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Étienne Schneider

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ACTUALITE

«Se retrousser les manches)À l'occasion des Journées de l'Économie, le nouveau ministre de l'Économie et du Commerce extérieura prononcé son premier discours officiel et dressé les grandes lignes de l'action qui sera la sienne jusqu'en 2014.

Jean-MichelGaudron(texte),HenriDaCruz (photo)

C'est bien connu: on n'a qu'une seule chance defaire une première bonne impression. Aussi, poursa première sortie officielle dans son nouveau cos-tume de ministre de l'Économie et du Commerceextérieur, Étienne Schneider savait qu'il seraitscruté, épié et, déjà, jugé.

Loin des envolées verbales de son prédéces-seur Jeannot Krecké, dont la partie écrite de sesdiscours tenait généralement en quelques lignesmanuscrites sur un bout de papier, M. Schneidera préféré assurer le coup. En 12 minutes chrono,il a livré devant près de 200 personnes pour lemoins impatientes, une prestation rigoureuse etstructurée, dense et concise. C'est un nouveaustyle auquel il faudra s'habituer. Il n'était de toutefaçon pas prévu qu'il fasse des annonces particu-lières, mais il a tout de même trouvé le temps dedérouler les grandes lignes du programme quisera le sien d'ici aux prochaines élections de juin2014. Deux ans et demi pour convaincre.

Haro suriesprix du logement

« On a rarement vu pire contexte pour rependre leportefeuille de l'Économie», a-t-il prévenu d'emblée,appelant à «fixer une trajectoire de consolidationintelligente», afin de «retoumer à l'équilibre bud-gétaire, voire à un excédent structurel, même si celasera difficile en période de faible croissance >l. Le nou-veau ministre ne peut que rejoindre le constat déjàétabli par les milieux politiques et économiques: lacompétitivité du paysse dégrade, tant en termes decoûts que de qualité. «La situation ne peut guère per-durer, prévient M. Schneider.Revenir vers l'équilibrebudgétaire et surveiller notre compétitivité n'est pasune nécessité au niveau national, mais un impératifface aux nouvelles règles de gouvernance économi-que européennes, qui vont rapidement imposer descontraintes de plus en plus sévères. »Dans cecontexte, il se déclare ((content» des prem iers pasqui ont été franchis, à commencer par la modula-tion du système d'indexation automatique dessalaires, votée par les députés fin janvier. ((C'estune décision très importante et je tiens à féliciter lesparlementaires de tous les partis qui l'ont soutenue

Journées de l'Économie

La réindustrialisation en question(s)Économistes et chefs d'entreprise du Luxembourg et de la Grande Région se sontpenchés, pendant deux demi-journées, au chevet d'une industrie pas très bien portante.

La politique industrielle du Luxembourget son développement futur, dans le contexteéconomique complexe que traverse l'Europeactuellement: tel était le thème abordé à l'occa-sion de la 6e édition des Journées de l'Écono-mie, organisées par le ministère de l'Économieet du Commerce extérieur, la Chambre de Com-merce et la Fedil, en collaboration avec PwCLuxembourg. Le contexte économique global,évidemment, n'est guère propice à un enthou-siasme débordant sur la question. «Je constatequ'il y a désormais un clivage entre ceux qui,d'un côté, se sentent concemés par l'avenir dupays et, de l'autre, ceux qui ont pour ambitionde maintenir leurs acquis sociaux, a regrettéHenri Grethen, l'ancien ministre de l'Économie(et aussi des Transports) et actuel membre de laCour des comptes européenne. Nous assistonsà la naissance d'une nouvelle société depuis lafin du XX· siècle. Alors que la main-d'œuvredisponible, à l'échelle mondiale, a doublé, lescapitaux n'ont pas suivi la même courbe. Onassiste aussi à une nouvelle répartition desrichesses, qui ne toume pas en faveur de laVieilleEurope, à moins de se voiler la face."Dans ce contexte, et de l'avis unanime des par-ticipants aux débats, le Luxembourg doit, pour

sans divaguer dans la politique politicienne.v Enparallèle, Étienne Schneider a annoncé la négocia-tion d'un accord avec les représentants du groupe-ment pétrolier, fixant la marge pétrolière jusqu'en2014, ce qui va réduire l'impact du prix du pétrolesur l'inflation.

Dans cette approche à la fois libérale et sociale,dont il entend faire une marque de fabrique, le nou-veau ministre annonce comprendre tout autant ((lebienjondé des soucis du patronat sur la compétitivité etla dégradation de la situation concurrentielle» que ((la

fermeté des syndicats qui craignent l'érosion du pou-voir d'achat des salariés». Pour lui, «ta véhémence etla virulence des débats résultent en grande partie de la

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tirer son épingle du jeu, poursuivre sesefforts en faveur du redéploiement d'uneactivité industrielle de pointe sur ses terres. Celapasse par des investissements en infrastructu-res, mais pas seulement. La recherche et ledéveloppement constituent, aussi, deux despoints clés de tout redéploiement industrield'envergure. «La R&D, ce que j'appelle laforge aux idées, doit être soutenue, a préciséYves Eisen, président du Fonds national de laRecherche. Il est temps que les secteurspublics et privés se rapprochent. Surtout,il faut s'assurer que le courant passe entreles chercheurs et l'industrie, que les transfertsde technologie sont possibles au bénéficede l'emploi et des entreprises."Pour Marc Solvi, directeur général de PaulWurth, si la réindustrialisation du pays est pos-sible et nécessaire, elle passe, au-delà d'uneprise de conscience politique, par une volontéplus large de l'ensemble de la société. «Lesnouvelles industries ne viendront pas d'elles-mêmes. Il est important de faire comprendreau plus grand nombre que si l'on veut mainte-nir un certain niveau de bien-être, nousdevrons recommencer à produire de la valeurréelle et pas seulement virtuelle.». M. P.

pression excessive exercée sur les salaires par le coûtdu logement. Si nous voulons calmer les discussionssur les ajustements salariaux, il faut s'attaquer à cecoût. » Si le problème estposé, la solution, elle,n'aenrevanche pas été évoquée. Beaucoup s'y sont déjàcassé les dents avant lui. Mais Étienne Schneidern'est pas du genre à montrer un quelconque pes-simisme. En dépit des deux échecs successifsdela Tripartite, il fait part de son espoir de renouerle fil du dialogue social. «L'heure n'est pas auxgrands rendez-vous médiatiques, mais aux échangessectoriels et thématiques. Je suis persuadé de l'utilitédu comité de coordination tripartite qui est dénigré àtort. Le dialogue social doit être mis en contribution

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ACTUALITE

«La paix sociale est un des atouts majeursde l'économie luxembourgeoise»

Étienne Schneider(ministre de l'Économie et du Commerce extérieur)

pour imaginer l'avenir économique social et environ-nemental du pays. En tous les cas je vais my employercarje suis convaincu que la paix sociale est un desatouts majeurs de l'économie luxembourgeoise.tParmi les mesures pour relancer la croissance quele nouveau ministre de l'Économie et du Commerceextérieur compte aborder « à plus ou moins brèveéchéance», l'idée de la création d'un haut comitépour l'industrie, fédérant les acteurs et destiné àconsolider le tissu existant, a rencontré toute sonadhésion. Mais Étienne Schneider a également listéune série de projets qui sonnent comme un vérita-ble programme pour les deux ans et demi à venir deson mandat qui s'achèvera à la fin du printemps

2014 ... sous réserve, évidemment, de resigner unbail de cinq ans au terme des prochaines électionslégislatives.Il a ainsi cité, entre autres choses, le développe-

ment de zones d'activités économiques supplémen-taires au travers du nouveau plan sectoriel; laréforme fondamentale du cadre législatif du secteurdes produits pétroliers; la création d'une nouvellecentrale de production électrique au gaz naturel; ledoublement de la quete-part des énergies renouvela-bles d'ici à 2015; le développement de l'électromobi-Iité... Des dossiers qui, pour leur grande majorité,avaient du reste déjà été initiés par Jeannot Krecké ...et auxquels Étienne Schneider n'était généralement

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pas étranger. « Vous aurez compris que je vais conti-nuer la politique économique de ce pays dans les mar-ques de mon prédécesseur, a-t-il conclu. Pas derévolution, ni de changement de cap. Vous me trouve-riez schizophrène dans le cas contraire. Si la situationn'est guère rassurante, je ne perds pas pour autantespoir. L'histoire nous montre que chaque période decrise a su être dépassée, non pas en attendant que letemps passe, mais en se retroussant les manches.»

Citant l'auteur français Georges Bernanos (( Onne subit pas l'avenir, on le fait»), Étienne Schnei-der est, en tous les cas, entré de plain-pied danssa fonction. Deux ans et demi ne seront pas detrop pour passer à l'acte.e

Serge Allegrezza(Observatoire de la compétiti-vité) et Étienne Schneider(ministre de l'Économie etdu Commerce extérieur)

Didier Mouget(PWC) '-- ..;;

Luc Henzig (PWC)et René Frédérici (Paul Wurth)

Le Grand-Duc héritier Guillaume et I."~~~~Pierre Gramegna (Chambre de Commerce)

Louis Thomas (KPMG)

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ACTUALITE

Claude Faber (Optimise) et Jean-Paul Nicolai(Centre d'analyse stratégique)

Loïc Bertoli (ministère de l'Économieet du Commerce extérieur)

Débats

Les Journées de l'ÉconomieComme chaque année, la salle de conférences de la Chambrede Commerce était bien garnie pour assister, les 8 et 9février,aux deux demi-journées de conférences et d'échanges placéssous le thème ((Quelle stratégie industrielle dans le contexteéconomique actuel? )).

Henri Da Cruz (photos)

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Robert Dennewald (Fedil) David Fetter (Ambassade des États-Unis)

Marc Hostert (Cour des comptes)

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