1
REUNION REGIONALE NORD 30/11/15
BOURSE DU TRAVAIL DE LILLE
Intervenants : Jean Michel STERDYNIAK (SNPST) – Sophie QUINTON
FANTONI (Professeure de Médecine du Travail)- Edouard DALLE (ANIMT)-
Véronique BACLE (SNPST) – Joëlle MILLIEZ (SNPST)
Présents : 11 IST- 1 AST- 2 Médecins du Travail
Objet : débattre de l’avenir de la santé en travail, du texte de loi en
préparation, des positions de chacun à ce sujet
2
Sophie QUINTON FANTONI
Replace le contexte de la loi Rebsamen, en ce qui concerne la santé au
travail, en précisant que, si elle est co-auteur du rapport Issindou, elle n’a
pas participé à l’écriture des textes:
- Plusieurs réformes récentes ont laissé des sujets de côté,
notamment celui de l’aptitude, bien qu’il y ait eu de très
nombreuses réflexions sur le sujet
- Il y a toujours plus de textes, d’où une judiciarisation croissante,
notamment à cause des obligations règlementaires impossibles avec
les moyens actuels
- La démographie médicale est préoccupante, et mal répartie sur le
territoire
- Rappel de la loi Macron qui a « commis » un plan de 50 mesures de
simplification dont plusieurs concernaient la santé au travail (et qui
ont été retirées)
- Le rapport Issindou a fait des constats : les médecins du travail
reçoivent des prescriptions sur le suivi de santé des salariés, alors
que ce sont eux qui devraient prescrire ce suivi de santé ; on voit
des inégalités d’un SIST à l’autre, notamment dans la périodicité des
suivis de santé
3 remarques sur la loi Rebsamen :
- Les points positifs : l’article L 4624-1 est conforté ( suivi
individuel) ; le renforcement du droit d’alerte du médecin du travail
au niveau collectif (art 4624-3) ;la reconnaissance législative de
l’équipe santé travail ;l’appréciation souveraine du médecin du
travail en cas de maintien impossible dans l’emploi
- Les points d’inquiétude : il y a débat sur les missions, article sur «
leur sécurité et celle des tiers »
- Les points qui attendent des décrets : l’Art 4526-4 , qui introduit un
suivi de santé ciblé sur trois catégories de salariés : salariés en état
de vulnérabilité, les postes à risques, les postes de sécurité
- Donc, il faut discuter, échanger mais attention à ne pas détruire un
système, attention à un texte qui serait tiré vers le bas. Les
mutuelles sont prêtes à remplacer le système actuel !!
Jean Michel STERDYNIAK
Est en profond désaccord avec les propos de Madame FANTONI, même s’il
partage la conclusion.
Le problème de la Médecine du Travail, c’est qu’elle s’est construite dès le
départ sur Aptitude/Inaptitude/Réparation en lien avec la médecine légale,
et non sur la prévention.
3
Il y a un réel problème de gouvernance, car celle-ci est patronale.
Les mesures Macron sont scandaleuses, et ont été prises sans aucune
concertation avec les salariés
Les organisations syndicales du COCT ont fait part de leur opposition aux
conclusions du rapport Issindou, la loi Rebsamen est un déni de
démocratie.
Il faut contextualiser et rappeler la précarisation des contrats de travail :
d’après le CISME, il faudrait faire 30 millions de visites médicales, alors
qu’il y a 22 millions de salariés à voir tous les deux ans ?? C’est bien la
politique économique et la politique de contrats précaires qui est la source
de difficultés par la multiplication des visites d’embauche, que les
employeurs nous reprochent de ne pas faire… !!!
Chaque année, 120.000 salariés sont licenciés pour inaptitude (sans tenir
compte des démissions et des ruptures conventionnelles), et les mesures
prévues vont encore faciliter cela.. Alors que le Code du Travail n’est déjà
pas respecté, notamment l’obligation de reclassement, ce qui prouve bien
que la contrainte n’est pas si forte, très peu de salariés contestent ces
décisions et saisissent les prud’hommes.. Cet argumentaire maintes fois
entendu sur la lourdeur des procédures en cas d’inaptitude ne tient pas la
route !
On ne peut isoler les mesures santé travail de l’ensemble de la loi
Rebsamen, car tout est lié : modifications du CHSCT, atteintes à la
représentativité des salariés dans les petites entreprises….
Il y a un changement de paradigme, cela devient de la prestation de
services aux entreprises. Alors, oui, il y a un risque de disparaître, et
qu’un champ concurrentiel permette l’arrivée des mutuelles…
En ce qui concerne la « sécurité des tiers », là aussi, désaccord... Prenons
exemple sur les pays nordiques, l’employeur doit protéger son salarié en
lui offrant un milieu de travail sûr et sain.. Il faut supprimer les risques,
plutôt que surveiller l’exposition à ceux ci..Il doit exister deux services
distincts : la médecine de prévention, et le contrôle de l(aptitude.
Comment faire de la prévention s’il n’y a pas la relation de confiance avec
le salarié ?
Il faut une transformation profonde du système de santé au travail,
changer de gouvernance, ne pas la laisser au patronat. Il faut permettre
une coopération des professionnels avec un suivi de santé au travail basé
sur les besoins de santé.
4
Edouard DALLE
Exprime la position des internes. Ceux-ci souhaitent remettre leur rôle de
préventeur au cœur du métier, au cœur de l’équipe..
Aujourd’hui, notre pratique est basée sur des textes de loi, alors qu’il
faudrait se baser sur un référentiel de bonnes pratiques.
L’ANIMT a écrit un texte qui reprend ses positions1 : l’aptitude sécuritaire
n’est pas le métier du médecin du travail, il faut remettre la relation avec
le salarié au centre de la pratique, redire l’importance des visites
médicales et des entretiens infirmiers.
Rappeler également que le sens donné à la profession rendra du crédit à
la spécialité.
SQF
Ne peut qu’être d’accord : pourquoi faire des textes, alors qu’on pourrait
avoir des recommandations ?
Le problème, c’est celui de l’hétérogénéité. L’objectif du droit du travail,
c’est d’être équitable.
JMS
Si notre système était efficace, cela se saurait..Les indicateurs santé
travail en France ne sont pas bons..
Question dans la salle du Docteur Legrand-Cattan
Est d’accord un peu avec les deux..Souscrit aux propos de JMS, mais
quelles sont les propositions du SNPST concrètement ?
Réponse de JMS
- Le SNPST a été le premier, il y a environ 15 ans, à prôner les
équipes pluridisciplinaires2 et la coopération médecins-infirmiers3
- Nous demandons un changement de gouvernance, et la création
d’Agences Régionales de Santé, qui définiraient les priorités, en
fonction des bassins d’emploi
- Nous défendons les visites et entretiens périodiques, notamment
dans les TPE, car souvent MDT et IST sont les seuls professionnels
de santé que voient les salariés de ces TPE
- Il faut revoir le fonctionnement des CMT, leur redonner toute leur
valeur
- Les CPOM sont à développer, car cela permet de travailler sur les
priorités.
1 ANIMT : « L’avenir de la médecine du travail »
2 Octobre 2002 propositions pour les équipes pluridisciplinaires
3 http://www.snpst.org/IMG/pdf/revue_du_jst_no8.pdf
5
- Nous allons nous battre sur : la sécurité des tiers, le suivi médical,
la gouvernance.
Véronique BACLE
Présente l’enquête réalisée par le SNPST auprès des IST, et qui sera à
croiser avec celle du GIT.
Environ 250 réponses, qui ont permis de montrer que les pratiques
diffèrent pour un même métier, que l’on soit en entreprise, en service
inter, en fonction publique…
Principales difficultés identifiées :
- En entreprise, mission quelquefois très large, et loin du cœur de
métier, malgré le cadre règlementaire. Surcharge de travail de ce
fait. Pressions sur le secret médical, sur les déclarations AT…Plus de
difficultés de coopération avec les MDT. Quelquefois, pas d’accès
aux dossiers médicaux. Moins de formation. Moins de protection.
Insuffisance de reconnaissance.
- En service inter, mission pas toujours préparée ni très claire .
Productivité au niveau des ESTI. Quelquefois, pas d’AMT.
Insuffisance de reconnaissance des directions de service.MDT
réticents.
Points positifs identifiés :
- En entreprise : diversité de la mission, possibilité d’ « aller jusqu’au
bout » de ce qu’on fait car toujours sur place
- En service inter : qualité d’exercice bien meilleure, on fait vraiment
partie d’une équipe
Propositions :
1/Proposer une rédaction de décret sur les missions et rôles des infirmiers
en santé travail, qui remplacerait la circulaire Oheix, et permettrait
d’introduire les dysfonctionnements constatés sur :
- les niveaux insuffisants de formation. Obligation de formation
universitaire validante de niveau Master 1 ; Reconnaissance des
« pratiques avancées » en santé travail. Formation par les pairs
(exclure les organismes de formation de type Comundi ou C3S)
- Rédaction du contenu des missions en se basant sur les 10
compétences du référentiel de formation, sur nos décrets d’actes et
règles professionnelles
- Définition des protocoles
- Positionnement et limites de l’exercice
- Statut de salarié protégé
6
2/ Demander la création de postes d’ « infirmiers référents » : le problème
d’absence d’interlocuteur métier a été maintes fois évoqué
3/ CISME : remettre sur le tapis la question de la formation et du statut
cadre
SQF
Il faudra avancer de façon homogène, mobiliser la philosophie du système
de santé au travail, faire entendre aux députés que l’obligation de
formation d’un niveau égal permettra l’homogénéité et la qualité des
missions.
JMS
Revient sur les questions sécuritaires : est-ce de la responsabilité de la
médecine du travail ? C’est bien l’obligation de sécurité et de résultat qui
est du ressort de l’employeur..
SQF
Il faut être pragmatique, attention à l’idéalisme..
Intervention d’Aurélia LONGE, IST
Rappeler l’importance de l’Action en milieu de travail pour les IST, elle doit
être de 30% comme pour les MDT
A vécu son expérience d’IST en entreprise comme « l’obligation légale »
de l’employeur.
Intervention de Catherine HERMANT,IST
Inquiétudes sur ce que seraient les « entretiens de prévention »
d’embauche ?
Question cruciale du moment où se ferait cet entretien. Si c’est trop tôt, le
salarié ne peut pas parler de son travail. Comment alors lui parler de
prévention, si on ne sait pas ce que sera son travail ?
SQF
Effectivement, le moment où se fera cet entretien est crucial, ce ne peut
être trop tôt.
C’est bien une prescription du médecin, qui permettrait d’ouvrir un
dossier de suivi de santé au travail.
Attention, danger : il ne faut pas faire de sous-catégorie, comme pour les
saisonniers par exemple (entretiens collectifs) , où il n’y aurait plus
d’inscription dans un suivi individuel.
7
Intervention de Nathalie ESTEVES, AST
A trouvé toute sa place dans l’équipe. Il faudrait cependant écrire un
périmètre des tâches, comme pour les IST
ED
Rappelle qu’il manque quand même une politique globale de santé au
travail
Intervention de Virginie SKRYPCZACK, IST
Pourquoi certains directeurs de service refusent que les IST d’entreprise
réalisent des entretiens infirmiers
Réponse des intervenants
Ils n’en ont pas le droit, car la loi permet cela !!!
Intervention du Docteur Florian TONE
Où concentrer nos efforts, quand la tâche est immense ?
Il faut que l’équipe revienne vers ses fondamentaux : préserver la santé
des salariés
Il y a une vraie pression des entreprises pour que les visites médicales
soient réalisées. Exemple d’une entreprise qu’il suit : alors que celle-ci
apprécie le médecin du travail, est évoquée la possibilité de changer de
service car ils estiment que le « service rendu », c’est-à-dire le nombre de
visites médicales, n’est pas réalisé..Comment faire changer la vision de la
médecine du travail ?
CONCLUSION
Le débat contradictoire, l’échange d’idées et de vision ont été très
appréciés.
Il est donc proposé de proposer ces échanges régulièrement.
8
A BIENTÔT !!!!!!!!!!!!!