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2 JEUDI 21 AVRIL 2011
Supplément RCEA
SURVIVANT Quatorze ans après cet accident, et tant d’autres, « rien n’a changé » s’indigne Laurent Marsan
Larage devivre après avoir frôlé lamort
TÉMOIGNAGEElsa Charnay
«J e n’ai qu’une seulevie ». La chansonde Gérald de Palmas résonne au
quotidien dans la tête deLaurent Marsan. Commeun mantra pour canaliserun esprit incessamment
tour menté. Depuis ce6 janvier 1997 et cet accident sur la RCEA, à Cressanges, dans l’Al l ier :« D’une extrême violence.Il y a la vie avant et la vieaprès ». Et quatorze ansaprès, « cet accident, c’estcomme un chewinggumque tu étires à l’infini. Tuas un gros bout dans labouche et il s’affine au furet à mesure que tu l’allonges ».
Un mort, treize blessés.Dernier jour des vacances.Laurent, sa femme Sophie,et leurs quatre enfants,rentrent à SaintJacquesdesBlats, dans le Cantal, àbord du J5 qu’il conduit.Laurent aperçoit soudain,face à lui, « un véhicule deneuf places couché, quiglisse avec sa remorque,en travers des deux voies.J’ai hurlé “non” en écrasant le frein ». Même à« 6070 km/h », le choc estinévitable : un mort ettreize blessés.
Hospitalisation et réédu-cation. Fracture et luxationde la hanche, nerf sciati
que endommagé, Laurentest opéré et hospitalisé àMoulins, puis en centre derééducation, jusqu’enavril. Avec Louison, 4 ans,jambes et fémurs brisés.Zoé, 2 ans, souffre de contusions. Léa, 4 mois, estindemne. Plus grièvementblessé (jambe et bras cassés, fracture ostéoméningée entre les yeux), Simon,5 a n s , e s t t r a n s f é r é àClermontFerrand, où ilsera plongé quinze joursdans le coma et hospitalisé cinq mois. Sa mère, Sophie, polytraumatisée, dev r a s u b i r t r e i z einterventions chirurgicales(pieds, jambes, œil, etc.)avant de retrouver figurehumaine.
Insomnies. Les nuitssans sommeil ont commencé à l’hôpital pourLaurent. Elles perdurent.Quelques mois après l’accident, Sophie se battaitpour réapprendre à marcher et Louison vivait alitée. Laurent, lui, face à Simon, se sentait « heureuxde le revoir, mais si triste
de le découvrir abîmé, levisage écrasé ». Avec laconviction qu’il ne seraitplus le même : « L’accident l’a irrémédiablementchangé ». L’an dernier, Simon, malgré des pertescognitives consécutives àl’accident, a décroché sonbac. « Une immense fierté ».
Culpabilité. Au début,entouré par la famille etles amis, le père a fait facepour gérer un quotidienfamilial totalement bouleversé. Puis il a commencéà « sombrer ». Dépressionposttraumatique. Unclassique : « Je me reprochais de ne pas avoir misles phares et visé le bascôté. J’avais le volant etleur vie entre les mains.Qu’estce que je n’ai pasfait pour empêcher ça ? »Une culpabilité que plusieurs séances de psychothérapie n’ont pas permisd’effacer totalement.
Reconstruction. L’accident, un film que Laurents’est repassé en bouclependant des mois et des
mois. Peu à peu, « les souvenirs s’émoussent » .Aujourd’hui, il reste « desimages ». Et des passagesà vide, mais toujours suivis d’une féroce envie deremonter la pente : « C’estcomme au flipper. Tu asune balle gratuite et ils’agit d’en faire quelquechose ». Laurent, instituteur, a repris le chemin dutravail. Sa femme, institutrice aussi, n’a, elle, pu recommencer à travaillerqu’à mitemps : « Elle secouche de très bonne heure pour encaisser les journées et la fatigue de lagestion de la classe, alorsque ses jambes et ses articulations la font souffrir ».
P r e s s i o n . « Être à lahauteur », d’EmmanuelMoire, est également unechanson qui remue lessens de Laurent Marsan,qui va bientôt fêter ses50 ans : « Je ressens uneréelle pression pour remplir ma partie gratuite ».Comme c’est le cas pourbeaucoup d’accidentés dela RCEA (voir page 12).
Survivre à l’accident, c’estvivre avec des séquelles ir-rémédiables, et hanté parla culpabilité. Une famillecantalienne en a fait la dou-loureuse expérience : « Il y ala vie avant et la vieaprès ».
« ON SE DONNE LA MAIN ET ON SE DIT QU’ON VA S’EN SORTIR ». Laurent Marsan (ici avec sa femme et l’une de ses filles à l’hôpital de Moulins) ne comprend paspourquoi, « à part des radars et des panneaux, rien n’a changé en quatorze ans ! Je ne comprends pas pourquoi l’État s’est désintéressé de cette route alors qu’il en aaménagé d’autres, bien moins fréquentées et bien moins accidentogènes. C’est bien qu’il n’y a pas eu de volonté de résoudre ce problème ». PHOTO : DR
La route de la honteRCEA
Les Bourbonnaisle savent, la RouteCentre EuropeAtlantique est unpiège mortel, uneroulette russe surlaquelle vous jouezavec votre vie. Parcequ’ils ont peu degoût à rouler commeon tourne un barillet,ils ont pris la sagehabitude d’emprunterdes itinéraires bis, quise transmettentd’automobilisteà automobiliste,de vieux Bourbonnaisà nouvel arrivant.Quand je me suisinstallée dans l’Allier,la RCEA s’imposaitd’évidence pourcirculer. On m’ena vite dissuadée.Il est aujourd’huigrand temps queles pouvoirs publics,l’État au premier chef,prennent les mesuresd’aménagement quis’imposent pourstopper l’hécatombe.L’annonce de la miseen concession de laRCEA dans l’Allier etla Saône-et-Loiremettrait fin à unsinistre feuilletonde quarante ans.Si, le 29 juinprochain, le feu vertest donné pour lamise en concessionde la RCEA, unnouveau chapitres’ouvrira. Enfinheureux. Pour lesdix ans à venir,au moins, ledépartement del’Allier ne serait plusdans la demande,mais dans l’action,avec deux corollairesessentiels : uneconstructiongénératriced’économie et doncd’emplois et laperspective de tirerenfin un trait surcette transversalemeurtrière. Alors,croyons-le, la vilainecicatrice disparaîtrapour faire place àune artère alimentantle cœur battantdu département,irriguant de millevaisseaux saprospérité future.
Sandrine Thomas
LE BILLET
Stopou encore
Plus de 300.000 €. Entreles frais médicaux et lesincapacités temporaireset permanentes, ce typed’accident coûte très cherà la société, les conduc-teurs reconnus responsa-b l e s n e p o u v a n t p a spayer ces sommes.
EXORBITANT
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
SOPHIE. Polytraumatisée, la femme de Laurent a subi treizeopérations. « Elle a dit stop. Ce n’était plus tenable ». PHOTO : DR
LOUISON. La fillette de 4 ans a eu les jambes et les fémursbrisés. Elle a dû rester alitée plusieurs mois . PHOTO : DR
SIMON. Le garçonnet de 5 ans a été évacué vers Clermont,plongé dans le coma, puis hospitalisé cinq mois. PHOTO : DR
AVANT L’ACCIDENT. Laurent, Simon, Louison et Zoé lavent le J5 à bord du-quel ils partiront en vacances. C’était le temps de l’insouciance. PHOTO : DR
CHOC FRONTAL. La désincarcération de Sophie a commencé vers 18 h 40 : « Elle a duré jusque vers minuit. Interminable, se souvient Laurent Marsan. Il y a un avant et un après l’accident. J’ai été mishors de cause par la justice, mais je me sens responsable par rapport aux miens. J’avais le volant et leur vie entre les mains. Qu’est-ce que je n’ai pas fait pour empêcher ça ? » PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
À LA CASSE. Les épaves des deux véhicules qui sont entrés en collision surla RCEA le 6 janvier 1997, à Cressanges, dans l’Allier. PHOTO : DR
“ Fautil qu’unministre soit tuépour mettrela RCEA en2 x 2 voies ? Il n’y apas encore assezde morts ? ,,De l’internaute, Wil03
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Supplément RCEALa route de la honteRCEA
Tunneldu Mont-Blanc
Tunneldu Mont-Blanc
NantesNantes
CholetCholetPoitiersPoitiers
Clermont-Ferrand
Toulouse
Lyon
Marseille
Strasbourg
Paris
Lille
Rennes
Nevers
BellacBellac
ConfolensConfolens
MontluçonMontluçonMoulinsMoulins GenèveGenève
BesançonBesançon
MontbéliardMontbéliard
Route à 2 voies
Autoroute ou routeà 2 x 2 voies
BelfortBelfort
MulhouseMulhouse
ALLE-MAGNEALLE-MAGNE
03
711
39
25
68
7401
87
36
24 15 43
63
07 26
38
73
05
1858
21
86
16
33
4449
SUISSE
ITALIE
Paray-le-MonialParay-le-Monial
Montceau-les-MinesMontceau-les-Mines
Chalon-sur-SaôneChalon-sur-Saône
MâconMâcon Bourg-en-BresseBourg-en-Bresse
BordeauxBordeaux
RoyanRoyan
Ph. CHAPELLE
La RCEA entreMontmarault
et Molinet (Allier)
Photo :P. COUBLE
CognacCognac
AngoulêmeAngoulême
St-JunienSt-Junien
GuéretGuéret
LimogesLimoges
La SouterraineLa Souterraine
LA MONTAGNE
INFRASTRUCTURE La RCEA, dont le tracé a été imaginé en 1954, est l’une des rares liaisons transversales
De l’Atlantique à l’Europe centrale
Pierre Raynaud
E l le s’appelle RouteNationale 79 dansl’Allier, RN 145 dans
la Creuse, RN 141 en Charente. Mais tous les habitants des départementstraversés par cet axe le désignent par quatre lettres :RCEA.
Le tracé primitif de laRoute Centre Europe Atl a n t i q u e a é m e r g é e n1954, sous l’impulsion deLouis Escande, députémaire de Mâcon, de Geor
ges Rougeron, présidentdu Conseil général de l’Allier, et des Chambres decommerce et d’industriede Bordeaux et Genève. Ils’agissait alors de promouvoir un axe touristique entre ces villes…
Mais le traf ic l ié auxéchanges économiquess’est vite révélé prédominant, avec l’intensificationdes liaisons entre les payseuropéens, et notamment« le développement deséchanges de marchandisesentre l’Espagne et le reste
de l’Europe », soulignel’Association pour la RouteCentre Europe Atlantique(ARCEA).
La RCEA permetd’éviter les zonesaux reliefs élevés
L’itinéraire, pratiquementgratuit sur sa totalité, esttrès prisé par les transporteurs routiers. La RCEA,l’une des rares grandesliaisons transversales,ouvre la façade atlantiquedepuis Royan, Nantes etBordeaux vers le sillonrhodanien via Chalonsur
Saône et Mâcon. Elle irrigue audelà l’Allemagne,la Suisse, l’Italie et l’Europe centrale.
Sa position stratégique,au nord du Massif Central,en fait un axe privilégiépour les trajets de longuedistance, en particulierpour les transports demarchandises. Il permetd’éviter les zones aux reliefs élevés, qui entraînentdes consommations decarburant plus importantes et des difficultés de circulation en hiver.
L a RC E A a t o u t p o u rplaire. Sauf sa configuration. Les tronçons à deuxvoies ne peuvent plus absorber l’explosion du trafic
de ces dernières décennies, alors que dans lemême temps, les promesses de l’État d’aménageren quatre voies cet axesont souvent reportées. La
mise à quatre voies dansl’Allier et la SaôneetLoireest en route depuis unetrentaine d’années. A peine 30 % de cet itinéraireest en deux fois deux voiesaujourd’hui…
La RCEA a été imaginée en 1954. Un demi-siècle écoulé etcet axe transversal souffre toujours de son aménagement.Pourtant cet itinéraire est très prisé car il constitue l’unedes très rares transversales qui ouvre la façade atlantiqueà l’Europe centrale.
“ En Creuse, unequatre voies. EnHauteVienne, unequatre voies. Leseul point noir,l’Allier. Encore…,,De l’internaute, Albatros03
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Supplément RCEA
“ Le piredans tout ça,c’est que lesterrains pourla mise à 2 x 2voies sontachetésdepuis plusde 30 ans,,De lafouine03
CHANTIER Roger Brérot et Henri Lainé, deux enfants de Montbeugny, se rappellent des travaux de la RCEA
« C’était invivableavec le trafic routier »
Pierre Raynaud
D e son ancienne exploitation agricole,Henri Lainé aperçoit
son dernier tracteur, unUtility rouillé, posé dansun champ. Mais il ne voitpas le tracé de la RCEA,distant de 800 m. Il le devine : « J’écoute le trafic etp a r f o i s j e re s p i re l e sodeurs des gaz d’échappement des poids lourds ».
Son grandpère s’est installé en 1914 au lieudit« Couzai », à l’écart deMontbeugny. Professionagriculteur. Le fils, puis lepetitfils, ne se sont pasécartés de l’amour de laterre, des sillons frais etimpeccablement tracés enparallèle, comme un enfant puni fait ses lignes.Henri Lainé, né dans lamaison familiale le 7 avril1934, reprend l’activité en1961. Soixantedix charolaises, 60 hectares et « unpeu de betteraves pourengraisser les bêtes ».
« Quand jevoyais tous cesmètres cubes deterre retournés,ça me faisait malau cœur »
Le tracé de la RCEA acoupé ses terres. Quatrehectares amputés de sonexploitation en 1977 :« Q u a n d j ’ a l l a i s v o i rl’avancée des travaux etque je voyais tous ces mètres cubes de terre retournés, ça me faisait mal aucœur. Et dire que le tracédevait initialement passerpar Chapeau ». Il récupère1,5 hectare lors d’un remembrement. Mais il perdau change.
L’aménagement de laRCEA le prive d’une sourc e p o u r a b re u v e r s o ncheptel : « J’ai multipliéles demandes pour installer une canalisation et ainsi récupérer l’eau dans lefossé. J’ai bataillé, mais ilsont refusé ».
Le tracé l’handicapedoublement. Ses terres,d’un seul tenant, se retrouvent scindées par lebitume des deux voies dela RCEA : « Pour emmenerles vaches de l’autre côtéde la route express, il fallait désormais passer parla route de NeuillyleRéal ». À pied et dans son
sarrau, il guide son cheptel au milieu des klaxons :« Je n’avais pas de bétaillère, alors des dizaines debêtes sur une route pastrès large, ça crée forcément des embouteillages ».
La RCEA, dont les travaux de la section ChemillyMontbeugny ont débuté en 1978, jette desvaches sur la route deNeuilly, mais limite le trafic incessant des poidslourds dans le cœur de lacommune. Roger Brérot,qui habite rue de Dijon,s’en rappelle : « L’intensitédu trafic routier, c’était invivable et elle posait degros problèmes de sécurité ».
« À partir deMontmarault,les camionsklaxonnaientet nousdoublaient »
Commerçant puis artisandurant trentedeux annéesà Moulins, il longe chaquejour la future RCEA : « Jesuivais ainsi l’avancée dest r a v a u x d e l a Su i s s e Océan. C’est ainsi qu’onappelait la RCEA à l’époque ». La deux voies a désengorgé la communed’une partie de ses poidslourds, mais Roger Brérotmilite farouchement pourla quatre voies :
« On rentrait, un soir, dechez des amis, à NérislesBains. À partir de Montmarault, les camions nousklaxonnaient et nous doublaient. Quand on respecte les limitations de vitesse sur cet axe, on est d’unr i d i c u l e. En a r r i va n t ,j’étais lessivé. J’en auraipleuré. Je l’évite désormaisà tout prix. »
Roger Brérot et Henri Lainésont nés à Montbeugny. Ilsn’ont jamais délaissé leurvillage natal, traversé parun flot incessant de poidslourds. La RCEA a désen-gorgé le bourg de ces ca-mions. Henri Lainé se rap-pelle du chantier. Alors agri-culteur, il a perdu quatrehectares.
MONTBEUGNY. Henri Lainé ne trace plus des sillons frais et n’est plus le capitaine d’un tracteur secoué par des vagues de terre.L’agriculteur de Montbeugny est à la retraite. Le tracé de la RCEA a amputé son exploitation de quatre hectares en 1977. Locataired’une partie de ses terres, il sera indemnisé et récupérera 1,5 hectare lors d’un remembrement. PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
La route de la honte RCEA
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Supplément RCEA
TÉMOIGNAGE Son mari, qui reliait Besançon à Moulins chaque nuit depuis six ans, s’est tué dans son camion
« La RCEA, c’est la route de la mort »
Elsa [email protected]
L e choc d’abord. L’incrédulité ensuite. Puisla souffrance. La colè
re. La culpabilité. Et levide abyssal laissé parl’absence perpétuelle d’unmari et d’un père.
7 heures, jeudi 14 mai2009. Le téléphone sonnec h e z l e s Ju r y, d a n s l eDoubs. Le fils décroche. Àl’autre bout du fil , lestransports Jeantet, l’entreprise qui employait Alain,49 ans. Le camion queconduisait leur chauffeuravait percuté, dans la nuit,à hauteur de Coulanges,deux poids lourds stationnés le long de la RCEA.Alain avait été tué dansson camion. Sur une routequ’il empruntait toutes lesnuits depuis six ans.
Monotone et fatigant« Il partait vers 20 h 30
de Besançon. Il se rendaità Moulins avec un semiremorque chargé. Il dormait un peu avant de retrouver un collègue deChâtellerault (Vienne). Ilséchangeaient les remorques et Alain rentrait vers7 heures », se souvient saveuve. Un itinéraire et unemanœuvre réglés commedu papier à musique. Maisun trajet « monotone etfatigant. Mon mari s’enplaignait. Il ne se passaitpas une semaine sansqu’il me dise qu’il avait vuun camion couché sur lachaussée. Un jour, il avaitété accroché par un autrecamion. Souvent, il me racontait “Il y a encore eu
un accident cette nuit”. Çal’avait marqué ».
Mais pas au point de demander à son patron dechanger d’itinéraire : « Ceboulot, il l’avait choisi parce que ça lui permettaitd’avoir une meilleure hygiène de vie après un infarctus ». Et parce que lapaye suivait : « Ça le fatiguait et je savais qu’i ltrouvait la route dangereuse. Moi, ça me tracassait à cause des accidents.Je lui ai suggéré de roulersur Besançon, mais il disait “Encore trois ans, histoire de rembourser lecrédit” ».
« Quandje croiseun camion,je l’imaginededans »
Depuis, la tranquillités’en est allée. « On y pensetout le temps. C’est un telchoc. Ma dernière, âgée de22 ans, vient d’avoir unefille. C’est tellement injuste qu’il ne puisse pas laconnaître. C’est le plusdur pour mon gamin de25 ans. Ils étaient très proches. Ils travaillaient ensemble. Il a du mal à remonter la pente. Quand ilallait vraiment mal, il m’amême dit “Je vais rejoindre mon père. Il m’attend” ».
D’une voix étranglée parl’émotion, Nelly dit tenirle coup pour ses deuxfilles et son fils. Et pour sapetitefille. « Je vois unpsy, ça m’aide. Je culpabilise car les gamins sontmalheureux. J’ai tout letemps peur que la mortfrappe à nouveau. Quandje croise un camion, jel’imagine dedans ».
Nelly sait que dans l’Allier, il est très difficile defaire une pause : « Lesc h a u f f e u r s n’ o n t p a sd’autre choix que de s’arrêter sur des endroits defortune. Qu’ils fassent desaires pour que les usagerssoient en sécurité ! ». Ellese demande « ce qu’ils att e n d e n t p o u r l a 2 x 2voies ? La vie n’a pas deprix. Il n’arrête pas d’yavoir des accidents. LaRCEA, c’est la route de lamort. Les gens qui habitent làbas ne la prennentmême pas ! Il faut vraiment faire quelque chose.On ne peut plus laisser lesvies se perdre comme ça ».
Depuis l’accident, Nelly apris la RCEA. Une seulefois : « Je voulais venir àl’endroit où mon mari estmort, mais je n’ai pas osém’arrêter. Je n’avais pasenvie de risquer moi aussima vie avec la circulationqu’il y a ».
Le mari de Nelly, chauffeurroutier de 49 ans, est l’unedes nombreuses victimes dela RCEA. Une route classéeparmi les plus dangereusesde France lors du Grenellede l’Environnement.
TUÉ DANS SON CAMION À LA DÉRIVE. Le poids lourd de couleur blanche que conduisait Alain, cette nuit de mai 2009, a percutédeux autres camions en stationnement le long de la RCEA. Depuis, sa famille peine à remonter la pente : « J’ai tout le temps peurque la mort frappe à nouveau. Quand je croise un camion, je l’imagine dedans », confie Nelly, sa veuve. PHOTO : SÉVERINE TRÉMODEUX“ Je prends
cette routedepuis desannées. Àchaque fois, jeme demandesi ça ne vapas être montour…,,De l’internaute, All03
La route de la honteRCEA
TRÈS CHÈRE INSÉCURITÉ ROUTIÈRE
100 TUÉS Dans l’Allier et laSaôneetLoire entre 2005 et aujourd’huiEt près de 370 blessés, dont plus des 2/3 grièvement.
20 MORTS Par an sur ces 250 kmEn moyenne, entre l’Allier (qui paie le plus lourd tribut)et la SaôneetLoire. Seulement 30 % des tronçons sontactuellement en deux fois deux voies.
1.254.474 € Le coût d’un tué sur la routeFrais médicaux et sociaux (secours, convalescence, etc) ;coûts matériels (véhicules, etc) ; frais généraux (expertise, justice, etc), mais aussi perte de leur production future et de production potentielle de leur descendance.
135.526 € Pour un blessé hospitaliséEt 5.421 € pour un blessé léger (Sécurité routière).
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Supplément RCEA
ACCIDENT Dans la nuit du 13 au 14 mai 2009, le camion conduit par Alain Jury a percuté deux poids lourds
Tué dans son camion à la dérive
DANS LE SENS MOULINS-MÂCON. Alain Jury rentrait sur Besançon quand, à hauteur de Coulanges, son camion est entré en collision avec deux autres garés le long de la RCEA. En percutant l’arrière dupremier, sa cabine s’est arrachée. La violence du choc a plié en portefeuille ce premier camion, qui s’est retrouvé pris en sandwich entre l’autre et celui d’Alain Jury, tué dans l’accident. PHOTO : S. TRÉMODEUX
TRANSPORT. De piècesmétalliques. PHOTO : S. TRÉMODEUX
POMPIERS. Pendant plusieurs heures, les pompiers de Saône-et-Loire ontdésencastré deux des trois camions. PHOTO : SÉVERINE TRÉMODEUX
NETTOYAGE. L’accident s’est produit à 2 h 30. Une des deux voies a été fer-mée à la circulation entre Dompierre et Molinet. PHOTO : SÉVERINE TRÉMODEUX
EN MORCEAUX. La cabine s’est arrachée et écrasée. PHOTO : S. TRÉMODEUX
COLLISION. Comme chaque nuit, les chauffeurs étaient arrêtés comme ils le pouvaient, le long de la RCEA, en l’ab-sence d’aires de repos, en nombre insuffisant, dans l’Allier. PHOTO : SDIS 71
EN SANDWICH Entre deux camions
Un choc d’unegrande violence
La route de la honte RCEA
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Supplément RCEALa route de la honteRCEA
“ C’est unevéritable honte !La vie de toutes cespersonnes briséespour une histoired’argent, alorsqu’on dépense siinutilement à tousvents…,,de l’internaute, Nat
DÉBAT PUBLIC (1) Habitants et usagers de l’Allier et de la SaôneetLoire se sont exprimés pendant trois mois
Le non à la concession roule en tête
Elsa [email protected]
F autil faire, ou non,une autoroute à péagepour achever rapide
ment l’aménagement de laRCEA dans l’Allier et laSaôneetLoire ? Tous lesprojets importants d’équipement ou d’aménagement du territoire (ligne àgrande vitesse, centrale,autoroute…) sont soumisau débat public.
Le but : permettre à tousceux qui le souhaitent des’informer sur le projet, dedonner leur avis, et deproposer des améliorations ou des alternatives.Une façon, aussi, d’éclairer la ministre de l’Écologie dans sa prise de décision.
1 S’informer. Le débatpublic sur l’accélération de la mise à 2 x 2
voies de la RCEA s’est tenudans l’Allier et la SaôneetLoire entre le 4 novembre 2010 et le 4 févr ier2011. Il a été géré par laCommission du débat public, neutre et indépendante.
Pour que les habitantsdes deux départements,mais aussi les usagers,soient informés, de nombreux documents présentant le projet de concession (coût, emplacementset tarifs prévisionnels despéages, impacts, calendrier, etc), ainsi que sonalternative (continuer lestravaux au rythme des enveloppes de l’État), ont étégratuitement mis à leurdisposition : envoi à domicile, expositions, site Internet, réunions publiq u e s … L e s e n j e u x e ntermes de sécurité routière la RCEA est parmi lesquatre plus meurtrières deFrance , mais aussi de dé
veloppement économiqueet démographique, ainsique d’environnement, ontété expliqués.
2 Pour ou contre ? À laseule condition d’êtreargumentés, tous les
avis sur la transformationde la nationale en autoroute à péage ont été prisen compte. La Commission a enregistré et retranscrit nommément lespropos tenus dans le cadre des réunions publiques, mais aussi transmispar écrit via les cahiersd’acteurs ou Internet. Lasynthèse que la Commission a fournie à la ministre de l’Écologie rassemblenotamment ces avis.
3 Proposer. Au cours dudébat, durant lequel lesparticipants se sont
majoritairement prononcés contre l’autoroutepayante, mais pour laquatre voies (lire cicontre), de nombreuses propositions de particuliersou d’élus, ont été faites,comme financer la mise àdeux fois deux voies de laRCEA avec des fonds européens, ou encore via despartenariats publicprivé.Certains ont même étéplus loin, comme GérardVoisin (députémaire UMPde CharnaylesMâcon) etArnaud Montebourg (président PS du Conseil général de SaôneetLoire), enformulant de véritablescontreprojets budgétiséset planifiés. Les deux élussuggèrent de financer lestravaux d’une route express à deux fois deuxvoies à 110 km/h par lescamions, via l’écotaxe. Ilsont fourni le détail de cesalternatives, qui ont ététransmises à la ministre encharge du dossier. Et lesservices de l’État ont étudié leur faisabilité.
La plupart des rares (unedizaine par an) projetssoumis au débat publicsont poursuivis, parfoisaméliorés. Mais il arriveaussi qu’ils soient abandonnés et qu’un contreprojet soit choisi à la placedu projet initial…
Autoroute payante ou pas ?L’État, maître d’ouvrage destravaux, voulait miser sur« une construction collec-tive » du projet d’accéléra-tion de la mise à 2 x 2 voiesde la RCEA. Réponse au plustard le 29 juin.
EN SAÔNE-ET-LOIRE. Le projet de concession a été hué durant toute la durée du débat public (hormis par certains habitants et élus,ainsi que par les chefs d’entreprise). Arnaud Montebourg, le président du Conseil général, a mis en cause la légalité de la transforma-tion d’une nationale en autoroute, en l’absence d’itinéraires de substitution dignes de ce nom. PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
Pensez-vous que le débat public a servi à quelque chose ?
ANDRÉ PROSTMâcon (71)Oui. Les citoyens ont pu donner leur avis,notamment ceux qui seraient pénaliséspar la concession. J’ose maintenantespérer que le principe d’un homme, unevoix, sera respecté par les pouvoirspublics. Le débat a aussi fait bouger despositions, même d’élus de droite, qui sontmaintenant contre la concession.
THIERRY VALENTINDeux-Chaises (03)Oui, on nous a certifié que tous leséchangeurs entre Montmarault-Mâcon/Chalon seront maintenus. Ensoutenant le maintien de celui deDeux-Chaises, j’ai défendu deuxprofessions, restaurateur, la mienne, etroutiers, qui bénéficient d’un parkingde cent camions devant mon commerce.
JEAN-CHARLES LAUMAINGilly-sur-Loire (71)Le grand public n’était pas informé. Ledébat a servi à éclairer la population. J’aiaussi été interpellé par le raccordementdirect de Bourbon-Lancy. On a eu unecommission qui collait au terrain entre lesréunions. On a pu voir les positionsopposées des deux départements, quidécoulent de tissus urbains différents.
è À VOTRE AVIS
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
DÉBAT PUBLIC (2) Les discussions se poursuivent d’ici la décision finale, les dés ne sont pas encore jetés
Toutes les voix pour la quatre voies
Elsa [email protected]
L’ opinion est majoritairement hostile àl’aménagement de la
RCEA en autoroute payante, mais unanimement favorable à l’achèvement rapide des travaux de mise àdeux fois deux voies. C’estl’un des enseignements dudébat public, qui s’esttenu, dans l’Allier et laSaôneetLoire, entre novembre et février.
La Commission nationale du débat public, organisatrice de la consultation,a rendu publiques sesconclusions. Elles ont ététransmises à la ministre del’Écologie pour l’aiderdans sa prise de décisionet dans les modalités de laconcession au privé, si elleretient cette option.
« Le débata donné lieuà une très largeexpression »
Une très large expression. 250 à 300 participants se sont déplacés àchacune des douze réunions, dont une moitiéd’élus, soit plus de 3.000personnes : « Nous avonscomptabilisé 700 avis, 23cahiers d’acteurs, 150 contributions, 300 délibérations et 16.000 visites surle site Internet. Le débat adonc, et c’est rare, donnélieu à une très large expression ».
Des questions de fond.Le débat, qui a confirméla nécessité de l’achève
ment rapide de la mise àdeux fois deux voies de laRCEA, a surtout concernédes points précis : « Lepéage, ses impacts financiers, les accès à l’infrastructure, ou encore les itinéraires de substitution ».Et les questions de fondont été identifiées : « Letrafic, les problèmes denature juridique et financière, l’importance des itinéraires de substitution ».
Encore beaucoup à faire.« Dans l’hypothèse où lemaître d’ouvrage, soitl’État, donnerait suite à
son projet, le débat a permis de pointer ses engagements, les questions qu’ilconviendra d’approfondiret cel les auxquel les i ls’ a g i ra d e r é p o n d re àcourt terme » (voir cicontre). Et en attendant lesé v e n t u e l s t r a v a u x d el’autoroute ou de la routeexpress (*), il s’agira de« renforcer la signalisation,mettre en place de nouvelles aires d’arrêt, traiterles abords pour favoriserles manœuvres d’urgence,adapter les équipements
pour limiter la surgravité, etc. »
Poursuite des discussions. Des propositions alternatives à l’autorouteont été présentées en finde débat et l’Allier a tenuà leur examen : ArnaudMontebourg, président socialiste du Conseil généralde SaôneetLoire et Gérard Voisin, député UMPde CharnaylesMâcon,voudraient, par exemple,que les travaux de la routeexpress soient financésgrâce à l’écotaxe pour uneréalisation avant 2018.
Les dés ne sont pas encore jetés. Ces projets impliquent, qu’avant toutedécision, l’État procède àdes études et expertisescontradictoires. Des estimations ont mis à jourune variation de coût importante entre les contrepropositions et les calculsde l’État, notamment surune sousestimation parles premières des fraisd’entretien, du montantde l’écotaxe, et donc decelui de l’emprunt et dudélai de remboursement.
Les discussions se poursuivent aussi autour duc o û t p r é v i s i o n n e l d el’aménagement des itinéraires bis, ainsi que du positionnement des péages.Les dés ne sont donc pasencore jetés.
Présidentielleet recoursRecours dissuasifs. Et
même si Nathalie KosciuskoMorizet décidait de latransformation de la RCEAen autoroute payante, sonéventuel successeur aprèsla présidentiel le 2012pourrait abandonner cettesolution. Sans compterque, d’ici là, d’éventuelsrecours contentieux dissuaderaient fortement lesexploitants potentiels del’autoroute.
(*) L’État proposait soit la miseen concession pour réaliser ladeux fois deux voies d’ici 2018,soit la poursuite des travaux aurythme des finances de l’État(route express d’ici trente à quarante ans). L’achèvement des travaux est estimé à 950 millionsd’euros pour la deux fois deuxvoies et 1,1 milliard pour l’autoroute (avec péages et mises auxnormes).
Deux tiers des participantsau débat public sont oppo-sés à l’autoroute payante,mais tous veulent vite une2 x 2 voies. En attendant ladécision de l’État, les discus-sions se poursuivent pouréviter des recours.
DANS L’ALLIER. Les élus de tous bords ont fait des concessions et se sont mobilisés pour faire avancer la concession. Une partie del’opinion les a suivis, même si, au fur et à mesure des réunions publiques, de plus en plus de voix se sont élevées : l’État a souventété malmené et accusé de ne pas laisser de vrai choix en ne présentant qu’une alternative. PHOTO : PIERRE COUBLE
La présidente de laCommission du débatpublic Claude Brévan arappelé qu’à la lumièredes expertises, laconcession au privé n’estpas illégale : « Mais ilfaut affiner le projet enprenant en compte lesdemandes, exigences etconditions émises dans lesdeux départements :maintien des diffuseursexistants, déplacement del’échangeur deMontbeugny et prise encompte de celui avec laRN 7 à Toulon-sur-Allierainsi que le maintien deDeux-Chaises, lutte contreles nuisances, créationd’aires pour les camions,engagement de ne pasachever la RN 7 via uneconcession auprivé… » En revanche,les positions financièresdu maître d’ouvrage, untemps accusé d’avoirmajoré les coûts, ont étéconfortées. Les expertisesont écarté la possibilitéde la mise en placed’uniquement deuxpéages à Montmaraultet à Mâcon.
A AMÉLIORER
Le débat public a-t-il servi à quelque chose ?
JOËL DARGESDompierre-sur-Besbre (03)Je ne sais pas si ce débat va servir àquelque chose, mais il faut vraiment queles choses changent vite, car les accidentsvont continuer. Le débat était plus quenécessaire : cette route est devenue tropdangereuse. J’essaye d’éviter de laprendre quand je le peux uniquementpour des raisons de sécurité.
PHILIPPE GOUDIERBourbon-Lancy (71)Ce débat n’a servi à rien. Ça a été undébat de bout de chandelles. Ils se tirenttous dessus et n’en font qu’à leur tête.Qu’elle soit payante s’ils veulent, maisqu’on ait une bonne route ! Quand onvoit comment on est desservi par laRCEA : je mets moins de temps pour faireMâcon/Annecy que Mâcon/Bourbon-Lancy.
VALÉRIE BONVARLETCressanges (03)Le débat a été enrichissant. C’estdommage que pour LeMontet-Cressanges, il ait eu lieu une foisles travaux terminés. Je pense que nosremarques serviront à ceux concernéspar la suite de ces travaux. Une foisconcédé, cet axe et ses abords serontpeut-être mieux entretenus.
è À VOTRE AVIS
“ Les hautesautoritésviennent dansl’Allier enhélicoptère,c’est moinsdangereux !,,De l’internaute, Will
10 JEUDI 21 AVRIL 2011
Supplément RCEA
Ils militent pour la mise en autoroute à péage entre l’Allier et la Saône-et-Loire
YVES TURQUETHabitant de Thiel-sur-AcolinJe suis absolument favorable à laconcession. J’habite à 100 mètres dela RCEA. Avec l’avancée du débatpublic, les gens sont de plus en pluspessimistes pour la concession. Maisc’est pourtant la seule solution pourbénéficier d’une deux fois deux voies,au plus vite.
PHILIPPE TREYVECCI de Moulins-VichyLa concession est la seule façonréaliste pour la mise rapide de cetaxe à quatre voies. L’écotaxe, quireste un projet, doit financer desmodes alternatifs à la route… Donc,Arnaud Montebourg fait fausse route.Tout autre itinéraire conduirait nosdépartements dans le mur.
BERNARD ÉCHALIERPrésident CCI de la Saône-et-LoireDemain la RCEA sera un atout.Aujourd’hui, c’est un handicap !51.000 entreprises du ressort des CCIde l’Allier et de Saône-et-Loiremilitent pour la concession. Elle leurpermettra de gagner encompétitivité et d’attirer de nouvellessociétés, créatrices d’emplois.
JEAN-LUC BURLAUDHabitant de MoulinsJ’emprunte régulièrement la RCEApour mes trajets professionnels. Il y atrop d’accidents et un trafic monstrede poids lourds. La priorité pour cetaxe, c’est sa mise à quatre voies.Concession ou pas, je m’en moque unpeu. Il faut le faire et vite pour enfinir avec cette route de la mort.
JEAN-MARC NESMEDéputé-maire UMP de Paray-le-MonialJe me rallie à la concession parréalisme. La proposition d’ArnaudMontebourg exclut l’Allier, ce quipose le problème de la continuitéterritoriale.Dire non à la concession, c’est aussipriver l’État des taxes qui serontpayées par le concessionnaire.
è À VOTRE AVIS
La route de la honteRCEA
CONCESSION AU PRIVÉ L’Allier et la SaôneetLoire ne parlent pas d’une seule et même voix
Il faut accepter de payer une autoroute
Sandrine [email protected]
P our accélérer la miseà d e u x f o i s d e u xvoies, l’État propose
de confier le financement,la réalisation, et l’exploitation de la RCEA à une société d’autoroute avec uneouverture en 2018. Sinon ilfaudra compter (encore)plusieurs dizaines d’années…
1 Vite, en une seule fois !Créée en 1973, la RouteCentre Europe Atlanti
que (RCEA) est l’un desrares axes routiers permettant de réaliser des trajetstransversaux en France etvers le reste de l’Europe.Elle relie Royan à ChalonsurSaône et Mâcon surl’autoroute A6. Elle estprolongée audelà par leréseau autoroutier de l’estde la France.
À l’heure actuelle, à peine 30 % des 250 km de laportion MontmaraultC h a l o n M â c o n s o n t àdeux fois deux voies. Si,e n t r e 1 9 8 9 e t 2 0 0 9 ,911,6 millions ont été investis, soit en moyenne43,4 millions par an dont27,2 par l’État et 15,3 millions par les collectivités,les besoins de financement pour achever la miseà deux fois deux voies del’ensemble de l’itinéraires’élèvent encore à 1,1 milliard d’euros. Si les investissements se poursuiventà ce rythme, les travaux nepourraient être achevésavant plusieurs dizainesd’années.
C’est l’argument majeurrépété à l’envi par les défenseurs du projet d’autoroute. Le recours à la conc e s s i o n p e r m e t t r a i td’achever la mise à deuxfois deux voies dans undélai court et en une seulefois, en anticipant la participation financière des
usagers. Une mise en service serait alors envisageable en 2018.
2 L a s é c u r i t é o u 6 6 0morts de plus ? Ces cinqdernières années, 100
personnes ont trouvé lamort sur la RCEA. Le plussouvent des conducteursen transit dans l’Allier, département central que l’ontraverse après avoir effectué plusieurs centaines dekilomètres : Vendéen serendant dans l’Ain, Portugais retournant en Allemagne… Atteint de somnolence, l’automobilistequitte son axe pour s’encastrer dans un poidslourd sur la voie opposée.La RCEA a tout du piègefatal avec son absence debarrière de sécurité, de séparateur central, ses courbes sans visibilité…
L’aménagement de laRC E A p a r u n e s o c i é t éd’autoroute, avec un séparateur central, permettraitd’améliorer la sécuritéroutière de manière significative, en limitant lesconséquences dramatiques des collisions frontales. Mais en ne comptantque sur les pouvoirs publics, la quatre voies nesera pas terminée avant2040, voire 2050. C’estàdire au rythme actuel, 660morts supplémentairesrien que pour l’Allier.
3 Barrières de péage. Unsystème de péage ditouvert serait mis en
place avec six barrières depéage régulièrement espacées, trois dans l’Allier ettrois dans la SaôneetLoire. Avec ce système, l’usager ne paierait pas en entrant sur l’autoroute, maiss’acquitterait d’un péageforfaitaire par tronçon. Cesystème permettrait ausside maintenir la quasitotalité des échangeurs actuels, fortement utiliséspour les déplacements locaux, domiciletravail notamment, de dispenser depéage de nombreux trajetslocaux et d’éviter d’installer des gares de péage àchaque échangeur.
En cédant sa réalisation àune société d’autoroute pri-vée, la RCEA, dans sa ver-sion sécurisée à 2 x 2 voies,pourrait ouvrir dès 2018.
TRAFIC. Jusqu’à 15.000 véhicules/jour sur la RCEA dans l’Allier. Avec un taux de croissance de 5 %, elle pourrait supporter, en 2018,un trafic de l’ordre de 24.000 véhicules par jour. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
JEUDI 21 AVRIL 2011 11
Supplément RCEA
Ils militent contre la mise en autoroute à péage entre l’Allier et la Saône-et-Loire
BERNARD BACDELPEUCHHabitant à YzeureÀ mon avis et à mon grand regret,nous n’allons pas y couper à laconcession… Je suis favorable à lagratuité dans le Bourbonnais. Déjà,lorsqu’on se déplace en voiture dansle sud du pays, on paie. Et bientôt, ilfaudra aussi sortir son porte-monnaiepour les déplacements est-ouest.
MARIE-JOSÈPHE DUBOISHabitante à YzeureSi le gouvernement a décidé demettre la RCEA en concession, il lefera et il ne va pas tenir compte del’avis de qui que ce soit.L’application de la demande de nepas faire payer les locaux sera aubon vouloir du concessionnaire,comme les tarifs.
DOMINIQUE LOTTEMaire PS de GueugnonNous sommes d’accord sur le fondmais, il y a une douzaine d’années,les études étaient déjà défavorablesà la concession. Et là, l’État nous faitla même proposition…Irréaliste à l’époque, aujourd’hui,comme par enchantement, ce seraitpossible !
DANIEL COFFINComité de défense du rail MontluçonQuelle est cette malédiction quifrappe notre région et notre secteurbourbonnais ? Pour une utilisationgratuite, il faudrait attendrequarante ans ? Les Bourbonnais ontdéjà financé les aménagements,notamment entre Le Montet etMoulins et les ouvrages d’art.
GÉRARD BARICHARDHabitant de Bessay-sur-AllierJ’espère que la concession seraremise en question. Je ne crois pasque des sorties seront accessiblesavant les péages pour éviter depayer. C’est pour mieux faire avalerla pilule. L’État ne veut plus payerpour ses routes. La RN 7 en saitquelque chose…
è À VOTRE AVIS
La route de la honte RCEA
CONTRE Des voix s’opposent à la concession au privé et plaident pour la gratuité de la deux fois deux voies
L’État a bien un milliard pour Neuilly
Sandrine [email protected]
L es participants au débat public sur la miseà deux fois deux voies
de la RCEA sont à 65 %hostiles au projet d’autoroute payante entre Montmarault et Mâcon.
1 Déjà payée. À l’issuedu débat public, 65 %des avis étaient défavo
rables au projet d’autoroute payante entre Montmarault et Mâcon. Parmi lesprincipales critiques : l’absence d’équité par rapportaux autres départements.Pourquoi les usagers locaux devraientils payerpour cet itinéraire créé en1973, qui n’a jamais reçules faveurs ni les crédits deson gestionnaire (l’État,N.D.L.R.), trop occupé parle développement desautoroutes et des nationales Parisprovince ? Et cetargument coup de grâce :« l’État est prêt à mettreun milliard pour une autoroute couverte de 1,5 kmentre la Porte Maillot et laDéfense à Paris, pour leshabitants de Neuilly. Lemilliard dont on a besoinpour la RCEA ».
Pour les opposants à uneautoroute payante (12,70 €estimés pour traverserl’Allier et la SaôneetLoire), « les contribuables desdeux départements ontsuffisamment payé, via lesimpôts locaux et nationaux, les aménagementseffectués sur la RCEA cesdernières années ». Et risquent de devoir encorepayer si, en cas de péage,un certain nombre de camions décident de se rabattre sur les routes dép a r t e m e n t a l e s , q u’ i lfaudrait alors remettre àniveau.
2 Contre-projet… politi-q u e . Si le président
communiste de l’Allier,JeanPaul Dufrègne, faitpreuve de pragmatismedans ce dossier, il n’en estrien de son voisin de SaôneetLoire, le socialisteArnaud Montebourg, toujours à l’affût d’un boncoup politique : « Nous netomberons pas dans lepiège d’un chantage morbide ». Il met aussi enavant le fait que la SaôneetLoire ne dispose pasd’un itinéraire alternatif àla future autoroute payante.
Arnaud Montebourg adonc présenté un contrep ro j e t : l a r é a l i s a t i o nd’une voix express limitéeà 110 km/h financée enpartie par la part départementale de l’écotaxe due àla SaôneetLoire. Un financement sur vingt ansp o u r d e s t r a v a u x s u rsix ans.
3 D é j à é c a r t é e . C’estl’autre argument massue des opposants :
l’idée d’une autoroutepayante avait été écartéepar l’État en… 1998. Lepréfet de SaôneetLoired’alors, Joël Gadbin, avaitconstaté que les conclusions n’étaient pas favorables à la mise en concess i o n d e l a R C E A . L erapport de l’époque pointait alors du doigt : « Laprincipale difficulté juridique réside dans la transformation d’une infrastructure gratuite pourl’usager, en partie réaliséeet ouverte à la circulation,en infrastructure à péage[…] Le système de péageouvert ne respecte pascomplètement le principede proportionnalité, saufpour le transit de longuedistance ». Comme le conseiller d’État honoraireDaniel Chabanol l’a fait aucours du débat public, lerapport pointait déjà lesrisques juridiques d’unegratuité pour le trafic local.
Les opposants au projet nesont pas contre l’autoroutemais réclament sa gratuité.Et déplorent l’absenced’équité par rapport àd’autres départements.
CONVICTION. 65 % des participants au débat public sur la RCEA sont hostiles au projet d’autoroute payante entre Montmarault dansl’Allier et Mâcon dans la Saône-et-Loire. PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
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Supplément RCEA
“Acteur dessecours etprésent surles lieux desaccidents,je manifestemonraslebol,,De l’internaute, Ja03
La route de la honteRCEA
URGENTISTE Pour le docteur CharlesNoël Camard, l’accident ne s’arrête pas lorsque la circulation redémarre
Survivre, c’est vivre à jamais meurtri
Elsa [email protected]
D onner un maximumde chances aux accidentés de la route,
notamment à ceux dont lepronostic vital est engagé.Le docteur CharlesNoëlCamard, urgentiste auSamu 03, est formel (*) :« La médicalisation précoce permet d’améliorer leschances de sur vie. Lespersonnes gr ièvementblessées ne supportentpas l’improvisation des secours et des soins d’urgence ».
« Des séquellespsychologiquestoujoursimportantes »
Organes vitaux projetés.L’évolution des protections rendant les voituresplus résistantes aux chocs,c o n n a î t d e s l i m i t e s :« Même si conducteurs etpassagers sont ceinturés,les chocs atteignent les organes, qui sont projetés.Deux voitures qui se percutent frontalement à90 km/h, c’est comme sep r e n d r e u n m u r à180 km/h. Quand les personnes s’endorment, l’absence de réflexes aggraveles conséquences. La technique a ses limites ».
Assurer la survie. « Dansl e d é p a r t e m e n t , n o u ssommes confrontés à desaccidents extrêmementgraves, notamment lorsdes chocs frontaux », souvent sur la RCEA. Pour leséquipes du SMUR, la priseen charge des blessés doitê t r e h i é r a r c h i s é e :« D’abord assurer la survieen stoppant les saignements, réanimer, soutenirla circulation et la respiration. Ensuite, évaluer lapertinence d’une prise encharge spécialisée ».
Limiter les séquelles. Laprise en charge dans desservices spécialisés, voirehyperspécialisés, permet« d’envisager des séquellesles moins lourdes possibles. L’endroit où la victime sera évacuée est dictépar le traumatisme » : plateau technique de proximité ou hôpitaux spécialisés. « Pour donner un
maximum de chances auxtraumatisés, nous avonsbesoin de filières de soinsdédiées ».
Réadaptation longue.« L’accident ne s’arrête paslorsque la circulation redémarre ». Pour les blessésles plus lourds, ce sont dessemaines, voire des moisd’hospitalisation, de rééducation, de réadaptation.
Vies brisées. « Le polytraumatisé, confié à uncentre spécialisé, doit ensuite se réadapter à la vie,à son travail qui doit parfois être aménagé. Desbouleversements majeursl’attendent, même aprèsavoir été consolidé. Parfoistétra ou paraplégique, amputé d’un membre, il doitchanger de métier, demaison, de vie ». Avec desconséquences dramatiques, comme l’explosionde la cellule familiale.« Ces accidents ont toujours des séquelles psychologiques importantes ».
Dons d’organes. « Onréanime avant toute chosepour sauver les patients ».Mais un médecin gardetoujours à l’esprit que,même en cas de mort cérébrale, un cas désespéréest un donneur potentiel :« Il faut que le corps s’ensorte le mieux possible.L’autre dimension de laréanimation, c’est le dond’organes. Et non l’acharnement ».
(*) Patients souffrant d’aumoins deux traumatismes graves,nécessitant une prise en chargelourde (traumatisme crânien etfracture du fémur, par exemple).Déclenchée par le SAMU, l’équipe médicale du service mobiled’urgence et de réanimation(SMUR), composée d’un médecin, d’un infirmier et d’un ambulancier, apporte aux blessés lessoins d’urgence sur place, et définit le service le plus adapté pourle recevoir et assure son transport dans de bonnes conditions.
Les chiffres taisent la réalitédes blessures les plus lour-des. Des semaines, voire desmois d’hospitalisation pourles polytraumatisés. Et desvies bouleversées.
AIDE MÉDICALE D’URGENCE. Pour le docteur Charles-Noël Camard, « la médicalisation précoce permet d’améliorer les chances desurvie. Les personnes grièvement blessées ne supportent pas l’improvisation des secours et des soins d’urgence ». PHOTO : PH.BIGARD
En moyenne. Une person-ne est blessée et hospita-lisée tous les deux jours,après un accident de laroute dans l’Allier.
VIES BRISÉES
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
DRAGON 63. L’hélicoptère de la Sécurité civile évacue les blessés dans un étatcritique vers Lyon, Clermont-Ferrand… pour une meilleure prise en charge deleurs multiples traumatismes. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
CHAQUE MINUTE COMPTE. Pendant que les pompiers dégagent la victime, l’équipe médicale laprend en charge. Dans un choc frontal, chaque minute compte, car les organes vitaux sont souventatteints. PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
URGENCE ET RÉANIMATION. Un équipement polyvalent pour intervenir, le plus rapidement possi-ble, dans les meilleures conditions de sécurité. À la fin de l’année dernière, de nouveaux véhicules,plus modernes, ont été achetés par le Centre hospitalier de Moulins. PHOTO : SÉVERINE TRÉMODEUX
SAUVER DES VIES. L’équipe médicale du Service médical d’urgence et de réanimation (SMUR) est composée d’un médecin, d’un infirmier et d’un ambulancier. Ils assurent, 24 heures/24 et 365 jours/an, laprise en charge des détresses et urgences vitales, dans un périmètre de plus de quarante kilomètres autour de Moulins : « La médicalisation précoce permet d’améliorer les chances de survie. Les person-nes grièvement blessées ne supportent pas l’improvisation des secours et des soins d’urgence », analyse le docteur Camard. PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
… COMME DE NUIT. Ici à Montbeugny, où unefemme et ses enfants se trouvaient entre la vie et lamort. PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
DE JOUR… Les polytraumatisés nécessitent une priseen charge lourde. Puis ils sont transférés vers les servi-ces les plus adaptés. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
14 JEUDI 21 AVRIL 2011
Supplément RCEALa route de la honteRCEA
“ Cinq morts en36 heures ! On faitquoi contre cetteroute. Elle estmonotone, on ysomnole…,,De l’internaute, D.
POMPIERS JeanPierre Masson et Claude Schwartzmann, retraités, restent marqués par leurs interventions
Cette route ne laisse aucune chance
Elsa [email protected]
C laude Schwartzmann,pompier retraité, n’ajamais oublié ce jour
où il s’est retrouvé avecune fillette dans les bras :« Elle m’a demandé “Pourquoi maman ne me répond pas ?” Les mots nesont jamais sortis. Je n’aipas osé lui dire que sa maman était morte. C’étaittrop dur ».
1 « En colère ». C’était ily a plus de vingt ans,mais cet accident, l’ex
capitaine du centre de secours de Moulins ne l’a jamais oublié. « Plus que lesblessures et le sang, quandje vois encore une familled é c i m é e s u r l a RC E A ,comment voulezvous queje ne sois pas en colère ?En trente ans, r ien n’a
bougé ». Claude Schwartzmann ne veut jeter la pierre à personne : « Même sinos élus se démènent,c’est un axe national .Deux voies avec le traficqu’il y a et le nombre decamions en circulation,c’est une catastrophe ! ».
2 « Un carnage ». Un avisque partage son anciencollègue pompier Jean
Pierre Masson : « Cetteroute continue à faire detrop nombreuses victimes ». Le major se souvient des départs pour unaccident sur la RCEA,« plus que sur une autreroute, car on ne savait jamais ce qu’on allait trouver. On se préparait touj o u r s a u p i r e . À u ncarnage. Des gens coincésdans la tôle, des morts,des blessures très graves ».
« Le boulot des pompiers
c’est notamment de permettre aux équipes médicales des SMUR d’accéderaux victimes. Souvent, ilfaut les désincarcérer sansabîmer la moelle épinière.Toujours des interventionstrès techniques, où il fautfaire très vite parce quedes vies sont en jeu ».
« Un carnage.Des gens coincésdans la tôle,des morts,des blessurestrès graves »
3 « Impressionnant lanuit ». Quand les accidents surviennent la
nuit, les interventions sont« moins évidentes et plusimpressionnantes. Il y ades éjectés, des gens éparpillés. Savoir combien il ya de personnes dans et
hors de la voiture, les retrouver ». Dans le silencede la nuit, les pleurs et lescris des accidentés sontencore plus pénétrants.« Même si on se dit queces cris, c’est la vie ».
Sans compter les risquespour les secours : « J’ai étéarrêté cinq mois aprèsavoir été accroché par uncamion alors que j’intervenais sur la RCEA », sesouvient Claude Schwartzmann.
4 « O n n e s ’ y f a i tpas ». Les soirs de départs en vacances, une
certaine appréhension gagnait JeanPierre Masson :« On savait qu’il allait yavoir des accidents, surtout sur la RCEA. On ab e a u e n v o i r t o u t l etemps, on ne s’y fait pas ».
Au retour, j’avais unerage en moi de voir que çane changeait pas, d’entendre les belles paroles etque rien n’aboutisse. Alorsque tout est prévu pourune 2 x 2 voies, on a juste
vu des portions s’ouvrir,des inaugurations, maispour une... deux voies ».
5 « Aires saturées ». Lerefus de l’État de mettre en cause les infras
tructures fait bondir lesdeux pompiers qui ontsuivi toutes les étapes duchantier : « Les gens devraient faire des pauses.Mais sur la RCEA dansl’Allier, ils s’arrêtent où ?Le peu d’aires qu’il y a estdéjà saturé de camions.Avec une famille, on a be
soin de s’arrêter dans unendroit où les enfants ontla place de courir, où lesadultes peuvent boire uncafé. À part à Toulon, dansnotre secteur, il n’y a quedes cabanes de jardin enrase campagne ! ».
JeanPierre Masson etClaude Schwartzmann savent que « les accidentsles plus graves sont leschocs frontaux. Sans muret central, la RCEA nelaisse aucune chance,n o u s n e l a p r e n o n splus ».
Les accidents, et plus particulièrement sur la RCEA, Jean-Pierre Masson et Claude Schwartzmann, pompiers retraités,ne s’y sont jamais faits : « Cette route continue à faire detrop nombreuses victimes ». Eux ne l’empruntent jamais.
« MARRE DES BELLES PAROLES ». Les deux retraités ne décolèrent pas en regardant la RCEA dont la mise à 2 x 2 voies n’avance pas : « Alors que tout est prévu pour une 2 x 2 voies, on a juste vu desportions s’ouvrir, des inaugurations, mais pour une... deux voies ». PHOTO : PHILIPPE BIGARD
JEUDI 21 AVRIL 2011 15
Supplément RCEALa route de la honte RCEA
DIOU. Un poids lourd avait pris feu ce matin-là sur la RCEA. Lerisque majeur : une explosion. Il faut sauver les occupants,mais aussi protéger l’environnement. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
MONTBEUGNY. Les huit occupants des deux voitures ont étéblessés, nécessitant l’intervention des pompiers d’une dizainede centres de secours de l’Allier. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
DOMPIERRE. Encore un choc frontal. Pour que l’équipe médi-cale du SMUR atteigne les victimes, les pompiers ont découpéla tôle. Les secours coordonnent leurs efforts. PHOTO : PH. BIGARD
DOMPIERRE. Au coucher du soleil, le choc frontal avait fait ce jour-là septblessés. Une trentaine de pompiers de l’Allier et de la Saône-et-Loire étaientintervenus. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
MONTBEUGNY. Sept blessés dansdeux collisions à quelques heuresd’intervalle. PHOTO : SÉVERINE TRÉMODEUX
ESPOIR. En regardant l’hélicoptère de la Sécurité civite quitter Pierrefitte-sur-Loire, les pompiers espèrent que le blessé survivra. L’accident avait déjàfait deux morts… PHOTO : PHILIPPE BIGARD
SURACCIDENT Volontaires et professionnels du Service départemental d’incendie et de secours sur le quivive
Prévenir les risques et éviter le carnage
Elsa Charnay
A gir vite. Hiérarchiserles pr ior ités pourdonner aux blessés
« le maximum de chancesde s’en sortir ». Une victim e d ’ a c c i d e n t , c ’ e s t« aussi précieux qu’unbébé ». Pour le lieutenantcolonel Rodriguez, officiercommunication du SDISde l’Allier, les interventions des pompiers sur laRCEA impliquent des précautions particulières :« C’est une voie rapide. Lapremière des nécessitésest de sécuriser notre inter vention : éviter auxpompiers d’être blessés etparer au suraccident ». Etquand les victimes sontincarcérées, « un véhiculede secours routier, équipédu matériel de découpe etde quoi éteindre un incendie, est envoyé ». La désincarcération est une interv e n t i o n « l o u r d e e tdélicate ». Plus particulièrement quand des poidslourds sont impliqués.
Sans compter l’impactpsychologique : « L’accident est sidérant. C’est uncarnage avec des imagesde guerre. Pour les secoursaussi, le risque de dépression est réel », résume ledocteur Rosati, médecinchef adjoint du SDIS.
De violents face-à-face aumilieu d’une circulation par-ticulièrement dense. Les in-terventions des secours surla RCEA impliquent des pré-cautions particulières.
MISSION DÉLICATE. Sauver les autres sans se mettre en danger. Éviter les suraccidents. Pour les pompiers, intervenir sur une voie rapide suppose de revêtir des giletshaute visibilité et de mettre en place un balisage spécifique, avant d’accéder aux blessés, souvent incarcérés. Il s’agit d’écarter les tôles, puis de les découper, avantd’extraire les victimes dans les meilleures conditions. En janvier et février, les pompiers sont intervenus sur dix accidents sur la RCEA. Dont deux mortels. PHOTO : PH. BIGARD
16 JEUDI 21 AVRIL 2011
Supplément RCEA
“ Vous séparez lesdeux voies par unpetit muret commeà Fos. Garanti, lesaccidents, ce serafini,,De l’internaute, Cocomecanic
La route de la honteRCEA
ROUTIERS La RCEA est un passage obligé pour Germain Noël, chauffeur à l’international, pour livrer du laiton
Une taxe à l’année comme en Belgique
Pierre Raynaud
5 17.000 ki lomètresparcourus en troisannées. Absent du
cocon familial dans l’Ornedu lundi au vendredi, parfois même jusqu’au samedi. Trois mariages, neufenfants et l’absence rompue « avec les petits » partéléphone, lors des pausessur les aires de repos.C’est la vie d’un chauffeurroutier à l’international.Celle de Jésus 27, son nomde cibi. Parce qu’il porte lab a r b e d e p u i s s e svingt ans, que Noël estson nom de famil le etqu’il est natif de l’Eure.
Selon ses horaires depassage dans la région parisienne, Germain Noëlopte pour la Nationale 6,« très tranquille car personne ne la prend », ou laRCEA pour conduire son
poids lourd de 440 chevaux vers Cluses, en HauteSavoie, ou dans la rég i o n p i é m o n t a i s e, e nItalie. À raison de deuxfois par semaine. Au départ de l’usine de laitonKME, à Boisthorel, dansl’Orne, il ravitaille en barres de laiton des entreprises spécialisées dans la robinetterie et les coudes.Au retour, il charge sonpoids lourd de limaillepour la fondre en Normandie et la transformeren barre.
« Visibilité réduite »Germain Noël affiche au
compteur entre 3.400 et4.000 km par semaine. Iln’est jamais chez lui : « Jepasse plus de temps dansma cabine qu’à la maison.C’est le plus dur. Je merattrape avec le téléphone.Les retrouvailles du week
end sont toujours un moment de fête ». Car le restede la semaine n’est pasune franche rigolade. Desjournées de conduite de9 heures et un jour par sem a i n e d e d e u x f o i s10 heures, avec des coupures : « Sans une bonnecondition physique, on nefait pas ce boulot ».
La RCEA, ses portions àquatre voies, à deux voies,ses cuvettes, son manquede visibilité et ses accidents mortels à répétition : « On voit pas tropmal le tracé dans nos cabines. Ce n’est pas toujours le cas des automobil i s t e s . Je l e s a i d e , e nmettant le clignotant,pour leur indiquer un dépassement possible. Maiscertains nous doublentavec une visibilité très réduite ».
C h a u f f e u r d e p u i s l e21 janvier 1980, GermainNoël enregistre « quelquesaccrochages et une trèsgrosse frayeur ». Survenuedans l’Orne dans un chocf r o n t a l a v e c u n a u t re
poids lourd : « Le gars enface, il s’est endormi. J’aiété projeté dans la cabine.Le visage en sang et un osfracturé, je m’en suis trèsbien sorti ». Il ne considère pas la RCEA comme unaxe accidentogène.
« Le visageen sang et un osfracturé,je m’en suis trèsbien sorti »
« Je n’ai pas d’angoisseparticulière à prendre cetitinéraire. Les routiers sonthabitués à circuler sur desroutes à deux voies. On limite les sections autoroutières pour une questionde coût. Mon patron paie1.000 € par mois pour lesparties d’autoroute incontournables. La RCEA manque cependant de portions à quatre voies pluslongues. Pour doubler unautre poids lourd dans
une montée, c’est la croixet la bannière ». La bannière, c’est aussi sur lescoups de 19 heures pourtrouver un coin de bitumesur les aires de repos. Pourpasser la nuit ou simplement casser la croûte :« Entre Moulins et BourgenBresse (184 km), il n’y ajamais une place libreaprès 19 heures. C’est notre point noir ».
La RCEA, c’est la routedes poids lourds. Avec despointes journalières quiatteignent 7.500 camionssur certaines portions.
Parfois plus de 50 % dutrafic, alors que la moyenne n’excède pas 12 % surle réseau national : « L’Étatpeut l imiter les poidslourds sur les nationales.Pour la sécurité de chacun, il faut mettre en place une taxe à l’année pourcontraindre les camions àcirculer sur les autoroutes.En Belgique, les routierspaient 8 € par jour et fontautant de kilomètres souhaités. En France, c’est1.000 € par mois pour lesportions autoroutièresobligatoires ».
La RCEA, c’est la route des poids lourds. Un passage obligépour Jésus 27, le nom de cibi de Germain Noël. Ce chauffeurà l’internationale ne craint pas l’aménagement actuel decet axe de transit. « Pour la sécurité de tous et comme enBelgique », il milite pour une taxe à l’année ouvrant àvolonté les autoroutes de l’Hexagone aux routiers.
AIRE DE PIERREFITTE-SUR-LOIRE. Après avoir pris des nouvelles de sa famille, c’est la pause cigarette pour Germain Noël avant de reprendre la route de la Haute-Sa-voie. Chauffeur à l’international, il a parcouru 517.000 kilomètres en trois années. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
12 %La part du trafic despoids lourds sur lesnationales françaises nonconcédées au privé. Ellepeut dépasser 50 % sur laRCEA entre MontmaraultetChalon-sur-Saône/Mâcon.
52,8 %C’est la part du traficpoids lourds sur l’année2010 atteint en joursouvrés au point decomptage de Dompierre,soit 6.408 camions.
7,4 %Le nombre de poidslourds enregistrés sur laRCEA est cependant enhausse importante de 7,4à 18,1 % en 2010, selonles sections.
7.516La part de poids lourdsqui empruntent chaquejour, du lundi auvendredi, la sectionDompierre-sur-Besbre/Saône-et-Loire, sur untrafic total de 15.713véhicules. 6.408 sontenregistrés entre Moulinset Dompierre, 4.493 entreMontmarault et Moulins.
49 %La part de marchandisestransportées par lesroutiers qui correspond àdes machines, desvéhicules et des produitsmanufacturés. Letransport de denréesalimentaires représente17 % du transit.
EN CHIFFRES
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
LES GENDARMES DE L’ESCADRON DÉPARTEMENTAL DE SÉCURITÉ ROUTIÈRE VEILLENT
CONTRÔLES
Les gendarmes de l’escadrondépartemental de sécuritéroutière (BMO d’Yzeure et deVichy et peloton autoroutier deMontmarault) effectuentrégulièrement des contrôles.PHOTO : PHILIPPE BIGARD
VERBALISATION
L’infraction la plussouvent constatéesur la RCEA par lesmotocyclistes est lenonrespect desdistances desécurité : moins troispoints et 135 €d’amende.
PHOTO : PHILIPPE BIGARD
CONSTATS
Pour déterminer leséventuelles respon-
sabilités, les gendar-m e s p r o c è d e n t a u xconstatations lors desaccidents. Sur la RCEA,les fautes de comporte-ment sont la principaleresponsable des pertesde contrôle.PHOTO : PHILIPPE BIGARD
HÉLICO
Lors des chassés-croisés des vacan-
ces scolaires, la RCEAest surveillée depuisl’hélicoptère de lag e n d a r m e r i e . L e sfautes de comporte-m e n t d e s c o n d u c -teurs (non-respectdes distances de sé-curité, dépassementsdangereux…) sontd a n s l a l i g n e d emire.PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
GENDARMERIE Le colonel Martzinek, patron des gendarmes de l’Allier, veut avant tout « sauver des vies »
Pleins phares sur la prévention
Elsa [email protected]
«U n g e n d a r m en’est pas préparépour annoncer
le décès d’un fils, d’unefille, d’une épouse, d’unmari. C’est la chose la plusdure qui soit. Ce sont desm o m e n t s q u e l ’ o nn’oublie jamais ».
Peu d’accidentscorporels,beaucoupde morts
Le colonel Martzinek,patron des gendarmes del’Allier, sait que derrièreles uniformes de ses femmes et de ses hommes, il ya d e s ê t re s h u m a i n s :« Lors de certains accidents, ils sont confrontésà des images de guerre.Comme fin août 2010, oùen deux jours, deux familles ont été déciméessur la RCEA, avec, sur cinqmorts, trois enfants tués.La cellule psychologiquede la gendarmerie s’estdéplacée, ce qui est assezrare ».
Sur la RCEA et ses 90 kmdans l’Allier, il y a peud’accidents corporels :
treize en 2009, dix en 2010et trois en 2011, mais sixont été mortels en 2009,sept l’an dernier et déjàdeux cette année. Face àune telle hécatombe, lecolonel a décidé d’un pland’attaque, il y a un an :
« Les causes des accidents sont majoritairement les fautes de comp o r t e m e n t ( a v e cbeaucoup d’endormissements), très rarement lavitesse et encore moinsl’alcool ou les stupéfiants.On a donc décidé de doubler, voire de tripler lespatrouilles pour être surcet axe en permanence.Nous avons fait intervenirles réservistes, l’hélicoptère et des véhicules banalisés. Et quand les conducteurs voient du bleu etfont des appels de phare,ce n’est pas grave. Au contraire, si ça permet d’attirer leur attention et d’évit e r l ’ a c c i d e n t , n o t r emission de prévention estréussie. Mon but sur cetteroute, c’est avant tout desauver des vies ».
Et l’État, qui souhaiteque cette route soit concédée, a récemment déployédes moyens : « Les mesures passives, comme lapose de panneaux ou debandes sonores, ont permis de faire baisser les accidents. Et quatre nouveaux radars dernièregénération, qui sont capables de faire la différenceentre les voitures et les camions, viennent d’êtreimplantés »…
Radars, surveillances parhélicoptère, contrôles… Lesgendarmes ont la RCEA àl’œil. Pour éviter des acci-dents, ils ont « doublé, voiretriplé les patrouilles ».
IMPRESSIONNÉ. « Quand je suis arrivé dans l’Allier et que j’ai observé le flot de véhicules, notamment de camions, j’ai soudain eul’impression de partir vers la Turquie, sur la Route de la soie »… PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
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Supplément RCEALa route de la honteRCEA
SIGNALISATION Les agents de la Direction interrégionale des routes sécurisent les abords des accidents
Le danger, ce sont les bouchons
Leïla [email protected]
T o u s l e s j o u r s , l e sagents de la Directioninterrégionale des
routes nationales CentreEst (DIR) font place nette.Pa re c h o c s , a n i m a u xmorts, pneumatiques… ilsramassent tout ce qui peutencombrer la chaussée etprovoquer des accidents.Toute la journée, l’hiver etl’été, de 5 h 30 à 20 h 30,deux patrouilles sillonnentla RCEA (*).
« Nous installonsun véhiculeéquipéd’un panneaud’information »
« Nous veillons à ce querien sur la route mette lesa u t o m o b i l i s t e s e t l e schauffeurs en danger »,e x p l i q u e C h r i s t o p h eAudin, chef du Centred’exploitation et d’intervention de la direction interrégionale des routes
CentreEst (DIR).Les agents de la DIR qui
veillent se tiennent toujours prêts à intervenir surla RCEA lorsque les pompiers ou les gendarmesappellent leur PC, à Yzeure, pour les informer d’unaccident : « Le chef parten éclaireur pour déclencher les moyens adaptés à
l’importance de l’accident ». Souvent, ce n’estp a s g r a n d c h o s e : u npoids lourd en panne, unevoiture sur le bascôté…
Parfois, c’est un accidentplus grave : « Le danger, cesont les bouchons qui seforment de part et d’autre.Il y a un risque de suraccident. Pour l’éviter, nous
installons un véhiculeéquipé d’un panneau d’information. On le déplaceau fur et à mesure de larésorption ou de l’augmentation du bouchon ».
DéviationSelon la gravité de l’acci
dent, du nombre de véhicules accidentés sur la
chaussée, les agents mettent en place une déviation.
« Cela peut prendre d’unquart d’heure à une heure,précise Christophe Audin.Il faut qu’il y ait un itinéraire bis. Il faut se renseigner pour savoir si sur cetitinéraire, il n’y a pas de
travaux pour que les voitures circulent sans problème. Et il faut calculer sile temps de mise en placede la déviation n’est pasplus long que la résorption du bouchon ».
(*) La DIR s’occupe aussi de laRN 7. Les agents sont aussi chargés de nettoyer les aires de repos,les toilettes et vider les poubelles.
Les agents de la DIR se tien-nent toujours prêts à inter-venir. Ils sont chargés de sé-curiser les accidents notam-ment lorsque des bouchonsse forment. Ils multiplient ledanger.
RALENTIR. Une équipe de la DIR Centre-Est est basée à Yzeure, une autre à Pierrefitte pour intervenir en urgence sur la RCEA. Sur un accident, leur première tâche estde signaler l’accident aux automobilistes. Une fois les personnes blessées évacuées et les véhicules dégagés, ils doivent nettoyer la route avant de rouvrir lacirculation. PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
LES AGENTS DE LA DIR SUR TOUS LES FRONTS
COUP DE BALAI
Les agents de la DIR sontles derniers à quitter les lieuxd’un accident. La chausséedoit être vite balayée et propreavant de pouvoir rouvrir laroute à la circulation. PHOTO : PHILIPPE
BIGARD
BALISAGE
Lors d’un accident,les gendarmes de labrigade motoriséeassurent la circulation.Les agents de la DIRbalisent la chausséepour guider lesautomobilistes etassurer la sécurité.
PHOTO : PHILIPPE BIGARD
SÉCURITÉ
Alertés d’un accident sur laRCEA par les gendarmes
ou les pompiers, les agentsde la DIR interviennent encoordination avec eux. Instal-lés à Yzeure, ils sont en quel-ques minutes sur les lieux del’accident. Leur mission estd’en sécuriser les abords etde mettre en place éventuel-lement une déviation.PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
BOUCHONS
Les accidents et les travauxpeuvent engendrer des ra-
lentissements ou des bou-chons sur la route. Cela aug-m e n t e l e s r i s q u e s d esur-accident. Pour les limiter,une des premières actionsdes agents de la DIR est designaler le bouchon auxautomobilistes. Cent cinquan-te mètres avant le bouchon,ils positionnent un véhiculeéquipé d’un panneau lumi-neux d’information et le dé-placent en fonction de la ré-sorption ou de l’allongementdu bouchon. PHILIPPE BIGARD
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
“ Lesinconscients, cesont aussi eux quituent sur lesroutes.Arrêtez de nepenser qu’à vous,vous n’êtes pastout seul sur lesroutes.,,De l’internaute, JC
PAUSE Problème quand on veut s’arrêter sur la RCEA, il faut patienter avant de pouvoir faire une halte
Elle manque d’aires pour souffler !
Leïla [email protected]
I l est midi. C’est l’heurecreuse. Et Raymondcasse la croûte, derrière
le volant de son camion.Sur l’aire de repos de PierrefittesurLoire, le long dela RCEA, ce n’est pas encore l’affluence.
« À l’heure du déjeuner,ça va. Il n’y a pas grandm o n d e . O n n e s e b a tpas ! ». Raymond n’a donc
pas eu à jouer des coudespour faire une place à soncamion au milieu d’uneaire semidéserte. Mais, enfin d’aprèsmidi, passé19 heures, c’est une autreaffaire : « Il ne faut pas arriver trop tard. Sinon, c’estplein ! C’est évident quesur cette RCEA, vu le traficde camions et de voitures,il n’y a pas assez d’aires derepos ».
JeanMichel acquiesce :« Entre Moulins et ChalonsurSaône, il n’y a quecelle de Pierrefitte et lecentre routier de ToulonsurAllier. C’est beaucouptrop juste ».
Et cela oblige les routiers
à anticiper. « Oui, il nefaut pas se louper, rajouteYvon, arrêté sur le parkingde ThielsurAcolin. Leproblème, c’est qu’on nepeut pas rouler plus dequatre heures et demied’affilée. Donc comme iln’y a pas assez d’aires derepos et que les parkingsle long de la RCEA sontpetits, soit on calcule bienson coup, soit on continueà rouler jusqu’à ce qu’ontrouve un endroit pour seposer, au risque de dépasser les quatre heures etdemie et d’être à l’amende. Et parfois, on est obligé de s’arrêter là où on enn’a pas besoin ».
20 heures, Francis, routier, vient de s’arrêter pourpasser la nuit, sur un dégagement, entre Moulinset DeuxChaises. Le parking est petit (une quinzaine de camions peuvents’y garer) et complet :« C’est tout le temps comme ça, lâche Francis. Habituellement, je préfèrem’arrêter pour la nuit surune aire de repos. Il y aplus de place et c’est tranquille. Les parkings aub o rd d e l a RC E A s o n tbruyants. Je dors mal ».
Pour les automobilistes,c’est encore plus difficilede faire une pause : « Cen’est pas facile de trouver
un endroit pour faire unepause pipi ! sourit Jacques,sur l’aire de Pierrefitte.Nous sommes partis deGuéret avec ma femme etune amie. On a pr is laRCEA à Montmarault etmes passagères commençaient à s’impatienter ! »
Ludovic , 27 ans, fa i tMontluçon/Mâcon toutesles semaines. Il a garé savoiture derrière un camion, sur un dégagement,et fume une cigarette :
« S’arrêter là, au bord de laroute, ce n’est pas la panacée mais bon, je me dégourdis les jambes cinqminutes. Cette route estfatigante. Elle n’est paslarge, il y a beaucoup det ra f i c e t b e a u c o u p d epoids lourds. Il faut toujours être superconcentré. Quand on prend laRCEA, c’est comme fairede l’apnée. On respire unef o i s a r r i v é à d e s t i n a tion ».
Où s’arrêter quand on roulesur la RCEA ? Les aires derepos et les parkings sontbeaucoup plus rares que lescamions et les voitures qui ycirculent.
ARRÊT. Les deux aires de Pierrefitte-sur-Loire peuvent accueillir 85 poids lourds. Le soir, presque toutes les places sont occupées. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
« On ne peut pas luttercontre la somnolence »L o r s q u ’ o n c o m m e n c e às’endormir au volant, cela« ne sert à rien de lutter »explique le docteur AndréMarcuccilli, responsable del’unité de pneumologie etdu laboratoire du sommeilau Centre hospitalier Mou-lins-Yzeure. « Il faut s’arrê-ter ».
Comment expliquez-vousle phénomène de somnolen-ce au volant ? Les troublesde la vigilance les plus fréquents que nous voyonssont liés aux apnées dusommeil. Ces arrêts respiratoires surviennent pen
dant le sommeil et empêchent de descendre dansle sommeil profond quiest le sommeil récupérateur. C’est la premièrecause de somnolence dansla journée.
Il y a aussi le fait que lesgens dorment moins :dans les années soixante,on dormait en moyenne 8à 9 heures. Aujourd’hui,c’est 6 à 7 heures. Certainsmédicaments favorisentaussi l’endormissement.
Si on commence à somno-ler au volant, on a combiende temps pour s’arrêter ?
On ne peut pas lutter contre la somnolence. Ce n’estpas possible. Si on est auvolant, il faut s’arrêter toutde suite parce que l’endormissement peut êtreimmédiat.
S’arrêter et se reposerc o m b i e n d e t e m p s ? Unquart d’heure suffit. C’estsuffisant pour tomberdans le sommeil profond.C’est tout à fait bénéfique.Mais pour les apnéiques,cela ne sert à rien. Le jourcomme la nuit, lorsqu’ildort, il fait des apnées.
Propos recueillis parLeïla Aberkane
MÉDECIN. AndréMarcuccelli.
« Il ne faut pas arriver troptard. Sinon, c’est plein »RAYMOND PINOL. Routier
20 JEUDI 21 AVRIL 2011
Supplément RCEALa route de la honteRCEA
DÉPANNEUR Dominique Chauvin, quinze ans de métier, s’inquiète de l’évolution du trafic autour de Moulins
Bientôt ce sera deux morts par semaine
Elsa [email protected]
L e dépanneur Dominique Chauvin inter vient sur « 80 % des
gros accidents de poidslourds entre Molinet etMontmarault et 50 % deceux qui impliquent desvoitures ».
La problématique d’uneroute à deux voies totalement inadaptée au traficqu’elle supporte, le patronde l’entreprise de dépannage bourbonnaise ne laconnaît que trop : « Descréneaux de dépassementinsuff isants, des gensénervés d’attendre des kilomètres et des kilomètrespour doubler… Sur cetteroute, plus qu’ailleurs, onn’a pas droit à l’erreur ».
900 poids lourdset 9.000 voituresdépannéschaque année
Enfant déjà, Dominiqueconnaissait particulièrement bien la RCEA. Sonp è r e a é t é p e n d a n tv i n g t a n s g e n d a r m e àMoulins : « Dans les années 80, il n’y avait pas encore le contournement deMoulins et je me souviens
qu’énormément de camions se renversaient ».
Quand il travaillait chezMercedes ensuite, « onavait carrément pour consigne de ne pas la prendre.On nous faisait passer parCosne ».
Le dépanneur craint que« comme l’A77 avance àgrands pas, le trafic va en
c o re a u g m e n t e r. Ave cl’ouverture de MagnyCours, puis de Villeneuve,Paris sera bientôt à à peine plus de 2 h 30. Quandles véhicules vont arriverau rondpoint du Larry,qui est déjà un entonnoir,ils ne vont pas comprendre. Ça fera comme en1996, quand le contourne
ment de Moulins a ouvert,mais en s’arrêtant au sud,où toutes les voituress’empilaient là ».
Il prévient : « Si la RN 7poursuit son développement et que rien n’est faitsur la RCEA, ce ne serapas deux morts par mois,mais deux par semaine ».
Et les souvenirs maca
bres de remonter : « Lesaccidents, ça fait partie dutravail et de cet axe rout i e r. No t re r ô l e, c’ e s td’ouvrir la route et de ladégager au plus vite, entoute sécurité. Mais mêmesi on apprend à vivre avec,toute cette accumulation,ce n’est pas bon ».
Ni pour lui, ni pour « sesgars. Au niveau psycholo
gique, nous sommes toustouchés. Les dépanneurssur la route, avec les voitures, les vict imes, lesang… Et tous les salariés,jusqu’aux secrétaires, carnous accueillons les familles qui veulent comprendre. Voir les voitures.Elles sont désemparées.Là, même si ce n’est pasnotre métier, nous les assistons. Nous les aidonsavec leur assurance parexemple ».
« Être là pour eux »Dominique Chauvin n’a
jamais oublié la venue decette grandmère « pourrécupérer les jouets desgamins. Sa fille était hospitalisée entre la vie et lamort. Son gendre et sespetitsenfants avaient étét u é s d a n s l ’ a c c i d e n t .Quand elle a trouvé laconsole de jeux, elle s’esteffondrée. Dans la mesuredu possible, on essaie dene pas les emmener jusqu’aux épaves des voitures. Et d’être là pour eux ».
Pas une semaine ne sepasse sans que le dépan-neur Dominique Chauvinn’ait à intervenir sur un ac-cident, plus ou moins grave,sur la RCEA.
PROFESSIONNEL. Le dépanneur Dominique Chauvin intervient sur « 80 % des gros accidents de poids lourds entre Molinet et Mont-marault et 50 % de ceux qui impliquent des voitures ». PHOTOS : PHILIPPE BIGARD
ÉQUIPE. Une partie des trente-trois salariés de l’entreprise Chauvin, basée à Yzeure et qui s’étend à Tronget et Cusset, appréhende de se déplacer sur la RCEA. Car ils connaissent souvent l’issue…
900 poids lourdsdépannés chaque année,par l’entreprise, surl’Allier, la Saône-et-Loire,la Nièvre et le Cher
9.000 voituresprises en charge
EN CHIFFRES
“Nous avonsVulcania,mais pas de4 voies pourla RN 79. Deschoix ont étéfaits.Commentrattraper ceretard ?,,De l’internaute, Albatros
JEUDI 21 AVRIL 2011 21
Supplément RCEALa route de la honte RCEA
INTERVENTIONS La moitié des accidents sur lesquels l’entreprise est appelée surviennent sur la RCEA
Unepriorité : rouvrir la routeauplus vite
CONTRE-LA-MONTRE. Les secours et les soins d’urgence ne souffrent pas l’improvisation : « Cha-que minute compte pour sauver des vies. Chaque geste est important pour gagner du temps et dela place pour que les équipes médicales du SMUR et les pompiers atteignent les blessés. Les aiderà remplir leur mission, c’est aussi le rôle du dépanneur », souligne Dominique Chauvin. PHOTO : DR
PASSION. « J’exerce ce métier depuis seize ans avec passion. Devoir intervenir rapidement procureune certaine dose d’adrénaline : remonter la file de voitures et de camions sur la RCEA pour arri-ver au plus vite sur les lieux de l’accident. Dégager tout ce qui encombre pour que la route puisseêtre rouverte à la circulation… ». PHOTO : DR
MATÉRIEL SPÉCIFIQUE. Les interventions des dépanneurs sont parfois très techniques et nécessitent beaucoup de matériel : « Il faut qu’on évacue tout ce qui gêne la circulation, les glissières de sécurité,les voitures, les camions, mais aussi leur marchandise par exemple. Il arrive que ce soit des animaux. Il y a toujours beaucoup d’imprévus auxquels il faut faire face. Ce type de dépannages peut prendredes heures et demande une bonne collaboration entre tous. À force de se voir sur la RCEA, où les sociétés de dépannage sont les seules entreprises privées à intervenir, on finit par bien se connaître etsavoir ce que chacun doit faire ». PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
EN SÉCURITÉ. « Depuis 2005 que la DIR intervient, notre travail est facilité et notre protection as-surée. Quand j’ai commencé ce métier, on se balisait nous-mêmes et on travaillait sous la sur-veillance des gendarmes. Ma première expérience d’accident sur la RCEA, en 1996, a donné lieuà un suraccident. Ma dépanneuse avait été percutée ». PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
POIDS LOURDS. « Quand des poids lourds sont impliqués, il est parfois très difficile d’accéder auchauffeur incarcéré. Une fois, nous avons monté les pompiers sur un plateau de dépannage pourqu’ils puissent le désincarcérer à hauteur. L’équipe médicale du SMUR a aussi travaillé depuis leplateau. On l’a ensuite descendu pour l’évacuer ». PHOTO : PHILIPPE BIGARD
22 JEUDI 21 AVRIL 2011
Supplément RCEA
PRAGMATIQUE Le président communiste du Conseil général J.P. Dufrègne a pris position pour la concession
« On ne peut plus revenir en arrière »
INTERVIEWSandrine Thomas
L a mise en concessionautoroutière accéléreral ’ a m é n a g e m e n t e n
deux fois deux voies de laRoute Centre Europe Atlantique (RCEA) entreMontmarault et les embranchements de l’A6, àMâcon ou à ChalonsurSaône, soit un tronçon de240 kilomètres.
« L’aménagement seraterminé en 2018 avec cescénario. Si on ne concèdepas la RCEA, ce sera quarante ans de plus », projette le président communiste du Conseil général del’Allier.
Un communiste qui se pro-nonce pour la mise en con-cession de la RCEA au privé,il fallait du pragmatismedans ce dossier ? Si j’étaisdans le moule traditionnel, je ne serais sans doutepas à la place où je suis. Jeme suis prononcé pour laconcession autoroutièreen 2018. Sous conditionde gratuité pour les locauxet de maintien des échangeurs actuels, car on nepeut plus se permettred’attendre. Mais ce n’estpas pour autant que jesuis un fervent défenseurde la pr ivatisation desroutes.
La question aujourd’hui,c’est de savoir si on accepte d’attendre trente années de plus pour que lamise à 2x2 voies devienneréalité, ou bien de bénéficier d’un axe sécurisé en2018 ? J’ai pris mes responsabilités, sans aucunétat d’âme. Et pourtant, jereconnais que ma positiona dérouté dans mon propre camp. Si tous n’ontpas compris, ils ont respecté ma prise de position.
Arnaud Montebourg, leprésident socialiste de laSaône-et-Loire voisine, estpourtant farouchement op-posé à la concession et pro-pose d’autres solutions…Plusieurs contreprojetsexistent. La SaôneetLoirepropose de reverser sap a r t d é p a r t e m e n t a l ed’écotaxe pour une routen a t i o n a l e e x p r e s s à110 km/h. Moi, je m’y refuse catégor iquement.Hors de question de payerles nationales avec l’argent qui doit rentrer dansles caisses du Département. D’autant que nousattendons avec impatience cette écotaxe pour financer le contournement
sudouest de Vichy. Sil’État n’a pas les moyenset au cas où la concessionne pourrait pas se faire, ilexiste également la possibilité d’un partenariat publicprivé.
« Au pied du mur »Mais sans la prise de position de l’Allier en faveurde la concession, jamais iln’y aurait eu de débat public. Nous avons permisde donner un véritablecoup de projecteur sur cetaxe classé parmi les quatreplus meurtriers de France,dont la RN7 qui se trouveaussi dans le Bourbonnais.Quelle que soit la décisionde la ministre le 29 juin, ily a u ra u n a va n t e t u naprès. Après ce débat public qui a mobilisé, l’Étatne peut pas revenir aupoint de départ. Si la proposition de concession deDominique Bussereau, leministre des Transports del’époque, ne tient plus,l’État devra proposer unea u t re s o l u t i o n . On n ecomprendrait pas qu’il nele fasse pas quand dans lemême temps, ce mêmeÉtat est prêt à injecter unmilliard pour une autoroute couverte de 1,5 kmentre la Porte Maillot et laDéfense à Paris, pour leshabitants de Neuilly. Lemilliard dont on a besoinpour la RCEA… Les pouvoirs publics sont maintenant au pied du mur.
Pourquoi l’Allier en est-el-le encore à réclamer des fi-nancements alors qu’enCreuse, la RCEA est désor-mais une quatre voies entiè-rement sécurisée et gratui-t e ? L e s é l u s d e l ’ A l l i e rsont-ils moins performants ?Je n’hésite pas à le dire :les différentes majoritésqui se sont succédées à laprésidence du Conseil général de l’Allier n’ont pasfait avancer ce dossier.L’Allier qui appartient àl’Auvergne, a aussi pâtides choix de l’ancien président de Région ValéryGiscard d’Estaing qui avaitfait de l’A75 et de l’A71,ses seules priorités.
Quels sont maintenant lesenjeux ? Dans sa configuration actuelle, cette routeest un sérieux handicappour le développementéconomique et démographique. Ce que nous demandons, c’est juste d’êtreau même niveau, d’avoirles mêmes chances, queles autres départements,ni plus ni moins.
Nous devons nous préparer à l’arrivée de cetteautoroute et à la perspective de la Ligne à grandevitesse. Nous attireronsalors des activités économiques qui créeront desemplois et donc des familles dans l’Allier qui faitpartie des sept départements français à continuerà perdre des habitants.
Jean-Paul Dufrègne est unpragmatique. Le présidentdu Conseil général de l’Al-lier s’est prononcé en faveurde la concession autorou-tière en 2018. Sous condi-tions. Et a dû expliquer saprise de position… dans sespropres rangs.
DÉCIDÉ. « Mon engagement en faveur de la concession au privé a dérouté jusque dans mon propre camp, il a fallu que j’explique[…] J’ai pris mes responsabilités, sans aucun état d’âme ». PHOTO : PHILIPPE BIGARD
La route de la honteRCEA
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
CHOC DES IMAGES. Chaque été, les mêmes drames sur la RCEA, les mêmes Une qui racontent ces familles décimées sur la route des vacances. Insoutenable. PHOTO-MONTAGE : JEAN-MARC SCHAER
INVENTAIRE Une étude dans l’Allier pour évaluer leur impact sur les professionnels, les victimes et les familles
Comment annoncer un tel décès ?
Elsa [email protected]
L’ Institut de préparation à l’administrat i o n g é n é r a l e d e
l’université d’Auvergne (*)a choisi l’Allier commeterrain d’études : sur laRCEA, axe très fréquenté,les accidents ont pourgrande constante leurmortalité. Et le réseau routier du département estparticulièrement dense(présence d’une autoroute, nombreuses départementales).
Sous la direction de lacriminologue AnnerachèlVan der Horst, un état deslieux est actuellementdressé, pour permettreaux intervenants professionnels sur les grands accidents d’évaluer la nécessité de revoir ou d’adapterles protocoles.
Quel est l’intérêt majeurde cette étude ? Les grandsaccidents sur la voie publique ont un impact im
portant dans notre sociét é , t a n t p o u r l e sprofessionnels que pourles victimes et leur famille.Leur prise en charge implique une mobilisationde structures diversescomme les pompiers, leséquipes médicales desservices d’urgence et de
réanimation, les gendarmes… Quel est le cadre légal de chacun des interven a n t s ? Co m m e n t c e sinterventions sontellesstructurées ? Comments’organise la prise en charge des victimes et de leurfamille, ainsi que celle desprofessionnels ? Cette étu
de descr ipt ive veut, àl’aide d’analyses de cas,offrir un aperçu de la réalité.
L’organisation du secoursà personne et l’aide médica-le d’urgence sont pourtantdéjà soumises à un protoco-le… Un référentiel comm u n d a t e e n e f f e t d u
25 juin 2008. Mais lesgrands accidents de laroute impliquent aussil’intervention des forcesde l’ordre pour la sécurisation des lieux, les constatations et l’éventuellep ro c é d u re j u d i c i a i re.L’étude que nous proposons s’attache à éclaircirles relations entre chacun,dans leur complexité etleur singularité. Le caractère létal de la plupart desgrands accidents de laroute fait émerger un nouveau type de victimes : lesproches du défunt.
La prise en charge de ladétresse des familles est-elleadaptée ? Face à une telleviolence, elle pourraitpeutêtre être inhibée parune procédure plus adaptée, recevant l’adhésion detous. Les recherches enpsychologie invitent àpenser la violence du décès comme facteur de déclenchement d’un deuilcompliqué, voire pathologique. La question du sensest au centre. Quand il y aperte de sens, inhérenteau contexte de l’accident,il y a trauma. Les famillesauraient voulu voir la scène pour poser des images,comprendre, accompagner… Fautil leur autori
ser l’accès sur les lieux del’accident ? Si oui, avecquel encadrement ? Comment annonceton un teldécès ? Peuton dire à unemère qu’elle ne peut pasvoir le corps de son filsparce qu’il est trop abîmé,ce qui suscite fantasmes etruminations négatives ?Qui sont les professionnels les plus à même deprendre en charge ces familles ?
Et les professionnels, com-ment vivent-ils la violencede ces événements ? Aprèsla semaine noire sur laRCEA en août 2010, certains n’étaient pas bien dutout. La gendarmerie a dûactiver sa cellule de soutien psychologique. Surcertains grands accidents,des pompiers volontairesintervenaient pour la première fois. Ces interventions si complexes et sisingulières ont, pour euxaussi, un impact important…
(*) L’IPAG a ouvert à ClermontFerrand, en 2004, le seul masterfrançais de sécurité publique, quiprépare notamment aux différents métiers (police, gendarmerie, armées, etc.) en balayant lesproblématiques nationales et internationales dans ce domaine.Annerachèl Van der Horst estl’une des intervenantes de cemaster.
La criminologue AnnerachèlVan der Horst dirige uneétude sur la gestion desgrands accidents de laroute. Cet inventaire de laréalité du terrain est actuel-lement réalisé dans l’Allier.
CRIMINOLOGUE. Annerachèl Van Der Horst dirige cette étude de terrain, dont les observations-in-terprétations seront restituées en mars 2012. Autour d’elle, un comité de pilotage, notammentcomposé du préfet de l’Allier, du président du Conseil général, du patron des pompiers et de celuide l’escadron de sécurité routière, d’un médecin légiste du Samu, etc. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
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10 janvier 2010 Toulon-sur-AllierUn automobiliste s’encastre contre un poidslourd. Les trois occupants de la voiture(19, 23 et 26 ans) sont tués.
11 janvier 2011 Toulon-sur-AllierLe directeur de la clinique de Moulins, âgéde 67 ans, trouve la mort dans une collisionfrontale avec un poids lourd.
18mars 2010 DavayéDeux poids lourds face à face.Les chauffeurs de 38 et 48 anssont tués sur le coup.
26 août 2010 BessonUn poids lourd en accroche un autre quiquitte sa trajectoire. Une voiture arrivaiten face. Le père, 37 ans, sa fille de9 ans et son fils de 13 ans sont tués.La maman est grièvement blessée.
25 août 2010 TrongetLe père de famille fait un écart, un poidslourd venait en face. L’automobiliste, 36ans et son bébé de 21mois sontmorts.La maman, 32 ans, et leur autre enfantde 6 ans sont blessés.
18 octobre 2010 Saint-VictorUne collision frontale entre une fourgon-nette et un poids lourd fait un mort, lepassager de la fourgonnette, au niveaudu contournement de Montluçon.
8 juillet 2010 GénelardUne automobiliste de 60 ans perd lecontrôle et va percuter un camion.Son père de 89 ans et elle sont tuéssur le coup.
1er juillet 2010 Neuilly-le-RéalUne camionnette heurte un poids lourd etva percuter une voiture. L’automobiliste,78 ans,est mort. Sa passagère et leconducteur de la fourgonnette sontblessés.
28 juin 2010 Deux-ChaisesLe corps d’un motard de 28 ansest retrouvé de l’autre côté de laglissière, déformée par le choc.
14 janvier 2011 BlanzyDeux camions entrent en collisionfrontale.Un des deux chauf-feurs, âgé de 27 ans,est tué.
16mai 2010 Ciry-le-NobleLa remorque d’un car se détache et va percu-ter un mini-bus transportant de jeunesfootballeurs. Un accompagnateur de 46 ansest tué, trois joueurs grièvement blessés,treize plus légèrement.
25 avril 2010 St-Vincent-BragnyUne voiture et une camionnette entrent encollision frontale. Le conducteur de la voiture,79 ans, est tué ; la conductrice de la camion-nette, 50 ans,grièvement blessée.
20 avril 2010 VérosvresUn couple d’octogénaires doit emprunter laRCEA pour rentrer chez lui. A une intersection,leur voiture est traînée sur une quinzaine demètres par une bétaillère. Le conducteur, 80ans, et sa femme, 83 ans, sont tués sur lecoup.
17 avril 2010 MontbeugnyLe monospace d’une famille fait un écartet s’écrase contre un poids lourd.L’automobiliste, 28 ans, son ami, 33 anset sa fillette de 3 ans sont tués.Sa femme, 33 ans, et leurs trois autresenfants de 9 mois, 5 ans et 9 ans, sontblessés.
14 avril 2010 MolinetL’automobiliste se déporte sur la gauche et vas’encastrer contre un poids lourd. Le conduc-teur de la voiture, 50 ans, estmort.Sa femme, 43 ans, sa fille, 7 ans, et les deuxpassagers du poids lourd sont blessés.
10 janvier 2011 MolinetUn conducteur de 36 ans décède dans unecollision avec un poids lourd chargé debovins, qui arrive en face.
MontluçonMontluçon
Paray-Paray-le-Monial
MâconMâcon
Allier
L’hécatombe sur la Route Centre Europe Atlantique depuis janvier 2010
Infographie : L. Chazal
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Supplément RCEA
PRÉFET Pour Pierre Monzani, le recours au privé offre des garanties de livraison en 2018 pour la quatre voies
« Un turbo dans le moteur de la RCEA »
INTERVIEWPierre Raynaud
La RCEA figure tristementdans le palmarès des quatreitinéraires les plus dange-reux de France. En atten-dant un éventuel double-ment des voies, commentl’État tentera-t-il de limiterles accidents meurtriers ?Les Bourbonnais ne sontjamais, ou presque, impliqués dans les accidentsgraves sur la RCEA. I ls’agit d’automobilistes,étrangers à notre département, qui effectuent delongs trajets. Les fautes deconduite s’expliquent parl’endormissement et parun manque de vigilance,certainement provoquépar la fatigue. L’accidentologie de la RCEA est doncatypique.
Les recettes classiques(contrôles vitesse et alcoolémie) pour lutter contreles accidents ont été inefficaces. J’ai fait intervenirune cellule parisienne dela gendarmerie pour mener un audit sur la sécurité routière dans l’Allier. Ilsont privilégié “le réveil desconducteurs”.
« Les recettesclassiquespour luttercontreles accidents ontété inefficaces »
Comment se matérialiseconcrètement la méthode“réveil des conducteurs” ?Davantage de gendarmespour contrôler la vitesseou l’alcoolémie, c’est uncautère sur une jambe debois. Il fallait donc agir surl’infrastructure : des bandes rugueuses et des barrettes sonores sur le bitum e p o u r r é v e i l l e r l e sconducteurs, 15 km de zones de dépassement remplacés par une ligne blanche continue, des balisesen plastique au milieu dela chaussée et des panneaux qui alertent sur ladangerosité de l’axe.
On a fait dans l’efficacitéavec cette batterie de mesures et deux nouveauxradars. Les accidents mortels ont diminué sur la
RCEA, mais je ne crie pasvictoire, car des famillesentières ont été décimées.Je ne peux pas baisser lesbras face à de tels drames.On a tapé juste avec lesmoyens qui étaient les nôtres. J’ai obtenu un pland’urgence de 400.000 €pour financer ces équipements de sécurité.
« Un délai assuré »
En septembre, vous décla-riez dans nos colonnes :« Pour tenir l’échéancier2018, le débat public ne doitpas se heurter à une posi-tion politique de la Saône-et-Loire. Raté ! La livraisonde la deux fois deux voiespourrait-elle être différée ?Le pack Allier est resté solide, a toujours poussédans le sens de la concession autoroutière, malgréquelques tensions, ce quiest normal avec une équipe politique plurielle. Lesavis sont plus partagés enSaôneetLoire. Mais lamajorité est du bon côté,au final.
La RCEA en deux foisdeux voies sera livrée dansles temps avec la concession. C’est un turbo dansle moteur de la RCEA ! Unfinancement classique, àtravers les programmes demodernisation des itinéraires routiers (PDMI),aurait certainement étécontrarié par les aléas quipèsent sur le budget del’État. En faisant intervenirle privé, on s’assure desgaranties dans le délai delivraison.
« Je ne crie pasvictoire,car des famillesentières ont étédéciméessur cet axe »
L’État ne versera plus uncentime dans le doublementde cet axe. Peut-on espérer,q u e d a n s l e s p r o c h a i n sPDMI, davantage de créditsseront affectés à la RN 7 ?La contribution de l’Étatsera tout de même de350 millions dans la concession. J’ai toujours étéun combattant pour l’Allier. Je me battrai doncpour la RN 7. Cet axe estaussi prioritaire que laRCEA. Je m’ef forceraid’obtenir plus de créditsdans les PDMI pour ledoublement complet decette route nationale etpour la réalisation indispensable des contournements de Varennes, Villeneuve et Bessay.
Le préfet de l’Allier, PierreMonzani, roule pour la con-cession autoroutière et neprend pas les chemins detraverse. La RCEA à quatrevoies, c’est une réalité en2018 avec le recours auprivé : « La concession, c’estun turbo dans le moteur dela RCEA ».
PIERRE MONZANI. « Davantage de gendarmes pour contrôler la vitesse ou l’alcoolémie, c’est un cautère sur une jambe de bois pourla RCEA. Il fallait agir sur l’infrastructure pour limiter les accidents mortels ». PHOTO : PHILIPPE BIGARD
La route de la honteRCEA
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Supplément RCEA
EN 1993 PierreAndré Périssol, alors députémaire, a fait le forcing auprès du ministre des Transports
« Attentionàne pas être des Gaulois ! »
INTERVIEWPierre Raynaud
Après des décennies decrédits insuffisants déblo-qués pour la RCEA, l’Étatn’a-t-il pas opté pour la voiede la facilité avec la mise enconcession du tronçon Mont-marault/Saône-et-Loire ?Cette section n’échappepas à la règle. La concession au privé est la voiechoisie partout en Francepour des projets routierssimilaires. Attention à nepas être les seuls Gauloisen refusant cette alternative ! Dans ce cas, il faudraattendre notre tour. Et iln’interviendra que dansune trentaine d’années, aumieux. Pourtant, on rev i e n t d e l o i n a v e c l aRCEA…
Elle avait été menacéesous le gouvernement Balla-dur. Un député de l’Allieravait sauvé la tête de cetaxe… 1993, C’est une éta
p e c h a r n i è r e p o u r l aRCEA. Le gouvernements’interrogeait sur le maintien ou pas de son projetd’aménagement en deuxfois deux voies. Je suis intervenu auprès de BernardBosson, alors ministre del’Équipement, pour obtenir un tronçon à quatrevoies entre Dompierre etDigoin. Cette réalisation atout changé. Plus personne ne s’est posé de question ensuite sur la nécessit é o u n o n d e c e t t etransversale. Elle est primordiale pour l’Allier. Onintéresse aujourd’hui àcrédit les entrepreneurspour Logiparc 03, à Montbeugny. Avec une RCEA àquatre voies aux pieds dela zone logistique, on attirera les entreprises.
Si la concession est confir-mée en juin pour la RCEA, ilfaudra s’atteler à sa jumel-le, la RN 7… En cas de feuvert pour la mise en concession, la RN 7 deviendrala priorité. Notamment letronçon entre Moulins etla Nièvre. Car le trafic augmentera avec une RCEA àquatre voies, et les automobilistes seront nombreux à sortir à l’échangeur de Toulon, pour sediriger vers Paris. Il faut semobiliser tout de suite !
Se priver de la concession,c’est s’amputer d’une RCEAà quatre voies à un horizonproche, estime le maire deMoulins, Pierre-André Péris-sol. Il met en garde : « At-tention à ne pas être lesseuls Gaulois en refusantcette alternative ! »
PIERRE-ANDRÉ PÉRISSOL. « Le gouvernement Balladur s’interrogeait en 1993 sur le maintien ou pas de son projet d’aménager laRCEA en deux fois deux voies ». PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
La route de la honte RCEA
EN 1995 Gérard Dériot, alors président du Département, avait fait adopter une motion pour la concession
« La RCEA pourrait déjà être en 4 voies »
INTERVIEWPierre Raynaud
Le consensus politiqueprédomine dans l’Allier pourla mise en concession auto-routière de la RCEA . Unemobilisation des élus n’était-elle pas envisageable plustôt ? Alors président duConseil général, j’ai faitadopter en 1995, déjà àl’unanimité, une motionpour demander la mise enconcession autoroutière.Avec deux conditions : lemaintien des échangeurset la gratuité pour le cabotage. Mes homologues dela Creuse et de la SaôneetLoire en avaient fait demême.
Tous les élus avaient déjàcompris les intérêts d’uneRCEA à quatre voies. Il n’ya pas d’idéologie politique. On privatise ou pas,ce n’est pas la question.On désenclave l’Allier, on
limite l’hécatombe routière, on dynamise l’économie, voilà les enjeux.
Des enjeux qui sont tou-jours d’actualité. À vousécouter, la RCEA devraitdéjà être à quatre voies…C’est une certitude. Maisla Direction nationale desroutes a refusé de donnersuite à nos motions. On aperdu au minimum seize ans. La RCEA serait terminée aujourd’hui. Cedossier a été relancé par leprésident de la République lors de son déplacement à SaintPourçain, en2008. Trois mois après,une délégation plurielle del’Allier se rendait à l’Élysée…
Lors du débat public, desintervenants ont dénoncé lecadeau royal fait par l’Étatau futur concessionnaire, cardes aménagements ont déjàété réalisés et payés… Laconcession n’est pas unenouveauté. Le tronçonMontmaraultBizeneuilleest déjà concédé. Sans cesliaisons déjà aménagées,la part de l’État dans lep r o j e t d e c o n c e s s i o n(275 millions) ne seraitpas la même. La factureserait beaucoup plus lourde.
La concession autoroutièren’est pas une idée nouvellepour le sénateur de droite,Gérard Dériot. Il l’avait ré-clamée en 1995. Cette hypo-thèse a été écartée. Avecregrets, car « la RCEA à qua-tre voies serait terminéeaujourd’hui ».
GÉRARD DÉRIOT. Le sénateur de droite s’oppose à l’idéologie politique sur le dossier de la RCEA : « On privatise ou pas, ce n’est pasla question. On désenclave l’Allier, on limite l’hécatombe routière, on dynamise l’économie, voilà les enjeux ». PHOTO : PHILIPPE BIGARD
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Supplément RCEALa route de la honteRCEA
“ Il y a deux ans,au mois de mars,mon beaufrère alaissé sa vie sur lamême route, lemême village…,,De l’internaute, Pseudo ali-85
MONTBEUGNY Le maire bataille pour que l’échangeur qui permet au trafic de passer dans le bourg soit fermé
« Je ne veux plus des poids lourds »
Leïla [email protected]
L e maire fait parfois legendarme. Un arrêtmunicipal interdit aux
poids lourds de traverserle bourg de Montbeugny.Guy Charmetant est obligéde le leur rappeler.
Les chauffeurs ne sontpas censés quitter la RCEApour aller vers Moulins encoupant par Montbeugny.« Ils ont toujours une bonne raison de passer par lebourg… », sourit le maireGuy Charmetant. Mais labataille que mène le mairede Montbeugny ne se si
tue pas sur le terrain dubruit : « Les vingttrois lotsdu lotissement des Bruyères (le plus proche de laRCEA), se sont vendus envingtsix mois… Et je neconnais pas de personnesqui auraient déménagé deMontbeugny à cause dubruit de la RCEA. Lorsquedes personnes me contactent pour avoir un terrainet me demandent s’il y adu bruit, je leur dis “venezvoir, venez écouter si voust r o u v e z q u ’ i l y a d ubruit” ».
À Montbeugny, le problème, c’est surtout l’échangeur à la sortie du village,qui permet aux automobilistes et aux routiers dequitter la RCEA et de se
rendre à Yzeure et Moulins en coupant par lebourg de la commune. Unéchangeur dont le maireréclame la suppression :« Il avait juste été créépour des travaux. J’ai demandé lors du débat public sur la RCEA, qu’il soitfermé ».
Pour un échangeurEn échange, le maire de
mande la création d’unéchangeur un peu plusloin sur la RCEA, « au niveau du pont sur la routeMoulins/Chapeau ».
Il permettra d’accéder àune route d’environ 1,7 kilomètre (qu’il faudra construire) qui rejoindra la fut u r e p l a t e f o r m elogistique, Logiparc 03 (*) :
« Nous avons modifié lacarte communale pouraménager ce Logiparc. Ilne reste plus qu’à la présenter au Conseil municipal et à la voter. Auparavant, je veux simplementdes certitudes sur la suppression de notre échangeur actuel et la création
de ce nouveau tronçon deroute. Je ne freinerai pas leprojet mais on ne doit pasavoir les inconvénientsque représente la circulation des poids lourds surla commune ».
(*) Le Logiparc s’étendra sur184 hectares sur Montbeugny,ToulonsurAllier et Yzeure.
À Montbeugny, ce n’est pas la bataille contre le bruit lié autrafic de la RCEA que mène le maire mais celle, dans lecadre du projet de mise en concession, de la fermeture del’échangeur pour empêcher les poids lourds de passer parle bourg.
CIRCULATION. À vol d’oiseau, le lotissement des Bruyères, à Montbeugny, n’est qu’à quelques mètres du trafic de la RCEA. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
« Je ne connais pas depersonnes qui auraientdéménagé de Montbeugny àcause du bruit de la RCEA »GUY CHARMETANT. Maire de Montbeugny
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
Une butte comme rempart au bruit du trafic de la RCEA
AMÉNAGEMENT. À quelques mètres des terrains de football, la mairie a aménagé une butte en terre d’une centaine de mètres de long et de six à sept mètres de hauteur,le long de la RCEA : « Nous l’avons construite en 2006 contre le bruit du trafic, notamment le passage des poids lourds », explique le maire Guy Charmetant. Nousaimerions la prolonger encore un peu mais nous ne sommes pas, pour l’instant, propriétaires des terrains ». Si des haies d’arbres n’empêchent pas le bruit de sepropager, une épaisseur de terre est un bon rempart contre le bruit.
Quels sont les avantages et inconvénients d’habiter près de la RCEA ?
LIONEL THÉVENET47 ans, lotissement les BruyèresIl y a malheureusement plusd’inconvénients que d’avantages.Quand il y a des pics de circulationl’été, j’aimerais bien pouvoir dormirles fenêtres ouvertes. Mais le bruitnous réveille. C’est surtout le traficdes camions qui fait du bruit. Commeil y en a beaucoup…
ÉLIANE HALUSZEZAK50 ans, route de LusignyLà où j’habite, la RCEA ne medérange pas. En revanche, ma mèrehabite route de Thiel dans unemaison ancienne qui n’a pas dedouble vitrage et là, il y a beaucoupde bruit. La RCEA, je ne la prends pasparce qu’elle est trop dangereuse. Ily a trop de camions.
MICHEL ROUX57 ans, rue de l’AgricultureJ’habite dans le bourg et beaucoupde camions sortent de la RCEA etpassent par là pour aller àl’aérodrome. Ça fait du bruit et de lapoussière. En plus que ce soient lescamions ou les voitures, ils vont vite.Sinon, la RCEA elle ne me dérangepas. Je ne la prends jamais.
JEAN-PIERRE THUAULT63 ans, route de l’AgricultureDepuis ma maison, j’entends commeun ronflement selon l’orientation duvent. Cela fait une résonance. Nousvivions beaucoup dehors mais depuisquelques années, on est mieux àl’intérieur. Cette route reste un atout.Je l’utilise beaucoup pour aller àChâtel.
CHRISTIANE COURTOIS51 ansJe suis présidente du comité desfêtes et la RCEA n’a rien apporté dedirect aux associations si ce n’estfaciliter l’accès à Montbeugny. L’accèsdirect au bourg a des avantages pourle commerce, l’élevage. Et desinconvénients : le trafic soulève lapoussière.
è À VOTRE AVIS
Quels sont les avantages et inconvénients d’habiter près de la RCEA ?
VALÉRIE DEVAUX41 ansNous avons un hôtel-restaurant et chaquejour, nous recevons de nombreux clients.L’échangeur est primordial pour notreactivité et pour les touristes qui peuventfaire une halte. S’il est supprimé, celasera très préjudiciable à notrehôtel-restaurant et pour le commerce engénéral.
PAULA BARBOSA30 ans, rue des BruyèresCôté bruit, je ne suis pas du tout embêté.La RCEA passe au loin mais la maison estbien isolée ! Cette route, je ne l’empruntepas souvent vu le nombre d’accidentsqu’il y a. Mais si elle est aménagée en 2x 2 voies, peut-êtreque je la prendrai même pour venir àMoulins.
STÉPHANE ROOSE33 ans, rue des BruyèresLes avantages, j’avoue que je ne les voispas bien…J’entends le bruit du trafic quand le ventvient de notre côté. Mais cela ne nousempêche pas de laisser les fenêtres denotre maison ouvertes. En fait, je pensequ’on ne fait plus vraiment attention aubruit qu’il y a.
è À VOTRE AVIS
“Personnene s’inquiètede l’étatpsychologiquedu chauffeur,traumatiséà vie !!!! ,,Internaute, Fouidibette
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Supplément RCEALa route de la honteRCEA
“ Nous ne vousoublierons pas. Vosamis prendrontsoin de la petiteTiffany. Reposez enpaix,,De l’internaute, pseudo Dede03
COMMERCES Le trafic, notamment de poids lourds, est une aubaine pour les commerces au bord de la RCEA
Flux de camions et afflux de clients
Leïla [email protected]
S ans les routiers, sonrestaurant serait videcomme la remorque
d’un camion qui vient dedécharger. Sur les coupsde midi et à l’heure du dîner, son restaurant estplein. « Au déjeuner, jepeux monter à 70/80 couverts. Le soir, j’en fais en
tre 150 et 200 ». Le flux dec a m i o n s e t , d a n s u n emoindre mesure, d’automobilistes qui empruntentla RCEA, alimente le restaurant routier d’Oscar Laporta, à VitryenCharoll a i s , à c ô t é d eParayleMonial.
« Sans cette route, c’estcertain, je ne vivrais pas !C’est grâce aux gens depassage et aux routiers
que je travaille ». D’autantque les routiers ne s’arrêtent pas uniquement pourmanger. « Nous avons unparking qui est surveillépar des caméras et un gardien. Nous avons égalem e n t d e s d o u c h e s » .Autant de raisons pour lesroutiers de faire une haltechez Oscar et y passer lanuit.
70 % des clientsD’ailleurs, les chauffeurs
représentent 70 % de laclientèle du restaurant.« Nous avons aussi des représentants commerciaux,d e s m i n i b u s d e t r a vailleurs saisonniers quifont le Portugal/La Suisse.On est très bien placé just e à c ô t é d’ u n é c h a n geur ». Le restaurant em
ploie quinze personnes.Ses clients ne sont pas
des routiers. Florence CodemoJouan, originaire dela région parisienne, s’estinstallée à ParayleMonial , i l y a trois ans etdemi. Dans sa maison située sur une départementale parallèle à la RCEA,elle a aménagé une piècepour en faire une chambred’hôtes de quatre places :« Pour l’instant, cela mepermet d’avoir un revenucomplémentaire ».
Une chambre qui n’aguère de mal à trouver deshôtes : « C’est sûr, le faitd’être à côté de la RCEA ades avantages. Beaucoupde gens qui traversent laFrance pour partir en vacances s’arrêtent chezmoi. Souvent juste pour
passer la nuit. Pour euxc’est pratique de ne pasavoir à rentrer dans Paray.Du coup, du mois d’avrilau mois de juin, il y a régulièrement du monde ».
L’été, ce sont les touristes qui prennent le relais.ParayleMonial attire despèlerins de toute la France
p o u r l e c u l t e d u S a créCœur (*). Une aubaineaussi pour la chambred’hôtes de Florence CodemoJouan.
(*) Au XVIIe siècle, le Christ serait apparu à sainte MargueriteMarie, née à Vérosvre (à côté deParay) et religieuse au monastèrede la Visitation.
Du monde sur la route, ce sont des clients dans les commer-ces qui bordent la RCEA. Le routier d’Oscar Laporta, àVitry-en-Charollais, sert parfois jusqu’à trois cents couvertspar jour. Et la chambre d’hôtes de Florence Codemo-Jouan,à Paray, n’a guère de mal à accueillir des voyageurs.
DÉJEUNER ET DÎNER. Le restaurant d’Oscar Laporta à Vitry-en-Charollais vit principalement du trafic des poids lourds. Les routiers représentent 90 % de sa clientèle. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
« Beaucoup de gens s’arrêtentpour passer une nuit »FLORENCE CODEMO-JOUAN. Elle a ouvert unechambre d’hôtes au bord de la RCEA
JEUDI 21 AVRIL 2011 31
Supplément RCEALa route de la honte RCEA
ParayleMonial est à un carrefour de la RCEA
TRONÇON. Dans la SaôneetLoire, la RCEA forme une patted’oie. Au niveau de ParayleMonial (près de 10.000 habitants), la route se divise en deux. Une voie va versMâcon, l’autre branche conduit les automobilistes vers MontceaulesMines. Mais jusqu’en 1995, la route coupait le bourg : « Nous avons pris la décision de réaliserune déviation au nord de la ville de Volesvre à Vitry, détaille le maire JeanMarc Nesme. Le long de cette déviation, nous avons aménagé un parc économique de110 hectares, sur lequel 70 à 80 entreprises se sont installées ».
Quels sont les avantages et les inconvénients de vivre à côté de la RCEA ?
RENÉ DESSERT74 ansC’est bien d’avoir cette route. Je vaisvoir mon fils dans l’Ain, je suisrapidement sur l’autoroute avec laRCEA juste à côté. Paray est aussibien desservi. Quant au bruit,personnellement j’entends plus lepassage du train que les voitures etles camions de la RCEA.
ANA DUPONT41 ansJe travaille à Digoin, je vais souventà Charolles, et pour moi c’est trèspratique d’habiter juste à côté de laRCEA.La proximité de cette routea été un critère pour nous installerici. Elle ne perturbe pas plus que çala vie de notre famille.
PAUL COGNARD69 ansIl y a une circulation intense et il y aeu beaucoup de morts sur cet axe.De Mâcon à Paray, c’est impossiblede doubler. C’est une routedangereuse. Mais je pense que pourle développement de l’industrie et del’économie, ça ne peut être qu’unbien.
ROBERT74 ansÀ vol d’oiseau, j’habite à 800 mètresde la RCEA et parfois selon le sens duvent, j’entends le trafic mais ça neme dérange pas. J’étais mécanopendant quarante ans. La seule chosequi m’embête, c’est si un jour lesgens du coin doivent payer pour yrouler.
EDMOND WALCZAK67 ansPour les gens d’ici qui doiventl’emprunter, la RCEA est une bonnechose. Avant que la déviation soitcréée, il y avait du bruit jour et nuitpour les riverains. C’était le défiléincessant entre Moulins et Charolles.Cela créait aussi de la pollution. Ladéviation a fait beaucoup de bien.
è À VOTRE AVIS
Quels sont les avantages et les inconvénients de vivre à côté de la RCEA ?
ÉRIC PLURIEL44 ansL’inconvénient, ça pourrait être lebruit. Mais notre maison est un peuen retrait de la route. Le principalavantage, c’est d’être bien desservi.Pour aller vers Digoin etMontceau-les-Mines, c’est pratique. Ilfaut surtout que la RCEA continued’être gratuite pour nous.
PAUL DUCAROUGE62 ansLa RCEA, c’est vraiment bien ! J’aibeaucoup roulé pour mon métier etau début, je ne l’avais pas… Il fallaitêtre patient. D’un point de vueéconomique, cette route est unegrande chance pour Paray. Je suispour cette route et pour la mise enconcession.
MARTHE GRENOT72 ansAvant, la maison était entourée deprés. Il y avait juste une petite route.Mais je suis née là, dans la ferme oùje vis au bord de la RCEA.Alors depuis le temps, le bruit dutrafic, je m’y suis habituée. Etmaintenant il ne me gêneabsolument pas.
RICHARD PLAA54 ansCette route est nécessaire à la vieéconomique et culturelle duCharollais. Désenclaver cette partiede la Bourgogne est nécessaire à lasurvie de la dernière industrie : letourisme. Si elle devient payante, ellelaissera les communes traversées surle bord de la route
JEAN CHEMY72 ansJ’habite aux “Mouillargues” près de laroute et elle crée des nuisancessonores. Cela fait quarante ans quej’habite ici et avant la constructionde la RCEA, c’était la campagne. Enrevanche grâce à la RCEA, beaucoupde commerces se sont montés le longde la route.
è À VOTRE AVIS
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“ Mortelle laRCEA le resteratant que leferroutagen’allégera pas letrafic entre est etouest ,,De l’internaute, Nic
MODERNISATION DE L’AXE Les entrepreneurs favorables à la concession autoroutière pour désenclaver l’Allier
1.300 emplois perdus depuis 2008
Pierre Raynaud
L’ Allier et la SaôneetLoire doivent affronter des problémati
ques similaires : enclavem e n t , d i f f i c u l t é séconomiques et baisse démographique.
La RCEA, aménagée endeux fois deux voies, devrait lever ces nombreuxhandicaps. Les Chambresde commerce et d’industrie de l’Allier et de la SaôneetLoire se positionnent sans concession pourla mise en concessionautoroutière de la RCEA.JeanMichel Chavarochette, président de la CCI deMoulinsVichy, est clair :
« Toute réalisation à unhorizon lointain (2045 aurythme actuel des créditsd’État) entraînerait unemarginalisation économique durable de l’Allier.
1 L’attractivité. La compétitivité d’un territoiredépend souvent de son
accessibilité. À défautd’une autoroute dans l’estde l’Allier et dans l’ouestde la SaôneetLoire, lesacteurs économiques misent sur une RCEA à quatre voies dans les plusbrefs délais :
« Sans infrastructure routière moderne, non seulement les entreprises perdent en compétitivité maisla difficulté à accueillir denouvelles entreprises, attirées par des territoiresmieux desservis, ne permet pas de régénérer letissu industriel existant ».Sur ces cinq dernières années, une seule implantat ion d’entrepr ise employant plus de 70 salariésa vu le jour sur le bassin
Moulins/DompierresurBesbre.
« L’enclavementcontraint ledéveloppement »
« Lorsque la conjonctureest difficile, l’économie locale en paie un lourd tribut : 1.300 emplois salariés perdus depuis 2008sur les secteurs de Moul i n s e t D o m p i e r r e » .L’ouest de la SaôneetLoire et tout le nord de l’Allier, le long de la RCEA,font partie, selon les CCI,des zones qui ont perduen France le plus d’emplois salariés privés en20072008.
2 Une position centralemal exploitée. L’économie de l’Allier est ma
joritairement tournée versla région RhôneAlpes,premier client et fournis
seur : « Permettre au département d’être relié àcette région par un axeautoroutier performant estessentiel à son développement ». L’Allier, à causede la RCEA et de la RN 7pas aménagées intégralement en quatre voies,n’exploite pas à fond saposition géographiquecentrale.
« On bénéficie pourtantd’un positionnement stratégique exceptionnel enFrance et en Europe cequi nous offre l’opportunité de dynamiser l’économie, en particulier en dir e c t i o n d e s a c t i v i t é slogistiques ». Les collectivités et les CCI s’y préparent avec des projets devillages étapes et de zonesd’activités ambitieuses :Logiparc 03 à Montbeugny, zone de la Loue àMontluçon, du Châteaud’eau à Montmarault, etc.
3 Érosion démographi-que. L’Allier fait partiedes sept départements
français qui perdront deshabitants ces trente prochaines années : 337.700habitants en 2040 contre343.100 aujourd’hui. L’enclavement ne facilite pasl’implantation de nouvelles familles. C’est un scénario noir pour les entrepreneurs.
« C’est le signe d’une faible attractivité du territoire, mal desservi par desaxes routiers performants
et sûrs. Ces perspectivesdémographiques, avectoutes leurs conséquencesnotamment en terme der e s s o u r c e s e n m a i n d’œuvre (tranche 2059ans : 18 % entre 2007et 2040) ou de transmission d’entreprises, montrent l’importance des actions à entreprendre pouraméliorer l’attractivité del’Allier. L’enclavementcontraint le développement ».
La RCEA devrait être unatout économique. Elle de-meure un handicap et nejoue pas à plein son rôled’attractivité des territoires.La faute à un aménagementpoussif en quatre voies, quidonne des suées aux ac-teurs économiques de l’Al-lier et de la Saône-et-Loire.
LE PAL À SAINT-POURÇAIN-SUR-BESBRE. Le site touristique le plus fréquenté de la région accueille 500.000 visiteurs par an. Ce qui le place au 5e rang des parcs d’attractions français. Le principal poten-tiel de développement du Pal se situe dans la région lyonnaise, qui constitue un réservoir d’un million de personnes. Le Pal souffre donc du sous-dimensionnement de la RCEA. PHOTO : J.-MARC SCHAER
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Supplément RCEA
EN CHIFFRES
22,5En pourcentage, le poids de l’emploiindustriel dans l’Allier (18 % au niveaunational) : « Il faut améliorer lacompétitivité des entreprises de cesecteur (Sagem, Bosch, Ligier, etc.) ».
11.560Le nombre d’entreprises que représententles deux Chambres de commerce etd’industrie de l’Allier.
1.300Le nombre d’emplois perdus depuis 2008sur les secteurs de Moulins et Dompierre :« La RCEA à quatre voies est capitale pourl’économie et l’emploi ».
6.000Le nombre d’emplois de la logistique etdes transports dans l’Allier et enSaône-et-Loire, deux activités appelées àse développer avec la RCEA à 4 voies.
1,6En pourcentage, la baisse de lapopulation bourbonnaise entre 2007et 2040. L’Allier fait partie des septdépartements à perdre de la population.
18En pourcentage, la baisse de la tranched’âge 20-59 ans entre 2007 et 2040, uneconséquence désastreuse notammentpour les ressources en main-d’œuvre.
CCI DE MOULINS-VICHY Pour le président JeanMichel Chavarochette, il faut se préparer dès maintenant
« La RCEA à 4 voies dopera l’économie »
INTERVIEWPierre Raynaud
Un spécialiste des ques-tions économiques a indi-qué, lors du débat public,que le lien entre le dévelop-pement des infrastructureset de l’économie n’est pasautomatique. Cependant nepas disposer d’infrastructu-res modernes est un réelhandicap. Comment se posi-tionne la Chambre de com-merce et d’industrie de Mou-lins-Vichy sur le doublementde la RCEA ? Je ne partagepas ce point de vue. Àl’époque galloromaine,on se fixait le long desvoies, avec l’arrivée deschemins de fer, la gare estdevenue un lieu d’implantation naturel. Les autoroutes sont aujourd’huicet aimant. L’Allier nepeut pas faire l’économied ’ u n e R C E A à q u a t r evoies, à moins de refuserl’avenir.
On n’a plus le choix. UneRCEA à deux voies marginaliserait l’économie. Àquatre voies, elle doperaitl’activité. Nous sommesfavorables à la concession,seule façon réaliste pourque cet axe soit aménagéen deux fois deux voies leplus rapidement possible.
Des territoires enclavés,des entreprises en manquede compétitivité, une éro-sion démographique… LaRCEA à quatre voies n’effa-cera pas tous ces handicaps.Quelles retombées peut-onescompter de cet axe mo-dernisé en autoroute ? LaRCEA à quatre voies ne réglera pas tout d’un coupde baguette magique.Mais elle donnera unenouvelle impulsion à notre département. Avec sacentralité, ses axes nordsud (A71, A77RN 7, A 6)e t s o n a x e e s t o u e s t(RCEA), l’Allier bénéficied’un positionnement géographique exceptionnel. Ilfaut exploiter cet atout àf o n d p o u r d y n a m i s e rl’économie. En confortant
les entreprises sur notreterritoire et en attirant denouvelles sociétés, le cercle deviendra vertueux.On freinera ainsi l’érosiondémographique. La logique actuelle est différente : pas de nouvelles usin e s , p a s d e p o s t e s àpourvoir et des famillesqui déménagent pourtrouver un emploi.
« Des famillesdéménagentpour trouverun emploi »
Sans des infrastructuresroutières modernes, les en-treprises perdent en compé-titivité. Mais est-ce pourautant un atout pour denouvelles implantations ? Àcause d’un accident, laRCEA peut être coupée àtoute circulation pendantde longues heures ou durant des jours comme cethiver à cause des intempéries. Si votre livraison setrouve bloquée, c’est trèspénalisant. Pour facilitercette proximité clientsfournisseurs, il faut encourager l’accessibilité.Elle passe par une RCEA àquatre voies. C’est à ceprix que le départementsera compétitif et améliorera son image.
L’Allier éprouve le besoinvital d’un renouveau écono-mique : 1.300 emplois ontété perdus, par exemple,depuis 2008 sur les secteursde Moulins et de Dompierre-sur-Besbre. Attendre encoreplus d’une dizaine d’annéespour la RCEA à quatre voies,n’est-ce pas le bout du mon-de pour l’emploi ? L’emploin’est pas sécurisé dansl’Allier. Les entreprises nes’implantent pas naturellement. Nous avons desarguments (un cadre devie agréable, des terrains,une maind’œuvre qualifiée, etc.) mais pas les infrastructures. On attireral’emploi lorsque la RCEApuis la RN 7 seront modernisées. Si la concessionautoroutière est officialisée fin juin, il ne faudrapas perdre de temps. Nousdeviendrons des VRP del’emploi.
L’Allier ne veut pas devenirune réserve d’indiens. Jean-Michel Chavarochette croitaux atouts économiques del’Allier : « On ne peut pas sepriver d’une RCEA à quatrevoies, à moins de refuserl’avenir ».
JEAN-MICHEL CHAVAROCHETTE. « Si la concession autoroutière est officialisée fin juin, il ne faudra pas perdre de temps. Nous devien-drons des VRP de l’emploi ». PHOTO : PHILIPPE BIGARD
La route de la honte RCEA
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TRANSPORT D’ANIMAUX La construction de la RCEA a incité la Sicagieb à déménager à Montbeugny en 1977
Sur le chemin de l’exportation
Leïla [email protected]
L a Sicagieb a quitté leDonjon, où elle avaitune ferme, et Moulins
où la coopérative avait sesbureaux. En 1977, elle adéménagé : « Lorsqu’on aappris qu’une route allaitse construire, on a cherché à partir du Donjon »,explique Joël Auzelle, directeur de la coopérativequi collecte et exporte desbovins charolais. « Nousavons acheté ici, cette fer
me, à Montbeugny qui allait être coupée par lanouvelle route ». La Sicagieb a ainsi trouvé chaussure à son pied. À certaines périodes de l’année,notamment l’automne aumoment de l’exportationde broutards vers l’Italie,c’est un balai de camions,le jour et la nuit : « Nouspartons chercher les animaux dans les fermes, ilssont amenés ici et repartent quelques heures plustard en camion vers les
pays avec lesquels noustravaillons. Nous avonsune quarantaine de passages par jour. Être près dela RCEA, c’est intéressant.On gagne du temps ».
Trouver d’autresdébouchés que l’ItalieLes clients italiens et
leurs camions à doubleétage aussi. L’Italie est leprincipal acheteur, à l’exportation, des charolais dela Sicagieb. « Cela faitquarante ans que noustravaillons avec l’Italie (*),précise Maurice Chopin,président de la Sicagieb.Les Italiens représentaient95 à 96 % de nos exportations ». C’est en train dechanger. La Sicagieb découvre de nouveaux marchés. Parmi les pistes sér i e u s e s e t l e s p l u sprometteuses, il y a l’Algérie : « On a commencéavec quelques camions en
2010. Nos clients viennentici. On leur fait faire letour des fermes, ils choisissent les animaux ». Ensuite départ pour l’Algérie.Par la route jusqu’au portd e S è t e ( e n v i r o nsept heures) et par bateaujusqu’à Alger (un jour etdemi de traversée). « LesAlgériens sont vraimenttombés amoureux de noscharolais ! Le bœuf estcher en Algér ie mais ilsemblerait que la consomm a t i o n s e d é ve l o p p e.C’est encore difficile à diremais l’Algérie est peutêtreun marché d’avenir ».
Tro p d é p e n d a n t e d umarché italien, la Sicagiebtente de diversifier ses débouchés. « Notre objectifest de faire augmenter lescours et d’aider les éleveurs ». Si l’Algérie paraîtêtre un candidat sérieux,la coopérative de Montbeugny travaille timide
ment pour l’instant avec laSlovaquie et l’Ukraine(achats de femelles reproductr ices), le Liban, laHongrie (broutards), et laTurquie : « Depuis 2010,les Turcs nous prenaientdes carcasses. Ils veulentmaintenant acheter desanimaux vivants. On setient prêts à exporter ».
Les camions vont continuer à faire des vaetvient dans la cour de laferme. Si la coopérativevoit d’un bon œil l’élargissement de la RCEA en 2 x2 voies, elle espère quel’échangeur de Montbeugny qui dessert la coopérative reste ouvert : « Onserait alors obligé de faireun petit détour d’une dizaine de kilomètres parChapeau sur des petitesroutes inadaptées à descamions à double étage ».Si bien qu’après avoirquitté le Donjon, la Sica
gieb pourrait envisager dequitter Montbeugny.
(*) Les animaux sont engraisséspendant sept mois en Italie, dansla région de Venise. Ils sont abattus en Italie pour la consommation locale.
EN CHIFFRES
3.500animaux collectés par anpar la Sicagieb dansl’Allier et les départe-ments limitrophes : Saô-ne-et-Loire, Nièvre, Puy-de-Dôme, Loire. Plus de lamoitié (60 %) sont expor-tés.
30personnes travaillent à laSicagieb dont 9 commer-ciaux.
1.200éleveurs adhèrent à lacoopérative Sicagieb.
Sans la RCEA, la Sicagieb ne se serait sans doute pasinstallée à Montbeugny. La route facilite le balai de ca-mions. La suppression de l’échangeur envisagée avec lamise en 2 x 2 voies de la route pourrait faire déménagerl’entreprise ailleurs…
SUR LA ROUTE. Les bovins collectés dans les exploitations sont amenés à la ferme de la Sicagieb. Les camions quittent la RCEA avec l’échangeur de Montbeugny PHOTO : JEAN-MARC SCHAER
« Les Algériens sont vraimenttombés amoureux de noscharolais ! »JOËL AUZELLE. Directeur de la Sicagieb
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FERME. Les animaux sont déchargés à la ferme de la Sicagieb. À leur arrivée, les boucles et les passeports des animaux sont vérifiés.Ils sont également marqués de différentes couleurs : chaque couleur correspond à un client pour faciliter le tri des animaux lorsqu’ilssont déchargés. PHOTOS : JEAN-MARC SCHAER
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DOMPIERRE/BESBRE PSA redoute l’hiver et ses couches de neige qui bloquent le trafic de camions
Peugeot-Citroën sur la route et... l’eau
Leïla [email protected]
L e directeur n’a jamaiseu à arrêter l’usine.Ravitaillée en matières
premières (fonte) par camion depuis la région parisienne, l’est, le sudest,le nord de la France, l’usine PSA PeugeotCitoën, àDompierresurBesbre,
n’aime pas les coups defroid car lorsque la neigetombe sur la RCEA, aupoint de perturber le trafic, c’est l’usine qui tousse.
« Les camions sont bloqués et la matière première (la fonte) dont nousavons besoin aussi, explique François Cosson, directeur de l’usine. Celapourrait empêcher l’usinede fonctionner. Nous pouvons tenir deux à troisjours. Après… » C’est lapanne. Cela ne s’est jamais produit. Et pour éviter que cela arrive, François Cosson roule pour lamise à 2 x 2 voies de laRCEA.
« Cela diminuerait le ris
que de blocage du traficpar mauvais temps ».
Cela faciliterait aussi letrafic des employés del’usine (sur 750 salariés,120 utilisent la RCEA) et letrafic des poids lourds :« Tous les jours, il y a environ soixantetreize camions qui entrent et sortent de l’usine et unevingtaine qui gravitentautour de notre site », précise Patrick Parvery, responsable de la logistique.
« Être en prise directea v e c l a RC E A , a p p u i eFrançois Cosson, c’est ungain de temps. Cela fluidifie le trafic et le sécurise.C’est rapide. Les camionsarr ivent aux portes del’usine même si dans notre métier, i l n’y a pasd’obligation de livraison àl’heure près ».
Si la RCEA telle qu’elleest actuellement n’enrayepas l’activité de l’usinePSA, elle est un frein àl’installation de nouvellesentreprises : « Nous pourr ions faire rapprocher
d’autres activités autourde notre usine pour, parexemple, le stockage etdes prestations pour despièces de recyclage. Nousaurions besoin d’avoir cesmétierslà, à proximité dechez nous, et ils sont loin.D’ailleurs, il y a une zoned’activités à côté de notreatelier qui est prête à accueillir des entreprises ».
Le nombre de camionspourrait toutefois diminuer. Depuis l’année dernière, l’entreprise teste unmode de transport ancien : le bateau. « Ce n’estencore qu’expérimentalprévient François Cosson.Une péniche par semainequitte Dompierre pourMulhouse. Nous la chargeons de pièces de freinag e . 2 0 % d u v o l u m e(1.600.000 pièces) quenous produisons, part ainsi par bateau ». Chaquefois qu’une péniche navigue sur la Besbre et la Loire, c’est une douzaine decamions en moins sur laRCEA.
L’usine PSA Peugeot-Citroënroule pour la mise en 2 x 2voies de la RCEA. L’entre-prise installée à Dompierre-sur-Besbre bénéficie déjà dela proximité de la route :« gain de temps et d’effica-cité » résume le directeur del’usine.
USINE. L’entreprise PSA Peugeot-Citroën fabrique des pièces de freinage et des carters-cylindres en fonte. PHOTOS : JEAN-MARC SCHAER
« Être en prise directe avec laRCEA, c’est un gain de temps.Cela fluidifie le trafic et lesécurise »FRANÇOIS COSSON. Directeur de l’usine PSAPeugeot-Citroën à Dompierre
L’entreprise investit11 millions pour ses lignesL’entreprise PSA Peugeot-Citroën fabrique des carters-cylindres et des pièces de freinage.
Elle produit 600.000 carters par an et 7 à 8 millions de pièces de freinage. 90 % des carterscylindres sont expédiés à Metz (Moselle) et le reste part àTrémery (Moselle) pour être usinés. Les disquesvont vers Mulhouse et Caen (Normandie).
« Nos carters sont en fonte et équipent les voituresde plus de 130 à 140 chevaux », détaille FrançoisCosson, directeur de l’usine de Dompierre.
Un volume de production « stable » précise François Cosson.
L’entreprise prévoit d’adapter ses lignes de production cet été. Elle investit 8 millions dans la lignequi fabriquera la nouvelle génération de carters cylindres (Euro 6) « moins producteurs de gaz carbonique et de particules diesel ». Trois millions serontégalement dépensés dans l’adaptation de la nouvelle plateforme pour les pièces de freinage avec une« nouvelle fonte et une nouvelle géométrie des pièces ».
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INDUSTRIE. Une fois fondue, la fonte sert à fabriquer les carters cylindres. L’usine de PSA Peugeot-Citroën, à Dompierre-sur-Besbre,fabrique aussi des disques de freinage. PHOTOS : JEAN-MARC SCHAER
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BOURBON-LANCY Terres d’or livre du fromage conditionné aux centrales d’achats de la grande distribution
L’impact des péages est insignifiant
Pierre Raynaud
T erres d’or, à BourbonLancy, vit dans l’ombre de Fiat Powertrain
(exIveco), premier employeur de la commune deSaôneetLoire avec 1.480salariés. Après la liquidation judiciaire de Fromagères Routhier, Daniel
Goetschy redémarre l’activité en janvier 1988. Terresd’or conserve 44 emploissur cent quatrevingt et leconditionnement du fromage : 2.000 tonnes sontexpédiées la première année vers les centralesd’achats des enseignes dela grande distribution.
Le Poucet n’est pas devenu ogre, mais il a pris duvolume. Terres d’or emploie cent personnes et livre 12.500 tonnes aux centrales de Carrefour, Lidl,Intermarché, Auchan etM é t r o : 9 . 0 0 0 t o n n e sd’Emmental râpé, en portions, et en tranchettespour les sandwicheries,3.000 tonnes de raclette entranchettes, 250 tonnes defromage fondu décoré auxn o i x e t 2 5 0 t o n n e s d e
Comté : « Cette activité aété transférée dans un atelier du Doubs, car on nepeut emballer ce produit,hors de sa zone d’Appellation d’origine contrôlée ».
La cadence s’est intensifiée sur les quatre quais del’entreprise. C’est une valse de 70 à 80 camions parsemaine entre l’acheminement de la matière première, des bobines de filmet la livraison des produitsconditionnés dans l’Hexagone. L’export reste marginal. Il concerne 4 à 5 % duchiffre d’affaires de 2010(50 millions d’euros au total contre 58 en 2009).
« On livrait une fois parsemaine, il y a dix ans.Aujourd’hui, ce sont quatre livraisons et Carrefourva nous en imposer six au1e r juin. On ne peut pasanticiper les commandesdes clients, à cause desdates de péremption étiquetées sur l’emballage. Ilfaut être réactif pour conserver ou gagner des marchés ». Ce qui imposepour l’entrepreneur une
RCEA à quatre voies dansl’Allier et la SaôneetLoire. Des livraisons arrivéesen retard se traduisent parde fortes pénalités. La répétition peut entraîner laperte du marché.
« On veutde l’accessibilitéet de lasécurité »
« Un camion couché surla RCEA, qui paralyse l’axependant des heures, leclient s’en moque. Il y a dela souplesse l’hiver avecles conditions météorologiques. Pas le reste del’année. La RCEA à quatrevoies, c’est vital pour la logistique, c’est vital pournous qui mettons, chaqueannée, 25.000 tonnes demarchandises sur les routes avec des délais strictsde livraison entre les approvisionnements et les livraisons. On serait beau
coup plus précis sur leshoraires avec un axe autoroutier. Aujourd’hui, onfait des prouesses tous lesmatins. Nous sommes tributaires des donneursd’ordre inflexibles ».
Daniel Goetschy, désormais président du conseilde surveillance, ne s’oppose pas à payer un péage :« L’impact serait insignifiant. Ça représente quoi50 km de plus sur des trajets de 700 km. Avec unequatre voies, on serait plusperformant. Nous, ce quel’on veut, c’est de l’accessibilité et de la sécuritépour les chauffeurs ». Terres d’or a pratiquementexternalisé son ser vicetransport. La société aconservé deux semiremorques sur huit :
« Une automobiliste aperdu le contrôle de sonvéhicule, en juillet 2010 àGénelard (SaôneetLoire),et est venue percuter notre poids lourd qui partaitlivrer sur Montceau. La direction du tracteur a étédétruite et le semiremor
que incontrôlable a traversé la chaussée. Heureusement qu’il n’arrivait aucunautre véhicule en face… Ily a eu deux morts dans lacollision. Notre chauffeura été traumatisé. Il n’a paspu reconduire durant troismois. On l’a protégé audépart, avec un doublon ».
Une RCEA à quatre voiesdésenclaverait l’ouest dela SaôneetLoire : « Si çacontinue, on va aller s’inst a l l e r e n Bre s s e, c h ezM. Montebourg parce que,pour son territoire, le faitqu’ i l y ait l ’autoroutepayante, ça ne le gênepas ! On souffre de l’enclavement. C’est un freinpour le recrutement ».
La RCEA en quatre voiesdeviendra un atout. Maispour gagner en compétitivité, Terres d’or ne peutpas se permettre le luxed’attendre 2018. Elle inve s t i ra 2 m i l l i o n s s u rdeux ans et demi pour renouveler une partie deson parc de machines etaméliorer les cadences deproduction.
Terres d’or met, chaque an-née, 25.000 tonnes de fro-mage sur la route. L’entre-prise de Bourbon-Lancy livredes centrales d’achat de lagrande distribution. Letemps est son ennemi. PourDaniel Goetschy, présidentdu conseil de surveillancede Terres d’or, « la RCEA àquatre voies, c’est vital pourla logistique, c’est vital pournous ».
SUR LES QUATRE QUAIS. C’est une valse de soixante-dix à quatre-vingts camions par semaine entre l’acheminement de la matière première, des bobines de film et la livraison des produits emballés dansl’Hexagone. PHOTO : PHILIPPE BIGARD
« La RCEA à quatre voies,c’est vital pour la logistique,c’est vital pour nous ».
DANIEL GOETSCHY. Président du conseil desurveillance de Terres d’or.
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TOUT UN FROMAGE. Terres d’or emploie cent personnes et livre 12.500 tonnes aux centrales d’achats de Carrefour, Lidl, Intermarché,Auchan et Métro : 9.000 tonnes d’Emmental râpé, en portions, et en tranchettes pour les sandwicheries, 3.000 tonnes de raclette entranchettes, 250 tonnes de fromage fondu décoré aux noix et 250 tonnes de Comté. PHOTOS : PHILIPPE BIGARD
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“ Les élus de laCreuse voisineseraientils plusefficaces et mieuxentendus que nosélus ? ,,De l’internaute, Papyjo73
LAMAIDS A l’ouest de Montluçon, la déviation a permis d’accueillir une population plus jeune
Les enfants font revivre le village
Fabrice Redon
E n ce jeudi ensoleillé,sept gamins jouent auballon sur la place de
l’Église, rénovée. Personnene craint d’aller récupérerle « cuir » sur la route.
Depuis quatre ans, lespoids lourds ne passentplus dans le bourg de Lamaids. De temps à autre,une voiture pointe le boutde son nez. Outre les locaux, des automobilistes
venus de Soumans ou deBoussac. De la Creuse voisine.
Le village baigne d’unedouce insouciance et personne ne s’en plaint. Laréalisation du contournement à deux fois deuxvoies a apporté ce quetout le monde attendait :le calme !
Le jour de l’inauguration,en février 2007, beaucoupont eu une pensée pourGaby, Henri et Marcel. Euxqui espéraient tant cetaménagement.
Jacqueline, elle aussi disparue, était plus partagée.« Elle aimait le contactavec les routiers, se souvient Madeleine, une riveraine. Pendant trois déc e n n i e s , l e s d e u xrestaurants ont tourné àplein régime. Il y avait de
l ’ a n i m a t i o n d a n s l ebourg ». L’ancienne RN145 est devenue une routesûre. Pas le moindre accident grave à déplorer depuis la mise en place de ladéviation. La « maudite »courbe de l’église n’en aplus que le nom.
Plus un seul accidentOubliée la cabine télé
phonique maintes fois enfoncée au point d’être déplacée quelques mètresp l u s l o i n . Ou b l i é s l e sdommages causés aux habitations des riverains pardes camions devenus fous.Qui un portail, qui une véranda…
Lamaids, qui comptait600 âmes au début duXXe siècle, ne perd plusd’habitants. Elle en gagne.136 à la mise en serviced u c o n t o u r n e m e n t ,
203 aujourd’hui. Un lotissement de onze pavillonsHLM a été réalisé derrièrela mair ie. Il abrite unequarantaine de nouveauxhabitants. Des jeunes avecdes enfants.
« En 2001, on envoyaittrois gamins à l’école. Désormais, ils sont une quinzaine à fréquenter le regroupement pédagogiqueintercommunal », se réjouit le maire, Noël Meunier.
Avec la 2 x 2 voies, Lamaids (830 hectares) estdevenue une communeattractive. Elle n’est plusqu’à sept ou huit minutesde Montluçon contre unbon quart d’heure avecl’ancienne nationale.
Les propriétaires privésne s’y sont pas trompés eninvestissant dans des maisons neuves ou en réhabi
litant de vieilles bâtissesautour du bourg.
Cet afflux de populationa obligé la municipalité àengager des travaux importants. La deuxièmetranche de l’aménagementdu bourg doit débuter enjuin, la réalisation de l’assainissement collectif esta t t e n d u e à p a r t i r d e
l’automne. Sans oublier leprojet de constructiond’une salle socioculturelle.
Finalement, Lamaids nevoit plus qu’un seul inconvénient à vivre sans lespoids lourds. « Quand il ya eu de la neige cet hiver,on n’a pas été dégagé aussi vite », constate, philosophe, le maire.
La mise à deux fois deuxvoies de la RCEA dans l’Al-lier a commencé par La-maids. En 2007, le contour-nement était ouvert au suddu bourg. Depuis, un lotisse-ment HLM a été construit etla commune s’est rajeunieen gagnant soixante-septhabitants.
JEUNES. Pour Jessy (10 ans), Jason (13 ans), Maixance (13 ans), Sarah (9 ans), Mickaël (13 ans), Alisson (12 ans) et Jonathan (14 ans), tous arrivés à Lamaids après 2007, jouer au ballon en bordure del’ancienne RN 145, désertée par les poids lourds, n’est plus un problème.
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
Montluçon : un partenariat public/privé gagnantgagnant
ON AVANCE. Les travaux du contournement nord de Montluçon touchent à leur fin. Après Lamaids et Quinssaines, le troisième chantier conduit par la directionrégionale de l’Équipement (services de l’État) va de l’échangeur de Domérat/Quinssaines au pont des Nautes, à SaintVictor. Cinq kilomètres à 2 X 2 voies ont déjà étélivrés à la circulation (notre photo). Les trois autres situés entre l’échangeur de Châteaugay et le pont des Nautes seront mis en service cet été. À partir du pont desNautes et jusqu’à la gare de péage de Bizeneuille (début de l’A 71), La société privée APRR doit achever la section autoroutière de 9,6 km, courant juin.
Comment jugez-vous l’évolution de votre commune depuis qu’elle a été délaissée de ses voitures et ses poids lourds ?
RENÉ MEUNIER65 ans, retraité EDFLa commune, qui était saturée decamions, est en train de changer. Onvoit des maisons se construire ou serénover. Ce n’est plus le petit villagecomplètement mort. Aujourd’hui, onpeut parler d’un calme olympien.C’est peut-être ça le revers de lamédaille.
PHILIPPE BARRIER55 ans, ancien chauffeur routierLe plus marquant, c’est le calme. Iln’y a plus de camions sauf le servicelocal. La proximité de Montluçon parla quatre voies, c’est formidable. Ducentre-bourg, il faut sept à huitminutes pour arriver à la zoneAuchan. Et puis, on se sent plus ensécurité.
THIERRY TOURRES51 ans, sans emploiJ’habite dans le bourg depuis 1976.Ne plus voir les poids lourds passerdevant chez soi, avoir enfin un peude calme, pouvoir dormir un peumieux. La place a été refaite, lebourg est plus joli. Un lotissement aété construit, il y a de nouveauxhabitants.
MADELEINE MOUSSON64 ans, retraitée d’une cafétériaNous avons eu souvent peur quandles camions fous s’écrasaient contreles maisons. Nous sommes plustranquilles, nous respirons mieux,nous pouvons ouvrir nos fenêtres.Mais restons vigilants. Cette longueligne droite est tentante et certainsla prennent pour une piste d’essai.
MAURICE THAVENOT59 ans, cavisteLe point le plus positif, c’est que lecontournement a ramené deshabitants sur la commune. Le prixdes terrains a augmenté. On étaitentre 5 et 10 €, on est aujourd’hui à15 € le mètre. On voit maintenantune dizaine de gamins qui jouent surla place. On n’avait pas l’habitude.
è LE CONTOURNEMENT DE LAMAIDS À 2 X 2 VOIES (4,5 KM) A ÉTÉ OUVERT EN FÉVRIER 2007
Empruntez-vous souvent la nouvelle RCEA pour vos déplacements personnels ou professionnels ?
RAYMONDE GUÉRET83 ans, retraitée de l’alimentationNon, très peu souvent. Quand jeprends la voiture, c’est généralementpour aller à Montluçon ou àDomérat. Quand je vais en Creuse, jepasse par les petites routes où je mesens plus en sécurité. Je suis tropvieille. Toutes ces grandes routes, çam’impressionne.
FRANCIS MILLARD55 ans, recyclage de voituresDe temps à autre lorsqu’il faut que jeprocède à l’enlèvement d’une voituredans la Creuse. Il m’arrive aussi del’emprunter pour des raisonspersonnelles. Avant, les gens avaientpeur de venir à Quinssaines avectous ces poids lourds. C’est bon pourmon entreprise.
MIREILLE BARTHAZARD47 ans, agent de service dans un lycéeJamais. Je prends toujours l’ancienneroute Quinssaines-Montluçon car jetravaille à l’entrée de Montluçon.Pour le premier anniversaire del’ouverture du contournement,j’essaierai peut-être de faire la routejusqu’à Lamaids. Je sais qu’ils ontaménagé une aire de repos.
ROGER LEPINASSE78 ans, retraité DunlopPas souvent. À mon âge, je ne rouleplus beaucoup. Dès fois, ça m’arrived’aller en Creuse. Je connais un peude monde sur Gouzon. La route estvraiment très belle. Avec toute lacirculation qu’on a aujourd’hui, cetype d’aménagement estindispensable.
MAURICE BROCHET84 ans, retraité de LandisJamais je ne prends lecontournement. Je l’ai juste vucomme ça, par-dessus le pont. Jen’en ai pas besoin, c’est plus valablepour les touristes et les camions. Mesdéplacements, c’est de l’autre côtévers Colombier et Commentry. C’estmon fief là-bas.
è LE CONTOURNEMENT DE QUINSSAINES À 2 X 2 VOIES (8 KM) A ÉTÉ OUVERT EN JUIN 2010
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“ Les poids lourdsne sont pasresponsables detous les maux. Etles pouvoirspublics alors ?,,De l’internaute, wil03
CREUSE De La Croisière à l’ouest à Nouhant à l’est, la RCEA est entièrement à 2x2 voies depuis janvier
30ans de travaux pour 90 kilomètres
Hervé [email protected]
E ntre la mise en service du premier tronçon au Pont à la Dau
ge en 1982 et l’ouverturede la section GouzonLamaids en janvier dernier, ilaura donc fallu près de3 0 a n s p o u r m e t t re l aRCEA à 2x2 voies dans les90 km de sa traversée dela Creuse.
Le premier chantier dece vaste projet a commencé en 1982 avec la mise enservice de 2,5 km à hauteur du Pont à la Dauge à
l’est de Guéret.Puis, après une longue
pause de dix ans, intervient en juin 1992 l’ouverture du tronçon SaintHilaireLe TroisetDemi àl’est de Guéret.
En janvier 1994, le tronçon SaintMaur iceLaSouterraine est à son tourmis en service, suivi, quelques mois plus tard dutronçon Le TroisetDemiL e Mo u c h e t a rd s u r l acommune de SaintSulpiceleGuérétois.
E n 1 9 9 5 , l a j o n c t i o nSaintMauriceLa Croisière, e t p a r c o n s é q u e n t
l’A 20 (*), est ouverte, demême que la section LaSouterraineSaintHilaire.
E n 1 9 9 6 , i n t e r v i e n tl’ouverture de la sectionLe Mouchetard jusqu’auxportes de Guéret (5 km),un secteur parmi les plusaccidentogènes de la RN145.
L’année suivante, en juin,le contournement d’Ajain( 4 k m ) e s t é g a l e m e n touvert à la circulation. En1998, un nouveau tronçonet l’échangeur à hauteurde Jarnages sont réalisés.
Au début de l’été 1999, lajonction de ce derniertronçon avec la déviationd’Ajain est mise en service, puis l’année suivantela liaison Pont à la DaugeGuéretEst est terminée.
Le contournement deGuéret (4 km) est achevédeux ans plus tard fin
2002. À ce momentlà, laRCEA est entièrement à2x2 voies entre La Croisière et Jarnages.
La progression vers l’estcommencera avec l’ouverture, en novembre 2004,du tronçon échangeur deJarnagesParsac (5,5 km).
Trois ans plus tard, autout début des vacancesd’été 2007, 9 km supplémentaires de 2x2 voiessont mis en service entreParsac et Gouzon.
Enfin, au tout début dec e t t e a n n é e 2 0 1 1 , l e s14 km restant jusqu’aux lim i t e s d e l ’ A l l i e r s o n touverts à la circulation.L’ a c h è v e m e n t d e l a“TransCreuse” valait bienun déplacement ministériel : ce fut Thierry Mariani, secrétaire d’État chargédes Transports qui s’y colla et qui, sans ironie aucu
ne, salua « un grand jourpour la Creuse enfin désenclavée ! »…
3 km par an !Enfin ! L’expression est
juste si l’on considère quece chantier de 90 km aprogressé, pendant trente ans, au rythme de 3 kmet de 5 millions d’euros
d’investissement par an.Au total , en ef fet , ces90 km à 2x2 voies auront,en effet, coûté 500 millions d’euros financésprincipalement par l’Étatet l’Europe ainsi que parla région Limousin.
(*) L’aménagement d’une véritable jonction autoroutière à LaCroisière entre l’A 20 et la RCEAreste à réaliser.
Commencé au début des années 80, le chantier de mise à2x2 voies de la RCEA dans sa traversée de la Creuse s’estachevé en janvier dernier avec l’inauguration du tronçonGouzon-Lamaids. Entre La Croisière à l’ouest et Nouhant àl’est, ces 90 km de voie express auront coûté 500 millionsd’euros financés principalement par l’État et l’Europe maisaussi par la région Limousin.
PARSAC-GOUZON. Les 9 km de ce tronçon ont été progressivement mis en service au début de l’été 2007. PHOTO : STÉPHANE LEFÈVRE
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
“ Je préfère nepas avoir de péagemais entre 600nouveaux morts etle péage, le choixest vite fait,,De l’internaute, Xsb
CREUSE Le nombre d’accidents mortels diminue au fur et à mesure de l’aménagement en 2x2 voies
Unaxedeplusenplussûrdepuis dix ans
Hervé [email protected]
L es chiffres ont ceci departiculier qu’ils sontincontestables : sur les
124 morts enregistrés surles routes creusoises entrejanvier 2001 et décembre 2010, 23 ont été constatés sur la RCEA dont 19sur des secteurs où la route n’était pas encore aménagée en 2x2 voies, enparticulier entre Gouzonet la limite avec l’Allier.
Quatre automobilistes“seulement” eston tentéde dire, ont ainsi perdu la
vie sur des sections aménagées en voie express :l’un avait abusé de stupéfiants, un autre, en 2005,avait perdu le contrôle deson véhicule à la suited’un excès de vitesse, untroisième, un motard en2007, avait presque 2 grd’alcool dans le sang, lequatrième s’était endormiau volant et avait violemment percuté la rambardede sécurité.
Quatre en dix ans, c’estbien peu quand, dans lemême temps, le trafic surl’axe a doublé passant de
8.500 véhicules/jour en2000 à près de 17.000 l’andernier, voire à près de20.000 en juilletaoût dont20 % de poids lourds.
Radars renforcés« Il y a une corrélation
évidente entre l’avancement des travaux sur laRN 145 et la baisse dunombre des accidentsmortels, analyse le majorBrunet, de l’EDSR (*) de laCreuse, d’autant que, dès2007, quand la 2x2 voiesest arrivée à Gouzon, nousavons renforcé les contrôles sur le secteur Gouzonlimite de l’Allier, avec desradars fixes mais aussiavec des radars embarqués. On avait constaté,en effet, que la plupart desaccidents mortels sur laroute pas encore aménagée, étaient des collisions
véhicules légerspoidslourds lors de dépassements dangereux. Ceschoix ont fini par atteindre leur objectif : il n’y aeu aucun accident mortelsur l’ensemble de la RCEAe n C r e u s e e n 2 0 0 9et 2010 ».
Mais pourquoi donc cette RCEA estelle empruntée par autant de poidslourds ? « C’est simple, explique Alain Lancereau,journaliste spécialisé dansle transport routier, la production industrielle a étédélocalisée à l’est de l’Europe et les produits sonttoujours consommés àl’ouest. Or, le seul axe gratuit entre l’est et l’ouesteuropéens, c’est la RCEA ».
La gratuité, le mot estlâché : dans un secteur deplus en plus dérégulé, cela
compte de plus en plus. Ilsuffit de circuler sur l’axepour remarquer de plusen plus de camions immatriculés en Pologne, Tchéquie, Slovénie ou Lituanie.Une présence qui poseune autre question : estceque les chauffeurs de cespays sont bien formés ?Pour Alain Lancereau, la
réponse est claire : « EnRoumanie, on peut achet e r u n p e r m i s p o u r500 €… ». Reste qu’aucunchauffeur roumain n’a étéimpliqué, dans un accident mortel sur la RCEAcreusoise depuis de nombreuses années.
(*) Escadron départemental desécurité routière.
S’il fallait démontrer l’absolue nécessité en terme de sécu-rité routière d’aménager les grands axes routiers en 2x2voies, il suffirait de reprendre les chiffres de l’accidentalitéde la partie creusoise de la RCEA : en dix ans, le nombred’accidents mortels sur cet axe dont la fréquentation adoublé dans la même période a diminué au même rythmeque les travaux de mise à 2x2 voies avançaient.
ACCIDENTS. Sur les 124 morts enregistrés depuis 2001 sur les routes creusoises, 23 ont été constatés sur la RCEA dont 19 sur des sections non encore aménagées et “seulement” 4 en secteur à 2x2voies. PHOTO : STÉPHANE LEFÈVRE
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Supplément RCEALa route de la honteRCEA
CREUSE Les communes longeant la RCEA connaissent un regain démographique et économique
Une route qui nourrit tous les espoirs
Hervé [email protected]
E n 1999, la communede Lépaud comptait342 habitants ; elle en
compte aujourd’hui 412.Même constat à Verneigesoù la population est passée de 85 habitants en2001 à 105 en 2009. Leschiffres restent modestes,mais pour ces deux communes de l’est creusoisimplantées le long de laRCEA, ils sont révélateursde ce que peut leur apporter “LA” route dont ils ontattendu la réalisation pen
dant trente ans. « Aujourd’hui, il n’y a quasimentplus rien à louer ou à vendre dans la commune »,confiait dernièrementMaurice Jolicard, le mairede Lépaud. Son collègueGilles Chassagne, de Verneige, indique que « si lap o p u l a t i o n c o n t i n u ed’augmenter, le principalp r o b l è m e q u e n o u saurons à régler sera celuid’une garderie pour lestoutpetits ».
Les nouveaux arrivantssont, en effet, souvent, dejeunes couples avec en
fants qui travail lent àMontluçon, désormais àmoins d’un quart d’heurede voiture.
Cet afflux de nouvellepopulation se fait mêmesentir jusqu’à Gouzon oùle maire, Cyril Victor, s’estlancé dans la révision deson PLU pour prévoir denouvelles zones à construire. Mais Gouzon et sonmaire espèrent bien attirerégalement de nouvellesactivités.
« La première tranche denotre zone d’activités estcomplète, la seconde esten cours de réalisation etnous avons déjà des réservations, annoncetil, toutcela, c’est l’effet RCEA ».
Un effet boosté par lesAides à Finalité Régionale,ces fameuses AFR finan
cées par l’Europe maisdont les territoires bénéficiaires ont été définis parla Région et l’État.
En Creuse, seules lescommunes longeant laRCEA de La Croisière àGouzon, puis de Gouzon àLa Courtine via Aubussonle long de la RD 990, enbénéficient. À l’est deGouzon, les communes ensont privées en Creusemais pas dans l’Allier, cequi fait hurler les mairesconcernés.
En attendant, l’axe à 2x2voies a été, bien avant sonachèvement, un argumentde poids des élus et décideurs dans leurs effortspour faire venir des investisseurs en Creuse. À Guéret notamment, la présence de la route a beaucoupcompté dans la décision
des dirigeants d’Abiodis,une société spécialiséedans la production d’électricité par méthanisation,de s’implanter à Guéret.
Quant à La Souterraine,le maintien, voire le développement de son tissu industriel, tient beaucoup àson emplacement idéal au
croisement de l’A 20 et dela RCEA. Porteuse d’espoir, outil d’un désenclavement enfin réalisé, laRCEA est, dans le mêmetemps, devenue un symbole : elle est coupée parles manifestations à l’occasion des gros coups decolère sociale…
Dans un département où le consensus est plutôt rare, il y aau moins une chose sur laquelle les élus et décideurs detous bords sont d’accord : la RCEA est un outil de dévelop-pement à la fois démographique et économique pour laCreuse. De nombreuses initiatives sont ainsi prises pour quel’axe ne se limite pas à un long tuyau fermé mais qu’ildevienne un pipeline irriguant le territoire qu’il traverse.
GUÉRET. Dans sa traversée de la Creuse, la RCEA longe plusieurs zones d’activité, comme ici dans la ville-préfecture où les élus mettent souvent en avant leur facilité d’accès. PHOTO : STÉPHANE LEFÈVRE
RCEA : LA ROUTE DE LA HONTE
Hors-série - Avril 201145, rue du Clos-Four - 63056 Clermont-Ferrand Cedex 2 - Tél. 04.73.17.17.17
Président-directeur général, directeur de la publication :Jean-Pierre Caillard
Directeur des rédactions : Pierre GirondeRédacteurs en chef : Philippe Rousseau, Philippe Vazeille
Chef de projet : Sandrine ThomasTextes : Leïla Aberkane, Elsa Charnay, Robert Guinot,
Hervé Moisan, Pierre Raynaud, Fabrice Redon, Sandrine ThomasPhotos : Philippe Bigard, Jean-Marc Schaer, Séverine Trémodeux,
Stéphane LefèvreInfographies : Philippe Chapelle, Laurent Chazal
Imprimerie :Centre d’impression de l’Yonne Républicaine, 89000 Auxerre
N° de commission paritaire : 0415 C 86413
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Supplément RCEALa route de la honte RCEA
ANDRÉ CHANDERNAGOR L’un des pères fondateurs de cette route revient sur une épopée de 40 années
« Nous n’avons jamais rien lâché »
Robert [email protected]
C’ é t a i t e n 1 9 6 7 àNiort. La caricaturecampe Louis Es
cande, députémaire deMâcon, André Chandernagor, député de la Creuse,le sénateur de la CreuseEugène Romaine, des représentants de la CCI deMontluçon et quelquesautres personnalités, dontun député des Charentes,en pleine discussion avecle directeur national desroutes. C’est ce jourlà quel’ARCEA, l’Associationpour la Route Centre Europe Atlantique, est née.Plus de quarante annéesont passé. André Chandernagor conserve précieusement cette caricature quia aujourd’hui valeur dedocument.
Groupe de pression« Il existait l’Assocation
de la route SuisseOcéan,à but touristique. Elle étaitprésidée par Louis Escande qui siégeait avec moi àl’Assemblée Nationale.Cette route était dans unétat épouvantable. AvecEscande, je me suis employé à convaincre lespouvoirs publics de la nécessité de réaliser unegrande route transversale.Escande connaissait bienles Ponts et Chaussées, ilétait soucieux du rayonnement de Mâcon et était,de plus, marié à une Creusoise. Alors nous avonscréé un groupe de pression. Nous avons invitéM. Dreyfus, directeur desroutes, à une réunion àNiort. Il a accepté qu’uneétude sérieuse soit réalisée. Tout est parti de là ».
Louis Escande est ainsi
devenu le président del’ARCEA, André Chandernagor, le premier viceprésident. Les deux hommes,des amis, ont constamment travaillé ensemble.L’association a recruté unpermanent et une secrétaire. Elle a fait appel à unconsultant ainsi qu’à quelques personnalités de latrempe de Jean Valleix, députémaire du Bouscat(Gironde) et de JacquesChabanDelmas. C’estainsi qu’Escande, Chandernagor et Valleix sontdevenus les “pèlerins de laRCEA”.
« J’étaispersuadé que lesinitiativesdevaient venird’en bas »
« Nous avons rendu visite à toutes les collectivitésconcernées par la route.Nous avons drainé jusqu’en Vendée. Nous avonsconnu quelques difficultésdans l’Allier mais l’élection de Jean Cluzel à laprésidence du Conseil général a tout arrangé. Moi,à l’époque, j’étais députéet conseiller général. Leprésident du Conseil général me laissait agir à maguise. J’ai eu la chance detravailler avec JacquesChartron, alors jeune préfet de la Creuse. C’est luiqui m’a suggéré de prendre la présidence du Comité d’expansion économique. Je considérais, àl’époque, que la Creuseétait enclavée sur tous lesplans. J’étais persuadé queles initiatives devaient venir d’en bas ».
En 1973, André Chandernagor est élu président duCo n s e i l g é n é ra l d e l aCreuse et l’année suivanteprésident du Conseil régional du Limousin. Deuxfonctions qui ont facilitél’avancement du dossierbien que siégeant dansl’opposition au pouvoirparisien.
Aujourd’hui, 44 ans aprèsla réunion de Niort, l’ancien ministre ne peut sesatisfaire de la situationactuelle : « Certes, la RCEAest à quatre voies dans latraversée de la Creuse.Mais, ai l leurs, i l restebeaucoup à faire. Le désenclavement n’est jamaisgagné ». Et d’édicter quelques règles simples : « Nepas se contenter de pleurer misère en se regardantle nombril, inscrire desperspectives d’avenir audelà du département, et,enfin, rassembler les énergies au lieu de les opposercomme c’est souvent lecas ».
La RN 145 est, depuis jan-vier dernier, à quatre voiesdans la traversée de laCreuse. C’est l’aboutisse-ment de plus de 40 ans d’ef-forts et de travaux. AndréChandernagor, ancien mi-nistre, ancien député et pré-sident du Conseil général dela Creuse, témoigne.
ANDRÉ CHANDERNAGOR. L’ancien ministre et élu creusois a été pendant des années l’un des « pèlerins » de la RCEA qui ont fini parconvaincre les pouvoirs publics de réaliser une grande route transversale de Mâcon à la rive atlantique. ARCHIVES LA MONTAGNE
1921Naissance dans la Vienne
1981-1982Ministre chargé desAffaires européennes
1983-1990Premier président de laCour des Comptes.
1958-1981Député de la Creuse
1973-1983Président du Conseilgénéral de la Creuse
1974-1981Président du Conseilrégional du Limousin
BIO EXPRESS
EN CINQ ANSANSCINQEN ANSCINQEN
100MORTS