des corrélations
entre certains traits de personnalité et stratégies de coping : ainsi Leandro et al.
(2010) retrouvent un lien significatif entre un névrosisme élevé et des stratégies
centrées sur l’émotion ou des stratégies de désengagement comportemental ainsi
qu’une corrélation positive entre le caractère consciencieux et les stratégies de
réinterprétation positive et de coping actif.
c) Influence des variables socio-démographiques et des
variables liées au cancer et au traitement
Dans notre étude nous ne retrouvons pas d’influence des variables socio-
démographiques (fait de vivre seule ou non, niveau d’études…) ni des variables liées
à la maladie cancéreuse (score TNM) ni à sa prise en charge (type de chirurgie,
traitement adjuvant…) sur le trouble anxieux généralisé à la fin de la première phase
de traitement.
Ces résultats concordent avec ceux de différentes études préalables : ainsi,
Hartl et al. (2010) constatent également l’absence d’impact du stade de la maladie,
de son pronostic ou encore du type de prise en charge sur la qualité de vie et sur
l’anxiété ressentie par les patientes, de même pour Burgess et al. (2005) ou Stark et
al. (2002). Ces travaux soulignent l’impact de l’âge : ainsi l’âge jeune serait un
facteur de risque de développement de troubles anxieux.
d) Comorbidités entre anxiété généralisée et les autres
troubles psychiatriques (évalués par le MINI)
Nous retrouvons une association entre le trouble anxieux généralisé à T3 et la
présence d’un trouble anxieux généralisé à T1 (OR= 3,81 [1,26 – 11,47] ; p = 0,018),
mais également avec le trouble panique avec agoraphobie à T1 (OR = 14,4 [1,42 –
145,67] ; p = 0,024) et l’état de stress post-traumatique à T1 (OR = 7,13 [1,12 –
45,46] ; p = 0,038). Le trouble anxieux généralisé à T3 n’est pas associé à la phobie
94
sociale à T1, ni au trouble panique sans agoraphobie ou encore au trouble
obsessionnel compulsif.
Le trouble anxieux généralisé à T3 est également associé à l’épisode
dépressif majeur à T1 (OR = 10,20 [3,42 – 30,4] ; p<0,0001).
Il apparaît donc une prévalence élevée de comorbidités au trouble anxieux
généralisé, d’où l’importance de repérer les facteurs prédictifs afin de rapidement
pouvoir venir en aide aux patientes concernées.
Devant le lien entre trouble de personnalité et trouble anxieux généralisé et les
fortes prévalences de comorbidités, il est probable que les sujets avec un trouble de
personnalité présentent une vulnérabilité au développement de différents troubles
psychiatriques (résultats partiellement développés dans l’étude 1).
e) Limites de notre étude
Dans notre étude, le nombre de sujets est suffisant en globalité, cependant, ce
nombre peut être insuffisant dans certaines catégories diagnostiques. Ainsi, certains
troubles de personnalité ne sont que faiblement représentés, voire pas du tout, de
même, certains ont pu être surreprésentés du fait de la spécificité faible de notre
échelle pour certains troubles.
Nous nous sommes concentrés sur la présence du trouble anxieux généralisé
à la fin de la première phase de traitement et non sur l’évolution entre T1 et T3, celle-
ci n’étant pas significative statistiquement, cela pourrait être l’objet d’études
ultérieures.
Notre étude s’est ciblée sur le trouble anxieux généralisé, car il s’agissait du
diagnostic psychiatrique le plus représenté dans notre échantillon. Cette forte
prévalence du trouble anxieux généralisé peut également être expliquée par la
prévalence importante de troubles de personnalité dans l’échantillon, ceux-ci étant,
nous l’avons démontré, des facteurs favorisants. Cependant il serait utile d’étendre la
recherche des facteurs prédictifs aux autres troubles anxieux, ainsi qu’aux autres
troubles psychiatriques pouvant être rencontrés chez des femmes atteintes de
cancer du sein.
95
Une meilleure connaissance des déterminants de la détresse psychologique
de ces femmes permettraient une détection plus précoce et une adaptation de la
prise en charge afin de garantir aux patientes une meilleure qualité de vie.
f) Généralisation
Cette étude met en évidence l’association entre certains troubles de la
personnalité et l’apparition d’un trouble anxieux généralisé. Le repérage précoce des
troubles de personnalité pourrait permettre de cibler les patientes chez lesquelles on
va proposer un suivi psychologique en priorité. Des outils d’évaluation pourraient être
développés pour repérer précocement les troubles de personnalité et être utilisables
par les équipes soignantes des services de cancérologie. Les prises en charge
pourraient également être adaptées en fonction de ces troubles. En effet, si certains
troubles entraînent une augmentation du risque de troubles psychiatriques au cours
du cancer, une thérapie ciblée sur les troubles de personnalité pourrait aider les
patientes à affronter différemment l’épreuve de la maladie. Il existe des thérapies
spécifiques (par exemple la thérapie dialectique comportementale de Linehan, ou
encore la thérapie des schémas de Young) et si celles-ci sont difficiles à mettre en
place, des prises en charge simples et spécifiques pourraient être développées dans
les services. En effet : les troubles de personnalité impliquant des modalités
comportementales, cognitives et émotionnelles rigides et peu adaptables, des prises
en charge ciblant par exemple une meilleure gestion émotionnelle telles la
mindfulness ou la relaxation pourraient être instaurées dans les services de soins
pour les patientes de cancérologie.
Dans tous les cas, d’autres études devront être réalisées, afin de définir
l’ensemble des facteurs prédictifs des troubles psychiatriques au cours du cancer du
sein. Il serait également intéressant d’étudier l’impact de prises en charge
spécifiques (notamment plus orientées vers les troubles de personnalité) sur le
devenir de ces patientes. Enfin une meilleure compréhension du lien entre les
troubles de personnalité et les troubles anxieux et dépressifs est nécessaire. En
effet, s’agit-il de modalités d’adaptation particulières selon les personnalités ? Les
sujets ayant des troubles de la personnalité ont-ils des fonctionnements relationnels,
des modalités de gestion émotionnelle rigides ou inadaptés et à l’origine de détresse
psychologique en cas de stress ? Les stratégies de coping utilisées par les patientes
96
présentant des troubles de personnalité sont-elles moins efficaces ? D’autres études
s’avèrent nécessaires pour clarifier ces points et mieux comprendre le
fonctionnement de ces patientes vulnérables.
Ainsi, l’amélioration des connaissances des facteurs prédisant la détresse
émotionnelle des patientes atteintes de cancer du sein pourrait permettre non
seulement un dépistage plus précoce mais aussi une prise en charge la plus adaptée
possible afin d’améliorer au maximum la qualité de vie de ses femmes.
97
CONCLUSION
Ce travail met en évidence une prévalence élevée des troubles anxieux et
dépressifs chez les patientes atteintes de cancer du sein, mais aussi l’impact
péjoratif des troubles de la personnalité sur le développement de ces troubles. Ainsi,
les patientes présentant un trouble de personnalité apparaissent plus vulnérables. Il
semble donc important de pouvoir repérer rapidement ces femmes et que des prises
en charge adaptées soient développées afin de les soulager et les aider au mieux au
cours de cette épreuve que représente la maladie.
98
ANNEXES
ANNEXE N°1 :
CRITERES DSM-IV-TR des Troubles Anxieux :
TROUBLE PANIQUE SANS AGORAPHOBIE :
A. A la fois :
Attaques de panique récurrentes et inattendues.
Au moins une des attaques s’est accompagnée pendant un
mois de l’un ou plus des symptômes suivants :
- Crainte persistante d’avoir d’autres attaques de
panique.
- Préoccupations à propos des implications possibles de
l’attaque ou bien de ses conséquences (ex : crise
cardiaque, « devenir fou »…).
- Changement de comportement important en relation
avec les attaques.
B. Absence d’agoraphobie.
C. Attaques de paniques non dues aux effets physiologiques directs
d’une substance ou d’une affection médicale générale.
D. Attaques de panique pas mieux expliquées par un autre trouble
mental.
TROUBLE PANIQUE AVEC AGORAPHOBIE
Idem au trouble panique sans agoraphobie sauf critère B :
B. Présence d’agoraphobie.
99
PHOBIE SOCIALE
A. Une peur persistante et intense d’une ou plusieurs situations
sociales ou bien de situations de performance durant lesquelles le
sujet est en contact avec des gens non familiers ou bien peut être
exposé à l’observation attentive d’autrui. Le sujet craint d’agir (ou de
montrer des symptômes anxieux) de façon embarrassante ou
humiliante.
B. L’exposition à la situation sociale redoutée provoque de façon quasi-
systématique une anxiété qui peut prendre la forme d’une Attaque
de panique liée à la situation ou bien facilitée par la situation.
C. Le sujet reconnait le caractère excessif ou irraisonné de la peur.
D. Les situations sociales ou de performance sont évitées ou vécues
avec une anxiété et une détresse intenses.
E. L’évitement, l’anticipation anxieuse ou la souffrance dans la (les)
situation(s) redoutée(s) sociale(s) ou de performance perturbent, de
façon importante, les habitudes de l’individu, ses activités
professionnelles (scolaires), ou bien ses activités sociales ou ses
relations avec autrui, ou bien le fait d’avoir cette phobie
s’accompagne d’un sentiment de souffrance important.
F. Chez les individus de moins de 18 ans, la durée est d’au moins 6
mois.
G. La peur ou le comportement d’évitement ne sont pas liés aux effets
physiologiques directs d’une substance ni à une affection médicale
générale et ne sont pas mieux expliqués par un autre trouble
mental.
H. Si une affection médicale générale ou un autre trouble mental est
présent, la peur décrite en A est indépendante de ces troubles.
100
TROUBLE OBSESSIONNEL-COMPULSIF
A. Existence soit d’obsessions soit de compulsions :
Obsessions définies par (1), (2), (3) et (4) :
(1) Pensées, impulsions ou représentations récurrentes et
persistantes qui, à certains moments de l’affection, sont
ressenties comme intrusives et inappropriées et qui
entraînent une anxiété ou une détresse importante
(2) Les pensées, impulsions ou représentations ne sont
pas simplement des préoccupations excessives
concernant les problèmes de la vie réelle
(3) Le sujet fait des efforts pour ignorer ou réprimer ces
pensées, impulsions ou représentations ou pour
neutraliser celles-ci par d’autres pensées ou actions
(4) Le sujet reconnaît que les pensées, impulsions ou
représentations obsédantes proviennent de sa propre
activité mentale (elles ne sont pas imposées de
l’extérieures comme dans le cas des pensées
imposées)
Compulsions définies par (1) et (2) :
(1) Comportements répétitifs (ex : lavage des mains,
ordonner, vérifier…) ou actes mentaux (ex : prier,
compter…) que le sujet se sent poussé à accomplir en
réponse à une obsession ou selon certaines règles qui
doivent être appliquées de manière inflexible
(2) Les comportements ou les actes mentaux sont
destinés à neutraliser ou à diminuer le sentiment de
détresse ou à empêcher un événement ou une
situation redoutés ; cependant, ces comportements ou
ces actes mentaux sont soit sans relation réaliste avec
101
ce qu’ils proposent de neutraliser ou de prévenir, soit
manifestement excessifs.
B. A un moment durant l’évolution du trouble, le sujet a reconnu que
les obsessions ou les compulsions étaient excessives ou
irraisonnées.
C. Les obsessions ou compulsions sont à l’origine de sentiments
marqués de détresse, d’une perte de temps considérable (prenant
plus d’une heure par jour) ou interfèrent de façon significative avec
les activités habituelles du sujet, son fonctionnement professionnel
ou ses activités ou relations sociales habituelles.
D. Si un autre trouble de l’axe I est aussi présent, le thème des
obsessions ou des compulsions n’est pas limité à ce dernier ;
E. La perturbation ne résulte pas des effets physiologiques directs
d’une substance ni d’une affection médicale générale.
102
ETAT DE STRESS POST-TRAUMATIQUE
A. Le sujet a été exposé à un événement traumatique dans lequel les
deux éléments suivants étaient présents :
(1) Le sujet a vécu, a été témoin ou a été confronté à un
événement ou à des événements durant lesquels des
individus ont pu mourir ou être très gravement blessés ou
bien ont été menacés de mort ou de grave blessure ou
bien durant lesquels son intégrité physique ou celle
d’autrui a pu être menacée.
(2) La réaction du sujet à l’événement s’est traduite par une
peur intense, un sentiment d’impuissance ou d’horreur.
B. L’événement traumatique est constamment revécu de l’une ou
plusieurs des façons suivantes :
(1) Souvenirs répétitifs et envahissants de l’événement
provoquant un sentiment de détresse et comprenant des
images, des pensées ou des perceptions.
(2) Rêves répétitifs de l’événement provoquant un sentiment
de détresse.
(3) Impression ou agissements soudains « comme si »
l’événement traumatique allait se reproduire.
(4) Sentiment intense de détresse psychique lors de
l’exposition à des indices internes ou externes évoquant
ou ressemblant à un aspect de l’événement traumatique
en cause.
(5) Réactivité physiologique lors de l’exposition à des indices
internes ou externes pouvant évoquer ou ressembler à un
aspect de l’événement traumatique en cause.
103
C. Evitement persistant des stimuli associés au traumatisme et
émoussement de la réactivité générale comme en témoigne la
présence d’au moins 3 des manifestations suivantes :
(1) Efforts pour éviter les pensées, les sentiments ou les
conversations associés au traumatisme.
(2) Efforts pour éviter les activités, les endroits ou les gens
qui éveillent des souvenirs du traumatisme.
(3) Incapacité de se rappeler d’un aspect important du
traumatisme.
(4) Réduction nette de l’intérêt pour des activités importantes
ou bien réduction de la participation à ces mêmes
activités.
(5) Sentiment de détachement d’autrui ou bien de devenir
étranger par rapport aux autres.
(6) Restriction des affects.
(7) Sentiment d’avenir « bouché ».
D. Présence de symptômes persistants traduisant une activité
neurovégétative comme en témoigne la présence d’au moins deux
des manifestations suivantes :
(1) Difficultés d’endormissement ou sommeil interrompu
(2) Irritabilité ou accès de colère
(3) Difficultés de concentration
(4) Hypervigilance
(5) Réaction de sursaut exagérée
E. La perturbation dure plus d’un mois.
104
F. La perturbation entraîne une souffrance cliniquement significative ou
une altération du fonctionnement social, professionnel ou dans
d’autres domaines importants.
105
ANXIETE GENERALISEE (TROUBLE)
A. Anxiété et soucis excessifs survenant la plupart du temps durant au
moins 6 mois concernant un certain nombre d’événements ou
d’activités.
B. La personne éprouve de la difficulté à contrôler cette préoccupation.
C. L’anxiété et les soucis sont associés à trois (ou plus) des six
symptômes suivants :
(1) Agitation ou sensation d’être survolté ou à bout
(2) Fatigabilité
(3) Difficultés de concentration ou trous de mémoire
(4) Irritabilité
(5) Tension musculaire
(6) Perturbation du sommeil
D. L’objet de l’anxiété et des soucis n’est pas limité aux manifestations
d’un trouble de l’axe I.
E. L’anxiété, les soucis ou les symptômes physiques entraînent une
souffrance cliniquement significative ou une altération du
fonctionnement social, professionnel ou dans d’autres domaines
importants.
F. La perturbation n’est pas due aux effets physiologiques directs d’une
substance ou d’une affection médicale générale et ne survient pas
exclusivement au cours d’un trouble de l’humeur, d’un trouble
psychotique ou d’un trouble envahissant du développement.
106
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117
Académie d’Orléans – Tours
Université François-Rabelais
Faculté de Médecine de TOURS
WEISS Aurélie Thèse n°
115 pages – 20 tableaux – 5 figures
Résumé : Contexte : Les troubles anxieux et dépressifs chez les femmes atteintes de cancer du sein sont actuellement
sous-diagnostiqués et sous-traités. Une meilleure connaissance des facteurs précoces associés à ces troubles
permettrait un meilleur dépistage et une meilleure prise en charge pour ces patientes. Notre étude a pour but de
déterminer l’impact des troubles de la personnalité sur la survenue ultérieure des troubles anxieux (dont le
trouble anxieux généralisé) et dépressifs (épisode dépressif majeur) en fin de première phase de traitement de
cancer du sein non métastasé. Méthode : 120 patientes ont été recrutées au sein de l’étude ESPOIR (Early
Screening for Psycho-Oncological Intervention Research). Cette étude longitudinale prospective multicentrique
(CHU de Tours et Poitiers) comportait trois temps d’évaluation : au moment du diagnostic (T1), à 3 mois (T2) et
à 7 mois (T3 : fin de la première phase de traitement). Nous avons mesuré à T1 et à T3 : les variables socio-
démographiques, celles liées au cancer et au traitement, les troubles anxieux et dépressifs évalués de manière
catégorielle (MINI) et les stratégies de coping (Brief-COPE). Les troubles de personnalité ont été évalués de
manière catégorielle (VKP) à T2. Résultats : Les patientes présentant au moins un trouble de personnalité avaient significativement plus de trouble anxieux généralisé, de trouble panique et d’épisode dépressif majeur à
T3. L’absence de trouble de personnalité réduisait le risque de trouble anxieux et d’épisode dépressif majeur à
T3. Certains troubles de personnalité (paranoïaque, borderline, évitante, dépendante, obsessionnelle-compulsive
et dépressive) étaient des prédicteurs de trouble anxieux généralisé à T3, indépendamment de la présence d’un
trouble anxieux généralisé à T1. Conclusion : Cette étude souligne l’impact péjoratif des troubles de la
personnalité sur le développement ultérieur des troubles anxieux et dépressifs chez les patientes prises en charge
pour un cancer du sein. Il conviendrait de pouvoir aider les équipes soignantes dans le dépistage précoce de ces
troubles afin de mieux identifier les patientes à risque
Mots clés :
- Psycho-oncologie - cancer du sein non métastasé
- épisode dépressif majeur
- troubles anxieux, trouble anxieux généralisé
- facteurs prédictifs
- troubles de personnalité
- coping
- étude longitudinale prospective multicentrique
Jury :
Président : Monsieur le Professeur Philippe GAILLARD Membres : Monsieur le Professeur Vincent CAMUS
Monsieur le Professeur Jean-Louis SENON
Monsieur le Professeur Christian RÉVEILLÈRE
Madame le Docteur Isabelle SUZANNE
Monsieur le Docteur Paul BRUNAULT
Date de la soutenance : 1er Octobre 2012