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1 Chers amis, Notre pays vient de connaitre une des pires tragédies de son histoire et nous en sommes tous profondément marqués. Il y a d’abord eu le temps de la stupeur et de l’horreur, d’une forme d’incrédulité. Comme tous ceux que, tout d’un coup, le destin accable, nous avons mis du temps à admettre et à réaliser ce qui s’était passé. Il y a eu ensuite dans tout notre pays un formidable élan où les uns et les autres voulaient marquer leur sympathie, leur compassion, et nous nous sommes tous sentis parents, amis, de toutes les victimes qui en quelques jours venaient de perdre la vie. A Lyon, mardi dernier, à la grande synagogue du quai Tilsitt, l’émotion et la colère nous étreignaient devant le drame qui s’était déroulé devant le lycée Ozar Hatorah de Toulouse. Un professeur de 30 ans et ses deux fils âgés de 6 ans et 3 ans, la fille du directeur de l’école âgée de 8 ans, froidement abattue. Qui, parmi nous n’a pensé alors à ses enfants, à ses petits-enfants, à celles et ceux que nous aimons et à qui tout d’un coup la vie pourrait être ravie par un acte de folie criminelle. Jeudi dernier, c’était à la grande mosquée que nous rendions un dernier hommage à Mohamed Legouad, 24 ans, jeune sapeur parachutiste du 17 ème régiment de parachutiste dont la famille vit à Meyzieu, l’un des trois jeunes soldats assassinés. Et nous avions tous en tête cette question. Comment est-ce possible ? Comment un homme a-t-il pu arriver à commettre de tels actes meurtriers ? Comment une société comme la nôtre peut-elle engendrer un tel monstre froid, aveuglé par ce qu’il disait être aux policiers du RAID, une haine de l’Etat, de l’occident, de notre armée, une haine des juifs ? Dans cette recherche du comment du pourquoi, il n’y a sans doute pas de vérité ou plutôt elles ne sont que partielles. On voit bien comment encore un certain nombre de nos quartiers peuvent être source de violence, combien ils génèrent de parcours à la dérive inquiétante.

Discours rassemblement Gérard Collomb 25 mars 2012

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Page 1: Discours rassemblement Gérard Collomb  25 mars 2012

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Chers amis,

Notre pays vient de connaitre une des pires tragédies de son histoire et nous en

sommes tous profondément marqués.

Il y a d’abord eu le temps de la stupeur et de l’horreur, d’une forme

d’incrédulité.

Comme tous ceux que, tout d’un coup, le destin accable, nous avons mis du

temps à admettre et à réaliser ce qui s’était passé.

Il y a eu ensuite dans tout notre pays un formidable élan où les uns et les autres

voulaient marquer leur sympathie, leur compassion, et nous nous sommes tous

sentis parents, amis, de toutes les victimes qui en quelques jours venaient de

perdre la vie.

A Lyon, mardi dernier, à la grande synagogue du quai Tilsitt, l’émotion et la

colère nous étreignaient devant le drame qui s’était déroulé devant le lycée Ozar

Hatorah de Toulouse. Un professeur de 30 ans et ses deux fils âgés de 6 ans et 3

ans, la fille du directeur de l’école âgée de 8 ans, froidement abattue.

Qui, parmi nous n’a pensé alors à ses enfants, à ses petits-enfants, à celles et

ceux que nous aimons et à qui tout d’un coup la vie pourrait être ravie par un

acte de folie criminelle.

Jeudi dernier, c’était à la grande mosquée que nous rendions un dernier

hommage à Mohamed Legouad, 24 ans, jeune sapeur parachutiste du 17ème

régiment de parachutiste dont la famille vit à Meyzieu, l’un des trois jeunes

soldats assassinés.

Et nous avions tous en tête cette question. Comment est-ce possible ? Comment

un homme a-t-il pu arriver à commettre de tels actes meurtriers ? Comment une

société comme la nôtre peut-elle engendrer un tel monstre froid, aveuglé par ce

qu’il disait être aux policiers du RAID, une haine de l’Etat, de l’occident, de

notre armée, une haine des juifs ?

Dans cette recherche du comment du pourquoi, il n’y a sans doute pas de vérité

ou plutôt elles ne sont que partielles.

On voit bien comment encore un certain nombre de nos quartiers peuvent être

source de violence, combien ils génèrent de parcours à la dérive inquiétante.

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On voit bien quels effets terribles les conflits qui minent notre monde peuvent

faire naitre dans des esprits exaltés.

On voit bien comme le sentiment de l’échec d’une vie au parcours de plus en

plus incohérent, peut amener à la haine de soi comme à la haine des autres.

Oui cette tragédie nous accable et elle nous interpelle en même temps. Elle doit

nous inciter à nous questionner pour savoir dans quelle société nous voulons

vivre.

Il est encore hélas dans notre pays trop de femmes et d’hommes que la

paupérisation et la ghettoïsation coupent des autres et entrainent au repli sur soi

et à l’enfermement.

Il nous faut, nous, construire une société de l’échange.

Il est parfois dans la façon dont nous portons nos idées politiques,

philosophiques, religieuse, des mots qui blessent. On voit qu’ils finissent par

tuer.

Et s’il est important de porter des idées fortes il faut le faire sans recourir au

vocabulaire de la violence et de l’affrontement.

Il se développe enfin dans notre société des courants qui ouvertement ou

insidieusement appellent, au nom d’idéaux dévoyés, à la haine, au rejet de

l’autre, à la guerre même contre l’autre, nous devons les bannir et éviter que les

glissements en glissement ils finissent par contaminer les esprits.

Mes chers amis, on ne rendra pas la vie à Imad, Mohamed, Abel, Gabriel, Arieh,

Myriam, Jonathan.

On ne consolera pas leurs parents, leurs frères, leurs sœurs, leurs amis.

Mais ce que nous pouvons faire c’est qu’ils ne soient pas morts en vain, que leur

sort funeste soit l’occasion d’un nouveau départ.

Nous tous rassemblés devant cet hôtel de ville, cette maison commune, de tous

les lyonnais, nous sommes divers.

Divers par nos origines, divers par nos sensibilités, divers par nos convictions

religieuses, divers par nos opinions politiques.

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Mais nous partageons tous ici un certain nombre de valeurs communes qui nous

font refuser la violence meurtrière, l’obscurantisme et le fanatisme.

Ces valeurs, ce sont celles de la république et de la nation française telles que

l’histoire les a forgées.

Non pas une nation qui se fonderait sur un prétendu droit du sang mais qui

rassemble tous ses enfants dans une même volonté de vivre ensemble, de

construire l’avenir ensemble.

C’est le grand historien Renan qui disait : « la nation est un plébiscite de tous les

jours ».

Il voulait dire, par là, qu’elle était à bâtir chaque jour.

Et bien, à nous de faire en sorte, par nos paroles, par nos actions, que tous les

enfants de la France aient envie demain de plébisciter notre nation et d’être fiers

de la servir ».