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0123 JEUDI 14 - VENDREDI 15 JUILLET 2016 idées | 7 Les robots paieront-ils nos retraites ? S i la violence des manifesta- tions sociales actuelles semble totalement disproportionnée au vu de l’enjeu du projet de loi El Khomri, elle est particulièrement re- présentative de la société anxiogène dans laquelle nous vivons. La violence apparaît le plus souvent avec le déses- poir : 85 % des Français gagnent moins de 1 194 euros net par mois, quand le seuil de pauvreté avoisine les 1 000 euros net dans notre pays. Les ménages sont de plus en plus fragiles, se retrouvant à la merci du moindre ac- cident de la vie. Une anxiété encore plus grande, voire une peur primaire, peut égale- ment s’emparer de nos concitoyens de- vant le futur « radieux » que tentent de leur vendre les grandes multinationa- les et les chantres des « nouvelles tech- nologies ». Ce mélange de robotique et de transhumanisme, paradis des ma- chines intelligentes, est un enfer pro- grammé pour les populations, surtout les moins formées, les plus âgées, les plus précaires, les plus fragiles. Mais les emplois des salariés licenciés, ou non embauchés, ne disparaissent pas : ils sont remplacés dans leurs fonctions par des machines qui ne cotisent ni pour l’assurance-chômage ni pour l’as- surance-maladie et encore moins pour l’assurance-retraite. Jamais un auto- mate d’autoroute qui remplace six per- sonnes (si l’on compte les repos com- pensatoires) ne permettra de financer la formation et la transition vers un nouvel emploi de ces six salariés. Certes, de nouveaux métiers seront inventés dans le futur, nous connais- sons bien cet argument, et nos conci- toyens aussi. Mais en attendant le fu- tur, ils ont besoin d’élever leurs enfants et de se nourrir dans le présent ! Une théorie politique déjà ancienne revient au goût du jour et illustre par- faitement la période que nous sommes en train de vivre : le « revenu univer- sel » de la naissance à la mort. L’idée s’impose peu à peu en Europe comme une nécessité absolue afin de minorer les effets néfastes (temporaires ou non) liés à cette transformation majeure du monde du travail. Si le revenu univer- sel ne semble pas poser de problème quant à son acceptation par les peuples européens, une difficulté subsiste : comment financer de manière viable un tel système, dont le nombre de bé- néficiaires sera toujours plus impor- tant, alors que le nombre de cotisants sera toujours plus faible ? CHANGER DE SYSTÈME FISCAL Plusieurs solutions sont envisa- geables. La première, qui est malheu- reusement la plus utilisée par les gou- vernements actuels, consiste à aug- menter les charges sur le travail, ce qui, dans un système fiscal déjà extrê- mement pesant, pour ne pas dire confiscatoire, n’est absolument pas viable à terme. La deuxième solution consiste à as- sujettir les robots et automates aux charges sociales de manière propor- tionnée au nombre d’emplois salariés remplacés. Cela permettrait au moins de ne plus subir la double peine so- ciale que représente l’augmentation du chômage et des préretraites, d’une part, et la baisse des ressources néces- saires pour les financer, d’autre part. Mais son défaut est de ne pas garantir la pérennité de notre système social, l’assiette de cotisants devenant insuf- fisante ; elle permettrait juste de frei- ner l’hémorragie. La solution la plus logique est donc de changer totalement de système fiscal et de ne plus prélever de charges socia- les sur la base du travail, mais une taxe universelle payée par tous les ménages, salariés ou non, selon un taux unique. Une telle TVA sociale permettrait non seulement d’équilibrer les dépenses et les recettes, mais encore de créer la sta- bilité fiscale tant réclamée par les en- treprises, et de financer le revenu uni- versel, qui va devenir très rapidement vital à la survie de nos sociétés. Il est irresponsable de laisser la France et l’Europe sombrer dans la vio- lence sociale actuelle en s’arc-boutant sur de fausses postures de fermeté qui ne mènent nulle part. p Cyrille Dalmont est juriste, chargé de développement dans une société d’économie mixte du secteur de la construction par cyrille dalmont SURLIGNE PAR ERIC LEGER La protection sociale ne peut plus être financée par des travailleurs toujours moins nombreux ; l’avenir est au revenu universel financé par une taxe sociale unique

Robots - Source du Revenu Universel

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0123JEUDI 14 - VENDREDI 15 JUILLET 2016 idées | 7

Les robots paieront-ils nos retraites ?

Si la violence des manifesta-tions sociales actuelles sembletotalement disproportionnéeau vu de l’enjeu du projet de loi

El Khomri, elle est particulièrement re-présentative de la société anxiogène dans laquelle nous vivons. La violence apparaît le plus souvent avec le déses-poir : 85 % des Français gagnent moins de 1 194 euros net par mois, quand le seuil de pauvreté avoisine les 1 000 euros net dans notre pays. Les ménages sont de plus en plus fragiles, se retrouvant à la merci du moindre ac-cident de la vie.

Une anxiété encore plus grande,voire une peur primaire, peut égale-ment s’emparer de nos concitoyens de-vant le futur « radieux » que tentent de leur vendre les grandes multinationa-les et les chantres des « nouvelles tech-nologies ». Ce mélange de robotique etde transhumanisme, paradis des ma-chines intelligentes, est un enfer pro-grammé pour les populations, surtout les moins formées, les plus âgées, les plus précaires, les plus fragiles. Mais lesemplois des salariés licenciés, ou non embauchés, ne disparaissent pas : ilssont remplacés dans leurs fonctions par des machines qui ne cotisent ni pour l’assurance-chômage ni pour l’as-surance-maladie et encore moins pour l’assurance-retraite. Jamais un auto-mate d’autoroute qui remplace six per-sonnes (si l’on compte les repos com-pensatoires) ne permettra de financerla formation et la transition vers un nouvel emploi de ces six salariés.

Certes, de nouveaux métiers serontinventés dans le futur, nous connais-

sons bien cet argument, et nos conci-toyens aussi. Mais en attendant le fu-tur, ils ont besoin d’élever leurs enfantset de se nourrir dans le présent !

Une théorie politique déjà anciennerevient au goût du jour et illustre par-faitement la période que nous sommesen train de vivre : le « revenu univer-sel » de la naissance à la mort. L’idée s’impose peu à peu en Europe comme une nécessité absolue afin de minorer les effets néfastes (temporaires ou non)liés à cette transformation majeure du monde du travail. Si le revenu univer-sel ne semble pas poser de problème quant à son acceptation par les peupleseuropéens, une difficulté subsiste : comment financer de manière viable un tel système, dont le nombre de bé-néficiaires sera toujours plus impor-tant, alors que le nombre de cotisants sera toujours plus faible ?

CHANGER DE SYSTÈME FISCAL

Plusieurs solutions sont envisa-geables. La première, qui est malheu-reusement la plus utilisée par les gou-vernements actuels, consiste à aug-menter les charges sur le travail, cequi, dans un système fiscal déjà extrê-mement pesant, pour ne pas dire confiscatoire, n’est absolument pasviable à terme.

La deuxième solution consiste à as-sujettir les robots et automates aux charges sociales de manière propor-tionnée au nombre d’emplois salariés remplacés. Cela permettrait au moins de ne plus subir la double peine so-ciale que représente l’augmentation du chômage et des préretraites, d’une part, et la baisse des ressources néces-saires pour les financer, d’autre part. Mais son défaut est de ne pas garantir la pérennité de notre système social, l’assiette de cotisants devenant insuf-fisante ; elle permettrait juste de frei-ner l’hémorragie.

La solution la plus logique est donc dechanger totalement de système fiscal et de ne plus prélever de charges socia-les sur la base du travail, mais une taxe universelle payée par tous les ménages,salariés ou non, selon un taux unique.

Une telle TVA sociale permettrait nonseulement d’équilibrer les dépenses et les recettes, mais encore de créer la sta-bilité fiscale tant réclamée par les en-treprises, et de financer le revenu uni-versel, qui va devenir très rapidement vital à la survie de nos sociétés.

Il est irresponsable de laisser laFrance et l’Europe sombrer dans la vio-lence sociale actuelle en s’arc-boutant sur de fausses postures de fermeté qui ne mènent nulle part. p

¶Cyrille Dalmont est juriste,

chargé de développement

dans une société d’économie

mixte du secteur

de la construction

par cyrille dalmontSURLIGNE PAR ERIC LEGER

La protection sociale ne peut plus être financée par des travailleurs toujours moins nombreux ; l’avenir est au revenu universel financé par une taxe sociale unique

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