Chapitre 5
Electrons libres, gaz de Fermi
5.1 Introduction
Reprenons le cas du sodium. Les 11 électrons sont répartis en 10 électrons qui occupent lesétats 1s2, 2s2, 2p6, et l'électron de valence dans l'état 3s1. On peut considérer un cristalde Na contenant N atomes comme formé de N électrons de conduction (les électronsde valence) et N ions positifs Na+ (formés du noyau Na et des 10 électrons 1s2, 2s2
et 2p6). Du point de vue taille, le Na+ a un rayon de 0.098 nm alors que la distance auplus proche voisin est de 0.185 nm : l'ion Na+ n'occupe que 15% de volume du cristal desodium.
On peut considérer que les N électrons de valence sont libres de bouger dans le cristal :ce sont les électrons de conduction du métal. Dans ce chapitre, nous allons considérerque ces électrons de conduction se meuvent librement dans le cristal. En fait,un électron de conduction parcourt plus de 1 cm avant une collision, ce qui représente108 à 109 distances interatomiques.
5.2 Etude du cas unidimensionnel
Soit un électron de masse m. Cet électron est conné le long d'un segment de longueur L.
Le potentiel est
V (x) =
0, 0 6 x 6 L∞, x < 0 et x > L
Nous avons vu que l'équation de Schrödinger
− ~2
2md2Ψdx2
= EΨ
1
2 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
avec les conditionsΨ(0) = Ψ(L) = 0
admet comme solution
Ψ(x) =
√2L
sin(nπxL
), n entier
E =~2π2n2
2mL2=(h2
2m
)( n2L
)2
La fonction Ψ ainsi dénie est normée.
Chaque niveau d'énergie n est occupé seulement par deux électrons de spin +1/2 et−1/2, à cause du principe d'exclusion de Pauli.
Soit N le nombre d'atomes sur la longueur L. Supposons N pair. Il y a donc N électronsde valence qui peuvent remplir les niveaux d'énergie depuis n = 1 jusqu'à n = nF tel que
2nF = N
Le niveau d'énergie EF est appelé niveau d'énergie de Fermi :
EF =(h2
2m
)(nF2L
)2
EF =(h2
2m
)(N
4L
)2
Le niveau d'énergie de Fermi dépend du nombre d'électrons par unité de longueur (N/4L).Pour un cas pratique de N/L ≈ 4 atomes/nm, on trouve EF ≈ 1 eV. Donc si on a unsystème où l'on a 4 atomes/nm, soit 4 ·109 électrons/m, pour occuper le niveau d'énergiede Fermi, les électrons doivent avoir une énergie cinétique de l'ordre de 1 eV. L'énergietotale du système E0 est :
E0 = 2N/2∑n=1
(h2
2m
)(1
2L
)2
n2
Ors∑1
n2 =16s(2s2 + 3s+ 1) ≈ 1
3s3 pour s 1
Donc
E0 ≈23
(h2
2m
)(1
2L
)2(N2
)3
=13NEF
La densité d'états D(E) est le nombre d'états occupés par unité d'énergie. Rappelonsque l'énergie E correspondant au niveau n est
E =(h2
2m
)1
4L2n2
5.2. ETUDE DU CAS UNIDIMENSIONNEL 3
dE =h2
m
n
2Ldn
2L
dn
dE=
4L2
h2
1n
dn/dE est le nombre de niveaux d'énergie par unité d'énergie. Comme il y a deux étatsquantiques par niveau d'énergie,
D(E) = 2dn
dE=
8L2m
h2
1n
D(E) =4Lh
( m2E
)1/2
La densité d'états varie donc comme E−1/2.
0E
D(E
)
← D(E) ∼ E−1/2
EF
Fig. 5.1 Variation de D(E). Tous les états sont occupés jusqu'à EF .
4 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
5.3 Extension à trois dimensions
Le cas tridimensionnel est aisément obtenu à partir des notions précédentes. L'équationde Schrödinger
− ~2
2m
(∂2
∂x2+
∂2
∂y2+
∂2
∂z2
)Ψ = EΨ
avec la condition aux limites
Ψ = 0 sur les faces du cube d'arête L
admet comme solution
Ψ(r) =
√8L3
sin(nxπx
L
)sin(nyπy
L
)sin(nzπz
L
)avec nx, ny et nz des entiers positifs.
L'énergie E vaut :
E =h2
2m
[(nx2L
)2+(ny
2L
)2+( nz
2L
)2]
5.3.1 Conditions périodiques
En physique du solide, il est souvent utile d'introduire des conditions aux bords pério-diques. Dans notre cas, nous supposons que le système est périodique de période L :
Ψ(x+ L, y, z) = Ψ(x, y, z)
et de même pour y et z.
La fonction d'onde Ψ est donc
Ψk(r) =(
1V
)1/2
expik · r, V = L3
avec kx = 0, ±2πL , ±4π
L , ±6πL , . . . , et de même pour ky et kz.
On vérie immédiatement la condition de périodicité :
Ψ(x+ L, y, z) =(
1V
)1/2
expikx(x+ L) expi(kyy + kzz)
=(
1V
)1/2
expi(kxx+ kyy + kzz) expikxL
Or
expikxL = expin2πL
L
= 1
5.3. EXTENSION À TROIS DIMENSIONS 5
DoncΨ(x+ L, y, z) = Ψ(x, y, z)
La formulation précédente nous permet d'introduire le vecteur d'onde k.
k = (kx, ky, kz)
L'énergie est donc
E =~2
2mk2
et l'impulsion p estp = ~k = mv
Dans l'espace des k, chaque état est caractérisé par un vecteur k = (kx, ky, kz). Le volumeoccupé par un état est (2π/L)3. Si on dénote par kF le vecteur d'onde correspondant àla sphère de Fermi, on a donc :
2× nombre d'états dans la sphère de Fermi = nombre d'électrons de valence dans V
243πk
3F
(2π/L)3=
V
3π2k3F = N
kF =(
3π2N
V
)1/3
L'énergie de Fermi est donc :
EF =~2
2m
(3π2N
V
)2/3
On dénit la vitesse de Fermi vF à partir de ~kF = mvF .
vF =~kFm
=~m
(3π2N
V
)1/3
(~/m = 1.16 cm2s−1).
Le tableau 5.1 donne les valeurs1 des grandeurs précédentes pour quelques métaux (oùkB = constante de Boltzmann = 1.381 · 10−23 J/K). Notez la faible valeur de la vitessede Fermi par rapport à la vitesse de la lumière.
1Extraites de Introduction to solid state physics, Charles Kittel.
6 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Métal N/V [cm−3] kF [cm−1] vF [cm/s] EF [eV] TF = EF /kB [K]
Li 4.6 · 1022 1.1 · 108 1.3 · 108 4.7 5.5 · 104
Na 2.5 · 1022 0.9 · 108 1.1 · 108 3.1 3.7 · 104
Cu 8.5 · 1022 1.35 · 108 1.56 · 108 7 8.2 · 104
Ag 5.76 · 1022 1.19 · 108 1.38 · 108 5.5 6.4 · 104
Au 5.9 · 1022 1.2 · 108 1.39 · 108 5.5 6.4 · 104
Tab. 5.1 N/V , kF , vF , EF et TF pour quelques métaux
5.3.2 Densité d'états D(E)
La densité d'états D(E) est le nombre d'états par unité d'énergie.
D(E)dE = 2Volume entre E et E + dE
Volume par état
= 2Volume entre E et E + dE
(2π)3/V
Le facteur 2 provient des deux états de spin. Le numérateur vaut∫dSE
dE
‖∇kE‖
avec dSE l'élément de surface correspondant au volume relatif à l'énergie E. Et donc
D(E)dE =2V
(2π)3dE
∫dSE‖∇kE‖
D(E) =2V
(2π)3
∫dSE‖∇kE‖
D(E) =V
2π2
(2m~2
)3/2
E1/2
A trois dimensions, D(E) est proportionnel à√E (voir gure 5.2).
5.4. TEMPÉRATURE NON NULLE 7
0E
D(E
)
D(E) ∼ E1/2
EF
Fig. 5.2 A T = 0 K, tous les états jusqu'à EF sont remplis.
5.4 Température non nulle
5.4.1 Notion de température
Jusqu'à maintenant, nous avons considéré l'état fondamental du système de N électronsde valence. Nous avons rempli les niveaux d'énergie depuis le niveau le plus bas jusqu'auniveau de Fermi. Du point de vue de la mécanique statistique, cet état est celui quicorrespond à la température nulle.
Mais qu'entend-on par température ? C'est une notion liée à la distribution aléatoiredes vitesses autour d'une vitesse moyenne.
Dans le cas de l'état fondamental, chaque paire d'électrons de spin +1/2 et −1/2 al'énergie
E =~2k2
2met une vitesse
v =~km
= v0
Sans agitation thermique, la distribution des vitesses est une distribution de Dirac, c'est-à-dire δ(v − v0). Ceci correspond au graphique de droite de la gure 5.3.
8 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
T = 0
Distributiondes vitesses
v = v0
T = 0
v
Distributiondes vitesses
vvitesse = v0vitesse moyenne = 0
Fig. 5.3 Distribution des vitesses
Si on introduit une température, l'énergie cinétique des électrons augmente. Certainsétats peuvent alors être occupés alors que d'autres seront dépeuplés.
Ce fait se passe autour de l'énergie de Fermi. Pourquoi ? Comparons kBT (énergie ther-mique) à l'énergie de Fermi. Pour T ∼ 300 K (température ambiante), kBT vaut environ0.03 eV. L'énergie de Fermi est d'environ 5 eV. Donc
kBT EF
Pour les états d'énergie qui ne sont pas proches de EF , l'agitation thermique ne pourrapas les amener à peupler les états vides au delà de EF . Seuls les états dans le voisinage deEF (|E − EF | ∼ kBT ) peuvent être aectés (voir gure 5.4 pour le cas unidimensionnel).
Etats d’énergie kBT
EEF
Etats d’énergie peuplés à T = 0
Fig. 5.4 En gris : états peuplés à T = 0. La forme de la densité d'états change autourde EF pour T 6= 0.
5.4. TEMPÉRATURE NON NULLE 9
5.4.2 Distribution de Fermi-Dirac
A température nulle, tous les niveaux d'énergie jusqu'à l'énergie de Fermi sont occupés. Simaintenant la température n'est pas nulle, il nous faut introduire la notion de probabilitéd'occupation d'un niveau d'énergie donné. Cette probabilité est donnée par la fonctionde distribution de Fermi-Dirac :
f(E) =1
expE − µkBT
+ 1
La quantité µ, appelée potentiel chimique, est fonction de la température. Pour lesmétaux à température ambiante, µ ≈ EF . Si T = 0, µ est exactement égal à EF et f(E)vaut :
f(E, T = 0) =
1, E 6 EF0, E > EF
Plus généralement, µ est choisi pour que le nombre total d'électrons soit égal à N .
5.4.3 Chaleur spécique d'un ensemble d'électrons libres
La chaleur spécique C est dénie par
C =∂E
∂T= variation de l'énergie du système par rapport à la température
Nous avons noté la dérivée avec une dérivée partielle, car dans les systèmes, on peutgarder des quantités du système constantes. Il nous faut donc calculer l'énergie E dusystème de N électrons.
D(E)kBT
EEF
Fig. 5.5 La forme de la D(E) change autour de EF pour T 6= 0 par rapport à T = 0.
10 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Elle se compose de deux termes :
• la contribution pour E > EF pour amener les électrons à une énergie supérieure à EF ,• la contribution pour E < EF pour amener les électrons à EF .
E =∫ E
EF
dE(E − EF )f(E)D(E) +∫ EF
0dE(EF − E)(1− f(E))D(E)
Le terme (1 − f(E)) dans la deuxième intégrale donne la probabilité qu'un électron aitété enlevé de l'état d'énergie E < EF .
E =∫ ∞
0dE(E − EF )f(E, T )D(E) +
∫ EF
0dE(EF − E)D(E)
La chaleur spécique est alors :
C =∂E
∂T=∫ ∞
0dE(E − EF )
∂f(E, T )∂T
D(E)
avec
f(E) =1
expE − EFkBT
+ 1
car µ ≈ EF pour les températures considérées.
D(E) =V
2π2
(2m~2
)3/2
E1/2
EF =~2
2m
(3π2N
V
)2/3
Comme nous l'avons remarqué, c'est autour de EF que les eets dus à T sont importants.Il sut alors de prendre
D(E) ≈ D(EF )
C ≈ D(EF )∫ ∞
0dE(E − EF )
∂f
∂T
Après quelques calculs (voir Kittel), on trouve :
C =π2
2NkB
kBT
EF
En écrivant EF = kBTF , on a :
C =π2
2NkB
T
TF
5.4. TEMPÉRATURE NON NULLE 11
Il est plus commode d'exprimer la chaleur spécique par mole. En supposant qu'il n'y aqu'un seul électron de conduction par atome,
Cmole =π2
2NAk
2BT
EF
=πk2
BNAm
~2(3π2N/V )2/3T
où NA = 6.023 · 1023 atomes/mole est le nombre d'Avogadro.
Résultats expérimentaux
La chaleur spécique se compose de deux contributions :• celle des électrons proportionnelle à T ,• celle du réseau cristallin proportionnelle à T 3.
C = γT +AT 3
Un graphique de C/T en fonction de T 2 est donné dans la gure 5.6.
C/T
T20
γ
Fig. 5.6 C/T en fonction de T 2
Par exemple, pour le cas du potassium pour T 2 jusqu'à 0.3 K2, c'est-à-dire T = 0.5 K,nous avons (voir Kittel) :
C
T= 2.08 + 2.57T 2
où C est exprimé par mole. Notons deux faits :• Remarquez le domaine de température des mesures : T < 0.5 K, c'est-à-dire unevaleur très proche du zéro absolu. Ce n'est que pour des très faibles températures quela chaleur spécique des électrons est importante. Au delà, c'est la chaleur spéciquedu réseau qui domine.• L'accord entre la théorie et l'expérience n'est malheureusement pas bon :
γexpγth
=γexp(
πk2BNAm
~2(3π2N/V )2/3
) = 1.25 (Na)
= 1.26 (Rb)
= 1.43 (Cs)
12 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
5.4.4 Conductibilité électrique
Considérons un métal décrit par un gaz d'électrons libres. A l'équilibre, les électronsremplissent la sphère de Fermi centrée en k = 0.
Rappelons que l'impulsion p de l'électron est liée à k par p = ~k.
Mettons un champ électrique E uniforme et statique dans le métal. Sous l'action de E,les électrons ressentent la force F = −eE.
dp
dt= ~
dk
dt= −eE = F
Après un temps δt, le centre de la sphère de Fermi est déplacé de δk.
δk =Fδt
~
Bien que les collisions des électrons dans le métal soient rares, elles existent. En moyenne,les électrons font une collision toutes les τ secondes (τ est de l'ordre de 2 · 10−14 s pourdu Cu à température ambiante). Donc, après ce temps τ , δk vaut :
δk =Fτ
~
A l'état stationnaire, la sphère de Fermi est déplacée de δk = Fτ/~ (gure 5.7).
Sphère de Fermi
kx
ky
E = 0 E
δk kx
ky
Fig. 5.7 La sphère de Fermi déplacée de δk sous l'action de E englobe de nouveauxétats, marqués par un point plus grand.
5.5. THÉORIE DES BANDES 13
Les électrons ont acquis une vitesse supplémentaire δv :
δv =~δkm
=Fτ
m= −eEτ
m
Si on a une densité n = N/V d'électrons de conduction par unité de volume, nous avonsalors une densité de courant j :
j = −neδv =ne2τ
mE
On dénit la conductibilité électrique σ par
j = σE
Donc
σ =ne2τ
m
5.5 Théorie des bandes
Jusqu'à maintenant, nous avons supposé que les électrons de valence ne ressentent aucunpotentiel dû au réseau des ions. Dans la réalité, il existe un potentiel autour des ions,comme le montre la gure 5.8 pour le cas unidimensionnel.
Potentiel iona
Fig. 5.8 Potentiel périodique créé par les ions
Les électrons ressentent ainsi un potentiel périodique, de période égale à la maille. Lerésultat de leur interaction avec ce potentiel périodique est l'apparition de bandes
d'énergie, représentées dans la gure 5.9.
Cette section nous permettra de comprendre pourquoi il existe de telles bandes permises(où nous trouvons des électrons) et interdites (où il n'y a pas d'électrons).
Pour simplier les calculs, nous considérons le cas unidimensionnel.
14 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Bande permise
Bande interdite
Bande permise
Electrons libres
EF
Electrons dans un potentiel périodique
E
0
Fig. 5.9 Bandes d'énergie des électrons dans un potentiel périodique
Rappel
Soit un réseau à une dimension, de période a. C'est le réseau direct.
ion a
x
Fig. 5.10 Réseau direct
Nous dénissons le réseau réciproque (pour le vecteur d'onde k).
Le vecteur unitaire dans l'espace réciproque est G1 = 2π/a. La zone [−G1/2, G1/2] estappelée première zone de Brillouin. Sur la gure 5.11, nous avons également dessinél'énergie des électrons libres, proportionnelle à ~2k2/2m.
Dans le réseau direct, les ions sont repérés par
x = na, n entier positif ou négatif
Dans le réseau réciproque, les points du réseau sont :
G = mG1, m entier positif ou négatif
G1 =2πa
5.5. THÉORIE DES BANDES 15
-4πa
Première zone de Brillouin
k4πa
2πa
-2πa
G12
-G12 = G1
E (pour des électrons libres)
0
Fig. 5.11 Energie dans l'espace réciproque, et première zone de Brillouin
5.5.1 Equation de Schrödinger
Nous considérons maintenant que les électrons ressentent l'eet d'un potentiel pério-dique V (x). L'équation de Schrödinger est[
− ~2
2md2
dx2+ V (x)
]Ψ(x) = EΨ(x)
avec V (x+ a) = V (x).
Nous avons la décomposition
V (x) =∑G
V (G) expiGx
avec G déni précédemment. En eet,
V (x+ a) =∑G
V (G) expiG(x+ a) =∑G
V (G) expiGx = V (x)
L'équation de Schrödinger se ramène à
− ~2
2md2Ψdx2
+∑G
V (G) expiGxΨ = EΨ
16 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Nous développons maintenant Ψ(x) en série de Fourier :
Ψ(x) =∑K
Ψ(K) expiKx
Notons que nous n'avons pas imposé, pour Ψ(x), la périodicité sur x. Transformonsmaintenant l'équation de Schrödinger :
− ~2
2md2Ψdx2
=~2
2m
∑K
K2Ψ(K) expiKx
V (x)Ψ(x) =∑K′
∑G
V (G)Ψ(K ′) expi(G+K ′)x
Posons K = K ′ +G. La dernière expression devient∑K
∑G
V (G)Ψ(K −G) expiKx
L'équation de Schrödinger devient
∑K
(~2
2mK2Ψ(K) +
∑G
V (G)Ψ(K −G)
)expiKx = E
∑K
Ψ(K) expiKx
Cette équation est valable quel que soit K. Donc :
(~2K2
2m− E
)Ψ(K) +
∑G
V (G)Ψ(K −G) = 0
C'est, en fait, un ensemble inni d'équations algébriques couplées qui remplacent l'équa-tion diérentielle de Schrödinger. En pratique, on peut approximer ce système inni enne gardant qu'un nombre ni de termes (2 termes !).
5.5.2 Comportement aux bornes de la première zone de Brillouin
Les bornes de la première zone de Brillouin sont dénies par
|K| = π
a=G1
2ou
(K −G1)2 = K2
5.5. THÉORIE DES BANDES 17
et~2
2mK2 =
~2
2m(K −G1)2
Dans le système d'équations précédent, nous ne garderons que deux termes, ceuxselon Ψ(K) et Ψ(K −G1).
(~2
2mK2 − E
)Ψ(K) + V (G1)Ψ(K −G1) = 0
(~2
2m(K −G1)2 − E
)Ψ(K −G1) + V (−G1)Ψ(K) = 0
Nous supposons que V est une fonction paire, de sorte que
V (G1) = V (−G1) = V1
Posons~2
2mK2 = EK et
~2
2m(K −G1)2 = EK−G1
Donc (EK − E) Ψ(K) + V1Ψ(K −G1) = 0
(EK−G1 − E) Ψ(K −G1) + V1Ψ(K) = 0
C'est un système de deux équations linéaires homogènes pour Ψ(K) et Ψ(K−G1). Pouréviter la solution triviale Ψ(K) = 0 et Ψ(K − G1) = 0, il faut que le déterminant descoecients soit nul.
∣∣∣∣∣∣EK − E V1
V1 EK−G1 − E
∣∣∣∣∣∣ = 0
E2 − E(EK + EK−G1) + EKEK−G1 − V 21 = 0
Soit
E =12
(EK + EK−G1)±√
14
(EK−G1 − EK)2 + V 21
Pour K = G1/2, nous avons vu que EK = EK−G1 = E1, et les deux racines sont :
E+ = E1 + V1
E− = E1 − V1
18 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
A la limite de la première zone de Brillouin, les deux racines sont séparées par une bandede largeur 2V1.
La gure 5.12 donne E pour K ∈ [0, π/a[. La bande autorisée 1 est séparée de la bandeautorisée 2 par une bande interdite de largeur 2V1. La bande autorisée existe jusqu'àK = G1, où nous allons de nouveau rencontrer une bande interdite.
Bande autorisée 1
k2πaG1
2G1 =
E
0
Bande autorisée 2
Bande interditeh2k22mParabole
2V1~
πa=
Fig. 5.12 Variation de E pour K allant de 0 à π/a.
5.5.3 Fonction d'onde à la limite de la première zone de Brillouin
Pour E = E1 + V1, nous avons :
Ψ(K) = Ψ(K −G1) = Ψ(−K) car K =12G1
Pour E = E1 − V1, nous avons :
Ψ(K) = −Ψ(−K)
La fonction d'onde est donc respectivement
Ψ+(x) ∝(
expiG1x
2
+ exp
−iG1x
2
)et
Ψ−(x) ∝(
expiG1x
2
− exp
−iG1x
2
)Les fonctions d'onde sont des ondes stationnaires en cos(G1x/2) ou sin(G1x/2).
5.5. THÉORIE DES BANDES 19
Potentiel dû aux ions
ion
||Ψ-||2||Ψ+||2
Fig. 5.13 Fonctions d'onde Ψ+ et Ψ−
Sur la gure 5.13, nous représentons le réseau avec les ions et le potentiel dû aux ions(V1 < 0). La fonction d'onde Ψ+ correspond à une situation où les électrons ont uneprobabilité plus grande de se mettre aux n÷uds du réseau, et diminue ainsi l'énergiepotentielle du système. Le raisonnement est inverse pour Ψ−.
5.5.4 Nombre d'état
Soit un cristal ayant N cellules primitives. Sa longueur est L = Na. Les vecteurs d'ondeK permis sont :
K = 0,±2πL,±4π
L, . . . ,
Nπ
L=π
a
Le vecteur K = −π/a est identique à celui de π/a.
Il y a donc N états d'énergie par bande. Ce nombre devient 2N en tenant compte desspins.
Si le cristal a un atome par cellule primitive et que cet atome a un seul électron devalence, alors la bande est à moitié pleine. Si l'atome a deux électrons de valence, labande est complètement remplie. Il en est de même si la cellule primitive possède deuxatomes ayant chacun un seul électron de valence.
5.5.5 Bandes et niveaux d'énergie des atomes
Considérons un système de N atomes séparés (c'est-à-dire dont les distances respectivessont grandes). Chaque atome possède des niveaux d'énergie déterminés par la résolu-tion de l'équation de Schrödinger. Les atomes étant séparés, ces niveaux d'énergie sontidentiques pour les N atomes : on dit que ces niveaux d'énergie sont N fois dégénérés.
20 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Distance entre les atomes
E
Bande
N fois dégénéré
N fois dégénéré
N fois dégénéré
Bande
Ban
des
inte
rdite
s
Fig. 5.14 Niveaux dégénérés
Nous voyons ainsi qu'il y a une bande de N états correspondant à chaque niveau d'énergieatomique. On peut donc appeler les bandes par le nom de l'état atomique, par exemplela bande 3s, la bande 3p, etc.
5.6 Propriétés électriques des corps
Lorsque l'on applique une diérence de potentiel électrique entre deux points d'un corps,un courant électrique peut circuler entre ces points. On distingue :
• les conducteurs électriques. Ces corps peuvent porter un courant électrique appré-ciable. La résistivité électrique augmente avec la température du corps.• les semi-conducteurs. La résistivité électrique des semi-conducteurs est plus élevéeque celle des conducteurs. Elle diminue lorsque la température augmente (contraire-ment à celle des conducteurs).• les isolants, qui ne conduisent pas d'électricité.
Bien que nous ne discutions pas de la supraconductivité, nous donnons ici les propriétésdes supraconducteurs :
• Au dessous d'une certaine température (appelée température critique Tc), la résistivitéélectrique du supraconducteur tombe à 0 (gure 5.15). C'est eectivement la valeur 0et non une approximation.
Température
Résistivité électrique
Tc0
Fig. 5.15 Résistivité d'un supraconducteur
5.6. PROPRIÉTÉS ÉLECTRIQUES DES CORPS 21
• Les supraconducteurs exhibent l'eet Meissner. Considérons un supraconducteur im-mergé dans un champ magnétique à une température T > Tc. Le champ magnétiquepénètre le corps. Lorsque l'on refroidit le supraconducteur en dessous de Tc, le champmagnétique est expulsé du supraconducteur (gure 5.16).
T > Tc T < Tc
Fig. 5.16 Eet Meissner
La question que nous posons est la suivante : pouvons-nous expliquer les propriétés desconducteurs, des semi-conducteurs et des isolants à partir de la théorie des bandes quenous venons de développer ?
Rappelons les points essentiels de la théorie :
• Les électrons sont distribués en bandes d'énergie permises séparées par des bandesinterdites.• En prenant tous les électrons disponibles, on peut remplir ces bandes jusqu'à uneénergie maximale appelée énergie de Fermi.
Schématiquement, nous avons deux cas, présentés dans la gure 5.17 :
• l'énergie de Fermi est au sommet d'une bande d'énergie permise : cas (a),• l'énergie de Fermi est à l'intérieur d'une bande d'énergie permise : cas (b).
(a)
Bande de valence
Energie de Fermi
Eg
(b)
Energie de Fermi
Fig. 5.17 Energie de Fermi : deux cas possibles
22 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Le cas (a) peut se subdiviser en deux cas, selon la largeur de la bande interdite Eg : Eggrande ou Eg faible. Nous préciserons plus tard ce que signie "grande" ou "faible".
Que se passe-t-il lorsque l'on essaie de faire passer un courant électrique ? L'énergiecinétique d'un électron quelconque doit augmenter. Pour ce faire, il doit se mettre dansun état d'énergie plus élevé et vacant dans la bande (naturellement, nous supposons quele champ électrique ne modie pas la structure de bandes que nous avons calculée sanstenir compte de sa présence).
5.6.1 Isolant
Considérons le cas (a) de la gure 5.17 : l'énergie de Fermi se trouve au sommet d'unebande autorisée. Comme il ne reste plus aucun état d'énergie vacant dans la bande, lecorps ne peut pas conduire l'électricité et est donc un isolant.
La question que vous posez immédiatement est la suivante : l'agitation thermique peut-elle amener un électron dans la bande d'énergie supérieure, qui, elle, est vide ? Ceci nousamène à comparer Eg (exprimée en eV) à kBT (énergie thermique, aussi exprimée en eV).
Pour un bon isolant, Eg est de l'ordre de 5 eV (5.5 eV pour le diamant). 1 eV correspondà une température de l'ordre de 104 K. L'énergie Eg excède de plus de 500 fois l'énergiethermique d'un électron : la probabilité de faire passer un électron à la bande supérieureest donc négligeable.
5.6.2 Conducteur
Considérons le cas (b) de la gure 5.17, où le niveau d'énergie de Fermi se trouve aumilieu d'une bande. Dans cette situation, lorsque l'on applique un potentiel, un courantpeut circuler, car il existe de nombreux niveaux d'énergie vacants où les électrons peuventse placer.
k
E
Energie
Fig. 5.18 Sous l'action du champ E (dirigé de droite à gauche), il y a des états excitéspour k > 0.
5.7. SEMI-CONDUCTEUR 23
5.7 Semi-conducteur
5.7.1 Semi-conducteur intrinsèque
Reprenons le cas (a) de la gure 5.17, mais avec une faible valeur de Eg. Pour le Si, Egvaut 1.1 eV (à comparer avec Eg = 5.5 eV pour le diamant).
Bande de valence pleine
Eg
Bande de conduction vide
Comme Eg n'est que de l'ordre de 100 fois l'énergie thermique kBT , il y a une possibilitéréelle pour que des électrons passent de la bande de valence à la bande de conduction.Le tableau 5.2 donne la valeur de Eg pour quelques matériaux. Ce processus, où lesélectrons sont transférés dans la bande de conduction, donne lieu à des semi-conducteursintrinsèques.
Matériau Si Ge InAs InSb
Eg [eV] 1.14 0.67 0.33 0.23
Tab. 5.2 Eg pour quelques matériaux
Mise en évidence de l'énergie de la bande interdite
Notons que, dans la bande de longueur d'onde visible (λ = 400− 700 nm), l'énergie d'unphoton varie entre 3.2 et 1.8 eV. Ceci correspond à la valeur Eg de la bande interdite. Ilest donc possible de déplacer les électrons de la bande de valence à la bande de conductionpar absorption d'un photon.
k
Energie
hω
Bande de valence
Bande de conduction
Fig. 5.19 Absorption d'un photon, kphoton ∼ 0
24 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Porteurs de charges dans un semi-conducteur intrinsèque
Lorsqu'un électron passe de la bande de valence à la bande de conduction, il laisse, dansla bande de valence, un "trou", qui correspond à une charge +e. Le courant dans unsemi-conducteur est porté par• les électrons dans la bande de conduction,• les trous dans la bande de valence.
E
j+
e-j-
+eve+
ve-
Fig. 5.20 Courants j− et j+ dus aux électrons et aux trous
j− = −ne−eve−
j+ = ne+eve+
Et donc j+ et j− ont la même direction. jtot = j+ + j−.
Comment comprenons-nous ceci dans la théorie des bandes ? Pour les électrons, la situa-tion est simple. Dans la bande de conduction, le petit nombre d'électrons qui y sont neremplit pas la bande. Il y a donc la possibilité d'avoir une conduction électrique.
Qu'en est-il des trous dans la bande de valence ? On peut considérer que pour les trous,la bande de valence est occupée par les trous seulement, sans les électrons. Ceci permetaux trous de porter le courant. En résumé, dans les semi-conducteurs intrinsèques, laconduction électrique est causée par les électrons et les trous.
Etudions la situation un peu plus en détail. Sous l'eet de la température, un petitnombre d'électrons ont passé de la bande de valence à la bande de conduction.
électrons
Bande de valence
Bande de conduction
Egtrous laissés dans la bande de valence
5.7. SEMI-CONDUCTEUR 25
Avant de pousser plus loin l'analyse, on possède l'explication de deux observations :• La résistivité des semi-conducteurs qui est plus grande que celle des conducteurs. Eneet, il y a peu de charges disponibles pour le transport du courant : seules les chargesqui ont été transférées dans la bande de conduction transportent le courant. Le nombrede charges dans un semi-conducteur intrinsèque est de 1016 m−3, à comparer à 1029 m−3
dans un métal.• la diminution de la résistivité avec l'accroissement de la température (à la diérencedes conducteurs). A T = 0 K, aucun électron ne passe de la bande de valence à labande de conduction. Le semi-conducteur est isolant. Plus la température augmente,plus le nombre d'électrons passant de la bande de valence à la bande de conductionaugmente : ce fait diminue la résistivité.
5.7.2 Semi-conducteur dopé de type n
Nous avons mentionné que la densité de charge d'un semi-conducteur intrinsèque estassez faible (1016 m−3) par rapport à celle d'un conducteur (9 · 1028 m−3). On peut yremédier en dopant le semi-conducteur intrinsèque, c'est-à-dire en remplaçant environ unatome sur 107 par un autre.
Considérons, pour xer les idées, du Si. Le Si a la structure 1s2, 2s2, 2p6, 3s2, 3p2. Lacouche de valence a donc 4 électrons. Schématiquement, nous avons la situation suivante :
Si e- Si Si
Si Si Si
Si Si Si
e- e- e-
e- e- e- e-
e- e- e- e-
e-
e-
e-
e-
e-
e-
e-
e-
e-
e-
e-
e-
Fig. 5.21 Structure du Si
Chaque atome de Si partage un des électrons de valence avec ses 4 plus proches voisins,formant un lien covalent de deux électrons. Remplaçons un des atomes de Si par duphosphore P. Le phosphore a une valence de 5. Quatre des électrons de valence du Pjouent le même rôle que les 4 électrons de valence du Si. Le 5e est faiblement lié au P.La structure de bande est celle de la gure 5.22.
26 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Bande de valence
Bande de conduction
Eg
ED
Fig. 5.22 Structure de bande du Si dopé au P
Le niveau d'énergie ED du 5e électron du P est très proche du bas du niveau de la bandede conduction, et ED Eg. ED est de l'ordre de 0.05 eV, et est donc comparable àl'énergie thermique à température ambiante. Les électrons du P peuvent donc être excitésthermiquement dans la bande de conduction. On a donc beaucoup plus d'électrons dansla bande de conduction :
Bande de valence
Bande de conduction
Eg
ED
Un atome comme le P est appelé donneur, car il donne un électron au semi-conducteur.Le semi-conducteur ainsi dopé est appelé semi-conducteur de type n (n pour négatif).Dans un semi-conducteur de type n, les porteurs de charge majoritaires sont des
électrons (apportés par le donneur), et les porteurs de charge minoritaires sont
les trous. Le semi-conducteur dopé est bien sûr neutre.
5.7.3 Semi-conducteur dopé de type p
Remplaçons maintenant un atome de Si par un atome d'Al, dont la valence n'est quede 3. Il manque donc un électron pour former les 4 liaisons de valence. Un électron d'une
5.7. SEMI-CONDUCTEUR 27
liaison Si-Si voisine se libère pour combler le trou dans la liaison Al-Si. Mais maintenant,il s'est formé un trou dans la liaison Si-Si, trou comblé par un électron d'une secondeliaison Si-Si. Il se forme ainsi une migration des trous. Les niveaux d'énergie sont alors :
Bande de valence
Bande de conduction
Eg
ED
Fig. 5.23 Structure de bande du Si dopé à l'Al
La valeur de ED est à nouveau relativement faible (∼ 0.067 eV) comparée à Eg (∼ 1.2 eV),ce qui permet aux électrons des liaisons Si-Si de combler le trou de la liaison Si-Al et delaisser un trou dans la bande de valence.
L'Al est appelé receveur, car il reçoit un électron. Les semi-conducteurs ainsi dopés sontappelés semi-conducteurs de type p, car les porteurs de charges majoritaires sont destrous.
5.7.4 La jonction p-n
Mettons côte à côte deux semi-conducteurs dopés, un de type n et l'autre de type p :
p n
Il faut discuter du mouvement des porteurs de charge majoritaires (les électrons, res-pectivement les trous, dans le semi-conducteur de type n, respectivement de type p),et des porteurs de charge minoritaires (les trous, respectivement les électrons, dans lessemi-conducteurs de type n, respectivement de type p).
Mouvement des charges majoritaires
Les électrons de la région n vont diuser à travers la surface de séparation vers la région pqui possède moins de charges négatives. Inversement, les trous de la région p diusent
28 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
vers la région n qui possède moins de charges positives. Il se crée ainsi un courant de
diusion Idiff dirigé (conventionnellement) de la région p vers la région n.
Les électrons de la région n, lorsqu'ils arrivent dans la région p, se combinent avec lesatomes receveurs (Al dans notre cas) qui manquent chacun d'un électron. Cette zone (àl'origine neutre) devient maintenant négative, car elle a une charge d'espace négative. Demême, les trous migrant vers la région n créent une charge d'espace positive rendant lazone positive (gure 5.24).
Potentiel
Idiff
x
np+-+++++
-----
Idrift
V0
Fig. 5.24 Jonction p-n : potentiel
Il se crée donc, autour de la jonction, une zone appelée zone de déplétion. Cette zoneest appelée ainsi car elle ne possède pas de charge libre : les trous de la région p sontcompensés par les électrons venant de la région n, et inversement. Dans cette zone, àcause de la charge d'espace, il existe un potentiel V0/2 négatif dans la région p et positifdans la région n.
Mouvement des charges minoritaires
Rappelons que dans un semi-conducteur de type n (respectivement de type p) les chargesminoritaires sont des trous (respectivement des électrons). Les trous de la région n voientun potentiel négatif dans la zone de déplétion. Pour les électrons de la région p, lazone de déplétion apparaît élgalement comme un potentiel attractif. Les deux porteursminoritaires sont donc accélérés et créent ainsi un courant Idrift dirigé (convention-
nellement) de la région n vers la région p.
A l'équilibre, nous avonsIdiff = Idrift
de sorte que le courant total est nul.
5.7. SEMI-CONDUCTEUR 29
5.7.5 La diode p-n
Jusqu'à maintenant, nous avons considéré deux semi-conducteurs p et n mis côte à côte.Connectons ce système à une alimentation. On a deux montages possibles (gure 5.25).
np
+ -
(a) Polarisation "forward"
np
+-
(b) Polarisation "reverse"
Fig. 5.25 Polarisations possibles avec une jonction p-n connectée à une alimentaion
a) Polarisation "forward"
Faisons le montage de la gure 5.26 pour mesurer le courant I en fonction de la tension Vaux bornes de l'alimentation.
np
+ -
V
AI(sens conventionnel)
Fig. 5.26 Montage en polarisation "forward"
La caractéristique I = I(V ), appelée caractéristique I-V, a l'allure suivante :
V [V]
I [mA]
10
20
0 0.2 0.6 1
Fig. 5.27 Caractéristique I-V
30 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Au-delà d'une certaine tension (0.3 V pour le Ge, 0.6 V pour le Si), le courant circule.
Rappelons qu'avant l'application de la tension, il existait une tension négative du côté pde la zone de déplétion et positive du côté n. Avec une polarisation "forward", le côté p(respectivement n) devient plus positif (respectivement négatif) : la valeur de la diérencede potentiel V0 à travers la zone de déplétion diminue. Si V0 est plus faible, les chargesdes deux côtés de la jonction peuvent diuser plus facilement et donnent lieu à uneaugmentation du courant de diusion Idiff .
Le courant de dérive Idrift n'est pas changé par la diminution de V0. En eet, les chargescontribuant à Idrift sont accélérées par le potentiel dans la zone de déplétion et le courantn'est donc pas aecté par la profondeur du trou de potentiel.
Remarque : Ne tombez pas dans l'erreur de dire : "les charges sont accélérées par le po-tentiel, donc la vitesse augmente et le courant, qui est proportionnel à v, doit augmenter".N'oubliez pas que dans un écoulement, vous avez l'équation de continuité
∂n
∂t+∇ · j = 0
A une dimension et à l'état stationnaire, ∂∂t = 0 et l'équation de continuité se réduit à
dj
dz= 0⇔ j = cte⇒ I = cte
Revenons à la polarisation "forward". Nous avons donc la situation suivante :
• Potentiel appliqué = 0 VIdriftIdiff
I = Idrift + Idiff = 0
• Potentiel appliqué & 0.5 V
IdriftIdiffI
I = Idrift + Idiff 6= 0
Le courant total I = Idrift + Idiff est maintenant non nul et important.
b) Polarisation "reverse"
Dans cette situation, le potentiel V0 est augmenté. Le courant de diusion Idiff est baisséet le courant de dérive Idrift reste inchangé. Il reste alors un petit courant inverse (del'ordre de quelques µA pour du Ge et du pA pour du Si).
5.8. COMPOSANTS À SEMI-CONDUCTEURS 31
5.8 Composants à semi-conducteurs
5.8.1 Diode
Un ensemble (p-n) ainsi décrit est appelé diode et est symbolisé par avec la ècheindiquant le sens du courant conventionnel.
Exemple de calcul de circuit avec une diode
+ -
A
I
R
5 V
Fig. 5.28 Circuit avec une diode
L'alimentation est de 5 V et le courant I est de 10 mA, mesuré par l'ampèremètre. Lacaractéristique I-V de la diode est celle du cas a), en particulier la tension est de 0.65 Và 10 mA. La valeur de la résistance R est donc :
RI = 5 V − 0.65 V = 4.35 V
R =4.35 V
10−2 A= 435 Ω
Diode en tant que circuit redresseur
Vin Vout~
t
Vin
t
Vout
32 CHAPITRE 5. ELECTRONS LIBRES, GAZ DE FERMI
Lorsque Vin est positif, la diode conduit et Vout reproduit la forme de Vin. Lorsque Vin estnégatif, la diode est bloquée et Vout est nul. Nous avons Vout durant une demi-alternanceseulement.
Dans les chargeurs de vos téléphones mobiles ou de vos ordinateurs, le circuit redresseurest le suivant :
R
220 V
D2
D1
VoutC
T
Le transformateur T baisse la tension de 220 V à la valeur d'environ une dizaine de voltsnécessaire pour charger votre accumulateur (3.6 V pour les téléphones). Les deux diodesD1 et D2 sont arrangées de façon à ce que D1 conduise pendant l'alternance positive, etD2 pendant la négative. Sans le condensateur C, la tension Vout serait :
t
V’out sans C
Le condensateur C "lisse" V ′out :
t
Vout
5.8. COMPOSANTS À SEMI-CONDUCTEURS 33
5.8.2 Diode émettrice de lumière (Light Emiting Diode : LED)
Si un électron de la bande de conduction se recombine avec un trou de la bande devalence, il y a émission de lumière de fréquence ω telle que
~ω = Eg = énergie de la bande interdite
Dans les deux cas d'un semi-conducteur nsèque ou dopé, il n'y a pas assez d'électronsdans la bande de conduction pour que ce processus puisse être utilisé. Il faut utiliser dessemi-conducteurs fortement dopés en donneurs et receveurs.
5.8.3 Transistor
Un transistor est formé d'une couche de semi-conducteur d'un type (par exemple n) prisen sandwich entre deux semi-conducteurs de type opposé (par exemple p). On ainsi destransistors pnp ou npn. Dans un transistor npn les porteurs de charges sont les électrons,et dans un transistor pnp ce sont les trous.
n
n
p
Collecteur
Emetteur
Base Base
Collecteur
Emetteur
(a) Transistor NPN
p
p
n
Collecteur
Emetteur
Base Base
Collecteur
Emetteur
(b) Transistor PNP
Fig. 5.29 Types de transistors
Un circuit typique d'un transistor est le suivant :
C
RB
Vout
~Vin
+-
VBE
VCE
B
E
VBE +-
VCE
IC
RC
Fig. 5.30 Circuit avec un transistor
On applique une tension VBE entre la base et l'émetteur, et une tension VCE entre lecollecteur et l'émetteur. Tant que VBE est positif, le courant IC (qui est important) peutcirculer, et Vout = RCIC est amplié par rapport à VBE .
Table des matières
5 Electrons libres, gaz de Fermi 1
5.1 Introduction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
5.2 Etude du cas unidimensionnel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
5.3 Extension à trois dimensions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
5.3.1 Conditions périodiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
5.3.2 Densité d'états D(E) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 6
5.4 Température non nulle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
5.4.1 Notion de température . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7
5.4.2 Distribution de Fermi-Dirac . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
5.4.3 Chaleur spécique d'un ensemble d'électrons libres . . . . . . . . . 9
5.4.4 Conductibilité électrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12
5.5 Théorie des bandes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
5.5.1 Equation de Schrödinger . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
5.5.2 Comportement aux bornes de la première zone de Brillouin . . . . 16
5.5.3 Fonction d'onde à la limite de la première zone de Brillouin . . . . 18
5.5.4 Nombre d'état . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19
5.5.5 Bandes et niveaux d'énergie des atomes . . . . . . . . . . . . . . . 19
5.6 Propriétés électriques des corps . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
5.6.1 Isolant . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
5.6.2 Conducteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22
5.7 Semi-conducteur . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
5.7.1 Semi-conducteur intrinsèque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
35
36 TABLE DES MATIÈRES
5.7.2 Semi-conducteur dopé de type n . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25
5.7.3 Semi-conducteur dopé de type p . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 26
5.7.4 La jonction p-n . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
5.7.5 La diode p-n . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
5.8 Composants à semi-conducteurs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
5.8.1 Diode . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
5.8.2 Diode émettrice de lumière (Light Emiting Diode : LED) . . . . . . 33
5.8.3 Transistor . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33