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12 ème journées de gynécologie obstétrique et de médecine de la reproduction, 2 & 3 décembre 2017, Hôpital Central de l’Armée, Alger. Préservation de la fertilité chez les patientes atteintes de cancer du sein Pr Y. TAYEBI, Dr I. KOURI, Dr SADAT Service de gynécologie obstétrique, EPH Hassan Badi ex-Belfort Introduction : Les cancers du sein représentent 30% de toutes les tumeurs malignes chez les femmes en âge de procréer. La détection précoce de ces tumeurs et les progrès thérapeutiques réalisés ont permis d ’ améliorer le pronostic considérablement avec augmentation de la survie à long terme. La possibilité et la nécessité de préserver la fertilité chez ces patientes sont des questions importantes au moment de la prise en charge. .Impact de la chimiothérapie sur la fonction ovarienne: Toxicité des anti-tumoraux Le critère d ’ évaluation de l ’ impact de la chimiothérapie repose, pour la plupart des études, sur la survenue d une aménorrhée. L ’ incidence de l’ a ménorrhée induite par la chimiothérapie est liée a l ’ âge de la patiente ( r isque de défaillance ovarienne et d ’ infertilité permanente après 35 ans ) , aux types d agents qui sont administrés et la durée du traitement. Ancien protocole : CMF ( c yclophosphamide, méthotrexate, 5-fluorouracile ) : la fonction ovarienne dépendait de la dose des agents alkylants et de l ’ âge de la patiente ( i ncidence de l aménorrhée 21 -71% avant 40 ans, 40-100% après ) Protocoles actuels basés sur l ’ utilisation d ’ u n e anthracycline et d ’ un taxane: *Régime avec anthracycline ( F EC ou FAC ) : induit une aménorrhée moins souvent que l ’ ancien protocole ( 34 à 55% en fonction de l ’ âge ) *Régime avec taxane ( chez les femmes ayant un envahissement ganglionnaire ) peu de données disponibles Femmes à haut risque d ’ insuffisance ovarienne : L ’ étude des marqueurs de la réserve ovarienne a montré une toxicité gonadique des chimiothérapies avec diminution du taux d’ h ormone antimullérienne ( A MH ) et du nombre de follicules antraux Il est cependant difficile de prédire dans quelle proportion la fonction ovarienne sera endommagée pendant la chimiothérapie Deux facteurs principaux sont impliqués dans la décroissance folliculaire Les facteurs génétiques : délétions, mutation ou polymorphismes de gènes candidats tels que GDF9, BMP15 FOXL2 es facteurs environnementaux : chimiothérapie, tabagisme La chimiothérapie, facteur environnemental, venant moduler un terrain génétique donné. Impact de la préservation de la fertilité sur le pronostic du cancer du sein Les œstrogènes d’ o rigine ovarienne jouent un rôle important dans l ’ oncogenèse du cancer su sein, la suppression de la production de ces hormones a une efficacité certaine. l ’ aménorrhée a potentiellement un effet bénéfique sur la survie en particulier dans les tumeurs hormonosensibles. Tenter de préserver la fonction ovarienne peut exposer à un risque théorique de contrôle tumoral insuffisant ( controversé ) Stratégies de prévention : 1- Préserver la fertilité ‘’in vivo’’ : Préserver la fonction ovarienne en bloquant son fonctionnement pendant la chimiothérapie méthode insuffisamment évaluée Seuls les analogues de la GnRH sont utilisés: *bénéfice: Les données cliniques suggèrent un effet bénéfique de l ’ a ménorrhée sur le pronostic du cancer du sein *risque:L’ h ypo - œstrogènie induite par les analogues pourrait diminuer l’ e fficacité de la chimiothérapie., souvent mal tolérés ( b ouffées de chaleur, sécheresse vaginale) , risque osseux au delà de 3-6 mois de traitement 2- Cryopréservation Congélation ovocytaire et embryonnaire Implique une stimulation ovarienne qui sera proposée entre la chirurgie et la chimiothérapie ( d élai réduit, parfois impossibilité de mettre en route la procédure en fonction du cycle de la femme ) Le type de la stimulation doit être adapté au cancer du sein ( un taux élevé d ’ œstradiol qui peut stimuler la croissance de cellules tumorales) : > Tamoxifène seul ou associé aux gonadotrophines, les inhibiteurs de l ’ aromatase associés aux gonadotrophines permettent de limiter l ’ élévation des taux d ’ œstradiol, sans réduire le nombre de follicules ponctionnés et d’ o vocytes obtenus —>Recueil d ’ ovocytes immatures en cycle spontané suivi de maturation in vitro puis congélation d’ o vocytes maturés ou d ’ e mbryons ( en cours d ’ évaluation ) —>Le risque d ’ h yperstimulation peut être limité par l’ u tilisation d ’ antagonistes de la GnRH en association avec les gonadotrophines Chez les femmes porteuses d ’ une mutation il n ’ y pas d ’ augmentation du risque de cancer du sein Congélation de cortex ovarien Technique prometteuse qui ne nécessite pas de stimulation ovarienne mais avec un faible recul *Contre-indiquée après 35ans ou pour une chimiothérapie réputée non systématiquement stérilisante ( il est possible que le tissu réimplanté comporte de micro-métastases *Réservée aux femmes ou enfants devant recevoir une chimiothérapie ayant un très fort risque de stérilisation Nouvelles stratégies maturation in vitro des follicules immatures extraits de cortex ovarien préalablement congelé Conclusion La préservation de la fertilité d ’une la femme jeune traitée pour cancer du sein est une problématique récente et complexe Les efforts doivent tendre à faciliter l’ é valuation de la balance bénéfice risque en générant des scores prédictifs de l’ i nsuffisance ovarienne chimio -induite et à développer des techniques de préservation rapides et efficaces Bibliographie : N. Chabbert-Buffet et al. Cancer du sein de la femme jeune: préservation de la fertilité. CNGOF 2010 M. Audrey et al. Chimiothérapie adjuvante de cancer du sein et fertilité. Bulletin du cancer 98 ( 2011 ) 741-751 M. Grynberg et al. Cancer, préservation de la fertilité et gonadotrophines. Journal de gynécologie obstétrique et biologie de la reproduction 41 (2012)512-518

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12ème journées de gynécologie obstétrique et de médecine de la reproduction, 2 & 3 décembre 2017, Hôpital Central de l’Armée, Alger.

Préservation de la fertilité chez les patientes atteintes de cancer du sein Pr Y. TAYEBI, Dr I. KOURI, Dr SADAT

Service de gynécologie obstétrique, EPH Hassan Badi ex-Belfort

Introduction :

Les cancers du sein représentent 30% de toutes les tumeurs malignes chez les femmes

en âge de procréer. La détection précoce de ces tumeurs et les progrès thérapeutiques

réalisés ont permis d ’ améliorer le pronostic considérablement avec augmentation de la

survie à long terme. La possibilité et la nécessité de préserver la fertilité chez ces

patientes sont des questions importantes au moment de la prise en charge.

.Impact de la chimiothérapie sur la fonction ovarienne:

Toxicité des anti-tumoraux

Le critère d ’ évaluation de l ’ impact de la chimiothérapie repose, pour la plupart des

études, sur la survenue d ’ une aménorrhée.

L ’ incidence de l’ a ménorrhée induite par la chimiothérapie est liée a l ’ âge de la

patiente ( r isque de défaillance ovarienne et d ’ infertilité permanente après 35 ans ) , aux

types d ’ agents qui sont administrés et la durée du traitement.

Ancien protocole : CMF ( c yclophosphamide, méthotrexate, 5-fluorouracile ) : la fonction

ovarienne dépendait de la dose des agents alkylants et de l ’ âge de la patiente

( i ncidence de l ’ aménorrhée 21-71% avant 40 ans, 40-100% après )

Protocoles actuels basés sur l ’ utilisation d ’ une anthracycline et d ’ un taxane:

*Régime avec anthracycline ( F EC ou FAC ) : induit une aménorrhée moins souvent que

l ’ ancien protocole ( 34 à 55% en fonction de l ’ âge )

*Régime avec taxane ( chez les femmes ayant un envahissement ganglionnaire ) peu de

données disponibles

Femmes à haut risque d ’ insuffisance ovarienne :

L ’ étude des marqueurs de la réserve ovarienne a montré une toxicité gonadique des

chimiothérapies avec diminution du taux d’ h ormone antimullérienne ( A MH ) et du

nombre de follicules antraux Il est cependant difficile de prédire dans quelle proportion la

fonction ovarienne sera endommagée pendant la chimiothérapie

Deux facteurs principaux sont impliqués dans la décroissance folliculaire

Les facteurs génétiques : délétions, mutation ou polymorphismes de gènes candidats

tels que GDF9, BMP15 FOXL2

es facteurs environnementaux : chimiothérapie, tabagisme

La chimiothérapie, facteur environnemental, venant moduler un terrain génétique donné.

Impact de la préservation de la fertilité sur le pronostic du cancer du sein

Les œstrogènes d’ o rigine ovarienne jouent un rôle important dans l ’ oncogenèse du

cancer su sein, la suppression de la production de ces hormones a une efficacité certaine.

l ’ aménorrhée a potentiellement un effet bénéfique sur la survie en particulier dans les

tumeurs hormonosensibles. Tenter de préserver la fonction ovarienne peut exposer à un

risque théorique de contrôle tumoral insuffisant ( controversé )

Stratégies de prévention :

1- Préserver la fertilité ‘’in vivo’’ :

Préserver la fonction ovarienne en bloquant son fonctionnement pendant la

chimiothérapie méthode insuffisamment évaluée

Seuls les analogues de la GnRH sont utilisés:

*bénéfice: Les données cliniques suggèrent un effet bénéfique de l ’ a ménorrhée

sur le pronostic du cancer du sein

*risque:L’ h ypo-œstrogènie induite par les analogues pourrait diminuer l’ e fficacité

de la chimiothérapie., souvent mal tolérés ( b ouffées de chaleur, sécheresse

vaginale) , risque osseux au delà de 3-6 mois de traitement

2- Cryopréservation

Congélation ovocytaire et embryonnaire

Implique une stimulation ovarienne qui sera proposée entre la chirurgie et la

chimiothérapie ( d élai réduit, parfois impossibilité de mettre en route la procédure

en fonction du cycle de la femme )

Le type de la stimulation doit être adapté au cancer du sein ( un taux élevé

d ’ œstradiol qui peut stimuler la croissance de cellules tumorales) :

—> Tamoxifène seul ou associé aux gonadotrophines, les inhibiteurs de

l ’ aromatase associés aux gonadotrophines permettent de limiter l ’ élévation des

taux d ’ œstradiol, sans réduire le nombre de follicules ponctionnés et d’ o vocytes

obtenus

—>Recueil d ’ ovocytes immatures en cycle spontané suivi de maturation in vitro

puis congélation d’ o vocytes maturés ou d ’ e mbryons ( en cours d ’ évaluation )

—>Le risque d ’ h yperstimulation peut être limité par l’ u t ilisation d ’ antagonistes

de la GnRH en association avec les gonadotrophines

Chez les femmes porteuses d ’ une mutation il n ’ y pas d ’ augmentation du risque

de cancer du sein

Congélation de cortex ovarien

Technique prometteuse qui ne nécessite pas de stimulation ovarienne mais avec un

faible recul

*Contre-indiquée après 35ans ou pour une chimiothérapie réputée non

systématiquement stérilisante ( il est possible que le tissu réimplanté comporte de

micro-métastases

*Réservée aux femmes ou enfants devant recevoir une chimiothérapie ayant un très

fort risque de stérilisation

Nouvelles stratégies maturation in vitro des follicules immatures extraits de cortex

ovarien préalablement congelé

Conclusion

La préservation de la fertilité d ’ une la femme jeune traitée pour cancer du sein est

une problématique récente et complexe

Les efforts doivent tendre à faciliter l’ é valuation de la balance bénéfice risque en

générant des scores prédictifs de l’ i nsuffisance ovarienne chimio-induite et à

développer des techniques de préservation rapides et efficaces

Bibliographie :

N. Chabbert-Buffet et al. Cancer du sein de la femme jeune: préservation de la fertilité. CNGOF 2010

M. Audrey et al. Chimiothérapie adjuvante de cancer du sein et fertilité. Bulletin du cancer 98 ( 2011 ) 741-751

M. Grynberg et al. Cancer, préservation de la fertilité et gonadotrophines. Journal de gynécologie obstétrique et biologie de la reproduction 41 (2012)512-518