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Autisme france

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LE DIAGNOSTIC PRÉCOCE DE L'AUTISME : DONNÉES ACTUELLES Bernadette Rogé P.U.F. | Enfance 2002/1 - Vol. 54pages 21 à 30

ISSN 0013-7545

Article disponible en ligne à l'adresse:--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-enfance-2002-1-page-21.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Rogé Bernadette, « Le diagnostic précoce de l'autisme : données actuelles », Enfance, 2002/1 Vol. 54, p. 21-30. DOI : 10.3917/enf.541.0021--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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Le diagnostic précoce de l’autisme :données actuelles

LE DIAGNOSTIC PRÉCOCE DE L’AUTISME : DONNÉES ACTUELLES

BERNADETTE ROGÉ

Bernadette Rogé1

RÉSUMÉ

Si la plupart des professionnels sont d’accord sur les signes centraux de l’autisme,l’identification des signes précoces pose encore des problèmes. Les signes précocespeuvent être discrets et ne représentent généralement que de légères déviations parrapport au développement normal. De ce fait, ils peuvent ne pas être reconnus par lesparents et même par des professionnels non spécialisés dans les troubles envahissantsdu développement. Différentes méthodes ont été utilisées pour enregistrer les signesprécoces. L’observation du comportement, les questionnaires permettant de recueillirl’information auprès des parents, les outils de dépistage ont été utilisés pour faire undiagnostic précoce et pour tester leur validité par la stabilité du diagnostic dans letemps. Tous les professionnels impliqués dans le suivi de jeunes enfants devraient êtresuffisamment familiarisés avec les signes précoces de l’autisme afin d’être en mesured’adresser l’enfant à risque à un spécialiste car l’identification précoce permet uneprise en charge rapide.

Mots clés : Autisme, Troubles envahissants du développement, Diagnosticprécoce.

SUMMARY

Early diagnosis in autism : current trends

While most professionnals agree on the basic criteria for autism diagnosis, iden-tification of early indicators continues to be controversial. As early signs can besoft and often only a slight qualitative deviation from the normal behavior, they canbe missed by parents and also by professionals who are not specialized in pervasivedevelopemental disorders. Different methods have been used to evaluate early indi-cators of autism. Behavioral observation, questionnaires for parents, and screening

ENFANCE, no 1/2001, p. 21 à 30

1. Professeur, Université de Toulouse-Le Mirail (Centre d’études et de recherches enpsychopathologie – CERPP) et Unité de diagnostic et évaluation de l’autisme, CHU deToulouse.

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tools have all been used in early diagnosis and gone through validity testing interms of temporal stability. All professionals involved in working with young chil-dren should be sufficiently familiar with the early signs of autism in order to referthe child at risk to a specialist because early recognition can lead to early access tointervention.

Key-words : Autism, Pervasive developmental disorders, Early diagnosis.

L’autisme est un trouble du développement d’origine neurobiologiquedont les critères de diagnostic sont maintenant clairement établis. Il existeun consensus au niveau international sur la triade autistique qui constituele noyau dur du trouble et qui permet de l’authentifier. C’est en effetl’association d’anomalies qualitatives dans les domaines de l’interactionsociale, de désordres de la communication et d’un style cognitif et compor-temental rigide et stéréotypé qui constitue le tableau classique du syndromeautistique.

L’accord rencontré au niveau international sur les signes les plus cen-traux ne doit cependant pas masquer les incertitudes qui subsistent auniveau de la délimitation du syndrome. La notion de continuum autistique(Wing et Gould, 1979), puis de spectre autistique (Wing, 1996) correspondà l’idée qu’il existe des degrés variables dans l’intensité des symptômes, cequi est admis par tous. Mais cette définition plus extensive de l’autismesoulève des discussions sur les limites du syndrome autistique et par consé-quent sur les taux de prévalence. Sur un autre plan, si l’un des critères dediagnostic de l’autisme est l’apparition des troubles avant l’âge de 36 mois,Wing a aussi souligné la possibilité de manifestations légèrement plus tar-dives dans quelques cas. La dimension développementale du trouble, quiinduit des variations du tableau clinique d’âge en âge, est d’ailleurs peuprise en compte dans les descriptions de l’autisme, ce qui renforce encore leproblème de validité du diagnostic dans des périodes d’évolution où lasymptomatologie est moins marquée.

C’est dans ce contexte que se pose le problème du diagnostic précoce del’autisme. En effet, bien que la participation de facteurs biologiques soitavérée, il n’existe pas de marqueurs biologiques de l’autisme et il restenécessaire de s’appuyer sur des signes comportementaux pour établir le dia-gnostic. Le repérage précoce des troubles représente un enjeu de taille puis-qu’il ouvre des perspectives de prise en charge à un âge où certains proces-sus de développement peuvent encore être modifiés. La littérature surl’intervention précoce intensive est explicite à ce niveau : les chances demodifier sensiblement la trajectoire développementale sont importantes, etles enfants qui bénéficient d’une telle intervention précoce et intensives’améliorent de manière significative sur le plan cognitif, émotionnel etsocial. Les études de suivi des enfants pris en charge précocement et demanière intensive ont en effet montré une accélération significative durythme de développement, avec des gains substantiels au niveau du QI, des

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progrès au niveau du langage, des comportements sociaux significativementaméliorés et une diminution des signes d’autisme chez les enfants pris encharge. Ces résultats sont obtenus dans la plupart des cas en un ou deuxans d’intervention précoce et intensive. La majorité des enfants pris encharge (73 %) atteint un niveau de langage fonctionnel à la fin de la périoded’intervention (en général vers 5 ans). Lorsque la stabilité des effets obtenusa été étudiée, le maintien des gains après la fin de l’intervention a étéconfirmé.

Actuellement, le diagnostic d’autisme est établi le plus courammententre 2 et 3 ans, en moyenne. Cependant, les cliniciens expérimentés pour-raient déceler les signes de l’autisme beaucoup plus précocement : à 12 moisen moyenne, pour Fombonne et De Giacomo (2000), à 12,7 mois pourVolkmar et al. (1994), après le premier anniversaire pour Rogers et DiLalla (1990), vers 13 mois pour Fombonne (1995).

Il existe donc un décalage important entre les connaissances actuellessur les manifestations précoces de l’autisme et leur mise en application auniveau du diagnostic. Le retard pris pour le diagnostic est lié à plusieursfacteurs. L’une des premières causes repérable est le manque d’expériencedes parents, qui ne connaissent pas le développement normal, comme c’estle cas lorsqu’il s’agit du premier enfant de la famille. Les parents peuventne pas accorder d’importance à de petits signes traduisant pourtant unretard ou une déviance qualitative dans le développement. Même lorsqueles parents relèvent des anomalies, ils peuvent adopter une attitude de déni,en raison de leur difficulté à accepter la situation, et s’appuyer sur des élé-ments positifs pour écarter l’idée d’une pathologie possible. Les parents, etplus spécifiquement les mères peuvent ainsi avoir développé des routinesinteractives particulièrement efficaces pour déclencher et maintenir descomportements sociaux d’apparence normale. Les mères négligent alors lefait que le comportement de l’enfant est hautement dépendant de la stimu-lation spécifique, de la personne qui la propose, et que les réponses positi-ves de l’enfant ne sont en fait que des séquences stéréotypées dont la qualitésociale est douteuse. Le manque d’expérience du professionnel peut égale-ment être en cause, et il arrive que certains médecins peu familiarisés avecla symptomatologie précoce de l’autisme en banalisent les premiers signesen se montrant résolument rassurants avec les parents.

La difficulté du diagnostic au plus jeune âge renvoie aussi au fait queles outils habituellement utilisés pour faire le diagnostic ne sont pas adaptéspour le plus jeune âge. En effet, les critères retenus dans les classificationset les seuils ne s’appliquent pas bien aux jeunes enfants, surtout lorsqu’ilsprésentent un retard, car les principaux critères de diagnostic portent surdes comportements qui peuvent ne pas encore être apparus. Par ailleurs ilexiste une variabilité importante d’expression du désordre qui peut mettrele clinicien en difficulté pour apprécier le caractère significatif de certainesmanifestations relativement discrètes, et ce, d’autant plus que le comporte-ment typique lui-même présente des variations interindividuelles. L’une des

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caractéristiques du profil de développement de l’enfant autiste est d’être trèshétérogène. Chez l’enfant très jeune, les différences entre les secteurs dedéveloppement sont par définition moins perceptibles car elles ne peuventporter que sur quelques mois.

Au plus jeune âge, le diagnostic repose donc essentiellement sur le juge-ment du clinicien. Les études portant sur ce type de démarche montrent quele jugement clinique de spécialistes expérimentés est fiable dans une propor-tion importante des cas. Ainsi, le plus grand nombre des enfants ayant reçule diagnostic d’autisme avant 3 ans ont un diagnostic stable par la suite(Gillberg et al., 1990 ; Lord, 1995). Le diagnostic d’autisme formulé à 2 ansest en effet retrouvé à 3 ans dans 72 % des cas. Le diagnostic de trouble dudéveloppement non spécifié (PDD-NOS) est moins stable : Seulement 42 %des enfants diagnostiqués à 2 ans ont encore le même diagnostic à 3 ans.Parmi ceux dont le diagnostic change, 50 % passent dans la catégoriede l’autisme et 50 % sortent du spectre des troubles autistiques(Lord et al., 1996).

Les observations de l’autisme chez le jeune enfant permettent de repérerles signes déjà perceptibles au début du développement. D’après les nom-breux travaux maintenant effectués, peut ainsi être dressée la symptomato-logie la plus fréquemment retrouvée. Des anomalies sont signalées dans lacommunication et l’utilisation des symboles, la répétition des sons, les jeuxsymboliques, les interactions sociales, l’imitation, le geste de pointé,l’utilisation du regard, les activités qui sont répétitives et traduisent unbesoin d’immuabilité, l’utilisation des objets. Sont également relevés desmaniérismes des mains et des doigts, des activités de flairage des objets etdes personnes, la mise en bouche des objets, les réactions atypiques auxsons et aux autres stimulations sensorielles ainsi que des anomalies motriceset posturales.

Si dans le contexte individuel d’une anamnèse précise et en réunissanttout un faisceau de signes cliniques le professionnel averti peut faire un dia-gnostic d’autisme chez les jeunes enfants avec une fiabilité relativementbonne, il n’en reste pas moins que tous ces signes n’ont pas la même valeurpronostique.

Les recherches actuelles s’orientent donc vers l’identification de signesconstituant des marqueurs fiables de l’autisme c’est-à-dire qui soient suffi-samment sensibles (pourcentage suffisant d’enfants identifiés), spécifiques(faible taux de faux positifs) et ayant une bonne valeur prédictive (diagnos-tic confirmé et validé par la suite). Il faut de surcroît qu’ils soient utilisablespar tous les professionnels.

Les études empiriques dans lesquelles de jeunes enfants autistes sontcomparés à des enfants retardés sans autisme, ou à des enfants ayant destroubles spécifiques du développement permettent de dégager les signes sus-ceptibles de différencier les enfants avec autisme des autres. Les éléments lesplus évocateurs de l’autisme sont ainsi les difficultés au niveau del’attention conjointe (McEvoy et al., 1993 ; Mundy et al., 1994 ; Baron-

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Cohen et al., 1992), la faible tendance à regarder le visage, le manque deréponse à l’appel du prénom et l’absence de jeux de faire semblant (Hertziget al., 1989 ; Osterling et Dawson, 1994). Les études portant sur les filmsfamiliaux (Adrien et al., 1991 ; Adrien et al., 1993) ont retenu des signesclairement indicatifs de l’autisme, différents suivant l’âge concerné. À 1 an,c’est la pauvreté du contact, le faible nombre de sourires sociaux et le peud’expressivité des mimiques qui dominent. À 2 ans, c’est encore la pauvretédu contact et la faible valeur expressive des manifestations émotionnelles,mais aussi les stéréotypies, les postures bizarres et l’attention labile qui per-mettent de différencier les autistes des autres enfants.

Une autre voie d’approche pour le repérage des signes précoces est latechnique de l’entretien avec les parents. Lord et Risi (2000) ont mis en évi-dence un certains nombre d’items susceptibles de distinguer les enfants por-teurs d’autisme. Deux items de l’entretien sont très discriminatifs chezl’enfant de 2 ans dont le diagnostic d’autisme sera confirmé à 3 ans : Lepremier comportement indicatif d’une anomalie est l’attention à uneremarque neutre. L’enfant ne manifeste aucune réaction si l’adulte pro-nonce une phrase du style « oh, il pleut » sans l’appeler par son prénom etsans se diriger vers lui ou attirer particulièrement son attention. Ledeuxième comportement correspond à la manière dont l’enfant sollicite etdirige l’attention de l’adulte. L’enfant n’essaie pas spontanément de faireregarder quelque chose à distance (un animal, les étoiles). Ces deux itemssont liés à la communication sociale, et c’est dans ce secteur que les indicesd’autisme doivent d’abord être recherchés. Les autres comportements,comme les comportements répétitifs et les intérêts restreints ne sont dans laplupart des cas pas encore apparus à 2 ans ou n’alertent pas encore lesadultes.

À 3 ans, cinq items discriminent clairement l’autisme. L’un est lemême qu’à 2 ans (attention à une remarque neutre). Un autre est une des-cription plus fine d’une tentative de diriger l’attention de l’adulte avecpointé du doigt pour exprimer son intérêt et pas pour demander quelquechose. À cet âge, les maniérismes sont devenus suffisamment communspour contribuer au diagnostic. Le fait d’utiliser la main de l’autre commeun outil est aussi un item discriminant. Enfin, l’absence d’utilisation spon-tanée et avec une certaine régularité de mots significatifs (en dehors depapa et maman) devient également un indicateur relativement fiable àl’âge de 3 ans.

Cette étude a été réalisée sur un échantillon comportant des enfantsavec des retards cognitifs. Bien que peu d’enfants de cet échantillon avec ousans autisme aient du langage à 2 ans, il faut souligner que dès 2 ans le lan-gage aide au diagnostic sous la forme d’un item de langage réceptif. Eneffet, dès cet âge, l’enfant qui ne comprend pas de mots hors contexte est àhaut risque pour l’autisme. À 3 ans, l’absence de mot significatif utilisérégulièrement est aussi un indicateur de l’autisme, quoiqu’il y ait aussi desenfants avec autisme qui n’ont pas de tels problèmes de langage.

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La même étude (Lord 1995) montre que les critères de diagnostic stan-dard appliqués à 2 ans ont tendance à surdiagnostiquer les enfants ayantdes retards cognitifs mais à sous-diagnostiquer des enfants autistes quin’ont pas encore d’activité répétitive. Cela peut-être dû en partie au fait queles parents n’ont pas encore reconnu le caractère répétitif. Par exemple, unenfant de 2 ans qui jette des objets ou tourne les pages d’un livre n’estrepéré qu’après un certain temps s’il persiste et si cela est en concurrenceavec le fait de s’engager socialement. Enfin, les chercheurs se sont égale-ment appuyés sur les mesures issues de l’observation standardisée pour affi-ner les possibilités d’identification de l’autisme dès le plus jeune âge. C’estainsi que Lord a examiné 110 enfants vus à 2 ans pour suspicion d’autismeet 21 enfants retardés, à l’aide de l’ADOS (Autism Diagnostic ObservationSchedule, Lord et al., 1999). Dans cette étude, tous les enfants vus à 2 ansfont l’objet d’un diagnostic clinique en plus de l’observation dans le cadrede l’ADOS. À l’âge de 5 ans, les mêmes enfants sont revus pour un diagnos-tic clinique, un ADOS et un ADI-R (Autism Diagnostic Interview-Revised,Lord et al., 1994) est pratiqué avec les parents.

À l’âge de 2 ans, les enfants de plus haut niveau sont moins bien iden-tifiés, mais l’ADOS est plus sensible que les rapports des parents. Les com-portements en situation spécifique (ADOS) sont moins effectifs pour discri-miner les enfants avec autisme des autres que les comportements observésdans différents contextes. La réponse à l’attention conjointe est trèsinfluencée par le développement, et les enfants retardés ne présentent pascette réponse du fait de leur retard. Le jugement de l’observateur surl’ouverture sociale est stable d’âge en âge.

Dans cette étude, les enfants diagnostiqués autistes à 2 ans restent dansle spectre autistique à 5 ans. Les enfants dont le diagnostic est douteux pas-sent dans la catégorie des troubles envahissants du développement non spé-cifiés. Ils avaient un meilleur niveau intellectuel et un meilleur niveau delangage à 2 ans. Sur les 110 enfants adressés pour suspicion d’autisme, 10seulement ne reçoivent pas le diagnostic d’autisme ou de trouble envahis-sant du développement non spécifié à 5 ans. Sur les 10, 9 présentent unretard mental ou un retard sévère de langage. Sur les 10, un seul reçoit lediagnostic de trouble oppositionnel. C’est un enfant qui, dès le départ, bienqu’adressé pour suspicion d’autisme, n’a jamais été considéré commeappartenant au spectre autistique par l’équipe de spécialistes, même à l’âgede 2 ans. Les enfants diagnostiqués autistes à 5 ans n’avaient pas forcémentun autisme de forme prototypique à 2 ans. Ils n’étaient pas isolés, étaientrépondants à l’interaction sociale notamment à l’interaction physique detype chatouilles, ils étaient attachés à leur mère et relativement prochesd’elle. Ils ne présentaient pas de bizarrerie de comportement ou de manié-rismes. Par contre, ils ne répondaient pas quand on leur parlait de manièreneutre, ne cherchaient pas à attirer l’attention d’un adulte dans une situa-tion de partage social, ne ramenaient pas un objet d’une autre pièce à lademande de l’adulte. Ces comportements susceptibles de les différencier des

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autres enfants dès l’âge de 2 ans étaient issus de mesures multiples puis-qu’ils étaient saisis à la fois par l’observation standardisée et par les entre-tiens.

Enfin, les questionnaires de dépistage suscitent également beaucoupd’intérêt car ils pourraient permettre une identification précoce des enfantsavant même qu’ils ne soient entrés dans le milieu spécialisé. Plusieurs outilsont ainsi été mis au point et testés sur des populations à risque. Le CHAT(Checklist for Autism in Toddlers), élaboré par Baron-Cohen et al., 1992,pose des problèmes de sensibilité et de valeur prédictive (Baron-Cohenet al., 1996). Le STAT (Screening Tool for Autism), mis au point parStone et al., 2000, a seulement fait l’objet d’études préliminaires. Sa sensibi-lité et sa spécificité sont encore incertaines. L’ASQ (Autism Screening Ques-tionnaire) élaboré par Michael Rutter et Cathy Lord (Berument et al.,1999) n’est pas encore validé sur les plus jeunes enfants. Tous ces instru-ments sont donc loin de pouvoir encore jouer un rôle important au niveaud’un dépistage systématique.

L’autisme peut donc être diagnostiqué de manière relativement fiableavant 3 ans. Les différentes études ont permis de montrer ce qui différenciel’autisme des autres désordres du développement dans la période de 20 à36 mois, caractéristiques que les dépistages antérieurs doivent cibler. Lessignes évocateurs de l’autisme incluent des déficits dans les domaines ducontact visuel, l’orientation à l’appel de son prénom, les comportementsd’attention conjointe (pointer, montrer), les jeux de faire semblant,l’imitation, les communications non verbales, et le développement du lan-gage. Les comportements émotionnels socialement dirigés peuvent égale-ment différencier les enfants porteurs d’autisme des autres. Mais ni lessymptômes sensoriels et perceptifs, ni les comportements répétitifs ou lescomportements problématiques ne permettent de différencier de manièreconstante les enfants avec autisme des non-autistes.

Les procédures de dépistage manquent de sensibilité car elles peuvent nepas identifier les variantes légères sans retard mental évident ou sans retardévident de langage.

À la lumière de ces différentes approches du problème du diagnosticprécoce, on peut donc conclure en disant que le diagnostic chez les enfantstrès jeunes est l’affaire de spécialistes avertis, car les premiers indicateursfiables sont surtout des anomalies qualitatives et parfois très subtiles ducomportement social. Il n’existe donc pas de méthode suffisamment fiablede dépistage pour que celui-ci soit généralisé en étant laissé aux mains deprofessionnels de santé insuffisamment formés à l’autisme. Si l’on veutaméliorer la détection des jeunes enfants porteurs d’autisme, il convient deprocéder en plusieurs étapes, résumées dans le tableau 1. D’abord, renfor-cer la formation des professionnels de santé impliqués dans les bilans desanté sur le développement normal et les sensibiliser aux premières manifes-tations de l’autisme. Ensuite, prévoir à partir de ce type de détectionl’examen des enfants jugés à risque par des cliniciens expérimentés.

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Étapes du diagnostic précoce

ÉTAPE 1 – SURVEILLANCE DE ROUTINE ET DÉPISTAGE(PROFESSIONNELS DE SANTÉ)

• Observation du développement– échelles de développement– questionnaires parents– repérage d’inquiétudes spécifiques :

! retard de langage! anomalies de la communication! comportements atypiques! enfant autiste dans la fratrie

• Examens spécifiques– bilan auditif– bilan pédiatrique

• Dépistage de l’autisme– échelles spécifiques de dépistage

ÉTAPE 2 – DIAGNOSTIC ET ÉVALUATION DE L’AUTISME PAR DES CLINICIENS SPÉCIALISÉS

• Évaluation médicale approfondie– anamnèse (histoire médicale et développementale)– histoire familiale– examen neuro-pédiatrique– recherche de l’X fragile– recherche de la sclérose tubéreuse de Bourneville

• Diagnostic de l’autisme– entretiens avec les parents– observation de l’enfant– interaction avec l’enfant– jugement clinique– échelles de diagnostic

• Évaluation de l’autisme– langage expressif et réceptif– évaluation cognitive– évaluation des comportements adaptatifs– évaluation sensori-motrice– évaluation neuro-psychologique

• Tests biologiques– tests métaboliques– tests génétiques– EEG– imagerie

ÉTAPE 3 : ORIENTATION POUR PRISE EN CHARGE PRÉCOCE

• Consultation spécialisée, structure d’accompagnement pour l’enfant• Accompagnement de la famille

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