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Liberté 62 n°856 - Le 10 Avril 2009 - 15 -

MondeLA VÉRITÉ SURSTRASBOURG

PAR PIERRE LAURENT,COORDINATEUR NATIONAL DU PCF.

QQUEUE lʼon ait vécu les événe-ments de Strasbourg deprès, avec douleur et colè-

re, comme ce fut mon cas avecdes milliers dʼautres manifestantspacifistes, ou quʼon les ait suivis deloin par télévision interposée, il meparaît impossible de laisser courirsans réagir le mensonge gouver-nemental et médiatique qui a étéspectaculairement mis en scènetout au long du week-end.Ce mensonge, on pourrait le résu-mer ainsi : tandis que les chefs dumonde capitaliste, Barack Obama,Nicolas Sarkozy et Angela Merkelen tête célébraient la paix et lanaissance dʼun nouveau mondesous lʼégide du G20 et de lʼOTAN,Strasbourg était livrée à la violenceaveugle de hordes de militantsbaptisés «anti-OTAN» par la plu-part des bulletins dʼinformation. Ilimporte donc de rétablir la véritéqui est tout autre. Un mot dʼabordsur le déroulement de ces événe-ments, en réalité très bien contrôlépar les autorités. Depuis dessemaines, tout était fait pour entra-ver le bon déroulement de la mani-festation pacifiste prévue. Lesautorités ont multiplié les entravesà son déroulement normal et paci-fique. À lʼapproche du sommet, undispositif policier démesuré a étémis en place dans Strasbourg, pre-nant littéralement en otage la viequotidienne des habitants. Le jourmême, les manifestants accé-daient à une ville en état de siège,hérissés de barrages policiers àtous les coins de rue. Les contrôlesdʼidentité étaient omniprésents,dès la gare de lʼEst à Paris. Desdizaines de cars de militants paci-fiques ont été empêchés dʼaccéderau lieu prévu de la manifestation.Les accès à ce lieu ont été bouclésdes heures durant, multipliant lespoints de tension devant ces bar-rages, à partir desquels les forcesde lʼordre ont usé sans retenue debombes lacrymogènes pendantplusieurs heures. Le rassemble-ment des manifestants nʼa en faitjamais pu se réaliser, certainsentrant dans une souricière policiè-re aussitôt refermée derrière eux,tandis que les autres restaient àlʼextérieur du dispositif, sans parlerdes pacifistes allemands qui nepurent jamais nous rejoindre. Nousavons assisté à une interdiction defait de la manifestation prévue, au

mépris de la sécurité de toutescelles et de tous ceux qui y partici-paient.Ensuite, il est évident que la provo-cation policière nʼa été rendue pos-sible que grâce aux agissementsde groupes ultraviolents, dont laresponsabilité est lourdementengagée. Paraît-il bien connus desservices de police, ils étaient subi-tement insaisissables. Il faudra parexemple nous expliquer commentplusieurs incendies successifs ontpu être allumés par ces groupes àdeux pas des CRS en surnombre.Cʼest la question que se posentavec juste raison les habitants dece quartier. Les militants pacifistesque nous sommes condamnentfermement ces violences, qui ontpermis aux dirigeants de lʼOTANde sʼaccaparer une image de paixà rebours des images de violencediffusées. Dʼautant quʼau-delà dusommet de lʼOTAN, ces violencessont un fier service rendu à NicolasSarkozy, pour qui toute image sus-ceptible de criminaliser lʼaction col-lective, tombe en ce moment àpoint nommé. Enfin, et cʼestpresque le plus important, la miseen scène des violences deStrasbourg sert à cacher le conte-nu des graves décisions prises parle sommet de lʼOTAN. Non, cenʼest pas le club de la paix qui sʼestréuni à Strasbourg, cʼest le clubdes pays capitalistes les plusriches, qui sous la tutelle américai-ne, fût-elle incarnée par un BarackObama au sourire de rock star,organise sa domination militairesur le monde. Cʼest, dans le mêmemouvement, un alignement histo-rique de toute lʼEurope, quiconsacre ainsi la subordination detoute doctrine militaire européenneà la stratégie de lʼOTAN. Cʼestenfin lʼabandon par la France, viala réintégration du commandementmilitaire intégré, dʼune voie origina-le dans le monde. Ce nʼest pas unhasard si le sommet de lʼOTAN asuivi celui du G20. Le capitalismeen crise cherche les moyens derelancer sa domination. Ce nʼestpas un nouveau monde qui émer-ge mais un capitalisme plus dange-reux encore, à lʼinverse de tout ceque les peuples de la planèteseraient aujourdʼhui en droit dʼat-tendre pour résoudre la crise. Oui,la vérité sur Strasbourg reste plusque jamais à dire

- Enfin, les membres de l'OTANont exprmé leur inquiétude sur ladécision de la Russie de sus-pendre le traité de FCE (forcesconventionnelles en Europe). Ilsestiment que l'intervention de laRussie en Géorgie est contraireaux principes de l'OSCE et consta-te de profonds désaccords avec laRussie.Néanmoins, ils estiment avoir «desintérêts communs» (?) avec leurpartenaire et voisin et souhaitentune coopération en matière dedéfense continentale.Non seulement, l'OTAN se com-porte en «gendarme du monde»mais son attitude belliqueuseenvers la Russie est dangereusepour la paix en Europe

Le lien transantlantiqueÀ Prague avait lieu la rencontreUE-États-Unis. On ne connaitguère le résultat des discussions.

Au terme de ces trois réunions, ilapparait que l'Union européennesemble la vassale des États-Unis,opérant un alignement complet surla politique étrangère et de sécuri-té des États-unis. Loin d'aller àl'encontre de cette situation, ladécision française d'entrer dans lecommandement intégré de l'OTANla conforte, retirant toute velléitéd'indépendance de l'Union euro-péenne vis à vis des États-Unis.Le soutien apporté par BarakObama à l'adhésion de la Turquieà l'UE même s'il n'a pas l'arrogan-ce de G.W. Bush, est significatif.N. Sarkozy a beau protester :Obama n'a fait que se conformer àla tradition américaine.À Prague, Barak Obama a faitégalement un discours qui a satis-fait les politiciens tchèques.Il a salué la «révolution develours» qui a mis fin au régimecommuniste, dénonçant l'URSS(disparue depuis 1991, fait-elleencore peur ?) et le communisme,discours apprécié dans un paysqui, en 2006, a interdit l'Union desjeunesses communistes.Combattant la proliférationnucléaire il a déclaré : «si nouspensons que la prolifération desarmes nucléaires est inévitable,alors c'est que nous admettons ennous-mêmes que leur utilisationest inévitable» et a préconisé l'éli-mination des armes nucléaires.On prête à Obama de retirer l'ar-mement nucléaire américain, parailleurs obsolète des pays euro-

péens. Mais son discours est sansdoute plus dirigé contre les paysdont on suppose qu'ils veulent sedoter de l'arme nucléaire : Iran,Corée du Nord et moins contre ladénonciation par G.W. Bush dutraité Start II (arrêt de l'armementnucléaire).Enfin, Obama, malgré de vaguespromesses à la Russie a confirmél'intention des États-Unis d'installerle bouclier anti-missile en Pologneet en République Tchèque.

Obama l'illusionnisteCes 5 jours de présence enEurope ne semblent pas avoir terniauprès de l'opinion publique l'ima-ge d'Obama.On peut se poser des questionssur la notion de changement.Certes, la capacité d'écouted'Obama, sa volonté de dialoguetranchent avec la désinvoltureméprisante de G.W. Bush.Certes, il a consulté ses parte-naires avant de prendre ses déci-sions. On louera également ses

qualités de diplomate et de média-teur.Ainsi, il aurait aidé à la réconcilia-tion entre la France et la Chine. Onpeut cependant douter de la pro-fondeur de cette réconciliationquand N. Sarkozy voulait mettreabsolument Hong-Kong et Macaosur la liste grise des paradis fis-caux.Il a réussi à faire revenir la Turquiesur son veto à la nomination d'A.F.Rasmussen au poste de secrétairegénéral de l'OTAN.Pour autant, les objectifs de la poli-tique étrangère restent les mêmes: assurer le leadership des États-Unis sur la planète.En Irak, les 2/3 des 140.000 sol-dats américains seront de retourcourant 2010 mais il en restera 1/3dans des bases selon les négocia-tions menées contre le gouverne-ment américain de G.W. Bush et legouvernement irakien.En Europe, la volonté de s'opposerà la Russie demeure avec le bou-clier anti-missile et l'élargissementpossible de l'OTAN à l'Ukraine et àla Géorgie.Sa politique en Afghanistan estplus dangereuse encore que cellede G.W. Bush.Il soutient tout comme G.W. Bushl'existence d'un État palestinienmais on attend les mesures.Enfin, la rivalité sino-américaine nes'est pas atténuée.Comme l'écrit Fidel Castro dansune de ses réflexions : «L'empire

est plus puissant que lui et sesbonnes intentions».L'impérialisme américain est tou-jours là et bien là.

Et pendant ce temps,la crise continue

Selon un sondage, le G20 auraitrendu les Français plus optimistessur leur avenir. Selon un autre son-dage, le G20 dont on attend lesretombées positives, aurait permisà N. Sarkozy et à F. Fillon degagner respectivement 6 et 5points de popularité.Pourtant, chaque jour, sont annon-cés de nouveaux licenciements...Mais on peut être rassuré : D.Strauss Kahn, tout heureux desmilliards promis au FMI, annoncela fin de la crise pour l'année pro-chaine et d'abord aux États-Unis.Les sondages se suivent et ne seressemblent pas, puisqu'un son-dage effectué juste après le G20,le 3 avril révèle que 49% desFrançais estiment que le G20 a étéun succès, 40% qu'il n'a été ni un

succès ni un échec et 10% qu'il aété un échec. Chose curieuse :aucun sondage n'a été effectuésur le sommet de l'OTAN...Le G20 aura-t-il une influence surle mouvement social ?La CSI (confédération syndicaleinternationale) a souligné l'avan-cée effectuée au G20, le renforce-ment du rôle de l'OIT (organisationinternationale du travail). Sur les 4syndicats qui en sont membres(CGT, FO, CFDT et CFTC), les 3syndicats FO, CFDT et CFTC ontla même analyse que la CSI.FO appelle cependant à «mettreau coeur du nouvel ordre écono-mique mondial», l'OIT, les conven-tions internationales du travail, deprotection sociale et le servicepublic.La CFDT souligne qu'un «effort decoordination sans précédent» etsouhaite que le social et l'environ-nemental soient au coeur de lalutte globale contre la crise». Ellesouhaite ainsi que la CFTC quel'OIT participe au prochain G20.Au delà des appréciations plus oumoins nuancées, le G20 n'a pasremis en cause l'unité d'actionpour les salaires, l'emploi et lesservices publics.Le mouvement social, l'action poli-tique, celle du PCF seront sansdoute plus déterminants pourl'amélioration de la situation destravailleurs en France que lesmesures du G20.

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LES PAYS DU G20

le G7 - G8 : - Les États-Unis, le Canada, La France, l'Allemagne, l'Italie,le Royaume-Uni, le Japon, la Russieles autres membres : a Corée du Sud, l'Arabie Saoudite, la Chine,l'Inde, le Brésil, le Mexique, l'Argentine, l'Australie, l'Indonésie, l'Afriquedu Sud, la Turquie, l'Indonésie.

LES PAYS DE L'OTANLes pays membres avant la chute du pacte de Varsovie : Les États-Unis, Canada, Allemagne, Espagne, Danemark, Islande, Royaume-Uni,Italie, Grèce, Belgique, Luxembourg, Pays-Bas, Portugal, Norvège,TurquieLes pays entrés en 1999 - 2002 et 2004 : Hongrie, RépubliqueTchèque, Bulgarie, Estonie, Lituanie, Lettonie, Roumanie, Slovaquie,Slovénie, PologneLes pays entrés en avril 2009 : Albanie, Croatie

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