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L’intensification écologique, une option pour l’Agriculture de l’Avenir
Jean-Pierre Destain et Bernard BodsonIngénierie des productions végétales et
valorisationAvec le concours de Yves Beckers
Ingéniérie des productions animalesGembloux Agro-Bio Tech
Conférence « Agriculture de l’Avenir, Avenir de l’Agriculture »18 /11/2015
Avenir de l’Agriculture: des défis multiples
• Assurer les ressources alimentaires
• Etre économe en intrants
• S’adapter au changement climatique
• Fournir des services éco-systèmiques et de régulation environnementale
• Participer à des productions non-alimentaires bio-sourcées durables et ciblées
• Satisfaire les attentes de la population en termes socio-culturels et de santé
L’intensification écologique
M. Griffon (2014): Concilier productivité élevée et vertu environnementale
L’ Agriculture Ecologiquement Intensive
Dans le monde, il existe des agricultures très diverses s’étendant:
• d’une production de subsistance qu’il faut aider à progresser de manière raisonnée en tenant compte des populations et des spécificités locales
• jusqu’à des productions hyper intensives en Europe, en Amérique du Nord et du Sud et dans certaines zones d’Asie caractérisées par- de fortes consommations d’intrants non renouvelables ou de synthèse- des atteintes environnementales , des pollutions diverses , des pertes de biodiversité- une volatilité extrême des marchés et des prix- peu de reconnaissance sociétale
L’intensification écologique peut offrir une alternative crédible face au constat actuel
L’ agriculture biologique est une des réponses et peut être considérée comme un prototype de l’Agriculture Ecologiquement Intensive.
Cahier de charges caractérisé notamment par- la non utilisation d’intrants issus de procédés chimiques- une adéquation entre les productions végétales et animales.
En Wallonie, 8,1% de la S.A.U et un agriculteur bio sur 10
En Belgique, les produits issus de l’agriculture biologique = 2,3% des dépenses alimentaires
Au niveau mondial , elle occupe 2,5% de la S.A.U
L’intensification écologique est déjà en marche sur des superficies importantes
Quelques exemples choisisde trajectoires empruntées dans
l’agriculture wallonne
Vers une meilleure compréhension du fonctionnement du sol pour améliorer les pratiques culturales ( travail du sol, restitution de la matière organique et des éléments nutritifs)
Physique du sol- La stabilité structurale et la compaction des sols - Les flux d’eau et les risques d’érosion
Chimie du sol - Valeurs seuils de fertilité pour P et K en question- Bilan des flux de C et de N ( exportation par les cultures, pertes par lessivage
et émissions de gaz à effet de serre)- La gestion de la matière organique
Biologie du sol - Microfaune et microflore- Avancées en métagénomique ( diversité microbienne et aspects
fonctionnels)
Le travail du sol doit être adapté aux contraintes :
• De préservation et/ou restauration de la structure du sol
• De la gestion des résidus de la culture principale ou intercalaire
• Des besoins spécifiques de la culture
• De la prévention ou du contrôle des bio-agresseurs
Stockage et déstockage (minéralisation) de la matière organique
Exemple de l’expérimentation de longue durée au CRA-W Gembloux pour le traitement apport de fumier
De 1959 à 2012, les apports de fumier conduiraient à une production d’humus à raison de 90 kg/ T de fumier) de 47250 kg/ha soit 28800 kg C/ ha.
A l’analyse du sol, on observe un stockage de 9000 kg C/ha.
Suivant la formule de Schvartz, le taux de minéralisation annuel est de 0,18% du C pour le traitement fumier et de 0,12% du C pour le traitement sans apport.
Meilleure valorisation des matières organiques
• Engrais de ferme : - réglementations et obligations légales- conseils de Nitrawal auprès des producteurs
• Couverts végétaux en intercultures très largement pratiqués: Cipan , Couverts avec Service d’intérêt écologique (min. 2 espèces)
• Recyclage de matières organiques : - digestats de biométhanisation de déchets des industries agroalimentaires ou de déchets verts - boues résiduaires des stations d’épuration
Source: FAO
Applications moyennes d’azote total et de phosphore minéral sur la SAU wallonne
30 ans d’essais sur la fumure azotée sur froment à Lonzée(Ferme Van Eyck)
0 N: la fertilité des sols et la minéralisation de l’azote n’ont certainement pas diminué
Fumure conseillée 185 N : l’efficience de la fumure (kg blé supplémentaire/ kg N apporté) augmente de 17 à 21 kg /ha soit 23%
Evolution de la teneur en nitrate dans les eaux de captage du bassin versant
d’Arquennes
Vers une meilleure utilisation de la très large diversité intraspécifique de nombreuses plantes cultivées
L’accroissement de la diversité variétale permet de mieux adapter le choix du cultivar aux conditions culturales et aux débouchés
Les Catalogues européens regroupent plus de 23 000 variétés d'espèces agricoles et plus de 21 000 variétés d'espèces potagères commercialisables.
Nouvelles variétés inscrites au Catalogue belge au cours des 5 dernières années.Orge d’hiver : 7 Froment d’hiver: 36Epeautre : 1 Maïs: 34Betterave : 88 Ray-grass anglais: 5Chicorées industrielles: 8
Diversité d’une des caractéristiques de l’amidon de différentes variétés de blé cultivées en Belgique
Formulations de dessert lacté type crème à base d’amidon de 4 variétés de
blé
Comportement directement, 30 min et 6 h après démoulage
L’amidon de la variété Corvus
convient parfaitement!!!
Avec les amidons des 3 autres
variétés, il faut des adjuvants dans la
recette!
Le séquençage à haut débit et l’utilisation conjointe de la génomique et de la phénomiquevont permettre de rendre moins aléatoire et surtout de mieux orienter les processus de sélection de nouvelles variétés sans avoir recours à la transgenèse (OGM)
Vers le développement de produits bio-sourcés
La graine de Colza contient des stérols intéressants pour la production de médicaments
10 variétés d’un même essai analysées
teneur en stérols dans l’huile : de 0,56 à 0,92 %
Vers une place plus grande laissée aux cultures de légumineuses
Cultures protéagineuses : soja, pois, féveroles, …
Production des protéines végétales indispensables à l’alimentation des monogastriquesmenace: pénurie de soja en Europe due à la demande asiatique
espoir: les rares sélectionneurs encore actifs font des miracles
Cultures en association de céréales et de protéagineux
0
2000
4000
6000
8000
10000
12000
0-0 0-40 0-80 0-120 0-160 40-40 40-80 40-120 80-80
Re
nd
em
en
t (k
g/h
a)
Fumure (T R - DF)
Rendement grain Epson Gangster essai fumure 2015
Pois
Froment
Dans nos conditions, l’association pois d’hiver-blé d’hiver permet d’ assurerune production fiable d’une quantité de matière sèche au moinséquivalente à celle produite par les deux cultures pures en améliorant lerendement en protéines tout en réduisant les apports d’engrais azotés desynthèse nécessaires à cette production
Autonomie fourragère
Les trèfles et la luzerne en prairies permanentes ou temporaires
Les mélanges céréales et légumineuses(pois fourragers, vesces,…)
ou plus complexes permettant plusieurscoupes/an
Vers une protection plus intégrée des cultures et une diminution de l’utilisation des pesticides
Les systèmes d’avertissements basés sur des réseaux d’observation et des modèles de développement des bio-agresseurs sont de + en + performants et couvrent maintenant beaucoup de cultures
La protection contre les ravageurs grâce aux sémiochimiques
Les Isnes 2015 - Champ de betteraves - semences sans néonicotinoïde, protégé contre la jaunisse virale par des diffuseurs de sémiochimiques
Des systèmes à libération lente de substances
sémiochimiques sont installés dans les cultures
Lutte contre les pucerons en blé,
féveroles, pois, betteraves
Piégeage des mâles de céciydomie équestre
Soutenir la biodiversité utile par l’installation de bandes herbacées dans ou en bordure des parcelles cultivées
Cibles: - Pollinisateurs
- Prédateurs des pucerons
- Carabes (semences d’adventices et limaces)
A: Influences de bandes de composition
différente en graminées et fleurs
B: Régimes de fauche optimalisant
l’accueil de la biodiversité utile
C: Capacité d’accueil de chaque espèce
prairiale
Observations des insectes
Rendement des bandes enherbées
Evolution des populations d’adventices
Rendement de la culture
Des substances naturelles vont offrir des alternatives aux produits chimiques de
synthèse
• Herbicides: acides nonanoïque(colza) et pélargonique, huiles essentielles
• Fongicides: polypeptides
• Eliciteurs: oligosaccharides
• Biostimulants racinaires: bactéries
Ces substances sont en phase d’expérimentation en champs, quelques unes sont déjà commercialisées
L’équipement agricole est de + en + intelligent et connecté
• L’autoguidage à haute précision (2-3 cm):
tracteur, bineuse, pulvérisateur, distributeur d’engrais
• Les capteurs et ordinateurs embarqués permettant la modulation, les cartographies d’interventions et de récolte
• Les gestions climatiques automatisées des serres et des entreposages des produits récoltés
• Les robots de traite
L’agriculture écologiquement intensive: les productions animales
concernées
Les bienfaits de l’association cultures – élevages
• Valorisation des légumineuses - Les animaux transformateurs des légumineuses
• Meilleure distribution de la matière organique et des éléments minéraux dans l’espace via les animaux
- Eviter les d’excès dans certaines zones
- Remédier aux manquements dans d’autres zones
- Principal frein : la spécialisation territoriale
• Meilleure utilisation des ressources naturelles
• … Soit une augmentation de l’efficience de la transformation du feed en food par les animaux
• De nombreux leviers sont mobilisables
L’agriculture écologiquement intensive: les productions animales
concernées
Quelques exemples
• Le progrès génétique– Des ruminants moins émetteurs de gaz à effet de
serre (i.e. méthane)– Améliorer la résilience ou la résistance des
animaux aux agressions biotiques et abiotiques
• Les itinéraires techniques qui doivent optimiser la production par jour de vie des animaux– Moduler la durée de vie des animaux pour
accroître leur période de production• Augmenter le nombre de lactations d’une vache laitière• Réduire les pertes animales durant les périodes
d’élevages
• L’alimentation– Alimentation multiphase en productions porcines
et aviaires• L’adaptation de la teneur en protéines des régimes selon le stade
des animaux permet de réduire jusqu’à 35 % les rejets azotés
– Utilisation des phytases pour mieux valoriser le phosphore phytique des végétaux par les porcs et les volailles
• Diminution de plus de 30 % du phosphore ingéré par les animaux
– Réduction des teneurs en protéines des régimes des ruminants
• Réduire les excès d’azote dégradable dans le rumen permet de diminuer de 15 à 30 kg les rejets azotés d’un taurillon BBBc
Quelques exemples
Quelles sont les conditions nécessaires pour poursuivre le développement de l’intensification écologique?
Juste rémunération du travail
• Créer de nouveaux mécanismes de régulation de la production et des prix payés aux producteurs (aux niveaux local et global)
• Augmenter le pouvoir de négociation des agriculteurs vis-à-vis des acteurs de l’aval
• Accroître la valeur ajoutée des produits par leur adéquation aux besoins de l’aval et des consommateurs
Maintenir une agriculture à caractère
familial
• Qualité et disponibilité de la main d’ouvre
• Meilleure adaptabilité aux caractéristiques cycliques et imprévisibles des productions
• Intérêt pour la bonne conduite des productions et pour l’innovation
• Sensibilité au respect de l’environnementau sein de l’exploitation et du terroir
Favoriser la juxtaposition dans une même région d’une diversité d’exploitations
• Attentes différentes des consommateurs: circuits courts vs aliments préparés achetés en supermarché
• Besoins pour l’approvisionnement local vs les marchés plus globaux
• Coopération entre exploitations avec des orientations différentes
Réguler l’accès à la terre
• Protéger à long terme les zones agricoles
• Faciliter les reprises d’exploitation
• Organiser une retraite décente aux agriculteurs pour la rendre moins dépendante de la transmission du capital foncier
Intensifier les efforts
de recherche
• Complexité des fonctions écosystémiques fortement dépendantes des conditions des agro-écosystèmes
• Mise en œuvre pratique des avancées scientifiques et technologiques en particulier pour les moyens alternatifs
• Développement de systèmes d’aide à la décision
Accompagner les producteurs
• Renforcer l’encadrement des producteurs et stimuler leur partage d’expérience
• Renforcer les relations entre producteurs transformateurs, consommateurs , chercheurs et contrôleurs au sein de filières transparentes
Rapprocher agriculteurs et consommateurs
• Des pistes encourageantes:- circuits courts ( paniers, Amap, magasins de producteurs, ….)
- labels ( régionaux, qualité différenciée, bio )- traçabilité totale du secteur de la fourche à la fourchette
• Des politiques à mettre en œuvre :- éducation à l’alimentation - vulgarisation objective sur l’évolution de la
production
Merci pour votre attention