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MODULE DE FORMATION SUR LES TECHNIQUES AMÉLIORÉES DE LA
CARBONISATION DU BOIS
I. Contexte du secteur des énergies traditionnelles
Aujourd’hui plus qu’hier, les ressources naturelles en général et forestières en particulier
subissent d’importantes menaces dont les principales sont :
les faibles capacités de l’Etat pour mettre en place un vaste programme de gestion
durable des ressources forestières ;
la non-organisation de la filière bois et la mauvaise valorisation des ressources
forestières ;
le manque de programme de recherche d’accompagnement ;
les feux de brousse ;
l'exploitation anarchique des ressources forestières et ;
l’appropriation illégale des forêts et boisements par l'administration locale.
Les principaux facteurs qui accentuent le phénomène de dégradation des ressources
forestières sont entre autres la croissance démographique, la densité conséquente de la
population et la pauvreté.
Au Burundi la population atteint 8,08 millions d’habitants, la croissance démographique
atteint 3,9% par an et la densité dépasse 300 habitants au km2 dans certaines régions du pays.
Ces facteurs pèsent lourdement sur les ressources nationales.
Selon la FAO le bois de feu et le charbon de bois constituent les sources d'énergie utilisées
par 95% des ménages dans les pays en développement.
Vers les années 1980, plusieurs pays ont mis en œuvre, surtout avec l'assistance de la FAO et
de la Banque Mondiale, des mesures visant à l'introduction des technologies de carbonisation
simples à rendement énergétique élevé : le rendement peut passer de 5 - 10%(méthode
traditionnelle) à 15 - 22% (méthode améliorée de production de charbon de bois (J.
LEJEUNE, 1989).
Au Burundi et ailleurs dans les autres pays en développement, le bois et ses dérivés
constituent jusqu’aujourd’hui et même après demain, la source d’énergie la plus utilisée
surtout dans les ménages. Ils représentent 96% des bilans énergétiques totaux de notre pays.
Elle n’est pas la moins chère mais la plus accessible aux populations rurales.
L’un des objectifs d'une bonne politique pour lutter contre la dégradation des ressources
forestières et l'environnement sont :
Introduire des techniques optimales et appropriées de production de bois de feu et de
conversion de bois en charbon de bois ;
Optimaliser l'utilisation de l’énergie bois et charbon de bois au niveau des ménages
(foyers améliorés).
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Une gestion rationnelle des ressources forestières est un passage obligé pour le
développement durable du pays. Un rôle déterminant doit être joué par les populations rurales
dans toutes les initiatives de gestion et de valorisation des ressources forestières.
La carbonisation est la forme de valorisation du bois que nous allons développer dans les
pages qui suivent. Le constat est que les techniques de carbonisation restent traditionnelles et
offrent de très faibles rendements.
Le renforcement des capacités en la matière est intervenu pour la première fois en 1988
lorsque le projet forestier Banque mondiale a appuyé la formation sur les méthodes
améliorées de carbonisation au profit des équipes de charbonniers vivant dans les alentours
des blocs boisés.
En 2004, un programme de coopération technique (PCT) : « Appui à la promotion des
plantations périurbaines et agro forestières pour la production du bois de feu et de service »
financé par la FAO, a assuré une formation sur les techniques améliorées de carbonisation au
profit des charbonniers vivant dans la zone d’intervention du projet à savoir les provinces de
Kayanza, Ngozi, Gitega, Muramvya et Mwaro.
L’étude a recommandé de :
poursuivre la formation des formateurs en matière de carbonisation ;
continuer à former les charbonniers (par les techniciens formés en carbonisation ;
diffuser les nouvelles techniques de carbonisation ;
continuer la recherche en matière de carbonisation améliorée.
Sur les foyers améliorés l’étude recommande de :
sélectionner et vulgariser le modèle de foyer amélioré le plus performant et le plus
adapté ;
former le formateurs artisans fabricants de foyers améliorés ;
vulgariser les techniques de confection de foyers améliorés ;
sensibiliser les utilisateurs de foyers améliorés.
C’est dans ce cadre qu’est organisée cette formation des membres des Comités locaux de
gouvernance des ressources naturelles. Elle est financée par l’ADISCO qui appuie ses
partenaires à mener une recherche action participative sur la bonne gouvernance des
ressources naturelles au Burundi, dans l’objectif de « Développer des schémas participatifs
communautaires et des politiques nationales plus inclusives et équitables pour la lutte contre
la dégradation des ressources naturelles collectives ».
II. La part du bois dans le bilan énergétique national
Les ressources forestières principales sources de combustibles traditionnels couvrent environ
5% du territoire national et représentent plus de 96% de la consommation d’énergies dans les
ménages. La croissance continue de la démographie dans les centres urbains entraîne une
consommation plus importante de charbon de bois. La demande croissante des combustibles
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domestiques est un facteur important de dégradation des écosystèmes. Le taux de
déforestation dépasse 2%.
D’après les données de l’étude sur la filière bois pour la ville de Bujumbura (F. Besse et Ph.
Guizol, 1991) le bois et le charbon de bois représentent 95,5 % de la consommation totale
tandis que les produits pétroliers couvrent environ 3,7% de cette consommation, l’électricité
0.5% et la tourbe 0,3%.
Tableau n°1 : Consommation du charbon de bois (1994-1998)
Consommateurs 1994 1995 1996 1997 1998
Ménages urbains 36 637 38 163 39 754 41 344 42 997
Ménages ruraux 8 573 8 660 8 748 8 835 8 924
Exportations 1 474 1 504 1 535 1566 1 597
Secteur public 104 105 107 108 109
Total 47 180 48639 50144 52251 53 818
Source : Nkurunziza, 1999
Tableau n°2 : CONSOMMATION ÉNERGETIQUE
Pays Energies
traditionnelles
Electricité Produits
pétroliers
Résidus
agricoles
Sénégal 60 % 5% 37% 1%
Burkina Faso 91% 1% 8% -
Botswana 76,5% 0.5% 18.5% -
Zambie 70%
Source : Institut de l’Energie et l’Environnement de la Francophonie (IEEF), 1999
Les enquêtes ayant montré qu’un ménage urbain utilise 3,5 kg de charbon de bois par jour
contre 9,6 kg pour un ménage rural la consommation du bois a été calculée au niveau de 4
provinces et en fonction de la technique de carbonisation utilisée.
Tableau n°3 : Consommation de bois en fonction de la technique de carbonisation
utilisée
Province Ménage urbain Ménage rural
Carbonisation
améliorée
Carbonisation
traditionnelle
Ngozi 139 225 2 800
Kayanza 166 270 2 046
Gitega 155 252 2 742
Muramvya 18 29 1 122
Total 478 776 8 710
Source : Claude Ramilson, 2004
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Le tableau montre que le rendement par sac (45 kg) de la méthode améliorée est de 2,06 sacs
par stère environ 92,7 kg par stère contre 1,27 sacs par stère environ 27,15 kg par stère. Un
stère pèse environ 450 kilogrammes.
Les ménages feraient une économie de plus de 9000 stères de bois par mois (298 kg/jr) en
utilisant la technique améliorée de carbonisation. Cette économie peut être augmentée en
utilisant les foyers améliorés pour l’utilisation de ce charbon.
La filière Charbon de bois
Les différentes composantes de la filière bois se présentent comme suit :
plantation des arbres,
exploitation de bois,
séchage et conditionnement du bois,
fabrication du charbon,
mise en sacs et transport,
commercialisation,
utilisation du charbon de bois.
Aucun de ces éléments de la chaîne ne peut être négligé lorsqu’on se penche sur la
problématique charbon de bois.
III. Avantages d’utilisation du charbon de bois
3.1. Utilisation du charbon du bois
Le charbon de bois est un produit obtenu après pyrolyse, une décomposition suite à la chaleur
et en absence d’oxygène de composés organiques ou minéraux.
En milieu rural le charbon de bois n’est pas très utilisé, le bois de feu étant accessible
gratuitement. Par contre la population urbaine préfère le charbon de bois au bois de feu.
3.2. Avantages techniques
Le charbon de bois est un matériau facile à manipuler et à subdiviser, le produit non brulé
peut être réutilisé. Par unité énergétique, le charbon de bois est facile à transporter et il est
moins cher par rapport au bois de feu. Il est utilisable dans les petits fourneaux relativement
efficaces et pas chers. Les foyers améliorés sont très bien acceptés par les ménages, toutefois
il faudra mettre au point des foyers améliorés plus solides (qui résistent plus longtemps) et à
haut rendement. Il brule sans grandes flammes et ne produit de fumées.
3.3. Avantages socioéconomiques
L’utilisation du bois énergie au niveau des boulangeries, des briqueteries etc. diminue le
recours aux produits en hydrocarbures qui sont importés et très chers.
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Economie sur les revenus en utilisant les foyers améliorés ; Création de nouveaux emplois sur
la carbonisation, la fabrication et la vente des foyers ;
Le charbon de bois contient plus du double d’énergie que le bois de feu. Il s’agit d’un
matériau inerte qui ne se détériore pas même sur de longues périodes de conservation.
3.4. Avantages environnementaux
Le charbon de bois pollue beaucoup moins que le bois de feu ou les déchets végétaux.
Economie du bois, économie du charbon et diminution de la coupe de bois, atténuation des
effets causés par le déboisement.
IV. Production de charbon de bois (la carbonisation)
4.1. Séchage du bois
Le séchage du bois avant la carbonisation a une grande influence sur le rendement en
charbon. Plus le bois est sec moins il faut en bruler dans la charbonnière pour évaporer
l’humidité du bois restant. Le séchage correspond au transfert d’une partie de l’eau contenue
dans le bois dans l’atmosphère. La durée de séchage dépend de divers facteurs dont
notamment le type d’essence, les dimensions du bois, la préparation du bois après l’abattage,
les conditions atmosphériques, la façon d’empilage et la forme de la pile. La perte en eau reste
plus importante durant les premiers mois ensuite la diminution de l’humidité se ralentit.
Lors du séchage il ya perte de poids, ce qui facilite le transport. Ainsi une tonne de bois à 40%
d’humidité sur brut, après séchage à 20% d’humidité brut, ne pèsera que 800 kg, soit 20% en
moins. Le temps de séchage doit être contrôlé de façon à assurer un maximum de séchage
avant que le bois ne se détériore. Un bois trop sec se carbonise mal. Une humidité de bois de
35 à 30 % est optimale.
4.2. Théorie de carbonisation
La carbonisation du bois consiste en la dégradation de trois polymères végétaux à savoir la
cellulose, l’hémicellulose et la lignine. Elle donne lieu à trois produits que sont le charbon de
bois, une fraction pyroligneuse et la fraction gazeuse.
Le tableau qui suit présente les différents pourcentages pour chacun des trois produits en ce
qui concerne le poids et l’énergie.
Tableau n°4 : Produits de la carbonisation en poids et énergie
Produits %en poids % en énergie
Charbon de bois 25 à 30 45 à 55
Pyroligneux 40 à 55 30 à 45
Gaz 10 à 15 10 à 15
Source : Claude Ramilson, 2004
Le charbon de bois contient 75 à 85 % de carbone. Cette teneur varie avec la température à
laquelle se passe la pyrolyse. Les pyroligneux sont constitués d’eau, d’acide acétique,
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d’acétone, d’acide formique, de méthanol, d’acétate de méthyle, de phénol, de crésol, et de
goudrons épais. Les gaz contiennent de l’oxyde de carbone, du gaz carbonique, du méthane et
des traces d’oxygène.
Selon les espèces carbonisées, le bilan global d’une carbonisation à 500°C pour une tonne de
bois se trouve dans le tableau qui suit.
Tableau n°5 : Bilan global d’une carbonisation à 500°C
Produits Bilan %
Charbon 300 à 350 kg 25 à 30
Pyroligneux 430 à 530 kg 40 à 55
Gaz 150 à 200 m3
10 à 15
4.3. Différentes phases de la carbonisation
a) L’allumage
Le feu est mis à une partie de la charge. On finit pénétrer le maximum d’air dans le four. La
température de la zone de combustion s’élève jusqu’à 200°C. Le bois perd surtout son
humidité. C’est la période endothermique où les réactions sont provoquées par un apport de
chaleur correspondant au séchage au cours de laquelle peuvent être éliminés quelques
composés volatiles entraînés par la vapeur d’eau. Le reste du four monte en température.
Cette phase est courte, elle ne sert qu’à former le front de carbonisation à l’intérieur du four.
b) La déshydratation
Les entrées de l’air sont réduites, l’ensemble de la charge libère l’eau qu’elle contient. A
partir de 200°C, les constituants les moins stables du bois se décomposent et donnent un
dégagement de gaz oxygénés CO, CO2, de vapeur d’eau, d’acide acétique et du méthanol. Le
résidu n’est pas encore du charbon mais du bois torréfié.
c) La carbonisation proprement dite
A partir de 280°C, se produit une autre réaction qui est exothermique, qui élève la
température sans apport extéri50-380°C. Le phénomène de combustion est encore nécessaire
pour entretenir le processus de l’ensemble de la charge. Une petite quantité d’air est donc
nécessaire. La température moyenne lors de cette phase est généralement comprise entre 280
et 380°C. Ces dégagements gazeux produisent toujours des gaz oxygénés mais en quantité
réduites et également des hydrocarbures de poids moléculaires peu élevés (méthane,
méthanol, acétone, méthyle-éthyle etc.) Cette production est accompagnée de goudrons
légers. Le résidu est du charbon mais sa teneur en carbone est inférieure à 80%, le charbon de
cuisson. Si l’on continue à chauffer 700 à 900 °C on produit du charbon pour l’industrie.
d) Fin de carbonisation
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Entre 380 et 500°C, les gaz formés sont principalement constitués par des hydrocarbures et
parallèlement, le pyroligneux s’enrichit en goudrons lourds. A la fin de la carbonisation il y a
refroidissement du four.
4.4. Les différents modes de carbonisation
La carbonisation par combustion partielle : l’énergie nécessaire à la carbonisation est
fournie par la combustion d’une partie de charge. C’est le mode le plus fréquemment
employé.
La carbonisation par chauffage externe : l’énergie nécessaire est fournie à la charge
par un foyer de chauffe externe par l’intermédiaire d’une surface charge (vase clos,
cornue).
La carbonisation par contact de gaz chauds : l’énergie nécessaire à la carbonisation est
fournie par des gaz chauds provenant d’un foyer externe et mis en contact direct avec
la charge. Le foyer est alimenté par les gaz de pyrolyse.*
4.5. Les différents modes de tirage
Il existe deux modes de tirage à savoir le tirage direct et le tirage inversé. Le tirage direct les
fumées sont directement évacuées sans circuler dans la charge alors que le tirage inversé
avant d’être évacuées les fumées circulent de nouveau dans la charge de bois. C’est le cas de
la carbonisation sans cheminée.
4.6. Rendements en carbonisation
Pour éviter toute évaluation erronée il sied de parler des rendements en matière de
carbonisation. La maîtrise du rendement clairement défini est indispensable à une évaluation
comparative des matériels et notamment l’élaboration de toute étude technico-économique
ainsi qu’en préalable à tout engagement dans un projet. Il existe cinq types de rendements à
savoir les rendements : massique, commercial, massique pondéré, énergétique et
technologique.
a) Rendement massique
Pour une comparaison rigoureuse le rendement massique sur matière anhydre est le seul qui
peut être pris en compte. C’est le poids de charbon anhydre produit rapporté au poids du bois
anhydre carbonisé.
b) Rendement commercial
C’est le quotient entre le poids de charbon commercialisable qui est produit et le poids du bois
anhydre carbonisé.
c) Rendement massique pondéré
Pour comparer les résultats de deux résultats de rendement massique, il faut tenir en
considération la qualité du charbon Afin de pouvoir comparer deux essais entre eux et
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plusieurs technologies entre elles on ramène le calcul tous les charbons à un même taux de
carbone fixe sur anhydre de 80% et on définit ainsi le rendement massique pondéré.
d) Rendement technologique
Le rendement technologique Rt permet d’exprimer la quantité de charbon escomptable par
cycle ou par cuisson en fonction du volume du four.
e) Rendement énergétique
Le rendement énergétique brut Re de la transformation du bois en charbon est le rapport entre
l’énergie calorifique potentielle du charbon produit et l’énergie calorifique potentielle du bois
brut initial.
4.7. Les facteurs influant sur la carbonisation
De nombreux paramètres influent sur le résultat d’une carbonisation. L’’importance de
chacun d’eux dépend du type de carbonisation employé.
Les facteurs les plus importants sont les suivants :
température,
rapidité du processus,
matière première utilisée,
technique suivie,
qualification de l’opérateur,
conditions météorologiques.
V. Description des types de fours connus au Burundi
Les méthodes de carbonisation diffèrent suivant leurs caractéristiques dont la forme de la
meule, le mode d’empilage, etc.
Nous allons analyser cinq types de fours les plus connus au Burundi. Il s’agit de :
la meule (ou four) traditionnelle burundaise
la meule traditionnelle améliorée ;
la meule à flanc de coteau ;
la meule Casamançaise;
la meule à tirage inversé (BITI).
4.8.1. Meule (ou four) traditionnelle burundaise
C’est une meule où le bois est rangé perpendiculairement à la pente du terrain. La capacité est
très variable, elle dépend des quantités de bois. Il faut d’abord nettoyer le sol et poser quatre
longerons de 20 cm de diamètre suivant la pente du sol. Le bois à carboniser est posé
perpendiculairement sur les longerons sans classification de diamètre. L’allumage se fait du
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côté aval et le front de carbonisation avance vers le côté amont de la meule. Il n’a ni cheminée
ni évents bien différenciés, ils se forment au fur et à mesure de l’avancement du front de
carbonisation. La carbonisation est directe. C’est le front de carbonisation lui-même qui sèche
le bois. On obtient alors le charbon friable et de petit calibre.
La meule n’est pas étanche ce qui provoque quelquefois un retour de feu sur la partie déjà
carbonisée. Le charbonnier devra collecter son charbon à partir de cette partie et sa présence
est obligatoire.
4.8.2. La meule traditionnelle améliorée
C’est une meule de forme rectangulaire et de grandes dimensions qui utilise 1 cheminée
constituée de trois fûts soudés les uns aux autres, et 4 évents métalliques de 15 centimètres de
diamètre.
a) Le bois à carboniser
L’humidité du bois à carboniser ne doit être élevée, les experts recommandent de laisser le
bois avec les branches pour faciliter la sortie rapide de la sève et permettre ainsi un séchage
rapide. La sortie de la sève sera donc uniforme et le bois ne se fend pas. Pendant la saison
sèche, le temps de séchage va durer au moins un mois avant le tronçonnage.
b) Comment charger la meule ?
Le chargement de la meule repose sur 3 longerons de 20 cm de diamètre posés suivant la
pente du terrain ou parallèlement à la direction du vent si le terrain est plat, et 2 piquets sont
plantés à la base du four pour tenir le chargement.
Le petit bois est rangé à la base de la meule de façon que le bois se touche et que les vides
soient bouchés par le bois de faibles dimensions pendant le chargement. Le bois de grandes
dimensions est rangé au 2/3 de la meule et du côté de la cheminée (en amont)
Les 4 évents sont placés à la base, entre les longerons, et au milieu de la meule, un trou est
aménagé pour supporter la cheminée en fût, c’est celui-ci qui va collecter la fumée de la
meule.
c) L’allumage
Après l’empilage du bois, on recouvre la meule avec des feuillages secs, de la paille et ensuite
de la terre. Celui-ci se fait par le bas, la fumée va sortir sur le trou au dessus de la meule.
Cette technique permet d’avoir un tirage direct pendant l’allumage.
Pendant l’allumage on ferme les quatre évents de la meule. Quand le feu a bien pris, on
bouche le trou de l’allumage au dessus et à la base de la meule, on ouvre les quatre évents en
amont de celle-ci. L’air de l’extérieur entre dans le meule par les quatre évents, cet air
traverse le couloir formé par les longerons, rejoint le front de carbonisation au point
d’allumage. Les gaz chauds dégagés par le front traverse toute la masse du bois et descend à
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la base de la meule pour sortir par la cheminée ; le tirage est inversé. Le passage de la fumée
chaude à travers le chargement sèche le bois avant la carbonisation proprement dite.
d) La conduite
La conduite est aisée car l’avancement du front de carbonisation est matérialisé par
l’affaissement des dessus de la meule quand cet affaissement n’est pas uniforme c’est-à-dire
qu’une partie avance plus vite qu’une autre, on bouche alors l’évent correspondant jusqu’à ce
que le front de carbonisation soit perpendiculaire à la longueur de la meule et ainsi de suite.
e) La fin de la carbonisation
La fin de la carbonisation est matérialisée par l’apparition des braises dans les évents, la
fumée bleue et légère dans la cheminée. Il faut immédiatement procéder à la fermeture de tous
les orifices qui laissent passer l’air. On laisse alors la charge se refroidir.
f) Le défournement
La meule n’est jamais refroidie complètement, il faut au moins deux jours. Il est conseillé de
faire cette opération très tôt le matin pour éviter les coups de feu sur le charbon. Il faut laisser
le charbon au moins douze heures à l’air libre avant la mise en sacs. Le rendement sur matière
anhydre est de 18 à 20%.
4.8.2. La meule à flanc de coteau
Il s’agit d’un four dont les dimensions sont variables suivant la pente du terrain et la
disponibilité du bois. C’est une meule qui est adaptée sur un terrain en pente. Elle a une forme
rectangulaire sur les pentes moyennes et une forme carrée sur les faibles pentes. Comme
évents elle compte 3 tuyaux métalliques de 15 cm de diamètre et de 150 cm de long.
a) Préparation
On creuse la fosse de 2 m de large, la longueur de la fosse étant orientée suivant la ligne de
plus forte pente. En amont on assai d’atteindre 1,20 m de profondeur. Le bois est coupé à 2
mètres. Les 3 longerons supportant la charge du four sont placés suivant la largeur du four.
On arrange les gros bois en amont de la fosse et les incuits sont placés du côté aval de la
fosse. Le four est recouvert de paille et de la terre.
b) Chargement
Le chargement est posé sur des longerons dont le nombre varie avec la largeur de la meule.
Pour une longueur de bois de 2,50 m deux longerons suffisent pour supporter la charge et
repartir l’air à l’intérieur de la charge. Les 3 évents sont posés en amont de la fosse
légèrement inclinés à 45° sur le talus. Il en est de même pour la cheminée, il faut un tuyau
métallique qui raccorde la base du four vers la terre naturelle où est posée la cheminée
métallique de 25 centimètres de diamètre.
Le rangement du bois à l’intérieur de meule, l’allumage et la conduite sont identiques à ceux
de la meule améliorée. Le rendement sur matière anhydre est de 18 à 20%.
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4.8.4. La meule Casamançaise
a) Description de la meule
C’est une meule traditionnelle améliorée pourvue d’une grande cheminée permettant
l’évacuation de toute la fumée produite pendant la carbonisation. Elle diffère de la meule
traditionnelle par l’évacuation de toute la fumée vers une unique et grande cheminée, et par la
circulation des gaz chauds dans le four avant d’en sortir par la cheminée.
b) Confection de la cheminée
Elle est constituée de 3 vieux futs métalliques soudés en série. Leurs couvercles agissent
comme un déflecteur de fumée et les goudrons et jus pyroligneux contenus dans la fumée
peuvent être récupérés à la base de la cheminée dans un récipient.
c) Construction de la meule
Environ 12 stères suffisent pour la construction d’une meule casamançaise. Une meule d’une
telle capacité occupe une aire de circulaire de 4m de diamètre. Celle de 60 stères fait à la base
environ 8 m de diamètre. La meule peut être construite sur une pente, il faudra par
conséquent dégager le terrain en procédant au nivellement.
Des longerons de 10 à 15 cm de diamètre sont disposés comme des rayons de roue sur la
surface nettoyée. Leur longueur varie selon l’importance de la meule à construire.
Entre les longerons sont installés 10 à 15 tuyaux métalliques l’aération de la meule se fait
grâce à des tubes. Ils doivent sortir de la meule pour ne pas être enterrer lors du recouvrement
de la meule avec du feuillage ou de la terre.
Au dessus des longerons on place transversalement deux couches de petits bois pour former le
plancher de la meule. Sur ces couches, le point d’allumage est préparé au centre. La cheminée
est placée du côté amont de la meule. L’orifice d’entrée de la fumée dans la cheminée est
placée entre et contre les longerons.
La meule est alors chargée plusieurs couches de bois partant du point d’allumage. On donne
une forme parabolique à la meule pour que le matériel de recouvrement puisse tenir dessus.
Quand tout le bois est empilé on recouvre la meule d‘une couche de feuillage sur laquelle est
jetée une épaisse couche de terres, en laissant libre le couloir central pour l’allumage du four ;
on vérifie si tous les tubes d’aération sont ouverts et bien aérés.
c) L’allumage
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Pour allumer le four on jette quelques pelletés de braise ardente dans le couloir central
jusqu’au point d’allumage, on ajoute de matériaux de bois bien sec et quand le feu s’est bien
développé on ajoute du bois serré dans le canal d’allumage jusqu’au sommet de la meule.
Sous le fond de la cheminée un trou est creusé et on y fait du feu pour chauffer celle-ci afin de
favoriser le tirage de la fumée. Ce même trou va servir plus tard de récipient de collecte des
produits liquides et visqueux résultant de la carbonisation.
Quand le feu dans la meule a bien pris on ajoute encore du bois dans le couloir d’allumage et
on ferme avec le feuillage et de la terre. La fumée ne peut sortir que par la cheminée.
d) Conduite de carbonisation
Après la fermeture du couloir d’allumage, il faut veiller à ce que le four reste bien étanche.
Les entrées d’air autres que les tubes d’aération et les fuites de fumée seront bouchées avec
de la terre chaque fois qu’elles apparaissent, l’air entre dans le four uniquement par les tubes
d’aération et la fumée sort par la cheminée.
Pour assurer une carbonisation progressive on fermera d’abord les entrées d’air situées près
de la cheminée. Ainsi le bois placé devant la cheminée sera carbonisé avant le contenu du
reste de la meule. Au fur et à mesure de la carbonisation dans la meule, celle-ci s’affaisse et
on peut apercevoir des braises par les tubes d’aération. Ces derniers seront alors fermés et on
ouvre les suivants.
Cette opération se poursuit jusqu’aux dernières entrées d’air, c’est-à-dire celles situées à côté
de la cheminée.
A la fin de la carbonisation il faut surveiller la fumée sortant de la cheminée. Quand elle
devient bleue et diminue fortement, il faut fermer la meule hermétiquement à toutes les
entrées d’air et aux éventuelles fuites de fumée. La cheminée est retirée et on ferme son
emplacement.
Pendant la carbonisation, il est prudent de marcher sur la meule à l’aide d’une échelle ou
d’une planche. Après le litage de la meule, elle se refroidit car le feu s’éteint. On la laisse
ainsi pendant quelques jours.
e) Récolte du charbon
On dégage la terre et le feuillage sur une partie du four et on sort le charbon. Pendant la
collecte du charbon il arrive de trouver des morceaux en feu. En les recouvrant de terre ils ne
tardent pas à se refroidir. Le charbon est mis en sacs. La collecte doit être réalisée avec soin
pour ne pas briser le charbon, ce qui affecterait la qualité du charbon.
f) Rendement d’une meule Casamançaise
Une meule de 15 stères produit 510 kg de charbon de bois. Quand on utilise la cheminée et les
tuyaux d’aération constamment on peut atteindre 50 fournées par an. Le rendement calculé en
poids de charbon de bois sur le bois sec est comprise entre 17 et 20%.
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4.8.5. La meule burundaise à tirage inversé (BITI)
Cette meule ressemble étrangement à la meule améliorée à la seule différence sur :
l’inexistence de la cheminée et évents, ceux-ci sont
creusés directement en amont du four et à la base de celui-ci ;
sur la confection des murettes qui sont posées
légèrement inclinées autour de la charge du bois, afin de créer un vide (couloir)
facilitant la circulation des gaz chauds dans le chargement.
a) Préparation
Les règles à respecter :
le chargement doit être bien fait ; c’est-à-dire que les
vides sont bouchés par le bois de petites dimensions, et que les bois se touchent de
manière que le feu passe d’un bois à un autre ;
dans le cas du bois à écorce épaisse et spongieuse
par exemple la souche d’eucalyptus robusta, le bois devra être écorcé pour éviter les
incuits (fumerons), car le feu se transmet seulement sur les écorces avec une vitesse
assez rapide qui ne carbonise pas le bois ;
l’air et les gaz chauds doivent pouvoir pénétrer
uniformément dans la charge du bois afin d’éviter la combustion inégale ;
à l’exception des évents, l’enveloppe de terre du four
doit être aussi étanche que possible ;
le bois de gros diamètre doit être placé dans les
zones restant très chaudes le plus longtemps, au centre du four et tout près de la sortie
de la fumée.
b) Constitution de la grille
Le bois placé à la base de la meule permet à l’air et aux gaz de carbonisation de circuler
librement à l’intérieur de la charge. Suivant les dimensions et l’humidité du bois, les
longerons seront de 5 à15 cm : 5 cm pour le bois de sec et de faibles dimensions ; 15 cm pour
le bois humide et de grandes dimensions.
La mise en place de la grille
Le rangement du bois se fait de façon
perpendiculaire aux longerons. L’air entre dans le
four par la base et rejoint le front de carbonisation et
l’air chaud traverse le chargement du bois
Les experts affirment que la mise en place de la
grille est d’une importance capitale pour obtenir une
carbonisation uniforme et réussie. Un plancher de
bois de petit diamètre est posé sur la grille.
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Photo IFDC 2010
c) Le chargement
Le point d’allumage est préparé sur ce plancher en dehors du centre de four à l’opposé des
entrées d’air et de sortie de la fumée. C’est là qu’on met les incuits d’une fourrée antérieure
pour faciliter l’allumage de la meule. Cela force les fluides provenant et la carbonisation de
circuler lentement à travers la charge de bois à l’intérieur du four avant de s’échapper à
l’extérieur.
Le bon contact des fluides chauds avec la charge, sèche le bois avant la carbonisation. Le
rendement du four sera élevé car l’énergie contenue dans le gaz chaud est partiellement
utilisée, et les déperditions de chaleur sont réduites. Donc le transfert de chaleur à l’intérieur
du four est rendu facile par un chargement serré. En outre, un empilage serré diminue le
risque d’effondrement des meules. Une densité uniforme du chargement lui permet de se
stabiliser pendant qu’il se rétrécit.
d) L’allumage
Un empilage serré du bois
dans le four permet de le
charger au maximum. Du bois
de petit diamètre est posé dans
les petits espaces entre les gros
arbres
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L’opération d’empilage est suivie de phase de couverture par un feuillage et des mottes de
terres. La zone du point d’allumage ne doit pas être complètement bouchée de terre. Ceci
permet de faire un tirage direct pendant l’allumage. La charge du bois est allumée par
quelques pelletées de braises jetées au point d’allumage. Le feu est entretenu par une
ouverture creusée à la partie supérieure de l’enveloppe. Le front de carbonisation se
développe et on étanchéifie le point d’allumage.
La température de la charge commence à monter l’eau contenue dans le bois s’échappe sous
forme de fumée blanche. La charge de bois perd progressivement son eau. La durée de phase
de déshydratation est fonction de la l’humidité du bois. L’air entre dans le four et la fumée
sort aussi par les mêmes trous situés en amont de la meule.
Couverture du four par un feuillage et des mottes de terres
Le bois de gros diamètre doit être placé dans
les zones restant très chaudes le plus
longtemps, au centre du four et tout près de la
sortie de la fumée ainsi le feu va les atteindre
quand il sera déjà très fort. Le bois de faible
dimension se place en dessous et au dessus du
bois de grandes dimension, les bois se
touchent de manière que le feu passe d’un
bois à un autre
L’opération d’empilage est suivie de phase de
couverture par un feuillage et des mottes de
terres. L’allumage de la charge s’effectue à l’aide
de petits bois, des brindilles ou des braises que
l’on place au point d’allumage situé en bas du
four.
De petits bois plus longs que la
hauteur de la charge sont placés
inclinés tout autour de la charge,
petits bois qui vont supporter les
feuillages et les mottes de terre
assurant l’étanchéité du fourrée et la
libre circulation des gaz chauds
autour de la charge et à l’intérieur du
four.
gufuka ifuru.
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Le point d’allumage est situé en bas du four.
e) La Conduite du four
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Lorsque le feu a bien pris et que la carbonisation commence, l’enceinte doit être étanchéifiée.
Il faut éviter toute entrée et sortie d’air sauf par les orifices préconçus à cet effet. L’objectif
consiste à conserver la température élevée à la phase de déshydratation. Il est donc important
de surveiller attentivement la progression du front de carbonisation. L’avancement du front
de carbonisation se fait perpendiculairement à la longueur de la meule. Il est matérialisé par
l’affaissement de la partie carbonisée. Si une partie du chargement se carbonise vite qu’une
autre il faut boucher l’évent opposé à cette partie et ainsi de suite.
Orifices préconçus pour l’entrée et la sortie d’air
La fin de la carbonisation est matérialisée par :
l’affaissement de toute la meule ;
l’observation d la fumée bleue et transparente dans la cheminée ;
l’apparition des braises sur les entrées d’air. le défournement
N.B. Une meule traditionnelle ou améliorée ne se refroidit jamais complètement même après
avoir bouché toutes les entrées d’air et les sorties de fumée. Le refroidissement de deux jours
au minimum est nécessaire afin d’éviter tout contact du charbon chaud avec l’air froid qui
peut entraîner l’éclatement du charbon et diminue la qualité physique du charbon.
Le tableau suivant donne le récapitulatif des quatre types de fours développés ci-haut.
Tableau n°6 : Récapitulatif des 4 types de fours
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N° Four Mise en
œuvre
Cheminée Event Cond
uite
Rendeme
nt sur
anhydre
Qualité
du
charbon
Durée de
carbonisa
tion
Caractéristiques de la
meule
Rende
ment en
sacs par stère
1 BITI facile sans sans facile 18 à 20% bonne longue Existence des
vides autour
de la meule
Sans
éléments
métalliques
2,06
2 Four à
flanc de
coteau
difficile métallique métallique facile 18 à 20% bonne moyenne Event et
cheminée
métalliques
- 1,90
3 Four
Casaman
çais
difficile métallique sans diffici
le
17 à 20% bonne moyenne grande
cheminée
métallique
- -
4 Four
amélioré
facile métallique métallique facile 18 à 20% bonne moyenne Event et
cheminée
métalliques
- 2,02
5 Four
tradition-
nel
facile sans sans - 10% médiocre longue Fuite sur
toute la
meule
Pas d’entrée
d’air
spécifique
1,27
VI. Conclusion :
Les cinq types de meules développées dans ce document ont été essayés au Burundi surtout
vers les années 1980, à cette époque le pays a développé des techniques de carbonisation à
rendement énergétique élevé avec l'assistance de la FAO et de la Banque Mondiale.
Les experts ont toujours proposé que la généralisation sur terrain soit poursuivie
principalement pour le four traditionnel amélioré, le four à flanc de coteau et surtout le four
BITI qui présente comme principal avantage le non usage de matériel métallique qui est cher
et qui n’est pas facilement accessible par la plupart des charbonniers burundais.
L’utilisation des éléments métalliques est très onéreuse, il faudra payer plus 750 000 francs
burundais pour avoir 4 évents et une cheminée du four amélioré soit la valeur de 100 sacs de
charbon.
Les experts proposent l’utilisation de la meule à tirage inversé étant donné la performance, la
facilité de mise en œuvre et le coût relativement faible de ce type de four (RAMILSON,
2004).