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Cas de Djoum au Sud du Cameroun Hubert NGOUMOU MBARGA Doctorant en Géographie UMR 5115. Les Afriques dans le Monde (LAM) Université Michèle de Montaigne – Bordeaux III 11 ème colloque Doc’Géo Vendredi 4 octobre 2013 PESSAC

Ngoumou Nbarga - L’identité territoriale et la gestion communautaire des espaces forestiers. Cas de Djoum au Sud du Cameroun

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Page 1: Ngoumou Nbarga - L’identité territoriale et la gestion communautaire des espaces forestiers. Cas de Djoum au Sud du Cameroun

Cas de Djoum au Sud du Cameroun

Hubert NGOUMOU MBARGA Doctorant en Géographie UMR 5115. Les Afriques dans le Monde (LAM) Université Michèle de Montaigne – Bordeaux III

11 ème colloque Doc’Géo Vendredi 4 octobre 2013

PESSAC

Page 2: Ngoumou Nbarga - L’identité territoriale et la gestion communautaire des espaces forestiers. Cas de Djoum au Sud du Cameroun

Plan

I. Situation géographique de la commune rurale de Djoum : localisation des communautés étudiées;

II. Les forêts communautaires. Contexte et mise en œuvre au Cameroun;

III. Les communautés de Djoum et la gestion des forêts. La participation et son bilan;

IV. Méthodologie : Essai d’une approche explicative de la faillite.

V. Résultats et discussion.

VI. Conclusion

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I. Situation géographique de la commune rurale de Djoum (1)

Localisé dans la Région du Sud.

Située sur le Département du Dja et Lobo.

Djoum est une commune forestière.

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I. Localisation géographique des communautés étudiées (2)

Quatre Forêts étudiées

AMOTA (GIC): 4323 ha. Regroupe les villages : Amvam, Otong-Mbong, Akonétché et Avobengon.

MAD (GIC) : 2362 ha. Regroupe les villages Minko’o, Akongntangan et Djop.

AFHAN : 1022 ha (Association des femmes, hommes et amis de Nkolenyeng) Oyo Momo (GIC): 4873 ha (villages Yen et Kobi)

Carte administrative de l’arrondissement de Djoum

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II. Les forêts communautaires. Contexte et mise en œuvre au Cameroun (1)

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Échelle internationale

Crises mondiales: environnement, extrême pauvreté, explosion démographique…

Débat international recommandant la mise en place de dispositifs de régulation sociale et politiques vertueuses en matière de développement durable

L’Agenda 21 promeut une gestion durable des forêts et une gouvernance multi-niveaux

Échelle nationale

Le Cameroun entreprend de grandes réformes dans son secteur forestier

L’État est réformé avec pour fil conducteur le principe de subsidiarité.

la loi forestière de 1994 accorde la possibilité aux communautés de solliciter et d’acquérir des espaces forestiers leur permettant de bénéficier de tous les avantages qu’elles peuvent en tirer.

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II. Les forêts communautaires. Contexte et mise en œuvre au Cameroun (2)

La gouvernance multi-niveaux des ressources naturelles au Cameroun s’appuie sur trois niveaux d’échelle: le niveau national, les collectivités territoriales et les territoires villageois.

Le territoire villageois constitue l’échelle spatiale de référence pour la gestion communautaire des forêts.

Pour solliciter et gérer une forêt, chaque village doit se constituer en une entité juridique et peut choisir parmi quatre formes (GIC, Association, Société coopérative et GIE) prévues par la législation en vigueur au Cameroun.

L’objectif de la gestion communautaire des forêts est de faciliter la participation de tous les villageois. Cette participation est censée favoriser une bonne structuration des communautés pour une régulation et coordination meilleures des interactions en termes de gestion des ressources et de production du développement local.

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III. Les communautés de Djoum et la gestion des forêts. La participation et son bilan (1)

Selon les villageois de Djoum, participer c’est s’impliquer activement dans la vie de l’organisation de gestion à travers les activités organisées.

Le principal critère utilisé pour traduire cette participation est l’inclusion/exclusion au sein du bureau exécutif de l’entité de gestion des catégories telles que : l’appartenance ethnique, le genre, l’âge, le niveau d’éducation et la profession.

Des efforts considérables pour traduire la participation dans les faits sont manifestes.

Cette participation est appréciée différemment selon les communautés, puisque la prise en compte de catégories ci-dessus est variable et non uniforme chez celles-ci (exemple 1 et 2).

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AFHAN OYO MOMO AMOTA MAD

% hommes % femmes

Exemple 1 : Intégration du genre

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III. Les communautés de Djoum et la gestion des forêts. La participation et son bilan (2)

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Exemple 2 : Intégration de l’ethnie

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III. Les communautés de Djoum et la gestion des forêts. La participation et son bilan (3)

Les communautés étudiées sont multi-ethniques et sont constituées par une ethnie majoritaire (Fang, Boulou et Zamane) et des ethnies minoritaires (essentiellement Pygmées et des des groupes issus du mariage inter-ethnies…)

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La participation passe encore à côté des objectifs visés (rassembler les énergies, les capacités et les compétences pour : meilleur contrôle et plus grande efficacité des organisations; régulation et coordination meilleures des interactions; production du développement local…).

La participation est instrumentalisée. Sert plus pour s’accorder aux dispositions réglementaires et légales.

L’organisation communautaire de la gestion des forêts ici est une faillite. Absence d’ engagement individuel des membres pour porter et faire vivre l’organisation. Bilan économique négatif.

Qu’est-ce qui peut expliquer cette faillite?

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III. Les communautés de Djoum et la gestion des forêts. La participation et son bilan (4)

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IV. Méthodologie : Essai d’une approche explicative de la faillite. (1)

1. En admettant que le processus de gestion communautaire des forêts interfère nécessairement avec la structuration sociale, culturelle, économique et donc spatiale des communautés villageoises, alors il faut (re)questionner ce que les acteurs communautaires construisent comme: relations, mises en tensions et/ou conflits, mises à distances et/ou proximités, mises en œuvre des résistances… ;

2. Une analyse par les co-opérateurs des actions ou forces qui alimentent le processus permet de montrer qu’il il existe bien une structuration qui rend difficile la possibilité pour les villageois de s’émanciper de leurs propres contraintes existentielles et de changer leur rapport au processus de gestion et aux gens.

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Deux hypothèses de travail

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IV. Méthodologie : Essai d’une approche explicative de la faillite. (2)

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Identifier et révéler les logiques (fruits directs des interactions)

mises en œuvre

Processus de gestion

Entretien semi directifs

Membres bureau exécutif et leurs discours

Questions connexes (mesure des distances, proximités, contours…

Enquêtes croisées

4 entretiens de groupe

30 entretiens individuels

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V. Résultats et discussion (1)

L’auto-analyse villageoise de l’interface communautés/processus de gestion communautaire des espaces forestiers fournit une description du territoire villageois et des entités de gestion dans le tableau ci-dessous.

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Caractéristiques socio-spatiales

Arguments explicatifs

Village

Lieu d’expression des divisions et dissensions

Effritement des liens humains de confiance; mauvaise cohabitation; absence de relation affectives et sentimentales; rapports sociaux débridés

Lieu gouverné par l’individualisme

Poursuite des intérêts particuliers; appropriation privée des biens communs; repli de chacun sur soi; manque de solidarité

Lieu de fabrique des soupçons

Manque d’authenticité dans les rapports avec les autres; usage accru du mensonge; conflits inter-individus; la parole donnée n’est plus respectée; les individus sont stratèges et composites

Entités de Gestion

Dispositifs de mise à distance

Absence de communication; dispositifs contrôlés par l’appât du gain; dispositifs minés par des conflits; dispositifs mis en place par une volonté extérieure

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Les logiques paralysantes de l’organisation communautaire

A. Le mensonge et le manque de transparence : deux usages qui s’observent dans les interactions de la vie communautaire.

B. L’usage des ressources symboliques : les représentations villageoises sur les rapports sociaux au sein de leur communauté se fondent sur l’imaginaire, celui d’une communauté parfaite de leurs ancêtres à laquelle il est impossible de ressembler ou de se conformer.

C. Les villageois sont victimes de leurs opinions et croyances pessimistes. Ils s’accusent, se jugent, se sanctionnent et se culpabilisent mutuellement.

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V. Résultats et discussion (2)

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D. Il en résulte :

1. un rejet mutuel proportionnel à la force des représentations et des convictions qu’ils se font d’eux-mêmes et de l’espace communautaire dans lequel ils vivent.

2. Perte d’estime et production d’une image dévalorisante de soi et de son espace de vie .

E. Engendre de la relégation, des dissensions, de l’exclusion, de la discrimination, de la ségrégation, de la séparation…

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V. Résultats et discussion (3)

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E. Les éléments décrits ci-dessus caractérisent mieux les interactions quotidiennes des communautés villageoises appelées à se regrouper et à s’organiser pour gérer leur forêt.

F. Ils s’expriment avec force dans leur façon de communiquer et se manifestent dans les comportements et les événements de leur quotidien.

G. Ils sont acquis à travers l’insertion du villageois dans son milieu de vie.

H. Loin de coaliser les énergies, les capacités et les compétences des acteurs villageois, ils sont plutôt les inhibiteurs de l’agir-collectif communautaire.

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V. Résultats et discussion (4)

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Mécanisme opérant : la vie communautaire

La vie communautaire peut se définir comme l’ensemble des acquis (sociaux, culturels, matériels, symboliques, …) tirés de l’usage de la dimension spatiale d’une communauté donnée, et qui la différencie des autres.

Elle prédispose à un mimétisme qui consiste à reproduire les codes, les règles, les comportements et les croyances de l’entourage proche de chaque membre et à assimiler ces éléments comme des valeurs de référence.

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V. Résultats et discussion (5)

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Elle a un pouvoir « d’éducation » sur chaque membre, en lui permettant d’apprendre comment se comporter, que croire ou ne pas croire, ce qui est interdit ou permis, ce qui est juste ou faux.

Elle oblige à se conformer à ce qu’elle offre comme modèle. Elle oblige chaque membre à une soumission aux « règles

communautaires » afin de se reconnaitre une appartenance à la communauté.

Son principe est d’apprendre à chacun de ses membres : 1. à vivre en concordance avec les besoins des autres membres

communautaires; 2. à vivre en conformité avec les opinions et les croyances

sociales établies sous peine de sanctions ou de rejet par la communauté.

Elle offre à chaque membre un encadrement inhibiteur de l’agir-collectif, du moins sur les aspects soulignés et décrits plus haut.

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V. Résultats et discussion (6)

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VI. Conclusion L’analyse fine de l’espace d’interaction entre communautés et

processus de gestion des forêts permet de récuser l’idée généralement admise des communautés consensuelles, en proie à des prédateurs de toute sorte.

Il ressort de notre analyse que la complexité des systèmes établis de relations et de perception impacte fortement l’agir-collectif communautaire sur la gestion des forêts. Ce contexte ne permet pas aux villageois de s’affranchir des déterminations interindividuelles et de changer leur rapport au processus et aux autres.

L’insertion de l’individu dans le territoire villageois a contribué à instaurer un climat délétère qui, plutôt que de favoriser la solidarité entre les villageois, a plus contribué à les opposer, à les éloigner mutuellement, au point de rendre difficile la poursuite d’un objectif commun.

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L'identité territoriale et la gestion communautaire des

espaces forestiers.Cas de Djoum au sud du

Cameroun

Ce diaporama a servi de support à la communication de Hubert NGOU-MOU NBARGA à l'occasion du 11e col-loque Doc'Géo, qui s'est déroulé à Pessac (Gironde) le 4 octobre 2013.

Son auteur l'a mis à dis-position sous les termes de la licence ouverte, dont le texte est dispo-nible sur le site de la mission ETALAB.