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La Presse Nouvelle Magazine février 2011
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J’ai pas volé l’orangeLe Collège interarmées de défense formant lesgrands chefs militaires vient de reprendre sonnom d’École de guerre : mesure significative desorientations officielles, à quels desseins ? L’Algérie,le Vietnam, c’était le bon temps ! Décidément, l’Afghanistan ne suffit plus. Un mot terrifiant : la guerre.Mais n’estelle pas, par une politique ultraréactionnaire, menée contre le peuple ?Guerre contre les conquêtes sociales, guerre contre lesservices publics, guerre contre l’Éducation nationale,guerre contre les Roms et les sanspapiers, guerrecontre les libertés démocratiques. Pas un jour ne passesans que l’on n’apprenne des licenciements, des misesen examen, des inculpations, des incarcérations dedélégués syndicaux, des expulsions de réfugiés.Le dialogue social à la sauce élyséenne, c’est la répression dans maintes entreprises privées ou d’État.Un tel acharnement, sans compter les tests ADNauxquels se refusent les militants incriminés, ne tolère aucune expression de mécontentement. LesCRS ont violemment dispersé les manifestants lorsde la visite de Sarkozy à Toulouse. Un importantdispositif policier a été déployé devant un immeubleparisien de haut luxe occupé par des « galériens dulogement ». Sur un ordre de réquisition, le préfet acassé la grève des agents de sécurité de l’aéroport deMarseille.La France, terre d’accueil, est défigurée quand unjournaliste chilien, venu chercher dans un commissariat son fils indûment arrêté, est molesté et mis engarde à vue un jour durant. Mgr Gaillot a bien raisonde s’exclamer : « Police partout. Justice nullepart. » JeanPierre Dubois, président de la Ligue desdroits de l’Homme aussi, qui déclare :
« Si les policiers ne sont plus les représentants dudroit, on va les obliger à mener une guerre…Le gouvernement fait peu à peu de l’État de droit une coquille vide ».C’est dans ce contexte que s’inscrit le projet de Loid’orientation et de programmation pour la performance (sic) de la sécurité intérieure (LOPPSI 2)adopté par le Sénat. Voici l’énumération de ses dispositions liberticides : Expulsion en 48h, sans contrôle du juge, de tous habitants d’habitats hors normes (tank, cabane, caravane, yourte, mobil home, bidonville, bus ou camionaménagé) sur terrain public ou privé et destruction deleurs habitats. Contrôle accru sur les prestations sociales et obligation pour les travailleurs sociaux de procéder à la délation. Couvrefeu pour les mineurs de treize ans. Extension de contrat de responsabilité parentale. Renforcement du contrôle administratif des mineursdélinquants et procédure de comparution immédiatedevant le Tribunal pour enfants. Reconduction des fichiers de police et de gendarmerie actuels. Les personnes innocentées resteront ainsifichées. Les entreprises privées pourront installer des caméras aux abords de leurs établissements et les préfetsle long des manifestations. La police pourra avoir accès en direct aux imagescaptées dans les halls et les parties communes d’immeubles. Les images de vidéosurveillance publique pourrontêtre exploitées par des entreprises privées agréées parle préfet.
Des logiciels de reconnaissance faciale automatiquepourront être utilisés aux fins d’identification des sujets. Filtrage et censure de sites Internet. Renforcement des pouvoirs de la police municipale. Instauration d’un Conseil national des activités privées de sécurité, entérinant la privatisation croissantede cette sécurité. Comble de l’illégalité : création d’une milice supplétive, dite « réserve civile » de 200.000 gendarmeset policiers à la retraite et étudiants rémunérés.Une législation qui nous prépare une société de contrôle fondée sur la tension et la stigmatisation. LeCrif n’a pas tardé à s’y engouffrer. A l’aide d’un slogan stupide : « Le palestinisme est source d’antisémitisme » et avec l’appui de la ministre del’Enseignement supérieur, il a obtenu l’interdiction*d’une conférencedébat prévue dans les locaux del’Ecole Normale Supérieure à laquelle StéphaneHessel devait participer et qui portait sur la politiqueexpansionniste d’Israël.Revenons à l’Enfance : le pouvoir avait déjà préconisé de détecter le symptôme de la délinquance dèsl’âge de trois ans. Deux polissons qui avaient emprunté et restitué des bicyclettes avaient été appréhendés dans les locaux de leur école. Toutrécemment, un petit garçon scolarisé depuis 4 ansavait été maintenu en rétention avec son père, arménien.Il y en a qui s’en mettent impunément plein lespoches par leurs malversations. Dans la chanson deGilbert Bécaud, un gamin apeuré clame soninnocence : « J’ai pas volé, pas volé, pas volél’orange du marchand ».
PNM n° 283 – Février 2011 – 29e année Le N° 5,50 €
Henri Levart
"Espace Mémoire du 14"vous sollicite 6Moyen-OrientDe la Tunisie à l'Égypte... J.Dimet 3PolitiqueMarine Le Pen pdte. du FN JY.Camus 3SociétéPlus le mensonge est gros... D.Vidal 3Cycle "Être juif au XXIe siècle ?"Recette juivepour fabriquer... L.Sablic 4MémoireAndrésy et SainteMaxime 5Voyage du souvenir AFMA 6ItinéraireRony Brauman,un humaniste sans frontières M.Muller 6Le billet d'humeurDémographie, démagogie J.Franck 5CultureCôté expos : F. Nussbaum F.Mathieu 7La chronique Cinéma de L.Laufer 7Proust ... l'affaire Dreyfus GG. Lemaire 8
20/02/2011 : Journée mondiale de la justice sociale21/02/1944 : 23 membres de la M.O.I. – dit groupeManouchian – sont fusillés au MontValérien21/02/2011 : l'Affiche Rouge : projections et conférences au Mémorial de la Shoah de 14h. à 17h.
Février
ISSN : 07572395
25 janvier 2011. Aboutissement de longues annéesde démarches de nombreuses organisations et de laville de Bobigny. Catherine Peyge, son maire, etGuillaume Pepy, président de la SNCF, signentl'acte transférant, moyennant l'euro symbolique,l'ancienne gare de Bobigny à la Ville.Simone Veil, présente, a manifesté, au nom de laFondation pour la mémoire de la Shoah, saconfiance à la municipalité de Bobigny dans sonprojet d'aménager cette gare en lieu de Mémoire etd'Histoire, en partenariat avec les associations dedéportés et de résistants.A (re)voir, l'émouvant film d'Henri Jouf Gare de la douleuret des photos de la cérémonie de transfert de propriété de lagare de Bobigny (www.garedeportation.bobigny.fr/index.php/Accueilgaleriephotos)
* Lire en p.5, Dominique Vidal "Plus le mensonge est gros..."
- Bobigny -Garede la DéportationÀ partir de l'été 1943, Bobigny se substitua à lagare du Bourget comme lieu de départ desconvois de la déportation versAuschwitz.
MENSUEL EDITE PAR L'U.J.R.E.Union des Juifs pour la Résistance et l'Entraide
La PNM aborde de manière critique les problèmes politiques et culturels, nationaux et internationaux. Elle se refuse à toute diabolisation et combat résolument toute les manifestations d'antisémitisme et deracisme, ouvertes ou sournoises. La PNM se prononce pour une paix juste au Moyen–Orient sur la base du droit de l'État d'Israël à la sécurité et sur la reconnaissance du droit à un État du peuple palestinien.
Les 4 fusillésdu Kremlin-BicêtreFrance 3diffuse le
26 février à15h25 et le 28 février à 00h35 cedocumentaire(2009) d'une qualité exceptionelle, réalisé par Caroline Bray, jeune diplôméede philosophie à partir de quelquesphotos, lettres et documents trouvéspar hasard dans une décharge, lesphotos ayant attiré son attention.Au sortir de ce film chacun est plusque convaincu de l'importance de préserver tout document, qui peut parfoissembler ne présenter aucun intérêt.
Joseph Mincest mort le 8 janvier 2011Militant du parti communiste polonais dèsl’âge de seize ans, il arrive en France en1931 et rejoint durant la seconde guerremondiale les rangs de la M.O.I. Il fut, jusqu’en juin 1946, secrétaire général de laCommission centrale de l’enfance (CCE)auprès de l’UJRE. Il participa ensuite à lacréation du MRAP, issu du MNCR, et devintsecrétaire général de l’UGEVRE (Union générale des engagés volontaires et resistantsd’origine étrangère). Pour l’évoquer, nousdonnons la parole à son fils, en publiantdes extraits de l’allocution prononcée le 12janvier au cimetière de Bagneux :« Vous verrez, dans les fairepart qui seront publiés qu’il est écrit Joseph Minc,ancien résistant M.O.I. C’était son souhaitet c’est le résumé du long chemin qui partde BrestLitovsk en 1908 et s’achève aujourd’hui dans ce cimetière parisien. Dansces mots “résistant M.O.I.”, que de continents engloutis ! Le “shtetl” de son enfance ; le judaïsme dont il s’était à la foiséloigné et qui demeurait néanmoins,comme pour notre mère, si proche ; lecommunisme qui l’a aidé à s’émanciper del’omniprésence rabbinique et dont il s’est,plus tard, écarté en amoureux déçu maistoujours attentif ; quant à la Résistance,c’est elle qui a fait de cet immigré, unFrançais à part entière, dont la premièretâche fut de s’occuper des orphelins de laShoah… »Rappelons que fidèle à son idéal, il figureparmi les parrains de l'association Mémoiredes Résistants Juifs de la M.O.I.
Les équipes de l’Ujre et de la Pnm
(*) sauf mention explicite (adhésion, réabonnement ou don), vos règlements sont imputésen priorité en renouvellement d’abonnement,puis en don. Pour rappel, 66% des montantsd’adhésion à l’UJRE et des dons sont déductibles de vos revenus. Nous prions nos abonnés de bien vouloir renouveler spontanémentleur abonnement, pour nous épargner des fraisde relance. Votre PNM vous en remercied’avance.
Par l'édition de la Presse Nouvelle Magazine, l'UJRE maintient l'expression d'une voixjuive, laïque et progressiste dans ses locauxhistoriques du "14". Ceuxci, rénovés parla Ville de Paris, sont désormais gérés par laFédération "Espace Mémoire du 14" quiregroupe ses trois fondateurs : l'Union desJuifs pour la Résistance et l'Entraide(UJRE), la Mémoire des Résistants Juifs dela MOI (MRJMOI) et Les Amis de la CCE(AACCE). Si l'action de chaque associationest spécifique, ensemble, elles œuvrent àréaliser au "14" un Espace Mémoire dédié àl'engagement des résistants immigrés juifsde la M.O.I. (cf. p.5). Conscients des nombreux appels faits à votre générosité, noussouhaitons préciser pourquoi l'UJREmaintient dans ces colonnes sa souscriptionpermanente – et où va l'argent ? S'ajoutantaux cotisations de nos adhérents et auxabonnements de la PNM, il contribue au financement de la Fédération pour sa gestiondes locaux et assure le développement desactivités de l'UJRE (rencontres, débats) etnotammment de son activité éditoriale.Connaissant votre attachement à notre journal "pas comme les autres", nous vousremercions d'avance pour votre soutien.Jacques Lewkowicz, président de l’Ujre
Fin décembre 2010, Sophie Szejer nous adressaitl'avis de recherche de ses cousines, Rachel et Georgette Chimisz (voir Pnm n°282 de janvier 2011).Depuis, grâce à nos amis lecteurs, qu'ils en soient remerciés, nous retrouvons tracede Rachel Belhassen née Chimisz, par le très beau témoignage sur son père, KalmeChimisz, paru sur le site de l'association Convoi 73*.Georgette Chimisz aussi qui, enfant, était au foyer du Raincy Côteaux...Il ne nous manque plus que leurs coordonnées, merci si vous avez des éléments deréponse de les transmettre au journal.
PNM* http://www.convoi73.org/temoignages/026_kalme_chimisz/
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Carnet qués... Communiqués ... Communiqués ... Communiqués ...Ujre- La Presse Nouvelle -Souscription* n° 58
(janvier 2010)
Avis de recherche
AppelPour unenouvelle politique del’Union européenne auProche-Orient
(...)L’impunité, c’est l’assurance que se perpétuera la même politique. (...) Les gouvernements israéliens successifs s’obstinentà nier les droits fondamentaux du peuple palestinien, à saccager le contenu de tous lesaccords de paix proposés depuis ceuxd’Oslo. (...) Sanctionner la politique israélienne apparaît aujourd’hui comme unenécessité si l'on veut faire avancer la caused’une paix juste au ProcheOrient (...).Des sanctions ? Mais lesquelles ? Laquestion nécessite une clarification. (...)La première exigence est la suspension del’accord préférentiel entre l’Union européenne et l’Etat d’Israël. Ne pas le suspendre encourage une politique qui nie en permanence les droits humains les plusélémentaires. L’Union européenne a (...)adopté des textes, relatifs à la traçabilité desproduits israéliens ou supposés tels, qu’ellen’applique que de façon partielle et insuffisante. Les investissements d’entreprises européennes qui facilitent la colonisation ouen profitent doivent cesser.Suspendre l’accord préférentiel jusqu’à cequ’Israël s’engage réellement dans un processus de paix, appliquer les textes qui interdisent aux produits des colonies d’êtreimportés en Europe sous label israélien,deux décisions qui constituent à nos yeuxdes objectifs politiques immédiats, crédibles, justes, efficaces, rassembleurs. Les paroles creuses de soutien aux droits palestiniens, démenties par les encouragements defacto à la politique qui les nie, laissent lechamp libre aux dirigeants actuels d’Israël.(...)
Nous rejetons deux positions antagonistes : D’uncôté celle qui prône le boycott total d’Israël, mesureproclamée radicale ; d’unautre côté, celle des forces qui n’ont jamaisagi pour que l’Union européenne exerceune pression réelle sur la politique israélienne et prennent prétexte de la prétendueradicalité du boycott total, qualifié de campagne de haine, pour exiger d’inacceptablescensures ou poursuites judiciaires. Nousconsidérons qu’il faut être aux côtés desprogressistes israéliens, qui soutiennent leboycott des produits des colonies, commeaux côtés des progressistes palestiniens.Nous soutenons la demande de hauts responsables palestiniens pour une action versl’Union européenne, en vue de sanctions efficaces, et non du boycott total d’Israël.(...) Seule [ la ] clarté permettra de convaincre ; elle seule permettra l’union la pluslarge pour que cesse enfin un conflit meurtrier, absurde en tout point car les conditions du règlement pacifique juste etnégocié sont connues et elles s’imposeront.(...)Nous nous y engageons*, nous vous yengageons.* Notons, parmi les signataires auxquelsvous pouvez vous joindre en adressant unmèl à : [email protected]psud.frRaymondAubrac, résistantMarieGeorge Buffet, députée PCFMaurice Cling, ancien déporté, professeur d'université honoraireMichel Dreyfus, historienJeanPierre Dubois, pdt. LDHStéphane Hessel, Ambassadeur de FranceHenri Leclerc, pdt. d’honneur LDHPascal Lederer, physicien, coanimateur d’UAVJMaurice Rajsfus, pdt. de l’Observatoire des libertésBernard Thibault, secrétaire général de la CGTRoland Wlos, ancien conseiller municipal de Paris
Sauvons la liberté d'expression
Total 715
Magazine Progressiste Juiffondé en 1934Editions :19341993: quotidienne en yiddish, Naïe Presse(clandestine de 1940 à 1944)19651982: hebdomadaire en français, PNHdepuis 1982 : mensuelle en français, PNMéditées par l'U.J.R.E
N° de commission paritaire 0614 G 89897Directeur de la publicationJacques LEWKOWICZRédacteur en chefRoland WlosConseil de rédactionClaudie BassiLederman, Jacques Dimet,Jeannette GaliliLafon, Patrick Kamenka,Nicole MokobodzkiAdministration AbonnementsSecrétaire de rédactionTaubaRaymonde AlmanRédaction – Administration14, rue de Paradis75010 PARIS
Tel : 01 47 70 62 16Fax : 01 45 23 00 96Courriel : [email protected] : http://ujre.monsite.orange.fr(bulletin d'abonnement téléchargeable)
Tarif d'abonnement :France et Union Européenne :6 mois 28 euros1 an 55 eurosEtranger (hors U.E.) 70 eurosIMPRIMERIE DE CHABROLPARISLa
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La direction de l’ École Normale Supérieure de Paris, mettant fin à unetradition de libre expression qui la caractérisait, a annulé, après l'avoir autorisée, la conférencedébat du 18 janvier que devait donner Stéphane Hesselavec Leïla Shahid (ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union Européenne), Jamal Zahalka (dirigeant de Balad, député au Parlement israélien),Michel Warchavski (fondateur du Centre d'information alternative israélien),Benoist Hurel (secrétaire général adjoint du Syndicat de la Magistrature)…Le Crif, prétendant agir au nom des juifs de France alors qu’il n’en représenteque 10% environ, se félicite d'avoir pu, en faisant intervenir différentes personnalités, mettre fin à l'expression d'idées qui lui déplaisent.L’Union des Juifs pour la Résistance et l’Entraide (UJRE) ne saurait tolérer laréduction des droits d’expression des citoyens et ne peut accepter une telle atteinte à la liberté d’expression en France. Quels que soient ses désaccordsconcernant les appels au boycott, l’ UJRE s’élève contre les poursuites judiciaires visant leurs auteurs et contre cette censure, qui s'inscrivent dans lecadre des tentatives répétées pour faire taire tous ceux qui critiquent la politique du gouvernement israélien et militent pour une paix juste, durable et négociée entre les deux États.Pour toutes ces raisons, l’ UJRE a appellé à participer au rassemblement deprotestation du mardi 18 janvier 2011, à 18h 30, place du Panthéon (Paris).
2 P.N.M. 283 Février 2011
conférence. Fier comme Artaban, il le narraluimême dans un éditorial sur le site duConseil 5: « Valérie Pécresse, ministre desUniversités, ainsi que le rectorat de l’Université de Paris que nous avons contactésen urgence ont réagi sans ambiguïté : jeleur rends hommage, ainsi qu’à ClaudeCohenTannoudji, Prix Nobel de Physique,BernardHenri Lévy et Alain Finkielkraut,tous anciens élèves de l'École normale supérieure. Et une pensée particulière à MmeCantoSperber qui mène un combat incessant contre des dérives inquiétantes. » Etd’enfoncer le clou : « C’est bien le Crif quiest à la manœuvre derrière toutes les procédures contre le boycott. »Cette arrogance ne dura guère. Car la plupart des « personnalités » citées démentirentavoir exigé une quelconque censure. Quantà la conférence, elle se déroula devant lePanthéon : comme un hommage de la patrie reconnaissante à ce grand jeunehomme, bien vivant, lui, de 93 ans...Tout est bien qui finit bien, diraton. Saufque Prasquier, Pécresse, CantoSperber, CohenTannoudji, BHL, Finkielkraut et la quasitotalité des commentateurs ont rabâché lamême contrevérité : la conférence aurait eupour but d'appeler au boycott d'Israël.Il était pourtant facile de consulter le site del'Appel pour en vérifier le verbatim : « Certains d’entre nous appellent au boycott detous les produits israéliens ; d’autres“ciblent” les seuls produits des colonies israéliennes ; d’autres encore choisissent desformes d’action différentes. Mais noussommes tous unis pour refuser catégoriquement que les militantes de la campagneinternationale BoycottDésinvestissementSanctions (BDS) soient accusés et jugéspour “provocation publique à la discrimination” alors qu’au contraire ils combattent contre toute forme de discrimination, pour le droit de tous les peuples àl’autodétermination, pour l’application àtous les États du droit international et dessanctions prévues lorsqu’ils le bafouent. »L’invitation à la conférence, elle, ne comportait même pas le mot « boycott ». Et les1 500 participants au meeting du Panthéon(cinq fois plus que la salle de l’ENS n’en aurait accueillis) peuvent en témoigner : sicertains des orateurs ont évoqué ledit boycott, presque tous ont prôné celui des produits des colonies israéliennes de Cisjordanie – conformément aux décisions dela Cour de justice de l’Union européenne.Comment, cela dit, qualifier un pays où uneministre, le président d’un Conseil communautaire, la directrice d’un des hauts lieuxde l’intelligence française, deux philosophes qui prétendent incarner celleci et laplupart des journalistes répètent, toute hontebue, une contrevérité, dans le plus parfaitmépris de leurs concitoyens ? Un tel comportement devrait être sanctionné, au moinssymboliquement. Car, comme le notait lepamphlétaire angloaméricain ThomasPayne, « c’est un affront que de traiter lemensonge avec complaisance ».
Dominique Vidal1. Voir site www.collectifpaixjustepalestine.org2. « Michèle AlliotMarie : “Ma présence parmivous ce soir est l’occasion de réaffirmer la placede la communauté juive au sein de notre Nation”, www.crif.org3. Séance unique du 20/05/2009, Ass. nationale4. En toute connaissance de cause, comme leprouvent les mèls envoyés par le signataire deces lignes à son assistante.5. http://www.crif.org/index.php?page=articles_display/detail&aid=23242&returnto=searchadv/motor&artyd=70
A quoi ressemble l’appareil frontiste désormais ? Avec 32,35% des voix, les partisansde Bruno Gollnisch représentent un tiersdes militants. Au comité central du FN, ilsdisposent de 42 sièges sur 120 et au bureaupolitique, de 10 places sur 42. Dans le nouvel organigramme, un homme fort : le mariniste Steeve Briois, élu local deHéninBeaumont, nommé secrétaire général. Le bureau exécutif est entre les mainsde « marinistes » convaincus comme AlainJamet, Louis Aliot ou MarieChristine Arnautu, qui est en charge des questions sociales. Pour gagner en crédibilité, MarineLe Pen a fait entrer directement au bureaupolitique deux intellectuels : Laurent Ozon,écologiste formé par la Nouvelle Droite etqui a travaillé avec Antoine Waechter, ainsique le géopolitologue David Mascré, ancienchargé de mission au ministère des Affairesétrangères, auteur d’un livre sur l’affaireIlan Halimi, « Des barbares dans la cité »,ce qui lui a permis d’être invité plusieursfois au salon du livre du Bnai Brith.Au sein de la tendance minoritaire, les radicaux continueront à siéger. Yvan Benedetti,Alexandre Gabriac, issus de l’Œuvre française, sont au comité central. Farid Smahi,qui joua un rôle dans l’organisation de la visite de Dieudonné à un meeting frontiste auBourget en 2006, élu brillamment au Comité Central, a par contre exprimé son désir dequitter le parti. Motif : il reproche à MarineLe Pen d’« être financée par les sionistescomme tous les autres mouvements d’extrême droite » et de se taire sur la « véritable colonisation, (celle) des territoiresoccupés palestiniens. ». Aux poubelles del’Histoire…Le FN version Marine est donc un parti rajeuni, doté d’une dirigeante qui a envie dupouvoir et qui a voulu imprimer tout desuite sa marque. La question identitaire,l’évocation du rôle « d’éveilleur » joué parle parti, le thème du localisme et celui del’écologie, évoquent une influence indéniable des idées néodroitières et decadres naguère tentés par Bruno Mégret.Bruno Gollnisch lui, compte regarder d’unpeu loin se mettre en œuvre une stratégiequ’il juge vouée à l’échec. Quoi qu’il ensoit, le congrès du FN, n’en déplaise à Nadine Morano, n’était pas un « non événement ». Surtout pas pour l’UMP…
Jean-Yves Camus
Elle a été élue à Tours le 16 janvier avec67% des voix des militants.Estce un FN nouvelle formule qui estapparu le 15 janvier sous les traits d’uneMarine Le Pen très confortablement choisiepar les militants, face à Bruno Gollnisch ?Le contraste est déjà saisissant, dans laforme, entre Marine et son père, et mêmeentre Marine candidate et Marine installée.Le 15 janvier, pour son dernier discoursprésidentiel, JeanMarie Le Pen était apparuégal à luimême : dénonçant « le mythe dela Résistance », parlant de l’Indochine et del’Algérie comme de « guerres de décolonisation dans lesquelles les soldats français[étaient] venus protéger les populations civiles », rappelant la mémoire de l’historiennégationniste et antisémite François Duprat,cadre fondateur du FN naissant dans les années 70.Le discours de Marine Le Pen, le lendemain, marque une inflexion sensible. Toutle monde a noté sa tonalité sociale, l’accentmis sur la défense des couches populairesface aux « superriches », à « l’injustice généralisée » et au « règne déchaîné de l’argent », la volonté de réhabiliter la notiond’État interventionniste. Tout le monde aremarqué aussi que l’immigration devenaitun thème secondaire, la nouvelle présidentemettant l’accent sur les valeurs républicaines, la laïcité et le refus de la visibilité del’Islam sur le sol français.Estce pour autant que le Front national adéfinitivement tourné le dos à l’extrêmedroite ? Il y a certes l’omniprésence des références à la République. Mais il reste l’attaque mariniste contre la « repentancenévrotique » et plus encore celle contre« les associations prétendument “antiracistes”, qui sont appelées à jouer les procureurs, prérogatives illégitimes qu’ellesutilisent abusivement pour imposer unecensure politique ou exercer un véritableracket sur les justiciables »... On note aussila dénonciation de la « fracture ethnique »opposant une France fondée sur les« principes chrétiens sécularisés » àl’Islam. Marine Le Pen s’attaque au multiculturalisme en général, assurant que le FNveut « tout pour les citoyens, rien pour lescommunautés » et promet que son parti« fera inscrire dans la Constitution : “La Républiquene reconnaît aucunecommunauté”».
Marine Le Pen devientprésidente du Front national
SociétéPolitique
Le ripolinage de Marine Le Pen n’aura duré que le tempsd’une campagne de communication voulant donner àpenser que la présidente et son parti étaient désormaisfréquentables…par certains à l’UMP.Parmi les constantes du FN, le mensonge, la haine de la démocratie, des journalistes et des juifs sont toujours aussi présents et « le ventre est toujours fécond ».Samedi soir [15/01], Michaël Szames journaliste à France 24arrive à Tours pour exercer son métier d’informateur.Vers 22h30 il entre, en tant que journaliste à un dîner de galadu FN afin de recueillir des informations sur le vote qui s’estdéroulé pendant plusieurs jours ; il se fait insulter, agresser,déposséder de sa carte de presse et jeter comme un chien parsept nervis du service d’ordre du FN qui lui tiennent lesmains derrière le dos.Les cervicales, le genou sont touchés, il souffre de multiplescontusions, sans compter le traumatisme subi : quinze joursd’arrêt maladie et accident du travail.
Mardi 18 décembre 2010 à 20 h.l'École nationale supérieure (ENS)de la rue d'Ulm devait accueillirune conférence organisée par les initiateurs de l' « Appel de solidarité avec Stéphane Hessel et toutes les victimes de larépression 1».Avant de déshonorer le Quai d’Orsay enproposant à Ben Ali le renfort du « savoirfaire français » afin de rétablir l’ordre (dictatorial), Michèle AlliotMarie avait séviplace Vendôme. Ministre de l’Injustice, elleinventa de toutes pièces, à l’occasion d’undîner du Crif d’Aquitaine, le 18 février2010, un « boycott des produits casher 2»…dont elle niait encore l’existence neuf moisplus tôt à l’Assemblée nationale 3. Et pourcause : personne n'a jamais prôné une action aussi révoltante – on attend toujours lespreuves annoncées par MAM…Cette manipulation lui a néanmoins permisd’appliquer aux militants de la Paix l'alinéa8 de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881,qui punit la « provocation publique à la discrimination » de peines allant jusqu’à 3 ansde prison ferme, 45 000 euros d'amende –plus, s'agissant de fonctionnaires, la radiation de la Fonction publique. L'incroyabledisproportion entre le « délit » reproché –un tract, une affiche, un autocollant – et lessanctions encourues a scandalisé tous ceuxqui s’inquiètent des atteintes répétées dupouvoir aux libertés publiques.D'où l'extraordinaire succès de l'Appel : plusde 15 000 signatures, parmi lesquelles denombreuses personnalités intellectuelles etpolitiques dont certaines n'avaient jamaisapposé leur nom au bas d’une critique de lapolitique israélienne. Parallèlement, Stéphane Hessel est devenu millionnaire en...brochures au titre explicite : Indignezvous !Voilà qui a fait perdre leurs nerfs aux plusinconditionnels des amis français de Benyamin Netanyahou. On se souvient qu'à lamioctobre dernier, un certain Taguieff, naguère suspecté comme « rougebrun » dansles colonnes du Monde, traita le vieux défenseur de toutes les causes justes de « serpent venimeux dont on comprend qu'on aitenvie de lui écraser la tête », avant de qualifier le résistant, envoyé de Londres enFrance, arrêté et torturé par la Gestapo, puisdéporté à Buchenwald de… « gardechiourme » des SS…Bref, lorsque la directrice de l'ENS, MmeCantoSperber, accorda une salle à Stéphane Hessel et à ses invités 4, RichardPrasquier, le président du Crif, utilisa toutesses « relations » pour faire interdire la
Plus le mensonge est gros...
Le Front national reste le Front national !Le président sortant du FN n’a pas manqué de poursuivredans l’ignoble en affirmant dimanche lors d’un point depresse : « Le personnage en question a cru pouvoir dire quec'est parce qu'il était juif qu'il avait été expulsé... Cela ne sevoyait ni sur sa carte d'identité ni, si j'ose dire, sur son nez ».Quand à Marine Le Pen, elle a osé affirmer lundi sur RMCInfoBFM TV : « Il aurait dû dire sur son front, ça au moinscela aurait évité la polémique ».Et en plus le FHaine porterait plainte pour dénonciation calomnieuse !Michaël Szamez ayant porté plainte pour agression, le SNJ*CGT se portera partie civile à ses côtés, s’il le souhaite, pouratteinte à la liberté de la presse.Il est temps que la profession démasque ce qu’est et reste véritablement le FN : un parti antidémocratique, dont le programme économique et social est à l’opposé de l’intérêt dessalariés et des couches populaires qu’il prétend sans hontedéfendre.* SNJ : Syndicat National des Journalistes
Paris le 17 janvier 2011[ Communiqué ]
P.N.M. 283 Février 2011 3
serter longuement sur les différencesentre Montagnards et Girondins. Bref,entre la maison, les vacances, le lycée,rien ne venait faire de l’ombre à cesentiment d’être au bon endroit, et aubon moment, en France dans les années 60/70.J’ai aujourd’hui 53 ans, quatre enfants, et LA question qui se pose à présent pour moi, comme à d’autresj’imagine, c’est :Que restetil de tout cela ?Q’avonsnous à transmettre ?A vrai dire, il reste peu d’éléments objectifs de la culture juive que je puisseréellement envisager de confier en héritage à Mathilde, Hugo, Josépha etGabrielle.La religion a été totalement absente demon éducation, et, pour être clair, jen’en conçois aucun regret. Le récit dePâques, fait par Mme Slovès au patronage, n’avait guère de chances denous permettre de renouer avec nos racines : il prenait la dimension héroïque des luttes internationales despeuples du monde pour leur libérationet, dans ces années là, du Vietnam àCuba, on ne manquait pas d’exemplesplus récents que les tribulations de cesmalheureux Hébreux, il y a quelquesmilliers d’années. Aussi bien, Sacco etVanzetti rejoignaient les époux Rosenberg dans notre Panthéon progressisteet j’ai plus fréquenté Lénine queMoïse au cours de nos veillées dechant, au Roc. Je me souviens même,lors des fameux spectacles qui constituaient le moment le plus attendu denos colos, d'avoir joué un B52 bombardant le valeureux peuple vietnamien au cours d’une représentation del'Homme aux sandales de caoutchouc,une pièce de Kateb Yacine ! Heureusement, je pense qu’il n’existe pas detraces de cette soirée.Une éducation laïque, donc.Pas de synagogue, pas de shabbat, pasde fêtes juives.Bien entendu, il y avait la déportation,le génocide – on ne disait pas Shoah –,nos familles disparues et la commémoration annuelle, rue de Lancry, du soulèvement héroïque du ghetto deVarsovie, avec au final un récital de laChorale populaire juive dans laquellechantaient mes grandsparents. Maislà encore, ces récits, ces témoignagesétaient surtout l’occasion de mettre enavant les actes de résistance des nombreux juifs communistes face à la barbarie nazie plutôt qu’à souligner unespécificité de notre condition de juifs.Plus persécutés que les autres, certes,mais aussi, plus engagés, plus valeureux, plus admirables. Je n’ai compris
que plus tard, la dimension particulière de cette volonté méthodiqued’anéantissement des juifs. Mais, ceque j’ai sinon perdu, du moins mis dutemps à saisir, est compensé par ceque j’ai gagné : le sentiment que lesort des juifs, aussi singulier soitil,n’est pas d’une nature si différente dessouffrances et des luttes des autres humains de notre planète. Cela, j’ai essayé de le transmettre.Et puis, il y a d’autres valeurs quenous ont transmis nos familles et noséducateurs de la CCE : le droit des enfants de s’exprimer et de prendre partaux décisions qui les concernent ; lastricte égalité entre garçons et filles ;le caractère sacré de la lecture ;l’amour de ce pays, la France, qui atant de choses à dire au monde… Sansdoute, il n’y a pas besoin d’être juifpour partager ces valeurs. Mais, le faitest que nous pensions que tout ça avaitun petit côté juif. En face, d’autres lepensaient et le pensent encore.Enfin, il y a l’humour, les blagues, leswitz** … Hélas ! Pour ma famille etpour mes amis, c’est sans doute la partla plus avérée de ma culture juive !Mais c’est un tel trésor et qui résumesi bien la distance nécessaire qui doitfaire de nous des hommes et non dessoldats.Pour conclure...Je dirai que l’éducation juivecommuniste, reçue principalement à laCCE, a produit quelque chose d’irremplaçable pour notre génération :elle nous a permis de nous passer decette référence permanente à notre singularité. En cela, elle est fidèle à sesprincipes. Audelà de la nostalgie, desmoments chaleureux et amicaux quenous avons vécus, cette éducationnous a permis, parfois à son corps défendant, de nous émanciper et d’entrerde plainpied dans la société française.Grâce au Château du Roc, à nos moniteurs, à nos chansons, à nos représentations théâtrales, à nos copains, noussommes devenus des membres à partentière d’un pays extraordinaire, laFrance. La CCE nous a protégés,vaccinés, contre toute tentation de repli sur les origines, d’exaltation del’appartenance à un groupe, de communautarisme pour employer ce motqui ne veut pas dire grandchose.J’éprouve une grande tendresse pourla CCE, je n’apprécie guère les procèsque l’on fait à ceux qui l’ont animéetoutes ces années, et en général –après en avoir fait partie –, je n’aimeguère les donneurs de leçons. Quellesque soient leurs erreurs, ils nous ontdonné beaucoup de leur temps, la plupart d’entre eux nous ont aimés sincè
rement, parfois avec maladresse,toujours avec enthousiasme et avec unprojet, des valeurs dignes de respect.Mais, c’est le passé. Un passé qui mérite certes d’être rappelé, étudié, maisni d’être exalté ni de remplacer la vie,celle que nous vivons ici et maintenant.Je dois donc reconnaître que tout cela, me concernant, c’est une histoirequi s’épuise, qui s’éloigne, qui vaprendre fin inéluctablement. Et mêmesi la nostalgie est là, cette disparitionn’est pas tragique, elle est aussi lacondition pour que nous vivions notreépoque de l’intérieur, comme acteursengagés et non comme une élitedistinguée par un quelconque méritetiré de ses origines.Au fond, c’est cela que je me sensen mesure de transmettre : la possibilité donnée à mes enfants de pouvoirêtre ce que le nazisme a refusé auxjuifs européens, de jeunes adultescomme les autres avec un avenir àconstruire, dotés d’une histoire familiale, de quelques récits, de valeursqu’ils réinventeront, et … d’un solidehumour juif ! Laurent Sablic* CCE : Commission Centrale del'Enfance. Créée par l'UJRE dès la Libération, elle prend la forme d'une association (loi 1901) en 1947.** Witz : Mot d'esprit, plaisanterie.
Jean-François Zygelentouré de
présente
en hommageà Shalom Zygel,
son arrièregrandpère,hazan
(cantor de synagogue)en Pologne
Représentation exceptionnelleDimanche 6 mars à 19h.
au Palace 8 rue du Fg. Montmartre Paris 9eau profit de la Maison de la culture yiddish
Réservation : 33 (0)1 47 00 14 00
Recette juive pour fabriquerde bons petits Français !
Vers l’âge de 8 ans, quand un demes camarades me demandaitpourquoi, contrairement à laquasitotalité des écoliers de maclasse, je n’allais pas le jeudi au catéchisme, je répondais que j’étais juifcommuniste ! Il me semblait que cetteexplication devait suffire à éclairerleur lanterne. À CharentonlePont,ValdeMarne, ville où j’habitais alors,cette réponse me conférait une certaine notoriété, un parfum d’originalité, mais elle ne m’aidait guère àrenforcer ma cote de popularité. Pourtant, je n’en ai guère souffert. Les colonies de vacances de la CCE*, auchâteau du Roc et à Celles sur Plaine,me fournissaient un contingent suffisant de jeunes de mon âge fréquentables et normaux, c’est à dire tous…juifscommunistes.Après avoir déménagé vers un quartiernormal lui aussi, le XIe arrondissement, tant au patronage, passageCharles Dallery, qu’au Lycée Voltaire,j’ai pu également vérifier qu’il étaitplus courant dans notre pays de se dénommer Eisenberg, Poznanski, Tenenbaum, Rosenblat, Wainberg ouSzwarcblik que Martin, Pion ou Delanois. J’ai aussi découvert, au fil dutemps et de mon engagement politique, qu’au sein de cette catégorie immense des juifscommunistes ilexistait des variantes assez nombreuses : des trotskistes – euxmêmessubdivisés en pas mal de souscatégories , des maoïstes, des réformistes,des staliniens… Heureusement pourmon équilibre psychique, ils étaienttous juifs. Quand même !Ainsi, pendant une longue période,celle de mon enfance et de mon adolescence, je n’ai guère rencontré deproblèmes identitaires, comme on ditde nos jours. Chez mes grandsparentset dans les fêtes de famille, ça parlaityiddish, ça chantait yiddish, ça s’engueulait yiddish, et bien sûr, ça mangeait yiddish.Et la France ? Quoi, la France ?C’était notre pays, à nous les juifscommunistes. Contrairement auxautres, terme dont je n’ai compris quetardivement qu’il désignait les sionistes, ceux dont mon grandpère neparlait qu’avec un mépris appuyé etqui s’intéressaient à un pays lointainappelé Israël et qui de surcroît lisaientUnzer Vort et non le grand journal familial, la Naïe Presse, je me sentaisplus français que les Français. Dureste, contrairement aux rares goységarés dans nos classes du lycéeVoltaire, j’avais lu Hugo et Zola, encouragé par ma grandmère qui les lisait en yiddish ; grâce aux "14 juillet"de la CCE, je pouvais à onze ans dis
C y c l e o p i n i o n s : ê t r e J u i f a u X X I e m e s i è c l e
Laurent Sablic
TalilaMartineBailly
PhilippeBerrod
Mishpokhe, ma famille juive
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Cela fut rappelé aussi lors de la victoiredu Hamas aux élections palestiniennes : le« mouvement de la résistance islamique », nom officiel du mouvement dontl’acronyme arabe est Hamas, avait été porté sur les fonts baptismaux par Israël pour,dans un premier temps, contrer une OLPplus séculière et pluraliste. On sait ce qu’ilen advint. D’autant plus que tout embryond’un Etat palestinien fut systématiquement détruit.En Egypte aussi, le pouvoir, bien que laconfrérie des Frères musulmans fût interdite depuis 1954, s’appuya à plusieurs reprises sur les « Frères » pour démantelerla gauche nationaliste et les communistes.En Tunisie comme en Egypte, régnèrent pendant des décennies la répression, la torture, les exécutions etune dégradation sociale.Les révoltes ouvrières notamment à Gafsa(Tunisie) ou à Mahallah (Egypte) furentréprimées dans le sang, comme les révoltes ouvrières au Maroc. On entenditpeu, c’est le moins que l’on puisse dire,les voix qui portèrent leur solidarité auxmouvements sociaux durement réprimés.Comme on entend peu encore aujourd’hui ceux qui s’élèvent contre les atteintes aux libertés, à la démocratie et audroit des femmes en Arabie saoudite déjàcitée, mais aussi dans les monarchies duGolfe et dans d’autres régions du monde.Aujourd’hui, Alain Juppé, ministre de laDéfense, peut se donner bonneconscience en faisant une (relative) autocritique (« Beaucoup des dirigeants deces pays ont dit que c’était eux ou lechaos islamiste. Il faut prendre aujourd’hui le pari de l’émergence desforces démocratiques »), il n’en reste pasmoins que, pendant des décennies, lespuissances occidentales ont soutenu les régimes autoritaires en écoutant et en s’appuyant sur leurs dirigeants.L’élément déclencheur de la révolutiontunisienne fut l’immolation de Mohammed Bouazizi, jeune diplômé contraintpar la crise économique à vendre desfruits sur un marché et en butte aux tracasseries policières.Le peuple tunisien – notamment à partir de sa jeunesse – a conduit un processus révolutionnaire qui a précipité ledépart de BenAli.On affirme parfois que c’est sur ordre –ou conseil – de Washington, que l’armée,représentée par le chef d’Étatmajor del’armée de terre, a forcé au départ de l’autocrate. La réalité est plus simple, c’est laforce du mouvement social et populaireen Tunisie qui a amené toutes les parties àtrouver une solution. Les Américainsn’ont pas besoin d’un nouveau foyer detension dans cette région du monde, ilssont donc pour une sortie de crise rapide.Les événements de Tunisie et d’Égyptemontrent que les régimes autoritaires nepeuvent plus tenir quand le degré d’exaspération de larges couches de la population est à son comble. Aux revendicationssociales se sont ajoutées les revendications directement politiques : la volonté
de vivre démocratiquement et donc d’enfinir avec des régimes où pouvoir, argentet famille se confondent. De la sociétéellemême sont nées des formes d’autoorganisation, même si les prémices enavaient été jetées durant les luttes menésdepuis des décennies.Pour Rachad Antonius, sociologue égyptien, les “Frères musulmans” « ont acquisun poids du fait de la répression. Cellecia beaucoup plus affecté les forces laïquesque les “Frères musulmans” qui avaientle réseau des mosquées pour s’organiser.Mais cette révolte a montré que les genssont capables de s’organiser en dehorsdes partis religieux. Le poids réel des“Frères musulmans” est bien moindrequ’on ne l’imaginait. Le régime les utilisecomme une sorte d’épouvantail. »Amr Ali, porteparole du Mouvement du6 avril* ne dit pas autre chose : « Les“Frères musulmans” font partie intégrante du régime parce qu’ils servent derepoussoir. Les jeunes en Égypte et leMouvement du 6 avril en particulier ontmontré qu’il existait une troisième voieentre le régime dictatorial de Moubaraket l’islamisme des “Frères musulmans”,c’est le peuple luimême. »On peut dès lors s’interroger sur certainesprises de position qui justifient à l’avanceun coup d’Etat militaire ou qui regrettentle régime Moubarak (ou celui de Ben Ali)par peur de l’avenir**.Rien n’est évidemment écrit d’avance etc’est pourquoi les révolutions tunisienneet égyptienne ont besoin du soutien detous les démocrates.
Jacques Dimet* Le Mouvement du 6 avril a été crée par dejeunes égyptiens en 2008 en soutien auxgrèves ouvrières de Mahallah, réprimées dansle sang.** L’ancien président du Crif, Roger Cukierman,écrit dans la newsletter du Crif datée du 8 février 2011 : « Ce qui se passe en Egypte n’estpas de bon augure ! Nous en sommes venus àsouhaiter le maintien au pouvoir de l’armée,non par amour de la dictature, mais par craintede l’arrivée des Frères musulmans (…) » Et lemême Roger Cukierman d’affirmer sans rirequ’aucune démocratie ne peut s’installer dansun pays arabe.convictions.
Il y a cent ans, à quelques semainesprès, une révolution populaire, principalement paysanne, renversait ungouvernement dictatorial. Le Mexiquevivait alors une des premières révolutionsdu XXe siècle (la révolution russe de 1905ayant connu le sort que l’on sait). John Reedque l’on retrouva en 1917 témoin engagéde la révolution d’Octobre fut aussi un témoin de la révolution mexicaine, dont iltira un livre Insurgent Mexico.L’Histoire ne se répète pas, disait Marx,elle bégaie. Mais à un siècle d’intervalle,force est de se dire que le XXIe sièclepeut bien aussi être le siècle des révolutions démocratiques. Deux événementsconsidérables sont, en effet, en train dese dérouler, de l’autre côté de la Méditerranée.Des régimes, soutenus jusqu’au bout parles démocraties occidentales et par lesEtatsUnis d’Amérique au prétexte qu’ilsauraient été un « rempart » contre les islamistes, sont mis à mal.La Tunisie d’abord où le régime dictatorial de Ben Ali est en train de rendregorge après la fuite du dictateur en…Arabie saoudite, pays que personne nepeut décemment qualifier de démocrateou de non fondamentaliste.Ben Ali prit le pouvoir le 7 novembre1987, en éjectant un Bourguiba vieillissant qui avait transformé la Tunisie indépendante en pouvoir autoritaire etautocratique. Le danger islamiste, dumoins dans le monde sunnite, était alorsrelatif. La prise de conscience de ce danger vint avec les progrès du FIS en Algérie, l’annulation par le pouvoir algériendes élections de 1991 et les années dequasi guerre civile que connut l’Algérie.On sait aussi que, durant des décennies,les Britanniques, puis les Américains,préférèrent s’appuyer et appuyer desmouvements religieux fondamentalistescontre les forces progressistes, et en particulier contre les communistes. Ce fut leurchoix de soutenir, par exemple, les monarchies arabes contre la volonté d’émancipation des peuples dans les annéescinquante et soixante.Ce fut le soutien aux troupes d’Arabiesaoudite qui menèrent la guerre au Yémen dans les années 80, à la fois pourempêcher tout progrès démocratique auNord et pour tenter d’éliminer le Yémendu Sud, alors marxiste et laïque. Ce fut lecas, à une échelle encore plus grande, enIndonésie (le plus grand pays musulmandu monde) où les milices paramilitairesislamistes furent mises à contributiondans le massacre des communistes et desprogressistes après 1965 (de 500 000 àun million de morts, selon les estimations). Et on n’oubliera pas non plus quece furent essentiellement les Américainsqui armèrent et formèrent les premiersdjihadistes en Afghanistan (Ben Ladenfut financé, formé et armé par la CIA),avant de reporter leurs espoirs sur les talibans. Souvent les créatures échappent àleur maître, il n’est qu’à se souvenir duGolem.
D e l a Tu n i s i e àl ’ E g y p t e- le temps des révolutions - AndrésyDimanche 30 janvier.Une aprèsmidi d'hivercomme les autres etpourtant différente.L'espace Julien Greenaccueille les “anciens des foyers”, leuramicale, leurs amis, des andrésiens, la municipalité d'Andrésy... pour la première dela création de Valises d'enfance, spectaclede marionnettes pédagogique, musical,dansé et imagé. L'aventure commencequand la compagnie PIPA SOL*, installée enrésidence par la municipalité d'Andrésy auChalet Denouval, découvre l'histoire dumanoir, utilisé dès 1945 par la CommissionCentrale de l'Enfance auprès de l'UJRE quiy ouvre sa première maison "d'enfants defusillés et déportés". Sollicitée en mars2009 par Agnès Gaulin Hardy, animatricede la compagnie, l'UJRE organise une rencontre avec les anciens du foyer d'Andrésy.Le "travail" est lancé... qui aboutit à cespectacle, "expérience d’une intime errance dont le partage assurera la transmission de parcours de mémoires"**.Spectacle émouvant, à voir en famille (dès8 ans). Nous y reviendrons en mars.
Mercredi 30 mars à 15h30Scolaires à 10h et 15h30 les 29 et 31 marsau Centre d'animation Montgallet4 passage Stinville, Paris 12e
Réservation 01 43 41 47 87* LA CIE PIPA SOL (www.pipasol.fr), créée en1996, réalise des spectacles destinés avant tout àun jeune public mais dont la pertinence peutinterpeller un public plus large.** Lire Quand l'histoire sort des pantins in Lecourrier des Yvelines, 19/01/2011SainteMaximeLa Villa Massiliafut la première colonieouverte, dès la Libération, par l'UJRE. Puis,elle accueillit, de 1945 à 1948, “les enfantsde parents résistants (...) fusillés et déportés. (...) Gérée par l'Union des juifs pour larésistance et l'entraide, elle a accueillitrente à quarante orphelins (...) scolarisésà l'école SiméonFabre, où ils ont eu pourcamarades de classe de nombreux petitsMaximois.”* “Un groupe d'amis**,soucieux d'informer la population d'aujourd'hui” (...) a fait appel à la mémoire detous les Maximois “qui étaient sur lesbancs de l'école SiméonFabre entre octobre 1945 et mars 1948, [en vue] de partager leurs souvenirs de jeunesse.”* Ainsivit le jour le Comité Massilia, soutenu parla municipalité de SainteMaxime qui a accueilli en 2010 une exposition de la Fondation pour la Mémoire de la Déportation.Grâce à leurs efforts, les "anciens" vontpouvoir témoigner dans les écoles et collèges de Saintemaxime et une plaque êtreapposée au portail de l'école. Nous seronsnombreux à cette cérémonie qui se tiendraà SainteMaxime (Var), le :
Vendredi 18 mars 2011* Nicematin, 14 avril 2010** Alain Prato, professeur d'histoiregéographie à laretraite, Daniel Libéron, ancien boulanger etprésident de la section locale de l'AMAC, YvetteBain et Germaine Dupin dont le père M. Bruno,était le gardien de la villa Massilia
© Luc Boutria
Mishpokhe, ma famille juive
Mémoire de la C.C.E.
Belle soirée, riche débat vendredi28 janvier à l'auditorium de l'Hôtelde Ville !Les Amis de la CCE y célébraientleurs 20 ans d'existence.Plaisir de revoir Nous continuons,film produit par l'UJRE en 1946,les enfants, notamment d'Andrésy,de SainteMaxime... (voir cicontre)Nous y reviendrons dans la PNMde mars.
Moyen-OrientP.N.M. 283 Février 2011 5
L’Association Fonds Mémoire d’Auschwitz (AFMA)organise un voyage du Souvenir et de la Mémoire.Du 3 au 6 avril 2011, l’AFMA codirigera les visiteshistoriques des camps d’AuschwitzBirkenau, Treblinka et des sites de Cracovie et Varsovie (Pologne), en présence de témoins rescapés.Durant quatre jours, les participants se rendront à AuschwitzBirkenau, Plaszow et Treblinka. Une visitede Cracovie (l’ancien quartier de Kazimiertz, la synagogue Remuth, le cimetière, le ghetto, Podgorze, le
musée de la pharmacie sous l’aigle, l’ancienne usineSchindler) et de Varsovie (vieille ville et ghetto) estaussi prévue.Comme chaque année, l’AFMA prend en charge l’organisation matérielle du déplacement avec ses partenaires : réservation de places d’avion allerretour, delogements (en hôtel deux étoiles) pour les trois nuitsainsi que les déplacements sur place.AFMA 17 rue Geoffroy l’Asnier 75004 Paris01 48 32 07 42 [email protected] www.afma.fr
AFMA : Fondée en 1987 au nom des rescapés des camps d’extermination nazis et de leurs familles pour pérenniser la mémoiredes millions d’hommes, femmes et enfants, victimes innocentesdes crimes les plus monstrueux et odieux de l’histoire de l’humanité, perpétrés par Hitler et ses sbires au cours de la deuxièmeguerre mondiale – Soutenue par les Fédérations nationales de déportés – FNDIRP et FNDIR, par des associations et amicales dedéportés rescapés du camp d’Auschwitz et de ses annexes (Kommandos), de combattants et de résistants. Elle compte aujourd’huiplus de 2 000 adhérents individuels, représentants de trois générations... – Voyage du souvenir pour les adultes, accompagnementpédagogique de milliers d’enfants dans leur visite des camps, exposition permanente ‘Les yeux de la Mémoire’dans ce que fut leCamp de Drancy, partenariat avec les communes de Bobigny etDrancy et d’autres associations pour rendre à l’histoire et à la mémoire, l’ancienne gare de Bobigny, gare de la Déportation... autant d'éléments emblématiques de l'action de l'AFMA.
Démographie - DémagogieDans Judaïsme et Liberté, Monsieur ClaudeGérard Marcus, ancien brasdroit de Monsieur Chirac et fidèle du chanoine président Nicolas, serisque à rompre des lances pour la loi sur les retraites.Il invoque l'allongement considérable de la durée de vie ; même si l'autre voletde son exposé démographique met en évidence un accroissement de la natalité.Donc de la population active qui cotisera pour les retraites des futurs vieillards(sauf chômage massif)." Vous voulez vivre plus longtemps ? Eh bien bossez plus longtemps et ne privezpas le patronat de quelques années d'exploitation supplémentaire. N'alourdissezsurtout pas ses charges."En gros, c'est ça la vraie raison. Elle ne figure pas dans l'article.A la lecture de ce texte, une chose saute aux yeux : Monsieur Marcus manipuleles données de la démographie pour vendre la politique antisociale du présidentchanoine. Il est intelligent.Nous pas. Il en administre la preuve en invoquant l'ignorance crasse de beaucoup de nos concitoyens, y compris des hommes politiques.Au moins sept millions de travailleurs, de syndicalistes, d'étudiants, de lycéens,d'élus, de femmes et d'hommes de tous âges et de toutes régions ont manifestél'automne dernier pour le maintien d'un droit acquis, la retraite à 60 ans.Pour Monsieur Marcus et Judaïsme et Liberté, ce sont sept millions d'imbéciles.Je m'honore d'en être. Jacques Franck20 janvier 2010
OUI je veux participer à la création de l’Espace Mémoire dédiéaux résistants juifs de la M.O.I.Nom PrénomAdresseCP Ville PaysMail TélJe fais un don deà inscrire sur le mur de l'Espace Mémoire : OUI NONChèque à l’ordre de M.R.J.M.O.I. à envoyer au 14 rue de Paradis 75010 Paris
"En souvenir du premier jour où nous avons ouvert la porte du 14, pourqu'elle ne se referme jamais"... Daniel DarèsIL NOUS RESTE À ÉDIFIERL'ESPACE MÉMOIRE DU "14"
Fondée par l’UJRE, l’AACCE, RPJ et l’UJJ, MRJMOIs’est donné pour objectif de créer au 14 rue de Paradis unEspace Mémoire destiné à faire connaître et à transmettrel’engagement des résistants juifs immigrés de la M.O.I.,partie intégrante de la Résistance française.Vous avez été des centaines à parrainer cette initiative auprès des pouvoirs publics en signant notre appel. Grâce à vous, grâce au soutien et à l’engagement de la Ville de Paris et de son Maire, notre projet prendcorps. Mais nous devons fournir 40 000 € pour financer les travaux d’aménagement de l’Espace muséal que nous voulons créer dans ce lieu historique.MRJMOI sollicite les pouvoirs publics et a lancé une souscription auprèsdes particuliers. Vous avez déjà répondu avec votre générosité habituelle.Mais il nous manque encore 22 000 € et nous n'avons plus que quatre moispour les réunir. Le temps presse. Chaque don est important. Les noms desdonateurs qui le souhaitent seront inscrits sur un mur de l'Espace Mémoire.La PNM soutient cette souscription.Merci de votre soutien. Un reçu fiscal vous sera adressé.
Le billet d'humeur
Zaïre. On a ainsi, dit Brauman, « inventé unenouvelle version du crime parfait, celuilàmême où il n'y avait que des victimes ». Et,soulignetil, du « tous innocents » au « touscoupables », il « n'y a qu'un pas ».«Devoir d'ingérence », « communauté internationale », deux expressions qui fleurissentces tempsci autour du drame de la Côted'Ivoire avec tous leurs relents empoisonnésd'interventions armées, de « sanctions »,d'arrogance des vieilles puissances impériales et coloniales dont les peuples seuls sontles victimes. Et dans le même temps, c'est aunom d'une prétendue noningérence en Tunisie que la ministre française des Affairesétrangères et européennes, Mme AlliotMarie, en est arrivée à proposer les services denotre pays au totalitarisme d'un Ben Ali pourréprimer plus efficacement..., sans doute aunom « de la civilisation » dont le puissant sedit porteur face au faible.Né en Israël en 1950 – son père était uncombattant de la Haganah – Rony Braumanest, tout naturellement, conduit à s'interrogersur le devenir de ce pays. « Historiquement,le sionisme a été à la fois un mouvement delibération nationale et un mouvement deconquête coloniale », constatetil. « Réparerune horreur par une injustice, qui plus est,envers un peuple qui n'avait aucune responsabilité dans l'horreur, ne pouvait êtreune issue viable », ditil encore à propos dela création de l'État d'Israël, « une erreur politique majeure de l'aprèsguerre ». Mais,soulignetil avec une même force, « Israëlexiste et la question qui se pose désormaisest de savoir comment composer avec cetteréalité pour que soient reconnus et respectésles droits politiques des Palestiniens ».Dans son permanent souci de ne pas se laisser piéger dans le nonpenser au nom de l'urgence, Rony Brauman dénonce la tentativede culpabilisation de toute critique de la politique israélienne ou de recherche d'une solution juste et durable « au nom de la mémoire» sacralisée de la Shoah. « Aucune mémoirene ménage de place pour les victimes desvictimes. Pas plus la mémoire juive que lamémoire japonaise, africaine ou palestinienne ».Et, pourraiton conclure avec Rony Brauman, il affirme que « si l'on veut s'appuyersur le passé pour tenter de conjurer les dangers du présent, seule l'Histoire, avec sescomplexités, peut nous aider ».« Finalement, si on vous demande : qu'estcequ'être juif pour vous? Estce une questionqui peut avoir du sens ? ».A cette question existentielle de Catherine Portevin, l'humaniste sans frontièresrépond : « C'est un fait. Quel est le sensd'un fait quand on n'est pas croyant ? ».Michel Muller* Rony Brauman, Penser dans l'urgence Parcours critique d'un humanitaire, Éd. du Seuil,Paris, 2006, 267 p., 21 €** NDLR DERG : Nom du groupe de soldatsdissidents qui renversa Haïlé Sélassié en 1974
Itinéraire
«Dans son livre sur Eichmann, Hannah Arendt montre un homme à laconscience assoupie, un criminelqui n'était pas tant animé par la soif du malque par la volonté de bien faire son travail,c'estàdire, en l'occurrence, organiser la déportation des juifs d'Europe ainsi que desPolonais, des Slovènes et des Tsiganes versles camps. (…) Avant d'être un acteur de l'extermination, c'était un travailleur, un “experten émigration”, devenu chef logisticien de la“solution finale du problème juif.” (…) C'estde cette façon que des actes monstrueuxpeuvent être commis par des hommes qui nesont pas des monstres et dont la caractéristique n'est pas la stupidité, mais l'absencede pensée. (…) Je ne pouvais, à l'époque [oùj'ai lu Hannah Arendt] concevoir démocratieet totalitarisme qu'en confrontation audessus d'un gouffre qui les séparait (…). Nonque démocratie et totalitarisme soient lamême chose, mais, avec le personnaged'Eichmann, apparaissent des liens qui fontqu'un sujet ordinaire, d'une société ordinaire,peut fonctionner dans le cadre d'un crimeextraordinaire avec la quasitotalité de sonoutillage intellectuel (…). »L'auteur de ces réflexions est Rony Brauman répondant aux questions de CatherinePortevin dans un ouvrage intitulé Penserdans l'urgence*. D'une certaine manière,c'est bien cette inquiétude permanente de fuirle piège de « l'absence de pensée » qui est aucœur de la vie de l'ancien président (1982 à1994) de Médecins sans frontières (MSF),acteur depuis la fin des années 1970 de l'humanitaire dont « une caractéristique fondamentale » est « l’ambiguïté » et « uneincitation renouvelée à la penser ».« Né » à la politique dans le grand chamboulement de mai 196768 et le combat contre laguerre américaine du Vietnam, fasciné untemps par le maoïsme dans son acceptionplaçant sur un même plateau le militant duPCF, de la CGT, « ces sociauxtraîtres » etles nervis de l'extrême droite, Rony Braumanse sentait, dans un même mouvement, engagé dans un combat vital et dans l'effroi devant« la rapidité avec laquelle une idée devientun cliché dès lors qu'elle est répétée ».« La rhétorique humanitaire, toujours tentéed'exprimer, comme le gauchisme, l'idée d'unBien universel, sombre vite dans le vide deslieux communs », si ce n'est le pire comme cefut le cas – explique Rony Brauman – enÉthiopie en 198485 où les ONG ont étéinstrumentalisées par la dictature « révolutionnaire » du DERG** lors d'un programmede déplacement massif et mortel (plus de500.000 victimes) de populations, sous couvert d'actions d'urgence contre la famine etde création de « l'homme nouveau ». Le pire,aussi, a été commis lors du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 – avec la France « auxcôtés d'un pouvoir raciste et sanglant » etce qui en a suivi, qualifié de « crise humanitaire » par le Conseil de sécurité des NationsUnies, couvrant ainsi d'un même manteau legénocide et les massacres qui ont suivi au
Le doute créateur d'unhumaniste sans frontièresRonyBrauman
Voyage du Souvenir et de la Mémoire¥¥¥¥¥¥¥¥¥en Pologne, du 3 au 6 avril 2011
URGENT
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Au delàde ClintEastwoodEastwood aborde le domaine de lamort en trois récits fantastiquesqui se mêlent. Si le sujet touche, lefilm convainc moins que les derniersopus du cinéaste, même s’il est à voir.Le risque est de trouver Au delà plussimpliste que simple : Eastwood adéjà réalisé des films plus complexeset plus beaux.
Poursuivant son programme d’expositions consacrées à des artistespersécutés et assassinés pendant lejudéocide, Friedl DickerBrandeis, BrunoSchulz, Charlotte Salomon, ou rescapéset marqués à jamais, Isaak Celnikier,Serge Lask, le Musée d’art et d’histoiredu judaïsme de Paris* a présenté du 23septembre 2010 au 23 janvier 2011 unensemble unique de cinquanteneufœuvres d’un peintre allemand découverttardivement en Allemagne et encore inconnu en France, Felix Nussbaum (19041944), habituellement visibles pour unegrande partie d’entre elles dans un muséeconstruit par l’architecte américain d’origine polonaise, Daniel Libeskind (qui aaussi conçu le Musée juif de Berlin), àOsnabrück, la ville natale du peintre.La « Felix Nussbaum Haus » qui, durantcette exposition parisienne, s’agrandissait, a montré continuellement plus decent soixante œuvres de Nussbaum, accomplissant ainsi sa volonté : « Si jemeurs, ne laissez pas mes peintures mesuivre, mais montrezles aux hommes. »Peintre sensible aux leçons de la « Nouvelle Objectivité », de la peinture métaphysique italienne et du surréalisme,Felix Nussbaum n’a jamais caché l’influence de Van Gogh, Rousseau, Ensor,Chirico, Beckmann, Dix, Ludwig Meidner, son professeur et de Felka Platek, sonépouse. Puis, jeté sur les routes de l’émigration par la venue de Hitler au pouvoir,il a su faire siennes leurs manières, les dépasser pour traduire son angoisse, son effroi, son désespoir de Juif livré à la foliegénocidaire des nazis.Dans les salles de l’hôtel SaintAignan,on pouvait, pour découvrir le chemin dela tragédie vécue par Nussbaum et traduite en peinture, faire quatre stations.La Place folle, 1931. La Pariserplatz. Aucentre la porte de Brandebourg. Au fond,à droite, la colonne tronquée de la Victoire, devant laquelle passe un peloton decroquemorts. À droite, jouxtant la célèbre porte, l’immeuble en ruine où habite Max Liebermann, le président del’Académie prussienne des arts. À gauche, ladite académie vers laquelle se dirige un long défilé ordonné de vieux académiciens en frac. Des angelots le survolent, l’un brandissant le drapeau prussien, un deuxième soufflant dans la trompette de la renommée, deux autres répandant des fleurs sur les têtes et aux piedsdes vieillards. Occupant le centre de laplace, vingtdeux jeunes peintres enblouse blanche déchargent d’un camiondes tableaux ou en montrent d’autres. Felix Nussbaum est l’un d’entre eux. Sespeintures sont reconnaissables. Sur la terrasse de son immeuble, Max Liebermann, le dos tourné à la place, peint l’unde ses nombreux autoportraits que surmonte, horizontal, l’ange doré de la colonne de la Victoire. Les peintres quel’Académie a refusés préparent l’exposition de la Sécession berlinoise.
Autoportrait dans le camp, 1940. L’artiste à SaintCyprien près de Perpignan. Ila été arrêté par les autorités belges et, déclaré « étranger ennemi », déporté dansce camp, comme cinq à huit mille autresJuifs allemands qui avaient fui le Reich.En buste de trois quarts à droite. La vestebrune déchirée, rapiécée, une calottenoire effrangée sur la tête. Le regard dur,impénétrable. La bouche ferme. Le cielest sombre. Une rangée de hauts barbelésenchevêtrés sépare l’espace du campd’un désert bosselé rougebrun, le dehorssans espoir. De chaque côté du tableau,un baraquement. Devant l’un, le visagecaché dans ses mains, un homme assis àune table de planches récupérées. Devantl’autre, deux hommes. L’un, deminu, assis au bord d’un tonneau d’aisances dégoulinant d’excréments ; l’autre, décharné, un bouchon de paille à la mainpour s’essuyer. Devant eux, le peintrenous jette son regard froid. Il accuse !Autoportrait au passeport juif, vers1943. Même manière. Felix Nussbaums’est évadé, est revenu à Bruxelles. Dénoncés par un homme avec qui il s’étaitlié d’amitié, agent sournois de la Gestapo,le peintre et sa femme, Felka Platek, secachent. Devant de hauts murs infranchissables, l’artiste en buste de troisquarts à droite, encore. Coiffé d’un feutre.Mal rasé, émacié, il relève de la maindroite le col de son manteau pourqu’apparaisse mieux son étoile jaune. Dela gauche, il tient sa carte d’identité, avec,mis en abyme, son portrait photographique : mêmes traits, même feutre. Inscrits au tampon rouge au centre du document : JUIFJOOD. Derrière le mur, unarbre élagué ras, dressé comme une potence à six bras. Pourtant, les quelquesbranches d’un arbre en fleurs.Triomphe de la mort (Les squelettesjouent une danse), daté du 18 avril 1944.Le 20 juin, dénoncés, Felix et Felka sontarrêtés par la Wehrmacht. Le 31 juillet, ilsmontent dans le dernier train en partancede Belgique pour Auschwitz, où ils arrivent le 2 août. Scène d’apocalypse. Sarabande macabre immobile pour unpressentiment. Le Triomphe de la mort deBruegel, Les Désastres de la guerre deGoya, La Guerre d’Otto Dix, Guernicade Picasso. Devant, la terre jonchée desvestiges détruits des arts, des techniques,des sciences, des métiers. Audessus, labande centrale des squelettes ricanant quisonnent de leurs instruments de musiquesur un fond de ruines la cacophonie duJugement dernier. Dans le ciel aussi brunque le reste du tableau, des cerfsvolantsgrimaçants, menaçants, et une escadre dehuit minuscules navires aériens.ÀAuschwitz, le couple est assassiné.Nussbaum a légué à l’humanité quelquesunes des œuvres les plus émouvantes,uniques, interprétations des persécutionsdes Juifs par Hitler et les siens. Ses peintures ne l’ont pas suivi, elles sont montrées aux hommes. François Mathieu
Felix Nussbaumpeintre assassiné à Auschwitz
la chronique deLaura Laufer Memoryof the Campsde Sidney Bernstein
GrandeBretagne, 1945couvrir un documentaire, rarement montré, qui bénéficia de ses conseils : Memory of camps qui fut tourné pour l’essentiel au camp de BergenBelsen, sous ladirection de Sidney Bernstein et dont nombre d’images, aujourd’hui emblématiques de la barbarie nazie dans les camps, ont été reprises par d’autres cinéastes,à commencer par Alain Resnais dans Nuit et Brouillard.Bernstein, qui fut membre du parti communiste anglais, avait travaillé jusqu’en 1944 comme conseiller auprès du ministère britannique del’Information. A partir de 1944, il travaille, à l’Etatmajor suprême desforces expéditionnaires alliées (SHAEF), enqualité de chef de la Section cinématographique. Hitchcock, ami proche, le rejoint pourparler du projet qu’ils ont ensemble de créerune société de production indépendante laTransatlantic Pictures. C’est alors qu’Hitchcock réalise deux films en français, conçus ensoutien à la Résistance française : Bon voyageet Aventure malgache. En 1945, décidant deproduire, à partir d'images tournées pas desphotographes alliés, un film destiné à être projeté dans toute l’Allemagne pour montrer et garder trace des atrocités nazies, Bernstein demande à Hitchcock de l'aider dans cette réalisation. Celuici préconise defilmer en plans longs, sans coupe et de s’interdire, autant que possible, le montage,car le montage est mensonge.Cette question du « montage interdit » invite à s'interroger sur l’écriture cinématographique de l’Histoire. D'où le questionnement d'Hitchcock : comment faire pourque le spectateur puisse être convaincu de la vérité de l’image ? Comment identifier le lieu et le moment de la prise de vue ? Comment reconnaître acteurs et actions ? Toute écriture historique se doit d’identifier le document source et d'endéterminer l'authenticité. Hitchcock recommande, entre autres, d’inscrire dans unmême plan panoramique charnier de victimes, bourreaux et témoins (Allemandsdu voisinage ou soldats libérateurs) afin de prouver le nontrucage des images decadavres.Il semble que la version de Memory of the camps montrée à la Cinémathèque soitun remontage du film, datant de 1985, où l'on a cru bon de couper l’ouverture etd'ajouter un commentaire ininterrompu qui aboutit à ce que les images soient assourdies sous la voix de Trevor Howard. Si mes souvenirs sont exacts, à l’ouverture du film d’origine, on entendait et voyait Hitler vociférer, acclamé par la foulequi venait de l’élire, puis, silence. La caméra entrait dans le camp de BergenBelsen et, sans bande sonore, témoignait par les seules images, le silence faisant chocaprès les hurlements d’Hitler. On y voyait aussi d’autres camps, la campagne tranquille, aux alentours notamment d’un camp du Tyrol où les nazis déportaient leshandicapés mentaux pour s’y livrer à de monstrueuses expériences.C’est bien souvent de ce film que sont issues les images des collections morbidesdécouvertes dans les camps : montagnes de cheveux, de lunettes, de vêtements,objets fabriqués à partir des corps des déportés (bougies, abatjour de lampes ...).Le film inachevé ne fut jamais montré. La réconciliation avec l’Allemagne étantà l’ordre du jour, il fut interdit de diffusion durant la guerre froide. Dans les années80, on le vit dans quelques projections, accompagné d’un documentaire surl’histoire de sa réalisation, La mémoire meurtrie.Aujourd’hui, les extraits du document d’origine ont été maintes fois recyclés, revus et noyés dans le flux des propagandes visuelles qui se déversent sur tous lesécrans du monde. Comment les sortir de leur banalisation ? Et à l’heure où les survivants de cette histoire disparaissent, la question des formes de transmission deson récit se posent. Il reste que s’interrogeant sur la représentation de la vérité,Hitchcock a répondu par l’écriture cinématographique, une écriture où l’éthique etla pensée de l’image participaient de la construction de l’Histoire.
la chronique deLaura Laufer
CultureCôtéExpos
Le Musée d’art et d’histoire du judaïsme de Paris a fait découvrir à plus de40 000 visiteurs Felix Nussbaum, peintre juif allemand assassiné à AuschwitzLa Cinémathèque française organise enjanvier et en février une intégrale de l’œuvred’Alfred Hitchcock. C’est l'occasion de dé
(Art)(Spiegelman)
s'est vu décernerle Grand Prixdu 38e Festival internationalde la bande dessinéed'Angoulême.Rappelons qu'il est l'auteur de Maus (1987), évoquant sous forme debande dessinée, le génocide nazi, seule BD ayantreçu le prix Pulitzer en1992.*Avoir : une visite guidée de l'exposition et les tableaux décrits dans cet article sur le site de l'UJRE : http://ujre.pagespersoorange.fr/pages/nussbaum.htm
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À la Recherche du temps perduest une œuvre qui peut se lirede bien des façons. Elle peutêtre lue comme un pur traité d’esthétique où l’on retrouve des métaphores sans nombre ayant trait à lapeinture ancienne ou à l’époque del’auteur. Elle peut bien sûr être vuecomme la mise en scène d’un mondetriomphant mais qui est en train desombrer et dont la Grande Guerreaura raison – une sorte d’antiZolapuisque Marcel Proust ne cherchepas à dresser un tableau exhaustifdes strates sociales, de ses mœurs, deses aspirations et des mécanismes dela société française. Comme danstous ses livres qui sont des monuments, aucune interprétation ne parvient à l’expliquer et surtout àl’épuiser.Il y a un personnage dans ce romanfleuve qui n’est comparable à aucunautre. Il ne donne lieu à aucune exploration poussée de sa personnalité,ni à une description de sa circulationdans les cercles mondains. Il n’existeque pour dire ou faire certaineschoses bien précises. C’est un amide lycée du narrateur et il apparaîtassez tôt et de manière brusque dansDu côté de chez Swann. Il s’appelleBloch. Proust introduit ce dernierdans son cercle familial. Mais songrandpère exprime une sorte de réserve : « C’était toujours un juif, cequi ne lui eût pas déplu en principe –même son ami Swann était d’originejuive – s’il n’avait trouvé que cen’était pas d’habitude parmi lesmeilleurs que je le choisissais. » SiSwann a, aux yeux du narrateur, unedimension héroïque, Bloch a unefonction révélatrice dans le récit. Ilest vite détesté par le reste desproches du narrateur, surtout par samère qui juge son influence pernicieuse. « Mais j’aimais Bloch »,avouetil. Une profonde complicitéunit ces deux jeunes gens. MaisBloch disparaît longuement une foiscette situation exposée.Il réapparaît bien plus tard dansl’histoire, dans la première partied’À l’ombre des jeunes filles enfleurs (« Un amour de Swann ») :c’est Bloch qui lui permet d’avoiraccès chez les Swann pour rencontrer Odette et c’est encore lui qui luifait découvrir de nouveaux horizons : « Ce fut vers cette époque queBloch bouleversa ma conception dumonde, ouvrit pour moi des possibilités de bonheur… » En réalité, il leconduit dans une maison de passe. Ilapprend que « le bonheur, la possession de la beauté, ne sont pas chosesinaccessibles…» Et ces joies se pré
sentent sous l’apparence de Rachel,qui se concluent par bien des souffrances et de mornes souvenirs.Mais Bloch n’est pas seulement soncicerone, en poésie et en amour charnel. C’est aussi son double en Juifidentifiable comme tel. Quand ildîne dans sa famille, il examine sonpère, qu’il regarde comme unhomme se donnant une « importanceillusoire ». Il les scrute avec attention, sans complaisance. Il comprendqu’ils ne sont pas reçus dans les milieux de la haute société. Il se rendcompte aussi qu’entre eux ils utilisent « un dialecte miallemand, mijuif…». La description de la soiréemontre un microcosme un peu ridicule et plein de suffisance, sans parler de traits de caractères particulièrement risibles (« Enfin, dans cemilieu où les grandeurs factices del’aristocratie n’existent pas, on lesremplace par des distinctions plusfolles encore. »).Cette vision très caustique fait échoà l’incident survenu chez Mme deMarsantes quand Odette Swann arrive en même temps que Lady Israels (elle « était sur des épines. »).Somme toute, si Bloch est omniprésent, c’est parce qu’il révèle lemonde juif à luimême, pouvant enrire sans pitié. A Balbec (Cabourg),le narrateur entend une voix goguenarde: « On ne peut pas faire deuxpas sans en rencontrer […] Je nesuis pas par principe irréductiblement hostile à la nationalité juive,mais ici il y a pléthore. On n‘entendque “Dis donc, Abraham, « chai fuChakop »”. On se croirait rued’Aboukir. »Cette voix, c’est celle de son camarade Bloch. Force lui est de reconnaître qu’il est accompagné de touteune colonie « plus pittoresquequ’agréable. […] Toujours ensemble, sans mélange d’aucun autreélément, quand les cousines et lesoncles de Bloch, ou leur coreligionnaires mâles ou femelles se rendaient au Casino, les uns pour le« bal », les autres bifurquant vers lebaccara, ils formaient un cortègehomogène en soi et entièrement dissemblable des gens qui les regardaient passer […] Quant auxhommes, malgré l’éclat des smokings et de souliers vernis, l’exagération de leur type faisait penser àces recherches dites « intelligentes »des peintres qui, ayant à illustrer lesÉvangiles ou les Mille et une Nuits,pensent au pays où la scène se passeet donnent à Saint Pierre ou à AliBaba précisément la figure qu’avaitle plus gros « ponte » de Balbec. »
Marcel Proust, luimême entre deuxmondes, celuilà (par sa mère, néeVeil) et celui du « beau monde » (parson père), lâche le nom de CharlesMaurras et fait état de l’affaire Dreyfus, qui amena selon lui un nouveau« kaléidoscope » peu après qu’il aitconnu Mme Swann et Gilberte. Ilobserve : « Tout ce qui était juif passa en bas, fûtce la dame élégante, etdes nationalités obscures montèrentprendre sa place. » Mais il fait aussiremarquer les aspects positifs deJuifs qui, par exemple, ont su semontrer patriotes.C’est ainsi qu’il enregistre de loin enloin les variations sur le sismographede l’opinion de son temps au sujet decette communauté aveuglée par l’espérance de se fondre dans la culturefrançaise et de s’y imposer. Ce quifait penser qu’en filigrane, la Recherche est une analyse sans concession d’un pays qui s’est converti àLa France juive d’Édouard Drumontet à sa ligue antisémite tout en étantune critique mifigue miraisin etpleine d’ambiguïté des aspirationsdes Juifs enrichis et plus ou moinsintégrés qui tentent de forcer lesportes de la noblesse et de la hautebourgeoisie d’affaires issue du Second Empire, dont il fait apparaîtrede la même façon les travers et lesfauxsemblants.Gérard-Georges Lemaire
LittératureProust à l'époque de l'affaire Dreyfus
Marcel Proust (18711922)
Le gros lot
Vous les avez adorés en juin, en novembre ... ou vous les avez ratés ? Enallant (re)voir jouer Dos groyse gevins (Le gros lot), pièce de SholemAleichem jouée en yiddish, surtitréeen français, le dimanche 13 mars à16h. à l'Espace Rachi, non seulement vous saurez ce que Shimele etsa famille deviennent après avoir gagné le gros lot, mais vous aiderez àfinancer le voyage du “Troïm Teater” de Charlotte Messer, troupe invitée à participer au FestivalInternational de Théâtre Yiddish deMontréal, du 13 au 23 juin 2011.Information Maison de la culture yiddish 01 47 00 14 00
À vos agendas !
Cet article paraît alors que France 2 vient de diffuser deux soirs d'affilée l'adaptation par Nina Companeez d'À la recherche du temps perdu. Dans le grand œuvre de Marcel Proust se tisse en filigrane une méditation sur le monde juif de son temps. Des personnages illustrent lasituation des Juifs en France : Swann d'abord (le Juif "intégré", qui se hisse dans les hautes sphères de la société) et Bloch, camarade declasse du narrateur (le Juif incarnant la judéité, mais aussi très critique à ce sujet). S'il n'a pas renié ses origines, Proust, qui a été un dreyfusard convaincu, reste un mystère car il a eu pour amis les plus acharnés antisémites d'alors...
L’IREMMO* organise mardi 1ermars à 18h30 une rencontre avecVictor Segré, auteur de :
L'EXIL Mes années en IsraëlPrésentation de l'ouvrage sous formed’un dialogue entre l'auteur et AlainGresh du Monde diplomatique. Celivre est le récit d’un fragment de vied’un jeune communiste juif originaired’Égypte où il s’est engagé, avec tantd’autres, dans un combat politique enfaveur des pauvres et du rêve d’unmonde meilleur. Arrêté, il doit se résoudre à l’exil. Après un bref séjour enItalie, il choisit Israël où il arrive en1949. C’est de ce parcours dont VictorSegré viendra parler. Discussion suivied’une séance de signatures.* Iremmo : Institut de Recherche et d'Études
Méditerranée Moyen Orient Information :01 43 29 05 65 / [email protected] 5 rue Basse des Carmes 75005 Paris
L’UEVACJEA* organise mardi 1ermars à 17h30 à l'auditorium del'Hôtel de Ville de Paris**, une projectiondébat autour du film :- LES RÉGIMENTS FICELLES -Des héros dans la tourmente de 1940
Documentaire de R. Mugnerotsur une idée de JP. Richardot,sur l'engagement massif desétrangers dans l'Armée françaiseen septembre 1939* Uevacjea Réservation : 01 42 77 73 32 /
[email protected]** Hôtel de Ville de Paris Auditorium 5
rue Lobau Paris 4e
Fin 2010, l'actualité sociale nenous a pas permis de publier lespropos confiés par Stéphane Hessel à Hélène Amblard.Qu'ils nous le pardonnent, noslecteurs trouveront dans le prochain numéro, une interview deStéphane Hessel. PNM
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