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L a consultation nationale autour de la Constitution touche à sa fin, celle-ci aura eu le mérite de permettre à beaucoup de Tunisiens de se pencher sur le contenu de ce projet. Les sujets d'inquiétude sont nombreux et touchent aux libertés, aux droits sociaux et économiques, à l'indépendance de la magistrature... Aujourd'hui en Tunisie la liberté de conscience est loin d’être consacrée, quand on sait par exemple que Jabeur Mejri purge depuis l’été 2012 une peine de 7 ans de prison pour avoir osé penser de façon "différente" son rapport à la religion musulmane. Il est d’ailleurs significatif que la condamnation de Jabeur Mejri se soit appuyée sur l’arsenal répressif mis en place du temps de l’ancienne dictature, en invoquant des articles de loi qui avaient justifié l’emprisonnement de Hamma Hammami, Mohamed Abou, Ahmed Manai et d’autres. Que l’on soit d’accord ou pas avec l’opinion exprimée n’est pas la question ici. L’important est qu’en démocratie, la liberté de conscience (et son corollaire la liberté d’expression) doit être respectée et défendue avec acharnement, même si les opinions exprimées vont à l’encontre de ce que pense la majorité de la population (et tant que ces opinions n’incitent pas à la violence cela va sans dire). L’adoption d’un tel mécanisme sera un critère déterminant qui permettra d’évaluer la réussite de la transition démocratique. Un moyen de se prémunir de ces dérives est de faire explicitement référence à la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme dans la Constitution. Elle aurait trouvé toute sa place dans un Préambule ré-écrit, loin de la version actuellement proposée, volontairement floue et qui est tout sauf un texte juridique. Si vous souhaitez appuyer cette démarche et protester contre le sort de Jabeur Mejri, alors interpellez les députés de l’Assemblée. Un excellent moyen de le faire est d'utiliser le site www.marsad.tn qui vous permet d'entrer en contact avec eux. Le bulletin d'Al-Qotb France N° 2 - Février 2013 Editorial Pour contacter Al-Qotb France, suivre nos activités, s'informer email : [email protected] Facebook : http://www.facebook.com/AlQotbFrance web : www.al-qotb.com Hommage à un combattant C hokri Belaïd fut une figure de la gauche tunisienne, membre de l'Union Générale des Etudiants de Tunisie et chef de la Mouvance des Patriotes Démocrates. Opposant au régime de Bourguiba, il a été détenu dans le sud de la Tunisie à cause de son activisme politique universitaire dans les années quatre-vingt. Il était avocat et défenseur des droits de l’Homme. Il a souvent plaidé dans les procès politiques sous le régime du président déchu Ben Ali, notamment en défendant des islamistes. Depuis les élections en Tunisie qui ont mis au pouvoir la Troïka dominée par Ennahdha, le gouvernement provisoire en place a échoué car il n’a pas répondu aux exigences de la révolution du 14 janvier 2011, celle des libertés et de la dignité. La situation économique et sociale s’aggrave, les libertés individuelles sont menacées, en particulier par une première version de la constitution confuse qui ne dissocie pas la sphère religieuse du politique. Les craintes des démocrates (et Chokri Belaïd en était un et des plus pugnaces) se sont avérées fondées. Depuis quelques mois déjà, la sécurité n’était plus assurée face à des actes de violence dirigés ou encouragés par des extrémistes islamistes et leurs milices. Les meetings étaient fréquemment chahutés, les insultes et invectives dans les médias et réseaux sociaux étaient devenus monnaie courante. Tant et si bien qu’un membre d’un autre parti démocrate a été lynché, des mausolées et des lieux culturels ont été détruits ou brûlés, des violences sur les Travail - Liberté - Justice sociale "Il était avocat et défenseur des droits de l’Homme. Il a souvent plaidé dans les procès politiques sous le régime du président déchu Ben Ali, notamment en défendant des islamistes."

Al Qotb France - bulletin n°2- février 2013

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La consultation nationale autour de la Constitutiontouche à sa fin, celle-ci aura eu le mérite de

permettre à beaucoup de Tunisiens de se pencher surle contenu de ce projet. Les sujets d'inquiétude sontnombreux et touchent aux libertés, aux droits sociauxet économiques, à l'indépendance de la magistrature...Aujourd'hui en Tunisie la liberté de conscience est loind’être consacrée, quand on sait par exemple queJabeur Mejri purge depuis l’été 2012 une peine de 7ans de prison pour avoir osé penser de façon"différente" son rapport à la religion musulmane. Il estd’ailleurs significatif que la condamnation de JabeurMejri se soit appuyée sur l’arsenal répressif mis en placedu temps de l’ancienne dictature, en invoquant desarticles de loi qui avaient justifié l’emprisonnement deHamma Hammami, Mohamed Abou, Ahmed Manai etd’autres. Que l’on soit d’accord ou pas avec l’opinionexprimée n’est pas la question ici. L’important est qu’endémocratie, la liberté de conscience (et son corollaire laliberté d’expression) doit être respectée et défendueavec acharnement, même si les opinions expriméesvont à l’encontre de ce que pense la majorité de lapopulation (et tant que ces opinions n’incitent pas à laviolence cela va sans dire). L’adoption d’un telmécanisme sera un critère déterminant qui permettrad’évaluer la réussite de la transition démocratique.Un moyen de se prémunir de ces dérives est de faireexplicitement référence à la Déclaration Universelle desDroits de l'Homme dans la Constitution. Elle auraittrouvé toute sa place dans un Préambule ré-écrit, loinde la version actuellement proposée, volontairementfloue et qui est tout sauf un texte juridique. Si voussouhaitez appuyer cette démarche et protester contrele sort de Jabeur Mejri, alors interpellez les députés del’Assemblée. Un excellent moyen de le faire est d'utiliserle site www.marsad.tn qui vous permet d'entrer encontact avec eux.

Le bulletin d'Al-Qotb FranceN° 2 - Février 2013

Editorial

Pour contacter Al-Qotb France, suivre nos activités, s'informeremail : [email protected] : http://www.facebook.com/AlQotbFranceweb : www.al-qotb.com

Hommage à un combattant

Chokri Belaïd fut une figure de la gauchetunisienne, membre de l'Union Générale

des Etudiants de Tunisie et chef de la Mouvancedes Patriotes Démocrates. Opposant au régimede Bourguiba, il a été détenu dans le sud de laTunisie à cause de son activisme politiqueuniversitaire dans les années quatre-vingt.Il était avocat et défenseur des droits del’Homme. Il a souvent plaidé dans les procèspolitiques sous le régime du président déchuBen Ali, notamment en défendant desislamistes.Depuis les élections en Tunisie qui ont mis aupouvoir la Troïka dominée par Ennahdha, legouvernement provisoire en place a échoué caril n’a pas répondu aux exigences de larévolution du 14 janvier 2011, celle des libertéset de la dignité. La situation économique etsociale s’aggrave, les libertés individuelles sontmenacées, en particulier par une premièreversion de la constitution confuse qui ne

dissocie pas la sphère religieuse du politique.Les craintes des démocrates (et Chokri Belaïd enétait un et des plus pugnaces) se sont avéréesfondées.

Depuis quelques mois déjà, la sécurité n’étaitplus assurée face à des actes de violence dirigésou encouragés par des extrémistes islamistes etleurs milices. Les meetings étaient fréquemmentchahutés, les insultes et invectives dans lesmédias et réseaux sociaux étaient devenusmonnaie courante. Tant et si bien qu’unmembre d’un autre parti démocrate a étélynché, des mausolées et des lieux culturels ontété détruits ou brûlés, des violences sur les

Travail - Liberté - Justice sociale

"Il était avocat et défenseur des droitsde l’Homme. Il a souvent plaidé dansles procès politiques sous le régimedu président déchu Ben Ali,notamment en défendant desislamistes."

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Actualités Al-Qotb

Le bulletin d'Al-Qotb France N° 2 - Février 2013personnes ont été perpétrées. Des prêches danscertaines mosquées appelant à la violence etaux meurtres ont pu se propager impunément.

Mais le 6 février, un cap a été franchi : destueurs sont passés à l’acte pour éliminer unefigure politique au franc parler juste et fort,proche du peuple, dont le seul tort aux yeux deses assassins et de leurs commanditairesaveuglés par la haine est d’avoir voulu prémunirles Tunisiens contre le terrorisme ambiant.Chokri Belaïd, leader avec Hamma Hammamidu « Front populaire pour la réalisation desobjectifs de la révolution » était dangereux car il

menaçait par sa parole libre et courageusel’installation insidieuse d’une dictature, celle del’obscurantisme.Celui que veut nous imposer les islamistes qui sesont fait passer pour "modérés" auprès d’unepartie de l'opinion publique nationale etinternationale. Depuis leur prise de pouvoir, ilsauront pourtant fait preuve d’un activisme quipuise ses fondements dans une idéologiedogmatique et qui vise à exclure celles et ceuxqui pensent différemment.Mais si l’on parvient à lâchement assassiner unhomme, on ne tue jamais ses idées. Lors desfunérailles nationales de Chokri Belaïd, unefoule immense comme jamais le pays n’a connudans son histoire aura tenu à exprimer sa colèreet son rejet de la haine et de la division quecertains veulent installer dans le pays.Mais ils ne gagneront pas. Le peuple tunisien,fier de son histoire millénaire, fort de sa libertéreconquise, n’abdiquera pas. Plus que jamais,¡no pasarán!

Pour contacter Al-Qotb France, suivre nos activités, s'informeremail : [email protected] : http://www.facebook.com/AlQotbFranceweb : www.al-qotb.com

"Chokri Belaïd, leader avec HammaHammami du « Front populaire pourla réalisation des objectifs de larévolution » était dangereux car ilmenaçait par sa parole libre etcourageuse l’installation insidieused’une dictature, celle del’obscurantisme."

Al-Qotb, de A…à BAl-Qotb, à quoi ça sert ? A compléter l’offre politique,sachant qu’Al Qotb est un parti ancré à gauche etaltermondialiste.La gauche tunisienne n’est-elle pas présente dans lepaysage politique ? Elle l’est notamment dans la sociétécivile mais sur le plan politique, la gauche réformisten’est plus très audible. Nous nous situons entre le Frontpopulaire et la coalition centriste dominée par NidaTounès.Quel projet pour Al-Qotb ? Notre projet est sur le plansociétal laïc. Notre orientation socio-économique metl’accent sur l’économie sociale et solidaire, surl’importance des services publics gratuits (éducation,santé) et sur la redistribution des richesses via un impôtjuste et progressif.On vous taxe d’intellectuels déconnectés des « réalités »,vrai ou faux ? Pour faire de la politique, il vaut mieuxavoir réfléchi à ses propositions. C’est donc un fauxdébat. On ne fera pas voter sur le seul rejet d’un modèlede société. Il faut aussi un projet qui réponde auxattentes citoyennes concrètes. Pour cela, nous pensonsque les politiques doivent entretenir un lien étroit avecla société civile.Toutefois ne risquez-vous pas de diviser le camp «démocrate » ? Non. Nous ne présenterons pas decandidats contre le camp démocrate, auquel nousappartenons. Nous nous opposerons, à chaque fois, auxconservateurs passéistes, car nous sommes attachés à laséparation du politique et du religieux, conditionincontournable pour une Tunisie républicaine.Belles perspectives ; mais comment faire ? Faire de lapolitique autrement n’est pas facile, surtout dans lecontexte actuel. Nous pensons que pour attirer desmilitants, il faut un fonctionnement démocratique ausein des partis. Ce n’est pas encore le cas dans la plupartd’entre eux. Mais c’est pourtant une des conditions pourêtre « attractifs » car il y a un risque d’abstention massiveaux prochaines élections. Une de nos propositionsfortes est de proposer à nos amis démocrates unprocessus de primaires militantes pour désigner lescandidats qui se présenteront aux élections.

Achraf Abid27 ans, journaliste.En charge de lacommunication

Hakim Becheur47 ans, médecin.CoordonateurPorte-parole

Fatma Bouvet deLa Maisonneuve47 ans, médecin.En charge del'argumentaire

Ezzedine ElMestiri60 ans, journaliste.Trésorier

Hichem Khodja46 ans, chercheur.Secrétaire généralEn charge del'organisation

Julia Chihi25 ans, étudiante.En charge de lalogistique

Al-Qotb a, dès l'annonce du projet de remaniement, initialement présenté comme ayant pour objetde proposer une équipe gouvernementale resserée et composée de "technocrates" :•soutenu le principe d'une telle démarche, sans pour autant donner un blanc seing à H. Jebali et nisans négocier le contenu, ni les modalités;•exigé un cahier des charges clair et précis, sur les volets politique (dissolution des LPR, enquêteinternationale sur l'assassinat de Chokri Belaïd, calendrier électoral...), et économique (gel des prixdes produits de première nécessité, arrêt des privatisations...).Al-Qotb a défendu ces propositions au sein de la coordination des partis démocratiques et desassociations.Al Qotb est convaincu que la gauche se doit de proposer une perspective de changementdémocratique en dehors d’une alternance qui nous guette entre libéraux-islamistes et libéraux-modernistes.

POSITION D'AL-QOTB CONCERNANT LA PROPOSITION DE REMAINEMENT MINISTÉRIEL

BUREAU D'AL-QOTB FRANCELe bureau d'Al-Qotb France est à présent constitué; nous vous en présentons ci-dessous les membres. N'hésitez pas à les solliciter !