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AMBASSADE DE FRANCE AU MAROC - MISSION ÉCONOMIQUE DE RABAT Justice et règlement des litiges commerciaux au Maroc Actualisation au 3 mai 2006 © MINEFI – DGTPE Prestation réalisée sous système de management de la qualité certifié AFAQ ISO 9001 Pour en savoir plus : Le guide « s’implanter au Maroc » disponible à la Mission Economique et à la librairie du commerce international – Ubifrance 10 av. d’Iéna 75016 Paris Tél : 01 40 73 34 60 Fax : 01 40 73 31 46 Consulter sur notre site la fiche : Avocats, experts comptables et consultants au Maroc Consulter le site du ministère de la Justice : www.justice.gov.ma Dans le cadre de la modernisation des institutions et de la politique d’attraction des investissements étrangers, le ministère de la Justice, a engagé en 1997 un programme de réforme articulé autour de 3 axes fondamentaux : la réhabilitation, la modernisation et la coopération internationale. A ce titre, les bailleurs de fonds ont, par exemple, financé des programmes d’informatisation des greffes et tribunaux de commerce. Le règlement des différends reste cependant fréquemment mentionné par les entreprises comme un frein à l’investissement au Maroc. Les principales difficultés identifiées résident dans certaines incohérences et lenteurs des jugements. Les causes résident essentiellement dans le manque de diffusion de la jurisprudence, le décalage culturel entre les magistrats et les entreprises, une formation des praticiens du droit (magistrats, avocats) parfois encore inadaptée ainsi que la qualité des travaux des auxiliaires de justice (experts judiciaires, huissiers de justice) sur lesquels les investisseurs cristallisent un certain nombre de griefs. Par ailleurs, quelques insuffisances sont signalées quant à la notification et l’application des jugements. Le dernier point ayant suscité une réflexion sur la révision des procédures relatives à l’exécution des décisions de justice. Les investisseurs français auront à l’esprit que si de façon générale le droit marocain est proche du droit français, les solutions marocaines ne sont pas systématiquement les mêmes, ni les règles de procédures identiques, que la jurisprudence est parfois en construction et que la procédure est en langue arabe. On peut en outre souligner que le Code de procédure civile régit la procédure civile, sociale, commerciale mais aussi administrative et que la séparation de l’ordre judiciaire et administratif est encore inachevée. Ce contexte pourrait désigner le recours à l’arbitrage comme mode approprié de règlement alternatif des différends. L’arbitrage interne conserve cependant certaines limites à défaut de structures expérimentées au Maroc. L’arbitrage international reste, lui, intéressant. Il faut cependant, pour y recourir que les éléments intrinsèques du dossier, les montants et enjeux le permettent. Le cas échéant, les parties pourront privilégier la solution de l’arbitrage international dès la négociation du contrat. La décision obtenue dans le cadre d’une procédure d’arbitrage international devra, tout comme une décision obtenue devant une juridiction étrangère être revêtue de l’exequatur au Maroc avant d’y produire des effets. Cette procédure ne pose pas de difficultés particulières. En revanche, l’obtention d’une décision à l’étranger ne permet pas en dernier lieu d’éviter les difficultés liées à son exécution lorsque celle-ci est demandée au Maroc (voir ci-dessus). L’action en justice au Maroc, quant à elle, devra être envisagée avec l’appui d’avocats dont la notoriété est sans faille. Le choix des conseils est une étape fondamentale. Ils sont un soutien indispensable à l’engagement de toute action judiciaire : le recours à des avocats de faible compétence et notoriété est souvent la cause des difficultés (allongement excessif des procédures, erreur de stratégie, défense insuffisante du dossier).

Justice et reglement_de_litiges_commer_maroc

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Justice et règlement des litiges commerciaux au Maroc

Actualisation au 3 mai 2006 © MINEFI – DGTPE Prestation réalisée sous système de management de la qualité certifié AFAQ ISO 9001 Pour en savoir plus :

Le guide « s’implanter

au Maroc » disponible

à la Mission

Economique et à la

librairie du commerce

international –

Ubifrance

10 av. d’Iéna 75016

Paris

Tél : 01 40 73 34 60

Fax : 01 40 73 31 46

Consulter sur notre

site la fiche :

Avocats, experts

comptables et

consultants au Maroc

Consulter le site du

ministère de la

Justice :

www.justice.gov.ma

Dans le cadre de la modernisation des institutions et de la politique d’attraction des

investissements étrangers, le ministère de la Justice, a engagé en 1997 un programme de

réforme articulé autour de 3 axes fondamentaux : la réhabilitation, la modernisation et la

coopération internationale. A ce titre, les bailleurs de fonds ont, par exemple, financé des

programmes d’informatisation des greffes et tribunaux de commerce. Le règlement des

différends reste cependant fréquemment mentionné par les entreprises comme un frein à

l’investissement au Maroc.

Les principales difficultés identifiées résident dans certaines incohérences et lenteurs des

jugements. Les causes résident essentiellement dans le manque de diffusion de la

jurisprudence, le décalage culturel entre les magistrats et les entreprises, une formation des

praticiens du droit (magistrats, avocats) parfois encore inadaptée ainsi que la qualité des

travaux des auxiliaires de justice (experts judiciaires, huissiers de justice) sur lesquels les

investisseurs cristallisent un certain nombre de griefs. Par ailleurs, quelques insuffisances

sont signalées quant à la notification et l’application des jugements. Le dernier point ayant

suscité une réflexion sur la révision des procédures relatives à l’exécution des décisions de

justice.

Les investisseurs français auront à l’esprit que si de façon générale le droit marocain est

proche du droit français, les solutions marocaines ne sont pas systématiquement les

mêmes, ni les règles de procédures identiques, que la jurisprudence est parfois en

construction et que la procédure est en langue arabe. On peut en outre souligner que le

Code de procédure civile régit la procédure civile, sociale, commerciale mais aussi

administrative et que la séparation de l’ordre judiciaire et administratif est encore

inachevée.

Ce contexte pourrait désigner le recours à l’arbitrage comme mode approprié de règlement

alternatif des différends. L’arbitrage interne conserve cependant certaines limites à défaut

de structures expérimentées au Maroc. L’arbitrage international reste, lui, intéressant. Il

faut cependant, pour y recourir que les éléments intrinsèques du dossier, les montants et

enjeux le permettent. Le cas échéant, les parties pourront privilégier la solution de

l’arbitrage international dès la négociation du contrat. La décision obtenue dans le cadre

d’une procédure d’arbitrage international devra, tout comme une décision obtenue devant

une juridiction étrangère être revêtue de l’exequatur au Maroc avant d’y produire des

effets. Cette procédure ne pose pas de difficultés particulières. En revanche, l’obtention

d’une décision à l’étranger ne permet pas en dernier lieu d’éviter les difficultés liées à son

exécution lorsque celle-ci est demandée au Maroc (voir ci-dessus).

L’action en justice au Maroc, quant à elle, devra être envisagée avec l’appui d’avocats dont

la notoriété est sans faille. Le choix des conseils est une étape fondamentale. Ils sont un

soutien indispensable à l’engagement de toute action judiciaire : le recours à des avocats de

faible compétence et notoriété est souvent la cause des difficultés (allongement excessif

des procédures, erreur de stratégie, défense insuffisante du dossier).

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La Mission Economique, sans se substituer aux cabinets juridiques locaux ou

internationaux, conseille et oriente dans leurs premières démarches les entreprises

françaises confrontées à des problèmes judiciaires au Maroc (contact : Daniel GROTINO,

Chef du secteur juridique, +212 (0) 37 68 98 00, [email protected]).

Juridictions de droit commun

Elles sont régies par le Dahir portant loi n°1-74-338 du 15 juillet 1974 fixant l’organisation

judiciaire du Royaume.

La Cour suprême

Elle est présidée par un premier Président. Le ministère public y est représenté par le

Procureur général du Roi assisté d’avocats généraux. La Cour comprend 6 chambres : une

chambre civile, une chambre de statut personnel et successoral, une chambre commerciale,

une chambre administrative, une chambre sociale et une chambre pénale.

La loi limite son rôle aux questions de droit : elle contrôle la légalité des décisions rendues

par les juridictions du fond et assure ainsi l’unité d’interprétation jurisprudentielle. La

Cour statue sur les pourvois en cassation formés notamment contre les décisions rendues

en dernier ressort par toutes les juridictions du Royaume, les recours formés contre les

décisions par lesquelles les juges excèdent leurs pouvoirs etc. Par ailleurs, la Cour

Suprême statue comme juridiction de second degré sur les appels contre les décisions des

tribunaux administratifs, en premier et dernier ressort sur les recours en annulation pour

excès de pouvoir dirigés contre les actes réglementaires ou individuels du Premier ministre

etc.

Les Cours d’appel

Elles sont organisées en chambres spécialisées. Les cours d’appel examinent les affaires

déjà jugées en premier ressort par les tribunaux de première instance et les appels formés

contre les ordonnances rendus par les présidents de ces juridictions.

Les tribunaux de première instance

Les tribunaux de première instance ont une compétence générale (affaires civiles, pénales,

immobilières et sociales). Ils peuvent connaître de toutes les matières sauf lorsque la loi

attribue formellement compétence à une autre juridiction.

Juridictions spécialisées

Les tribunaux administratifs et cours d’appel administratives

Les tribunaux administratifs sont régis par le dahir n°1-91-227 du 10 septembre 1993

portant promulgation de la loi 41-90 créant les tribunaux administratifs. Ils sont au nombre

de 7 et sont installés dans chacune des régions du Royaume. Ils sont compétents pour juger

en premier ressort l’examen de la légalité des actes administratifs, les recours en

annulation pour excès de pouvoir formés contre les décisions administratives, les litiges

relatifs aux contrats administratifs, les actions en réparation de dommages causés par les

actes ou les activités des personnes publiques, les contentieux fiscaux, les expropriations

etc. Les cours d’appel administratives sont régies par la loi 80-06 promulguée par le dahir

n°1-06-07 du 14 février 2006 et sont compétentes pour connaître de l’appel formé contre

les jugements administratifs.

Les tribunaux et cour d’appel de commerce

Elles sont régies par la loi n°53-95 du 6 janvier 1997 promulguée par le dahir n°1-97-65 du

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12 février 1997 et fonctionnent depuis 1998. Les tribunaux de commerce sont compétents

pour connaître des actions entre commerçants à l’occasion de leurs activités commerciales,

des actions relatives aux contrats commerciaux, aux effets de commerce et aux fonds de

commerce ou plus généralement des actes accomplis par les commerçants à l’occasion de

leur commerce. Le Président du tribunal de commerce surveille également les formalités

du registre du commerce.

Les cours d’appel de commerce sont au nombre de 3 (Casablanca, Fès et Marrakech). Elles

jugent en appel contre les décisions rendues par les tribunaux de commerce et les

ordonnances de leur président.

Procédure Le Code de procédure civile est régi par le Dahir du 28 septembre 1974. Il contient les

règles communes applicables en matière civile, sociale, commerciale et administrative et

constitue ainsi le droit commun de la procédure. La procédure pénale a fait l’objet d’une

réforme et est régie par la loi 22-01 du 3 octobre 2002. La procédure devant les tribunaux

administratifs doit être présentée dans les formes prévues par le code de procédure civile.

Le tribunal de commerce est saisi par requête écrite et signée par un avocat inscrit au

tableau de l’un des barreaux du Maroc. La procédure est écrite. Les convocations sont

transmises soit par huissier soit par un agent du greffe ou par lettre recommandée avec

demande d’accusé de réception. Le délai d’appel des jugements rendus par le tribunal de

commerce est de 15 jours à dater de la notification, au lieu des 30 jours prévus pour les

jugements rendus par les tribunaux de première instance.

Le président du tribunal de commerce peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne

font l’objet d’aucune contestation sérieuse et même dans ce cas ordonner des mesures

conservatoires ou la remise en état pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un

trouble manifestement illicite. Le délai d’appel pour les ordonnances est également de 15

jours. Il est par ailleurs compétent pour connaître des requêtes d’injonction de payer,

fondées sur des effets de commerce et des titres authentiques. Le délai d’appel contre les

ordonnances aux fins d’injonction de payer est de 10 jours et dans ce cas l’appel n’a pas

d’effet suspensif. La loi prévoit que le Président du tribunal désigne, sur proposition de

l’assemblée générale, un magistrat chargé du suivi des procédures d’exécution. L’agent

chargé de l’exécution doit obtenir dans un délai de 10 jours, à dater de la demande

d’exécution, soit l’exécution de la décision, soit l’intention de la partie condamnée. Il doit

dresser un procès-verbal constatant le résultat de sa mission.

Principales voies de recours

L’opposition

Elle est dirigée contre les jugements rendus par défaut. Elle est présentée devant le juge qui

a prononcé la décision attaquée. La procédure vise à demander au tribunal de revenir sur sa

décision. Pour éviter les manœuvres dilatoires, le Code de procédure civile a limité le

champ d’ouverture de cette voie de recours. Le délai d’opposition est de 10 jours et la

procédure n’est autorisée devant le tribunal de première instance que si le jugement par

défaut n’est pas susceptible d’appel.

L’appel

Il est introduit devant une juridiction hiérarchiquement supérieure à celle qui a rendu la

décision critiquée. L’appel a un effet suspensif à moins que l’exécution provisoire n’ait été

ordonnée par le tribunal de premier degré. Le délai d’appel est fixé à 30 jours à compter de

la notification du jugement. Il peut être réduit à 15 jours pour les ordonnances de référé et

triplé en faveur des personnes sans domicile ni résidence au Maroc.

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Le pourvoi en cassation

Le pourvoi peut être introduit par les intéressés contre toute décision rendue en dernier

ressort. Le procureur du Roi est également habilité à introduire un pourvoi dans l’intérêt de

la loi. Les cinq cas d’ouverture du pourvoi sont : la violation de la loi interne, la violation

d’une règle de procédure ayant causé préjudice à une partie, l’incompétence de la

juridiction qui rendu la sentence, l’excès de pouvoir, le défaut de base légale ou de motif.

Le pourvoi n’a pas d’effet suspensif, contrairement à l’appel. La décision attaquée est donc

d’exécution obligatoire pendant la durée de la procédure. Le délai prévu pour se pourvoir

en cassation est de 30 jours à compter de la notification du jugement rendu en premier et

dernier ressort ou de l’arrêt rendu par une Cour d’Appel.

Arbitrage Deux modalités sont envisageables selon que les parties ou l’objet du litige présentent un

caractère interne (arbitrage interne) ou international (arbitrage international).

L’arbitrage interne

Si les règles relatives à l’arbitrage prévoient encore de nombreuses limites, la loi 53-95

instituant les juridictions de commerce fait explicitement référence au recours à ce mode

alternatif des différends (art 5 al 4) en matière commerciale. Il renvoit au code de

procédure civil qui le régit (art 306 à 327 CPC). Un projet de Code de l’arbitrage est

actuellement en discussion au Secrétariat général du Gouvernement.

Les parties peuvent insérer une clause compromissoire dans le contrat (art 309 du CPC).

Elles s’obligent alors à désigner des arbitres dès l’apparition d’un différend. Sauf clause

contraire, les parties et arbitres se soumettent aux délais et formes établis pour les

tribunaux de première instance (art 314 CPC). Les grands principes de procédure doivent

être respectés : droits de la défense, comparution personnelle, débats contradictoires,

communication des pièces entre les parties etc.

Les sentences rendues par les arbitres sont revêtues de l’autorité de la chose jugée. Faute

d’exécution volontaire, elles ne sont cependant exécutées qu’en vertu d’une décision

d’exequatur émanant du tribunal de commerce. Les sentences arbitrales ne sont pas

susceptibles de recours (art 319 CPC). Les ordonnances d’exequatur qui s’y rapportent

peuvent en revanche être attaquées par voie d’appel (art. 322 CPC).

L’arbitrage international

Le Maroc est partie aux conventions de New York du 10 juin 1958 et de Genève du 21

avril 1961 relatives à l’arbitrage international. Il reconnaît donc officiellement les

sentences arbitrales rendues à l’étranger. L’arbitrage international est de plus en plus

courant, entre parties privées, mais également dans le cadre de contrats conclu avec des

organismes publics (la concession par exemple). Il est cependant exclu pour les marchés

publics en application de l’article 306 du Code de procédure civile marocain.

Copyright Tous droits de reproduction réservés, sauf autorisation expresse de la Mission Economique de RABAT (adresser les demandes à [email protected]). Clause de non-responsabilité La Mission Economique s’efforce de diffuser des informations exactes et à jour, et corrigera, dans la mesure du possible, les erreurs qui lui seront signalées. Toutefois, elle ne peut en aucun cas être tenue responsable de l’utilisation et de l’interprétation de l’information contenue dans cette publication qui ne vise pas à délivrer des conseils personnalisés qui supposent l’étude et l’analyse de cas particuliers.

Auteur : Mission Économique Adresse : 1, rue Aguelmane Sidi Ali RABAT-AGDAL 10000 MAROC Rédigée par : Daniel GROTINO Revue par : Jean Alexandre EGEA et Daniel MAITRE Date de parution : Version originelle du 1 mai 2002 Version n°3 du 3 mai 2006