Upload
francis-batt
View
21
Download
0
Embed Size (px)
Citation preview
Œlî19t.ba,
ZLE PORTIQUE DES AMIS DE DIEU.
RECUEIL SCIENTIFIQUE ET RELIGIEUX
A L’ U s A G E
DES NÉOSOLYMES DES DEUX SEXES.
ENTREPBIS
PAI
L. G. HOFAKER.
_ /
DEUXIÈME PARTIE.
CONTENANT
LE SEIGNEUR AVEC nous, un L’INTERMÊDIMRE DE ANNA ET
GASPARD LINEWEG.
— —-—<ar®œ——yÿyÿy
PARIS ,
TnEUTTEL ET WÜRTZ , LIER. , RUE DE LILLE Nm. 17.
SAINT - AMAND ,
A LA LIBRAIRIE DE LA NOUVELLE JÉRUSALEM.
TUBINGUE ET LEIPSIC ,
A LA LIBRAIRIE GUTTENBEBG.
1840.
RAPPORTS
ENTRE
LA NOUVELLE JÉRUSALEM CÉLESTE
ET
LA NOUVELLE JÉRUSALEM TERRESTRE;
OU
LE SEIGNEUR AVEC NOUS,.
un L’INTEEMEDIAIRE
7
DE ANNA ET GASPARD E_æEWEG.
TRADUIT DE L’ALLEMAND
PAR
L’AUTEUR DES RAPPORTS ENTRE LES DEUX MONDES.
. y“flw'1
——.09909&—
PARIS ,
TEEUTTEL ET Wümz , LIBR., II'UE DE LILLE Nro. 17.
SAINT - AMAND ,
A LA LIBRAIRIE DE LA NOUVELLE JÉRUSALEM.
TUBINGUE ET LEIPSIC ,
A LA LIBRAIRIE GUT'I‘ENBERG.
1840.
A MESSIEURS DU CLERGÉ DE FRANCE.
Messmuns.
Depuis plusieurs années je fais des efforts pour rendre le
Clergé de France attentif à l‘apparition de la Nouvelle Jérugalem
sur la terre. Un examen approfondi et consciencieux m’a intime—
ment convaincu de la vérité de ce grand et réjouissant évène
ment. Et je ne suis point seul: plus de cent mille autres personnes,
parmi lesquelles on peut compter des esprits distingués de toutes
les classes et de tous les pays, partagent mes convictions.
Malgré mon in<ufliunrn et mnn indignité personnelle, la
divine Providence m’a conduit à travailler, en particulier, dans
ma patrie à une si belle cause. Dès 1828, en revenant d’Angle—
terre, où j’étais allé étudier la Nouvelle Eglise déjà florissante,
je publiai, sous le titre du Vrai Messie, un ouvrage dans lequel
j‘exposai la théorie de la langue de la nature, ou des correspon—
dance: des objets de la 1création visible avec les wéñte’s et les
sentiments invisibleq dans l’homme, ce qui offre une véritable
clef d’or conduisant à tous les trésors encore cachés de la parole
prophétique. Dans ce livre je fis en même tems l’application des
principes exposés aux passages les plus remarquables de l'ancien
et du nouveau Testament, relatifs aux vrais caractères de Dieu—
Rédempteur, afin de montrer que ma théorie n’est point vaine,
mais qu’elle offre des résultats: et cet ouvrage fit quelque sensa—
tion, quoique ma position sociale ne me permit pas alors d’y
donner suite. Cette théorie, bien que faiblement tracée, d’une
langue par images, d’une langue «me plutôt qu’entendue, frappa
singulièrement quelques esprits penseurs. Un des hommes les plus
1
s_v]_
distingués de notre époque *), qui s’était beaucoup occupé des
anciens mythes, se trouva d’avance si persuadé d’une langue de
la nature perdue depuis les tems les plus réculés des annales
humaines, qu'en voyant paraître le Vrai Messie il s’écria: Voilà
ce que j'attendais depuis longtems. Il est vrai que mon travail
ensuite ne répondit pas entièrement à son attente: mais j'ose
assurer, que s’il n’a pas reconnu la vérité toute entière, c‘est à
la faiblesse seule de mes moyens qu’il doit l’attribuer; ou, peut—
être aussi, à quelques idées inexactesdont l’étude des mytholœ
gies anciennes l’avait préoccupé, et qui l’auront empêché d’appré—.
cier le système à sa juste valeur : car s’il avait pu être porté à
recourir aux sources où j’avais puisé moi-même , il serait sans
aucun doute demeuré pleinement convaincu.
Ce premier ouvrage je l'ai fait suivre de l'Essai d’uanic—
tionnaire r]p la Ïrmg:m de la Nature, dans lequel i'expliquai le
sens de plus de huit cents hiéroglyphes, ou emblèmes de la lan—
gue prophétique, pris dans la nature extérieure, afin de montrer
par des résultats plus positifs encore, jusqu‘à quel point la théo
rie d'une pareille langue était fondée en raison. Je ne donnai
naturellement pour. incontestables, que ceux des articles que
j'avais trouvé consignés dans les nouvelles données supérieures,
les autres significations assignées ne restant que_ plus ou moins
probables ou ingénieuses; mais , du moins, tout le travail, pris
dans son ensemble, prouve la vérité du principe, et signale une
mine inépuisable à exploiter à la science et à l'étude.
Quelques années plus tard un de mes amis d’Allemagne crut
devoir publier des Mémoires sur des particularités extatiques qui
s’étaient offertes dans ma propre vie, et dont le fait principal lui
semblait pouvoir se rattacher à l’apparition de la Nouvelle Église.
‘Je savais très—bien à quoi je m’exposais par une pareille publication ,
') Mr. Ballanche.
—- VII —
dans laquelle, à côté de données évidemment pures, j’entrais
dans des détails, plus ou moins hasardés, sur'des songes ordi—
mires, qui, selon moi, pouvaient devenir le sujet de spécula
tions philosophiques comme tous les autres phénomènes de la
nature: mais tel est le peu de cas que je fais, à tort sans doute,
de l'opinion des autres hommes à mon égard, que cette considé
ration ne put m’arrêter. Cet ouvrage me fit du tort, en effet,
dans l’esprit des personnes étrangères aux nouvelles études exta
tiques, et qui ne se donnèrent pas la peine de discerner lesfizits
sérieux que j'avance, des matières secondaires que je traite,
qu’il est permis à chacun d‘expliquer comme il l’entend , et sur
diverses particularités desquelles j’ai moi-même changé d’opinion
depuis. Plusieurs des disciples même de la Nouvelle Je’rusalem
m’ont blâmé dans cette occasion, prétendant que je compromet—
tais la dignité et la pureté de la Nouvelle Doctrine. biais sans
vouloir autrement défendre ici, absolument tout ce que contient.
ce livre (dans lequel je déclare moi-même que je n'ai pu bien
distinguer la nuance de ce qui me paraissait pur, de la partie
qui me semblait être une réaction infernale), ne pourrait-on pas
dire qu’il y aurait un avantage à publier même quelques-unes
des aberrations auxquelles les expériences extatiques peuvent
donner lieu? Les erreurs forment en quelque sorte les ombres
du tableau de la vérité: celle-ci ne sera parfaitement connue
que de celui qui aura aussi une idée claire de ce qui n’est point
elle. Il serait donc bon et utile, dans ce cas, que quelqu’un se
sacrifiât, pour montrer jusqu’où peuvent aller les illusions dans
une question aussi délicate. Encore ne faut-il pas trop étendre
le champ des illusions possibles dans cette partie, sans cela on
ne saurait plus à la fin où s’arrêter, et les communications les
plus belles en recevraient un échec. Si vous accordez, en effet,
que les esprits infernaux peuvent inspirer un volume entier de
réflexions et de raisonnements pas trop mal liés ensemble, et ex
_ —
primant des sentiments plus ou moins touchants ou pieux, d’au—
tres diront que la même illusion peut se glisser dans quinze vo
lumes*); et adieu alors toute espèce de communication céleste,
quelle qu’elle soit!
Il va sans dire que toutes les données particulières ne doi—
vent ni ne peuvent jamais être jugées que par l’ensemble de la
Doctrine de la Nouvelle Eglise, laquelle demeurera toujours le
seul cn’te’n‘um auquel tout devra être rapporté, et auquel je suis
prêt à me soumettre tout le premier.
Enfin je puhliai encore un tout petit ouvrage intitulé:
Nouvelles Questions philosophiques, pour réhabiliter un peu,
s’il était besoin, mon caractère, aux yeux d’un certain public;
en faisant voir que toutes ces matières de songes et d’extases
peuvent être présentées d’une manière dont un esprit sérieux n’a
point à rougir. — Il y a, en effet, dans la Nouvelle Doctrine
deux points fort distincts, le côté philosophique et le côté mys—
tique. Le côté philosophique est tellement à la hauteur des lu
mières du siècle, que Jean-Jacques, pour lequel j’ai toujours
professe une haute admiration, dans la partie saine de sa phi—
losophie morale et religieuse n’eût eu qu’un pas à faire pour
devenir un disciple de la Nouvelle Jérusalem; il n’eût eu qu’à
reconnaître la Divinité personnelle et absolue du Cunrsr, et
accepter comme Créateur et Rédempteur, en d’autres termes
comme Père, Fils et Saint-Esprit, l’Etre étonnant qu’il avait
si fort élevé au—dessus de Socrate, et dont la mort lui paraissait
la mort d'un Dieu.
' Quant au côté mystique de la Nouvelle Doctrine, qui, re—
marquez-le bien, ne peut plus effrayer personne, dès que la
‘) Le docteur Han-dey ne pourrait plus donner alors, avec la même assu
rance, comme une des preuves de la vérité des communications de Swe
denhorg, que dans les quinze mille paragraphes de ses ouvrages ou
chercherait en vain une contradiction réelle. '
—xx——
morale, la foi chrétienne , et une parfaite tolérance sont en sû—
reté, c’est une étude à part, pour ceux qui ont le goût de ces
choses. Elle ouvre un champ immense à la recherche du sens
riche et profond de toutes les images parlantes de l’Ecriture
sainte; et cela, sans que l’on puisse jamais s’égarer sur les ap—
plications essentielles, le Dictionnaire et la Grammaire de la
langue spirituelle étant assez complets maintenant pour que l’er—
reur sur l’ensemble ne soit plus possible, quelles que soient les
nuances particulières de l’esprit de chaque individu. Cette étude
met sur la voie de l’origine de toutes les Mythologies, et suggère
sur les songes les plus ordinaires, qui sont toujours un com—
mencement d‘extase , des conjectures très-intéressantes pour le
philosophe qui sait que rien dans la nature n’est à dédaigner.
Voyant toutefois, de plus en plus, mon insuffisance et sur—
tout mon indignilé à travailler pour une cause à la fois si belle
et si épineuse, je m’étais résigné à ne plus penser qu’à faire mon
propre salut, comme un membre caché, et de peu de consé—
quence, de la Nouvelle Jérusalem, lorsque parut tout-à—coùp en
Allemagne l’ouvrage dont on va lire la traduction.
Si donc je m’adresse de nouveau au public, et surtout au
Clergé de France, c’est que j’ai été porté à croire que le SEI
GNEUB lui—même est venu au secours de ma faiblesse et de mon
impuissance, par des signes tellement frappants de sa présence
déjà active au sein de sa Nouvelle Église, qu’aucun esprit im—
partial ne puisse plus le méconnaître.
Je vous adresse donc, Messieurs, ce livre, demandant pu
bliquement votre Jugement, que, j’espère, vous ne refuserez pas.
Il y a eu un tems où les prélats chargés de veiller au dépôt de
la foi, montraient une plus grande sollicitude à l’apparition d’une
nouveauté en fait de religion, et ne se laissaient pas prier des
années avant d’agir. Vous devez vous montrer aussi vigilants
_x_
qu’eux, sous peine de laisser croire que les questions de ce genre
sont» devenues moins intéressantes par le laps du tems.
Non—seulement les progrès extérieurs de la Nouvelle Jéru—
salem offrent un phénomène qui ne peut plus vous échapper,
celui d’une rapidité extraordinaire, puisqu’en 1828 , il n’y avait
encore qu’une Eglise de la Nouvelle Jérusalem à Londres, et
qu’aujourd’hui il y en a trois, et dans toute l’Angleterre plus de
soixante-dix sociétés particulières; un seul Ecclésiastique *) qui
s’était consacré à la prédication de la Nouvelle Doctrine , ayant
compté près de trente mille Disciples au moment de sa mort:
non—seulement cette Église nouvelle fait de même des conquêtes
extraordinaires en Amérique, en Allemagne, en Suède, et envahit
àen ce moment la France, où elle a déjà un organe respectable
j. dans la presse périodique, mis en rapport avec toutes les Eglises
et les sociétés étrangères, par les PiÏm‘ts duquel le premier tem
ple est près de s’élever; mais une preuve matérielle **) d'un
rapport déjà réellement établi entre la société de la Jérusalem
spirituelle ou céleste, et la société de la Jérusaiem terrestre est
signalée dans une des grandes villes de France! Je le repète
donc, vous êtes forcés maintenant, Messieurs, de faire attention
à ces choses, et vous ne pouvez plus reculer : il faut parler, si
vous ne voulez pas que dorénavant votre silence soit pris pour
un consentement!
C’est à Strasbourg que ces rapports entre l’Eglise triom
phante et l’Église militante ont en lieu; dans cette ville, où l’on
avait si fort exploité, avant la grande révolution de 89, le phé—
nomène de l’imposition des mains de Mesmer, renouvellée des
anciens temples, et dont la société magnétique, dite des amis
') Mr. Clowes, Pasteur à Manchester.
“) L’expression est neuve, appliquée à un Esrmr, mais enfin elle est
juste, et.consacrée.
._'x] _
réunis, a laissé des Annales si étonnantes touchant des guéri—
sons et des rapports avec des agents invisibles *). Les Rapports
que nous publions sont du même genre : seulement nous avons
la consolation de pouvoir les annoncer comme provenant d’une
source plus pure. — Pendant plus d’un an, et tous les trois à
quatre jours, un Chrétien défunt, ou plutôt ayant subi son état
de transformation, est venu s’entretenir, avec ses amis et sa fa
mille, du royaume spirituel du SEIGNEUR, et cela avec l’agrément
et de la part du SEIGNEUR, [L qui soit rendu honneur, louange
et gloire à jamais! ’
Lisez, Messieurs, cette relation, avec toute l’impartialité
dont vous êtes capables, et décidez ensuite par oui ou non cette
question: « La Nouvelle Jérusalem promise par Saint—Jean de la
part de son Maître ressuscité et glorifié, est—elle ou n’est—elle
pas descendue des cieux de nos jqus ? ou bien descend-elle ou
ne descend-elle pas des cieux en ce moment même? »
L’Académie de‘Médecine a depuis longtems donné, de son
côté, ses décisions relativement à de si étonnants phénomènes“),
le public a le'droit d’attendre aussi les vôtres. La question était
plus encore dans vos attributions que dans la leur. ——' Nous
pouvons par conséquentv0as sommer, comme nous vous 50m.
') Voir les Annales de Strasbourg, 5. vol. , pendant les années 1786
à 1789. J’ai eu également entre les mains le manuscrit d’une cor
respondance entre le fameux Saint-Martin de Paris, le Conseiller
aulique Ekartslmusen de Munich, le Conseiller de Kirchbergcr de
Berne, et Lavater de Zurieh, sur ce qui s’est passé dans les loges
de Paris, de Lyon, de Bâle, d’Avignon, de Péterslrourg, par où il
est constaté, que, moyennant des consécratious égyptiennes, on
n’était pas seulement parvenu aux rapports avec des esPrits, mais
que des phénomènes physiques mêmes commençaient à avoir lieu, ce
qui efl'rayait jusqu’aux adeptes. '
' “) Voir le Dr. Foissac, Rapports et Discussions de l’Académie de me.
decide sur le magnétisme animal. Paris 1855.
‘h_‘I \I l |
_xu_
mous, au nom du ciel et du salut des fidèles, d’examiner la doc
trine de la Nouvelle Jérusalem, avec les nouveaux symptômes
de révolutions spirituelles que nous vous signalons.
Si vous reconnaissez la réalité de ce grand évènement, alors
proclamez-le, et le christianisme, et avec lui la face de la terre,
sera renouvellée.
Si vous ne reconnaissez pas cette réalité, expliquez alors,
d’une manière satisfaisante, 'des phénomènes d’un genre si nou—
veau; montrez comment l'illusion naturelle, cules illusidns in
fernales, peuvent aller jusque-là, que, pendant plus d’un an, une
somnambule, ou extatique, puisse parler au nom d‘une autre
personne défunte, avec tous les caractères de son individu, en
prose, en vers, toujours d’une manière digue de celui auquel
elle sert d’organe; qu’elle puisse parler au nom du SEIGNEUR,
ou de sa part, d’une façon qui ne paraisse pas trop indigne
d’une si haute source, et enfin dire des choses souvent si édi—
fiantes, et si touchantes dans leur simplicité, qu‘il semble que
ce ne sont plus des discours de notre terre.
Pour ce qui est du parfait honneur, de la science, de la
solidité du caractère, et de la bonne foi chrétienne de tous les
acteurs de ce drame nouvaau, je n'ai pas besoin d’en répondre:
ces acteurs sont connus; et d’ailleurs il est clair que ce n’est pas
ainsi qu’on invente.
Il est véritablement tems, Messieurs, de prendre enfin au
sérieux la question de cette Nouvelle Église, qui commence à
envelopper, comme d’un réseau, l‘ancien et le nouveau monde,
et qui a pris maintenant aussi racine au milieu de vous.
Serait-il d’ailleurs si étonnant, que , selon la promesse du
SEIGNEUR, la Nouvelle Jérusalem, attendue depuis si longtems,
fût enfin descendue du ciel, bien qu’avec des circonstances diffé
rentes de celles que l’imagination des faibles humains s’était plu
à se forger? Quand Saint-Paul annonçait paisiblement pendant
— XIll —
deux ans l’Evangile à quelques Juifs de Home, on ne se doutait
guère non plus que dans peu sa secte envahirait l’univers: la
même destinée peut être réservée à la Nouvelle Jérusalem; et
il n‘y aurait absolument rien 'étonnant qu’elle fût l’Eglise véri
table des derniers temps. N’est- on pas assez généralement d’ac
cord, chez les Chrétiens de toutes les communions, et parmi les
savants même qui ne considèrent ces grands mouvements des na
tions que comme des phénomènes naturels de la vie sociale, à
penser que le christianisme est arrivé à ce qu’on a appelé son
époque critique, et qu’une nouvelle époque organique se présente?
Cette persuasion est générale, et il n’y a entre les deux partis que
cette différence, que les chrétiens de conviction croient que leur
Dieu, toujours fidèle, se mêlera immédiatement de cette grande ré—
volution, tandis que les simples philosophes pensent que ces change—
ments se feront par l’entraînement naturel des choses de ce monde.
Pour nous, nous le répétons, après un examen sérieux et
consciencieux de plusieurs années, nous avons entièrement re—
connu le doigt du SEIGNEUR. Oui, les derniers temps sont arrivés!
ou plutôt ils sont déjà derrière nous. Les temps ont été abrégés,
et la vraie lumière a déjà lui!
La période de l’abomination et de la désolation, selon les
disciples de la Nouvelle Jérusalem, doit être placée dans cet
intervalle où l’esprit humain, parvenu aux limites de ce qu’il a
appelé sa philosophie, n’a plus rien trouvé ni à examiner ni à
nier; où toutes les passions lamentables du cœur humain ont été
déchaînées au point que le récit seul en fait encore frisonuer,
et que les générations à venir ne pourront le croire; où non—
seulement le christianisme a été aboli au sein de la nation la
plus civilisée de l’Europe, mais où, portant tous ses fruits de
mort , le déisme lui—même s’est suicidé, pour faire place au ma—
térialisme , à l’incrédulité et à l’indifférence absolue; où un
Robespierre! pour dire tout en un mot, s‘est trouvé contraint
u
—- XIV —
de proclamer de nouveau , au milieu de chrétiens dégénérés, la
croyance et l’Être suprême et à l’immortalité de l’âme ! *) Oui,
voilà le moment suprême! LeÎmoment suprême est nécessairement
arrivé, quand il n’y a plus rien au-delà, ni pour les errements de
l’esprit humain, ni pour les égarements du cœur. Comment serait
il possible, aujourd’hui que toute la pensée humaine est fixée irrévo
cablement par l’imprimerie , que l’univers parcourût encore une
fois le même cercle d’idées qu’il a si laborieusement parcouru
depuis deux mille ans? Cela n’est pas dans la nature des choses,
évidemment. Tout a été dit et redit, toutes les suppositions ont été
faites, tous les systèmes ont été débattus, toutes les hérésies ont
été mises en avant .- et il ne reste plus absolument qu’à accor
der enfin à Dieu-Rédempteur tous ses droits, à reconnaître toute
la plénitude de la Divinité habitant en Lui corporellement, ou
à tout nier et rejeter pour jamais, et sans retour.
Voulez-vous un autre signe des derniers temps, et de la
nouvelle ère que nous avons déjà commencée. On avoue géné—
ralement en France un retour aux idées religieuses. Dans les
autres pays de même , parmi les populations protestantes, on a
signalé ce qu’on est convenu d’appeler le réveil religieux : mais
ce sentiment, ce besoin général, comment les nourrira—t- on?
Cette faim et cette soif spirituelle , comment les appaisera-t—on?
Qu’est-ce qui ranimcra assez le christianisme pour obtenir de si
grands résultats? Qui est—ce, en un mot, qui offrira au monde
cette nourriture devenue indispensable? — Sera-ce le catholi
cisme ravivé? Les faits ont déjà prouvé l’impossibilité de l’effica—
cité de cette ressource. En se déclarant infaillible, Home s’est
étranglée de ses propres mains: elle ne peut reconnaître la
') Il est dans tous les cas extrêmement remarquable, que Var-urne et
SwEnnnnono aient vécu à peu de chose près ensemble, et que Messuen
et GAL]. se soient rencontrés dans cette ville, où le matérialisme était
devenu l’unique article «la foi.
moindre erreur, avouer le plus léger abus, sans cesser d’être!
N’a-t-on pas vu dans quel embarras se sont trouvés de nos
jours, tous ces esprits généreux que la nouvelle école spirituæ
liste, réaction naturelle contre le matérialisme grossier du der
nier siècle, avait jetés dans la lice? Quel enthousiasme d’abord,
quand on a vu de si intéressants athlètes renoncer a un bel
avenir dans le monde, pour consacrer des talents déjà éclatants
à leur aurore, à une cause, respectable sans doute, mais que
l’on s’était accoûtumé à regarder comme perdue! Toute l’Eu
rope, alors, rétentit d’éloges et d’admiration. - Cependant qu’est—
il arrivé? Dès qu’on a remarqué que ces nouvelles et admira
bles convictions étaient le moins du monde raisonnées et philo—
sophiques , on s’est cru forcé de les flétrir du soupçon d’hérésie,
on s’est cru forcé d’articuler ’épithète obligée d’hérésie, et aus—
sitôt tout ce beau feu s’est amorti. L’insuffisance du catholicisme
romain a donc été mis à nu en ce point aux yeux de tous. *)
Sera-ce le protestantisme qui sauvera la chrétienté du
XIXme siècle de son naufrage immense? — Pas davantage! Le
temps de se faire protestant est passé; en d'autres termes, le
protestantisme a fait son temps. Sous Charles X. , au moment où
') Qui ne déplorerait pour le Christianisme la perte de l’admirable ta—
lent de M. de Lamennais? Ce beau génie uni à un beau caractère,
s’était en quelque sorte cunnronmä à Rome! Eh bien, il n’a pas pu y
tenir, une séparation violente a eu lieu; et la réaction a porté ce
génie plus loin qu’il ne serait allé, s’il avait trouvé à se satisfaire.
Qui ne regretterait aussi un Bautain, un Bonncchose? Ils se sont
soumis, dit-on, au bon plaisir de la cour romaine que] qu’il puisse
être: à la bonne-heure, mais le froid de la mort a ainsi tout glacé! -
Une telle soumission a un côté respectable; mais peut- être qu’à
l’époque où nous sommes parvenus, une résistance généreuse eût été
plus utile. - Quant à l’abbé Lacordairc, c’est encore autre chose: il
veut raviver le christianisme, ou plutôt le catholicisme, en ressusci
tant un ordre religieux; j’ose affirmer que personne, hors lui, ne
croit à la réussite.
II*
l’on avait les plus fortes raisons politiques d’en venir à une pa
reille mesure comme réaction contre le Jésuitisme qui nous me
naçait de son intempestif et malencontreux retour, près de deux
cents membres d‘une des sociétés les plus respectables et les
plus instruites de la capitale *) avaient pris la résolution d’écla—
ter au même jour par une déclaration de principes protestants:
mais à l’heure venue, ils ont senti le peu d'importance que l'opi
nion publique attacherait à une pareille démarche , chacun pou—
vant aujourd’hui, dans l‘un comme dans l‘autre parti, être croyant
ou mécréant à sa façon sans que personne y prenne garde; ils
se sont tus, et ils ont bien fait. Ce n’est donc pas de-là non plus
qu'il faut attendre du secours.
Beaucoup de Protestants, il est vrai, sont parvenus, dans
leur société, à une foi d’autant plus éclairée et plus inébranla
ble, qu‘elle s‘est trouvée fondée sur leurs propres réflexions et
leurs propres raisonnements; mais d’autres aussi sont arrivés au
déisme et à l'incrédulité par la même voie, surtout parmi ceux
qui se croient, ou se donnent pour savants. Et il n’est rien
moins que sûr, que, sans un secours particulier d'enhaut, l'in
crédulité ne l‘emporterait pas encore une fois dans la balance,
à la longue. Voyez cet autre phénomène des derniers temps,
l’ouvrage du Dr Strauss, qui a enfin lié en un système suivi
tout ce qu’on avait dit, ou donné plus finement à entendre avant
lui , contre la foi chrétienne (car le D“ Strauss n'a que le mérite
de l’arrangement, et de l'audace plus libre de son siècle) : que
les passions brutales viennent maintenant se joindre à ce der
nier efl'ort de l'incrédulité, et vous pourrez douter raisonnable
ment du triomphe ultérieur de la vérité.
Sans donc méconnaître ce que le catholicisme romain a
pu faire de bien par la foi imposée d‘autorité aux masses , ni ce
‘) L’Atbénée royal.
—- XVII —
que le protestantisme a pu rendre de vie à cette foi par le libre
examen, sans méconnaître ce que l'un et l’autre des deux sys—
tèmes ont pu avoir d’utile, d’opportun, de nécessaire même,
chacun à son époque; on peut raisonnablement désespérer au—
jourd‘hui de leur efficacité pour l’avenir : et, même humaine
ment parlant, il n‘y aurait que la foi de la Nouvelle Église, fon—
dée sur la Parole de Dieu divinement interprétée, offrant un
christianisme tout-à-fait universel, et pouvant être mise en une
parfaite harmonie avec tous les progrès de l'esprit humain au
Xlee siècle, qui pourrait sauver la grande oeuvre de Dieu—Ré—
dempteur, et présenter la chance d’infuser une vie nouvelle dans
la société morte par l’égoïsme, l’individualisme et l'absence ab—
solue de toute espèce de convictions sérieuses : état social dont
la perspective eût effrayé les peuples payens. —
Il ne me reste qu‘à faire quelques réflexions particulières
sur les communications mêmes qu’on va lire, et sur l’adoption
générale de la Nouvelle Jérusalem.
On aurait tort d'abord de prendre ces communications
pour de nouvelles révélations, ou même de regarder tout ce qui
y est dit comme vérités infaillibles. Les communications de
l’apôtre moderne lui—même, faites de la part du SEIGNEUR, ne sont
point proprement des révélations nouvelles. La Parole de Dieu
est close par le dernier verset de l’Apocalypse de Saint—Jean ,
comme elle avait été ouverte par les premiers mots de la Genèse.
L’homme, le chrétien devenu esprit immortel, qui s’est mani—
festé à Strasbourg, avoue avoir encore au-dessus de lui des
Instructeurs dans le monde spirituel dans lequel il a passé; il
avoue ignorer encore bien des choses: il est donc bien éloigné
de se donner pour infaillible; et il est le premier à dire avec
l‘apôtre: Examinez ,- éprouvez tout, et retenez ce qui est bon.
Examinez même les choses que vous apprenez de moi par cette
voie Mmrdinaire, et ne croyez que ce qui vous paraîtra
— XVIII -—
vrai sous les yeux du SEIGNEUR. Cet esprit supérieur n‘est au
fond , lui, qu’une preuve de l’immortalité, que l'on peut appeler
matérielle ou palpable; une preuve de la vérité du christia
nisme, et de la divinité personnelle de Jésus Dieu—Rédempteur,
sous les auspices duquel ses rapports avec la terre ont en lieu;
et enfin une preuve de la bonté et de l’amour infini du SEI—
GNEUB, qui renoue dans ces derniers temps les rapports entre le
ciel et la terre interrompus depuis si longtemps.
Autre réflexion : dans tout le livre que nous présentons,
il ne se trouve pas un mot des sectes ni des divisions, ni encore
moins des haines religieuses, dont l’Église a si souvent été le
théâtre. Ceci, nous supposons, est de nature à faire plaisir à
tout le monde, dans ce siècle des lumières; et c’est à nos yeux
une nouvelle preuve en sa faveur, puisque le SEIGNEUR, en
effet, ne doit point se mêler de nos malheureuses dissensions ni
de nos disputes absurdes. En un seul endroit l’homme-esprit
blâme les indulgences: mais les catholiques éclairés eux-mêmes
reconnaissent aujourd’hui tout ce que ce point avait d’abusif.*)
') Nous croyons devoir dire aussi un mot , ici, sur ce que pensent ou peu
vent penser de cette publication les Néosolymites. En général, ils n’ai
ment pas , comme on l’a déjà vu , ces sortes de petites révélations partiv
culièrcs : celle-ci néanmoins, j’espère, fera exception. Peut—être recon—
naîtront—ils plus tard , que c’est précisément par ces sortes de rapports
entre les deux mondes, que la Jérusalem céleste descendra sur notre
terre nus TOUTE sa PLÉNITUDE , sans que pour cela , il soit changé ,
quoi que ce soit au fond même de sa doctrine, que nous savons être com
plète quant aux principes , bien qu’une grande partie de la parole pro—
phétique reste encore à être expliquée dans ses détails.
Un des disciples de la Nouvelle Eglise qui a lu l’original allemand de
ma traduction, et qui avait connu l’esprit—communicateur de son vivant,
a été contrarié de certaines particularités de ses communications au
point de douter de la pureté de l’ensemble. Il est une preuve que les
Néosolymites ne sont point aussi crédules que l’on pourrait être porté
à le croire. Néanmoins les lecteurs jugeront comme moi qu’il a tort; car,
comme je l’ai dit, si l’on n’attache point, à ces sortes de communications
-—-—xrx—
Que si quelqu‘un craignait que l'adoption de la Nouvelle
Eglise n’entraînerât trop de changements sur la terre, je lui
dirais d’abord que ce n’est pas là la question : s’il était reconnu
que le souverain Maître a parlé, il n’y aurait certes plus à délibé
rer. Mais de plus, la Nouvelle Jérusalem ne changera que peu
de chose parmi les chrétiens; elle ne fera, au fond, que faciliter
la naissance de la foi chez ceux qui s’appellent aujourd’hui sa
vants, philosophes, et penseurs, parce qu’elle conduit à la foi
par la science même et par la philosophie. Tous ceux, du reste,
qui dans tous les pays croient à la Divinité absolue de CHRIST,
adorent en Lui le Père, le Fils et le Saint-Esprit, un dans sa
personnalité divine, et triple seulement par rapport à l’homme,
et n’attendent de salut qu’en Lui et par Lui, sont par—là même
de la Nouvelle Eglise. La Nouvelle Jérusalem ne fera au fond
que nous rendre tous plus chrétiens, en nous faisant toucher
pour ainsi dire au doigt, l’impossibilité absolue d’entrer en rap
port avec le Dieu métaphysique et insaisissable, qui, comme
créateur, est à la fois partout et nulle part; qui n'est rien pour
partielles , l’importance qu’elles méritent, les hommes pourront être
portés à négliger aussi la PRINCIPALE ne mores, sous prétexte qu’elle
n’est qu’un peu plus étonnante que les autres , mais que rien ne garantit
sa pureté absolue. -- Ce critique disait, par exemple, que l’Esprit en
question avait très - bien connu pendant sa vie les ouvrages de la Nou
velle Église, contrairement à ce que déclarent les éditeurs. Mais ceux-ci,
autant que j’ai pu le comprendre, ne nient pas que M.” L. a connu la
Nouvelle Doctrine ;' ils disent qu’il ne s’était point déclaré femelle
ment Néosolymite pendant sa vie, se contentant d’être chrétien à sa
manière. -- Il s’ofl'ense aussi de ce que cet esprit ne parle jamais de sa
première femme , avec laquelle il avait fait un si heureux ménage pen
dant de longues années , et seulement de la seconde , qu’il avait épousée
sur la fin de ses jours: mais de bonne foi, qui peut décider laquelle des
deux était devant Dieu son épouse véritable , - celle qui devait pouvoir le
mieux harmoniser éternellement avec son être , comme il arrive parmi
les anges?
Cette relation ne contient donc rien de choquant, rien qui soit pré
_xx_
nous, s‘il n’est personnifié; qui, en un mot, envisagé hors de Cumsr,
n‘offre qu’un X introuvable, et un Être que l’on chercherait et
poursuivrait inutilement pendant toute éternité sans pouvoir
l'atteindre. Relativement à l'Ecriture sainte, la Nouvelle Jéru—
salem ne fera que nous donner la véritable; clé du langage em
blématique, afin que nous puissions dorénavant comprendre la
Bible dans son entier, et non plus simplement les passages les
plus saillants et les plus aisés à saisir, et qui jusqu‘aujourd’hui
avaient suffi, bien qu’ils ne dussent plus suffire dans les derniers
temps. Mais du reste elle ne changera rien aux détails de la foi,
qu’elle ne fait que simplifier. Enfin, quant au culte extérieur,
elle ne fera que le remettre également sur ses véritables bases ,
en ramenant toutes les cérémonies à leurs significations emblé
matiques et primitives.
Un des premiers prélats de la France *), auquel je fis
part dans le temps de la découverte que je croyais avoir faite de
la Nouvelle Jérusalem promise , me dit : .. Ressuscitez-moi un
mort! et je vous écouteraî. ” Il y a assurément un côté respec—
table dans ce mot, en ce qu’il montre une foi vigoureuse, si
rare aujourd'hui : cependant, Messieurs, vous reconnaîtrez d’un
autre côté, avec moi, que c’est tenter Dieu que de demander
des miracles; qu‘il faut que ce moyen violent des miracles, qui
forcent l’entendement, pour le moment, sans convertir le cœur,
cesse avec les temps d’un christianisme plus éclairé. Les morts,
en effet, ressuscités par Jésus - Cnmsr pendant sa vie mortelle,
doivent servir pour tout le monde, et pour toutes les générations,
et l’on n’a pas le droit de Lui en demander d’autres. D'ailleurs ce
que demanderait l’un, tous pourraient le demander, et cela
cisément contraire à la Nouvelle Doctrine, bien qu’on n‘ait pas be
soin d‘ndopter ce qu’elle confient, comme si c’étaient des véritéa évan
géliques.
‘) Mr. de Quélen, Archevêque de Paris.
_m_.
n’aurait plus de fin. Le SEIGNEUR n’opère donc plus aujourd‘hui
de ces sortes de miracles; mais ce sera avant tout l’évidence
des explications données sur l’ensemble du christianisme, qui
devra convaincre les esprits dans l’Église nouvelle qui se pré
sente; et cette merveille, d‘une nouvelle espèce, suffira. —- Que
si quelqu'un veut appeler du nom de miracle la communication
d’un chrétien mort, avec d’autres chrétiens encore vivants, par
l’intermédiaire d’une personne tierce qui lui serve d’organe, rien
n‘empêche : cette sorte de conversation inattendue , est assuré—
ment très—merveilleuse. Il est certain cependant que bientôt on
s'y accoûtumerait, comme on s’y était accoûtumé lors de la
première origine du genre humain, quand le monde matériel et
le monde spirituel étaient nécessairement en relations; et alors
on demanderait encore une fois d’autres signes pour croire,
comme faisaient les Juifs du temps du SEXGNEUB. Aussi n’est-ce
pas ce qu’il y a de merveilleux dans la présente Relation, qui
doit porter à croire à la Nouvelle Église; mais ce qu’elle ren—
ferme de simple, de clair, de conforme à la raison et au bon
sens, et de propre à faire recourir les lecteurs à cette autre
source plus importante encore, et sur laquelle repose plus
exclusivement l’Église de la Nouvelle Jérusalem, savoir aux
ouvrages si longtemps méconnus de l’apôtre des derniers temps.
Berne , 1. Juillet 1840.
0E G G E R,
Ancien premier Vicaire de la Cathédrale
de Paris.
RAPPORTS
ENTRE
LA NOUVELLE JÉRUSALEM CÉLESTE
ET
LA NOUVELLE JERUSALEM TERRESTRE,
ou
Ë
LE SEIGNEUR AVEC NOUS,
un L’mrumfimunn
DE ANNA ET GASPARD LINEWEG.
———-——ŒW—m
AVERTISSEMENT DU TRADUCTEUR.
Les Disciples de la Nouvelle Jérusalem et les Savants
qui se sont occupés de l’extase provoquée, peuvent seuls se
flaire une idée de l’extrême dificulté de communiquer d’une
manière utile avec le monde des esprits par la connaissance de
la langue de la nature. C’est ce qui rend si épineuse la publi—
cation d’écrits sur ce sujet. On ne sait au juste jusqu’à quel
point on aide ou compromet la bonne cause. L’ensemble toute—
fbis des communications qu’on va lire, ne permet guère à un
homme raisonnable de douter de leur réalité, ni même de leur
pureté.
Il n’est pas nécessaire pour cela de connaître les noms
des personnes éclairées. et respectables qui attestent la vérité
des faits: elles ont cru devoir garder l’anonyme; bien qu’elles
soient assez au-dessus du qu’en dira-t-on pour se déclarer au—
vertement à tous ceux qui par un véritable amour pour la vé—
rité , voudraient remonter aux sources. On verra par la suite
qu’un avis positif a été donné aux témoins de garder l’anonyme
vis—à—vis du public, probablement pour des raisons d’une mo—
deste réserve.
—— XXVI -—
Il y a des personnes, et surtout Disciples de la Nouvelle
Jérusalem, qui blâment singulièrement ces sortes de publica—
tions. Je ne saurais être de leur avis. Si personne ne publie
rien de ces choses extraordinaires, comment saura-bon que les
deux Églises, la visible et l’invisible, ont été enfin mises en
contact? Comment parviendra—bon à distinguer les communi—
cations pures d’avec celles qui ne le sont pas? Car certes, on
ne les arrêtera plus; elles iront leur train. Nefaut-il pas que
les Néosolymites eux—mêmes sachent jusqu’où peuvent aller les
illusions ? Pour peu que l’on _y mette de la prudence et de la
circonspection, la vraie doctrine de la Nouvelle Église n’en
saurait recevoir d’atteinte; celle-ci est trop bien exposée dans
les ouvrages de l’apôtre moderne, pour qu’elle puisse jamais
être obscurcie: le SEIGNEUR y a trop bien pourvu; et les phé—
nomènes noupeaux ne servent qu’à y rendre attentif de plus
en plus.
Ce sont ces considérations qui m’ont engagé àfaire con
naître aussi en France un ouvrage, en tout cas extrêmement
curieux, qui a déjà paru en Allemagne: ses lecteurs jugeront
de la plus ou moins grande opportunité de ma démarche.
«nm. sum’!» ':.Mb'dÿz‘€‘ 'e'5”;"1hW
Gaspard Linetveg descendait d’une famille suisse,
et était natif de la ville de Saint-Gall; mais il passa toute
sa vie en France; et ses premières années comme ofliu
cier du corps du génie.
Ayant été porté de bonne heure vers les choses
célestes par une mère pieuse, il fixa toüj0urs fidèlement
ses regards sur le Dieu créateur et sauveur, au milieu
des flots agités de sa vie aventureuse. Aussi le SEIGNEUR
de Son côté le conduisit—Il avec une bonté toute pater
nelle, et ne le laissa jamais souffrir lohg-tems sans lui
donner des‘marques assez frappantes de sa présence,
en particulier par la manière dont Il le fit échapper
plus d’une fois aux périls imminents que sa vie avait à
COlll‘ll‘.
Mais sur la soirée de ses jours, le SEIGNEUR lui ré—
servait un lot bien plus désirable encore, celui de tra
vailler pour le bien spirituel de ses semblables.
Lineweg en se retirant dans la vie privée, fixa son
séjour à Argentine. " - \ u;
Là celui qui depuis lmg-téms était l’ami de cœur
de tous ceux qui l’approchaien’t, par son fonds inépui—
sable de charité et d’amour, comme par son inébran—
lable courage dans les périls et sa gaîté inaltérable au
milieu des plus grands malheurs, devint aussi leur con
ducteur zélé vers Celui seul peut donner la vraie
joie et la paix, Vers le Père est. aux cieux. Le “don
1
__2__
de la parole et de la prière qui lui avait été accordé
dans un très-haut degré de perfection, assemhla autour
de lui une société spirituelle d’un cercle très-étendu;
des amis et des frères même de l’Allemagne, venaient
se réunir chez lui.
Nous aurions du plaisir à retracer l’image de cet
homme de bien;:ccpendant comme la manière la plus
courte et la plus exacte de bien faire connaître une per—
sonne consiste à faire connaître ses amis, surtout ses
amis de cœur, nous rappellerons simplement que les
amis les plus intimes de Linewcg étaient Mr. _Lezai—
Mamesia, préfet du Bas-Rhin, dont le souvenir vit en
core dans le cœur de tous les Alsaciens, et Mr. 0ber
lin, ce pasteur si connu du Ban de la Roche. Une
élève de ce dernier, formée sous ses yeux au Ban de
la Roche, était l’excellente épouse de Lineweg. Nous
aurons occasion de revenir sur toutes ces personnes
par la suite.
.. ' Comme ses bons et'pieux amis , Lineweg était lui—
même un homme pieux de la bonne souche. Une haine
du mal franche et sans détour, la vigueur de la jeu
nesse, la sagesse et la prudence de l’âge, tout cela
était empreint dans sa personne. Et l’on se souvient
encore en#France combien sa charité ingénieuse a
trouvé de moyens pour faire passer la frontière à nom
bre de victimes destinées à tomber sous la hache révo
lutionnaire,len les mettant' en sûreté sur les terres
d’Allemagne, souvent sans les connaître, et au péril
de sa propre vie; et conservant au milieu de tout cela
un tel sang-froid, qu’ayant une fois déguisé un célèbre
général en commis voyageur, il causa et disputa si
long-tems avec lui, à ’ w = du pont de Echl, sur des
i ' _ ,
._5__
articles de marchandises ne répondant pas aux échan—
tillons, que l’oflicier du poste lui—même, excédé de leur
sot bavardage , leur ordonna de pousser leur chemin et
de débarrasser le pont.
Pour l’intelligence complète de tout ce qui va
suivre, il faut encore savoir, que, pendant bien des
années, la maison de Lineweg était le lieu de rassem
blement de tous ceux qui cherchaient Dieu, dans tous
les pays, et le lieu de refuge de tous les malheureux
de la ville, où la source des consolations et des secours
ne tarissait jamais. Par ce long exercice de tous les
devoirs de la charité, l’épouse de Lineweg avait acquis
une douceur de manières vraiment angélique.
Peut-être néanmoins, ce qui pourrait mieux encore
expliquer les événemens particuliers qui ont en lieu au
sein de cette famille, qui ont un côté si sérieux, et dont
nous avons à faire part à nos contemporains, ce qui
pourrait donner la clef des choses extraordinaires que
la Providence y a laissé éclore, ce serait l’harmonie
admirable qui régnait entre les deux époux, le véri
table amour conjugal qui s’était conservé intact jusque
dans les glaces de l’âge, et qui avait changé pour eux
leur automne au printems de la vie. Mais qui pourrait
décrire cette fidélité, cette tendresse, cette paix, cette
inaltérable bonne humeur, qui faisait le bonheur de
ce ménage? les sentimens de Philémon et Baucis pour
raient seuls en donner une légère idée, si ces sentimens
étaient représentés comme purifiés, comme fortifiés et
annoblis par l’amour bien plus divin du SAUVEUR et de
tous ses Racheté5.
C’était une croyance généralement répandue à Ar—
gentine,que Lineweg était favorisé de terps ep terne
I à
_4_
d’apparitions personnelles du SEIGNEUII . Comme il s’est
tû à ce sujet pendant sa vie, nous n’avons pû véri—
fier‘le fait; mais à sa mort du moins nous eûmes des
preuves convaincantes de son amour extrême pour le
SEIGNEUR, et de l’amour parconséquent aussi que, dans
sa bonté infinie, le SEIGNEUR lui portait.
Un jour Lineweg fit avec nous une promenade
dans les champs, marchant comme à l’ordinaire d’un
pas ferme, et paraissant jouir d’une bonne santé; mais
tout-à-coup, en revenant à la porte de sa maison, il
nous déclara qu’il était dans l’impossibilité de monter
l’escalier. Nous l’aidâmes; il fit un effort; mais l’ha—
leine lui manquait, il étouffait. Arrivé dans la pre
mière pièce, il se jeta sur une chaise, et quand il put
parler, il nous dit avec calme: c’est une hydropisie
de poitrine. Cette indisposition soudaine devait le
conduire dans le monde spirituel; et ce moment solen
nel arriva au bout de quelques semaines. Il fallut de
grandes souffrances pour dissoudre la dépouille mor
telle de cet homme si plein de force; nous nous
abstiendrons d’en faire la relation. “W “NM
Nous remarquerons seulement que l’esprit du ma—
lade triompha toujours des souffrances du corPs‘t“ 'Li
neweg attendit la mort dans son fauteuil. Ayant't0u8
les membres couverts de plaies, et sentant déjà ’l’0n-’
nemi travailler au cœur, il conserva toujours’tm=vfl
sage gai, calme et résigné. Il ne put même s’empêcher
de nous chercher des yeux et de nous sourire en en—'
tendant les discours apprêtés d’un ecclésiastique qui
vint lui faire les visites que son ministère lui imposait,
et qui ne se doutait guère de la joie de son patient, et
de son ardept désir d’être réuni à son Sauveur: et à
_5_
l’heure où les siens se réunissaient autour de la grande
table placée devant lui, pour chanter les louanges de
Dieu et des cantiques d’actions de grâces, la voix du
mourant sé ranimait tellement, qu’elle dominait sou
vent pendant un quart-d’heure ou une demi-heure, sur
toutes les autres voix ;_ tant il était touché, et retrou
vait de force au souvenir de ses destinées immortelles.
Quand Lineweg se trouva tout près d’expirer, il
fit approcher de lui le jeune Gustavc d’Allemagne,
qu’il avait pris tout particulièrement en affection, et
lui donna sa bénédiction avec tant de chaleur et d’ef
fusion de cœur, que sa voix étoutt‘ait. Il lui mit au
doigt le bijou le plus précieux qu’il eût sur cette terre,
un anneau d’0berlin, garni de ses cheveux , et lui dé
clara qu’il reviendrait le visiter après sa mort, si le Smo
NEUR le permettait; puisqu’il avait plû à Sa divine pro
vidence d’établir entre eux un lien extrêmement étroit.
C’est par -là qu’il termina sa belle vie, le ’14 Fé
vrier 1855.
Maintenant, cher lecteur, les mémoires de ce même
Gustavc vous apprendront comment par la bonté in
finie du SEIGNEUR le coucher de ce bel astre, a été suivi
aussitôt d’un plus brillant lever.
S’il faut parler franchement, dit Gustavc en tête
de ses mémoires, je dois avouer qu’après la mort de
mon vénérable ami, je.ne pensais que bien rarement
à la promesse qu’il m’avait faite: je n’avais aucune idée
qu’il dût jamais m’arriver rien d’extraordinaire.
Je me rappelle seulement que dans un voyage que
je fis avec mon ami Chandani et ses enfans par une
partie de la Suisse, à une époque où des peines de toute
espèce venaient nous assaillir, je sommais en quelque
n__ê.n__«.______ L
__6..
sorte Lineweg dans mon intérieur, de venir me soutenir
par son courage, vu qu’il avait souvent passé lui
même par de semblables tribulations. — Et, en efl'et,
plus d’une fois, surtout quand il y avait quelque mon
tée, et que je suivais la voiture seul et à pied, le cœur
malade, tourmenté de tristes réflexions, je sentis di
stinctement sa présence et ses touchantes consolations,
et j’élevai au ciel des yeux baignés des larmes de la
reconnaissance.
Le jour de notre retour En Argentine , le 29 Juillet
1855, notre première course fut une visite dans la fa
mille de Lineweg. Dans le courant de la conversation
nous apprîmes qu’on n’y était point entièrement aban—
donné, et qu’on avait quelquefois des nouvelles du
cher défunt, Un ami de la maison‘), ayant les yeux
de son esprit ouverts pour le monde spirituel, etreçoit presque journellement pendant plusieurs heures
des conseils supérieurs pour la guérison de ses mala.
des, l’avait vu, au moment de sa mort, passer dans le
monde des esprits, couvert d’un long vêtement blanc,
serré sur la poitrine d’une ceinture bleue, et le visage
rayonnant de joie.
L’excellente veuve vint le lendemain nous remer
cier de notre visite: elle était accompagnée de Meue
Arma Lineweg, fille d’un frère du défunt. En les re
conduisant par le jardin, Chapdani qui marchait au
milieu d’elles, crut devoir leur demander, si elles
mc‘mex n’avaient point reçu quelque manifestation de
' 1‘”
*) Il est question ici de Jean Lin_k, ce médecin très-connu d‘Argen
fine et des environs, dont le portrait plus détaillé, sans doute
communiqué par un autre ami de Lineweg, a été inséré dans les
Feuilles de Prévorst. ; 'i '
_.7_
l’ami que nous pleurions: elles se regardèrent d’un air
embarrassé, comme si à peine elles comprenaient cette
demande. Chandani, pressé intérieurement, insista;
mais il ne put rien apprendre de précis.
Ce ne fut que quelques jours après, que (sans doute
sur un avis communiqué) elles furent plus courageuses
à me faire l’aveu de leur secret, pendant une visite. Mme
Lineweg me prit en particulier, et m’avoua qu’elles
avaient en effet des nouvelles du cher bienheureux, et
cela par Arma, qui de tems en tems avait une sorte
de ravissement, pendant lequel, par son intermédiaire,
le maître de la maison se trouvait présent; que par cet
organe nonseulement son époux, mais encore d’autres
bienheureux, et quelquefois le Sarcunun lui-même se fai
saient entendre; tandis qu’Anna personnellement ne sa
vait rien de ce qui se passait, ni pendant ni après la
communication faite, à moins qu’on ne le lui racontait.
De cette manierc, continua-belle, déjà pendant que vous
partiez pour votre pénible voyage en Allemagne, mon
époux nous avait dit: Il faut que je vous laisse main
tenant pour un tems, afin d’accompagner mon ami, et
que je le ramène en sûreté. Plus tard, pendant votre
course en Suisse, il m’a dit: Gustave, pendant son
voyage, a senti ma présence. —— Votre grand père, dit
elle encore, vous a aussi alors accompagné; car il jouit
également d’un haut degré de béatitude.
Ces simples données furent déjà pour nous un
baume salutaire, au milieu de nos peines et de nos lon
gues souffrances. D’où en effet, Chandani, dépouillé
comme il l’était, et blessé dans ses plus chères afl'ec
tiens, eût-il pu tirer quelque consolation, si ce n’est
du ciel? ‘
"8——
Cependant parla miséricorde du Surcsrun,nos cœurs
navrés, ainsi consolés, devaient puiser bien plus avant
encore dans cette nouvelle source de joie.
Le 7 août, à une heure dujour où je n’allais jamais
en visite chez Mme Linewcg, je me sentis intérieure
ment comme pgussé et entrâiné à m’y rendre; je cédai
à cette invitation et j’y allai.
A peine les salutations réciproques furent elles
faites, qu’Ar;na, jusque là fort éveillée, tomba dans
l’état mentionné de ravissement, état qui, après avoir
commencéparun légerbâillement, n’offrait d’autre carac- ‘
tère particulier que les paupières parfaitement fermées
et un treswif incarnat de la figure exprimant un degré
extraordinaire de paix, de bonheur et de bonté.
Mme Linewcg lui donna le bras, lui fit quitter le sa
lon, et la conduisit dans la petite chambre retirée du
défunt, d’où elle revint bientôt pour m’y conduire égale
ment. En y entrant je me sentis en quelque sorte placé
sur les confins de deux mondes, ayant d’un côté le sen.
timcnt de la joie de l’homme spirituel qui va voir et se
convaincre, de l’autre côté le doute de l’homme natu
rel qui se tient sur ses gardes et qui craint encore d’être
trompé. La circonstance extraordinaire me donna unîlé
gcr frissonl— Je m’assis vis à vis d’Anna qui se tournant
aussitôtvers moi, me parla ainsi: ou plutôt ce fut son oncle
défunt, mon immortel ami, qui me dit d’une voix claire
et solennelle, toutes les paroles qucje vais écrire, et que
ma mémoire me permettra j’espère de rendre fidèlement:
” Ton ami autrefois souffrant, et maintenant heureux
au delà de toute expression , est là. Oui , l’instant
désiré est arrivé; il m’est permis de te parler, de te
consoler et de te tranquilliser. Ne crains pas , crois
_9_
seulement. Ne crains pas au milieu de tes contrariétés
et de tes soulirances; il ne le sera pas dérangé un
cheveu sur la tête. Quelques peines que t’arrivent, ne
crains pas; attends et patiente; car c’est par ces souf
frances que le SEIGNEUR, qui t’aime, veut t’attircr de plus
en plus à Lui et en Lui. Les souffrances servent si
bien à la perfection, que je serais prêt à repasser
de nouveau par toutes les épreuves pénibles que j’ai
eu à endurer dans ma vie, plutôt que de dire qu’une
seule, même la plus petite, en ait été inutile. Toute
fois faut-il remarquer, que les peines ne sont pas aussi
utiles à tout le monde. Tu rencontres, en effet, souvent
dans le monde des personnes tourmentécs pendant toute
leur vie, de peines de toute espèce, et qui n’en devien
nent pas meilleures. Pourquoi cela? parce qu’elles ne
font jamais autre chose que se plaindre, sans recourir
à la prière, et sans se laisser attirer vers le SEIGNEUR. Il
ne s’agit pour toi que de t’attacher fermémcnt à ton
RÉDEMPTEUR par la foi, comme un enfant s’attache à
son père; alors tu pourras tout surmonter. Cependant
cette foi encore, tu ne peux te la donner toi-même; elle
est donnée par grâce à tous ceux qui la demandent
sérieusement. Tiens-toi donc uniquement attaché au
SEIGNEUR, la source d’eau vive, et Il t’éelairera et te fera
connaître de plus en plus sa sainte vérité. Pourquoi
chercherais-tu la vérité chez les hommes, et dans leurs
citernes crevassées? 0 mon ami! ne cherche point à
suivre les sentiers de ta volonté propre; ne tourmente
pas ton esprit par des subtilités métaphysiques; ne re
cherche point les plaisirs. Vis uniquement dans la sim
plicité de la foi au SAUVEUR, et demeure fidèle jusqu’à
la fin. (Outre les peines extérieures de la vie, j’avais en
_10_
core à combattre à cette époque, surtout sur une pro—
vidence particulière, des doutes qui me tourmeutaient
beaucoup, et dont je cherchais souvent à me distraire
par les distractions du monde.) Ton Rédempteur t’aime,
Il est toujours près de toi, et te soutient par la main
à chaque pas que tu fais, comme l’ange Raphaël con
duisit le jeune Tobie. (Ce tableau de Raphaël, qui se
trouvait dans une des chambres de Lineweg, m’avait beau
coup attiré.) Crois-tu que j’eusse pu supporter, moi,
toutes mes souffrances, surtout ma dernière et cruelle
maladie, si je n’avais pas eu cette foi ferme àmon
Rédempteur? Maintenant toutes les vérités auxquelles
je m’étais ainsi tenu attaché surla terre, je les vois, non
plus par la foi, mais de mes yeux. Rien n’est plus vrai ‘
que ce que le SEIGNEUR a dit: Partout où deux ou trois
sont assemblés en mon nom , je suis au milieu d’eux.
Quand tu étais chez moi, et que nous nous entretenions
de sujets de piété, le SEIGNEUR était toujours là. Comment
aussi mes paroles eussent-elles pu trouver un sol prêt
à fructifier, si le Dieu de toutes grâces n’avait point
été présent avec ses riches bénédictions? J’ai encore
beaucoup de choses à te dire, et je causerai souvent ici
avec toi, mais le proverbe connu, Trop est mal—sain,
demeure toujours vrai même encore ici; je m’arrêterai
donc pour le moment. Garde ce que je t’ai dit dans
un cœur bon et pur. Va, et sois sûr que ton BÉDEMP
TEUR t’accompagne; même quand tu te crois seul et
abandonné, Il est toujours à tes côtés.
,,Dans tes deux voyages j’ai été ton compagnon.
,, Encore un mot, priez pour vos persécuteurs, toi
et ton frère dans l’affliction, afin qu’en cela aussi vous
ressembliez à votre SAUVEUR. Priez ensemble pour eux;
..u..
cette prière portera certainement son fruit. Quand vous
ne les verriez point ici bas ces fruits, vous les verrez
plus tard. (J’avais justement la le chapit. 5, Vs. 44 et
suivans de St. Mathieu, avant de partir de chez moi,
où il est question de l’amour des ennemis; mais je
n’étais point entré, comme je le devais, dans ces senti
mens évangéliques. En général même j’étais porté à
négliger davantage la prière, à mesure que j’avais à
repousser plus de tentations intérieures et extérieures.)
,, Il te semblera que tu pars seul; mais d’aimables
amis t’accompagneront. Loué soit Celui en qui seul se
trouve le salut, JÉsus-Cnmsr, le SEIGNEUR, Amen. “
Tels sont les premiers discours de ce nouveau mes
sager du ciel, envoyé par le Roi des rois , après un si
long silence.
Je m’éloignai , à peine maître de mon émotion, et
accablé de tous les sentimens qui m’agitaient.
Mais le croira-bon? il me vint encore des doutes
sur la question de savoir, si, réellement, mon bien
heureux ami m’avait parlé? si ce n’était point une illu—
sion? Il ne fallut rien moins que plusieurs entretiens
consécutifs, pour m’ôter tous mes doutes. Mais ces
entretiens eurent lieu peu de tems après, et je m’accoû
tumai enfin entièrement à ce nouveau mode de
communication.
Du 9 août 1855.
Ce soir j’ai été au cercle de la famille Lineweg avec
Alfred Astio, qui était sur le point de s’en retourner à
Bâle, à l’Institut des Missions. Anna eut un ravisse
ment, et par elle nous entendîmes ce qui suit:
- Un vainqueur par la grâce de Jésus est là, et dit:
_12_
«Amis dans le SEIGNEUR, vous qui? l’aimez! Le
SEIGNEUR se manifeste à vous de bien des manières. Il
a mille voies ouvertes pour venir à vous, si vous vou
lez le reconnaître. Ne voyez donc que Lui dans tous
les accidens de votre vie, afin que vous Le trouviez.
Mes bien-aimés, la dernière heure est venue; veillez et
priez. Veillez, afin que votre SAUVEUR ne vous soit pas
enlevé, et que vous demeuriez fidèles jusqu’à la mort.
Conduisez-vous avec prudence et rachetez le tems, car
les tems sont mauvais. Je veux dire, soyez sept fois plus
vigilants que vous ne l’avez jamais été, afin de n’être
point ébranlés dans la foi et l’amour. Travaillez et
agissez dans le monde, non avec le monde. Beaucoup
de Faux docteurs et de faux prophètes sont là, et disent:
Voilà le CHRIST. Ne vous laissez pas séduire; et sur
tout ne croyez pas que le salut ne puisse point vous
échapper parceque vous vous trouvez au milieu de
chrétiens. Voyez cette ville si singulièrement favorisée
du SEIGNEUR (il entendait la ville de Bâle qui venait
précisément d’être teinte de sang fraternel, lors de sa
fameuse querelle avec les campagnes environnantes), à
laquelle Sa parole avait été si abondamment annoncée
par des serviteurs fidèles; elle a abandonné le SEIG
NEUR: elle dit maintenant: voyez, je suis riche, je suis
rassasiée; et elle ne sait pas qu’elle est pauvre etmisé
rable et nue. O priez, priez pour elle. La prière, voi
là la meilleure arme aujourd’hui contre les attaques
rasées du démon. Ce sont précisément ceux qui s’at
tachent au SEIGNEUR que le démon recherche aujourd’hui
avec ardeur, afin de les faire tomber. Mais, mes
bien -aimés, n’ayez d’autre souci que de vous tenir collés
au SEIGNEUR avec, une confiance Vraiment filiale; Il a
__15_.
le pouvoir de sauver. Ne perdez point courage, en
vous sentant faibles; seulement ne vous arrêtez pas;
allez toujours en avant, et eonjurcz le SEIGNEUR de vous
donner la force nécessaire; Il ne vous la refusera pas.
Comment, Lui, qui est mort pour vous, qui vous a sa
crifié sa vie, comment ne vous donnerait-il pas cette
légère force dont vous avez besoin? Avez-vous des
peines, même de grandes peines, jettez un regard sur
le Golgotha, et elles deviendront légères. Vous reste-t-il
quelque sentiment de haine contre un frère, jettez un
regard sur le Golgotha, et ce sentiment s’éfl'accra. Oh,
venez, venez auprès du SEIGNEUR, auprès de cet ami qui
versa son sang pour vous!
«Et toi, mon ami Alfred, tu te rends dans cette
ville du deuil, ah! prends avec toi le SEIGNEUR qui
t’aime; en vérité je te le dis, tu as besoin de Lui. Il ne
t’a pas seulement appelé; Il t’a aussi élu; pour que tu
devinsses un témoin fidèle de sa vérité. Tu auras en
core bien des combats à livrer; mais ne crains pas, tu
vaincras dans le SEIGNEUR. Aime seulement; apprends
il aimer, et tu auras tout appris. — p
uEt maintenant, mes bien-aimés, adressons une
prière au SEIGNEUR;
- SEIGNEUR Jésus! jette un regard favorable sur
cette pauvre petite assemblée ici présente, îsouillée, et
chargée de ses péchés. Nous venons à toi, et te prions
humblement de vouloir bien nous aiderànous purifier.
Et comme nous-’mêmes nous nous ménageons trop, viens
et redresse nos cœurs gâtés; ne nous épargne pas, quand
ces cœurs devraient saigner; ne cesse de les travailler,
jusqu’à ce que tout mal en soit extirpé? SEIGNEUR Jésus,
nous ne te prions pas de nous délivrer de nos souffran
_14_
ces; ce serait nous priver de tes bénédictions: fais
seulement que ces soulfrances servent à nous rappro
cher de Toi. Viensdemeurer ennous, afin que nous
devenions ta gloire et la récompense de tes humilia
tions et tes souffrances sur le Golgotba. 0 SEIGNEUR
JÉsus! lave-nous par ton sang, nétoie-nous de toutes
nos souillures; corrigesnous de toutes nos faiblesses,
afin que nous devenions tes enfans. Envoie-nous ta lu
mière, afin qu’elle nous éclaire, afin que nous brillions
de ses rayons, et que nous devenions lumière nous
mêmes, capables de nous éclairer les uns les autres.
Fais que nous aimions les pécheurs, et que nous haïs
sions uniquement le péché. Aide-nous à te suivre; dé
tache-nous de nous-mêmes et du monde, afin que nous
ne vivions plus que pour Toi. Délivre-nous de nous
mêmes, et fais que nous ne p0rtions d’autres liens que
ceux de Cumsr. Donne-nous un cœur reconnaissant;
afin que nous te glorifions par une vie qui te soit agré
able. Aie pitié de nous, et nous grave profondément
dans le cœur cette vérité que tunous as enseignée: ’)
Qui ne peut entièrement se dégager,
Mais le souhaite de tout cœur:
Le SEIGNEUR change son plaisir en peine
Et ses joies en douleur; ‘
Le Smoumm lui enlève un bien terrestre après l’autre,
Il lui enlève tout:
Heureux qui le laisse agir
Et lui abandonne tout avec plaisir!
*) Je n’ai pas cru devoir traduire en vers, ce qui est en vers dans
l’original: je ne suis point assez poète pour cela. Il eût d'ail—
leurs fallu dénaturer plus ou moins le sens; et il suffit de savoir,
que la poésie de l‘original est excellente. N. d. '1‘.
_45__
c Oui, SEIGNEUR Jésus , fais que nous t’ayons tou
jours devant les yeux et dans nos cœurs. Nous ne prions
pas quetu nous retires du monde; mais seulement que
tu nous préserves du mal dans lequel le monde est en
veloppé. Rends-nous fidèles; donne-nous d’être à Toi,
et de demeurer à Toi, pour la gloire de ton saint nom!
Amen. '
Enfin il ajouta : « Vous pouvez encore prendre
maintenant quelques miettes de la table du Summum;
car je vous donne l’assurance que mon ami n’arrivera
pas’ trop tard. » (Alfred devait être à dix heures à la
diligence.) Nous tirâmes alors au sort, de la boîte aux
sentences, les versets des saintes écritures qui y étaient
renfermés pour cet usage; et chacun en eut un qui parut
adapté à son état. Le mien se trouva être le 20“” Verset
du Psaume 55: Notre âme s’attend au SEIGNEUR, Il est
notre aide et notre bouclier.
Du M Août 1855.
(Un Dimanche.)
Pour mettre par écrit la prière précédente, ma
mémoire n’avait été fidèle que jusqu’à ces mots: Et que
nous haïssions seulement le péché. Le reste, je ne pus
en aucune façon me le rappeler; et j’en étais surtout
peiné à cause des vers. Mme Lineweg aussi regrettait
de voir cette lacune, pendant la visite que je lui fis au
jourd’hui. A mon arrivée Arma était au piano; nous
nous mimes à chanter, et arrivâmes ainsi au cantique
favori de Lineweg. En le terminant nous entendîmes
30udain un léger bruit dans la chambre; nous nous
regardâmes étonnés, mais Arma dit: Ah! il n’est pas
loin; j’en suis sûre. - Je leur racontai alors un songe
in
—16—.
remarquable que j’avais en quelques semaines aupara
vant. Voici ce songe: «Je me vis dans une grande salle
d’étude avec plusieurs de mes amis de l’université. On
voyait au mur un tableau qui ressemblait au portrait
du père de ma tante Piscatori, que dans ma jeunesse
j’avais en presque toujours sous les yeux. J’examinai
donc attentivement ce tableau dans mon rêve; et je re
marquai avec surprise que d’abord les yeux, puis dilI‘é
rents traits, et enfin toute la figure remuait. Je le fis
remarquer aux personnes présentes, qui semblèrent n’y
pas faire grande attention; tandis que moi, je ne pus
m’empêcher de continuer à l’observer; d’autant plus que
le regard sérieux et triste de la figure paraissait s’atta
cher principalemeut à moi. Enfin j’eus la force de lui
dire: Es-tu un être vivant de l’autre monde? -— Oui,
répondit-il. — Et qui donc? Il me dit alors un nom que
je n’ai pas retenu, sans doute son nom spirituel, ou le
nom de son esprit. ——Comment te trouves-tu de l’autre
côté? lui dis-je. — Pas bien; le SEIGNEUR a jugé, etje
n’ai point été accepté. (Je crois du moins que c’étaient
[à ses expressions.) — Veux-tu que je prie le SEIGNEUR
Jésus pour toi? — Oui, oui; ah! fais-le! s’écria-t-il aus
sitôt, et avec instance. En même temps , il me sembla
qu’une figure d’homme, grande et mince, habillée et
ornée selon la mode de notre pays, sortit de derrière le
tableau, courut à une chaise et s’assit. Sa tête était comme
enveloppée d’un brouillard; et il me dit, que je ne devais
point le voir. J’engageai alors quelques-uns de mes ca
marades que je regardais comme pieux, de vouloir aussi
prier pour lui; je m’approchai et les lui nommai, avec
quelques autres, en lui demandant s’ils ne devaient point
aussi prier pour lui. Non, s’écria—t—il, avec impatience, je
-17—
ne puis souffrir que tu me nommes , tantôt l’un, tantôt
l’autre de ces individus; il suffit que tu pries, toi, pour
moi. Alors je laissai tout;je me mis à genoux à côté
de lui à terre; et sentant réveiller en moi l’ardeur
d’une ancienne amitié, je me cachai le visage dans les
mains et le posai sur ses genoux. Après quoi je me
réveillai avec le sentiment pénible, que mon ancien
penchant pour une amitié humaine, qui m’avait causé
tant d’amertume, gagnait de nouveau mon cœur. Cette
conclusion du songe me chagrina. J’ajouterai ici, par
manière de commentaire, que dans l’ensemble de ce songe
je devais reconnaître mon ami Becher, mort depuis peu.
Déjà à l’école j’avais contracté à lui une amitié intime, qui,
de mon côté du moins, fut un attachement violent; car il
était labonté et l’amabilité personnifiée. Al’université
nous fûmes séparés, mais conservant toujours notre pre—
mier attachement. Il s’abandonna à tous les plaisirs du
jeune âge, sans toutefois manquer jamais à la vertu ni
à l’honneur, et il était aimé de tout le monde. Seule—
ment il paraissait s’occuper peu des choses immortelles.
Et dans cet état une fièvre chaude vint l’enlever. Je
pensais souvent à cet ami, et j’étais inquiet de son sort.
Ce songe, de plus, représentait assez fidèlement son
état; et pourtant je doutais que ce songe vint d’une
bonne source, à cause des circonstances qui le termi
naient, et je priais quelquefois le SEIGNEUR de m’éclairer
sur ce que j’avais à faire; car je craignais jusque-là
d’agir en conséquence. J’osai même demander au
SEIGNEUR de me faire savoir de manière ou d’autre si ce
songe était réellement de Lui D.
Pendant que je racontais, Anna entra dans son état
2
_18._
de ravissement: elle voulait d’abord se contraindre,
pour entendre le songe jusqu’à la fin; mais cela ne fut
pas possible, son esprit était absent. Nous la condui
sîmes dans le cabinet, et aussitôt Lineweg s’empressa
de parler:
«L’amour m’a pressé de venir à vous; vous avez
dû m’entendre arriver. Je viens principalement pour
donner à mon ami la fin de la prière, qu’il désire. Il
me dicta cette fin mot à mot ainsi qu’elle est rapportée
plus haut. Puis il continua. ” Je voulais aussi t’engager
à prier pour celui que le SEIGNEUR t’a montré en songe;
car tu le délivreras, comme un tison qu’on tire du feu,
et cela par la grâce et le secours du SEIGNEUR. Oh! que
bien-heureux est celui à qui il est donné de pouvoir
prier. .
«Écris maintenant ce que je vais te dicter:
,,Le Seigneur t’invite lui-même
De vouloir aller à lui;
Lui-même veut être ton maître,
Lui qui t’a reçu en grâce;
Donne-lui ton cœur, confie-lui tes prières,
Il pense à toi, comme un père,
Il veut être ton berger.
Ton sentier souvent est rude et rapide,
Mais jamais tu n’es abandonné;
Il t’envoie des peines pour ton salut,
Il veut te saisir en entier.
0! crois-moi, et ne crains pas;
Il tient toutes ses promesses,
Il est ton rempart.
Il est une lumière dans le sentier ténébreux
Pour tous ceux qui se confient à lui;
Il te remplit de la joie de sa face;
\
_49_
Tu verras de tes yeux son puissant secours.
Mais reconnais comme pure grâce
Ce que le Seigneur a fait pour toi,
Car en vérité ce n’est que miséricorde.
Donne-toi à lui en pr0priété,
Donne-lui ton cœur en entier et sans rescrve,
Demande l’esprit de Jesus,
Dans les joies comme dans les peines.
Alors tu apprendras
Combien il est précieux et doux
De porter son joug à sa suilc.
Reçois-le dans ton cœur tout entier,
Et laisse l’y régner en maître.
‘ Il veille sur tes sentiers;
Laisse-toi seulement conduire.
Si tu restes près de lui, il reste près de toi ;
Tu deviendras un joyeau de sa couronne
Et lui ton (éternelle) vie. Amen. “
.Il me dit de mettre éternelle entre parenthèses.
Ensuite il ajouta: «C’est une commission bien
douce que d’être envoyé pour le service de ceux qui
doivent hériter la vie éternelle. Prenez pour vous tous
ce que j’ai dit à l’un; ce sont des miettes de la table
du SEIGNEUR.”
En dictant ces mots: Il t’envoie des peines pour
ton salut, Arma s’arrêta quelque tems, ses traits expri
mant une grande satisfaction. Mme Linewcg lui dit:
N’est-ce pas, il est content? Oui, extrêmement, dit-elle;
car son vieux ami est là. Madame demanda si c’était
li... — Non, repondit-elle; c’est son compagnon de
voyage. -— Ah! votre grand père! me dit Madame avec
joie. — Oui, reprit la voix d’Anna; mais il n’est plus
vieux maintenant; il a rajeuni jusqu’à l’âge du SEIGNEUR.
2a
-20...
Il est extrêmement beau. Sais-tu qui il est? il est
chargé de tirer ta clochette")
Du 18 Août 1855 (au Dimanche).
En sortant de table j’allai chez Mme Lineweg. Je
lui parlai de notre projet d’aller demeurer à la cam
’ pagne, et notamment à Tz'gle’sIneîm. Elle me nomma
plusieurs demeures qui pouvaient nous convenir; entre
autres aussi la maison d’un ouvrier. Tandis que nous
en eausions, Anna, qui croyait aussi la maison susdite
convenable, tomba tout à coup dans son état de simple
instrument, et la voix dit:
«Ton ami est là. Je viens pour te conseiller dans
tes projets. Je savais bien que tu viendrais; car c’est
moi qui t’ai poussé à venir; et si tu ne fusses pas venu,
j’aurais donné le conseil à ma chère femme. Je lui ai
fait savoir hier soir que tu viendrais aujourd’hui.» (En
allant se coucher, Anna, en état d’extase, le lui avait
dit, comme elle lui disait souvent certaines choses con
cernant le ménage; mais Mme Lineweg ne lui en avait
pas parlé dans son état de veille, pour lui ménager une
surprise.) Pour ce qui concerne maintenant ton projet
d’aller demeurer dans ce village, je te conseillerais, et
le. SEIGNEUR lui-même par moi, d’aller ni à l’entrée ni à
l’autre bout de cette Sodome; car la colère du SEIGNEUR
pèse sur ce lieu impie. En particulier je ne puis te
conseiller la maison de N. . . . Car les mauvais esprits
y auraient puissance de te donner une maladie, ainsi
') Expression tirée de l’homme gris de Stilling, désigne,
je crois, les avertissements provenant de l’instruction par
l’Église. N. (I. T.
_21_
qu’à ton ami. Pour l’appartement que j’y avais. une
fois choisi, moi et ma chère femme, il serait absolument
passable; passable sous le rapport spirituel (il appuya
lentement sur cette expression); mais cet appartement
est humide, et ne vaudrait rien pour vous. (Madame
m’expliqua cela, en me disant qu’il se trouvait un puits
sous la principale chambre.) Si tu as prié le SEIGNEUR,
et si tu continues à t’adresser à lui, il te montrera une
demeure; il te la montrera sans faute, et même d’une
manière frappante, de sorte que tu la reconnaisscs; il
fera plus, il s’y rendra avec toi. S’il a fait le plus,
pourquoi ne ferait-il pas le moins, et n’aurait-il pas
soin de vous loger? — Oh! mets tanIlfiance en lui
comme un enfant en son père; il ne te porte pas seule,
ment dans les mains, il te porte dans son cœur. |
«Quelques personnes pourraient trouver étrange
que les bien-heureux s’occupent encore de ces sortes
de choses; mais ces personnes là n’ont pas encore ré
fléchi pourquoi le SEIGNEUR a fait distribuer par ses
disciples du pain et du poisson ‘). C’est par les bien
") C’est ici une allusion au sens spirituel du passage de
l’Evangilc en question. De la part de Lineweg qui pen
dant sa vie étaitgdemeuré généralement étranger à la doc
trine de la Nouvelle-Jérusalem et surtout à la connaissance
d’un sens spirituel particulierè chaque met, cette manière
d’employer ce passage nous frappa et nous surprit. Mais
bientôt nous nous dîmes: Pourquoi donc nous étonner?
ceux qui meurent dans le SEIGNEUR sont tous dans la
Nouvelle Eglise, et entrent parconséquent dans le langage
intérieur de la parole. Les nombreux rapports que nous
trouvâmes ensuite entre ses communications successives et
la science des correspondances, nous confirma entièrement
dans cette opinion. 2 D’après le sens intérieur des saintes
7’92—
heureux que le SEIGNEUR veut faire conduire les siens.
Oh! combien Il désire donner la nourriture et la boisson,
à ceux qui lui appartiennent, par l’intermédiaire de ses
bien-heureux! Combien Il désire leur donner par eux
des avis et des consolations. Mais, mes très-chers, vous
ne pouvez tout recevoir en une fois. Et même il y a
toujours douze panniers de restes ’). Mais ce sont là des
morceaux précieux que le SEIGNEUR ne donne qu’aux siens,
et que tout estomac ne peut pas supporter. Aussi ne les
distribue-t-on pas comme le pain quotidien, et ne les
donne-bon que de loin en loin,pour ranimer la vie et lajoie.
,,0 mes bien-aimés! S’il vous était donné de jeter
en ce moment un regard dans le hadès, ou l’univers
des esprits dégradés, et de voir que] trouble y règne,
vous seriez consternés; vous vous attacheriez à JEsus
plus fortement que jamais, et vous ne le quitteriez plus.
Ils savent là-bas que bientôt le jugement sera porté
sur eux, que le jour du SEIGNEUR est proche; c’est
pourquoi ils tremblent, ils frissonnent, et sont dans un
désordre affreux.
( Parmi ces esprits, les plus persécuteurs sont les en
vieux; ils ne peuvent souffrir que vous suiviez un meilleur
chemin qu’eux, et que vous atteignicz un plus heureux
Écritures les Disciples du Seigneur sont ceux qui se
trouvent dans le vrai par le bien, comme c’est le cas de
tous les bien-heureux (voy. Apocalypse expliquée, No.
405). Le pain et le poisson signifient du bien et du vrai ,'
c’est-à-dire des conseils pour la vie active (Apoc. expl.
No. 557, 553; — 280, 540, 515.)
‘) Douze panm'ers signifient la plénitude des trésors de
l’instruction (ibid. No. 548). Comparez Clowes Gospel of
Matthew, relativement au passage en question, Ch. 14,15—20.
_25_
but; et ils mettent tout en œuvre pour vous en détour
ner. 0 tenez-vous donc inébranlables à côté de votre
SAUVEUR. Là où est Jésus, là est le ciel, et non ailleurs;
et si Jésus était en enfer, le ciel y serait; et si Jésus
quittait le ciel, l’enfer s’y trouverait! Demeurez donc
en JEsus, et vous serez au ciel partout où vous irez;
ce trône de l’ETERNEL sera en vous. Conjurez-le de
vous accorder un ardent amour; car alors il sera en
vous, et les choses les plus difficiles vous deviendront
faciles et douces. — Il est impossible que vous soyez
entièrement exempts de souffrances tant que vous ne
serez point parfaits: — et s’il y a encore en vous quelque
mauvais penchant, il disparaîtra bientôt en présence de
cet amour. La charité est la reine du ciel; car la foi passe
quand la vue arrive; l’espérance passe également: mais
la charité demeure éternellement.
«Mes bien-aimés, si votre fardeau commence à
vous peser sur votre route, ne perdez pas courage;
avancez toujours sur l’étroit sentier. Si le chemin devient
rapide, ne voyez-vous pas votre salut sur la montagne
de Sion? Voyez l’agneau qui s’y tient, et vous fait un
signe amical: Venez, venez à moi! Le son de la
trompette vous crie de même: Venez à moi, pauvr‘es
malheureux, qui êtes chargés! et je vous soulagerai ‘).
«Mes bien-aimés, recevez le SEIGNEUR dans votre
cœur, car alors , quand vous paraîtrez devant le PÈRE,
') L’agneau signifie le SEIGNEUR quant a son humanité (Apoc.
révélée, 256). Le son de la. trompette vous crie. Dans
le monde spirituel de grandes vérités sont souvent annon
cées par cette voie; c’est le signe sensible d’une publication
importante et générale.
_24..
il ne vous abandonnera pas, il ne pourra vous abandon
ner, puisqu’il verra Jésus en vous. Il vous dira: Venez,
venez, enfans bénis, venez aux noces de l’agneau! Ve
nez toutes ses épouses, âmes innocentes et purifiées;
héritez le royaume qui vous est préparé depuis le com
mencement du monde! Venez, partagez maintenant la
gloire de votre époux, avec lequel vous avez en pa
tience un peu de tems, triomphez maintenant éternelle
ment dans le ciel. Amen. —
«Dites à ma chère femme de ne pas se ehagriner de
ce qu’elle n’ait pas pu prendre part à toute cette béné—
diction. L’époux de son âme est disposé à lui en tenir
compte d’une autre façon; et Il le fera. » (Elle avait été
forcée de s’absenter presque durant tout le tems de
cette communication.)
(Après une pause.) «Vous pourriez vous étonner
que je fasse toujours réveiller cet intermédiaire, qui
me sert d’organe, par ma fidèle épouse. Celui qui a
mis Anna dans cet état, pourrait bien aussi l’en tirer
sans aucun secours humain. Mais il est donné à ma
femme de contribuer, pour sa part, à cette bénédiction.
Quelqu’un de vous peut maintenant la réveiller. ” (Cela
5e fit d’après la formule arrêtée.)
Du 21 Août 1853.
Tout ce qui précède, je n’avais pu le mettre par
écrit que jusqu’à ces mots: Venez, épouses etc. Et
puis,\à la fin, il me manquait les mots, de contribuer
aussi pour sa part. Je fis donc aujourd’hui une visite
à Mme Lineweg; mais j’y rencontrai une personne de
connaissance. Je m’entretenais avec cette personne d’ob
jets de physique, quand soudain Mme Lineweg se retira.
-—-—25—
Je m’apperçus qu’il se passait quelque chose de par
ticulier, etj’eus (le la peine à continuer ma conversation.
Bientôt Madame revint avec Anna, et comme je voulais
prendre congé, elle me prit à part, et me dit que dans
l’intervalle son mari était venu, et qu’il avait dit qu’il
ne s'arrêterait qu’un instant; qu’il voudrait bien me
parler, mais qu’à cause de la personne présente, bonne
au fond, mais un peu bavarde, il remettrait la chose à
une autre fois. ,, Qu’on ne soit pas en peine des lacunes,
avait-il ajouté, tout cela se retrouvera“.
Du 25' Août 1855.
Chandani et moi nous vînmes ce soir chez Mme
Lineweg. Pendant la journée j’avais nourri le secret
espoir que Lineweg pourrait adresser quelques paroles
de consolation à cet ami souffrant, qui ce jour même
avait reçu de nouveau quelques tristes nouvelles tou
chant le sort de ses enfans; et cet espoir ne fut point
déçu. Anna entra bientôt en notre présence dans son
état extraordinaire, et Liueweg parla par elle avec une
ardeur et une énergie de zèle et de charité telles que
je ne les avais point encore rencontrées.
«Un racheté du SEIGNEUR, votre ami et votre frère,
est là. Son visage brille d’un reflet de l’amour divin.
--o Pressé par cet amour je viens à vous, mes bien
aimés, non pour vous dire que le SEIGNEUR vous aime:
votre propre expérience doit vous le dire tous les
jours. Votre propre cœur vous le dit, pour peu que
vous y soyez attentifs; Il travaille incessamment à ces
cœurs, et veut les attirer à Lui de plus en plus. Je
dirai seulement que vous ayez foi en Lui, le Maître
qui a été crucifié, qui est ressuscité, qui est monté aux
-26—
cieux, et est assis à la droite de Dieu; que vous ayez foi
au RÉDEMPTEUR qui reviendra, et cela bientôt. La foi
tient la clef du trésor des grâces; et plus vous y puise
rez par elle, plus vous y trouverez '.
Il se tourna alors vers Chandani, et lui dit ce qu’on
trouvera rapporté sous la date du 25 Août, parce que
je n’ai pu le compléter que ce jour là. — Quand il
eut fini, Arma se tourna vers moi, et la voix me dit
avec la plus douce charité:
«Et toi, mon cher, tu désirerais bien aussi avoir
quelque chose? je te dirai donc quelques paroles que tu
écriras sur les tablettes de ton cœur, bien que tu puisses
aussi te les marquer sur le papier si tu veux». Tandis
que je me préparais à écrire, il dit encore à Chandani:
,, C’est une bien grande joie pour moi, qu’il me soit
permis d’intercéder pour toi auprès du SEIGNEUR“.
J’étais alors prêt, et après m’avoir engagé à écrire
ligne par ligne, il me dicta les vers suivans:
Grave, ô JESUS, profondément ton nom
Et tout ton être dans mon cœur;
Plante—moi, comme ta semence,
Dans la bonne terre de ton champ.
Sois tout pour moi sur la terre et dans les cieux,
0 Père du SEIGNEUR Jnsus-Cnmsr.
Crée en moi, Esprit d’amour,
Simplicité, foi, charité, fidélité;
Enseigne-moi le secret
De ne point fuir la croix;
Perfectionne en moi ton œuvre:
Gloire, louange, gratitude à toi!
c Cherchez, et vous trouverez; ces paroles pourront
aussi s’appliquer à la circonstance'. -— Je considerai
__27._
q
‘
mes vers avec quelque timidité. Mule Linewegry jeta
un coup d’œil,“devina la petite surprise, et trahit le
secret. Je vis avec autant d’étonnement que d’attendrisse
ment que c’était un acrostiche, et que les premières
lettres représentaient mon nom. Mais ’qui peut peindre
la joie de l’ami bien -heureux, qui perça à travers la
figure d’Anna! C’était le principal plaisir du défunt
de ménager de ces innocentes surprises à ses amis. —
,,Maintenant, ajouta-t-il, épouse bénie du SEIGNEUR, tu
peux réveiller“.
Le fait est que nous fûmes tous profondément tou
chés. Nous racontâmes à Arma tout ce qui s’était
passé. Ces vers lui firent aussi un singulier plaisir; et
nous nous séparâmes enivrés des bontés du SEIGNEUR.
Le soir du mêmejour, avant le coucher, Lineweg dicta
encore à sa femme les vers suivans également acrostiches
dans l’original, et contenant ses noms à lui, en disant
que ce qu’il était juste de donner à l’un , pouvait être
équitablement accordé à l’autre.
,, Centre de toute félicité,
Alpha et Oméga, bien suprême!
Tu vins toi-même montrer le chemin aux pêcheurs,
Tu donnas ton sang pour de pauvres pélérins:
Oh! rends-moi reconnaissante,
Purifie-moi et je serai pure.
Voie, vérité, salut, vie;
Le ciel et la terre te glorifient!
Que les désirs de mon cœur
Ne se fondent que sur toi, bien unique!
Apprends-moi, JEsus, ta volonté,
Fais que je la remplisse avec joie,
Maintenant et à jamais. Amen,
_28l
Du 25 Âoût (un dimanche) d855.
Cet après-dîner j’allai dans la famille de Lineweg,
avec un grand désir de voir remplir les nombreuses
lacunes qui m’étaient restées dans mes dernières réla
tions. Je trouvai Anna chantant au piano; mais elle
paraissait si gaie et si éveillée, que je déscsperai de la
voir devenir en ce jour un simple instrument passif.
Je m’assis donc près de la chanteuse, et mêlai ma voix
à ses pieux accords. Nous éprouvâmes bientôt une
grande jouissance et une grande consolation. Mme
Lineweg qui vint se faire entendre aussi, fut touchée
jusqu’aux larmes. Il entra encore un autre monsieur,
qui avait été dans le tems un membre de la paisible
société du défunt; et il chanta avec tous les autres.
Nous choisîmes enfin le cantique chéri de Lineweg;
et une heure s’écoula de la sorte aussi vite que fait
d’ordinaire minute. Le moment d’aller à l’église était
venu; et Anna aussi bien que moi, nous avions résolu
de nous y rendre; car c’était Racther, le meilleur ora
teur de la Ville, qui devait se faire entendre. Malgré
cela, au moment même, je sentis quelque répugnance.
Anna déclara aussi qu’elle n’y irait pas; et en même
tems elle parut accablée de sommeil. Elle n’eut plus
que la force de me dire: ,, Si j’étais allée au temple, je
’ m’y serais endormie“; et elle passa dans le cabinet de
son oncle dans l’état complet de ravissement. Lineweg
était là, et dit à sa femme: Fais entrer mon ami. J’entrai,
et il parla ainsi:
1 Je viens pour dédommager ma chère femme de
la peine qu’elle ressent de ne pas pouvoir se rendre
au temple. Car le SAUVEUR sait bien que ce déplacement
-29__
lui serait nuisible. Je te l’ai de même dit à l’oreille,
mon cher ami, de ne pas aller à l’église. Nous nous
comprenions si bien ensemble sur la terre, pourquoi
ne nous comprendrions-nous plus maintenant? Et puis,
mes bien-aimés, nous pourrons aussi avoir notre office
divin entre nous. Mais avant, pensons à remplir les
lacunes. -
Pendant que je m’arrangeai, il dit à sa femme:
Il faut avouer, mon cœur, que ton veuvage t’est rendu
passablement doux. Assurément, répondit-elle, je suis
plus avantagée que bien d’autres. J’étais néanmoins
mieux encore, quand je pouvais prendre conseil à tout
instant. — Mais de cette manière, ajouta Liueweg, tu
me possèdes de même; et le plaisir en est plus grand
quand il est un peu plus rare. Le SElGNEUR t’a déjà dit,
tu le sais, qu’il ne m’a retiré pour un tems qu’afin de
m’orner et de m’enriehir mieux pour l’époque où je
te serai rendu. Sois donc tranquille, et remercie le
SEIGNEUR de ce qu’il te soit permis de lui faire ce léger
sacrifice.J’étais alors prêt, et il me dit: in Tu as dans ta
relation ce passage: « et si Jésus était en enfer, le ciel
y serait » : mais il te manque la phrase parallèle: 1 et
si Jésus quittait le ciel, le ciel se changerait en enfer I.
Plus loin tu as ces mots : uVenez, vous, enfants bénis,
venez aux noces de l’agneau! ; écris à présent le reste:
«Venez etc. » (Voir et comparer plus haut.) Comme
l’espace que j’avais laissé sur ma feuille me parut un peu
trop petit, j’allais commencer vers le milieu de la page
vis-à-vis. «Non, dit-il; continues là où tu es resté, en
serrant un peu‘. A cette remarque de détail je regardai
Mme Lineweg avec quelque étonnement. «Le lieu ni
2..
_50._
l’écriture ‘n’y font rien sans doute, ajouta-t-il aussitôt:
mais enfin c’est là la place de ce passage I. Et en effet
il s’y rangea très-bien.
Il m’indiqua de même encore ces mots: 4 de con
tribuer pour sa part à cette bénédiction» (voyez plus
haut). Puis il continua du ton de la plus tendre amitié:
.Voilà donc ce qu’il y avait à ajouter pour tout com
pléter. Tu as bien fait, mon ami, d’y faire mention de
la bénédiction de ma femme. -—- Le SEIGNEUR t’a fait don
d’une bonne mémoire. De plus tu avais la confiance que
tes lacunes seraient remplies, et tu vois que ta confiance
a été couronnée '.
Comme il me restait toujours encore une certaine
timidité à lui adresser la parole directement, je dis à
Mme Lineweg: «Je voudrais bien savoir ce qu’il y a
d’imparfait dans les paroles adressées à Chandani; il
y a là aussi des choses omises. Relisez-les une fois, me
répliqua-t-elle. Et comme je hésitais encore: Allons,
ajouta Lineweg, lis-les! C’est au nom du SEIGNEUR D. Je
me mis donc à lire, m’arrêtant aux endroits où je sup
posais des lacunes; il les remplissait aussitôt. Quelque
fois il disait: 1 C’est cela, bien; ou: Le sens est rendu,
c’est l’idée principale 1'.
Le discours qu’il avait tenu à Chandani, et que
je n’avais pas pu donner plus haut, était donc celui-ci:
l« Et toi, mon cher ami, que craindrais-tu? Qu’est
ce qui pourrait te donner de l’effroi? Les hommes, que
peuvent-ils te faire, quand le dieu des armées est avec
toi? Il est vrai, bien des tribulations t’ont atteint:
des peines, tu en as autant que tu en peux endurer;
mais réjouis -toi et triomphe , car ton SAUVEUR veut te
rendre son frère et s’unir à toi de plus en plus! Oui,
—5l.-— .
réjouis-toi et jette des cris d’allégresse, non de ce qu’il
t’a fallu, mais de ce qu’il t’a été permis d’offrir ton ;
Isaac. Publie avec des chants de louanges la gloire du
SEIGNEUR, et exalte son saint nom a toujours et à jamais!
,,Le SEIGNEUR t’a fait la grâce de te donner à Lui;
de déposer tes enfans dans son cœur de RÉDEMPTEUB:
sache donc que le SEIGNEUR les gardera; qu’ll les
environnera comme d’un mur de feu; et que tous tes
ardents désirs seront remplis. Aucune de tes prières,
aucun de tes soupirs ne seront perdus. Il les exauce selon
son infinie bonté, bien qu’il ne les accomplisse en ton
tems, mais en son tems. Ce que je fais, te dit-il, tu ne
peux le comprendre maintenant; mais tu le comprendras
plus tard.“ - (Ici il s’adressa à sa femme, et lui dit:
,, Tu te rappelles, mon cher cœur, combien de fois le
SAUVEUR m’a répété ces mêmes paroles pendant ma vie
. mortelle. 0 combien j’en sens maintenant la. vérité!“)
«Et quand tes enfans seraient entraînées pour un
tems vers les plaisirs du monde, quand ils recevraient
même quelquefois du poison au lieu de sucre; ne crains
pas , le SEIGNEUR sera toujours à leur côté, et les pro
tégera; il est plus puissant que tout. Il peut rechanger
le poison en sucre; et la prière, si tu continues à la
lui adresser avec ardeur et avec foi, formera véritable
ment comme un mur de feu autour d’eux. Confie-toi
uniquement à ton SEIGNEUR; il peut tout te donner; et
il veut l’enrichir de ses dons les plus parfaits si tu
l’aimes. Aime-le donc de tout ton cœur, non à cause
de ses dons, mais à cause de Lui-même, et uniquement
parce qu’il mérite un amour infini. Si la foi porte une
clef, la foi des enfans porte tout un paquet de clefs
pour arriver aux trésors célestes. Le SEIGNEUR a aimé
. “.32...
tous ses disciples; et néanmoins il a plus accordé à
Pierre et à Jacques qu’aux autres; et Jean a reçu plus
qu’eux tous. Il a moins parlé à Jean qu’aux autres; et
toutefois c’est à lui qu’il a découvert ses mystères les
plus importants. —- Sais-tu quelle est ta tâche journa
lière? Notre tâche à tous, c’est de nous détacher de
plus en plus de tout, afin de deVenir un avec le SEIG
NEUR. Donne-toi au SEIGNEUR entièrement, et sans aucune
réserve; dis-lui souvent: Vois, SEIGNEUR, devant toi,
un pauvre petitver de terre; prends-moi tel que je
suis. Aie pitié de moi; je ne suis rien, et ne puis rien
par moi-même; mais par toi je serai tout. Tu es mon
rocher, ma forteresse et mon désir. C’est à toi que je
me confie; éclaire-moi continuellement, et prends soin
de moi et des miens, selon ta miséricorde. Ainsi, mon
ami, rends-toi toujours plus intime avec Moi; alors tu
obtiendras la force qui te manque, de prier aussi pour
tes ennemis. Oh, prie pour tes ennemis! je te le dis de
la part de ton Maître et du mien! fais-le, et tu rassem
bleras des charbons ardents sur leur tête. Un jour
viendra que tu t’écrieras: Vous pensiez me faire du mal
à moi et à mes enfans, et Dieu l’a changé en bien.
Mais apprends à leur bien pardonner. Il y en a tant
qui disent: Je veux bien pardonner une offense; mais
je ne saurais l’oublier. Ne leur ressemble pas; ils
agissent contre l’am0ur divin, lequel ne peut point agir
en eux. Le SAUVEUR voudrait faire de toi quelque chose
de meilleur que cela. Oublie donc ce qu’ils t’ont fait.
N’est-ce pas? tu l’avoues; tu es bien aise aussi que
ton Rédempteur te pardonne tes péchés; qu’il les oublie
et les jette derrière lui? — Eh bien, fais donc de même
à l’égard de tes semblables. Pense que ton SAUVEUR
-55
sait bien ce qu’il en coûte de pardonner, et qu’il le
provoque à prier après Lui en disant: Pardonne-leur,
car ils ne savent ce qu’ils font. Sais-tu le nom de la
plus belle perle de la couronne de vie? elle s’appelle
amour des ennemis. -—- Toutefois, cher ami, ce ne
doit point être quelque motif particulier qui doive tc‘
porter à prier pour tes ennemis; ce ne doit être que
l’amour et la reconnaissance envers Celui qui t’assure,
en te choisissant pour disciple, que si tu prends le
SEIGNEUR pour Pasteur, il ne te laissera manquer de
rien. Rempli de cette consolante assurance, pars en
paix, je serai avec toi, dit le SEIGNEUR, je veillerai sur
toi; je serai ton protesteur, ton soutien! Pars en paix.”
Nous avions terminé notre travail relativement aux
lacunes restées dans le discours du 25 août. Alors Line
weg continua:
«Oui, je le répète, c’est une grande vérité, que si
la foi a une clé, la foi de l’enfance en a un paquet tout
entier. Même parmi les chrétiens les plus distingués
il y a aujourd’hui tant de préjugés: Vous irez. jusque
lll, disent-ils, et pas plus loin. Ils prescrivent ainsi à
la grâce divine un point auquel elle doit s’arrêter. Ils
s’arrêtent aux instrumens, au lieu de s’élever jusqu’à
la cause et à l’agent. Oh, de combien de gloire ces
chrétiens se privent et se priveront!
«Mais il viendra un tems, un tems malheureux tel
qu’il n’y en a pas encore en, et tel qu’il n’y en aura plus,
où la pure doctrine de l’Evangile disparaîtra presqu’cn
entier, où la publication de la vérité deviendra telle
ment rare, que ces chrétiens si distingués s’enquerront
d’elle avec anxiété, et se contenteraient alors même de
"
0
-54
l‘avoir de Panama de Balaam‘). Mais en ce moment
ils ne voient absolument que l’instrument; et demandent
s’il est convenable ou digne qu’on l’écoute, tandis qu’il
faudrait examiner directement ce qu’il annonce.
«Et toutefois, n’est-il pas vrai, mon ami, que
quand tu reçois un livre qui contient de bonnes choses,
tu ne t’arrêtes pas Iong-tems à la couverture? Tu ne
demandes pas avec quel instrument il a été coupé, avec
quel marteau on l’a battu? Tout cela ne t’inquiète
pas: tu ne fais que. lire ce qui y est écrit, et tu t’en ré
j0uism
Ici il s’arrêta un instant, comme s’il voulait une
réponse. Je ne dis rien; et il ajouta de nouveau avec
douceur: N’en est-il pas ainsi? A quoi je répondis
«oui, assurément», ' avec timidité.
«Il n’y a pas long-tems, mon cher ami, continua-t
il, que je demandai au SEIGNEUR pourquoi Il n’avait pas
permis plutôt que tu puisses être témoin de sem
blables rapports avec'le monde des esprits; quoique
tu fusses en état de les recevoir. Il me répondit: c’est
parceque je savais que tu lui serais bientôt enlevé de
la terre, et j’attendis jusqu’à ce moment.* Mme Lineweg
me dit à cette occasion, que plusieurs fois, dans ses
ravissemens (car il en avait pendant sa vie), son mari
avait demandé au SEIGNEUR s’il ne lui serait pas permis
de m’entraîner avec lui; et qu’il lui avait toujours été
répondu: Encore un peu de tems. Lineweg reprit:
‘) Selon la doctrine des correspondances le cheval, l’âne, le
chameau etc. comme moyen de voyager et d’explorer le
monde, indiquent le scientifique naturel.
N. du Trad.
_55_
c Aujourd’hui, à l’heure que vous appelez midi,
Oberlin et moi nous sommes allés sous le berceau
appelé le Berceau de Jésus, et nous avons chanté un
cantique de louange. Après cela nous nous sommes
rendus dans la vallée de Nazareth pour y faire une
instruction. J’y ai instruit, entre autres, ton ami, qui
fait beaucoup de progrès. Oh! il est si désireux d’ap
prendre! Le SEIGNEUR a exaucé ta prière pour lui; et
’ cette prière a réveillé dans ton ami le désir d’apprendre.
Il s’est beaucoup humilié. Et il porte maintenant le nom
de Timidus. »
Ici j’eus l’assurance de demander vivement: «Est
ce Becker? 1' Car bien que j’en fusse assez sûr , je n’en
avais pas néanmoins une assurance formelle. —— Oui,
me dit-il, c’est lui. L’Intercession réveille une certaine
contrainte et cette contrainte se change bientôt en un
désir d’appartenir entièrement au SEIGNEUR.
u Lorsque tantôt, reprit-il, vous chantiez les
louanges du SEIGNEUR, il y avait une légion entière de
bienheureux autour de vous. Cet exercice est comme
un aimant qui les attire. Quand vous louez le SEIGNEUR,
vous attirez à vous vos frères d’enhaut, et eux vous
’altirent de leur côté vers les régions supérieures.
« Oh! combien votre BEDEMPTEUR est fidèle! Il l’est
au-delà de toute expression : sa bonté surpasse infini
ment celle d’un père. Vous le savez bien; vous l’avez
éprouvé. —A mon égard sa fidélité a été inexprimahle.
Il m’a conduit par de rudes épreuves, parce qu’Il savait
que sans cela je me serais sans cesse éloigné de Lui.
Mais en ce moment j’aimerais mieux endurer encore
une fois toutes mes épreuves que de renoncer à la
moindre des félicités qui me sont arrivées par cette
51
_56_
’source des grâces. —Ah, ajouta-t-il avec une profonde
émotion, adressez-vous donc toujours à Lui! Dites—Lui
tout ce qui vous presse; parlez avec Lui comme un
ami avec son ami. N’est-il pas vrai que quandvous
vous entretenez avec un ami intime, vous ne cherchez
pas longtems vos paroles, vous n’étudicz point les ex
pressions dont vous dcvcz user pour vous faire com—
prendre? N’est-il pas vrai que vous lui dites absolu
ment tout ce que vous avez sur le cœur? —— Eh bien,
usez donc de -même avec cet ami, le meilleur de tous.
Dites-lui tout avec une simplicité filiale; et il vous
exaucera avec une bonté, un amour infini! Un enfant,
qui a conservé la véritable simplicité de l’enfance, confie
à sa mère tous ses besoins: eh bien, sachez que le SEI—
GNEUR est toujours encore la poule-mère qui appelle ses
poussins. Oh! pressez-vous donc de plus en plus sous
ses ailes et dans son sein: et vous éprouverez qu’il est
bon d’être là; et vous direz nous allons y établir nos ta
bernacles.
« Je l’ai déjà souvent dit aux miens, et je te le dis
de-même, mon cher-ami, ne crois pas que quand tu
demandes quelque chose au SAUVEUR, même la plus
petite chose, il ne t’exauce pas aussitôt. Le SAUVEUR
exauce chacune de tes prières. Ou bien il remplit aus
sitôt ton désir; ou bien, au lieu de ce que tu demandes,
il te donne quelque bien beaucoup plus précieux et
plus durable. Et de cette dernière façon , même le
Non dans la bouche du SEIGNEUR , devient un Ûui d’un
grand prix.
. Aujourd’hui, vers l’heure que vous appelez le
soir, je pars avec une grande légion de bienheureux
pour aller recevoir une épouse du SEIGNEUR. — Hélas, il
-—57—- '.
en arrive ici un si grand nombre qui ne meurent pas
comme celle-là. Mortels! ne croyez point qu’il y ait
une contradiction dans ces paroles: Le juste ne verra
point la mort, et toutefois le juste meurt 5 car c’est pré
cisément à l’approche de sa mort, que le juste cesse de
mouru’.
«Tu reçois ici, mon ami, une collection de pierre
rles ÿ, qui vaut plus que toutes les collections d’histoire
naturelle des environs.
«Et maintenant, mes bien-aimés, je m’arrêterai;
vous avez eu un repas assez splendide, nous continue
rons une autre fois.”
Pendant qu’il disait cela, des personnes revenant
du temple, se présentèrent dans l’antichambre. Mme
Lineweg se leva pour aller les recevoir: je lui témoi
gnai que je n’avais pas encore bien saisi le sens des
paroles relatives à l’intercession: Et il était important
pour moi d’être bien instruit sur ce point; ma prière,
je le sentais bien, ne pouvant avoir l’efficacité conve
nable que quand j’aurais bien compris la manière dont
elle opère. — Lineweg me dit donc: «Ton intercession
a pénétré jusqu’au SEIGNEUR, et elle a réveillé dans ton
ami le désir d’apprendre. Tu comprends alors que le
SAUVEUR a exaucé ta prière. Quand tu pries, c’est-à-dire
quand tu pries avec ardeur et piété filiale, le SEIGNEUR
se sert de cet ardent désir, de ce désir plein de vie et
de foi que tu manifestes, pour remuer et toucher celui
qui est l’objet de ta prière. Dis donc souvent en priant
pour cet ami: «1 SEIGNEUR, réveille en lui une pénitenc‘e
‘) Les pierres précieuses signifient des vérités tirées de la
parole. N. du Tr.
sincère 1'. Car il faut que tu saches une chose, c’est que
la pénitence devient trés-diflicile pour ceux qui sont de
l’autre côté. Le premier mouvement à cet égard, est
donc déjà un riche présent de la grâce *. (J’avais
demandé dans le tems au SEIGNEUR de savoir comme je
devais prier pour cet ami: ne pouvant jusque-là faire
autre chose que solliciter en général sa miséricorde en
sa faveur.)
Me Lineweg venait de rentrer: «Ma chère femme,
lui dit-il, fais passer ces personnes dans une autre
chambre, afin que mon ami puisse sortir sans gêne.
Il ne faut pas que l’ombre la plus légère tombe sur
mon ami; c’est le SEIGNEUR qui me dit d’en user ainsi ”.
Elle lui promit de le faire. «N’est-ce pas, répéta-t-il,
vous êtes richement pourvus de nourriture en ce mo
ment?” Assurément, répondîmes -nous; et Madame
demanda si elle devait réveiller Anua. Il y consentit,
et elle le fit.
Quand cette dernière fut rentrée dans le monde
matériel, je lui racontai toutes les choses qui nous
étaient arrivées par son intermédiaire; et je quittai la
maison sans être vu des visiteurs.
Du 28 Août 1855.
Nous n’avions encore arrêté aucune demeure. Melle
Palmettas, autre nièce adoptive de la maison Lineweg,
s’était mise en devoir de trouver un logement pour
Chandani, et les siens, parmi lesquels je comptais.
Celui qu’elle nous proposait, paraissait assez conve
nable, mais il ne devait être libre que pour Noël. Je
ne savais donc au juste que faire, pour ne pas aller
contre ce qui nous avait été conseillé le 18. 1‘ me
-59...
Lineweg fit la réflexion que probablement je devais
d’abord prendre un parti; que je ne pouvais recevoir
d’avis qu’après que je me serais décidé moi-même, afin
d’agir d’après mon libre arbitre qui ne devait point
souffrir de tout cela. Il y avait du vrai dans cette ré
flexion; mais je ne pouvais prendre de résolution dé
finitive, bien que mon choix penchât pour le premier
appartement proposé. Nous en étions là, lorsque tout
à-coup Arma tomba dans son état de ravissement; le
bien-heureux était là, et dit aussitôt à sa femme: ,, Donne
de suite du papier et une plume“. Puis il me dicta ce
qui suit:
«Celui qui est éternellement fidèle; Celui qui veille
à tous tes besoins avec une immuable attention, te fait
dire: Tu crois; c’est pourquoi tu verras. Celui qui
recherche avant tout le royaume de Dieu et sa justice,
celui qui regarde cet objet comme le principal, et s’en
occupe exclusivement, le reste lui sera donné comme
par surcroît. — C’est à dire que les choses moindres,
bien loin de lui être refusées, lui seront données libé
ralement. L’ami de ton âme, celui auquel tu t’es confié,
a soin de toi. Toutefois, tu sais qu’il agit lentement,
avec mesure, et qu’il conduit les siens par des voies
admirables “. — (Arma s’arrêta un instant en cet endroit,
et dit enfin à Mme Lineweg: ,, Ton fidèle époux est de
très-bonne humeur.“) — ,, Tu sais, mon ami, croire et
attendre sont étroitement liés, mais la confiance au SEIG
NEUR n’est jamais déçue. Parle avec ton ami, avec
l’ami de ton âme; et il te répondra; enfonce-toi dans
cette lumière, et tu ne resteras pas dans les ténèbres.
Fais ton œuvre avec fidélité, Il fera la sienne. Tiens
..toi seulement à ses côtés, comme son enfant; tu con
_4o_
naitras sa volonté. — Sois sûr que si ton SAUVEUR avait
voulu que tu fusses dans la demeure qui t’a été offerte,
tu y aurais été décidé. Reste donc tranquille, et con—3
tente-toi, en attendant, d’un autre appartement, pour
l’habitation duquel tu te sentiras intérieurement porté.
Fais attention au but de tes démarches; mais sache que
partout tu te trouveras sur le champ de bataille; car
rien de parfait ne se rencontre sur cette terre. Contente
toi, avec la grâce de l’ami de ton âme, de ce qui est
bon, en attendant que vienne le meilleur. Il y a , mon
cher ami, un grand sens dans ce peu de paroles. ——
Cherche; et tu y trouveras le SEIGNEUR et son appui.
Tiens-toi donc aussi satisfait de sa grâce, pour cette fois.
Ceci te servira de matière de réflexions. Reçois main
tenant quelque chose pour ta joie. Il faut que je te le
communique moi-même , sans cela la délicatesse de ma
femme t’en eût fait un mystère.
Il dicta alors l’acrostiche suivant sur le nom de
Mme Lineweg :
Cancan, 6 but des malheureux!
Tout te cherche, tout te désire;
La séparation produit ici une semence de larmes:
(Comme nous ne comprénions pas bien le sens de
ces derniers mots , sans toutefois le témoigner; il ajouta,
« Vous renversez le sens ‘), mes bien-aimés: c’est vrai
ment la séparation qui produit. ici la semence des larmes.
') En allemand effectivement le sujet et le régime ne sont
ici distingués que par le sens qu’on donne à la phrase.
C’est comme le /'uror ù-a brevis d’Horace.
_N. d. T.
-41_
Tu l’as bien éprouvé, mon cœur, n’est-ce pas? ' — C’est
bien vrai, répondit-elle.)
‘
Plus tard elle produira le ravissement céleste.
Médecin de tous ceux qui ont la maladie du pays,
Conseiller de chacune de nos pensées,
Jesus, c’est à Toi que je m’abandonne;
Reçois—moi pour l’éternité,
Ancre de mon salut.
c Voilà, ajouta-t-il, ce que la délicatesse de ma
femme t’aurait caché, bien que dans tout le reste elle
agisse avec une tendresse _ vraiment maternelle à ton
égard. Tu vois quelle trahison je commets moi -même
à l’égard de ma chère moitié.
«Maintenant, mes bien-aimés, le SEIGNEUR est avec
vous, et reste avec vous; demeurez aussi avec Lui, et il '
ne pourra vous arriver aucun mal. Amen. -—
«Si vous sentiez que l’inquiétude veut vous gagner,
rappelez-vous seulement ce qui est écrit: Le SEIGNEUR
est afl‘able et sa bonté demeure à jamais ‘). Alléluia;
Amen. Ma chère, tu peux réveiller.»
Du 50 Août 1855.
Chandani s’en étantremis entièrement à moi du choix
d’une habitation, je cherchai uniquement à diriger mes
démarches d’après les avis de Lineweg. Déjà auparavant
nous avions visité un appartement assez agréable dans
la rue d’Elisabeth; j’y retournai donc pour prendre de
') La bonté de Dieu est éternelle, signifie dans le sens inté
rieur, que tout ce qu’il nous envoie, toutes les destinées par
lesquelles il conduit l’homme, n’ont pour but que l’état
éternel de ce dernier, ou son éternel bonheur.
_42_
nouvelles informations. Mais la réponse, tant à cause
du prix qu’à cause des manières du propriétaire, ne me
donna pas précisément un grand désir de conclure un-'
marché; et en m’en allant je ne sentais plus aucun goût
pour ce logement, au contraire, je me sentis répoussé.
Nouvelle incertitude par conséquent. Tu dois entrer,
me dis -je, dans une maison qui t’attire, qui te plaise;
par là même ce ne peut être celle-là. L’appartement
d’ailleurs parait beaucoup trop. grand. Je me trouvai
donc de nouveau inquiet, ne sachant que faire. Tout à
coup je me rapellc que mon premier penchant m’avait
porté vers une maison, quai St. Jean, et à laquelle nous
n’avions renoncé que parce que le logement était trop
petit. C’est sans doute cette maison - là, pensai-je; il
faudra s’en contenter. J’y allai aussitôt, et je trouvai
que si je me décidais à faire ma chambre à coucher d’un
petit cabinet qui donnait sur le péristyle, nous aurions
suffisamment de place; et de plus p_n espace libre et
éclairé du soleil; en un mot une demeure tranquille et
'commode, bien que resserrée. Dans le moment même
les paroles de Lineweg me parurcnt si claires et mon
goût tellement en harmonie avec ce qui avait été dit,
que je ne conscrvai plus aucun doute. Le soir donc
j’allai chez Mme Lineweg, pour savoir ce qu’elle en dirait.
Il se trouva qu’elle pensait différemment. Elle croyait
que les paroles de son époux cadraicnt mieux avec l’ap
partement de la rue d’Elisabeth. Elle était ainsi à,m’ébran
fer, quand jetant un coup d’œil sur Anna, elle me dit:
[Je crois que vous allez avoir encore quelque avis ». «Je
le crois aussi, dit Arma; car il me semble que Monsieur
l’a amené avec lui». Elle se fit conduire dans le cabinet;
et aussitôt nous entendîmes ces paroles: u Ton conduc
-45\
teur est ici, et dit: Tu te trouves, mon ami, dans l’em
barras; le SEIGNEUR a dit: Je suis le conseil de celui
qui se fie à moi. Vois-tu, mon ami, ton confrère et toi,
vous êtes tous deux conduits par le SEIGNEUR. Lui, au
quel rien n’est caché, ne peut pas vous placer également
partout: il faut qu’Il fasse une différence entre les siens
et les enfans du siècle, bien que vous vous trouviez
partout sous la protection de l’ami de votre âme. Par
sa grâce vous êtes arrivés à la lumière; voilà pourquoi
les ténèbres vous contrarient souvent. Cependant ne
craignez point; la lumière de la gloire du SEIGNEUR perce
partout; et Il sera toujours avec vous. Il t’a été dit,
mon ami, que tu dois te c0ntcnter de peu; mais le con
seil donné n’a pas déterminé le lieu auquel tu devais
être restreint. — Le principal but de l’avis donné était
de t’apprendre que partout où tu irais, tu trouverais
quelque chose (souligne ce mot) qui ne conviendrait pas
bien pour vous. Ce n’est donc pas précisément ceci qui
doive préciser le lieu de votre retraite. Chère âme,
tout ce que je te dis, entends-le plutôt dans le sens de
la langue des esprits; que tu apprendras peu à peu. —
Ce qui a été également dit de l’attrait que tu y trouve
rais, ne devait point te lier exclusivement. Tu as du
reste encore le tems, bien qu’il soit court, de prendre
tes mesures; mais sois sûr que le conseil du SEIGNEUR te \
sera enfin connu. Tu sais bien qu’Il s’occupe du ver
dans la poussière, et lui donne sa nourriturejournalière:
comment donc pourrait-il refuser une retraite à ses élus?
Ainsi, mon ami, examine encore un peu, au nom du
SEIGNEUR; tu trouveras certainement ce que tu cherches.
Aussitôt que tu auras trouvé un logement qui te sem
blera convenable pour l’extérieur; et qui te plaira plus
_44_
ou moins; viens alors, et ton SAUVEUR, ton Protecteur,
te fera dire oui, ou non, par ton guide. Mais alors aussi
prends l’appartement tel qu’il sera. Tu es heureux,
mon cher ami, d’être un enfant; c’est-à-dire d’avoir la
simplicité et la confiance d’un enfant ; car tu verras le
Père dans le secours qui te sera donné. Va donc dans ta
foi; sois ferme, libre, sans contrainte et agis en tout en
présence du SEIGNEUR, et avec le SEIGNEUR. Si tu marches
avec Lui, Il marchera avec toi; et tu ne peux manquer
d’arriver à tes fins. Il est vrai que les croyans eux-mêmes
sont quelquefois portés à s’écrier: 0 Dieu, tu es vrai—
ment uu Dieu caché! Tu le sauras par expérience; le
SEIGNEUR dontlenom est1dmirable, laisse souvent attendre
long-tems; mais à la fin pourtant il porte toujours une
entreprise glorieusement à exécution. Il est certain que
si nul mortel ne savait plus te secourir, et qu’il n’y eût
plus de logement au monde, ton Dieu trouverait encore
des moyens, ton Dieu saurait encore te fournir une de
meure. C’est Lui qui prépare l’étable pour ses agneaux,
c’est Lui qui reçoit ses fidèles serviteurs dans son aire.
Il est toujours fidèle; il sera ton secours; il sera votre
secours à tous. Amen 1'.
Mme Lineweg me rappela que je pouvais encore
chercher un logement dans la rue sur laquelle donnait
la fenêtre de la chambre de son mari, et où il y en avait
de vacants. Je lui témoignai la crainte que cette rue ne
fût trop bruyante. Là dessus Lineweg observa que je
pouvais être dans l’erreur. «Crois-tu, dit-il, que si cette
rue avait été trop bruyante, ton ami y eût établi son
cabinet pour prier? Mais, comme je l’ai dit, partout tu
trouveras quelque contrariété. Je sonpirai: « console-toi,
ajouta-HI; ton soupir sera entendu ». Je cherchai 21 ex
-45
caser un peu ce soupir, en remarquant qu’une contra
riété suivait toujours l’autre. « Oh, s’écria-t-il, entre avec
joie dans l’école de la croix, car elle est l’école la plus
riche en bénédictions». «Ainsi, continuai-je, dans l’espoir
également d’obtenir quelque conseil, suis-je encore dans
l’embarras de savoir si je dois ou non faire un voyage
à la maison. Car je ne voudrais rien faire sans avoir
d’abord consulté la volonté du SEIGNEUR”. —- «Eh bien,
me dit-il, n’ai—je pas été ton conducteur dans l’autre
voyage? et l’ai -je été en vain? Je le serais aussi dans
celui-ci. L’intention et le but d’une entreprise y sont
beaucoup pour la réussite. Quand un enfant de Dieu
choisit telle ou telle chose pour son propre plaisir ou
sa propre satisfaction, il lui arrivera plutôt quelque mal,
que quand il ne suit que son devoir ou sa vocation. Du
reste, mon ami, nous pourrons encore en parler. Pré
sentes cette requête comme toutes les autres à ton SAU
vEUR; continue de Le solliciter; je ferai la même chose
de mon côté, ainsi que les miens; et certainement le
SEIGNEUR t’aidera ”. «Combien de fois, mon cher cœur,
dit-il en s’adressant à sa femme, tu le sais, combien de
fois ne t’a-t-Il pas laissée aussi te débattre contre des
souffrances prolongées ou des difficultés incessamment
renaissantes! et toutefois, à la fin Il est toujours venu
à ton aide, et cela au tems opportun. Oh! c’est un éco
nome exacte que le SEIGNEUR. Il dirait plutôt à la terre
de s’ouvrir et de vous procurer une demeure, que de
vous abandonner, Lui, l’ami de vos âmes”! — En ce
moment il sonna huit heures, et c’était l’heure du souper
de nos deux ménages. Il s’arrêta donc, et ajouta seule
ment encore à la hâte: «Vous savez, mes bien-aimés,
que l’ami de vos âmes a de l’ordre en tout, et qu’il tient
46—
aux tems et aux heures: nous ferons de même. Allez,
et Il sera avec vous. Alléluia. Amen ”.
«Voyez comme il entend encore tout ce qui se passe
sur notre terre! dit Mme Linewcg; jusqu’à la cloche de
notre vieille cathédrale. » « Oh! s’écria-t-il avec solennité,
oh! pourquoi chaque coup de la cloche n’est-il pas pour
tous les enfans des hommes un appel à veiller et à prier!
Les infortunés! ils aiment mieux les ténèbres que la lu
mière; mais malgré eux un jour la lumière luira! Mais
elle luira sans les éclairer! elle ne fera que révéler leurs
abominations; car ils s’enivrent tous du vin de la pro
stituti0n ‘). -— Mais, chère femme, il est tems d’éveiller.'
Du 51 Août 1855.
Pressé par ma charge de pourvoir au logement , et
n’ayant plus de repos, je sortis aujourd’hui de bonne
heure, pour visiter de nouvelles demeures. Je n’en trou
vais point: celle qu’on m’avait indiquée vis-à-vis des
fenêtres de Lineweg, avait été louée dans l’intervalle.
Je courus donc chez sa veuve pour chercher de nouvelles
adresses dans la feuille des annonces. Il ne s’y rencon
tra qu’un seul qui offrit quelque chance de pouvoir nous
convenir. J’étais sur le point de partir pour l’aller voir,
quand Anna donna les signes de l’extase; et le Bien
heureux rendu présent nous dit: «Le serviteur de votre
Maître est ici. (Je me préparai à écrire.) Puisque tu
') Il est question ici de la grande Tour de la cathédrale
d’Argentine, un des sièges les plus remarquables des évêques
de l’Eglise romaine: N. de l’Edit. (Il est inutile d’ajouter
que le vin de la prostitution puisse 'se retrouver dans toutes
les sectes: N. d. Trad.)
\
veux écrire, fais-le. Voici ce que le SEIGNEUR vous dit:
Bien-aimés, pour le moment vos épreuves ont assez
duré. Toi, mon ami, tu as fait fidèlement tout ce qui
dépendait de toi. Voilà pourquoi aussi l’avis te sera
donné. Tu dois te retirer de suite, mais seulement en
attendant (souligne ces mots), dans la petite chaumière.
Votre SEIGNEUR aura fidèlement soin du reste. Cela
durera peu; conforme-toi au tems. Dans ce moment il
faut savoir se contenter. Mais pour plus tard je t’an
nonce des choses meilleures.
'«Si tu avais trop froid, mon ami, dans ton petit
cabinet, tu pourrais bien pour ce peu de jours, faire,
comme on dit parmi les hommes, de nécessité vertu, et
établir ton lit dans une des deux chambres. Encore une
fois, ce n’est que pour peu de tems; car votre Maître
sera fidèle à penser à vous. — C’est, humainement par—
lant, une chose singulière que de si grandes personnes
doivent aller demeurer dans une si petite chaumière ‘)”!
Toutefois, il en est ainsi, et cela aussi aura son utilité.
Va donc, et au nom de Jésus termine cette affaire.
L’Eternel, toujours fidèle, a dit: «Il en est tems à pré
sent, et je veux retirer mes enfans de cette anxiété.
Fais donc ce qui est dit, mon ami, et le raconte à tous
ceux qui prennent un intérêt si vrai à ce qui touche des
enfans du SEIGNEUR comme vous. Ils ont souffert avec
vous, ils ont prié avec vous, ils pourront aussi se ré
jouir avec vous. Le SEIGNEUR vous accompagne. La
‘) Pour l’intelligence de cette remarque il faut savoir, que
le jeune Gustave est d’une taille bien audessus de la taille
ordinaire.
_48_
moindre des ehoses_alors vous sera agréable. Encore
une fois, va, ton Dieu est avec toi. Amen!‘
Profondément touché comme on peut croire, de ces
soins si paternels, qui entrent dans les plus petits dé
tails, je m’écriai: Hélas! que n’en sommes-nous aussi
plus dignes! — «Eh! que dis-tu? reprit-il; ne sais-tu pas
que le SEIGNEUR étend nuit etjour ses bras vers un peuple
infidèle et désobéissant? que ne fera-t-îl donc pas pour
ceux qui s’occupent de lui nuit et jour, pour ceux qui
l’aiment et le cherchent sans relâche? A ceux -là Il se
donne tout entier, Il leur donne tout ce qu’Il est et tout
ce qu’Il a’. — .
«Si le logement vis-à-vis avait encore été libre, mon
ami, je ne vous y eusse pourtant point laissé aller‘).
Des occupations indispensables avaient éloigné Ma
dame depuis quelques moments: quand elle revint il lui
dit: «Tu es encore une fois caissière aujourd’hui, au
nom du SEIGNEUR?‘ Comme je ne comprenais point ces
mots: il ajouta que c’était lejour où venaient les pauvres;
mais il aurait voulu que je ne fisse pas mention de cette
particularité. .Puisque tes mains ont béni les pauvres,
dit-il à sa femme, le SEIGNEUR te bénira aussi, et riche—
ment, sois en certaine. -— Maintenant réveille ’.
Du 1 Septembre 1855.
Notre bienheureux ami se trouva de nouveau au
milieu de nous, et nous parla ainsi:
«Un reflet du soleil éternel qui vivifie tout, est ici.
Béni soit le SEIGNEUR, dit-il, de ce que nous nous con
‘) Les propriétaires de cette maison étaient des personnes
ayant l’extérieur du chrétien, mais non l’intérieur.
-49_
naissions et nous aimions en Lui. Celui qui, tant que
nous sommes , ne nous a pas seulement appelés , mais
qui nous a élus , pour devenir et pour demeurer un prix
de ses indicibles tourments; c’est Lui qui pendant ces
heures de bénédiction de son jour de repos, veut ravi
ver vos âmes par son amour ineffable et sa paix qui
pénètre tous les cœurs. Il vous salue donc, mes bien
aimés dans le SEIGNEUR, par ce salut d’amour: Que ma
paix soit avec vous! O mes bien-aimés! ouvrez bien au
large les portes de vos cœurs , afin qu’y puisse entrer
le Roi de gloire, le Prince de la paix. 0 mes bien-chers!
sacrifiez tout, tout sans réserve, afin de le posséder,
celui qui veut être à vous: ne craignez pas, c’est l’amour,
la vie, le bonheur, qui veut entrer chez vous et remplir
votre être. Qui eraindrait un doux agneau, une douce
colombe? Ouvrez donc, ouvrez votre maison, afin que
le salut y entre. C’est la Charité qui se communique à
vous, qui se communique à tous les hommes: et qui
donc oserait demander des explications à cette reine du
ciel; qui oserait se présenter devant elle et lui dire:
Pourquoi en uses -tu ainsi? pourquoi te donnes -tu à
celui-ci, et à celui-là? Rappelez-vous, mes bien-aimés,
que le SEIGNEUR est Roi, et qu’Il agit selon son bon
plaisir; qu’Il donne son esprit à qui il Lui plaît, et qu’Il
déclare sa volonté quand et où il Lui plaît. Que l’envie
se retire de sa présence, que l’avarice Le fuie, et que
celui qui vient pour Lui demander compte, tombe sur la
face en sa présence.
Sachez-le , la fin est proche
Tout va être renouvellé ;
Les choses anciennes passent,
_50_
L’Amour et la Fidélité restent;
Humiliez-vous devant le SEIGNEUR ,
Et soyez petits à vos propres yeux;
Petit troupeau de la croix
Vois Iuire déjà l’étoile du matin.
« Bienheureux l’homme qui se confie au SEIGNEUR,
bienheureux est celui qui s’abandonne au SAUVEUR du
monde! En vérité je vous le dis: encore un peu de tems,
et le SEIGNEUR se montrera à découvert; Il se montrera
en puissance et en majesté, pour sa propre gloire, à
la joie des bons et à la terreur des méchants. Bientôt,
mes bien-aimés, la Justice demeurera sur la terre,
l’Amour et la Fidélité se rencontreront, la Justice et
la Paix s’entrebaiseront. Bientôt arrive l’époque tant
désirée, où le loup s’ébattra avec l’agneau, où l’enfant
à la mamelle jouera avec le basilique. Qui donc ne se
réjouirait, de tous ceux qui aiment le SEIGNEUR , qui
attendent sa venue? Qui ne soupirerait après cette douce
paix, qui verra disparaître la ruse et la fraude, l’injus
tice et la haine, la persécution et la violence? Oh! pa
tientez, mes amis, patientez encore quelques moments;
je sais que l’époux se hâte, l’amour et les soupirs de
l’épouse le pressent, tout se prépare pour le dernier
combat; les moissonneurs ont reçu leurs ordres, les
anges de la mort sont en activité; de tous les points
du champ de bataille s’élève ce cri retentit par les
cieux: SEIGNEUR JEsus, viens bientôt! Oh! mes bien-aimés
dans notre SEIGNEUR et notre ROI, encore quelques in
stants:
Et le combat est terminé:
Restez donc aux mains de Jésus,
Elevez vos têtes et réjouissez-vous,
Le règne de votre Epoux commence.
_51_
«Oui, mes très-chers, le SEIGNEUR sait que le juste
souffre beaucoup sur la terre: mais cette terre, elle passe,
et avec elle tous les combats de la vertu, tous les cris
des malheureux, et les larmes des ceux qui soupirent
après Jésus. Elle s’approche, mes bien-aimés, elle s’ap
proche, l’heure de la délivrance, pour tous ceux qui ont
la maladie du pays, à cause de l’absence de l’époux de
leurs âmes. Soyez dans la jubilation, Rachetés du SEIG
NEUR, car votre rédemption s’approche: car bientôt, oui
bientôt, Chrétiens et Juifs, Payens et Turcs, Nègres et
Blancs, Grands et Petits, Biches et Pauvres, Maîtres et
Serviteurs, entonneront un seul cantique de louange, et
chanteront d’une voix unanime I’Alléluia de l’Agnean
immolé dès l’origine du monde. — Qu’est ce qui passe
et qui périt, mes bien-aimés? — N’est-ce pas le monde
avec ses folles joies? — Et qu’est-ce qui demeure éter
nellement? — N’est-ce pas le ciel, avec ceux qui font la
volonté du Père, lequel est un avec Jésus-Cumsr, auquel
appartient la gloire à tout jamais? — Ce sont là les
amis et les parents du SEIGNEUR, sa mère, ses frères et
ses sœurs. Oh! mes bien-aimés, si vous pouviez sentir
le bonheur ineffable qu’il y a de se sentir intimement
allié à l’éternel amour, d’être attaché, lié au SEIGNEUR, et
son prisonnier! Oh! choisissez par la suite le Rédemp
teur pour être la voie de votre vie , cette voie qui con
duit ?! la vérité et à la vie; vous ne vous en répentirez
jamais. Oh! aimez le SEIGNEUR Jésus par-dessus tout;
c’est par expérience que je vous parle: Quand par grâce
il vous sera donné de le voir face à face, alors vous
verrez que le ciel avec toutes ses lumières, que les sé
raphins, les chérubins, que la gloire des vingt -quatre
vieillards, l’auréole des apôtres, les anges de tous les
4e
cieux à la fois, ne seront plus rien, et que vous ne ver—
rez que la beauté unique du Martyr de votre rédemption,
de la Victime de votre pardon. C’est moi, vous dira-t-il,
le Dieu triple et unique; et les rayons de la gloire de la
sainte et adorable Trinité vous pénétréront entièrement;
le côté du SEIGNEUR, ses mains, ses pieds, annoncent aux
cieux des cieux que le SAUVEUR vit, et qu’il vit pour les
siens! Aucune langue humaine ne peut décrire l’amour
de la beauté incréée; recevez-le donc, et l’expérience fera
votre félicité; que cet amour vous pénètre tout en
tiers; désirez ardemment lui appartenir, et tout vous
appartient sur la terre et aux cieux.
Oh! jubich avec moi, et louons le SEIGNEUR avec joie,
Il l’a dit, il tire nos cœurs en haut:
Et ce qu’il dit, Il sait aussi l’accomplir;
Suivez-Le, Il vous conduit à son Paradis.
Qui pourrait fermer son cœur à un tel amour?
Ne connaissons donc que louange et gratitude.
Recevons-Le, et tous les dons avec Lui.
Pour vous il a répandu tout son sang,
Pour vous ses larmes ont coulé.
Pour vous il quitta le sein du Père.
Devenez petits, et en lui vous deviendrez grands.
S’il vit en vous, vous avez en vous la paix,
Et avec elle tous les trésors de la terre.
Amour, Paix, lien adorable,
Heureux celui qui a trouvé la Perle de‘Cnmsr! .. ..
Que de couronnes le SEIGNEUR a réservées,
A celui qui s’attache à Lui dès maintenant;
Il est son bouclier, il est sa récompense,
Il l’attire avec Lui sur un même trône. .
Par sa grâce moi-même je suis bienheureux; _ ’ ' "
Il m’a reçu dans l’ordre éternel de Sion; . . ‘.
Il est la Voie, la Vérité, la Vie, . . ,' . ;.,, _.
Il s’est donné à moi, entier et sans réserve. ‘ .
_55_
Oh! jubilez avec moi, exaltez l’agneau, la victime;
Vous aussi, Il vous attire, et bientôt vous possédera;
Arrivez, arrivez à son sanctuaire
Et, d’une seule voix, nous chanterons tous sa gloire. Amen.“
Il s’arrêta un instant, puis il termina par ces mots:
«Vous y ajouterez quelques miettes du Testament de
l’amour du SAUVEUR”.
Le 2 Septembre 1855.
Je devais aussi recevoir des. avis touchant mon
voyage; mais ceux-là vinrent d’une source à laquelle je
ne m’attendais pas. Je les reçus par Henri 0berlin, fils
du célèbre Pasteur du Ban de la Roche. Il avait déjà
précédé en 1817, son excellent père, qui ne mourut
qu’en 1825. Je n’avais connu aucun des deux person-Â
nellemcnt, mais j’avais pris beaucoup d’affection pour
eux. La personne du père, et sa conduité dans sa pa
roisse , m’avaient déjà beaucoup attiré quand j’étais
encore à Ebertsbrunn, par la lecture d’une petite notice
publiée sur lui par Schnbert. Au commencement de
mon séjour ici à Argentine, je ne pouvais me rassassier
d’entendre parler de lui. J’avais en quelque sorte dé
voré les détails de sa vie; et l’image de cet homme s’était
imprimée dans mon imagination bien plus profondément
que celle de tous les autres grands hommes dont parle
l’histoire. Avec quelle joie, et quel étonnement j’appris
donc auj0urd’hui par Mme Lineweg, que pendant tout
le tems que je lisais ici la vie d’Oberlin écrite par Stœber,
l’excellent pasteur avait été incessamment à côté de moi,
pour m’impressionner des sentimens qui -l’animaient sur
la terre, ainsi que lui-même l’avait déjà fait savoir dans
_54_
le tems à la famille par l’intermédiaire de L . . . que c’était
pour cette raison queje l’avais sibien compris ; et qu’enfin
dans la famille on avait souventsouri avec émotion quand
on m’entendait parler du pasteur avec tant de feu. Elle
ajouta, que pendant que j’avais lu les ouvrages d’Anne
Bourignon qu’0berlin avait aussi beaucoup goutés, il
avait été également près de moi pour exciter mon intérêt.
Il est très vrai que la vie et la doctrine de cette femme
m’avaient de même singulièrement étonné, et éclairé sur
bien des points.
Le fils donc de cette ancienne connaissance dont je
ne me doutais pas, savoir l’être qui sur terre avait été
Henri Oberlin, vint parler à notre chère veuve, par l’inter
médiaire d’Anna, pendant que Lineweg se trouvait à
remplir une commission de la part du SEIGNEUR à Madrid.
Après l’avoir puissamment consolée elle-même, il lui
avait dicté pour moi ce qui suit:
«Mon cher frère en notre SEIGNEUR JEsus-Cnmsr, au
quel est la gloire aux siècles des siècles. Amen.
«Comme tu es un objet particulier de l’intercession
de mon père, nous aussi nous sommes liés d’une ma
nière particulière; c’est pour cela que notre Maître m’a
fait la grâce de pouvoir te donner conseil sur l’affaire
pour laquelle tu as sollicité ses lumières. Le SEIGNEUR
t’a béni en te donnant une grande simplicité de cœur;
donne-lui toujours ton cœur avec cette simplicité; et
certainement tu ne manqueras pas la bonne route.
« Tu demandes de la lumière, elle te luit; tu sollicites
un avis, le voici: si notre Maître à tous trouve bon de
prolonger encore la saison froide (il était tombé de la
neige dans les montagnes), il t’est conseillé au nom de
Dieu de renoncer à ton voyage. Quoique le mouvement
te serait très-utile à cause de la complexion sanguine
de ton corps, le voyage ne te serait point favorable
néanmoins en ce cas. Mais s’il plaît au SEIGNEUR d’envoyer
un peu de chaleur, ce qui sans doute doit être aban
donné à sa seule sagesse, alors mets-toi en route avec
courage; ton Dieu sera avec toi, et ton bienheureux et
fidèle ami t’accompagnera. O que bienheureux est celui
qui connaît le SEIGNEUR, et qui marche dans ses voies!
Demeure en Lui, afin que dans un bonheur commun, il
nous soit donné de comtempler ce SEIGNEUR éternelle
ment. I{emercie le SEIGNEUR de sa grâce; c’est à Lui
qu’appartient toute la gloire. Alléluia. Amen»
Du 4 Septembre 1855.
Tourmenté de différentes tentations, j’allai ce soir
chez Mme Lineweg; je lui demandai de nouveau ce qu’elle
avait reçu elle-même de Henri Oberlin; car à cette oc
casion elle‘ m’avait encore donné à lire un autre écrit,
et je désirais les emporter tous deux pour les copier.
Elle répondit avec quelque hésitation; car elle avait
remarqué qu’au même moment Arma passait peu à peu
à l’état de ravissement. Lineweg, en effet, était présent;
et sur la demande de sa femme: depuis quand es-tu de
retour? depuis environ ce que vous appelez une heure,
répondit-il. Je ne pus cacher la joie de pouvoir l’entendre
de nouveau, après un tems qui m’avait paru si long; et
de son côté, ses paroles semblaient de même tout de
feu, animées par la joie de se retrouver au milieu de
nous. En s’adressant à moi après s’être fait connaître
par ces mots: Ton fidèle compagnon est là, il ajouta:
Pour salut du soir, apprends que tu auras tout ce que
tu désires écrire. Je me doutais bien, remarque Mme Li
56
‘neweg, qu’il aurait à dire quelque chose à cet égard:
vous poiivez vous flatter d’avoir un ami vigilant. -—
-Celui, ajouta-t-il, qui est l’enfant du SEIGNEUR, le SEIG
NEUR lui est père. Vous savez qu’il est écrit: L’humble
reçoit la grâce. Tu désires sans doute aussi savoir, ma
chère femme, quel était le but de notre visite àMadrid?
Ton désir sera également satisfait. Il y avait là un ex
cellent enfant du SEIGNEUR horriblement tourmenté de
doutes que lui suggérait l’auteur du mal. Nous fûmes
donc envoyés pour fortifier cet enfant, pour l’encoura
ger, et lui donner des solutions satisfaisantes sur les
questions à l’occasion desquelles il était si fort travaillé
dans son esprit. Le SEIGNEUR bénit cette œuvre, car elle '
était entreprise en son nom; et nous fûmes, à plusieurs,
favorisés de cette grâce. Il est étonnant de voir tout
ce que le démon suscite d’obstacles à ceux qui cherchent
Dieu!
Moi aussi, je me plaignis à cette occasion de tout
le mal qu’il me faisait. Alors le Bienheureux se tourna
vers moi et dit: «Sais-tu, mon ami, quel est le meilleur
moyen, et le plus court, d’éloigner l’adversaire? Le
SAUVEUR lui-même t’a laissé pour cela son exemple. Quand
il a été tenté, il n’a point fait de longs discours, Retire
toi, Satan, s’est il contenté de dire. Ne disputes donc
pas non plus longtems avec lui; prononce seulement
les mêmes paroles avec une ferme foi. Plus une âme
s’abandonne au SEIGNEUR et veut lui appartenir, plus le
démon la tente , mais ne crains pas, le SEIGNEUR est plus
fort. Un seul soupir adressé au SEIGNEUR fait trembler
tout l’enfer. La prière est la meilleure arme, celle qui
frappe l’ennemi le plus efficacement. Chaque enfant de
Dieu, sans exception, a ses tentations, ses combats, ses
_57_.
passions, des attaques de toute espèce à repousser: heu
reux celui qui se jette dans les bras de JEsus. Il est alors
en sûreté; avec Lui, avec le puissant vainqueur, il
triomphe du monde et de tout ce qui est dans le monde.
— Si la crainte et l’inquiétude veulent se glisser dans
ton cœur, rapelle-toi encore cette vérité contenue dans
le trésor de la parole de Dieu: Là où’ le péché abonde,
la grâce de Dieu abonde encore davantage. Que eette
grâce soit ta conductrice, et tu triompheras; et tu rem
porteras le prix de ta foi, savoir le salut de ton âme. 0
mon bien-aimé! ne te laisse ravir, ni par un ami ni par
un ennemi, le moindre accent de la parole de Dieu; ne
la laisse attaquer ni affaiblir ni ébranler en rien. Le
SEIGNEUR, le SAUVEUR, Lui, l’éternelle vérité, n’a sans
doute besoin d’aucun garant étranger; mais c’est une
grâce qu’Il me fait en ce moment d’oser te confirmer
la glorieuse sainteté de l’ancien et du nouveau Testa
ment depuis le premier mot jusqu’au dernier '). Aussi
vrai que Jésus notre SEIGNEUR et Roi est vivant, aussi
vrai est chaque lettre qui s’y trouve écrite.
0 parole chère et inappréeiable, sois toujours mon unique
trésor
Que mon cœur lui soit toujours ouvert, et qu’il la reçoive tou
jours comme telle.
Qu’elle soit mon plus fidèle compagnon, elle me conduira dans
ma vrai patrie, '
Elle m’enseigne la patience sur une route semée de croix et
d’épines.
‘) Savoir, de tous les livres vraiment inspirés et qui se re
connaissent par le sens intérieur et spirituel.
N. (1. T.
_58_
«O mes bien-aimés, l’état de cette âme dont nous
parlions, confirme encore cette vérité que La tentation
rend attentif à la parole. Cette pauvre âme était sur
le point de s’arracher la vie; une vie qu’elle ne s’était
pas donnée! et de s’abréger par-là le tems de la grâce.
Voilà jusqu’où le Teutateur l’avait troublée. Mais le
SEIGNEUR dit: Jusque là, et pas plus loin. Oh! bien—
heureux, éternellement bienheureux, l’homme auquel
il est permis de servir le SEIGNEUR! Les anges du ciel
qui jouissent d’une félicité et d’une gloire si immense,
font leur plus grand bonheur de pouvoir agir en sér
viteurs. Et, chose étrange! les enfans des hommes se
donnent partout du mouvement pour être les premiers,
pour être servis; et ils se tourmentent pour se rendre
malheureux les uns les autres, au lieu de s’aimer dans le
SEIGNEUR,et de s’adoucir mutuellement leur séjour dans
la vallée des larmes! Quelle folie! —
«Tu aurais tort, ma chère femme, de croire que je
ne t’ai pas visitée dans l’intervalle de ma course; car,
mes bien-aimés, nos voyages ressemblent à vos pensées;
je n’ai qu’à vouloir, et je suis aussitôt près de toi. —
Ne t’inquiète donc pas aussi, mon ami, si je t’accom
pagne dans ton voyage; ma femme ne sera pas abandon
née pour cela. Toutefois vous savez que l’amour aime
aussi les privations)
Il faut savoir qu’un instant avant le ravissement
d’Anna, j’avais témoigné àMme Lineweg, qu’un des mo
tifs qui s’opposaient àmon voyage était aussi la crainte
de lui enlever son bon ange. Je lui avais répété la même
chose _à l’occasion de quelques paroles de son époux; mais
elle m’avait dit: Que cela ne vous retienne pas; vous
voyez que quand absolument mon mari reste loin, aussi
tôt un autre ami est prêt, comme Oberlin par exemple,
que vous savez être venu. -—
Lineweg continua: «Ce sont là de ces disputes de
l’amour dont il y a aussi des exemples dans le ciel: oui,
ici nous nous disputons continuellement pour savoir à
qui il sera permis de porter du soulagement aux mortels.
Oh! qu’heureux est l’homme qui marche avec le SEIG
NEUR! le SEIGNEUR le soutient puissamment. Jésus-Cumsr
est le plus grand trésor au ciel et sur la terre; tous les
univers ne sont rien en comparaison. Si vous vouliez
recevoir dans votre cœur tous les vains trésors qu’offre
votre terre, il faudrait déjà qu’il fût bien spacieux: et
toutefois, le trésor, qui vaut mieux que tous les trésors
y demeure! savoir le SEIGNEUR avec son amour! Chose
étonnante! Heureux celui dont le SEIGNEUR remplit tout
le cœur par son esprit! —
«Encore une fois, mon ami, si sur la route l’idée
te venait que je suis loin de ma femme, rappelle-toi que
j’y puis me transporter par la pensée, et m’y rendre
présent quand je le veux. —
«Oh! prie continuellement pour ceux qui te sont
chers: on a déjà enlevé bien des pierres de ces tom
beaux, et le SEIGNEUR est éternellement le même. Sa
mort a ouvert le Saint des Saints; sa mort a déchiré le
voile; ou peut pénétrer maintenant jusqu’à l’Arche d’al
liance. Ne vous contentez donc pas de rester dans
l’avant-cour : pénétrez dans le saint des saints, pénétrez-y.
Conjurez l’esprit de Jésus-CHRIST de vous assister; qu’il
vous montre comment on y pénètre. Tant que quel
qu’un se trouve dans l’avant-cour, il prie, il frappe, il
cherche: mais dans l’intérieur du Saint des Saints on
n’entend que ces mots: SEIGNEUR, que ta volonté soit faite!
_60_
0mes bien-aimés! que les plaies du SEIGNEUR deviennent
de plus en plus pour vous la fente du rocher dans le
quel vous reposerez. N’en doutez pas, Noé, le grand
Noé, sera votre protecteur; demeurez dans l’arche avec
lui; c’est à dire, demeurez dans, sa grâce qui vous a été
révélée. Veillez, à ce que vous croissicz et fassiez des
progrès quant à l’homme intérieur. Que l’Esprit du
SEIGNEUR qui vous conduit dans toute vérité, demeuré
votre lumière. Celui qui le demande, le reçoit; mais
que celui qui l’a reçu veille, afin qu’il le conserve; car
celui qui le conserve et le laisse agir, celui-là porte des
fruits pour la vie éternelle. Tous ses penchants, toutes
ses actions, ses pensées et ses paroles, partiront de lui
comme une nouvelle génération, une lumière allumera
l’autre; et de cette manière s’assemblent par ci par là,
des pierres, bien que petites, pour la construction du
Temple de Sion. Mais l’architecte fera tout le reste:
L’aider seulement de loin, c’est déjà la félicité)
Ces paroles prononcées avec quelque force, me re
présentèrent Lineweg si vivement à l’esprit, que même
les traits d’Anna, bien qu’elle eût les yeux fermés, me
le montraient vivant devant moi; il me semblait aussi
que mes propres traits s’épanouissaient de joie, comme
si je pouvais lui exPrimer ma profonde émotion; car,
quant à lui, je reconnus tout son agréable sourire au
jeu des lèvres d’Anna. Lineweg avait quelque chose du
sourire d’un enfant, dans les moments qu’il préparait
une agréable surprise à quelque ami.
40 mon ami, continua-t-il, le SEIGNEUR veut t’ap
prendre a faire de tout un sujet de prière, conformément
à cette précieuse parole: Priez sans cesse. Cela ne veut
pas dire qu’il faille prier comme font quelques-uns, qui
_61_
croient se sanctifier par des œuvres mortes, qui parlent
beaucoup et remuent le bout des lèvres pendant des
journées entières, à genoux dans un coin. Tout cela
ne mène à rien. La plus belle prière, mon ami, c’est
de devenir entièrement un avec la volonté du SEIGNEUR.
Si sa volonté est entièrement la tienne, tu es en harmo
nie avec Lui; et c’est ce que veuille nous accorder notre
SAUVEUR à tous. Qu’il t’amène à cet état: que le matin,
le soir, à la maison, en voyage, que partout et en tous
tems, il soit seul ton secours, et l’objet de tes pensées,
et la joie de tes yeux! Que notre SEIGNEUR vous bénisse
tous, qu’il demeure avec vous tous les jours de votre
vie, et qu’il achève en vous l’œuvre de la grâce qui est
commencée, pour votre salut et son éternelle gloire.
Alléluia. Amen.l>
Il se tourna alors vers sa femme et lui dit: «Tu
trouves bien, n’est-ce pas, ma chère, que je cause ainsi
longuement avec mon ami? avec toi je suis tous les
jours.” Elle reconnut avec beaucoup de bonté de cœur
que cela était dans l’ordre. -— Vous savez, d’ailleurs,
ajoutai-je, sur que] terrain desséché ses bénédictions
viennent de tomber. Mu“? Lineweg partagea ma joie
d’avoir été si richement consolé. Il continua: «Le vé
ritable amour se réjouit plus du bien d’un frère que du
sien propre. Sache de nouveau, mon ami, que le SEIG
NEUR m’accorde la grâce d’être à tes côtés, soit que tu
reste à la maison ou que tu te mettes en voyage.” —
Quand ici Mme Lineweg me demanda si mes idées étaient
maintenant arrêtées sur la question de mon voyage, je
lui avouai que non, et il ajouta: «Le SEIGNEUR t’a donné
ses conseils par notre‘ ami. Tu sais combien tu as à
te garder contre les refroidissemens; c’est l’affaire de
_62
‘ ta santé qui doit te décider. Le SEIGNEUR a parlé, et tu
peux choisir ').'
Huit heures vinrent à sonner; et il dit aussitôt:
«Encore une fois, mes bien-aimés, je vous recommande
à Dieu.» Nous témoignâmes notre étonnement que le
tems se fut écoulé si vîte: «Oh! ajouta-t-il, la vie avec
le SEIGNEUR est infiniment agréable; plus vous avancerez,
mieux vous le sentirez. —- Tu peux réveiller, ma chère. '
Voici maintenant les deux pièces dont Lineweg m’a
permis'de prendre copie. La première contient ce que
Henri 'Oberlin dicta à Mme Lineweg au moment qu’il lui
donna les conseils relatifs à mon voyage.
«Ame chère et précieuse!
«Comme ton époux bien-aimé se trouve occupé par
un voyage agréable que le SEIGNEUR l’a jugé digne, ainsi
que mon père, de faire à Madrid, ce même SEIGNEUR a
bien voulu me choisir pour te porter de sa part des
paroles de salut, de bénédiction et de consolation. Une
petite troupe de Bienheureux s’est assemblée. En se
donnant la main, ils se sont approchés de l’Amour éter—
nel; j’étais du nombre; le SEIGNEUR nous regarda avec
amour; et nous lui dîmes: SEIGNEUR, celle que tu aimes
") Il faut bien que sur certaines choses nous demeurions libres
dans notre choix, sans cela nous ne serions plus des hommes,
mais de pures machines. Mais ‘a cette époque le jeune
Gustave était presque incessamment tourmenté par de grandes
tentations, dans lesquelles l’ennemi de son salut I’accusait
sans relâche touchant sa conduite intérieure; lui reprochant
toutes ses pensées et ses démarches, de quelque manière
qu’il se conduisit. Ses scrupules ne s’étendaient pas seule
ment a son état de foi chrétienne en général, mais à tous les
plus petits détails de la vie. — Maintenant ce combat est
fini, et il est tranquille et fort dans le SEIGNEUR.
_65_
I
est malade; va donc à elle et lui dis que tu es sa con
solation, que tu es son secours! Oh! chère-amie, si tu
eusses pu Le voir! Si tu eusses pu voir luire dans ses
yeux et dans tous ses traits le feu de l’amour qui ac
corde tout à l’amour! Oui, dit-Il: Je suis à elle, et elle
est à moi; j’irais et je la soulagerais; je lui ferai com
prendre que toutes les souffrances qu’elle a à endurer
pour des raisons de sagesse, ne sont rien c comparai
son de la gloire qui l’attend. L’Amour éte l y ajouta
ces vers :
Je vais moi-même à sa rencontre ,
Elle me verra le premier , avant tous les autres;
Elle se jettera dans mes bras ,
Elle s’est donnée entièrement à moi;
Elle verra combien elle m’est chère.
Comment n’aurais-je pas eu pitié d’elle?
a Ame chère et bien-aimée, en prononçant ces pa
roles de l’amour le plus vrai, Il se leva de son trône ,
et courut te bénir et te presser sur son sein, pour te
consoler, t’inspirer du courage et de la joie, au souve
nir de la prochaine arrivée de ton Rédempteur. 0 bien
aimée ! Nous, les habitants heureux du ciel, nous sommes
restés muets d’étonnement à la vue d’un pareil amour;
et nous sommes tombés le front en adoration. A chaque
syllabe qu’Il prononçait, les marques de ses plaies di
vines devenaient plus brillantes; et nous comprîmes
qu’un jour notre joie serait ineffable en te recevant au
milieu de nous, quand la sagesse éternelle du SEIGNEUR
déclarera que ta tâche est remplie. O âme précieuse,
cette consolation nous a nous-mêmes ravivés dans notre
joie: combien plus n’a-t-elle pas dû te faire impression!
à toi qui as encore besoin de patience dans tes peines,
Æaa
mais qui as confiance, et qui mets ton espoir et ta joie
dans ton Rédempteur et ton éternel Protecteur! Oh!
vois, aussi vrai que Jésus vit, aussi vrai Il te glori—
fiera; tu jetteras des cris de joie et tu diras:
Le SEIGNEUR a tout bien fait ,
Il a tout bien ordonné ,
A Lui, 31 notre Dieu la gloire!
c Le .1eu de ton cœur te donne l’assurance , que
quand tu seras cxaltée, tu pourras influencer mille fois
mieux ceux qu’il te coûte maintenant des larmes de
quitter. Oh! vois, chère âme, comment l’homme de
douleur, ton soutien, te prévient dans chaque douleur!
comment il t’aide à porter ton fardeau, et combien il te
rend doux ce qui est amer! O bien-aimée, nous sommes
tombés sur nos visages, en voyant son inconcevable
amour! Oui certes:
Les âmes soufl'rantes qui se confient en Lui,
Verront de leurs yeux son secours admirable;
Car elles l’attirent à elles comme un aimant;
Lui-même, lui-même Il les soulagera!
Il réjouit de ses regards d’amour
Celui qui ne désire que Lui.
«I Nous nous réjouissons généralement dans le ciel
de l’approche du jour du SEIGNEUR, quand le boiteux
sautera de joie, que l’aveugle verra jusqu’aux lieux les
plus éloignés, et que le sourd distinguera les sons les
plus délicats *); quand l’amour règnera, quand la dou
ceur gouvernera et que la justice commandera.
') Pour l’intelligence du sens intérieur de ces paroles, nous
dirons que le boiteux signifie celui qui n’est pas dans le
_65_
«En vérité, chère aime, les peines de la vie, quelque
nom qu’elles portent, ne sont point comparables avec
la gloire que le SEIGNEUR Jésus révélera dans ses Elus.
C’estpourquoi, épouse promise du SEIGNEUR, reste encore
avec quelque patience dans le creuset qui doit te puri
fier; ce creuset se changera bientôt en un vert gazon,
sur lequel tu sauteras de joie éternellement.
«Le SEIGNEUR, le Dieu de ta consolation soit loué,
qu’il soit glorifié, le Dieu toujours fidèle! Car la lou
ange et la gloire lui appartiennent à jamais. Amen.‘
Mme Linewcg qui à cette époque souffrait beaucoup,
me dit que dans le moment où la scène rapportée plus
haut pouvait avoir eu1ieu dans le ciel, elle avait ressenti
des émotions tellement profondes, qu’elle ne pouvait
verser assez de larmes de joie. —
La pièce suivante est du.tems que Lineweg vivait
encore sur la terre; elle lui fut donnée le jour anniver
saire de sa naissance, le 18 avril 1850.
Le Grain de blé récueilli dans le grenier qui demeure
éternellement.
|Pour le jour où naquit un ami pour ma gloire.
Ami de mon coeur je te salue,
Ma bénédiction paternelle coule sur toi,
vrai bien par l’ignorance du vrai (Apoc. expliq. 455 , 518,
721); sauter de joie signifie le plaisir de découvrir le vrai;
les aveugles sont ceux qui se trouvent dans le faux positifl
et ne peuvent par conséquent recevoir le vrai (Le Ciel et
l’Enf. 487. Apoc. cxpliq. 555); les sourds sont ceuxne comprennent rien au bien; et ceux qui entendent sont
les personnes qui comprennent le bien et le recherchent
(Apoc. expliq. 259, 455). '
5
..66—
Comme un fleuve descendant du trône de l’agneau.
Mon frère, sois le bien-venu en ce jour.
Le livre de vie a reçu ton nom
Il y a soixante-trois ans.
Sois béni en ce jour
Et pour l’Eternité,
Ami et frère,
De la part de ton SEIGNEUR,
L’Etoile du matin
Prête h s’élever dans l’Orient.
2.
Dès ta naissance tu fus conduit
Par ma main, qui t’a préparé,
Pour être un des prix de mes douleurs.
Frère, j’ai compté tes jours,
Chacun a été placé sur la balance,
Et ce fut mon cœur qui servit de poids.
Je sus que tu m’aimâis,
Que profondément tu te contristais
Quand tu voyais mes pleurs;
En cet état restera la balance,
Mon ami, jusqu’au jour
ou ma voix t’appelera.
5.
De bonne heure déjà je t’avais ceint,
De bonne heure. je t’avais donné la houlette, _
Pour paître mes brebis;
Tu étais encore au sein de ta mère
Quand Je dis a cette pieuse femme
Qui te mit au monde: crois moi,
Tu reçois un fils
Dont tu entendras dire
Qu’il m’amène un petit troupeau
A la porte de la bergerie;
Et tu m’en glorifieras éternellement.
-67...
4.
Ami, je continuerai à te conduire,
Tu continueras à sentir mon secours,
Monpbras fort, ma main puissante.
Ne crains pas; seulement, dans le combat,
Demeure ferme et plein de confiance;
Déjà tu t’approches du bord de la mer.
Sois courageux dans la dernière tentation;
Car il n’est pas loin
Le jour du triomphe,
Où plein de joie,
Exempt de souffrances,
Ta fidélité se reposera.mm :2‘-:;: 37
.:iu‘s;i .sxm ‘I
g. 3 .;Q“.\, r’lï;r;1t{xäj
.’l fu)fæ
Prends pour gage de mon amour _"”””iÎ’ , .
La parole d’ami que je te donne ;æ?ë;î”@’i ”’Ï’"Ï
Et te plonge entièrement en moi.
Je voudrais de même, ami, vivre en toi,
Me donner entièrement à toi, m‘êçA
Partager tes plaisirs et tes peines. , î,y_ ‘l:fÀ\r
Lève-toi et demeure ferme, "
n
nur 'u:
.""Ï"ir>‘i’! 'l!l'fl"s
Ami bien-aimé, ami chrétien,
Aussi dans les souffrances;
Afin qu’en homme fortTu regardes le ciel “afin ,LsinI2'x’l
Quand je te conduirai sur GOlgotha. n;fl;‘.i aimev
im=: f:c;z» ianis
34“.
:..f 'ï’fl;'æ :‘n3 i
6.
Je demeure le soleil de ta vie,
Je demeure ton plaisir et ta joie,
Mon ami, même pendant ton pélérinage. ’ " **"
Je veux devenir fin avec toi; N* -”Que ta volonté se perde dans la mienne “æ’-' th‘3
Dès maintenant et à jamais.
Je demeure ta force,
Qui sait tout créer en toi;
Donne-moi ton cœur
.‘tE ‘î";:-.î-è. a
:529; : mon
5.
Pour toujours, ‘
Je te le purifierai
Dans mon propre sang.
7.
0 mon ami,’ après quelques heures, H":
Tout est surmonté pour l’éternité:Portes donc encore ta croix avec plaisir. '. ,;
Tout te sera changé en douceur; ,r.‘; k
Patiente seulement encore à mes pieds, I {M ',
Te confiant à ton Dieu et à ton maître. ‘
Vois, je te bénis aujourd’hui ’Et ainsi pour l’éternité; ‘ *" ",,.‘ ‘
Frère, ami, " ”‘
Reprends ta tâche;
Mon Benjamin, ,..a-'
Tu as toute mon amitié. Amen ‘).
Du 8 Septembre 1855.
Aujourd’hui, un dimanche, j’allai, accompagné de
Chandani, chez Mme Lineweg. Mon ami désirait ytrou
ver un service divin d’un genre supérieur, pour son
cœur froissé. On devine quel prédicateur il cherchait,
ainsi que moi. Nous trouvâmes notre amie un peu souf
frante, ayant le coeur malade. Des anciens amis étaient
venus la voir, et lui avaient témoigné toute la douleur
que leur causait la perte du cher défunt. Cette circon
stance avait renouvellé ses propres regrets; et nous
nous mimes à discourir sur cette vérité, que le bonheur
‘) Il est inutile de remarquer] que chacun demeure libre de
penser sur l’origine de cette pièce étonnante ce qu’il
voudra: cette origine , évidemment, peut être plus ou
moins pure ou plus ou moins immédiate; j’ajouterai seule—
ment que la beauté des vers dans l’original la rend moins
étrange. N. (I. T.
_59_
de l’amitié ne peut se goûter dans sa plénitude que
dans la présence visible de celui qui nous est cher. Peu
d’instans après se montrèrent chez Anna les symptômes
de l’influence du monde spirituel. Nous nous assemblâmes
autour d’elle. Elle se tourna d’abord vers Mme Lineweg,
mais la voix me dit à moi: écris.
«Ame bénie du SEIGNEUR, l’époux qui t’est uni pour
toute l’éternité est ici. Il te présente une fleur céleste. Son
nom est: Plusje te vois plus je t’aime. Elle est aspergée
du sang de l’amour sacrifié, et te rappelle la douceur
d’un amour indestructible en JEsus-Cunxsr. On y lit:
Le lien de l’amour qui nous unit,
Demeure ferme, même au delà du tombeau,
Où Dieu est tout en tous.
-Oui, femme bien-aimée, ceux'qui s’aiment dans le
SEIGNEUR , ne sont jamais séparés; bien que l’amour
éternel interpose pour quelques instants entr’eux un
voile léger: et ce voile lui-même ne sépare pas ce qui
s’aime réellement. Attends avec patience, et sois calme
dans l’espérance; réjouis-toi dans l’objet de ton amour.
Ne m’a-t-il pas été donné d’aller à ce SEIGNEUR , qui t’a
fait à toi, comme à tous, cette consolante promesse: Je
demeure avec vous tous les jours? Loué donc soit l’Eter
ne]! Alleluia! Amen)
Il avn, dit Mme Lineweg, que j’étais un peu triste;
et il est venu aussitôt me consoler. Elle alla à une ar
moire; et, à notre grand étonnement, elle en retira une
tasse, sur laquelle nous vîmes écrites en lettres d’or
toutes les paroles rapportées ci-dessus, et que Lineweg
lui avait donnée dans le tems en cadeau, le jour anni
versaire de sa naissance.
c Maintenant, ajouta-t-il, écris un autre article» (Pour
...7o_.
bien comprendre ce qui suit, il faut savoir que Chan
dani, depuis la dernière communication qui lui avait été
faite, avait été beaucoup occupé à réfléchir sur la signi
fication de ces mots: Pardonnez à vos ennemis, car ils
ne savent ce qu’ils font. Comment, disait-il, ces derniers
mots peuvent-ils s’appliquer aussi à ceux de mes enne
mis qui, selon moi, savaient très-bien qu’ils étaient des
juges prévarieaieurs? Nous en avions souvent causé;
mais ce sujet dans son esprit demeurait toujours un peu
obscur. L’ami fidèle, qui avait dissipé déjà tant de
nuages, dissipa encore celui-là.) Voici ce qu’il dit:
«Amis du SEIGNEUR! Comme JÉsus-Cnmsr (il pro
nonçait Ztous les différents noms du SEIGNEUR avec une
solennité de ton indéfinissable) demeure avec vous tous
les jours, Il connaît votre désir et vos voeux. Rien ne
Lui est caché! Il veut donc répondre au souhait d’un
disciple, et parler avec lui touchant sa parole de pitié
et de miséricorde: Père, pardonne leur, ils ne savent ce
qu’ils font. JÉsvs-Cumsr fit cette prière sur la croix,
pour ses ennemis, comme fils de Dieu. Il prie comme
fils de Dieu. Et à qui s’adresse-t-il? A son Père; car
Il sait que ce qui est fait à son enfant est fait au père.
Père, s’écrie-Ml, pardonne leur , pardonne à mes enne
mis! — O bien-aimés du Semeun, sachez qu’en de
mandant avec cette ardeur le pardon, le Fils de Dieu
demande en même tems un châtiment paternel. Châtie
ce peuple , dit-il, mais châtier-le avec mesure. Car bien
qu’un père pardonne ses fautes à son enfant, ily ajoute
en même tems la grâce (le la punition salutaire qui ga
rantit l’enfant des chiites de l’avenir. Châtie donc les
coupables, mais les châtie avec mesure, et fais que le
châtiment leur soit profitable. Viens à leur aide par ta
-71
grâce; et que ta longanimité porte enfin ces cœurs si durs
à la pénitence. Pardonne leur, ils ne savent ce qu’ils
font. Ils ne savent pas qu’ils blasphèment le Père qui est
dans l’enfant; pardonne leur, ils ne savent pas qu’ils ne
se moquent pas d’un pur homme, mais du Dieu qui est
en lui. Dans leur incrédulité ils ignorent qu’ils commet
tent un si horrible attentat et pèchent contre leur BÉDEMP
TEUR. Père, pardonne leur; c’était la prière du Fils de
Dieu, à la suite de la prière du Fils de l’homme, quand
dans sa dernière tentation le SEIGNEUR s’était écrié en son
pirant: Mon Dieu! mes amis et mes ennemis m’ont aban
donné, pourquoi m’as-tu aussi abandonné? 0 bien
aimés du SEIGNEUR, dans ce moment le Père s’est aussi—
tôt manifesté dans le larron répentant à sa droite en
disant au Fils de l’homme si désolé, et au Fils de Dieu
qui avait si soif du salut des âmes: SEIGNEUR, souviens
toi de moi quand tu seras entré dans ton royaume. Voilà
la révélation du Père, opérant par son esprit, une telle
merveille dans le coeur d’un pécheur, pour la consola
tion et le soulagement de son Fils. -— O mes chers
frères, âmes rachetées comme moi, priez donc comme
prie ce Jésus; établissez-vous près de cette source
d’amour; placez-vous avec Marie à ses pieds; et Il vous
enseignera ce qui est bon pour vous. Il vous donnera cet
esprit qui vous conduira en toute vérité. Petits enfans,
si vous voulez que le SEIGNEUR, la source de tout salut,
vous lave et vous purifie, il faut que vous-mêmes dimi
nuez, il faut que votre moi diminue. Car je vous le dis
en vérité, ce n’est que dans cet abandon plein d’humi
lité, au SEIGNEUR et à son amour, que l’on apprend à
aimer; et il n’y a que cet amour-là qui sache prier pour
les amis et les ennemis:
-72
L’ain0ur recherche l‘amour:
SEIGNEUR ne laisse point sans culture le champ de mon cœur;
Rends ce cœur fertil et riche dans le tems,
Afin qu’il goûte les plus doux fruits pendant l’éternité.
«0 bien-aimés , celui qui suit le SEIGNEUR, l’agneau
de Dieu, avec un amour vraiment filial, et se donne à
lui sans réserve, celui-là est un disciple de l’amour, un
frère de Dieu-Messie! C’est pour celui-là que Dieu
homme, JEsus-Cnmsr, a prié avec tant d’ardeur vers le
Père, et a dit à Celui qui est un avec Lui: Père, je veux
que là où je suis, soient aussi ceux que tu m’as donnés.
Oh! qu’on est heureux d’être la possession, la propriété
de Dieu! Voulez-vous l’être, suivez-Le seulement quel
ques instans, partagez un moment l’opprobre de sa
croix, et Jésus sera votre félicité et votre triomphe éter
nel. Suivez-Le, oui, suivez-Le! Celui qui vaincra, sera
vêtu de vêtemens blancs; il recevra un nouveau nom,
il sera élevé sur le trône de son SEIGNEUR, et il jugera
avec Lui les douze tribus d’Israël. C’est à ceux qui
sont élevés de la sorte que le Dieu des armées, à qui
est donnée la puissance au ciel et sur la terre, déclare
que-s’ils pardonnent leurs péchés aux hommes, leurs
péchés leur seront pardonnés; et que s’ils les leur
retiennent, ils seront retenus. Mais qui est au juste
celui qui est assis sur un même trône avec le SEIGNEUR?
C’est celui qui est devenu un avec l’éternel amour, avec
l’amour qui crie: Père, pardonne; pendant qu’il aban
donne le moment et la manière de pardonner, au Dieu
de gloire, auquel seul est réservé l’acte du bon plaisir.
Demander, mes bien-aimés, est votre tâche, exaucer est
celle du SEIGNEUR. Allez, et soyez miséricordieux comme
votrePère céleste est miséricordieux; Lui, qui fait lever
-75
son soleil sur les bons et sur les méchants, sur lesjustes
et sur les injustes.
Abandonnez-vous à JESUS seul,
Demandez l’esprit de Jnsus;
Le fils alors vous transformera,
L’esprit saint vous instruira.
Bénie soit l’adorable Trinité,
Dans le _tems et dans l’éternité. Amen.
«Maintenant, bien-aimés du SEIGNEUR, l’amour éter—
nel vous a ravivés; que cet amour demeure en vous,
qu’il agisse en vous; alors il portera des fruits pour la
vie éternelle. Que le Dieu de toute bonté opère le tout
en vous par sa grâce! Amen.»
Après une petite pause ilvajouta encore avec rapi—
dité ces mots, que je n’ai pu écrire qu’après son départ:
«Il n’y a que le trésorier des biens célestes puisse
ainsi parler; il n’y a que la source d’eau vive de l’Eter
nel qui puisse ainsi étancher la soif. 0 petits enfans,
chers petits enfans, demeurez en Lui, Il demeurera en
vous, et vous posséderez Tout. Amen!»
_ Du 12 Septembre 1855.
Depuis quelque tems je vivais dans une pénible
obscurité d’esprit. Des doutes de toute espèce venaient
m’assaillir. Touteperception supérieure du vrai m’échap
pait, au point qu’il ne me restait pas une seule vérité
dontje pusse dire avec une entière confiance: je la crois.
Je fus bien forcé de reconnaître que l’homme ne peut
pas croire par lui-même. A Cela venaient se joindre
les souvenirs de fautes et d’erreurs paSsées , et l’ennui
de celles dans lesquelles je tombais * tous les jours.
' —74-—
Enfin, des souffrances extérieures n’y manquaient pas.
Je me croyais, de plus, indigne de prier; je n’osais plus
dire que ces mots: SEIGNEUR, aie pitié de moi , pauvre
pécheur. Je perdais même l’espoir qu’un être ainsi
réduit à l’état le plus misérable, pût être rendu à une
vraie santé spirituelle. J’errais donc ça et là, entière
ment découragé. Ce soir j’allai voir Mme Lineweg, sans
lui faire part de l’état de mon âme; et ne montrant au
cune tristesse, simplement pour ne point aller contre
les paroles du SEIGNEUR, en St. Mathieu 6. 16—18. Je
n’avais non plus l’intention d’y chercher quelque conso
lation, car mes vraies dispositions étaient réellement
dans ces momens une totale indifférence. C’est du moins
ce que je croyais. Mais, comme on va voir, le SEIGNEUR
en jugeait autrement: si je renonçais, moi, à tout espoir
de perfection et de salut; le SEIGNEUR n’y renonçait pas.
A peine me trouvai-je là, que Anna ressentit les symp
tômes de son sommeil spirituel 5 elle entra dans l’état
supérieur et dit: «Ton ami toujours fidèle, et s’intéres
sant à ton sort, est là.* Il dit: «Écris.»
«N’est-il pas vrai, cher ami, qu’il te semble qu’il y
a bien longtems que je ne t’ai parlé d’une manière sen
sible? Je te voyais pourtant, crois-moi, et je savais tes
peines et tes désirs; voilà pourquoi je t’appelle à rece
voir ce soulagement. Viens donc, âme chargée du poids
de l’angoisse, et écoute cette parole: Console-toi, ne
crains point; crois seulement. Si c’est ta foi qu’on attaque,
dis simplement: Au nom de JEsus-Cnmsr je t’ordonne,
Satan, de te retirer: JEsus est à moi, et je suis à Lui.
0 mon bien-aimé, ne t’étonne pas d’avoir bien des com
bats à livrer, bien-des tentations à endurer. Rappelle—
toî que celui que le SEIGNEUR glorifie et comble de
_75_.
grâces, a aussi d’un autre côté bien des humiliations à
endurer. Est-ce le souvenir de tes fautes qui t’attriste?
0 mon ami, je te conjure, ne te laisse point abattre par
cette tristesse; cours à ton Rédempteur, au Médecin
qui connaît ton cœur; jette-toi dans les bras de Jésus;
dis-lui tout; expose-lui toutes tes peines; Il est ton
meilleur conseil. Il t’aime; c’est Lui qui t’a conduit dès
ta naissance; Il t’a eonduitàla lisière, comme une mère
conduit son enfant. 0 penses-y, et ne rejette point ta
première confiance, qui a une grande récompense. O
pense combien de tems tu as vécu au milieu de serpens,
et entouré de la race des vipères, qui, poussés par le
prince qu’ils servent, ont voulu te ravir ta foi, et avec
ta foi, ta félicité. Le SEIGNEUR t’a protégé et conservé
au milieu de ces bêtes féroces, pour que tu devinsses un
des prix de ses souffrances. Daniel s’est trouvé pendant
longtcms au milieu de meurtriers qui en voulaient à
sa vie corporelle; le SEIGNEUR l’a secouru avec la puis
sance d’un roi: pour toi, mon ami, tu t’es trouvé pen
dant plusieurs jours au milieu d’assassins qui en vou
laient à ton âme; mais le SEIGNEUR, ton bouclier, t’a“
maintenu par sa grâce. O âme chérie, pe crains donc
point, crois se‘ulement. Tiens-toi ferme au souvenir de
cette parole: Je fais ce que je fais, je laisse ce que je
laisse, comme si le SEIGNEUR venait incessamment me
surprendre. Oh! vois; ton BEDEMPTEUR, qui a aussi été
le mien, et qui le sera toujours, Il ne t’abandonnera pas,
Il ne te négligera pas; cela est aussi vrai que tu sais
qu’Il est vivant aux siècles des siècles. Pense seulement
que Jésus , ton Maître, a aussi traversé le désert pour
aller à Canaan. Rappelle-toi que c’est à ceux de ses
disciples qu’il aime, qu’il fait part de ses croix les plus
n
riches en bénédictions. Réjouis-toi de ce partage plein
de grâces, et pense: sans combat point de victoire; sans
croix point de couronne. Par la nuit on arrive à la lu
mière, par le malheur à la félicité, par la privation à la
jouissance, par la tribulation à la gloire. O mon ami,
cette vie de souffrance n’a que la largeur de la main.
Les pleurs ne durent qu’une soirée, le plus court inter
valle d’un jour; et au matin commence la joie "). Encore
un peu de tems, et les disciples de Jésus se réjouiront
d’une joie ineffable et éternelle, qui ne leur sera plus
enlevée. Oh! aie donc encore un peu de patience; celui
qui persévère jusqu’à la fin sera seul sauvé. C’est main
tenant l’heure que la foi et la patience des imitateurs
de JEsus-Cmusr sont le plus puissamment éprouvées.
Je t’assure, âme précieuse, que je ne voudrais point
qu’on m’cût épargné un seul des combats, une seule des
soufl'rances qui sont venues m’assaillir. Mille et mille
fois j’ai vu confirmée cette parole de l’Ecriture: Quand
la tribulation est présente, elle n’annonce pas la joie;
mais bientôt après (souligne ces mots) elle devient un
’truit précieux de la justice pour tous ceux qu’elle a
éprouvés. Rappelle-toi, que ce Jésus, qui est toujours
près de toi, connaît toutes les tentations. Il a été tenté
lui-même. Il est un Grand-prêtre compatissant, qui ne
permettra pas que tu sois tenté au delà de tes forces
‘) Dans ces paroles, comme dans le Psaume dont elles sont
tirées, il est sans doute aussi question du renouvellement
de l’Église: car dans le sens spirituel la soirée signifie les
derniers tems, quand le mal et l’erreur règnent dans l’Église
et que le SEIGNEUR pense ‘a la renouveller (Apoe. expliq.
557, 677); et le matin signifie ce renouvellement réalisé.
-77
Et toujours la tentation, chez toi, tournera de manière
que tu puisses la supporter. Vois, mon cher ami, con»
bien ton SEIGNEUR et ton Dieu veille sur toi, puisqu’il
m’a fait la grâce de pouvoir venir te consoler, au mo
ment que tu es abattu et que tu as le cœur brisé. Oh!
qui saura mieux consoler que celui qui a soufl'ert lui
même? Réjouis-toi donc en ton Dieu; saute de joie au
souvenir de ton RÉDEMPTEUR. Recommande-Lui tes
destinées futures, et sans aucun doute Il te conduira à
une heureuse fin. Il est ton Défenseur, ton Rempart,
ton Bouclier et ton Abri. Tiens-toi tranquille et dans le
silence, Il parlera pour toi. Il est avec toi dans l’arène;
Il est ton Roi et ton Guerrier; Il combat avec toi et
pour toi, et Il veut que tu demeures victorieux. Donc,
mon ami, reste avec ce Dieu en vérité; Il est le Dieu
vivant! Ce qu’Il veut se réalise. Il ordonne ettout obéit.
En disant c’est moi Il a jeté des guerriers dans la pous
sière. Il accourt à ton aide, et t’encourage; Il te con
sole, Il t’apelle, Il dit à ton cœur: C’est moi! et tu sauras
un jour qu’Il s’est occupé de toi en Père.
Tu n’es que pour quelques instans dans les ténèbres,
L’Etoile du matin brillera bientôt;
Oh! console—toi, tu appartiens au SEIGNEUR,
Il est lui-même ton étoile. ' Amen.
Je le remerciai, profondément touché de tout ce
qu’il venait de me dire. Alors il s’adressa à sa femme‘
N’est—ce pas, chère femme, lui dit-il, tu sais par expé
rience comment le SEIGNEUR peut c0nsoler? —- Sans
doute, répondit-elle, aussi touchée que moi-même.
Elle me dit alors que je pouvais proposer des
questions sur tout ce qui m’embarrassait, queje ne ferais
-78
nécessairement aucune demande déplacée, et qu’elle
était même chargée de m’y encourager. "
J’avais toujours été très-timide jusque là, dans ces
circonstances; toutefois, en ce moment, après que j’eus
commencé, il s’établit bientôt entre nous une de ces
conversations cordiales, qui caractérisaient nos rapports
pendant sa vie: avec cette différence qu’il était plus
aimable encore et plus sage qu’il n’avait été ; tandis que,
de mon côté, j’étais devenu plus pauvre et plus aban
donné. Voici ce que je me rappelle de cette conversation:
Moi. Je Suis forcé de l’avouer, toute ma foi s’est trouvée
ébranlée.
Vois, men ami, c’est—là la grande affaire de Satan,
de vouloir nous ravir la foi: parce qu’il sait que
s’il réussit, il a beau jeu.
Moi. Je voudrais bien souffrir, si je n’étais forcé d’at
tribuer toutes mes souffrances à mes péchés.
Heureux celui qui, avec l’enfant prodigue, recon—
naît qu’il apéché; et qui dit: j’ai péché, moi; non
tel ou tel. Oh! celui-là est sûr que le Père va à
sa rencontre, les bras ouverts, et l’embrasse. Celui
qui se juge ainsi soi-même est déjà jugé. Ce
n’est que par un effet de l’esprit de Dieu et de sa
grâce, qu’il peut reconnaître son véritable état;
car, par sa nature, l’homme est vain et orgueilleux,
et il ne veut pas s’avouer pécheur. Celui donc qui
reconnaît ses péchés et les avoue, celui-là sent
déjà l’influence de l’esprit de Dieu et de sa grâce.
Oh! remercie de tout ton cœur ton Rédempteur,
de ce qu’il te donne son esprit, et prie—le, conjure
le , de continuer à te faire faire des progrès dans la
connaissance de toi—même, et à t’éclairer de plus
Lui.
Lui.
.43...“
. _79_
Moi.
Lui.
Moi.
Lui.
en plus, et à fond. La connaissance .de soi-même
conduit à la connaissance des hommes; alors mûrit
aussi la connaissance de Dieu. Bien-aimés, vous
verrez toujours que plus un enfant de la terre
parviendra à connaître ses faiblesses et ses mi
sères spirituelles, et plus il s’humiliera en pré
sence de Dieu, plus il deviendra indulgent, doux,
tendre envers ses semblables. Il est écrit: Aime
ton prochain comme toi- même; mais vous savez
trop que l’homme sejuge toujours, lui et ses fautes,
avec indulgence; c’est pourquoi l’amour de Dieu
et du prochain est une étude continuelle.
Souvent je me surprends dans des mouvemens de
haine, même envers des personnes qui sont le
plus étroitement liées à moi.
Rapelle -toi que la haine est le meurtrier de son
frère. La vie est un combat continuel; celui qui
combat avec le SEIGNEUR, le SEIGNEUR combat pour
lui; et nécessairement il remporte la victoire.
Quand Satan avec tout l’enfer se lèverait contre
toi, ne crains pas; nous sommes plus nombreux
et plus forts que Satan et l’enfer. Et quand le
SAUVEUR serait seul avec toi, quand personne d’autre
ne t’entourerait, tu serais encore plus fort; car
sur un signe du SEIGNEUR, du Dieu des armées,
des légions entières tombent dans la poussière.
En reconnaissant que le péché soit pardonné,
comment se consoler quand on voit que les suites
de ce péché vous rendent incapable de faire le
bien parmi vos semblables?
Il est vrai que le péché souille l’homme; mais
celui qui se donne entièrement au SEIGNEUR, le
' -- 80 -
SEIGNEUR le purifie de son péché. La culpabilité
est détruite; et celui qui marche avec le SEIGNEUR,
peut bien encore se heurter le pied; mais il ne
tombe plus dans son péché.
IŸIoi. J’ai aussi été inquiet d’avoir parlé, en divers en
droits, de ces communications surnaturelles, sans
en avoir demandé la permission. Dans la joie de
mon cœur, je n’y ai point assez réfléchi.
Lui. Ton intention était bonne; et c’est l’intention que
le SEIGNEUR considère. Toutefois, n’oublie pas ce
qui est écrit: Soyez prudcns comme les serpens,
et simples comme les colombes. C’est précisément,
vois-tu, parceque les hommes sur cette terre sont
conduits dans mille et mille situations variées, qu’il
nous est indispensable de solliciter continuellement
l’esprit de Jésus-CHRIST; lui seul peut nous éclai
rer. Il est nécessairement permis de glorifier le
SEIGNEUR et de publier hautement ses grâces. Un
mot dit à sa place est souventun puissant secours
pour la foi. Il est dit qu’il faut annoncer le soir
sa grâce et le matin sa vérité. -— Que le SEIGNEUR
soit avec vous, mes bien-aimés , et qu’il vous
maintienne dans le bien par sa grâce vivifiante et
son immuable fidélité.
Moi. Maintenant je me sens soulagé; mais j’étais bien
tourmenté.
Lui. Souvent le SEIGNEUR nous laisse vivre dans l’ari
dité, afin que nous nous donnions à Lui sans re
serve.
Moi. Ce que j’ai peine à eroire, c’est que le SEIGNEUR
puisse s’occuper d’une pareil pécheur.
Lui. Ne connais-tu pas ce met: mon royaume est le
—.81
Moi.
royaume des pécheurs. Ton SAUVEUR est venu à
cause des pécheurs, non à cause des justes. 0
mon ami, n’accorde pas à l’ennemi de ton âme le
triomphe de te voir perdre la Foi à l’amour de JE
sus pour les pêcheurs. Car s’il te tourmente et
que tu renonces pour cela à la foi, il faut voir
comment il se réjouit et saute de joie autour de
toi; c’est-là la vraie jouissance de Satan. 0 mon
enfant, mon ami, pour l’amour de JESUS, prends
patience, et continue de combattre. Tiens ferme
ce que tu as, afin que personne ne te ravisse ta
couronne. Quand tu es tenté sur la foi à JESUS,
dis: '
Il est à moi, je_suis à Lui.
Cette alliance entre nous est éternelle.
Je ne puis pas dire que je suis à Lui; je puis
tout au plus me rendre le témoignage que je vou
drais qu’il me prit pour un valet, un j0urnalier.
Lui. De son côté il est tout à toi; pourvû donc que tu
Moi.
veuilles être à Lui, par là même tu Lui appartiens.
Si tu ne veux être que sonjournalier, son employé,
eh bien, présente-toi en cette qualité 5 mais alors
pour toi il se changera en Père, il te recevra
dans ses bras, il mettra l’anneau à ton doigt, et
t’appellera au banquet de la vie éternelle. a
Je me tourmente aussi souvent pour savoir si, ici,
à Argentine je suis vraiment à mon poste?
Abandonné-toi seulement à Lui sans réserve, alors
il t’éclairera. Recommande-lui tes voies , et il te
montrera le chemin que tu dois suivre. Dis bien
souvent de tout cœur:
6 .
_32_
Tu es le maître, je suis le serviteur;
Tout ce que tu ordonnes est bien ordonné.
Lit-dessus, il renouvella sa bénédiction, et je m’en
retournai à la maison rempli de sentimens de joie et de
reconnaissance. '
Du 15 Septembre 1855.
Comme mon âme demeurait toujours encore tour
mentée de doutes et de tentations, mon fidèle ami et
compagnon entendit toutes mes questions inquiètes sans
que je les lui proposasse, et il y répondit dans la dictée '
suivante qu’il fit faire pour moi:
L’Àmi et l’Ennemi.
Jssus à l’âme. Crois-moi, en nul autre ne se trouve le
salut, et il n’est point donné aux hommes d’autre
nom, par lequel ils puissent être sauvés, si ce
n’est le seul nom de JESUS-CHRIST.
Satan ä l’âme. Comment Peux-tu espérer encore ta
grâce?
JESUS. Je suis la voie, la vérité et la vie; personne ne
vient au Père que par moi.
Satan. Comment peut-on te pardonner? tes péchés sont
vraiment trop grands.
Jssus. Là où le péché abonde, la grâce abonde bien
plus encore.
Satan. Mais ceci ne te regarde pas: pour toi, tu es re
jeté depuis longtems.
Jesus. Rapelle-toi cette parole précieuse: Moi, JESUS
CHRIST, je suis venu au monde pour chercher et
sauver ce qui avait péri.
—- 85 ———
Satan.
Jésus.
Satan.
JEsus.
Satan.
JESUS.
Satan.
JESUS.
Satan.
Jésus.
Satan.
Jésus.
Satan.
JEsus.
Satan.
Qui pourra sauver celui qui a péché, parceque
le SEIGNEUR est misécordieux? _
Je suis le bon Pasteur, je donne ma vie pour
mes brebis, je laisse les quatre-vingt-dix-neuf,
et je cours après la seule brébis égarée.
Tes péchés sont en trop grand nombre, et puis
tu as commis de tels forfaits que si quelqu’un
doit périr c’est toi.
Et quand tes péchés seraient rouges comme du
vermillon, je les laverai et les rendrai blancs
comme la laine.
Le Dieu qui te jugera est un Dieu de justice.
Je ne te*trRite pas selon tes péchés, je ne te
châtie pas selon tes iniquités.
Je te dis que tu es perdu! tu es un enfant des
ténèbres: Dieu qui est lumière ne peut rien
avoir de commun avec les ténèbres.
Heureux ceux qui s’attristent à cause de leurs
péchés, car ils seront consolés. ’
Ne te donne plus aucune peine pour trouver
grâce et miséricorde, tout est inutile.
Venez à moi, vous tous qui êtes malheureux et
chargés, et je vous soulageraia‘;
Pour moi je te donnerai tout ce que ton cœur
souhaite, si tu te prosternes et m’adqres. _ .
Je suis la seule vraie porte; celui qui entre par
moi a la vie éternelle. - i” '" _
Bien, bien; tout est fini pour toi; il n’y a plus
de secours. '
Celui qui vient à moi,"3 je ne le repousserai pas.
Pour tout le reste tu pourrais trouver pardon,
7’“ si seulement tu n’avais pas commis telle faute.
6a
84
Jssus.
Satan.
Jssus.
Satan.
Jnsns.
Satan.
Jnsus.
Satan.
JEsus.
Satan.
Jssus.
Satan.
Décharge-toi sur moi de toutes tes peines; j’ai
trouvé le salut, ne crains pas, crois seulement.
N’est-ce pas une folie de croire une chose qu’on
n’a point vue?
Heureux ceux qui croient sans avoir vu.
Mille autres ont trouvé du secours; mais on ne
s’occupe plus de toi; pour toi point de conso
lation.
Attends et espère, ta force croîtra comme celle
de l’aigle.
Où est donc ton SAUVEUR? tu ne le vois ni ne le
sens.
La parole de Dieu est stable; et sa promesse il
l’accomplira certainement.
C’est dans sa colère que Dieu t’a abandonné.
C’est en t’humiliant que je t’exalte.
Où est maintenant ton Dieu?
Dans ta faiblesse tu deviens fort. Dans ta ma
ladie tu as recours à ton médecin.
Ne vois-tu pas que c’est en vain que tu pries,
que tu cries?
Jssus. Le SEIGNEUR a pitié du misérable, il exauce ses
Satan.
JESUS.
Satan.
Jssus.
cris et vient à son aide.
Si tu me sers, tu auras des biens et des honneurs,
rien ne te manquera.
Cherchez d’abord le royaume de Dieu et sa
justice , et le reste vous sera donné comme par
surcroît.
Mais où est l’accomplissement des anciennes
promesses? Où est ton Rédempteur?
Tant que tu ne regarderas que toi tu perdras
courage; mais porte tes regards sur le principe
_35_
et le consommateur de ta foi, alors le secours
est trouvé.
Satan. Tu apprendras plus tard que tes soins sont su
perflus; car tu mourras de mort.
JESUS. Celui qui croit en moi vivra, quoiqu’il meure.
Satan. Eh bien, va alors; cherche ton bonheur si tu
peux.
JESU3. Mon âme, loue le SEIGNEUR; que tout ce qui est
en moi loue son saint nom. Mon âme loue le
SEIGNEUR, et n’oublie jamais tous ses bienfaits.
Il te pardonne tous tes péchés, et guérit toutes
tes infirmités; Il rachette ta vie de ta tombe, et
te couronne de grâce et de miséricorde. Oh!
que chaque battement de ton cœur soit un sen
timent de reconnaissance, que chaque reprise
d’haleine, soit un chant de louange, pour Gelui
qui est mort pour toi, afin que tu Vives. Ré
jouis-toi, chante le triomphe de ton SAUVEUR,
exalte sa miséricorde, et comprends le cri de
son amour:
Tes larmes ont ceulé en abondance
Sur tes nombreux égaremens;
Pleure maintenant aux pieds_ de JEsus
En voyant sa grâce et sa bonté sans fin.
«Oui, mets—toi aux pieds de JEsvs comme un néant;
car Il veut être tout en tout pour toi; il faut que tu di
minues s’Il doit croître en toi.
Ce n’est que par am0ur qu’ll t’a ainsi châtié,
Oh! remercie-le, s’il vient a t’anéantir;
S’Il te rend chétif, petit, tu deviens grand en Lui,
C’est le sort le plus heureux, au sort digne d’envie.
_86_
Du 15 Septembre 1855 (un dimanche).
Chandani et moi, nous avions demandé à Mme Li
neweg si elle ne nous permettait pas de nous rendre
chez elle à une heure convenable, dans l’espoir de re
cevoir quelque avis du SEIGNEUR. Elle nous remit à cinq
heures du soir (heure à laquelle Lineweg avait coutûme
d’avoir ses réunions quand il était encore de ce monde).
Il faisait un temps magnifique, et Chandani m’en
gagea à faire d’abord un tour dans les champs. Nous
arrivâmes à un endroit d’où la chaîne de montagnes de
ma patrie, au-delà du Rhin, offrait un point de vue très
imposant. A cette vue je sentis quelques atteintes de
la maladie du pays, laquelle venait quelquefois m’as
saillir. Je me plaignis à Chandani de la peine que
j’éprouvais de vivre ainsi sans patrie. Il me dit que
notre patrie devait être là où ilyavait à travailler pour
le règne du SEIGNEUR; que pour lui, tout lui avait été
enlevé sur la terre; qu’il en avait fait le sacrifice, et
n’avait plus:d’autre désir que de voir arriver le règne
du SEIGNEUR. Je me disais bien aussi à moi-même que
tous mes désirs devaient être tournés vers le SEIGNEUR;
mais celui de vivre avec mes parents et mes amis, celui
d’agir plus directement sur une portion d’hommes, et
celui enfin d’avoir une fois un séjour fixe sur la terre,
venait de même se faire sentir. Ce fut au milieu de ces
réflexions et de ces causeries que nous arrivâmes chez
Mme Lineweg, et cela une demi-heure après le moment
convenu. Tout en entrant, nous apprîmes que le SEIG
NEUR faisait déjà sentir sa présence. Anna avait peineà
combattre l’esprit; depuis un quart-d’heure elle com
battait, aussi entra-t- elle immédiatement en état d’ex
-87
w
tase, et dit: IUn prêtre du SEIGNEUR est là et dit: écris.‘
Ces paroles, et le ton dont elles furent prononcées,
rappelèrcnt à la veuve ces heures paisibles de dévotion
pendant lesquelles le défunt savait si bien édifier la
petite société de chrétiens qui venaient chercher chez lui
la nourriture spirituelle pendant sa vie ; et elle ne put
s’empêcher de verser des larmes.
«Le SEIGNEUR l’avait donné, le SEIGNEUR l’a enlevé,
que le nom du SEIGNEUR soit béni! Voilà, dit la voix,
qui doit être votre consolation, ma chère femme, et mes
chers amies en Jésus-Cunrsr. Oh! qu’heureux est celui
que le SEIGNEUR visite dans le plaisir et la peine, dans
la joie et les tribulations! Ce que fait ton Dieu est bien
fait. Oh! chantez l’amour éternel, louez-le par des
cantiques d’allégresse. C’est à Lui qu’appartient lagloire,
à Lui l’amour. Alléluia! Amen.
«Réjouissez-vous: partout où deux ou trois sont
assemblés au nom de Jésus, Jésus est au milieu d’eux.
Et où est Jésus, là est la paix et la joie! Heureux qui
le reçoit; il reçoit Celui qui livra son fils unique à la
mort, afin que ceux qui croient en Lui ne soient point
perdus, mais qu’ils aient la vie éternelle. Heureux celui
en qui vit Jésus; il vaincra le monde. Et bien qu’il soit
quelquefois inquiet, qu’il ne se décourage pas; son Sau
veur lui dit: Dans le monde vous avez de la peine, mais,
consolez-vous, j’ai vaincu le monde. Réjouissez-vous,
bien-aimés, et louez le SEIGNEUR quand Il vous humilie,
quand Il vous abaisse et vous réduit au néant. Il veut
faire de vous une œuvre admirable pour la gloire de
son saint nom. Pour vous donner tout, Il vous enlève
tout; pour qu’Il devienne tout pour vous, il faut que
vous soyez réduits à néant. Patientez, mes amis, dans
.' -38—
cette école de la souffrance et de la grâce. Pensez que
ce qui est amer dans la bouche est favorable à la santé.
Le SEIGNEUR, le Dieu de miséricorde, Il vous fait des
cendre d’abord avec Lui dans les enfers, où Il est des
cendu Lui-même; c’est dans ce creuset qu’il vous pu
rifie comme de l’or, afin que votre foi devienne réelle
et véritable; afin qu’elle devienne agissante dans la cha
rité. O âme chère et précieuse, si tu épreuves cette
grâce qui châtie pour le bien, ferme la bouche et adore.
Jette-toi dans l’abîme de l’amour lequel te purifie de
toutes tes scories, et te rend propre à devenir un ci
toyen du royaume céleste. Oh! quand la grâce de notre
SEIGNEUR et Sauveur JESUS-CRRIST, auquel appartient la
louange et la gloire à jamais, brise bien ainsi un cœur
pécheur, ce n’est autre chose que l’action puissante de
l’Esprit qui procède du Père et du Fils. C’est là cet
attrait ineffable du Père que l’on n’exallera jamais assez
pendant l’éternité, qui pousse vers le Fils, lequel il son
tour porte la brebis égarée sur ses épaules, la porte au
Père, la place dans son cœur, et la ramène ainsi dans
sa véritable patrie. Vous êtes des pèlerins et des étran
gers ici bas: et vous êtes heureux de l’être, car tous vos
vœux, tous vos désirs vous portent vers le lieu où vous
devez demeurer éternellement. Si différentes choses
vous pèsent sur la terre, mes bien-aimés, pensez que
v0us êtes en voyage, et que naturellement vous devez
rencontrer diverses incommodités; que toutes ces peines
et ces amertumes ne font qu’augmenter chez vous la
maladie du pays. Toutefois, mes bien-chers, ce ne sont
pas les peines, ce ne sont pas les chagrins qui doivent
produire en vous le souhait de mourir pour être auprès
de CHRIST. Il faut que la maladie du pays devienne
_89_
pure chez vous: l’amour, l'amour ardent tout seul, pour
votre RÉDEMPTEÙR, votre Sanctificateur, pour l’Ami de
vos âmes; cet amour seul doit vous rendre assez ma
lades pour que vous puissiez dire avec vérité et de tout
cœur: c’est l’amour du SEIGNEUR qui me fait désirer ma
dissolution. Vous éprouverez alors combien votre JESUS
s’empressera de vous réjouir de ses fleurs, et d’étancher
votre soif du jus de ses pommes ’). 0 mes petits en
fants, je vous le répète, apprenez à aimer, et vous avez
tout appris.»
Mme Lineweg fut appelée en ce moment, et nous
l’entendimes bientôt causer avec le médecin dans la
chambre à côté. Le Bienheureux dit alors d’un ton plus
bas; mais avec un grand sentiment de joie: «Réjouis
sez-vous, mes bien-aimés, réjouissez-vous; encore un
peu, et nous serons tous consolés par le SEIGNEUR; et
alors notre joie ne sera plus interrompue. —- Continue
d’écrire mon ami. » .
«Ecoutez, bien-aimés, ce que JESUS'V0us dit:
Le danger vous presse-t-il de tous côtés,
Faites ce que fait un enfant,
Il remet tout aux soins. de_sa mère,
Il se réfugie dans son giron et s’endort.
«Je t’ai aimé depuis longtems, dit le SEIGNEUR, je
t’ai toujours aimé; voilà pourquoi ma bonté t’a attiré
jusqu’à moi.. Ce n’est point toi qui m’as choisi, c’est
moi qui t’ai choisi. J’ai tout fait pour vous: et vous,
‘) Les fleurs, dans la langue céleste, signifient les joies pro
venant du vrai spirituel (Apoc. expl. 507); les pommes
les joies provenant du bien spirituel (ibid. 458). .
I _ % _
qu’avez-vous fait pour Moi? Je ne demande qu’un
retour d’amour, continue JESUS: pouvez-vous me le refu
ser? Je vous place comme un cachet sur mon cœur;
laissez-vous donc bien éprouver par mon amour. Mon
trez par votre conduite, que la grâce a créé en vous la
charité; prouvez par là que tout ce que JESUS vous en
voie, vous le recevez comme un gage d’amour. 0 mes
chers petits enfants! cet amour vous rendra bienheureux;
il rendra doux tout ce qui est amer; et le plus précieux
de tous les joyaux, l’heureuse paix du SEIGNEUR, ne sera
plus troublée chez vous; car vous direz sans cesse:
C’est le Père qui agit. Quand votre foi sera attaquée
au point que vous croyez que tout est fini, ômes bien
aimés, c’est alors que le soleil de la grâce est le plus
près de vous! C’est de sa chaleur que vient la couleur
brune de la Sulamith. Oh! réjouis-toi, âme bien-aimée,
le Père se souvient de son enfant, le Pasteur de sa
brebis, l’Epoux de son épouse. Patientez, bien-aimés,
patientez avec l’homme de Dieu, et chantez de tout cœur
avec lui ce cantique de la confiance: Malgré cela, je
serai toujours avec toi, SEIGNEUR (P5. 75, 25). Oui, mes
bien-aimés, celui qui demeure inébranlable malgré tous
les revers, verra enfin arriver le Libérateur, qui ne
laissera pas éternellement souffrir ses serviteurs. Il le
mènera enfin à son but, son unique, et à un but glorieux.
Après qu’Il l’aura conduit selon sa sagesse ici-bas, Il
le recevra en honneur; et Il lui donnera un nouveau
nom, que personne ne connaît que celui qui le reçoit.
Et comment, direz-vous, faut=il entendre ce nouveau
nom? Le voici: ce nom, mes bien-aimés, est frappé au
coin du caractère qu’imprime à chacun la course de
sa vie. Le bienheureux qui s’est endormi dans le
_91_
SEIGNEUR, porte un regard en arrière sur toute la car
rière de sa vie terrestre; cette vue le porte à l’éternelle
louange de Dieu; car il voit ce qu’il a été; et il voit ce
qu’il est devenu par l’admirahle munificence de Jésus!
Il voit Ïquelle route il aurait prise, si le Bon Berger
n’eût eu pitié de lui, et ne l’eût reçu en grâce; il se con
naît, il connaît son nouveau nom.
C’est de là, mes bien-aimés, que vient le chant
éternel des bienheureux, et leur éternel Alléluia:
Le SEIGNEUR est venu a mon secours ,
Le SEIGNEUR m’a sauvé,
Son sang m’a lavé,
Il a en pitié de moi.
Je serais perdu maintenant
S’Il ne fût accouru a mon cri;
C’est Lui, c’est Lui qui m’a racheté!
Il m’a attiré à Lui.
A Lui la gloire!
Sa fidélité et sa grâce
Demeurent à jamais. Alléluia. Amen.
. Maintenant, mes bien-aimés, le SEIGNEUR votre
Rédempteur vous a fortifiés, allez donc et témoignez
Lai votre gratitude par un cantique de louange. Edi
fiez-vous les uns les autres en vous entretenant de ce
que vous avez entendu. Que le SEIGNEUR notre Sauveur
à tous, le SAUVEUR unique, bénisse vos cœurs, afin
qu’ils portent des fruits de gloire et de salut en CHRIST.
C’est son amour qui m’a porté à vous parler. — Ré
veille. '
Je relus toute la relation, afin qu’Anna en eût
aussi connaissance. Nous chantâmes quelques cantiques
sur l’amour du SEIGNEUR. Mon cœur était rempli de joie.
Quelquefois je frissonnais en pensant à ces événements
6..
_92_
supérieurs; mais je pus chanter sans fatigue, et plus
longtems qu’à l’ordinaire.
Du ’19 Septembre 1855.
Je n’avais pas l’intention d’aller aujourd’hui visiter
la famille Lineweg. J’étais au musée à étudier, entouré
de Journaux savants et politiques; au milieu de tout
cela je me sentais de tems en tems poussé de m’y rendre.
Je me raisonnais, je trouvai des raisons de rester, et
me remettais à l’étude. Enfin pourtant je cédai, sou—
riant en moi—même de cet esprit inquiet. Mais déjà à la
porte je rencontrai Chandani qui s’était de même senti
pressé d’aller dans cette famille. Nous n’avions nulle
idée, ce jour-là, de vouloir entendre quelque chose
par la voie surnaturelle. Seulement le matin nous nous
étions entretenus péniblement de notre position; nous
nous étions confié mutuellement les peines de nos cœurs,
nous plaignant de ce que même nos travaux relatifs au
règne de Dieu, auxquels nous avions sacrifié notre re
pos, n’avançaient point et se trouvaient contrariés de
tant de façons. Mon ami ne s’était de même décidé à
venir que parce qu’il n’avait pu combattre plus long—
tems les sollicitations intérieures. Cependant entrés
chez Mme Lineweg, Chandani n’eut que le tems de lui
donner quelques nouvelles consolantes touchant ses
enfants, en confirmation des promesses que le SEI
GNEUR en avait faites, quand Anna fut aussitôt ravie en
esprit, et que je fus dans le cas de préparer la plume
et le papier. c Oui, mon ami, dit le Bienheureux, tu
peux écrire. '
c Vous savez assez, mes bien-aimés, continua-t-fl,
quel est celui que l’amour presse de venir vous entre
-95
tenir; c’est un envoyé du Roi de vos âmes et de l’auteur
de votre félicité. Que JÉSUS-Cmusr, la couronne de vie,
soit toujours avec vous, afin que vous soyez liés toujours
plus étroitement par les liens de son saint Esprit, et
que par ses communications vous soyez de plus en plus
enracinés dans la vraie liberté des enfans de Dieu. C’est
l’amour, l’amour fidèle de JESUS qui fortifie et renou
velle continuellement, et qui là même où il frappe,
n’ouvre la plaie que pour la guérir plus radicalement.
Voilà ce qui vous arrive dans ce moment, bien-aimés
dans le SEIGNEUR; c’est le pur amour de JESUS qui vous
visite: le SEIGNEUR châtie ceux qu’il aime. Oh! qu’heu
reux est celui sur qui tombe ce châtiment de l’amour!
heureux celui qui s’y soumet, non seulement parcequ’il
le faut, mais volontiers et avec un plein consentement.
Les plus riches bénédictions tombent sur lui à chaque
pas. Vous êtes comme chassés, pour le moment, mes
frères dans le SEIGNEUR, mais consolez-vous, ce n’est
aussi que pour un moment; vous êtes comme une petite
plante méprisée; mais soyez tranquilles et joyeux, votre
trésor est dans le ciel; le jardinier des grâces vous y a
transplantés, dans la prairie de son immense amour.
C’est Lui, c’est le Dieu éternellement fidèle qui vous
conduit, et cela par des chemins dont l’entrée est extra
ordinaire, et la fin glorieuse. O cœur d’ami, cœur de
père, ne saigne plus, ne saigne jamais plus; c’est le bon
pasteur qui est le Maître, l’Ami, le Protecteur de ces
enfans qui sont bien plus siens que tiens. Oui, ils sont
à Lui, et il conserve ce qui Lui appartient. Oh! que
tu es heureux d’avoir répondu à l’appel de l’amour
éternel te préparant une bénédiction en te disant: «Mon
ami, laisse ces petits enfans venir à moi. Je veux les
-94_
élever pour ma gloire, pour ta félicité. Tu les as
bénis en moi, et je les ai bénis en toi, en les enrichis
sant de la semence du salut. Vois, cette semence est
placée profondément dans leurs cœurs, comme un or
précieux qui ne prend point de rouille. Moi-même, je
me les conserverai comme ma propriété; car en vérité, je
te le dis, la faiblesse de leur mère ne leur sera point
mortelle) Voilà mon ami, la promesse que t’a faite le
SEIGNEUR ton Dieu, et sa parole est stable éternellement.
Il est le Dieu d’amour; l’Ancien des Jours. Il a été hier,
il est aujourd’hui, et sera le même à toujours et à jamais,
Amen.
«Et toi, mon plus jeune ami, apprends que tes
prières, tes soupirs et tes supplications pour ces petites
brebis, ont aussi pénétré jusqu’au cœur du Père. 0
mon ami, il y a toujours autour de vous un certain
nombre de bienheureux, dont le bonheur est chaque
fois enflammé par la joie que vous leur préparez en
faisant des prières qu’il leur est permis de porter au
sein de Celui qui peut les exaucer. Si après une prière,
après une sollicitation bien intime, tu sens comme un
frisson qui pénètre tout ton être, oh! réjouis-toi, c’est
que tu as reçu de la part d’un ange le baiser de paix et
d’amour au nom du Dieu de miséricorde. Oh! alors
laisse monter librement ton cœur vers Celui qui a tout
fait pour toi; et sois réjoui en Lui. Et si Satan, dans
sa méchanceté infernale t’envie cette bénédiction, et te
tourmente par des inquiétudes intérieures, alors soupire
simplement après ce Jasus, dont l’amour est toujours
ancien et toujours nouveau, et tu sentiras
Qu’un regard porté vers Lui
Ramène mille et mille bénédictions.’
-95...
Sois persévérant dans la prière; demande instam—
ment à ton Dieu qu’il fortifie ta foi, qu’il augmente ta
charité, qu’il te conserve l’espérance, qu’il entretienne
ta patience, et assure ton humilité. Et tout te sera ac
cordé; car le SEIGNEUR s’est donné lui-même à tous, et
à vous tous, comme Conseil, Force, Héros admirable,
comme Père de tous les siècles, et comme Prince de la
paix. Heureux celui qui l’a reçu, il est la proie du ciel;
Alléluia! Amen.)
Je me rappelai qu’avant de sortir de chez moi le
matin, j’avais lu la sentence citée plus haut; que je
l’avais méditéc, et je le lui dis: Ah! répondit-il, j’ai
souvent fait la même surprise à ma femme, en trahis
sant ainsi ses pensées. Mais, ma chère, ajouta-t-il, tu
peux réveiller maintenant; le Dieu de gloire, le Sauveur
riche en grâces vous a comblés de toutes ses bénédic
tions.‘
Il est vrai que nous nous sentions tout renouvelés,
et tout humiliés à cause de notre indignité. -— Je dois
encore ajouter que quelques jours auparavant, d’après
une invitation de Lineweg, sa femme m’avait conseillé
de lire la vie de quelques âmes pieuses par Tersteegen,
afin de méditer sur la conduite du ciel à leur égard.
Du 25 Septembre 1855.
La respectable veuve souffrait depuis plusieurs ours
d’un rhumatisme très—douloureux au bras, pour me servir
de l’expression par laquelle elle désignait un mal bien
plus sérieux et plus grave. Depuis assez longtems je
magnétisais de l’eau pour elle; et elle s’en trouvait bien
comme bien d’autres personnes, s’en étaient servies
avec confiance. Mais alors son mari lui dit le soir, de
_96_
m’engager à lui frotter le bras immédiatement; vu que
le SEIGNEUR m’avait accordé beaucoup de force magné
tique. Je m’y rendis donc ce soir, bien charmé de pou
voir rendre quelque service à une personne qui m’était
si chère, et j’allais commencer les frictions, lorsque
nous apperçumes chez Anna les symptômes de son état
supérieur. Comme on venait de laver le cabinet, aussi
bien qu’une autre pièce voisine, et que je craignais
l’humidité pour ma patiente, je proposai de rester dans
le salon; ce que néanmoins Madame n’approuva pas,
dans la crainte d’être dérangée par des visites. Nous
conduisîmes donc Anna dans le cabinet; mais déjà en
chemin elle commença à parler:
«Votre fidèle ami est là, dit la voix: si je n’avais
pas su qu’il y a encore une petite place sèche dans la
maison, je me serais bien gardé d’influencer Anna en
ce moment; pourquoi ne la conduisez-vous pas dans
mon ancien petit oratoire?
(C’était un tout petit cabinet à côté de la première
chambre de Lineweg, auquel nous n’avions effectivement
point pensé; et nous y fîmes passer Anna, tandis que la
voix disait: Contentons-nous pour cette fois de ce petit
coin.)
Lui. Des âmes qui demandent peu pour être heureuses
savent se contenter de la plus petite chose. Je
voulais te dire, avant tout, mon cher cœur, de ne
jamais laisser l’eau ainsi bénite, ou magnétisée,
sans fermer la bouteille.
Elle. Je ne la laisserai plus ouverte; la vertu sans doute
s’évapore.
Moi. Ou bien de mauvais esprits pourraient la dénaturer.
97
Elle. C’est encore vrai, l’ennemi en approche plus fa
Lw.
cilement. .
Cette dernière raison est la véritable. -— Ecris
maintenant quelques mots, mon cher ami:
«Je vois que tu es toujours encore un peu ti
mide dans tes demandes: cela ne vaut rien; sois
tout-à-fait libre et abandonné avec ton ami. Il
faut que tu saches que quand notre glorieux RE
DEMPTEUR était sur la terre au milieu de ses dis
ciples, et conversant avec eux, Il voyait bien sou
vent leurs pensées et leur désir de l’interroger,
sans pourtant leur en parler. Il se conduisait, en
attendant, comme s’Il ne le savait pas. Et pour
quoi cela? C’est parce qu’Il voulait qu’ils arri
vassent au point de Lui parler avec franchise,
d’aller à Lui avec une pleine confiance, et de Lui
adresser hautement les questions qu’ils avaient à
Lui faire. Et chaque fois Il leur répondait avec
une bonté inconcevable. Lui, qui est omniscient,
n’avait point besoin de l’intermédiaire d’un son
matériel, pour savoir tout ce qui était dans l’homme ;
mais Il voulait faire sentir à tous la dépendance
pleine de grâce dans laquelle ils vivaient. Tu
n’as point non plus, mon cher ami, à te gêner en
rien devant mon épouse. Comme femme, comme
mère, comme amie, elle a acquise assez la connais
sance des choses de ce monde; ne crains donc
pas de lui faire part sans aucune gêne de l’état de
ton intérieur. Et qui donc désire plus sincèrement
le bien d’un enfant que sa mère? Vois-tu? l’amour
de CHRIST me presse de te dire tout cela. Tu re
çois aussi en ce moment ton petit emploi de béné
' 7
_98_
diction: un bienfait en vaut un autre. Le SEIGNEUR
ton Rédempteur t’a accordé beaucoup de feu élec
trique, ct tu es disposé à employer ce feu pour
sa gloire; tu sais que c’est une grâce qui vient de
Lui, et que c’en est une nouvelle de servir entre
les mains de son amour, et en son nom, d’instru
ment au soulagement de ses semblables. Conti
nue donc tes fonctions. (Lineweg aussi pendant
sa vie avait en la main très-bienfaisante ; sa femme,
comme beaucoup d’autres personnes en avait res
senti les heureux effets.) Frotte au nom du Dieu
Trois fois saint, ce présent de Dieu , ma chère
femme, depuis l’épaule, le long des bras jusqu’aux
bouts des doigts, en faisant un mouvement comme
si tu voulais rejeter quelque chose.
(Madame me montra comment son mari avait
toujours fait.) Elle lui demanda, sije devais aussi,
comme lui, faire les passes au nombre de neuf; il
répondit qu’oui. De cette manière, ajouta-t-il, tu
reçois à mesure que tu donnes. Au nom du SAU
vEUR, il sortira à chaque passe une vertu salutaire
de toi; mais le Dieu d’amour te la rendra à me
sure et avec usure.
Moi. Je sens parfaitement que cette vertu que je com
munique, ne peut venir que de Dieu; car moi-même
je suis naturellement très-faible. Je me sens sou
vent entièrementprivé de force; tandis que d’autres
fois je me sens plein de vigueur; surtout dans les
mains, qui sont alors comme chargées; au point
que je sens distinctement l’influence qui survient:
mais moi-même je suis faible.
Lui. Quand tu es faible, c’est alors que tu es fort;
99
Moi.
Lui.
Elle.
Moi.
Lui.
car c’est dans les faibles que Dieu est puissant.
Commence donc au nom glorieux de notre SEI
GNEUR JESUS-CIIRIST. Quand cela ne procurerait que
quelques heures de soulagement, mes bien-aimés,
cette œuvre de charité ne serait point sans objet.
Assurément; et d’ailleurs, il n’y a que du plaisir
à rendre quelque service à des personnes que l’on
aime et que l’on honore.
Crois-moi, ma chère, je connaissai trop bien mon
ami, pour ne pas savoir que je pouvais m’adres
ser àlui. (Madame, dans la crainte de me prendre
du tems et de la force, n’avait pas voulu me faire
part des soins dont son mari me chargeait.) Il
fera certainement tout ce qu’il pourra, et avec
plaisir; et certes aussi, dans ces cas là, la béné
diction du SEIGNEUR n’y manquera pas. Toutefois
rappelez-vous, qu’en tout ceci, le succès est en
tièrement entre les mains du SEIGNEUR, dont la
volonté seule soit faite en tout et partout.
Je suis en cela entièrement soumise au SEIGNEUR;
Il sait bien qu’il est nécessaire que j’aie ce mal,
sans cela lui-même pourrait me l’ôter tout-à-fait
en un instant.
Son intention est de laisser à d’autres le plaisir
de soulager de semblables souffrances, en leur en
donnant le pouvoir..
Enlever, en ces cas, toutes les souffrances, ce se
rait enlever en même tems toutes les bénédictions.
Apprends par là, mon ami, apprends de nouveau
quelle est la fidélité de ton Dieu, qui s’occupe avec
tant de bonté de notre enveloppe de poussière,
et qui a imprimé tant de majesté à notre corps
71
100 -
mortel. Combien plus de soin encore ne doit—il
point avoir de notre âme immortelle? Combien
ne doit-il pas attacher d’importance à ce qu’elle
soit perfectionnée, rendue digne de Lui et de sa
félicité? Donc, mes bien-aimés, revenons toujours
au point principal: Celui qui n’a point épargné
son Fils unique, mais l’a livré à la mort pour
nous donner la plénitude de la vie, comment, avec
ce fils, ne nous aurait-il pas tout donné? Que ce
soit là, mes bien-aimés, le fruit de sa bénédiction
d’aujourd’hui sur vous.
Peu de paroles, mais beaucoup de bien,
C’est JESUS qui I’opère en nous,
Lui, le fidèle, le véritable ami,
Il nous a toujours voulu du Bien.
Alléluia, Amen.
«Fais remarquer encore à mon ami, ajouta-t—il, ma
chère, qu’il y a dans sa dernière relation un endroit
inexact; le mot enflammer (entzi‘mden) doit remplacer
celui d’éprouver (empfinden). (On peut voir plus haut
(page 90) que j’avais bien employé le mot éprouver,
mais je l’avais placé avec quelque répugnance.)
«Encore un mot pour terminer, dit-il avec rapidité,
j’ai deux choses à vous proposer, vous en ferez l’une
ou l’autre aujourd’hui, et le tout à une prochaine ré—
union; édifiez-vous par un cantique de louange, ou tirez
au sort quelques miettes des grâces de la parole de
Dieu.”
Madame voulut que je décidasse. Ence cas, dis-je,
je voudrais de tout mon cœur chanter au SEIGNEUR un
cantique d’actions de grâces pour tant de bienfaits reçus
-—IOI-—
de Lui en ce. jour, entre autrgs pour ses lumières sur
plusieurs passages de la Parole.
Lui. Bien; faites cela; et toi aussi, ma chère, au milieu
de tes souffrances, le SEIGNEUR a souvent tourné
sur toi un régard de miséricorde; tu peux bien
aussi mêler ta voix aux cantiques de louange et
de gratitude. Le remercier est une prière nou
velle. Et maintenant, mes bien-aimés, que le
SEIGNEUR demeure avec vous; et si alors votre
sentier vient quelquefois à s’obscurcir, vous avez
sa lumière, Il est la lampe de nos pieds. Amen.
Du 24 Septembre 1855. ’
Je remarque seulement pour ce jour que j’ai fait les
frictions ordinaires au bras de la Dame soulfrante, qu’elle
a ressenti une grande chaleur au simple contact de mes
mains, et que son mari lui a fait savoir le soir que le
SEIGNEUR avait contribué à ce bien-être par sa sainte
présence.
Du 26 Septembre 1855.
J’eus de nouveau à passer quelques heures téné—
breuses; quelquefois c’était un fond d’inquiétude inex
plicable, quelquefois le chagrin causé par de nouvelles
découvertes de la dégradation de mon être; quelquefois
encore l’insénsibilité, l’indifférence glaciale que je sen
tais pour tout bien; et enfin une foi toujours languis
saute et sans activité. Comme Lineweg m’avait engagé
avec tant de bonté à lui parler sans gêne, je me propo
sai de l’interroger, à la première occasion, sur cet état
d’inquiétude; afin de savoir comment j’avais à m’y con
duire. Aujourd’hui donc, tandis queje passais les'mains
—102—
sur le bras souffrant, Arma entra tout-à-coup en extase
et dit: «L’ami de son ami est là, il désire que l’on écrive. ’
«Loué soit le SEIGNEUR qui nous a fait la grâce de
lier une de ces amitiés qui durent éternellement. C’est
Lui, c’est l’amour éternel qui l’a fait; ce qu’ll lie tient,
ce qu’Il noue ne peut plus se dénouer. Celui dont le nom
est admirable nous a aussi fait faire connaissance d’une
admirable manière: que ce soit pour sa gloire et notre
salut! D’où peut venir, mon ami, que Dieu ne t’ait pas
conduit ici deux ans plus tard, comme cela pouvait
tout naturellement se faire? Ah! Lui, qui sait tout, n’a
p -’nt agi sans de sages raisons. Il conduit tout à des
fins si admirables! qu’ll soit loué et béni à jamais. Com
bien il est consolant pour nous d’avoir appris de sa
bouche, que toutes choses (souligne ces mots) tournent
à leur plus grand bien, pour ceux qui aiment Dieu. Je
sais très-bien, mon ami, que dans les premiers moments,
mon jour de naissance pour l’éternité te paraissait avoir
été trop hâté. (Oui, à lui et à beaucoup d’autres, ajouta
Madame en pleurant.) Eh bien, s’écria-t-il, maintenant
par la grâce n’es-tu pas devenue, toi, plus résignée?
n’as tu mieux renoncé à ta propre volonté? Tu Lui en
sais gré; et cela aussi le SEIGNEUR l’a bien fait. — Je
conçois bien, ma chère femme (elle continuait de pleurer),
que tout cela tu ne peux "à présent le bien reconnaître
que comme chrétienne, par la foi, la charité et l’espé
rance: mais sois sûre, que quand un jour ton tour vien
dra de passer à l’état de clarté, tu verras de tes propres
yeux, et tu reconnaîtras avec une profonde gratitude, que
le meilleur moment de mon départ était l’heure de dé
livrance choisie par le SEIGNEUR. — Et toi aussi, mon
ami, sois en persuadé. Tout ce qu’îl fait est bien fait
—105—
Pensez que c’est l’amour même qui a tout :irrangé; alors
la douleur elle-même vous paraîtra douce. Celui qui
connaît le SEIGNEUR JESUS, n’a pas besoin d’autre chose.
Si vous le possédez réellement, mes bien-aimés, vous
possédez tout, et vous ne manquez de rien. Tout ce
qui est à Lui est à vous. Quel baume pour le cœur hu
main, qu’une pareille assurance! Plus d’une fois vous
vous êtes écriés vous-mêmes: Si ta parole, Seigneur,
n’eût été ma consolation, j’eusse péri dans ma misère.
Voilà, jusqu’où, mes bien-aimés, l’amour éternel a étendu
ses soins. Il n’a préparé que des choses précieuses et
admirables pour ceux qui se donnent à Lui. Vous n’avez
qu’à demander, pour recevoir avec abondance; vous
n’avez qu’à étendre les mains et prendre. Sans doute,
mes bien-aimés, l’amour éternel connaît les jours et les
heures mieux que vous; mais rassurez-vous,
Quelque étroit que soit le sentier
Quelque mauvais, quelqu’ahandonné!
Quel que soit le nombre des épines
Et des croix dont il est semé;
Traversez le désert,
Avancez toujours, avancez!
Nous suivons notre guide,
Et nous sortirons triomphants.
«N’est-ce pas, ma chère femme, c’est une expérience
que nous avons souvent faite?
Elle. Assurément. Mais ces vers me paraissent si connus?
Sont-ils tirés d’un cantique, ou les ai-je déjà en—
tendus réciter dans l’état extatique?
Lui. Tu voudrais le savoir?
Elle. Oui, s’il n’y a point d’obstacle.
Lui. Petits enfants, venez, allons, etc.
104
Elle. Ah! je inc le rappelle! C’est un cantique qu’il a
Moi.
Lu 1‘.
Moi.
Elle.
La1.
Moi.
Lul.
souvent récité en forme de prière dans ses réu
nions. Il en savait un grand nombre.
Ces vers peignent parfaitement mon état; mais
comment percerai-je à travers les buissons et les
épines? Je m’y arrête plein d’inquiétude et de
découragement.
Cela arrive souvent au voyageur. Nulle part il
n’aperçoit d’issue; devant lui, il voit l’obscurité,
derrière lui les ténèbres: mais il faut néanmoins
qu’il prenne courage.
Quelqu’obscurité qu’ofl're l’horizon,
Quelque oppressé que soit ton cœur,
Un seul regard vers Celui qui règne aux cieux
Ramène la paix et la tranquillité.
Vois-tu, ma chère femme, il faut que je fasse aussi
part à mon ami du trésor que j’ai amassé.
Les cantiques impriment admirablement certaines
vérités dans l’esprit et le cœur.
Tout y est dit avec simplicité et avec concision.
Savez-vous, bien-aimés, ce qu’il y a de meilleur
dans tout cela? c’est que les vérités et les senti
ments exprimés entrent dans la vie et la conduite.
C’est bien vrai; je voudrais pouvoir y réussir.
(Le sourire perçait dans son ton de voix.) Toi tu
ne peux rien faire, quelque peine que tu prennes;
réunis toutes tes forces, toutes tes pensées, toutes
tes facultés, tu ne parviendras à rien de réel;
mais rappelle-toi ce mot: Je puis tout en‘Celuz’
qui me fortifie, savoir, en Camsr.
——.105—
«Il serait possible que tu dises en toi-nième, mon
cher ami, (et je me le disais réellement): La sentence
rappelée plus haut, qu’un régard vers JESUS-JEHOVAE
ressuscité des morts, rétablit aussitôt la paix dans l’âme,
ne s’est point encore vérifiée en moi. Mais ne crains
pas, ceci—même (souligne ces mots), ceci—même est pour
ton bien, et doit t’y conduire. — Et comment donc cela
mon REUEMPTEUR, ô Pasteur de mon âme? —— Le voici,
chère brebis: Il faut que tu fasses des progrès dans la
vertu de patience. — Dans la patience? — Oui, mon
fils, dans la patience; car la patience est nécessaire à
ceux qui combattent sur la terre. — Et à quoi donc doit
elle me servir, mon cher Maître? - A devenir fort,
mon cher disciple, dans l’accomplissement de la volonté
de Dieu.
«Quand tu ne vois plus rien, quand tu n’entends
plus rien, et que tu crois être entièrement émoussé, obtus,
incapable; alors va, ou si tu ne peux marcher, traîne
toi, auprès de JESUS, ton éternel ami, qui ne connaît
point de changement, et tiens-toi simplement dans sa
présence. —
Moi. Voilà précisément mon état. —- Mon Dieu! qu’il
est étonnant, dis-je à Mme Lineweg, que l’on ré
ponde ainsi à mes pensées les plus secrètes! Au
jourd’hui même, quand j’avais le cœur si oppressé,
j’avais prié le SEIGNEUR de me consoler par sa pa
role, et en l’ouvrant je.tombai sur le passage du
Bon-pasteur et de ses brebis. Combien ce passage
est beau, me dis—je, mais il faudrait être réellement
une brebis du SEIGNEUR. Il est dit: elles entendent
ma voix et me suivent; mais quand on est sourd,
que l’on n’entend pas, et boiteux et que l’on ne
106
Moi.
Lui.
Moi.
Lui.
Mai.
peut marcher: qu’y a-t-il à faire? Alors on ne
lui appartient pas.
Tu vois du moins par là, mon ami, que tu es l’ob
jet des attentions de ton SEIGNEUR: tu n’es donc ni
abandonné, ni négligé, mais simplement éprouvé.
Je voudrais bien endurer cette épreuve, mais je
voudrais aussi savoir commentje dois me conduire.
Dis, ou plutôt bégaie, ces mots, en t’adressant au
cœur de JESUS comme au cœur d’une mère : SEI
GNEUR parle, car ton serviteur écoute. Et même
alors, quand tu n’entendrois pas un mot de ré
ponse, il ne faudrait pas perdre courage. Car tu
te rappelles, toi, qu’une tendre mère, tout en de—
meurant muette, jette encore un regard indéfinis
sable sur son nourrisson dans ses bras!
Il est vrai, l’amour d’une mère caractérise le mieux
l’amour du SEIGNEUR.
Eh bien, si tu t’abandonnes entièrement à cette
mère, tu n’as plus à t’inquiéter de ton éxtérieur
dérangé, malpropre, taché. Un nourrisson ne se
salit-il pas dix fois par jours? et arrive-t-il jamais
que la bonne mère le laisse dans cet état? sa
tendresse se décourage-belle? ou prend-elle de
l’humeur? — 0 mon ami! et quand il arriverait
qu’une mère oubliât son enfant, sois assuré, en
présence de notre SEIGNEUR à qui rien n’est caché,
et qui est la vérité même, que JESUS-CRRIST, plus
tendre et plus fidèle que toutes les mères, ne
t’oubliera pas; que tu es toujours présent à ses
yeux, et que tu lui as été gravé dans les mains et
dans le côté!
Oh! cet amour est si grand qu’on ne peut y croire.
107
Lu1.
Et toutefois je sais que je ne surmonterai Satan
que quand cet amour sera devenu bien vivant dans
mon cœur et que je croirai queje suis aimé. Voilà
pourquoi Satan met tout en œuvre pour ne me
point laisser parvenir à cette foi, et qu’il me re
proche continuellement mes péchés.
Comment donc, un amour éternel, indicible, incon
cevable, immense, sans bornes, et qu’aucune langue
ne saurait décrire, comment ne pourrait-il point
avoir pitié, même du plus misérable des pécheurs?
Pour qui cet amour s’est-il fait crucificr? pour
qui s’est-il fait fouetter, martyriscr, couvrir de
crachats, maudire, persécuter àmort? Pour qui?
-— Pour une âme que le père du mensonge, le
meurtrier dès le commencement, a laissé languir
dans son sang. Voilà ce que déplorait l’Etcrnel;
voilà ce qui porta son incompréhensible charité
à abandonner le séjour des parfaites félicités, à
s’abaisserjusqu’à terre, à étendre sa main miséri
cordiense, et à saisir cette pauvre âme, perdue
sans Lui. Il fit plus cet amour! Il fit couler le
baume précieux et bienfaisant de son huile sur
cette âme; Il lui donna à boire la boisson de la
vie, le vin qu’il produit lui-même comme le véri
table cep ‘). Cet amour, il prit soin de cette âme
pour le passé, pour le présent et pour le tems fu
tur. 0 mon ami, le SEIGNEUR, l’ami des pécheurs,
t’a appelé, t’a élu, pour être la proie de cet amour.
Oh! attends donc avec patience: ton Protecteur
‘) L’huile signifie l’amour divin (Apoe. expliq. 575, 684); le
vin la vérité divine (ibid. 252, 576, 1152).
108
Moi.
Elle.
0l.
Lui.
Moi.
Lui.
est Celui devant qui doivent se ployer les genoux
de tout ce qui est dans les cieux, sur la terre, et
sous la terre! Et il est fidèle, mon ami, sois en
assuré, ce RÊDEMYTEÜR, ce SAUVEUR plein de misé
ricorde et plein d’amour.
Il aide à tous et toujours
Non quand l’homme le pense,
Mais au tems qu’il le faut.
Amen.
«Ajoutez tout ceci aux trésors que vous avez déjà
déposés dans vos cœurs.
Hélas! quel désert dans le mien! tout m’est enlevé
à la fois; car je ne puis encore croire fermement.
Et pourquoi ne croiriez-vous pas? Croyez donc
enfin sans retour.
Je le voudrais bien, mais le péché m’en a ôté la
force.
La foi est un don de la grâce.
Oh! je le sens bien; je ne puis qu’une chose, prier
que Dieu me donne la foi et la patience.
La patience est souvent mise à unelongue épreuve;
mais tout-à-eoup le secours arrive, et il arrive avec
puissance (ces derniers mots il les prononça avec
une énergie particulière). Sais-tu, mon ami, qui
a prononcé un jour ces paroles: J’ai prié pour
toi afin que ta foi ne succombe pas? Il t’adresse
ces mêmes paroles; le fidèle Intercesseur dans les
cieux, prie pour toi, il prie avec toi; et quand
l’heure sera venue, quand ce sera pour ton bon
heur, alors tu recevras la foi dans toute sa pléni
tude.‘
Le lendemain matin en tirant des sentences au sort,
—109—
il m’échut la suivante: La part de ceux qui se dé;
couragent est dans l’étang de feu (Apoc. 21, 8.). C’était
un rayon bien lumineux tombant dans mes ténèbres. Je _
me dis: Évidemment tu es timide et découragé, voilà
ton défaut. Risque donc une fois ta vie dans l’entre
prise: que peux-tu y perdre? Une vie dans la foi au
SEIGNEUR est toujours plus noble, qu’une vie sans elle,
quand même à la fin tu te tromperais. Ce est bon,
ce qui est beau, il faut donc toujours l’aimer! Oui,
c’est la résolution que je fais, et c’est là une puissante
arme contre le père du mensonge.
Du 1 Octobre 1855.
Hier nous allâmes demeurer dans la petite habita
tion nous avait été désignée par le SEIGNEUR, après
lui avoir d’abord rendu grâce pour les puissantes con
solations qu’Il nous avait fait goûter dans l’ancienne.
En entrant dans la nouvelle maison nous avions la douce
persuasion que le SEIGNEUR y entrait avec nous. Aussi
quand je me retire le soir dans mon petit cabinet, je
sens tant de contentement, que j’aurais envie d’y sauter
de joie, s’il y avait assez de place. Voilà combien il est
vrai que le SEIGNEUR peut donner du charme à la moindre
des choses, et un charme inexprimable.
Cet après-dîner, par un jour d’autômne magnifique,
nous fimes une promenade sur les terres d’Allemagne.
Nous ne ressentions pas seulement cette joie et ce bien
être que le beau temps naturellement inspire , mais nous
éprouvâmes comme un nouveau et profond sentiment
d’amour de la patrie. Pendant toute la promenade aussi
je me sentais échaufl’é de l’amour des bienheureux, dont
je sentais distinctement la présence.
-. HO ——
L’explication de ces diverses sensations me fut bien
tôt donnée. Le soir j’allai visiter notre veuve, pour lui
rendre le petit service de charité qui pour moi était un
service d’amitié. Quand j’eus fini de passer les mains
sur le bras malade, Anna, qui pendant ce tenus était
entrée promptement dans l’état d’esprit, nous dit: «Votre
inséparable et toujours fidèle compagnon est là.»
«Tu remplis très-bien ton emploi, mon ami. (Il me
dit cela pour me rassurer à propos de doutes à cet
égard que je venais justement d’exprimer à Madame.)
Et tu dois sentir que les forces dépensées te sont ren
dues à mesure.» ——
Moi. Cela est vrai; je me trouve même plus de forces
qu’auparavant.
Elle. Puis-je faire appeler maintenant Ml‘ Palmettas?
Lui. Oui, oui, va l’appeler.
Ce Palmettas est un frère de Mlle Palmettas dont
il a été question plus haut, et dont la famille Lineweg
prenait soin. Il était venu en visite de la Bourgogne
où il demeurait habituellement; et on lui avait promis
qu’il pourrait assister à une communication avec le bien- V
heureux défunt.
Pendant que Madame était allé l’appeler, Lineweg
me dit:
«J’avais déjà ce matin averti ma femme que j’aurais
besoin aujourd’hui d’un bien-aimé secrétaire.»
Moi. Je suis extrêmement réjoui de pouvoir encore
une fois me trouver ici, il y a un assez long tems
depuis notre dernière entrevue. Aussi ai-je bien
senti que vous me suiviez et me pressicz.
Lui. Vous avez été poussé à venir.
Moi. C’est un plaisir d’être ainsi poussé.
—lM—
o
Lui. C’est la paix et la bénédiction du SEIGNEUR qui
nous presse.
Mr Palmettas entra, et aussitôt Lineweg lui adressa
la parole:
«Un ami qui t’est inconnu, mais qui te connaît très—
bien, qui t’aime ardemment, qui te bénit souvent et qui
est à jamais heureux, est en ta présence.»
Ici Madame entra aussi, et il me dit: Lis d’abord
ce qui vient d’être écrit, à ma chère femme. Après que
je l’eus fait, il continua :
«Tu sais, et vous tous, bien-aimés ici présents, vous
savez comment le SEIGNEUR JESUS se glorifie dans les
enfants des hommes, non pas simplement par les voies
ordinaires, mais aussi quelquefois par des voies extra
ordinaires; et cette dernière bénédiction t’a aussi été
réservée; car il est dit: heureux ceux qui ont faim et soif
de la justice; car ils seront rassassiés. Avant tout je
veux que mes amis sachent que parmi nous on se tutoie
toujours et éternellement; car ici règne la vraie liberté
et la pure égalité. Et maintenant, Bénis du SEIGNEUR,
et toi en particulier, ami bien-aimé en CHRIST, notre
unique Maître, sois le tout bien-venu dans le cercle de
ceux qui me sont si chers! A voir les choses d’une
manière terrestre, tu crois, mon ami, avoir trouvé ici
une veuve; mais sache que nous sommes liés maintenant
plus étroitement que jamais; car le Bon Pasteur, dont
les paroles sont véritables, a dit: Je ne la laisserai point
veuve, Je viendrai à elle! C’est donc bien plutôt une
amie du SEIGNEUR que tu es venu trouver. Oh! vraiment
celui qui possède le SEIGNEUR JESUS, peut bien se passer
de tout le reste, il ne laisse pas d’être dans l’abondance.
De même, mon} ami, tu n’es pas non plus abandonné
—-ll‘2—
,de Lui, ni négligé. Tu es solitaire, il est vrai, mais
non pas seul; le Roi du ciel et de la terre est avec toi.
Il est ton protecteur, ton soutien, ton secours. Lui
même il est ton Berger, qui te conduit dans de vertes
prairies. C’est Lui - même, l’éternelle fidélité, qui te
nourrit du pain de vie, de la Manne céleste, qui est
Lui-même; c’est Lui, la source du salut, qui t’abreuve
de ses eaux salutaires. Tu es bien heureux d’avoir mis
ta confiance en Lui; c’est ton salut, que d’avoir com
mencé à l’aimer. En vérité, aimer JEsus,par-dessus
toute chose , c’est la suprême science. 0 mon ami!
JESUS-CIIRIST à qui appartient la louange et la gloire à
jamais, Il s’occupe de toi avec une bonté infinie, Il ne te
perdjamais de vue; ses yeux te suivent partout où tu vas.
Ne crains donc point; quand il serait vrai qu’il te faut
quelquefois traverser des vallées ténébreuses, JEHOVAH
est ta lumière, Cnmsr est ton bâton et ton soutien, JE
sus est ta main qui te conduit. Comme Berger Il veille
sur sa brebis, comme Maître Il guide son disciple. Con
tinue, mon ami, à mettre ta confiance dans le SEIGNEUR
et attends patiemment le salut de ton Dieu. Vois, sa
bénédiction est sur toi comme la rosée du ciel, Il bénit
ta sortie et ta rentrée. Oh! qu’il est heureux, celuicomprend le cri de son amour: Marche en ma pré
sence et sois sage! Quand il t’arrive quelquefois d’être
abreuvé de quelque amertume, pense que si JEsus te
charge d’un fardeau, Il t’aide aussi à le porter; réjouis
toi, mon ami, des peines de cette vie; car ce sont autant
de bénédictions; et puisque tu aimes le SEIGNEUR JESUS,
. mêmes les choses les plus pénibles tourneront enfin
nécessairement à ton plus grand bien. Attends en paix
et dans la patience; le SEIGNEUR conduit les siens d’une
-115—
manière admirable par les ténèbres à la lumière, parle
combat à la victoire, par la croix à la couronne. Omon
cher ami, choisis pour ta devise, à l’exemple de l’homme
selon le cœur de Dieu: Et toutefois je reste toujours;
avec toi! Oui, mon ami, reste près de Lui et en Lui.
Il est le rocher inébranlable. Fais comme la sage Marie;
établis-toi à ses pieds percés par amour pour toi; Lui
même Il veut être ton maître et ton instructeur, la chaire
où il parle est ton propre cœur. Oh! réjouis-toi dans
le salut de ton Maître; Il veut t’enseigner à prier, à veil
ler, à combattre, à vaincre et à triompher. Il veut te
perfectionner au point que tu puisses terminer toutes
tes demandes dans la vertu de sa sainte résignation en
présence de son Père, quand il dit: Cependant que ta
volonté soit faite, et non la mienne. Voilà, mon ami,
00mment le Dieu éternellement fidèle, ton pasteur, veut
travailler sur toi par l’esprit de sa grâce, jusqu’à ce
qn’ll ait tout terminé pour sa gloire et ton éternelle
félicité. Heureux, mille fois heureux celui qui est devenu
un avec le Dieu d’amour! Heureux celui dont la vo—
lonté se perd entièrement dans la volonté de l’amour éter
nel! Assurément celui - là goûte une paix durable; car
rien ne peut plus arriver contre sa volonté.
« Et qu’est-ce donc, mes bien-aimés, qui cause tant
de souffrances aux hommes sur cette terre? Rien autre
chose que la volonté propre. Mais plus l’amour
propre diminue, plus la paix devient grande dans un
cœur jusque-là tourmenté. Là où se trouve la résigna
tion, là se trouve la paix; et c’est ton Rédempteur, mon
ami, qui opère tout cela en toi. Loue et glorifie, exalte
le nom du SEIGNEUR; chante des cantiques d’allégresse;
car Il t’aime avec tendresse, et sa bonté demeure éter«
8
—114—
uellement. Celui qui le cherche l’a déjà trouvé. O mon
ami, patiente jusqu’à la fin! Le SEIGNEUR qui t’a appelé,
qui t’a élu, Lui-même s’occupe de toi comme un père
s’occupe de son enfant. Demande—Lui instamment son
bon esprit, et il te conduira en toute vérité; Il t’éclairera
de part en part. Il te changera en lumière; et à la fin tu
seras forcé d’avouer, à son éternelle gloire, la vérité
de cette parole: Je ne manque de rien, car le SEIGNEUR
est mon Berger.‘ '
Il s’adressa ensuite à moi. Mais avant de rapporter
ses paroles, il faut que j’avertisse que je possédais le
Psaume 25 et le 126m0 en musique et que je les avais
chantés plusieurs fois dans la maison Lineweg, mais
non de son vivant. Comme donc je m’apperçus que le
discours adressé à M“ Palmettas, était calqué sur le
premier de ces psaumes, je pensais, en écrivant, qu’il
conviendrait de le chanter pour clore la séance. Il me
dit donc d’une voix extrêmement caressante:
«Eh bien, cher ami, bien-aimé chantre des Psaumes,
serais-tu disposé à édifier mon ami, par quelque chant
agréable?
Moi. De tout mon cœur; lequel faut-il chanter? Dieu
est mon Berger, ou Quand le SEIGNEUR délivrera
les prisonniers de Sion?
Lui. Sais-tu ce qu’il faut faire? Chante-les tous deux.
-— Le bonheur éternel consiste à édifier SOn sem—
blable et à exciter dans son cœur la joie du SEI—
GNEUR. C’est une félicité d’être envoyé au service
de ceux qui doivent hériter la vie éternelle. Egaie
toi donc, mon ami, au nom du SEIGNEUR, et réjouis
toi en Dieu ton Sauveur. Amen. Oh! combien le
SEIGNEUR trouve de plaisir en ceux qui l’aiment!
-— 115—
Avec quel plaisir il répond, oui, amen! à ceux
qui lui crient: SEIGNEUR Jssus viens à moi. 0
mes bien-aimés, rappelez bien souvent dans votre
mémoire ces paroles: '
Un regard porté vers Lui
Ramène mille et mille bénédictions.
«Le cœur de mère de JESUS est si tendre, si doux,
qu’un regard même peut le brisera (La sentence qui
m’était échue aujourd’hui au sort, c’était le verset ’1‘?)
du chapitre 49 d’Isaïe.)
Mme Lineweg“, qui s’était éloignée, rentra; et il lui
dit: N’est-ce pas, ma chère femme, mon ami, le chantre
des Psaumes, doit édifier, et réjouir notre autre ami
par son chant? Tu dis bien aussi ainsi soit-il à cette
invitation? -
Oh! assurément, répondit Madame. Ainsi ajouta-t
il, notre SEIGNEUR et SAUVEUR JESUS à qui appartient
l’honneur et la gloire aux siècles, ayant béni de ses
plus riches bénédictions tous les bien—aimés ici présens,
tu peux réveiller en son saint nom.*
Du 2 Octobre 1855.
En entrant ce soir chez Mme Lineweg, je ne trouvai
dans le salon que Mr Palmettas; Anna était déjà réduite
à l’état d’instrument, ou d’organe, de l’immortel, et on
l’avait conduite dans le cabinet ordinaire.
En nous entendant parler au-dehors, la voix dit
aussitôt à Mme Lineweg. «N’est-ce pas, le SEIGNEUR sait
rassembler ses brebis? — Elle nous fit entrer et la
voix continua.
uUn serviteur du SEIGNEUR, votre frère en JESUS
8a
—— “6—
Cmusr est venu pour vous bénir au nom de son maître
et du vôtre; écris donc ce que je vais dicter:
.
Reste avec JESUS, chère société d’enfants de la croix,
Près de Lui seul vous vous trouvez vraiment bien;
Vous n’êtes point a vous, vous êtes à Lui;
Il vous racheta de son précieux sang.
Reste près de JESUS, cher petit troupeau;
Lui-même t’a conduit au royaume du Père,
Pour que tu apprisses a bénir son saint nom;
Il se fit pauvre pour que tu devinsses riche.
Reste près de Jssus, âme chèrement achetée,
Lui, le vrai Samaritain, prend soin de _toi,
Il te fortifie de son vin, de son huile;
Entendez-vous sa voix: Petits enfants, aimez-moi,
Dit-il, suivez-moi sur l’étroit sentier;
Recevez de moi la force et la lumière;
Venez, puisez, enfants, grâce pour grâce;
Croyez seulement, et ne craignez pas.
Partout où vous irez, je serai votre protecteur,
Et je vous enverrai mon consolateur.
Surtout dans tes combats sur la terre,
Ame chérie, crois à mon puissant secours.
Moi—même je couronnerai enfin ta patience;
Attends seulement le tems que ton JESUS voudra.
Viens, je veux te familiariser avec moi;
Le nourrisson n’est-il pas bien près de sa mère?
Aimez donc JESUS de tout votre cœur,
La charité est la reine du ciel!
0 combien elle adoucit la souffrance et la peine?
L’amour toujours attire à lui l’amour.
Et certes l’époux de vos âmes
Il mérite tout, il est digne de tout amour.
Unissez-vous donc à Lui, comme sa chaste},épouse;
Il y a bien longtems qu’il a demandé vos cœurs,
Il veut vous donner tous ses trésors;
Heureux ceux qu’il enrichit!
Quel malheur pourra contrister
——117-—
Un cœur habité par JESUS-CRRIST?
Ame heureuse, de ton JESUs heureuse proie,
Ah! tu as choisi la meilleure part.
Au près et au loin, partout, partout,
Louez JESUS, petits et grands;
Car pour une seule âme, et la plus pauvre,
Il en laisse quatrevingt-dix-neuf,
Il vole pour la chercher, pour la sauver;
Ah! de ton côté, cours donc aussi à sa rencontre.
Oh! qui n’aimerait pas le Dieu Rédempteur?
Qui ne se consacrerait pas entièrement à Lui?
Et toi aussi, mon ami, il t’a marqué de son sceau,
Celui qui a été, qui est et qui sera.
C’est Lui qui te donne la douce paix de Dieu,
C’est Lui qui te fortifie, t’afl'crmit, te perfectionne,
C’est Lui qui t’a fait une heureuse part,
Il te bénit et dit; Amc Je suis à toi!
0 âme chèrement rachetée! le SAUVEUR est à toi!
Il t’a donné tout ce qu’il a et tout ce qu’il est.
Est-il une bénédiction, est-il une grâce plus grande?
La couronne t’est préparée dans ta ville natale.
Continue, mon cher ami, à marcher en sa présence;
L’honnêté seul est de durée, c’est une bien grande vérité.
Il bénit tes travaux, il bénit tes démarches;
Tu l’as souvent vu, et tu t’en es convaincu.
Il continuera toujours à te bénir;
Oh! demeure fidèle jusqu’à la mort!
Alors Il viendra à toi avec tout son an10ur,
Et Il te dira: Mon fils je suis moi-même ta récompense,
Tu as été fidèle dans les petites choses,
Viens que je t’établisse sur les grandes!
Et dans ses yeux tu liras cette vérité:
C’est par moi que tu atteignis l’heureux but:
Entre, entre dans la joie de ton maître;
Moissonne maintenant ce que tu as semé;
L’agneau de Dieu lui-même te paîtra;
Tu seras plus qu’un hôte, tu seras un citoyen.
Reçois, mon cher, reçois de JESUS ses riches bénédictions,
’ —MS—
Exalte à jamais son am0ur et sa fidélité.
Continue à marcher dans ses voies
Et sa grâce chaque jour sera nouvelle sur toi. Alléluia! Amen.
f?
«L’amour du SEIGNEUR JESUS, même pour ceux qui
ne l’aiment qu’autant que leur faible nature le leur
permet, ne saurait être décrit.
.Ce sont justement ceux qui craignent de n’être
point du nombre de ses élus, qui s’y trouvent inscrits
les premiers. Celui qui est vraiment humble, ne Con
naît pas son humilité. L’humilité a reçu la promesse des
plus grandes grâces Un enfant de l’humilité éprouve
souvent de ces moments de bonheur qui lui font dire:
Ah! SEIGNEUR éloigne—toi de moi, je suis un homme pé—
cheur. Mais le SEIGNEUR ne s’arrête pas pour cela dans
l’œuvre de sa grâce, jusqu’à ce que l’âme puisse dire:
Il est à moi, je suis à Lui. Heureux celui qui Le laissa
agir, et se tient bien tranquille en sa présence: souvent
les enfants des hommes dans leur inquiétude et leur em
pressement, dévanceut la marche de la grâce du SEI
GNEUR, et en gênent le travail. C’est Lui seul qui donne
le vouloir et qui donne le faire. Amen.»
Du 5 Octobre 1855.
Il y avait assez longtemsl que j’avais raconté à Mme
Lineweg les tourments que me causaient les mauvais
esprits, la nuit pendant mon sommeil. Elle me con
seilla de porter sur moi comme souvenir, une croix,
qu’elle-même et son mari avaient portée dans une oc
casion analogue. ‘ Quand je la pris, j’étais triste et 0p
pressé: mais ce nuage passa, et bientôt je sentis revenir
la joie et la paix, au souvenir de la bonté du SEIGNEUR. ‘
—-119—
Commeje disais aujourd’hui à Mme Lineweg, quej’éprou—
vais quelque répugnance à accepter en propriété, la
croix qu’elle m’avait donnée, qui était une croix en argent
ancienne et beaucoup portée, et ayant par conséquent de
toute manière un prix double dont je ne me sentais point
digne: Ah! me répondit—elle, si vous saviez de qui vous
vient cette croix, vous la garderiez avec grand plaisir!
et elle m’avoua qu’elle ne m’avait été donnée que par
un_ ordre supérieur.
Du 4 Octobre 1855.
MmeLineweg avait reçu de son bienheureux époux
l’avis que l’imposition des mains sur son bras devait être
supprimée. Je craignis que cela ne vint de ce_que je m’en
étais rendu indigne, ou que mon désir violent d’aller à
la maison, n’eût amené cette disposition. Par la même
raison j’étais dans l’incertitude de savoir si je continue
rais ou non à aller aussi souvent dans la famille Line
weg qu’auparavant; quoique ce fût la seule maison où
mon âme se trouvait à son aise. Aujourd’hui j’étais en
chemin pour m’y rendre, quand je fus retenu par les
considérations ci—dcssus. L’idée néanmoins me vint que
Madame pouvait n’avoir plus d’eau préparée, et je me
décidai à y aller. Mais à peine fus—je entré, et que
Madame et Anna m’eussent reçu, que cette dernière
passa instantanément dans son état supérieur, on la
conduisit dans le cabinet, et elle dit:
«Ton fidèle compagnon est ici. Écris, cher ami.
L’amour fraternel me force de venir te tranquilliser sur
l’interruption momentanée de ton œuvre de bénédiction.
Dans ce moment, mon ami, le but proposé est atteint»
_42()_
Mme Lineweg fut appelée dehors; il lui dit assez
haut: ma chère femme! mais elle était déjà trop éloignée.
Quand elle revint il lui dit: Je voulais seulement t’aver
tir que tu pourrais rentrer le chapeau de notre ami, afin
qu’il n’éprouve aucune gêne si l’on vient. Elle courut
le chercher; et aussitôt quelqu’un arriva dans l’anti
chambre. Il continua de parler de l’état de sa femme:
«Ce que tu as fait, c’était la subtilisation du sang
dans cette partie qui l’exigcait. Il s’y était engorgé;
mais la chaleur de tes mains lui a rendu peu à peu sa
liquidité, et maintenant il circule comme àyl’ordinaire.
J’ajouterai, mon ami, que l’interruption de ce service
ne doit nullement t’empêcher de visiter cette demeure
qui est devenue la tienne, aussi souvent que tu le voudras.
c Eh! s’il en est ainsi, dis-tu, je pourrais bien y rester
toujours': c’est pour cela, mon ami, que l’amour fra
ternel m’a engagé à t’encourager à venir librement,
puisque je sais que tu aimes beaucoup la tranquillité
d’une famille douce et paisible. Et puis, voyons, me
permets-tu de trahir ta pensée? l’idée seule de ton
voyage ne t’a-t-elle pas déjà fait craindre une sorte de
maladie du pays en pensant à ma chère famille? Avoue
le. —-— Toutcfois, cher ami, il ne faut pas renoncer à
ton voyage pour cela, si tu en a réellement envie. Je
ne te dirai à ce sujet qu’un mot, un mot d’ami et de
père: sache que les tiens souhaitent ardemment de te
voir au milieu d’eux, et cela non pas simplement pour
une visite, mais pour te retenir entièrement. Examine
donc bien, mon cher, pour savoir quel est ton désir;
j’ajouterai, qu’en effet tu ne pourras pas toujours rester
au poste que tu occupes en ce moment. Pour ton esprit
de feu, ce cercle d’activité est trop étroit; et puis, il y a
un certain tems que l’esprit de grâce t’a travaillé ien ’
plus que tu ne t’en doutes, surtout depuis peu; de sorte
qu’il peut arriver qu’au tems’opportun ton Rédempteur
t’appelle et te dise: m’aimes-tu? Pais mes brebis (ou
plutôt mes agneaux; vu que tu es en particulier un
ami des enfants). Du reste ne t’en inquiète pas, à l’heure
que cela sera nécessaire, tout te sera donné. Vois-tu,
j’ai été invité à te dire ces choses, parce que je t’ai vu
déjà souvent le cœur oppressé de toutes ces pensées.
Sois sûr que quand ta petite heure sera venue, ton
SEIGNEUR REDEMPTEUR te donnera des signes qui te ma
nifesteront sa volonté: alors, mon ami, tu pourras prou
ver par les effets, que c’est de tout cœur que tu lui dis:
Tu es le maître, SEIGNEUR, je suis le serviteur,
Tout ce que tu ordonnes est bien ordonné.
«Telles sont les choses, mon ami, que j’ai voulu et
dû te communiquer en peu de mots.
«Que le SEIGNEUR te bénisse, qu’il conduise tous tes
pas, et termine tout selon le bon plaisir de son amour,
pour sa gloire et pour son salut. Amen.» *)
Se tournant alors vers Mme Lineweg, j’ai accom
pagné, dit-il, mon ami (savoir, Mr Palmettas qui partit
hier, pour arriver aujourd’hui au lieu de sa destination),
’) Au moment que nous livrons ces lignes à la presse, Gustavc
est déjà fondateur et directeur de deux écoles de jeunes
enfants dans deux villages différents. L’amour et la béné
diction dc ses petits élèves sont la joie des environs et
jusque dans la capitale. Ses capitaux qui au grand étonne
ment de plusieurs paraissent ne point devoir s’épuiser, ne
reposent pourtant que sur sa foi. (Note de l’Éditeur.)
_. 199 _
.
je ne l’ai quitté que rendu dans la ville. Alors je suis
venu te bénir, et chercher cet autre ami présent. Cette
nuit c’est moi qui suis ton gardien.
Elle. Quelle ardeur il a, pour rendre service de tous
côtés!
Lui. Ces services augmentent chaquel‘ois ma félicité.
—-Les moments sontprécieux. —Tupeux éveilleræ
Du 8 Octobre 1855.
L’avis précédent nous avait tout bouleversés, Chan
dani et moi-.; Pour moi, il était, sous un rapport, ré
jouissant, puisqueje sentais le goût d’agir sur les hommes
plus directement que par des écrits, croître en moi de
plus en plus. D’un autre côté,’néanmoins, une sépara
tion d’avec Chandani pouvait être occasionnée par-là;
et nos travaux littéraires en recevaient nécessairement
un échec. Cette considération avait aussi inquiété mon
ami, qui regardait mon départ comme prochain._ Mais
hier en faisant une visite à Mme Lineweg, elle me ra
conta que son bienheureux époux lui avait dit, qu’il ne
fallait pas prendre aussi littéralement tout ce qu’il m’avait
dit, mais toujours un peu plus selon le sens intérieur et
spirituel; que quelque grands savants que nous fussions,
nous avions néanmoins encore compris peu exactement
ce qui avait été dit en dernier lieu; qu’il m’expliquerait
encore les choses plus clairement; qu’ean Mme Line
weg devait me copier le cantique: Société de l’interces
sion, sanctifie-toi.
Aujourd’hui me trouvant de nouveau dans la fa
mille, Arma entra dans l’état de communication, et nous
apprîmes ce suit:
_125__
«Ton ami toujours fidèle est là. Il dit: Ecris.
«Une soirée de bénédiction, enfant bien-aimé. Voici,“ *
l’amour me ramène de nouveau vers toi, et me force ’
de t’entretenir, en partie, sur notre dernier entretien.
Cher ami, l’avis que tu as reçu comme une indication
de la part d’un père et d’un ami, n’est réellement qu’une
indication du doigt de Dieu, et une grâce de la part de
ton SEIGNEUR. On ne t’a point parlé d’une place arrêtée
pour une époque déterminée: c’est une vocation que le
SEIGNEUR te prépare, et qu’il te confiera quand son heure
sera venue, en son tems (souligne cela, en son tems). En
attendant l’esprit de toutes grâces continuera à te pré
parer, à te fortifier, à te rendre capable de remplir ce
précieux emploi. Sois sûr, mon bon ami, que quand
cette petite heure du SEIGNEUR viendra, tu le sentiras
clairement. Car, en vérité, quand notre Roi conduit une
entreprise, il la conduit à sa fin, d’une main puissante.
Il ne s’interrompt pas comme les enfants des hommes.
Mais aussi il prend les tems et les moyens convenables,
et la fin est toujours glorieuse. Donne toute ta con
fiance a ce bon Maître; honore-Le par cette confiance.
Celui qui'l’honore, Il l’honore à son tour. Et en
attendant, mon ami, s’il te semble quelquefois, que tu
es là désœuvré et entièrement inutile, rappèle-toi ce
que je dois te dire: c’est qu’en ce moment, ton unique
travail, ton unique occupation, consiste à t’abandonner
entièrement à la conduite du SEIGNEUR. Ton SAUVEUR,
mon ami, veut d’abord, et doit d’abord, agir en toi,
avant que tu puisses agir Pour Lui; après cela seule
ment, mon enfant, après cela seulement on pourra te
dire: Travaille maintenant pour les autres, et laisse
veiller le Tout-puissant sur toi. Ne te tourmente pas
——124—
de soins inutiles: Comment pourrai-je amener des bre
bis au SEIGNEUR, moi qui suis encore égaré moi-même
dans le sentier de l’erreur? Encore une fois mon ami,
je t’en prie, ne te tourmente pas de soucis sans but, car
ces soucis sont un reproche pour le SAUVEUR. Peux
tu douter de cette vérité, que, ce qui est impossible
aux hommes, est possible àDieu? Lui, la fidélité éter
nellex et l’éternelle puissance, sait rendre utile, rendre
grand et fort ce qui est faible et méprisé dans le mqnde.
Il possède bien les moyens nécessaires pour te pourvoir
de tout ce qu’exigeront ta vocation et ton élection. En
attendant encore, mon ami, je puis t’assurer que tu n’es
point oisif. N’es-tu pas quelquefois , sous les yeux du
SEIGNEUR , la joie et le soulagement d’âmes souffrantes
et abandonnées; un disciple du SEIGNEUR, mon cher, ré-À
pand souvent de grandes bénédictions, sans qu’il le
sache lui-même, on puisse et doive le savoir. Souvent
le Tout-miséricordieux le lui cache pour de sages raisons;
souvent, mon cher enfant, pour éprouver sa foi et sa
fidélité, Il veut savoir s’il sera croyant sans voir de ses
yeux, et fidèle et persévérant dans la patience. Les
petits enfants qui se donnent à Lui, notre R’oi les con
duit avec un amour, avec une richesse de grâces et de
bénédictions indicibles. Il les reçoit à’son école, dans
son institut; Il se charge lui-même de leur éducation.
0 ami bien-aimé! Il t’a reçu, il t’a agréé, laisse-le donc
gouverner tes affaires; attends avec patience, sois tran
quille et espère. Par-là tu deviendras fort dans la ré
signation à sa volonté, et de cette manière l’ami de ton
âme arrivera nécessairement au but d’amour et de grâce
qu’il se propose à ton égard. Quelle œuvre précieuse,
quel riche travail, que d’être la bénédiction, la conso
-—125
lation des âmes souffrantes. Console-toi donc mainte—
nant, mon cher ami, le SEIGNEUR JESUS, ton soutien, te
donnera la force de L’aimer. Il établira ta foi sur le
rocher, il augmentera ton amour et te conservera l’espé
rance, et te maintiendra dans l’humilité. Il fera tout
cela par sa grâce et selon son bon plaisir, je L’en ai prié
pour toi et avec toi; et je le Lui demande avec ardeur;
que l’amour éternel nous exauce, et te conduise à ton
salut. Que le SEIGNEUR notre Rédempteur te bénisse,
qu’il te scelle de son sceau, comme sa propriété, pour
son grand jour. Que 50n Saint-Esprit te conduise en
toute vérité; qu’il te guide dans les sentiers de l’immor
talité, et ne te laisse pas , que tu ne sois devenu une
belle couronne du SEIGNEUR. Amen.» ’
Moi. Je vous remercie mille et mille fois. Tout ce que
vous venez de me dire est extrêmement précieux
pour moi. Aujourd’hui même, et depuis bien long
tems, je priais le SEIGNEUR de me faire la grâce de
sentir que je Le sers: car il est bon que chaque
serviteur sache au juste quel est son maître.
Quand il se rencontrerait, mon ami, des heures
entières, pendant lesquelles tu ne paraîtrais rien
faire extérieurement, pourvu que tu sois attaché
au SEIGNEUR, tu ne laisserais pas d’être son SERVI
TEUR. Que ton cœur soit toujours tourné vers ton
JESUS, et tu vis dans un service de Dieu continuel;
réjouis-toi d’une pareille vérité.
C’est une grande joie, en effet, pour moi, d’ap
prendre qu’il m’est permis de continuer à servir
le SEIGNEUR, malgré mon indignité; je n’aurais ja
mais cru en avoir la force.
N’est-ce pas, ma chère femme, nous avons appris
Lui.
Moi.
126
Elle.
Moi.
Moi.
Lui.
Moi.
Moi.
Lui.
Mai.
à quel point le SEIGNEUR sait fortifier ses instru
ments quand il veut s’en servir? -—
Plus d’une fois, certainement; aujourd’hui même
en se levant, Anna se sentait si faible, qu’elle
croyait à peine pouvoir se soutenir, et la voilà
très-bien. 1
Chez moi ce sera un vrai miracle si je conserve
la force d’agir pour le bien.
Eh bien, ne seras-tu pas bien aise de devenir une
merveille de sa grâce?
J’en serais nécessairement bien-aise: mais il me
semble toujours que la merveille serait trop grande.
de voir entrer le SEIGNEUR dans le cœur d’un pé
cheur tel que moi. '
La grâce en paraîtra d’autant plus glorieuse.
Je ne pourrai qu’à l’exemple du malade de l’Evan
gile, publier toujours hautement quelles grandes
choses le SEIGNEUR a opérées en moi.
Au ciel, parmi les, bienheureux, mon ami, on
n’entend absolument que louer et exalter le SEI
GNEUR et sa grâce. Chaque âme bienheureuse est
un miracle particulier de la grâce.
Chez moi, le miracle ne sera pas seulement spiri—
tuel, il sera aussi corporel, si j’ai les forces né
cessaires pour travailler au service du SEIGNEUR.
Ne vois-tu pas, mon cher, journellement, et à toute
heure, comment le SEIGNEUR toujours fidèle, ré
pare à mesure tout ce que les enfants des hommes
dégradent et détruisent?
En moi du moins, je l’ai remarqué: à voir le peu
de ménagement que j’ai apporté à ma santé cor
porelle, je devrais être étendu aujourd’hui sur un
127 -‘
Lui.
Moi.
Lula
lit de douleur, si la nature avait suivi son cours
ordinaire.
Ceci aussi, "I'non ami, le SEIGNEUI1 sait par son
amour le tourner pour le bien de ceux qui s’atta
chent à lui. N’as-tu pas avoué tout-à-I’heure toi
même, que le SEIGNEUR laisse souvent tomber
l’homme dans tel ou tel péché pour le forcer à se
bien reconnaître. Eh bien! le SEIGNEUR met à profit
maintenant ces oublis de toi-même, en te les rap
pelant si souvent. Et pourquoi le fait—Il? et dans
quelle intention? Il assure par-là ton humilité,
’ . . I
mon cher ami. Ces souvenirs sont autant d’humi
liations salutaires; et chaque humiliation est un
effet de la grâce du SEIGNEUR.
A en juger par-là, j’ai dû avoir un orgueil peu
commun; car aussi loin que ma mémoire peut
me rappeler le passé, je ne rencontre partout que
des humiliations.
Aussi bien, maintenant le SEIGNEUR te tient atta
ché à lui par le lien de son amour, jusqu’à ce que
tu sois rendu attentif. Oh! le bon, le fidèle Pas
teur, éternellement le même; combien de grâces
Il t’a déjà faites! — Et vois-tu, mon cher, cha
cune de ces grâces a été une préparation pour ta
vocation à venir; car ce ne sera que quand tu
auras bien appris à connaître, par ta propre expé—
rience, l’ami des pécheurs, que tu pourras le
louer et le glorifier avec toute ta force. Comment
pourrais-tu crier par la suite aux âmes égarées:
Venez à Jésus! si tu ne le connaissais pas bien
toi—même? — Et pour le bien connaître, ne faut
il pas que tu connaisses par toi-même toute sa
128
Moi.
Lui.
Moi.
Lui.
Moi.
Lui.
llIoi.
vertu divine. .C’est pour cette raison, mon ami,
que tu es conduit par tant d’épreuves différentes,
ce qui n’arriverait pas , si le SEIGNEUR n’avait pas
ces vues sur toi.
Je me soumettrais volontiers à tout, si seulement
je savais que je profite en quelque chose de ces
leçons.
N’est-il pas écrit: Les siens entendent sa voix?
Je crains toujours que la voix de mon cœur na
turel ne se mêle à la voix de Dieu; et il m’est
difficile de les distinguer l’une de l’autre.
L’esprit de Dieu parle toujours par la conscience,
et il tend continuellement à anéantir le vieil
homme. Tout ce qui flatte ce vieil homme, vient
de toi; mais ce qui l’aflligc et ce qui veut sa mort,
vient de l’esprit de Dieu. L’expérience, mon cher,
te rendra de même ceci fort clair.
Je ne vois pas non plus fort clairement, si mon
penchant à aller trouver les miens vient de moi
même ou d’une influence plus pure?
Si c’était ton vouloir et ton désir seul, il pourrait
bien en être comme tu crains : mais ne serait-ce
pas le désir ardent de ta mère, qui aurait réveillé
en grande partie chez toi ce même penchant qui
te presse? Si ce voyage peut s’arranger tu es con
tcnt, n’est-ce pas? De même que tu te soumet
trais dans le cas contraire?
Certainement, je n’ai que la crainte, que la vo
lonté de Dieu ne s’accomplisse point en moi.
Celui qui n’a pas de volonté propre , le SEIGNEUR lui
prépare une double jouissance. Il est bon et fidèle
au-delà de toute expression, notre REDEMPTEUR à
5129...
Mot.
Lui.
01.
Lui.
Moi.
t0us: voit—Il que telle ou telle de Ses brebis veut
avoir, de force, telle ou telle chose, Il a la bonté
de lui apposer toutes sortes d’obstacles, pour
rompre sa volonté pro re. Mais voit-Il que la
brebis est sonmiSe, dans sa bonté infinie Il lui
accorde avec bien du plaisir la satisfaction d’agir,
et Il l’aide même à mener une entreprise à une
beureuSe fin.
Qu’il fasse à men égard arriver tout selon sa
sainte volonté, quand elle serait contraire à mes
inclinations !
Il est fidèle. Il n’y a aucUn mal en Lui. Il t’a pro
mis, comme à tous, d’être ta lumière, et la lampe
de tes pieds; et tout ce qn’Il promet, Il l’exécute.
Amen.
Je renouVelle mes remercîments; je suis un grand
questionneur; et j’ai peut-être abusé de la per—
missi0n par ma trop grande hardiesse.
Tu y aVais été invité par écrit; et pour moi c’est
une augmentation de félicité que de te répondre;
c’est l’amour fraternel qui s’épanche, quand il
se communique au nom et à la gloire du Toute
Puissant. Tes questions ont pour but la Science
du salut; ce n’est pas un par effet de votre en
riosité.
Je ne désire savoir que ce qui peut me faire com
naître et accomplir la volonté du SEIGNEUR.
Alors, avec Marie, tu as choisi la meilleure part.
. '- A présent, chère femme, tu peux réveiller.
9
.. 150..
Du 8 Octobre 1855.
M. Palmettas était revenu dans la ville; et on
l’attendait à sept heures dans la famille Lineweg. J’y
arrivai'une'demi-heure avant. Arma se sentait puissam
ment attirée par le monde spirituel. Madame aurait
voulu attendre l’hôte, mais Anna déclara ne pouvoir
attendre plus longtems. J’en suis peut-être la cause,
lui dis—je; je suis fâché d’être venu sitôt. Aussitôt
qu’Anna fut conduite dans la petite chambre, la voix
dit à Mme Lineweg : - Comme on doit écrire, il n’y a
pas de difficulté que l’autre ami arrive plus tard , faites
entrer mon cher secrétaire. '
J’entrai, et la voix continua:
. SOis, mon ami, le bien-venu; ce n’est pas trop
tôt; votre frère en JESUS-CBRIST est là; il dit:
« Que le salut, la paix et la bénédiction} soit avec
vous tous de la part de Dieu, notre Père, et notre SEI—
GNEU‘R JESUS-CHRIST! Bénis du SEIGNEUR, vous qui avez
été reçus en grâce, et qui vous êtes attachés à Lui;
venez, bien-aiinés,plaœz-vous aux pieds de JESUS, à
ces pieds percés et attachés à la croix pour vous. Venez,
bien-aimés, tout est prêt; mettez-vous à la table, où
ses grâces les plus abondantes vous rafraîchiront, où
vous mangeréz la manne de la vie, et boirez l’eau qui
jaillit jusqu’à la vie éternellé, et provenant de l’océan
de l’amour de Cmusr. Oh! heureux celui qui reçoit cette
nourriture et cette boisson de l’amour! Il n’aura plus
de soif, il n’aura plus de faim. Oui, SEIGNEUR JESUS,
apprends toi-même à ces petits enfants assemblés en
ton nom, à aimer, rends-les de j0ur en jour plus sem
blables à toi; fais SEIGNEUR, Dieu toujours fidèle, qu’ils
——451——
préimedt en toi la forme de l’homme parfait, et qu’ils te
soient agréables; pénètre-les entièrement de ton essence
divine; et ’de cet amour qui les rendra capables de
vaiin‘cre par toi le monde en eux et le monde hors d’eux.
O SEIGNEUR JESUS! grave profondément dans leurs cœurs
cetfé parole que tu as prononcée: Celui qui me confesse
de’vant les hommes, je le confesserai aussi devant mon
Père céleste et devant tous les anges des cieux. SEIGNEUR
JESUS! accorde-leur pour cela la conduite de ton esprit,
dirige leurs cœurs, afin qu’ils distinguent le zéphyr lé
ger de ta grâce, qu’ils entendent la douce voix, et te
suivent comme tes brebis. Enfin, SEIGNEUR JESUS! rends
vivante en eux cette foi, qui empêchera que par la
suite ils ne soient arrachés de tes mains; cette foi, qui
les convaincra que c’est toi-même qui te donnes à eux
comme l’éternelle vie; oui, SEIGNEUR, fais par ta grâce
que rien, absolument rien, ne puisse arracher à ton
amour des êtres si chèrement rachetés. O Dieu! éter
nellement fidèle! aie pitié d’eux, aie pitié de ta pro
priété; ne les abandonne pas, afin qu’ils ne t’abandon
nent pas. Reste avec eux, vu le tems s’est approché de
la soirée, et que le j0ur,a commencé à décliner. Tu le
sais, tu le vois, comment la terre s’est couverte d’obs
curité, comment les ténèbres se sont répandues sur les
peuples ! Tu connais, SEIGNEUR JESUS, tous les dangers
que courent ceux des tiens qui voyagent sur la terre
dans ces derniers tems : oh! reste donc avec eux; sois
leur lumière et la lampe de leurs pieds; maintiens - les
dans tes lois; et quand ils seront entourés de serpents
et de la race des vipères, oh! sois leur bouclier, leur
retraite, sois leur un mur et un rempart. SEIGNEUR
JESUS, apprends à ces petits enfants à rester près du,
9.
—152—
A I
Père; qu’ils entrent en toi de plus en plus; rachctte-les
de tout ce qui te déplaît; Dieu de toute pupeté, rends
les purs comme toi: toutes choses te sont’possijples;
toute puissance t’est donné au ciel et sur la terre. Oui,
SEIGNEUR JESUS, c’est dans ton cœur de mère que je dé
pose tous ces êtres si chèrs, tes brebis qui te sont
connues. Prends-les dans ton école, élève-les pour" le
ciel, ô toi, notre DIEU et notre SAUVEUR à tous! Dans
cette heure de grâce, je recommande surtout à ton éter
nel amour ce cher ami et frère, ton enfant, que tu con
nais et dont tu connaissais le nom avant qu’il fût; tu
sais, Dieu éternellement fidèle, où il demeure et où il
va. Accompagne-le SEIGNEUR JI:SUS, demeure avec lui et
lui donne ta paix. Il t’aime, mais enflamme son amour
et le rends brûlant. Il a tourné les yeux vers Toi, bénis
lc et montre-lui ta grâce; son cœur veut être à toi, fais
lui connaître ta sainte volonté. Ses oreilles écoutent ta
voix, instruis-le donc : bénis-le, SEIGNEUR JESUS, guide
toutes ses démarches; fortifie-le de sorte qu’il devienne,
qu’il soit et qu’il reste un homme selon ton cœur; con
serve-le fidèle, et parle toi-même pour lui. Pour ta
gloire, SEIGNEUR, quelquefois il s’est tû; pour ta gloire
aussi, il a souvent ouvert la bouche. Couronne, 6 Dieu
éternellement fidèle, la foi de celui qui croit, et qu’il
reçoive ta parole comme le plus précieux joyau, et la
conserve de même; aide—le, SEIGNEUR Jssus, enrichis—le
de l’esprit de prière, place—lui toi-même cette arme pré
cieuse dans la main et le triomphe dans le cœur. Conserve
toi pour ton éternelle louange, ce prix de tes soulfranc'es ;
enfin, mon Dieu, si ici-bas, dans cette vallée des combats
et des larmes, il se sent quelquefois porté à l’inquiétude
et au souci, dis-lui par ta grâce de Rédempteur:
—- 155-4—
Enfant, ne t’inquiète pas , ..
Moi, ton JESUS , je suis près de loi;
Bien que tu ne puisses me voir;
Crois fermement et te rassure,
Je ne te laisse jamais seul.
. Tu parais isolé , tu parais abandonné ,
Tu ne l’es pas , crois moi,
Soudain tu me verras.y
. l
1 Oui, SEIGNEUR JESUS, fais-lui sentir ta douce et
Ê. ineffable présence. Continue à le guider sur ton chemin;
aide au fidèle soldat de la croix à garder tes trésors
fqu’il a déjà amassés; donne-lui la persévérance, afin
que personne ne lui enlève sa couronne; aide-lui à pa
tienter jusqu’à la fin; alors reçois-le, SEIGNEUR, reçois
ce pécheur, Toi l’ami des pécheurs, et fais lui voir Ton
salut; alors il tombera à tes pieds, et bégaiera ces mots
de gratitude : 0 mon SEIGNEUR et mon Dieu! et Toi,
divin JESUS, Tu lui répondras par ton sourire : viens,
mon fils, car là où je suis, là doit être aussi mon ser
viteur. Exécute tout cela, SEIGNEUR JESUS, et dis au nom
de "ta sainteté: oui, ainsi soit-il pour l’éternité. '
Il s’adressa alors à moi et me dit: c N’est-ce pas,
mon ami, tu auras la bonté d’ajouter cela à ce que j’ai
dit auparavant à mon cher ami? — 0 mes bien-aimés,
ce sont des paroles éternellement vraies que celles-ci:
Le SEIGNEUR est bon et miséricordieux, il est patient et
d’une grande bonté, d’une grande fidélité. En vérité, ’
celui que JESUS aime, celui-là porte le cœur du Père à
faire toute sa volonté. Maintenant, mes bien-aimés,
remerciez le SEIGNEUR pour les grâces obtenues; cha
que sentiment de gratitude est une nouvelle prière,
Amen. '
—»154—
Du 10 Octobre 1855.
J’avais résolu d’entreprendre le lendemain mon
voyage à la maison, si je ne recevais un avis contraire.
Le temps était très-beau ; ma famille avait un vif désir
de me revoir, et mon passe-port était en réglé. Il y
avait déjà quelque tems que Lineweg m’avait fait dire
par sa femme, qu’au cas que je voulusse voyager, il
fallait mettre en règle ce passe-port, qui en effet n’avait
point été renouvelé, et pour lequel on,m’aurait fait
plus tard de grandes difficultés. J’allai donc faire’ ma«
visite d’adieu à notre chère veuve; mais je la trouvai?
souffrante. Je lui témoignai ma peine de voir qu’il lui
faudrait se passer aussi de l’eau préparée par mes
mains. Ce que je pourrais faire à cet égard, lui dis—je,
ce serait d’y imposer les mains plus souvent, et vous
l’allongeriez alors avec d’autre eau. Mais en ce peu
d’instants Anna s’était trouvée dans l’état de ravisse
ment, et elle dit aussitôt : n Le guide qui t’est connu,
est là, et il dit: Ï'
«Pars en paix, le SEIGNEUR est avec toi. Tu es et
tu voyages sous sa puissante protection; tandis que tes
pieds s’avanceront sur la route, que ton cœur soit près
de Lui ; et tu sentiras que le Dieu d’Israël est partout.
Les moments les plus heureux pour toi sont ceux que
tu passes avec Lui. C’est Lui qui veut te bénir, t’ex
horter, t’instruire et t’élever. C’est dans le silence de
Sion que l’on entend le doux mouvement de l’Esprit.
Réjouis-toi de connaître un si bon SAUVEUR et de le
posséder. Commence dOnc ton pélérinage, plein de ce
sentiment de paix, et au nom de JESUS. Ton SAUVEUR
lui-même veut être ton bâton et ton soutien. Voyage
‘ _ -‘— 155 -—* '
Ï . _
avec Lui, et tu auras le meilleur des Per
sonne ne peut te le prendre, personne ne peut te le
fausser, ni l’anéantir. Fic-toi à cet Intendant fidèle. Il
s’avance avec toi comme ton rempart, Il t’accompagne
comme ton défenseur. Crois seulement, mon ami, et tu
éprouveras encore cette fois sa grâce, son amour, sa
fidélité; tu le verras Lui-même dans ses œuvres. Oh!
que bienheureux est celui qui voit en tout son Dieu!
Et toi aussi tu es heureux; car ton JESUS veut te con
duire chez toi, et exécuter ce que tu ne pourrais faire.
Il veut se révéler à toi comme le Dieu vivant, et comme
l’ami particulier de ceux qui savent qu’ils ont failli. {,
«Encore une fois pars, en emportant ces miettesl
du pain de sa grâce. Qu’elles te fortifient dans l’amour}
de celui qui te les a données. Et souviens-toi que ton
JESUS est avec toi, et qu’en outre ton autre ami, le ser
viteur de JESUS , aura le bonheur de pouvoir te suivre.
Ainsi Adieu, que le SEIGNEUR et son salut demeurent
avec toi! AmenuD
Enfin, après une petite pause, il ajouta encore:
«Quant à ma femme, mon ami, tranquillise-toi; je t’as
sure qu’elle ne souffrira pas de ton absence.”
Moi. Je voulais justement demander, si l’eau ne
pouvait pas être remplacée par autre chose , et de loin?
Lui. Sans aucun doute, tu peux faire cela très
bien — par une prière filiale et fervente. Et voici
comment: enveloppe bien ma chère femme dans le
nœud de ton amour, et emporte-la; mais, sans la gar
der pour toi, va la déposer dans le cœur de mère de
JESUS , et la bénédiction se répandra sur elle et sur toi.
«Du reste, ma chère, dit-il à sa femme, tu peux
facilement multiplier cette eau; la bénédiction y est.
-- 156 -—
ï
. Voilà , mes bien-aimés, ce que j’ai à vous dire
pour le moment: nous nous reverrons plus tard.*
Du 6 Novembre 1855.
J’avais fait un voyage assez heureux; je n’avais
éprouvé d’autre chagrin que celui de voir, combien les
peuples se tiennent encore éloignés de leur Dieu. Dans
ces moments je me sentais quelquefois saisi d’un ardent
désir de travailler au règne du SEIGNEUR dans la retraite.
Ce désir s’augmenta par degrés jusqu’aux derniers
jours , où je n’avais plus d’autre_souhait que d’être de
retour ici, pour goûter les charmes de la piété et de la
paix avec mes amis.
Ma première visite, à mon retour, fut celle de la
famille Lineweg. Madame me raconta qu’elle avait en
souvent de mes nouvelles. C’est ainsi que dans un mo
ment que j’étais dans de grands tourments relativement
à ma vocation, son mari lui dit: ah! si notre ami pen
sait seulement dans cet instant à ces paroles qu’il chante '
si souvent: Tu me prépares un banquet à la face de mes
ennemis! car ces paroles seront accomplies à son égard.
Il lui dit aussi que, selon sa recommandation, je ne
l’avais point gardée (elle) pour moi; mais que je l’avais
recommandée fidèlement à Dieu. En effet, bien souvent
cette pensée me venait tout-à-coup pendant le voyage:
maintenant il faut prier pour elle. Il est arrivé dans la
famille quelque chose de plus singulier encore : Deux
soirs consécutifs la clef du salon se tourna avec bruit,
et quand on voulut ouvrir, il n’y avait personne. Line—
weg dit le soir à Madame , que c’était un effet de mon
ardent désir du retour. '
—-157—
Elle me fit ensuite cadeau d’un livre richement
relié, intitulé: Le Ne-m’oubliez-pas du chrétien, qu’elle
avait une fois gagné dans une loterie, et que Lineweg
voulut bien me faire remettre. Elle y ajouta le discours
qui va être transcrit, et qui lui avait été dicté pour moi
quelque tems auparavant. Dans une conversation que
Chandani avait eue ave_c Mme Lineweg, cette dernière
avait désirée avoir quelque lumière sur le grand en
semble de la doctrine de la Nouvelle Jérusalem, et
Chandani lui en avait donné un petit précis pour cet
effet. Jusque là il avait évité de lui en parler, parce
qu’il pensait que ces grandes vues, quand bien même
il serait possible d’en donner une idée exacte par des
.r'conversations passagères, ne diraient rien de particu
lier à cette âme tendre et pieuse, qui avait la foi des
vrais enfants de l’Evangile, et pouvait se passer de tout
le reste. Moi-même, avant de lire ce discours, je m’étais
examiné}de mon côté pour savoir, si ce système im
mense et admirable ne m’avait pas trop absorbé par
tout ce qu’il a de grand, de céleste et d’extraordinaire,
pour me livrer avec assez d’attention à l’observation
des commandements du SEIGNEUR dans la vie pratique.
Ce qui avait amené chez moi cet examen, ce fut ce
passage de l’Evangile: Le royaume de Dieu ne vient
point avec des signes extérieurs; tandis qu’ébloui par
les rayons vainqueurs que je voyais sortir de l’explica
tion providentielle des saintes Écritures, donnée par
Emmanuel Swédenborg, je croyais toujours que la
Nouvelle Église devait éclater avec la puissance irré
sistible de ses vérités; ou, pour l’exprimer autrement:
il me semblait que préoccupés de merveilles extérieures,
nous ne recherchions pas assez le feu, la vie de la
—158—
parole intérieure pour nous l’appliquer.-— J’étais donc
sous tous les rapports bien-aise d’apprendre ce que
dirait notre Bienheureux à ce sujet: or voici sondîs
cours, était daté du 50 Octobre.
I
Ami bien-aimé dans le SEIGNEUR.
«L’amour de Cnmsr presse ton ancien ami, de"
causer avec toi, dont Dieu est le soutien‘), touchant la
seule chose nécessaire à ton âme immortelle.
(JESUS dit pendant sa vie mortelle : Je suis venu
allumer un feu sur la terre; et que désirai -je plus ar
demment, si ce n’est de le voir déjà brûler? Jssus seu
tait profondément le fardeau des péchés du monde; Il
sentait la puissance de la malédiction qui reposait sur
les créatures; Il voyait combien Il aurait à souffrir pour
effacer la grande culpabilité du genre humain, et le dé
livrer de cette malédiction: mais l’amour qui était en
lui triompha, et le conduisit victorieux sur le Golgotha
pour y endurer la mort la plus terrible, seule capable
de rendre les hommes attentifs à leur profonde perver
sité? C’est de la croix de Golgatha que partent les
flammes et les rayons de l’amour de Celui qui seul est
vraiment aimable, qu’ils s’étendent dans tous les sens
et pénètrent jusqu’aux confins de la terre. Oh! pourquoi
ce brasier n’a-t-il pas déjà échaul’l’é tous les cœurs?
Pourquoi ces rayons n’ont-ils pas encore attiré les jeunes
gens, l’âge mûr, les enfants à la mamelle et les vieil
lards! Car je vous le dis en vérité: la parole dela croix
') Le nom de (instave ( Gml -Staf) signifie en suédois Dieu
ton soutien. Note de l’Edit.
—159-—
estime vertu de Dieu, capable de sauver tous ceux
qui y croient. C’est par la seule parole de la croix de
CHRIST que le royaume de Dieu s’établira sur la terre.
Ce royaume ne paraîtra point avec des signes extérieurs;
c’est dans l’intérieur de l’homme qu’il prendra nais
sance par l’esprit de CIIRIST. La foi vient à naître : la
foi à quoi? la foi à la parole qui vivifie , la parole qui
était auprès de Dieu , et qui a été faite chair, afin
d’amener les enfants des hommes des ténèbres à la lu
mière. Cette parole, cette parole de bénédiction est
posée comme la pierre angulaire de l’édifice, sur lequel
les prophètes et les apôtres ont élevé le temple, ren
dant un éclatant témoignage au nom de leur Dieu, de
sorte que l’univers actuel puisse encore l’entendre. Per
sonne ne peut poser d’autre fondement que celui qui a
été posé; car il n’a été donné aucun autre nom aux
hommes, par lequel ils puissent être sauvés, que le
nom de JESUS. Ce nom de JESUS est la source de t0.ut
salut; et il ne suffit pas d’y croire, il faut qu’il devienne
une vertu de Dieu dans les cœurs et que son efficacité
passe dans la vie: or ceci n’arrive qu’à ceux qui s’absin
donnent sans réserve et comme des enfants à la conduite
de l’Esprit qui mène à toute véritéet qui rend àchacun
claire et intelligible cette parole de la croix. Tous ceux
qui demandent cet Esprit de lumière, le reçoivent! et
celui qui l’a reçu, doit veiller et prier, pour qu’il lui
reste , et qu’il lui montre le chemin de la vérité qui est
lé,CIIRIST, la vie éternelle. Ce qui vient de CHRIST, mon
ami, le seul SAUVEUR et SANGTIEI0ATEUR de l’univers, con-v
duit aussi à Lui. Voilà pourquoi ce même CHRIST a dit!
Allez dans tout l’univers, prêchez à tous les peuples
l’Evangile de JESUS-CHRIST, et leur enseignez à observer
_149_
tout ce que (moi Jssus) je leur ai commandé. JESUS dit:
Vpus êtes mes amis, si vous faites ce que je vous com
mande. 0 mon bien cher! qui n’aimerait être l’ami du
Rédempteur? — Ailleurs Il dit encore : Le serviteur
qui connaît la volonté de son maître, et ne la fait pas,
sera _d’êùblement châtié. Personne donc ne pourra se
présenter devant lui et lui dire : Je ne connais point,
SEIGNEUR, ta volonté! car la Lumière, qui est toujours
le même CHRIST, luit à tous; celui qui s’approche de
cette lumière est tellement attiré par ses rayons salu
taires èt’viv‘ifiants, qu’il est forcé de s’écrier: Lumière
divine, yiéfis en moi, éclaire-moi; éclaire mon cœur de
part_jenjjpart, afin que je voie et que je puisse mettre
de côté tout ce qui fait obstacle à JESUS, le Roi de
gloire ,! et tout ce qui l’arrête et l’empêche d’établir sa
démeui*e .en moi! Eclaire-moi jusqu’à ce que je trouve
la monnaie de la grâce et de l’unique salut en CHRIST,
lequel me crie: mon enfant, ma grâce te suflit.
c Oui, mon ami, c’est au nom de ce JESUS, de ce
SAUVEUR, que je dois te crier: Zachée, descends de
toutes les hauteurs des édifices que tu t’es construits,
ne perds pas ton tems à examiner des choses qui ne 'sont
point de tu vocation; descends, fais-toi petit; JESUS,
l’unique SAUVEUR, la source de tout salut, le pain de
vié,’veut entrer dans la demeure de ton cœur, afin que
le saluty entre avec Lui, et que tu sois revêtu de force
par l’esprit de la grâce de JESUS , pour devenir un té
moin de cette vérité qui seule te transportera dans la
vraie liberté des enfants de Dieu, et te rendra capable
d’annoncer la bonne nouvelle de la paix , et le nom de
Celui en qui seul est le salut.
« Ecoute, mon ami, ta vocation est d’annoncer la
—»—l41—
parole de vie, mais'de ne l’annoncer d’aucune autr'e
manière que par la communication pure et simple du
lait sans mélange de l’Evangile de JESUS-Cnms'r; et
‘ quand ta prédication ne Consistcr‘ait qu’en une réunion
‘ claire et naturelle de divers passages de la Bible, c’est
à-dire de textes rendus mot pour mot, mais formant
un ensemble dans tout l’esprit de simplicité native , je
te promets sur mon âme, que la semence de ta parole
sera agréable au SEIGNEUR qui la bénira‘. Que tu parles
donc aux grands ou aux petits, je te le répète, d’après
ta vocation, tu ne dois annoucer la parole de la croix
d’aucune autre manière que par le lait simple et sans
mélange de l’Evangile. Car vois-tu, c’est là la parole
de vie; ce n’est que dans la sainte Bible que le chemin
de la vie est ouvert aux peuples , qui seront jugés un:
jour selon le contenu de ses livres.
(JESUS - CHRIST dit: Quand l’Èvangile Sera prêché
aux confins de la“terre, alors entrera la plénitude des
gentils; alors paraîtra l’étoile brillante du matin; alors
on verra sur la terre le règne de Dieu aussi dans sa
forme extérieure. Il faut donc , mon ami, que le règne
de Dieu se forme d’abord dans l’intérieur de l’homme
pour paraître ensuite au dehors, et cela uniquement
d’après les conseils du Sage des sages, de JESUS, le
seul Maître et Instituteur, quand il a dit: Allez et prêt
chez l’Evangile. Je te le dis en vérité, la simple prédi
cation de la parole de la croix, voilà la vraie manière
de s’y prendre, pour construire le grand temple de
Dieu. Le CHRIST a frayé ce chemin , et Il nous invite à
L’y suivre. Il conduit, il est vrai, à la croix, mais il
conduit aussi à la gloire, dans laquelle Il est entré
comme le premier des héros, et d’où Il’nous dit :
-——142——
Là où je suis, je veux que mon serviteur soit avec
moi. '
«Je suis Venu allumer un feu sur la terre, et que
désirai-je plus ardemment, si ce n’est de le voir déjà
brûler? Voilà encore une fois ce que dit le SEIGNEUR;
le SEIGNEUR forme aussi des souhaits, mais non pour
Lui, mon ami; pour toi et tous les enfants des hommes.
Il voudrait que tous les cœurs fussent déjà enflammés
de ce feu allumé sur le Golgatha, et dont Oberlin,
Lavater, Arnd, Tersteegen, Franhe et beaucoup d’au
tres frères du même genre étaient enflammés, et qui
ont publié avec la Vraie simplicité qui plaît à Dieu,
l’amour‘de Celui qui s’était abandonné à la mort afin
qu’ils eussent la vie. Oui, mou ami, ces frères vraiment
chrétiens vivent et vivront éternellement; et ils ne se
répentiront jamais d’avoir annoncé les voies de Dieu
avec pureté et simplicité. Ils prêchaient aux peuples la
parole de la Bible; aux enfants ils donnaient le lait, à
ceux qui pouvaient la supporter, ils donnaient de la
nourriture plus solide; et‘ si le SEIGNEUR, qui a des
grâces de toute espèce, jugeait convenable de leur don
ner, à eux, quelque chose déplus, ils le gardaient
pour eux dans un cœur aimant et simple, et n’en com
muniquaient au. peuple que ce qu’il était en état de
digérer, se rappelant cette parole indispensable de l’Ecri—
turc : Ne jetez point vos perles devant les pourceauyç ,
et ne donnez pas les choses saintes aux chiens, afin
qu’ils ne se retournent pas vers vous pour vous déchi
rer. Ils se rappelaient que le SEIGNEUR aimait tous ses
disciples; mais qu’Il confia plus à Pierre, à Jacques et
à Jean qu’aux autres; qu’Il n’en prit que trois avec Lui
sur le Thabor , et que sa sagesse éternelle ne se découvrit
—’143—
entièrement qu’au Seul disciple reposa sur son sein.
0 mon cher ami! crois-moi, si, selon la volonté du
SEIGNEUR , tu veux devenir pasteur et prédicateur de la
Justice qui soit reconnue de Dieu, prédicateur simple
de la Bible et de l’Evangile, le SEIGNEUR, ton Intendant,
dirigera les cœurs même des plus revêchcs, comme on
dirige des ruisseaux d’eau pure. Prie donc le SEIGNEUR,
mon ami, de t’accorder encore plus de simplicité; laisse
toi entièrement mouvoir et conduire par Lui; cherche
a devenir un enfant; car alors Il fera de toi un homme.
Que le SEIGNEUR, notre SAUVEUR à tous , auquel appar
tient l’honneur et la gloire, veuille apposer sur toi son
sceau par son esprit, comme sur son éternelle pro
priété, comme appartenant à la famille divine en CHRIST;
qu’ll accomplisse cette parole en toi, selon le conseil
de son éternel amour, e.t son bon plaisir, afin que tu
puisses un jour t’écrier‘de tout ton cœur avec l’apôtre:
Je regarde tout comme des choses mauvaises et de la
boue , afin de gagner CHRIST! Que le Dieu d’amour
soit avec toi, et que son esprit te crie à toute heure:
.
Cherche JESUS et sa lumière,
Tout le reste n’est que chimère.
Amen. ‘)
‘) La manière dont les réflexions précédentes sont présen
' tées, semblerait donner à entendre que les explications
providentielles de l’Ecriture sainte, sur lesquelles repose
la Nouvelle Jémsalem, sont superflues: au fond pourtant
il n’en est rien, comme Gustave lui-même va le dire. Tout
ce que dit ici le bienheureux est parfaitement conforme à
la nouvelle doctrine. Il résulte donc simplement de ce
discours que tous les esprits sur terre aussi bien que dans
le monde spirituel, n’ont pas besoin d’être introduits dans
—M«Æ—
’ Du 8 Novembre 1855.
Le Discours précédent m’avait t’ait faire bien des
réflexions. Je craignis d’abord qu’il ne fût dirigé contre
mes travaux et mes convictions actuelles; mais ayant
mûrement réfléchi et suivi ensuite ce qui se passait en
nous, Mme LineWeg et moi, j’ai reconnu que le but
principal de ce discours était d’abord de ramener ami—
calement cette dame, par le canal de laquelle il me fut ‘
communiqué, à cette simplicité entière de la foi qui
convenait à son sexe et à la nature de son esprit; en
suite de me détourner moi-même un peu du tour spé
cial et scientifique que mon esprit avait pris depuis
quelque tems , et qui était entièrement opposé à la vo«
cation, telle qu’elle venait de m’être présentée. Déjà à
présent je reconnais que Cet avertissement est arrivé à
.
le sanctuaire de la foi par la porte des sciences profondes;
cela n’est réservé qu’à ceux qui ne sont point susceptibles
d’autant de simplicité. Et quand on reconnaîtrait que Li
peweg lui-même, quoiqu’un être bienheureux d’un ordre
très—élevé, n’était point encore initié à tantes les vérités
célestes, on n’ôterait rien à son mérite, ni à l’onction
Vraiment incomparable de ses communications. Le SEIGNEUR
n’est point tenu de déclarer immédiatement à chaque es—
prit que c’est Swédenborg qu’ll a chargé de transmettre
in la terre le sens spirituel de la parole: cette démaflhe
doit se découvrir par l’intermédiaire des autres esprits,
par l’examen et l’étude. Comme disciple sans restriction
de la Nouvelle Jérusalem, j’ai cru devoir placer ici cette
remarque : d’autant plus que ces mêmes communications
n’ont fait que me confirmer plus que jamais dans la doc<
trine destinée, selon moi, à faire par la suite le salut de
l’univers. Note du Trad.
—145-—
propos; il m’a porté un peu plus de la connaissance du
vrai à l’amour du bien, vers lequel se dirigent beau
coup plus maintenant mes all’ections et mes forces. La
vérité de mes convictions, pour le fond, n’en est de—
venue que plus inébranlable par la tentation; seule
ment le nom de ceux qui annoncent la Nouvelle Jéru
salem, et le matériel, pour ainsi dire, de son immense
système, sont rentrés un peu dans l’ombre, comme
moins compatibles avec le fond de mon caractère , qui
tend à suivre la bannière de l’amour et de la charité.
',.. Le combat, néanmoins, qu’il m’avait fallu livrer
à cette occasion, m’avait laissé quelque inquiétude dans
l’esprit, et je n’eus de repos que je n’eusse revu le
fidèle ami. Je demeurai bien quelque tems dans l’irré
solution à cet égard; mais enfin je me recommandai au
SEIGNEUR, et je l’allai trouver; car, malgré moi, je m’y
sentais toujours entraîné. Dès mon entrée Anna vint
au-devant de moi et me dit: Je suis bien aise que vous
arriviez; depuis longtems je me sens tourmentée. Et
moi aussi, lui répondis-je. Nous n’eûmes que le tems
d’entrer dans le cabinet; déjà elle était en esprit; et
Lineweg me dit d’une voix animée, comme par l’amour,
des paroles qui semblaient avoir des ailes de feu.
« Ton ami, toujours invariablement le même, est
là. Il dit: écris.
« Salut, salut, ami cher et précieux; sois mille
fois le bien - venu dans le cercle de mes bien -aimées;
ami de mon cœur; elles ont prié bien ardemment pour
toi pendant ton absence; et tes propres supplications
pour elles ont été portées par moi dans le cœur paternel
de notre Dieu; car l’amitié que l’on cultive dans le SEI
GNEUR est fidèle. Il n’est point question ici du proverbe
,10
-'-' 146 —
du monde : Loin des yeux, loin du cœur. Non , mon
bien cher, l’alliance de notre amitié a été cixnentée
plus fortement: elle durera toujours, tout comme le
gage que je t’cn_ai donné, et que j’ai mis à ton doigt.
Examine- le bien, tu verras que tu n’y trouveras point
de fin; eh bien! notre amitié sera de même éternelle.
u Et maintenant, mon ami, quel langage as-tu
reconnu dans la dernière communication qui t’a été
transmise? Oh! mon cher, je puis t’assurer, crois—moi,
il est celui de l’amitié la plus vraie et la plus. pure. Je
voulais te donner un mot d’avis salutaire pour ta main'
et pour ton cœur, et cela pour tout le reste de ta vie,
Comme il y a en ce moment beaucoup de séductions
spirituelles, que tu es encore jeune et sans expérience
à cet égard, je voulais te rendre attentif à la nécessité
pour toi de regarder toujours l’étude de la Bible et
l’enseignement de l’Ecriture sainte comme la chose
principale, et de ne donner qu’un rang secondaire à
tout le reste, quelque parfait qu’il puisse paraître.
Comprends bien, mon ami, que la science des esprits
n’est point faite pour toi, qu’elle n’est point dans la vo
cation. Ton emploi doit être de répandre la pure et
claire semence de la parole dans de jeunes cœurs et
dans des cœurs adolescents. Crois-moi, ami de m0n
cœur, c’est là une tâche agréable. Et quand tu te seras
une fois bien enfoncé dans les richesses de cet ineffable
trésor de la parole, tu ne donneras plus , pour aucun
prix, la félicité qu’il te procurera. Je rends grâce au
SEIGNEUR de m’avoir choisi moi-même pour un semblable
office, et d’avoir ainsi enrichi ma pauvreté pour le bien
de son église. Que le SEIGNEUR en soit béni; Il me per
met maintenant par sa grâce de voir et de goûter les
—-147—
Bar——
fruits de ce que j’avais semé en son nom, par sa vertu
et avec son assistance. Oui, que le SEIGNEUR qui m’a
donné tout cela, en soit éternellement béni. Il te donne
la même chose, mon ami; viens seulement à Lui; la
plénitude des trésors de ses grâces t’est aussi ouverte
à toi; viens avec confiance; plus tu feras d’instances
auprès de Lui, plus tu Lui seras agréable. Vois, Il m’a
fortifié et affermi de mille manières; c’est de Lui que
vient une grâce si ineffable. Oui, je célébrerai éter
nellement sa louange; car il m’a fait une grande misé
ricorde. Il m’a béni et m’a délivré sur le champ de ba
taille intérieur et extérieur; Il veut de même être ton
soutien. Après m’avoir ainsi gratifié, il y a ajouté, par
pure grâce, le don de deux compagnes pieuses, qu’Il
a fait tenir à mes côtés pour me soutenir puissamment,
et qui outre les mains du Dieu de toutes grâces sont
devenues pour moi une bénédiction permanente.
« 0 mon bien-aimé, quand tôt ou tard tu penseras
à te marier, ne te cherche ni une femme belle, ni une
femme riche, cherche plutôt un cœur pieux et fidèle;
c’est là la bénédiction d’une maison. Je le sais non
seulement par raisonnement, mais aussi par expérience.
« Remarque, mon ami, que ma félicité ne consiste
pas à te dire des choses qui sonnent bien à l’oreille;
mais des choses utiles pour le tems présent et pour le
tems futur. Regarde donc aussi la dernière communi—
cation qui t’a été faite, comme un avertissement salu
taire. L’heure viendra que tu te rappeleras cette même
communication sérieuse avec un cœur profondément
touché, et tu t’écrieras : SEIGNEUR Jésus - CHRIST, avec
quelle tendresse tu m’as traité! Je te remercie de
10"
148
)
m’avoir révélé cela , à moi, petit enfant, enfant encore
mineur. ‘)
« Sache que tu as été forcé de revenir ici. Je t’ai
pris par la main, comme un père prend son enfant, et
je t’ai mené au lieu où tu devais apprendre ceci, pour
ranimer ta force et ton courage. Si d’ailleurs tu as quel—
que chose sur le cœur, mon cher ami, si tu désires
quelque éclaircissement, parle, ton ami écoute.
Moi. Je ne sais au juste ce que je dois entendre
par l’édifice, ou la construction propre, de laquelle je
dois descendre, d’après la dernière communication.
Lui. Le passage en question, mon ami, a rapport
à ton état présent et à l’avenir. Il doit, comme quel
ques autres indications, te porter à reprendre davantage
le caractère simple de l’enfance. Tu l’as déjà , mais tu
ne risques rien de descendre encore plus à cette sim
plicité. Les systèmes et les écrits des savants sont re
présentés par des tours élevées; il en faut descendre
pour ramasser les miettes précieuses et trop négligées
aujourd’hui du simple Évangile. Tu dois être rendu
attentif à ne plus te perdre dans des doctrines et des
compositions étrangères à cette simplicité évangélique,
et à n’y point attacher plus d’importance qu’à la parole
‘) Note de Gustave. Cette heure est déjà venue. Depuis qua
tre ans je sers le SEIGNEUR dans une grande paroisse; et
tous les jours je vois avec joie, avec reconnaissance’et
étonnement, comment cette école m’a formé pour devenir
un pasteur des brebis et des agneaux. Cet image de tra
vaux utiles qui.1n’avait été offert, est toujours demeuré
présent à mon esprit; et conformément à la prédiction du
Bienheureux , ce sont surtout les agneaux me réjouis—
sent par leurs progrès. ' ’
-M.«9—
sortie de la bouche du Saint des Saints‘). Voilà au
juste, mon cher, quelle était mon intention dans ce que
je t’ai dit; et tu peux maintenant parfaitement le com
prendre.
Moi. Je suis forcé d’avouer que j’ai négligé un
peu l’étude directe de la parole, et que je n’aime pas
encore le SEIGNEUR comme je devrais.
Lui. C’est parce que le SEIGNEUR t’aime, et vou
drait faire quelque chose d’utile de toi, que cet avis
de la charité t’est donné; et c’est pour toi une chose
sérieuse. Mais ne crains pas; prends courage; attache
toi à Lui par la foi, attache - toi à Lui-même; Il est la
voie, la vérité et la vie. Reste avec Lui, Il restera avec
toi; et alors il faudra bien que tu réusisses. Celuit’a appelé est fidèle; il saura te préparer l’armure né
cessaire; laisse - le bien agir sur toi, et tu apprendras
qu’Il est le Dieu vivant; qu’il sait opérer des merveilles;
et tu jetteras enfin ce cri de joie : Mon âme, loue le
SEIGNEUR, que tout ce qui est en moi loue son saint
nom! Amen.
' ‘) Je suis forcé de le répéter ici, ce n’est point, sur la Nou
velle Jémsalem que tombe ce blâme, puisque la Nouvelle
Jérusalem enseigne de son côté précisemcnt ce que Line
weg vient de dire, et puisque Gustavc lui-même n’y a pas
renoncé, et s’y est au contraire plus fortement attaché. Il
ne peut être question ici que de l’abus des systèmes et de
la perte de tcms que peut entraîner l’étude de certaines
branches pour lesquelles du n’a point d’aptitude, aux dé
pens des soins a donner à la réforme’de son être; torts
que la Nouvelle Doctrine est la première à condamner,
bien qu’elle seule puisse accorder définitivement le chris
tianisme avec la science et la philosophie moderne.
Note du Trad.
—150—
Moi. Mille remereîments; le conseil m’a été donné
à propos , et j’y ferai attention.
Lui. Oui, mon bien cher, entre plus profondé—
ment dans l’Evangile, pénètre plus avant dans la parole
de la croix, et tu éprouveras les choses les plus admi
rables. Tu te rendras toi -même plus heureux et plus
riche en bénédictions, et d’autres en profiteront. Va
maintenant en paix, je serai à tes côtés. Amen.
Du 14 Novembre 1855.
J’avais bien souvent présent à l’esprit mon ami
mourant, voulant me dire quelque chose de particulier
les derniers jours de sa maladie , et n’en pouvant venir
à bout; mais je n’avais pas encore jugé convenable de
l’interroger à cet égard: aujourd’hui il m’a dit la chose
de lui-même; après quelques réflexions sur mes prières,
souvent trop pressantes ou trop inquiètes, quand je
désire porter le SEIGNEUR à se dévoiler tout-à-fait, et à
me faire entrer enfin dans la vocation annoncée. Il
me dit :
c Ton ancien ami est là; écris:
c Reçois de nouveau, mon cher ami, une miette
de la table de l’amour du SEIGNEUR; de ce SEIGNEUR qui
est aussi ton Père , et dont l’œil de feu et de flammes
est tourné jour et nuit sur toi ’), afin de te former tel
qu’il veut que tu sois. Réjouis -toi donc , âme chérie,
et pousse des cris de joie au souvenir de ton Dieu.
Sois homme courageux; Lui-même Il veut te guider,
') L’œil de Dieu signifie sa science infinie; le feu et les flam
mes, son amour infini. (Apoc. rêvé]. n.“ 48.)
—151—
Lui-même Il veut achever en toi l’œuvre commencée
de sa grâce pour son éternelle gloire. Il est fidèle Celui
qui t’a appelé, Celui qui t’a élu, et Il terminera son
œuvre. —
. Apprends maintenant, mon bon ami, ce que dans
ma dernière maladie j’avais voulu te dire sans trouver
la force. Je voulais te dire une chose que tu n’as pas
laissé de faire depuis, une œuvre pour laquelle ton
SAUVEUR te bénira. Ayant reconnu en toi, pour la gloire
du SEIGNEUR et dans son amour, un ami sincère et fidèle,
je v0ulais te recommander une perle précieuse, et te
dire d’avoir soin , autant qu’il sera en toi, de mon
excellente femme. Le SEIGNEUR m’a bien fait la grâce
d’être son gardien; mais , ô mon ami, demeurons encore
unis tous deux , même à présent, dans la véritable
charité. Le SEIGNEUR t’a béni, et Il te bénira encore:
vois , tu me réjouis au sein de ma félicité immortelle;
car l’amitié indissoluble que nous avons formée, bien
loin de s’afl'aiblir par le voile posé entre nous, croit au
contraire et s’étend de plus en plus dans toute la force
du véritable amour. Et combien je suis réjouis davan
tage en voyant que toi aussi tu trouves du plaisir à
pouvoir servir! Tu es heureux en cela , mon ami; car
notre glorieux Rédempteur a aussi servi tout le tems
qu’Il était sur terre. Combien sont insensés ceux qui
ont honte de servir, et qui en souffrent! Béni au con
traire celui qui aime à servir, qui sert au nom de Jésus,
et sous ses yeux! Celui là sert comme il faut! Vois,
mon ami, il vit dans un service de Dieu continuel; car
un service rendu par amour est vraiment un service divin.
«Voilà ce que je voulais déposer au fond de ton
cœur; tu l’as fait jusqu’à ce jour; continue de le faire,
—159—
principalement par la prière; car aucun soupir, si léger
qu’il soit, n’est perdu. Quand il ne serait pas entendu
tout de suite, quand il ne serait point exaucé à ta ma
nière, il ne laisse pas d’être entendu et même exaucé
d’une manière divine. Voici comment l’ami éternelle
ment fidèlc le conduit à l’égard de tes prières: si ce
que tu demandes t’est salutaire, Il te l’accorde aussitôt;
dans le cas contraire Il refuse, mais alors Il te donne
l’équivalent d’une autre façon. Voilà, mon cher, avec
quelle précision Il répond à chacune de tes demandes!
Demeure-Lui donc uniquement fidèle, et Il se glori
fiera en toi de la manière la plus admirable. Jusqu’ici
Il te cache encore bien des choses; Il te dit: ce que je
fais, tu ne le comprends pas maintenant; j’aurais encore
beaucoup de choses à te dire , mais tu ne pourrais les
porter. Mais glorifie le SEIGNEUR par la patience ; et le
tems viendra , qu’Il se révélera a toi entièrement, oui,
entièrement. Oh! ne renonce pas à ta confiance en Lui;
attends patiemment; son secours se prépare ; tu appren
dras dans peu, mon ami, que tu as au ciel un Dieu
vivant et véritable, un Dieu ami! Il est près de toi,
Il est en toi! Le secours peut- il être plus près? Oh!
parle-Lui , Il te répondra; attache-toi à Lui, Il te pla
cera sur son sein , et Lui-même fera ton œuvre avec soin.
« Tel est, mon ami, le message qu’Il m’a chargé
de te porter. Nous autres bienheureux, nous lisons sa
volonté sur une table de crystal ‘), telle est sa condes
cendance; nous nous plaçons sur le nuage de la grâce,
et l’haleine de l’amour nous porte près de vous les
bien-aimés que nous avons laissés sur la terre.
‘) Le crystal signifie la vérité divine.
Note du Trad.
—155—
. 0 mon ami! quelle jubilation ce sera aussi pour
toi, quand une fois tu entendras le chant de triomphe
de ceux qui ont cru et qui viennent à voir face à face!
Je partage ta félicité en te voyant consacrer ta _voix à
la louange du SEIGNEUR; cette voix se forme et se dé
veloppe de plus en plus pour sa gloire; elle pourra se
mêler plus tard aux sublimes accords du cantique nou
veau. ‘) Quand sur terre un homme, même un seul,
loue et glorifie le SEIGNEUR par le chant, c’est un aimant
qui attire des milliers de bienheureux autour de lui; ils
s’unissent à ses accords, et le bénissent au nom du
SEIGNEUR. Sois assuré, mon bien cher, que notre grand
Dieu s’occupe même de la plus petite chose, et qu’il
bénit ses enfants dans les petites circonstances comme
dans les grandes, et cela d’une manière inetl’able. Com
bien de fois je l’ai remercié de ce que, dans sa bonté
infinie, il m’ait fait la grâce de pouvoir bénir par ces
conversations extraordinaires et célestes , et enrichir
de grâces, en son nom, ceux qui me sont chers, et
parmi lesquels tu es compté! Que le SEIGNEUR en soit
glorifié. Vous aussi vous éprouverez un jour son amour
au -delà de ce que vous demandez , au- delà de ce que
vous pourrez comprendre. .
u 011! tenez-vous à Lui, Il se tiendra à vous. Lui
même Il vous formera pour son céleste empire. Ho
sianna! Amen. '
Après une pause il continua:
«Mon ami, tu es instamment prié d’imposer de
") Le cantique nouveau signifie la joie d’un cœur réjoui par
la nouvelle que le SEIGNEUR en tant que homme a reçu
toute puissance au ciel et sur la terre. (Apoc. expl. 526,
857, 859.)
-—154—
nouveau les mains à ma chère femme , comme aupara
vant, et au Nom trois fois saint; seulement tu pourras
ajouter des passes depuis les genoux jusqu’au bout des
pieds. Il faut que je te dise cela moi-même; car ma
femmè ne te l’eût jamais dit.” —(Même après cette in
vitation, elle prétendit encore que cela me forcerait
à trop me baisser.) «Mais la vraie charité, répartit Li
neweg, ne trouve rien de pénible à se baisser. " -—
Immédiatement avant l’arrivée du bienheureux père
de famille, nous nous étions entretenus d’un prince voi
sin, en Allemagne, qui avait été très-grand mangeur:
nous fûmes donc étonnés d’entendre tout- à - coup la
voix nous dire: «Ce grand mangeur , dont vous parliez
tout-à-l’heure, est assis en ce moment dans un désert
affreux , ayant devant lui une table admirablement ser
vie, couverte de mets excellents et de vins délicieux;
mais il lui est défendu d’y toucher, il ne peut pas même
se rafraîchir la langue brûlante; et il souffre horrible
ment dc la faim et de la soif. ”
Cela me rappela un article touchant le D” F . . .
d’Argentine que Lineweg avait fait insérer de son vivant
dans une gazette de main et que je m’occupais à tra
duire du français. Je lui demandai, si j’y devais faire
entrer une note ajoutée plus tard, également de sa
main, et qui m’avait été communiquée. «Tu n’as qu’à
l’ajouter également en note, me dit-il. Mais ce cher
racheté, ah! il faudrait le voir maintenant, comment
il fait résonner la harpe sous ses doigts?) Son hymne
“) Jouer de la, Harpe signifie célébrer le SEIGNEUR par la
joie d’avoir connu la vérité. Les instruments à cordes ont
plutôt rapport au vrai, les instruments à vent plutôt à
l’amour. Note du Trad.
—-155—
favori est: Le SEIGNEUR a fait pour moi de grandes
"3 choses. '
«Maintenant, dit-il, en terminant, nous allons
convenir d’un point très-naturel entre amis, et tu peux
également en prévenir ceux de ta maison, c’est que
dans le cas que nos entretiens se prolongent au - delà
de l’heure des repas , tu acceptes la table de mes bien
aimés, pour recevoir la nourriture corporelle, après
avoir reçu la nourriture spirituelle. Tu seras donc tou
lours le bien-venu, que ce soit aujourd’hui ou demain.”
* * *
Comme l’article mentionné ci-dessus n’a encore
rien perdu de son intérêt, et qu’il jette un grand jour
sur la manière de vivre et les aimables particularités
du caractère de Lineweg pendant sa vie, je crois
devoir en donner ici la traduction, avec la note en
question, et les réflexions orales qu’il y ajouta.
Rapport d’une conversion remarquable et touchante,
opérée par la grâce tue/fable de notre SEIGNEUR , à la
suite de prières et d’intercessionsI ardentes et multi—
pliées, sur la personne d’un ennemi décidé de la
croix de CHRIST.
Du 21 Mars 1816.
J’ai à vous communiquer l’histoire touchante de
la conversion d’un de nos concitoyens. Il n’y a pas
longtems qu’elle a en lieu dans notre ville (à Argen
tine). C’est notre ancien ami, le Dr F..., à qui le fait
est arrivé. Oh! louez et glorifiez avec moi le nom saint
et adorable de notre Rédempteur. qui a montré dans
-— 156..
<—_———..-A .
cette rencontre d’une manière si admirable sa puissance
et son amour!
Le D“ F... , mort depuis peu de jours; était par
venu à l’âge de 77 ans. Étant né de parents catholiques,
il avait passé ses jeunes années dans un couvent de
Jésuites , et était devenu pieux à un degré remarquable;
— mais la conduite scandaleuse et révoltante de plu.
sieurs mauvais prêtres , dont il fut souvent témoin , lit
sur son cœur une bien malheureuse impression; en
confondant la parole de Dieu avec ces ministres indi
gnes qui l’annonçaient, et qui sans doute auraient dû
prêcher I’Evangile par leur conduite comme par leurs
paroles, au lieu de le nier par leur vie, votre ami se
mit à haïr de tout son cœur des hommes qui lui fai
saient horreur, et devint en même tems un ennemi de
la croix de Cnmsr et de toutes les personnes qui avaient
à cœur la gloire de Dieu BÉDEMPTEUR et qui cherchaient
à la procurer. Il persévérait, dans un âge avancé, dans
ces désolantes dispositions; car il n’y a que quelques
mois qu’il renouvela encore en ma présence ce serment
solennel qu’il avait souvent fait, que jamais il ne souf
frirait l’approche d’aucun ecclésiastique à son lit de
mort. Je cherchais toujours, dans les moments que la
grâce du SEIGNEUR me ménageait, et où je pouvais lui
parler en ami, de faire quelque impression sur son
cœur; et je conservais toujours l’espoir, qu’à la fin
pourtant la grâce du SEIGNEUR triompheraît de cette
âme aveugléc et déroutée. Enfin le SEIGNEUR bénit cet
espoir et la peine que je prenais à son sujet; surtout
pendant les derniers jours que notre ami, qui n’avait
été que trop à plaindre, eut encore à vivre.
Écoutez le récit de cette merveille de notre Dieu.
z.“
——157-—
Il y a trois semaines, le D" F . . . tomba dange
reusement malade. Aussitôt nous convînmes au nombre
de cinq personnes, trois frères de sa propre commu
nion, avec ma femme et moi, d’adresser à la fois nos
prières au ciel; et cela uniquement pour le salut de
son âme, car la santé de son corps nous paraissait la
moindre des choses. Personne encore que môi n’avait
osé parler au malade de religion: encore n’en'pouvais
je dire moi - même qu’un mot en passant, sans insister
longtems. Il prit toutefois pour moi une tendre alfection,
et ne voulait soufl'rir personne d’autre auprès de lui,
même quand la maladie fut devenue décidément mor
telle. Comme avec tout cela je ne pouvais remarquer
encore aucun changement dans son cœur, nous nous
réunîmes tous chez moi, afin de prier pour lui en ohm
mun; et nous conjurâmes le SEIGNEUR de vouloir bien
amener par sa grâce ce pauvre malade, depuis si long
tems dérouté, à une prompte et salutaire pénitence.
Un des jours suivants je me sentis porté à l’aller
trouver pour lui parler tout - à - fait ouvertement de la
nécessité de se réconcilier avec Dieu, de lui représenter
ses égarements et ses péchés, enfin de lui rappeler la
mort de Celui en qui seul peut se trouver le salut. Je
sollicitai ardemment l’assistance du SEIGNEUR pendant
le trajet de chez moi jusqu’à sa‘demeure. gg,
Mais dans quel état je devais le trouver! sa langue
était paralysée, et il ne put parvenir à articuler une
seule syllabe; seulement il me serra à plusieurs reprises
sur son cœur, et semblait ne plus vouloir me laisser
aller. Je ne pus donc lui parler et m’ouvrir à lui aussi
librement que je m’étais proposé de le faire; mais au
lieu de cela je m’adressai avec d’autant plus d’ardeur
_.158._
au SEIGNEUR; et je Le conjurai de lui délier la langue et
de lui rendre la faculté de parler, si cela pouvait être
conforme à sa sainte volonté; ou bien de parler Lui
même au cœur de cet infortuné, et de lui dire tout ce
que je m’étais proposé de lui communiquer, savoir:
qu’il serait perdu sans retour s’il ne parvenait à recon
naître et 11 confesser ses péchés, et s’il ne venait à
s’adresser à Jésus, à son SAUVEUR , pour obtenir grâce
et miséricorde par la foi en Lui et l’amour pour sa
persowie adorable. Je le quittai vers neuf heures du
matin. Le jour suivant je fus dérangé par des affaires
pressantes et je ne pas le voir. Ce ne fut donc que le
Surlendemain que je pas de nouveau le visiter; mais en
attendant nous continuions à intercéder pour lui avec
ferveur; parce que nous étions vivement émus à la vue
de la position critique de notre ami, et du triste sort
qui l’attendait dans la vie future. Mais apprenez main
tenant les merveilles du SEIGNEUR. Aussitôt qu’il me vit,
il me saisit“ la main avec un empressement extraordi
naire, m’attira à lui, et me dit d’une voix distincte et
ferme : Ami! ami! Dieu a opéré en moi un miracle, un
miracle soudain, malheureux pécheur que je suis, et qui
ne sais comment j’ai pu le mériter. Dès qu’avant-hier vous
m’eûtes quitté j’ai pu prier le Dieu, que depuis si long
tems j’avais oublié. Tout a été changé en moi. J’ai
demandé grâce pour l’amour de JESUS-CRRIST. J’ai con
fessé mes péchés. Je me suis réconcilié avec Dieu et avec
les hommes. J’ai prié mes ennemis, et surtout les ecclé
siastiques , de me pardonner pour l’amour de Jésus—
Cnmsr. J’ai reçu la communion, et je sens dans mon
âme une paix indicible .' J’ai obtenu grâce entière. Jésus est
mort aussi pour moi! Je le sens; JESUS est tout pour moi!
-— 159 -
Notre frère vécut encore quatre jours dans cet
état d’un heureux changement, et dans cette plénitude
de grâce et de joie. Il avait à la vérité de grandes souf
frances corporelles à endurer; mais son âme était heu
reuse d’un bonheur que jusque-là il n’avait point connu.
Il demeura plein de foi et d’amour jusqu’à la fin, priant
continuellement avec un ecclésiastique, auquel il té
moigna toute sa reconnaissance. Quand j’allais le voir,
il ne voulait plus me quitter; tout son cœur était attiré
par un ami dont il savait que la suprême satisfaction
était d’appartenir entièrement au SEIGNEUR, et de savoir
que d’autres Lui appartiennent. Aussi passai—je chez
lui tout le tems que mes occupations me laissaient libre,
et sans aucune crainte de prendre sa maladie, qui était
contagieuse. Je m’abandonnai entièrement à la provi
dence du SEIGNEUR en ce point; même quand ayant
plusieurs fois tenu le malade embrassé, je sentis les
atteintes de la même fièvre et des mêmes chaleurs brû
lantes qui le dévoraient. Le SEIGNEUR ne permit pas que
cela eût pour moi aucunes suites fâcheuses.
Notre bienheureux ami mourut ainsi le cinquième
jour de sa conversion. J’étais dans mon lit, quand tout
à-eoup je me réveille vers cinq heures et demie , et me
sens porté intérieurement à prier pour ce nouveau frère
dans le SEIGNEUR. J’avais le pressentiment que dans ce
moment-là même il était à l’agonie et subissait son der!
nier combat. Je priai pour lui tout haut; j’étais tout en
larmes; et je conjurai le SEIGNEUR de recevoir dans sa
grâce cette pauvre âme qu’Il avait rachetée, et qu’Il
avait ramenée à la vie en Lui. — Je m’habillai alors à
la hâte; je me rendis chez le malade, et j’appris qu’il
venait de rendre son âme au milieu des prières. C’était
160 -—
.
a l’instant-même que je m’étais senti poussé chez moi
à prier pour lui.
La conversion de cet homme, qui demeure un
monument touchant de la bonté infinie du SEIGNEUR, a
fait une impression extraordinaire sur le public; car il
était généralement connu dans la ville pour un savant
du premier ordre dans sa profession; et on l’aimait à
cause de sa bienfaisance, de son honnêteté; mais on
savait en même tems très-bien que c’était un ennemi
décidé de la croix de CHRIST , et qu’il haïssait surtout
l’Église. On le regardait comme un déiste; encore crai
gnait-on que son incrédulité n’allât plus loin.
0 mes amis, remerciez le SEIGNEUR avec moi, de ce
que sa bonté ait touché aussi cette âme, qui est deve
nue un précieux prix de ses souffrances. Oui, qu’à
l’Agneau qui a été sacrifié pour nou_s , on accorde l’hon
neur, la gloire, la louange et la bénédiction; parce
qu’ll a répandu son sang pour les plus grands pécheurs,
et pour les pécheurs les plus endurcis. Conjurons -Le
que par sa puissance divine et par sa grâce , Il les rap
pelle tous à Lui et à sa félicité. Amen , Amen!
Note de Gustave.
J’avais trouvé cette Lettre dans un recueil manus
crit que le pasteur Oberlin faisait circuler dans sa pa
roisse du Ban-dc-la-Roche et parmi ses amis d’Argentine.
Mais il paraît qu’elle avait été singulièrement abrégée
et changée pour être insérée dans les feuilles publiques;
car dans ce manuscrit on lisait en marge l’addition sui
vante de la main de Linewe« :
*-161«
.Notre ami, le docteur Fischer, médecin de l’im«
pératrice. Joséphine , a obtenu de notre RÉDEMPTEU‘R la
grâce insigne, qu’au milieu de son répentir et de ses
larmes , la veille de sa mort, le SEIGNEUR Lui-même lui
apparût. Le SEIGNEUR lui montra son côté ouvert et les
plaies de ses mains, et lui assura de bouche l’entier
pardon de ses fautes. "
A la fin de la lettre on lisait cette autre note de
Lineweg : «Je ne me rappelle plus au juste le contenu
de ma lettre; mais dans l’original il devait y avoir des
détails bien plus circonstanciés; car j’ai entendu, de
mes oreilles, que le Docteur rernerciait le SEIGNEUR,
avec larmes, de s’être montré à lui face à face, à lui
le plus misérable de tous. les pêcheurs; de lui avoir
montré son cœur percé, et de lui avoir dit ces propres
paroles : Tous les péchés te sont pardonnés. La première
parole qu’il m’adressa , lors de ma dernière visite , fut
celle - ci : J’ai vu le SEIGNEUR, et j’ai obtenu mon
pardon! "
’ Je me rappelle de mon côté parfaitement, 00m4
ment Lineweg, pendant sa vie, parlait quelquefois du
D“ Fischer. Celui - ci se plaignait souvent amèrement,
que les Jésuites lui eussent ravi sa foi, la paix de son
cœur et le bonheur de sa vie: et quand Lineweg lui
représentait vivement la vérité et la majesté de la foi
chrétienne, il s’écriait avec larmes : «Si je pouvais
croire , je serais heureux; mais cela ne dépend plus de
moi. J’ai toujours devant les yeux l’horrible jeu que
mes professeurs faisaient de la religion. Moi-même,
qui me destinais à l’état ecclésiastique, ils ont voulu
m’initier à leur honte et à leur hypocrisie, me portant,
en quittant l’autel, au dévergondage des plus sales
——162——
voluptés et du blasphème contre les choses saintes. '
La noblesse de son caractère et son profond sentiment
de. moralité s’étaient trouvés tellement froissés, qu’il
avait pris le parti de se sauver, et qu’il s’était fait mé
decin. .Ce qui prouve jusqu’à quel point il avait été
révolté, c’est que dans un âge très-avancé, il s’écriait
encore souvent, que si un calottin avait l’audace de se
présenter à son lit de mort, il le percerait d’un dard.
Ce ne fut que dans les derniers moments de sa
vie que Lineweg avait réussi à lui faire entrevoir la lu
mière divine dans ce flambeau qui, entre les mains des
prêtres, ne lui avait paru qu’une lueur trompeuse; car
déjà avant sa maladie cet ami l’avait quelquefois entre
tenu de la nature de l’Evangile, et avait ébranlé les
appuis de son incrédulité les uns après les autres. Comme
son cœur au fond voulait le bien, il se laissait gagner
peu à peu. Ce fut dans cet intervalle qu’il fut surpris
par sa maladie, et alors Lineweg employa tous les
moyens en son pouvoir pour le salut de son âme; et
on sait avec quel succès. Ce fut lui qui engagea le ma
lade à faire chercher un ecclésiastique. Il eut d’abord
de la peine à persuader au prêtre catholique de venir,
car celui- ci avait peur de Fischer ; et il ne risqua sa
visite que sur l’assurance réitérée qu’il serait bien reçu:
Lineweg l’accompagna chez le patient.
Du 15 Novembre 1855.
Quand je visitai aujourd’hui la chère veuve, nous
entendîmes tout- à - coup un léger bruit : Anna assura
que l’Etre chéri devait n’être pas loin , elle avait déjà
plusieurs fois entendu ces sons , qui ne lui semblaient
/
..—— 165 —
point provenir uniquement des objets physiques de la
chambre. Mlle PalnIettas, frappée de surdité dans ses
organes matériels, mais d’autant plus impressionnable
pour les influences supérieures, prétendait aussi sentir
la présence de plusieurs êtres bienheureux. Après que
j’eus fini les soins à donner à Mme Lineweg, je voulus
me retirer; Mme Lineweg m’engagea à rester à souper;
et à peine eûmes-nous pris notre léger repas, qu’Anna
entra dans l’état extatique et dit:
«Votre heureux père de famille est là, et parle
ainsi:
«Vous n’aviez pas seulement une visite près de
vous, mais plusieurs, mes bien—aimés! Tant d’esprits
faibles et incrédules disent aujourd’hui: Jamais les dé
funts ne peuvent donner de leurs nouvelles aux hommes
de la terre. Insensés! les esprits malheureux et dégra‘
dés se font remarquer de mille façons parmi les enfants
des hommes; pourquoi la même chose ne serait-elle
pas possible aux esprits bienheureux, quand le SEIGNEUR
le leur permet et les soutient? -—
«Il m’est permis, mes amis, de vous annoncer
qu’aujourd’hui le SEIGNEUR abrègera encore les jours,
afin que son règne vienne. Il faut bien qu’il en soit
ainsi, mes bien-aimés; il le faut; car les ténèbres et la
perversité parmi les enfants des hommes sont plus
grandes que jamais; et si le SEIGNEUR n’abrogeait avec
rapidité les tems, personne ne pourrait être sauvé.
«Demandez, mes bien-aimés, demandez à Dieu
des cœurs aimants; demandez-Lui son amour; car ce
n’est qu’avec cet amour que vous pouvez triompher.
L’amour, est - il dit, est fort comme la mort. --— Vous
en avez tous besoin. Il faut que vous deveniez dignes
M.“
a.‘rw"'
—-164——
d’être aimés, afin que vous soyez dignes du SEIGNEUR.
L’amour est l’huile qui alimente la lampe; celui qui ne
l’acquiert pas bientôt, afin que sa lumière brille, risque
d’arriver trop tard. ‘) Car dans un intervalle très-court
l’homme de péché, l’enfant de perdition sera manifesté;
et la porte sera fermée, de sorte que personne ne pourra
plus entrer. Celui-là fiattera toutes les passions, em
ploira tous les moyens pour détacher les hommes de
CHRIST. C’est pourquoi, mes bien-aimés , priez le SEI
GNEUR de vous donner la plénitude de son Saint-Esprit;
priez sans cesse, afin d’échapper à toutes les tentations.
En ce moment ce n’est plus comme un lion rugissant
que le Démon tourne autour de vous, car sous cette
forme les fidèles le reconnaîtraient; il se glisse comme
un perfide serpent. Veillez donc et priez sans cesse!—
Et ce que je vous dis là ne signifie pas qu’il faille croi
ser les bras; non: c’est pendant le travail que vous
devez prier; un seul soupir peut briser le cœur tendre,
le cœur paternel de Dieu. Et je vous répéterai encore
une fois:
Un regard envoyé vers Lui
Ramène mille et mille bénédictions.
c Combien l’on cherche, combien on court quand
on sait qu’on peut parvenir à se procurer quelque bien
terrestre! et l’on ne ferait pas la même chose pour se
procurer un bien éternel? Vous ne pouvez rien vous
donner vous-mêmes: comment donc pourriez-vous vous
maintenir dans ces tems de ténèbres et d’obscurité, si
’) La lampe signifie la connaissance du vrai; l’huile, l’attrait
de l’amour. (Arcanes célestes. 4658.)
—165-—
le SEIGNEUR ne vous soutenait. Insistez, pour que le
SEIGNEUR reste avec v0us, maintenant que le soir est
venu, et que le jour a décliné; insistez! oh , combien
ce divin SAUVEUR aime qu’on Lui fasse cette sainte vio
lence! Prenez-Le pour votre Berger, alors rien ne vous
manquera. Que vienne alors l’enfer avec toutes ses
puissances, il ne pourra rien sur vous: vous êtes en
sûreté! 1*
Lineweg fit ensuite lui—même une admirable prière
au SEIGNEUR, exprimant tous les sentiments indiqués;
puis, après une pause, il dit d’un ton fort sérieux:
«Aujourd’hui, mes amis, a été abattu un avare, comme
on abat un arbre (c’est ainsi que se désigne ici la mort
subite), et son sort n’a point été fortuné. Il cherche en
ce moment la mort, et ne peut pas la trouver. Son es
prit en fureur court ça et là sous la forme d’un rat;
car les souris et les rats représentent les affections des
avares. '
Enfin Lineweg dit à sa femme : «Tu as très -bien
fait de retenir aujourd’hui ce cher hôte; tu nous as
ainsi retenus tous deux. -—- Tu peux réveiller. »
Puisque le bienheureux (exPlique lui-même, ici,
le sens de ces images naturelles qui apparaissent dans
le monde des esprits, nous sommes dispensés de le
faire nous-mêmes; mais nous ajouterons un évènement
de la vie terrestre de Lineweg qui rappelle des choses
semblables. De même que ce chrétien, plein d’une foi
agissante, avait reçu la grâce de guérir et de soulager
les malades par l’imposition de ses mains, de même il
chassait quelquefois les mauvais esprits par la vertu du
SEIGNEUR: car ces choses marchent naturellement en
semble, comme on le sait par l’Evangile et l’Église
166
primitive. La puissance du SEIGNEUR détruit toute espèce
de mal. Quand Lineweg sentait le moment venu, après
avoir prié, il saisissait un malheureux par le bras , lui
regardait fixement dans les yeux, et lui disait : «Le
SEIGNEUR te délivre; va et ne pèche plus. * C’est de
cette manière qu’il délivra un jour une paysanne de la
rive droite du Rhin, qui vint le trouver pour être guérie
de ses tourments intérieurs. Tandis qu’il priait avec
elle, entra le vieil ami de la maison, Link, connu pour
avoir la vue spirituelle ouverte (comme il y en a tant
aujourd’hui, soit pour le bien soit pour le mal): «Quels
animaux infernaux,» dit-il en entrant, «avez-vous donc
là dans la maison? » « Que v0ulez -vous dire? ’ lui de
manda Lineweg. — « Mais un énorme rat, que je viens
de rencontrer sur l’escalier! Il m’a fallu me retirer
contre la rampe pour le laisser descendre.» C’était
sans doute sous cette forme que partait l’esprit de
l’avarice qui tourmentait cette pauvre femme. ‘)
\
Du ’16 Novembre 1855.
Aujourd’hui, à la suite de quelques causeries du
soir, Mme Lineweg apporta la boîte aux sentences; on
tira au sort; et chacun eut à se réjouir des paroleslui étaient échues. Mue Palmettas, frappée de surdité,
eut le passage de St.-Mathieu XX. 29 —— 54.“) Nous_
chantâmes ensuite le cantique : Louez le Rédempteur,
le puissant roi de gloire. Anna nous accompagnait au
piano: tout-à-coup, au lieu de continuer le quatrième
“) Voyez Arcanes célestes. (958. 1514.)
”) C’est la guérison des deux aveugles.
—’167—
verset, elle retire vivement les bras à elle; et elle est
ra_vie en esprit. Lineweg était au milieu de nous, et dit:
« Attiré par votre hymne de louange, je viens vous
dire que non-seulement mon cœur, mais les cœurs d’un
grand nombre de bienheureux en ont été touchés. Votre
chant a même pénétré dans le ciel suprême, et a tou
ché le cœur paternel de Dieu. Le cœur paternel de
Dieu? dites-vous; et pourtant nous avons loué le RE
DEMPTEUR, le Fils de Dieu. Mais ne savez-vous pas, mes
bien-aimés, qu’Il est un avec le Père, et que le Père
Lui a donné la puissance, la gloire, les trônes et les
dominations? Si donc vous louez le RÈDEMPTEUR, vous
louez le Père. — 011! si vous saviez, combien Il aime
qu’on le loue et l’exalte ainsi, avec un cœur content et
joyeux! quand on Lui expose tous les mouvements
d’un cœur aimant et plein de gratitude! Apprenez qu’Il
est encore ce même Dieu de bonté qui guérit les deux
aveugles. Dans toutes vos peines, criez avec assurance:
SEIGNEUR, aie pitié de nous! Il se retournera aussitôt,
et dans sa profonde compassion Il vous dira à chacun
de vous: Que veux-tu que je te fasse? Et si alors vous
Lui demandez d’être délivré de quelque défaut moral
et spirituel, Il vous exauce; si ce n’est au moment
même, ce sera pour l’époque marquée par sa sagesse.
Je puis vous assurer ces choses sur mon âme et mon
éternelle félicité. Et si le peuple veut vous imposer
silence, si la génération mauvaise et perverse veut vous
intimider et vous arrêter dans l’efl'usion de vos cœurs
en présence de l’Eternel, alors criez encore plus fort:
Fils de David, aie pitié de nous! Et je vous dis en vé
rité que JEnovm-JEsus-Cnmsr vous exaucera. Priez-Le
de vous ouvrir les yeux; car Il a un excellent baume
——168—
pour tous ces’maux. Demandez-Lui sa lumière, afin que
vous ne marchiez pas dans les ténèbres. Et quelle est
cette lumière? direz-vous. Encore une fois, c’est l’es
prit de CHRIST. J’en reviens toujours à vous dire: De
mandez l’esprit de CHRIST, afin qu’ll devienne tout
votre bonheur.
. Telle est aujourd’hui la rosée de la bénédiction
du SEIGNEUR qui se répand sur vous. Achevez maintenant
votre hymne ; mille bienheureux vous accompagneront.
«1 Et toi, mon ami, s’il se fait trop tard, le cœur
t’invite à rester avec les miens , car tu es de la famille.
Aujourd’hui, demain, toujours tu seras le bien-venu.
«J’ai veillé à la nourriture spirituelle, ma chère
femme, veille de ton côté à la nourriture du corps. ”
Mme Lineweg réveilla au nom du SEIGNEUR, et nous
achcvâmes notre cantique.
Du 17 Novembre 1855.
Quand j’entrai aujourd’hui chez Mme Lineweg,
elle me dit: Avez-vous mis par écrit ce qui s’est passé
hier? —- Oui, lui répondis-je. — Tout cela aura coulé
de votre plume comme d’une Source, ajouta-belle? —
C’est vrai, dis -je ; j’en ai été étonné moi-même. Je ne
voulais d’abord pas m’y mettre , parce que je ne pou
vais croire qu’il mc serait possible de bien rendre un
discours prononcé avec tant de promptitude; mais peu
à peu une phrase après l’autre me revint à l’esprit, et
je crus devoir les jeter sur le papier. — Je savais déjà
tout cela, reprit Madame : ce matin mon mari m’a dit
au réveil : J’ai été chez notre ami, et je lui ai rappelé
tout ce qui a été dit hier, de sorte qu’il a pu l’écrire.
I.
-—169—
Mme Lineweg me raconta en outre un petit évé
nement fort singulier, arrivé la veille dans la majson.
Il y avait sur la table, dit- elle, trois carafl'es pleines
d’eau; la première, au bord, était restée sans bouchon,
parce qu’elle était destinée à être préparée par moi
comme remède, par la prière et l’imposition de mes
mains. Arma, en ôtant la poussière de la table, toucha
très-légèrement à la carafi'e bouchée la plus éloignée,
et ce léger choc, qui ne fit rien à cette carafi’e elle
même, suflit pour faire sauter un éclat de la troisième
caraffc, celle qui était ouverte; de sorte que toute l’eau
coula dans la chambre; et la pauvre fille fut toute sai
sie de cet accident, par la raison qu’elle ne pouvait
concevoir comment il avait pu avoir lieu. Madame en
rit et fit donner cette caraffe trouée à des enfants de la
rue qui s’en firent un amusement. Mais le soir, quand
elles se mirent au lit, Lineweg adressa, comme il fai
sait souvent, quelques paroles à sa femme : Ton mari
est là, lui dit-il, et cela en coupable; c’est moi, qui ai
amené le désastre de la carafl'e. Il faut que tu saches
qu’un mauvais esprit, en passant, avait fait couler de sa
bave dans ton eau, et lui avait communiqué par-là une
qualité délétère, telle, que si tu eusses bu de cette eau,
tu aurais souffert des douleurs insupportables. Le SEI
GNEUR m’a ordonné de détruire aussitôt cette influence
de l’enfer. J’aurais pu mettre Arma en extase, et vous
avertir; mais j’ai préféré m’y prendre d’une manière
plus frappante, afin de vous faire plus d’impression, et
vous mieux faire connaître la malice infernale. Même
si tu n’avais fait que toucher aux morceaux de verre
cassés, tu aurais encore souffert dans ton bras. Madame
demanda, si les enfants qui avaient joué avec cette bou
—170—
teille, en avaient aussi reçu quelque dommage: il ré
pondit que non, et l’engagea simplement à remercier
le SEIGNEUR de la providence particulière, avec laquelle
Il veille sur ceux qui Lui appartiennent.
Du 18 Novembre 1855.
On racontait hier chez Mme Lineweg une histoire
qui nous lit à tous un grand plaisir. Un ecclésiastique
de notre ville, disait une relation imprimée qui nous
était tombée entre les mains, appelé Laurenz , fut obligé
de faire un voyage à Jéna. En chemin il se consola de
l’abandon dans lequel il se trouvait, et de l’éloignement
de la ville natale et des amis, par la pensée que Dieu
et ses anges l’entouraient et le protégeaient. Quand il
n’eut plus qu’une journée de chemin à faire, il se pré
senta tout-à-c0up à lui un étranger qui lui proposa de
faire route avec lui, et cela—avec des manières très
afl'ables. Laurenz lui demanda qui il était ,_ et il dit
qu’il était employé au château de Bourg-Lumière ‘);
mais il tut son nom. Laurenz n’était pas précisément
réjoui de cette rencontre, il aurait préféré marcher
seul; mais il ne refusa pas la compagnie. Ils voyagèrent
donc ensemble; l’étranger à cheval, Laurenz en voi
ture. Celui-ci cependant perdit bientôt l’étranger de
vue. La nuit vint, il_fallut traverser une forêt, mais
après s’y être enfoncé, le cocher déclare qu’il ne con
naît plus rien aux chemins. Laurenz était dans une
‘) Leuchtenburg , ancien château sur les hauteurs de la ville
de Géra, dans laquelle Laurenz devait s’arrêter pour le dîner.
—I7l-—
grande inquiétude, regardant ça et là, quand tout-à
coup l’étranger s’approche et crie : soyez tranquille,
je vais vous conduire; je connais ici tous les chemins;
nous arriverons bientôt en un endroit, où il nous fau
dra passer la nuit. On arrive. Laurenz s’arrêtait avec
regret dans cet endroit qu’on lui avait signalé comme
peu sûr, et comme recélant des voleurs et des assassins.
Cependant il fallut se soumettre à la nécessité. On
entre dans l’auberge; aussitôt l’étranger se met à la
recherche d’une chambre commode pour Laurenz, au
quel il cn indique bientôt une, ayant une antichambre,
dans laquelle il offre de coucher lui - même pour
que son compagnon puisse dormir tranquille. Plein
( d’admiration et de reconnaissance, Laurenz se soumet
à tant de bontés. On soupe; l’étranger parle peu, ne
fait que les réflexions nécessaires, mais se montre par
faitement honnête et plein d’attentions pour tout le
monde. Après le souper, Laurenz lui souhaite une bonne
nuit de tout cœur, se retire dans sa chambre, remercie
Dieu de sa protection et de la paix qu’il ressent, et
s’endort. Le lendemain matin il trouva son compagnon
déjà dispos; ils repartirent ensemble; mais bientôt
Laurenz perdit de nouveau l’excellent étranger de vue:
et cette fois il ne le revit plus, bien qu’il dût aller aussi
à Jéna, et y arriver vers midi. Bien plus, Laurenz prit
des informations, et il se trouva que personne ne
connaissait d’employé du château de Bourg-Lumière
qui ressemblât le moins du monde à l’étranger en
question.
Cette avanture avait été chantée en beaux vers par
Laurenz, et la dernière strophe renfermait cette l‘é!
flexion:
—- 179-—
Était-ee un ange envoyé par Toi
A l’heure où Tu me vis en peine?
S’il est vrai que ce n’était qu’un homme,
Toujours a-t-il été ange pour moi.
C’était de cette histoire que nous nous occupions
hier soir. Aujourd’hui il était convenu que je lirais la
traduction de la lettre sur le D" Fischer que l’on con—
naît déjà. Je le fis; mais à peine eus-je terminé, qu’Anna
était déjà ravie en extase, et la voix connue nous dit:
«Mes enfants, un bourgeois, et si vous voulez un
bourgeois du château Bourg-Lumière, se trouve ici.
Salut, mes bien -aimés, assemblés au nom de ce JESUS
qui s’est montré d’une manière si admirable le miséri—
cordieux SAUVEUR de notre ami et frère Fischer, main
tenant heureux et très—heureux, et dont tu as rappelé
au mieux la fin terrestre. L’esprit du SEIGNEUR était sur
toi, tandis que tu écrivais, pour que tu rendisses bien
cette édifiante notice. Apprends, ma chère femme, que
c’est ce même frère, ami du SEIGNEUR, qui a été ton
gardien cette nuit. Il m’avait prié d’être chargé de rem—
plir cette œuvre de charité, parce qu’il savait que j’avais
été envoyé pas le SEIGNEUR dans la compagnie de cinq
autres bienheureux, parmi lesquels se trouvaient aussi
Stilling et Anne Bourignon, pour conduire dans le sein
d’Abraham, c’est-à-dîre, dans le sein de JEsus-JEnomn,
un excellent enfant de Dieu sortant des états d’Espagne.
Cette âmé précieuse avait été la mère de neuf enfants,
qu’elle laissait sur la terre; nous nous avançâmes avec
elle dans un char comme celui d’Hénoch. Il fallait la
voir, mes bien-aimés! Ces scènes là ne peuvent se dé
crire. Elle se tint longtems prosternée en adoration, ne
pouvant articuler une parole. Mais aussi, quelle assem
—175-—
blée auprès du trône céleste! Des chérubins, des séra
phins, des prophètes, des apôtres, des vieillards ra
jeunis, des hommes brillants de la force de l’âge, des
vierges sans nombre, des adolescents de la force de
l’homme fait, des femmes, des mères, des enfants !
Tous les habitants célestes accoururent pour célébrer
le triomphe éternel de cette âme aimante et résignée.
0 mes bien-aimés! le SEIGNEUR a conduit cette
âme par des voies admirables, mais glorieuses. Cet
enfant de la grâce sut imiter parfaitement Saint - Paul,
abandonner le vieil homme, briser la volonté propre,
renoncer à elle-même , pour connaître l’unique volonté
de Dieu et la faire. La première demande de Paul,
après que Dieu, dans sa miséricorde infinie, se fut ma
nifesté à lui, fut celle-ci: SEIGNEUR, que veux-tu que je
fasse? Et depuis ce moment il renonça pour jamais à
l’ennemi du salut des hommes dans son cœur. Le SEI
GNEUR vit sa résolution , et l’aida ; il ôta la pierre de la
volonté propre de la tombe du cœur de Paul. Telle fut
aussi, mes bien chers, la résolution de cette douce co
lombe. Elle s’était jetée entièrement dans les bras de
Dieu, n’ayant plus d’autre volonté que la sienne. Et
plus elle s’anéantit devant Lui, plus le SEIGNEUR devint
puissant en elle. Elle Le priait tous les jours de ne point
cesser que l’œuvre de sa rédemption ne fût accomplie,
pour sa propre gloire. Et sa prière fut entendue et exau
cée dans le ciel, par son ami éternellement fidèle. Il la
purifia dans le creuset des tribulations, et ôta toutes
les sorceries de l’homme terrestre en elle; Il agit in
cessamment jusqu’à sa parfaite guérison. 0 mes bien
aimés! elle est maintenant saine à jamais; votre Ré
dempteur a été son Rédempteur; votre médecin a été
-174—
le sien. Et maintenant elle triomphe et chante éternel
lement les grâces du SEIGNEUR. Mes bien-aimés! par
tout le ciel on entendait sortir, comme d’une seule
bouche, ces paroles : Quelle est celle-ci? D’où vient
elle? et une voix de jubilation répondait : Alléluia!
cette colombe vient d’une grande tribulation; elle a
lavé ses vêtements dans le sang de l’Agneau. Salut!
salut! elle a apporté avec elle l’olivier de la paix. Salut!
son nom est maintenant Enfant de Dieu. Oui, Amen,
dit Jéhovah; heureux les pacifiques , heureux ceux dont
le nom est inscrit au livre de vie! -- Mes enfants, ce
sont là des béatitudes, ce sant des scènes de joie, c’est
une gloire, en comparaison desquelles les soufi'rances
de cette vie ne sont rien. Oh! réjouissez-vous; l’ami de
cette bienheureuse est aussi votre ami; Il est à côté de
vous dans la joie et dans les pleurs. Elle repose main
tenant, cette âme fatiguée, dans la chambre de l’épou;
elle exalte le SEIGNEUR dans une glorieuse paix. Son oc
cupation est la louange et le chant de reconnaissance;
son repos est la célébration de la grâce du SEIGNEUR,
partout où le SEIGNEUR l’envoie. Vous aussi donc, mes
bien-aimés , ne laissez jamais s’afi'aihlir votre confiance
dans le SEIGNEUR. Il est fidèle, Il connaît les siens; Il
les conduit d’après les conseils de sa sagesse, et les
reçoit enfin en grâce , et les couronne d’honneur. Ho
norez l’ami de vos âmes par une confiance toute filiale,
et sa gloire vous apparaîtra aussi à vous. Oh! pensez
souvent à cette grande vérité: c’est l’amour qui t’éprouve;
bientôt tu entendras la voix du consolateur te criant:
me voici! Amen. —
«Ma chère femme, crois-tu que je ne t’ai pas vue
pleurer hier? (Elle avait en efi'et pleuré, en se rappelant
—-175—
les souffrances de Lineweg, et par le désir d’être avec
lui.) Vous autres petits enfants de la terre, vous pleu—
rez sur des choses qui seront éternellement le sujet de
mes chants!-—Te sens-tu un peu soulagé maintenant?
—Oui, grâce à Dieu! répondit-elle. — Te rappelles-tu,
ma chère, le tcms où nous allions faire de petites pro
menades dans les environs? Tu sais qu’alors je te dé
vançais aussi quelquefois un peu: eh bien, la même
chose nous est arrivée ici, je n’ai fait que te précéder;
et bientôt vous me suivrez tous. ”
Oh! suivez, suivez JESUS; alors point de séparation.
Celui qui aime JESUS est et reste dans la paix ').
Du 19 Novembre 1855.
Chandani avait reçu de nouveau une décision fort
affligeante, relativement au procès pour ses enfants,
que les juges d’Ebertsbrunn étaient appelés à terminer.
Tandis que, sous le prétexte odieux d’une restitution
qu’il devait faire à sa femme séparée de lui, avant
qu’ils lui eussent fait rendre compte, et même avant
qu’ils lui en eussent présenté un, ils retenaient tout son
bien, ils portèrent la sentence inique et cruelle, que
les enfants, que l’autorité supérieure avait fait placer
dans un institut, seraient rendus à leur malheureuse
mère, à moins que le père qu’ils venaient de piller, ne
donnât de son côté les sûretés nécessaires pour le paie
ment de la part de la pension. Dans cette occasion
") La paix signifie dans l’Eeriture sainte le ciel. et l’éternelle
félicité provenant de l’union avec le SEIGNEUR. (Apocal.
expl. 540. 565.)
-—176—«
Chandani ne savait plus laquelle de ses douleurs était
la plus grande, celle de voir le triste sort de ses en
fants, ou celle de voir les hommes oublier à son égard
les serments et les lois les plus sacrés. Nous ne savions
plus que faire ni lui ni moi: nous ne pouvions plus que
dire: SEIGNEUR, Ton règne vienne.
Pleins de ces inquiétudes nous arrivâmes tous
deux, chacun de son côté, dans la famille Lineweg,
avec le désir et l’espoir d’obtenir quelque avis et quel—
que consolation. Mais Anna demeura gaie et éveillée;
et Chandani retourna à la maison, afin de se distraire
par le travail. Pour moi, je restai encore quelque tems,
pour remplir mes petites fonctions; et enfin Arma entra
dans l’état supérieur, et le bienheureux commença à
parler.
«Ton ami et l’ami de ton ami est là , et dit: Mon
bien cher, le Dieu d’amour m’envoie de nouveau pour
consoler en son nom et par sa grâce son enfant, notre
ami et frère. Dans ce moment il peut dire avec raison:
0 Dieu! pourquoi demeurai-je triste et abandonné,
tandis que mes ennemis me persécutent? —- 0 mon
cher, dis -lui bien que le SEIGNEUR se souvient de lui.
Oui, chère âme souffrante , le SEIGNEUR ne t’a pas encore
oubliée. Mais, vois, c’est en t’humiliant qu’ll t’exalte.
C’est maintenant la dernière heure, et le dernier com
bat s’engagé; le jugement commence par la maison de
Dieu, et il s’achevera promptement, afin que les grains
encore bons soient amassés avant que la flamme vienne
dévorer la paille inutile. Le SEIGNEUR se hâte de nettoyer
son aire; il épure les siens et les éprouve comme l’or
dans la fournaise. 0 mon ami! vous serez heureux, si
vous voyez le SEIGNEUR aussi dans vos souffrances!
\
-177-—
C’est souvent la main de l’amour paternel qui frappe;
mais Dieu ne veut point le mal de ses élus, mais leur
salut. Le SEIGNEUR se hâte de renouveler tout, de dé
truire ce qui a vieilli, afin que la douleur, les souffrances
et les larmes aient une fin. Oui, mon ami, le SEIGNEUR
est en grande hâte, et la matinée des mille ans va se
montrer, la bonté et la fidélité vont se rencontrer, la
justice et la paix vont s’entrebaiser. C’est le SEIGNEUR,
le juge incorruptible, qui est ton soutien, ton ami.
Tiens-toi donc tranquille, âme chérie, et attends encore
avec patience son arrivée. Vois, tes ennemis, les Caï—
nites, doivent réussir un peu de tems; mais attends
seulement, attends avec patience, homme de Dieu, et
tu verras la fin; et le Dieu, auquel tu te confies, te ré
servera une riche compensation pour les joies et les
jouissances que tu perds. Lui-même, le Dieu éternelle
ment fidèle , déposera dans ton cœur paternel, qui saigne
en ce moment, ces petits enfants, qui, je te le répète,
sont à Lui plutôt encore qu’à toi. Ils sont à moi, dit le
SEIGNEUR; et personne ne les arrachera de ma main;
‘c’est moi qui veux les élever, bien que tu ne puisses
le voir maintenant de tes yeux mortels. Laisse donc
faire , mon ami, qu’on te dépouille: ton Dieu est riche,
et tu ne manqueras de rien. N’est - il pas la Manne vi
vante des cieux! ") N’est-il pas la source, d’où découle
‘) Voici ce que dit la Nouvelle Doctrine sur la nourriture cé—
leste. Cette nénrriture a divers degrés : dans le premier
ciel elle est formée par le Bien de l’amour et le Bien de
la charité mutuelle donnés immédiatement par le SEIGNEUR,
ainsi que par le vrai. de la foi, dont le SEIGNEUR donne
également la connaissance , ce qui s’appelle nom‘rltm'c:
12
—— 178—
la vie? et celui qui croit en Lui, ne répandra-t - il pas
lui-même des fleuves d’eaux vives jaillissant jusqu‘à la
vie éternelle?‘) En vérité, je vous dis que le Tout
Puissant se prépare déjà pour cette grande démarche;
Il va mettre fin à l’abomùzation de la désolation dans le
lieu saint. Quand son œil de feu et de flammes cherche
des cœurs, Il n’aperçoit plus que des cavernes de vo
leurs. Ils sont arrivés ces tems affreux depuis longtems
prédits, où Abel ne peut point assez prier, où Abel ne
peut point assez invoquer l’assistance de son Dieu. Mais
soit qu’on le fasse mourir d’une prompte mort, soit
qu’il ne succombe qu’à un long martyr, par ceux qui
se prétendent ses frères , l’heure vient, et le Tout
Puissant le délivrera de tout mal. Le SEIGNEUR connaît
le remède, et le secours est dans sa main.“) 0 mon
.,u;.-. '
céleste. C’est là généralement la nourriture des Anges. De
celle-là procède, dans un degré inférieur, une nourriture
appelée céleste-spirituelle pour les esprits angéliques. Enfin
elle se transforme en un troisième degré; sans changer de
nature; elle agit sur la raison et sur l’amour de la science,
et nourrit ainsi les esprits bienheureux récemment sortis
de la vie matérielle. L’image sensible de toutes ces nour—
ritures se trouve dans le degré matériel, le dernier de
tous, et n’est autre chose que le manger et le boirefont vivre les corps; mais cet image représente dans le
monde matériel toutes ces espèces diverses de nourriture
par ce que Swédenborg appelle correspondances entre le
spirituel et le matériel. (Arcanes célestes, 1480.)
’) L’eau, dans le sens spirituel, signifie le vrai; eaux vives
le vrai divin. (Apoe. expl. 185. 518.)
”) Pour l’intelligence de ce qui est dit ici d’Abel dans son
rapport avec les Caim‘tes mentionnés plus haut, il faut
-— 179
ami, aie bon courage; laisse passer la rage et la fureur
des ennemis; laisse siffler les serpents, laisse la race
.
v
savoir que la persécution organisée contre Chandani était
entretenue par l’esprit de l’ancienne église, et surtout par
son clergé, qui sens main allumait le feu et irritait les
flammes contre lui. Voici, selon Swédenhorg, le sens in—
térieur de l’histoire de Caïn et d’Abel: « Tous les person
nages nommés dans l’Ecritnre sainte signifient, non des
personnes , mais des choses, en ce qu’ils représentent tou
jours une partie de ce qui appartient à l’Eglise ou au
ciel; et le nom d’un personnage, chaque fois qu’il revient
dans la parole, signifie cette chose dans le sens spirituel/Ù
Le mystère donc caché dans l’histoire de Caïn et d’Abel,
est celui-ci : Abel représente le Bien de l’amour actif, et
Cain le Vrai de la fbi. Ce Bien et ce Vrai sont souvent
aussi appelés frères dans les saintes Écritures, et le vrai
de la foi premier-né. La raison de ceci est, que le Vrai
qui dans l’homme doit être élevé par la suite à la dignité
de vrai de la foi, doit nécessairement être acquis en pre
mier lieu et déposé dans la mémoire; afin que le Bien,
savoir le bien de l’amour, puisse prendre de là, comme
d’un magasin, ce dont il a besoin pour former réellement
le vrai de la foi. Le vrai ne devient en effet objet de la
foi, que quand l’homme commence à l’aimer et à y con
former sa vie; et dans la même pr0portion que l’homme
agit en conséquence du vrai qu’il connaît, dans la même
proportion Dieu l’attache a Soi et aux cieux. Il influe en
lui par l’amour et le Bien, et il change en vrai et en bien
réel le vrai que l’homme s’est approprié depuis les années
de la jeunesse. C’est ainsi que se forme le fond de la foi
Sans cette circonstance, tout ce qui est bien certainement histœ
rique depuis la vocation d'Abraham, aurait évidemment perdu à
peu près tout son intérêt pour nous.
Note du Trad.
'12‘
—— 180—
de vipères se glisser sons l’herbe, laisse l’hypocrisie
faire ses conquêtes; malgré eux, mon ami, malgré
eux, tout ce qui est promis arrivera, et la volonté du
Dieu vivant sera faite! et rien que sa v010nté! Les
larmes sont la nourriture des siens pendant un peu de
tems; l’absynthe est leur pain; mais déjà l’horizon
s’éclaircit, les nuages se séparent, et une grande armée
vivante et véritable, par l’union du bien et du vrai. Jus—
que-là ce que l’homme sait, n’est autre chose que con—
naissance, on même simplement science; ce qui ne lui
donne d’autre croyance que le savoir d’une vérité par un
tiers, vérité à laquelle il peut encore renoncer par la
suite , si elle n’entre point dans son système. Cette croyance
de simple mémoire, n’est que la croyance d’un autre en
moi, mais ce n’est pas ma croyance, ce n’est point ma
foi. Il est clair que pour qu’un homme puisse retrouver
sa foi après la mort, il faut que cette foi soit devenue la
sienne pendant sa vie: et elle ne devient la sienne que
quand, d’après ses convictions propres, il voit le vrai, le
veut, l’aime et le met en pratique. C’est par-là seulement
que la foi entre dans l’homme, et forme son homme inté
rieur et spirituel; parce qu’elle devient le principe de
son activité et de ses pensées. L’homme-espritn’est au
fond que le désir et la pensée de chacun. Ce qui tient au
désir s’appelle bien, ce qui tient a la pensée par suite de
ce désir, s’appelle vrai. Et jamais l’homme n’appelle vrai,
que ce qui est en harmonie avec la racine de son désir ou
de son penchant intérieur. Il suit de là que les choses
seules, que l’homme pense par suite de son désir inté
rieur, peuvent être sa foi. Tout le reste de ce que l’homme
conserve dans sa mémoire, quelque nom qu’on lui donne,
soit qu’il l’ait puisé dans l’Écriture sainte ou dans la
doctrine de son Eglise, soit qu’il l’ait appris par la lec
ture, la prédication Ou même par la réflexion et la force
de son pr0pre raisonnement, tout cela n’est rien moins
— 181 —
s’avance; au milieu se trouve le Dieu des armées, monté
sur un cheval blanc, et avec lui tous les saints, revêtus
de lumière; la trompette sonne, et le clairon se fait
entendre: ‘)
Me voici, je viens de tous les maux
Délivrer mon petit troupeau;
que la foi, quelle que soit sa ressemblance avec elle, et
quelque portés que soient les hommes de nos jours a le
prendre et à vouloir le faire passer pour elle. C’est donc
ce commencement, cette première production déposée
dans la mémoire, qui est représentée et signifiée par CaÏn
dans les saintes Écritures: Caïn était le premier-né. Vient—
0n donc dans le monde à regarder ce simple commence
ment comme étànt la foi elle-même, cette foi qui sauve
l’homme, et regarde-t-on le désir du bien et la vie active
selon la foi comme une chose secondaire, alors se forme
dans l’Église cette doctrine hérétique et désolante, que la
foi seule peut subsister sans la vie correspondante; tandis
que dans la réalité une pareille foi n’est point de la foi;
mais une chose purement extérieure, une simple connais
sance déposée dans la mémoire de l’homme. Quand ensuite
cette doctrine hérétique s’étend parmi les hommes, quand
elle prend des racines et s’affermit, elle chasse et détruit
insensiblement la vie de l’amour, qui finit par être rejetée
comme non—essentielle au salut. C’est ainsi que Caïn tue
son frère Ahel, le bien de l’amour. » (Apoc. expl. ‘27.)
à Il est de l’essence des choses qu’aussitôt que la foi. veut
séparer d’elle l’amour, elle détruit et anéantit cet amour,
ou le tue. n (Arcanes célestes, 566. 569.) Et n0us ajoute
rons, que ce qui est dit ici des principes, doit aussi être
dit des personnes qui les professent. *
‘) Les nuées signifient la parole dans son sens littéral (Apoc.
expl. se, 64. 920. 401. 594.); armée signifie le Bien et le
Vrai (ou l’amour et la sagesse) provenant du ciel ( Ibid.
-—182-—
Voici, voici l’époux de vos âmes,
L’épouse est prête, Il se hâte de la prendre. ’)
« Oui, elle s’approche à pas rapides, cette époque
de jubilation; le Dieu d’amour, mon ami, arrive, pour
recevoir ceux qui l’aiment. Heureux donc ceux qui de
meurent dans l’amour, et qui attendent et patientent
dans l’amour! La félicité est leur part; une joie ineffable
est leur but et leur fin. Attache - toi au Dieu d’amour,
et demeure inébranlable, Il te sauvera d’une manière
admirable :
Il t’avouera pour sien devant les amis et les ennemis ,
Devant tous les êtres il t’appellera par ton nom;
Sa main fidèle et paternelle guidera tes pas.
Tu ne vois pas toujours cette main,
C’est par l’obscurité qu’elle te conduit ‘a'la lumière;
Mais laisse-toi conduire par ton Dieu dans ta patrie,
Amen. -
«J’aurais fait part de tout cela à ton ami lui-même,
ajouta-t-il en terminant; mais tu sais que sa santé ne
lui permet pas d’être assis longtems immobile à la
même place.
Moi. Je suis réjoui de pouvoir le lui rapporter, et
je vous remercie en son nom.
975. 405. 444. 652.); le Dieu ou le Roi des armées, monté
sur un cheval blanc, représente le SEIGNEUR quant ‘a son
humanité , ou quant à la parole (lbid. 516. Arcana cœl. ,
9950.); tous les saints ou toutes les sociétés célestes dans
leur ensemble, signifient la plénitude du vrai provenant
du bien, ou la plénitude de la sagesse et de l’amour cé
lestes. (lbid. 204.)
’) L’épouse signifie la Nouvelle Église ou la Nouvelle Jérusa
lem. (Apoc. expl. 1504. 1558. 1565.) '
\ - 185 —
Lui. Celui qui aime à consoler les autres, reçoit
aussi la consolation dans ses maux. Vous pouvez en
core, mes bien-aimés, recueiller quelque baume dans
la parole , au nom de Jésus; et alors, mon très - cher ,
tu iras faire part du tout à ton ami.
Moi. S’il m’est permis, je voudrais encore vous
demander comment se doivent entendre ces paroles:
Laisse faire etc.
Lui. C’est-à-dire qu’il se tienne en repos.
Moi. Mais cela ne l’empêchera pas de faire quel
ques démarches?
Lui. Sans doute : qu’il fasse de son côté ce qu’il
pourra; mais il ne faudra rien vouloir forcer.
Moi. Le SEIGNEUR lui inspirera ce qu’il devra faire?
Lui. Oui, rappelez -vous cette parole : à l’heure
que vous en aurez besoin, je vous donnerai ce qui
sera nécessaire. —- Pensez au baume , et tirez surtout
au nom de JÉsvs. *
Je tirai pour Chandani : Isaïe 61. ’10. Cela nous
parut une admirable conclusion. ‘)
") Voici ce texte, selon son sens littéral et spirituel : Je me
réjouirai en JEIIOVAH , mon âme éclatcra en chant de triom
phe au souvenir de mon DIEU; (Je me réjouirai dans le
Bien divin, mon âme éclatera en triomphe à la vue du
divin vrai,- car le SEIGNEUR s’appelle Jéhovah à cause de
son amour, et Dieu à cause de sa vérité ; or toute joie spi
rituelle vient de ces deux sources.) parce qu’il m’a couvert
du VETEMENT du salut; (parce qu’il m’a instruit, et m’a
fait connaître sa vérité ,) et qu’il a jeté sur moi le MAN
TEAU de la JUSTICE , (et qu’il m’a comblé de tout Vrai pro
venant du Bien; parce que manteau signifie le vrai dans
son ensemble, et que lajustice se rapporte au Bien,) comme
1 5.....
_184_
Du 21 Novembre 1855.
Depuis quelque tems nous lisions le soir avec un
grand sentiment de joie, dans la famille de Lineweg,
les nouvelles du progrès des missions chez les infidèles,
et nous y voyions une preuve du prochain accomplisse
ment des promesses du SEIGNEUR. Ce jour aussi, nous
nous entretenions de cet intéressant sujet avec un cer
tain nombre d’étrangers qui se trouvaient présents, et
qui étaient venus d’au-delà du Rhin, quelques-uns de
Westphalie. Après qu’ils nous eurent quittés, Anna_
fut ravie en extase et dit:
. L’Envoyé du SEIGNEUR qui vous est bien connu
à tous, est ici et désire qu’on écrive:
« Mes chers enfants, je viens vous donner le salut
du soir. C’est encore une fois, et toujours le même
amour, celui de CHRIST, qui me presse de venir vous
parler, et vous parler du royaume de Dieu. Venez, les
bénis du SEIGNEUR, qu’en son nom je vous édifie et vous
réjouisse; venez chers pélerins, marchant encore_ dans
des sentiers sémés d’épines, vers l’heureuse patrie;
venez, recevez" dans vos cœurs ce que le SEIGNEUR m’a
dit avec sa bonté de Dieu BEDEMPTEUR: c Va, console
moi Sion, et parle au cœur de Jérusalem ‘). * Et c’est
un époux place l’omement de sa tête, et comme l’épouse
ajuste ses joyaux. (Comme celui qui a goûté le Bien se revêt
de sagesse, et comme celui qui a goûté le vrai, s’enrichit
de connaissances.) (Apoc. expl. 595. 1189. Arc. cél. , 9182.)
j‘) Sion signifie ceux de l’Église céleste, qui sont davantage
dans l’amour; Jémsalem ceux de l’Église spirituelle, qui
sont davantage dans la connaissance du vrai ou dans la foi.
(Apoc. expl. 195. 557. 685.)
-—185-—
ma félicité, mon éternelle félicité, de remplir cette vo
lonté de Dieu, que je vois à la clarté de la lumière de
son trône. Apprenez, bénis du SEIGNEUR, mes bien-aimés,
que je ne suis pas vénu simplement vers vous, mais
que j’ai volé vers vous, porté sur des ailes d’aigle, afin
d’accomplir cette volonté de Dieu qui pour nous est un
commandement, et tout ce qu’Il fait faire n’est que joie
et féflcité. Tout ce qu’Il dit, tout ce qu’Il fait, toutes
ses démarches, ses châtiments mêmes, ne sont qu’un
écoulement de son amour. 0 mes bien-aimés, permettez
que je vous découvre la félicité dans le SEIGNEUR, la
joie de ses saints! Sachez qu’aujourd’hui même une
légion précieuse est entrée, provenant de la plénitude
des gentils! — Et où sont-ils entrés, direz-vous? En
sortant des ténèbres, ils sont entrés dans la lumière
admirable. Gloire et reconnaissance au SEIGNEUR, qui
agit le matin , et qui agit le soir. Réjouissez-vous avec
nous, mes bien - aimés, de ce que là où les prêtres se
taisent, le SEIGNEUR fasse parler les pierres. La moisson,
mes amis, est grande; et elle est mûre: priez avec nous,
pour que le Dieu de toutes grâces réveille le zèle de
nouveaux ouvriers; qu’Il leur donne la force néces
saire, et les envoie dans une de ses vignes, selon son
bon plaisir.
« Mais ici aussi, mes bien-chers, ici à Argentine,
il y a des gentils et des païens , pour lesquels vous pou
vez être les messagers de la bonne nouvelle : il suffit
que pour cela vous vous attachiez à l’œuvre des bien
heureux, et qu’avec eux vous adressiez au SEIGNEUR vos
prières et vos vœux en faveur de l’extension de son
règne. Ne vous laissez pas rebuter dans vos prières
par l’idée de leur inefficacité, en voyant le peu de fruits
-—186—
extérieurs qui en résultent. Jamais ce que vous faites
dans le SEIGNEUR et pour le SEIGNEUR n’est inutile; les
fruits se montreront tôt ou tard; et ils sont certains.
Aidez-nous par-là, mes bien - aimés, aidez les saints à
établir,le règne du SEIGNEUR sur la terre : dites avec
nous: SEIGNEUR ton règne vienne! Et il viendra ce règne,
soyez-en sûrs, et cela dans peu.
« Mais faites bien attention à ce que je vais vous
rappeler ici: Quand Noë bâtit l’arche, beaucoup de
personnes furent_employées à ce travail, mais toutes
ne furent pas sauvées: la même chose, mes bien-aimés,
arrive en ce moment dans les constructions pour la
Nouvelle Eglise. Beaucoup d’ouvriers s’occupent de
l’établissement de la Z\’ouvelle Jérusalem , mais peu réu
sissent. Ce n’est pas de travailler à cette grande œuvre
qui sauve; c’est d’y travailler, comme le SEIGNEUR le
veut, et d’établir avant tout la Nouvelle Eglise dans
son propre cœur. Ce n’est pas le temple fait l’ar
chitecte , mais c’est l’architecte qui fait le temple. Plu
sieurs de ceux qui se mêlent aujourd’hui d’instruire,
auraient encore besoin eux-mêmes d’instruction. Que
personne donc n’oublie cette prière: Faites-moi la grâce
SEIGNEUR, qu’après avoir prêché aux autres, je ne sois
point moi-même réprouvé. Encore une fois, mes bien
aimés , il y a beaucoup d’architectes aujourd’hui, mais
le jour du SEIGNEUR fera voir pour qui chacun auratra
vaillé. — Mais fais attention, mon ami, que cela n’est
pas dit personnellement pour toi; je vois que la crainte
te gagne : rappelles—toi que quand le moment d’ensei
gner sera là pour toi, le SEIGNEUR t’y aura préparé;
entre seulement dans les vues de sa grâce. Ce que je
dis n’est qu’un avertissement qui pourra te servir par
—187—
la suite; car tu ne demeureras pas toujours avec des
personnes pensant comme toi, mais tu rencontreras
toutes sortes d’architectes. —
« 0 mes bien - aimés , c’est une jouissance en ce
moment pour les Saints de porter leurs regards sur les
régions des infidèles; quelle faim! quelle soif! — non
pour des choses vaines; mais pour la nourriture qui
demeure éternellement. — Qui croirait à tant de bon
heur de la part des païens? plus que d’autres ils dési
rent le royaume de Dieu et sa justice, c’est-à-dire Cnmsr.
C’est ainsi qu’encore cet après-dîner, selon votre terre,
car pour nous le tems n’existe plus, un chef païen est
parvenu à la connaissance de CHRIST le SAUVEUR; et
aussitôt, quel changement? Ses esclaves sont devenus
ses enfants! Qu’est-ce qui opère ces miracles? ce n’est
que l’esprit du Christianisme, qui est l’esprit de l’amour.
Dans peu tout ce petit troupeau formera le germe d’une
église adorant le SEIGNEUR. Et, comme vous savez, une
lumière allume l’autre, un hameau porte la bonne nou
velle à l’autre; et ce feu des bénédictions enflammcra
ainsi des états entiers. Mes enfants, l’aube se montre
à l’Orient, tandis qu’autour de vous règne le minuit;
mais eonsolez-vous, c’est à minuit que l’Epoux arrive.
Faites seulement en sorte que les lampes de vos cœurs
soient allumées; il ne suflit pas qu’elles soient ornées.
Devenez des mendiants, de vrais mendiants à la porte
du SEIGNEUR; frappez sans relâche pour obtenir l’huile
de l’amour, de la foi, de la patience , de l’humilité et
surtout de la persévérance. N’attendez pas que l’Époux
arrive à vous ; il vaut mieux sortir de vous-mêmes , et
courir à sa rencontre, à Lui qui ne dort ni ne som
meille , à Lui, le fidèle gardien d’Israël.
_188_
« Placez-vous sur son cœur et dites:
Tu es à moi, je suis à Toi.
L’amour ainsi nous a réunis;
Que ce ne soit point en vain
Que ton sang coula de tes plaies.
JESUs, mon désir, ma joie,
Je te tiens, et ne te quitte plus.
Amen. u —
Après un moment de silence dans l’assemblée,
Madame me dit: Cette fois-ci il fallait écrire vite; je
n’aurais point en cette habileté. — c Oh! je sais , ma
femme, à qui j’ai à faire, ' observa Lineweg. «1 Mes
bien-aimés, édifiez - vous maintenant en relisant ce qui
a été dit; et puis vous prendrez quelques miettes dans
la parole de Dieu. Et le Dieu d’amour y ajoutera sa
bénédiction pour la vie éternelle. Amen. »
Du 27 Novembre 1855.
Lorsqu’avant-hier je pris congé de Mme Lineweg,
elle me dit qu’elle était fort étonnée qu’Anna, après
avoir donné tant de signes de l’approche de son état
d’extase, fût de nouveau si éveillée. Aujourd’hui elle
me raconta que son mari n’avait pas laissé de venir
aussitôt après mon départ, et qu’il avait dit: Tu as
été étonnée que j’aie commencé à agir sur celle qui me
sert d’organe, et que je l’aie de nouveau laissée : il
faut que tu saches qu’il m’est survenu une commission
à faire en Arabie , et que je n’en suis revenu qu’en ce
moment. -—
Aujourd’hui, quand .j’arrivai, il était déjà présent,
et avait dit pour salut: J’arrive de Berne, j’y ai fait
—— 189-—
une commission, et l’amour m’a porté vers vous. — Il
s’adressa alors à moi, et me dit ce qui suit, et que je
mis en même tems par écrit: _
« Ton ami, qui souvent est chargé de t’accompa—
gner, est ici et te dit:
« Que le SEIGNEUR te garde; qu’Il fasse luire sur
toi sa sainte face , et te soit miséricordieux; qu’Il
tourne sa sainte face sur toi, et te donne la paix!
Amen.
1 Oui, mon ami, que la paix soit avec toi, la paix
de Dieu le Père et de notre SEIGNEUR JEsus- CHRIST;
que l’amour de JÉsus te pénètre tout entier, et que son
. saint esprit te conserve dans sa communion! Apprends,
mon ami, ou permets que je te confirme une vérité:
c’est que si tous les brins d’herbe, toutes les étoiles,
toutes les gouttes d’eau s’assemblaient et formaient des
voix, des langues et des caractères d’écriture, pour
annoncer dignement l’amour du SEIGNEUR, ils ne pro
duiraient pas même un ombre de ce qu’est cet amour
dans la réalité. Cet amour du SEIGNEUR pour tous les
hommes,est infini, mais pour ceux qui l’aiment, il est
indicible. Je le vois, souvent tu t’inquiètes, et tu te
crois sans amour: 6 mon ami, permets que je te bé
nisse, queje te réjouisse et que je t’instruise sur l’amour
du SEIGNEUR, et sa grâce et sa vérité: élève ta tête avec
joie, car ta rédemption, qui est CHRIST , s’approche de
toi, elle s’approche tous les jours, elle s’approche à
toutes les heures. Quand est-ce que tu t’inquiètes, mon
ami? c’est quand tu jettes un regard sur ton cœur, et
que tu vois ton amour pour le SEIGNEUR, ton Dieu , si
faible, si petit, si misérable; tu t’inquiètes, quand tu
ne penses qu’à toi, qu’à ta faiblesse, à ton impuis
190
sauce , à ta culpabilité: ô cher ami! suis le conseil de
ton ami transformé et éclairé par la lumière céleste;
ne t’arrête pas à ton amour si chétif, mais à l’amour
infini de l’Etre seul aimant et seul aimable. Enfonce
toi dans cet abîme, élance-toi dans ces hauteurs incom
mensurables, et contemple l’amour de ton Dieu pour
toi! Contemple cet amour divin, cet amour qui embrasse
tout, cet amour qui anime tout : voilà l’amour auquel
ton cœur doit s’abandonner! alors ton inquiétude dis
paraîtra; elle disparaîtra nécessairement! En vérité, je
te dis, mon ami, l’amour de Dieu est sans bornes. Il
faudrait être plus d’un Chérubin pour te le décrire.
Porte avec joie tes regards vers le Principe et le Con
sommateur de ta foi. Ne crains pas, même alors que
tu te trouves quelquefois pauvre d’amour. Celui qui
sera toujours fidèle, à qui rien n’est caché, Il cache,
Lui, quelquefois à ses amis, jusqu’à l’amour et à la
paix. Par - là Il les éprouve, mais par-là aussi Il les
fortifie. Quand ces heures d’épreuve surviennent, mon
bien-cher, alors tiens- toi seulement tranquille, et at
tends que le SEIGNEUR revienne. Quand se font sentir
ces moments de mort apparente, où tu ne sens abso
lument aucun mouvement de l’esprit divin , alors attends
et espère; car le Dieu d’amour qui ne délaisse ni n’ou
blie les siens, te fortifiera en attendant quant à l’homme
intérieur. Béjouis-toi d’une pareille grâce, et garde-toi
de contrister le SEIGNEUR par la défiance. Abandonne
Lui le soin de te préparer; Il ne cessera jamais d’être
un Dieu ami; et il sait aussi travailler en secret. Il ré
pond à tes prières par le fait même; jette des cris de
joie; car son ampur et sa grâce sur toi sont ineffables.
Permets que je te donne en particulier l’assurance que
..
— 491 -—
sa bonté et sa fidélité n’ont sur toi que des vues de
grâce et de paix, et cela non pour quelque mérite de
ta part, mais par un amour tout-à-fait spontané de la
Sienne. Cet amour te prépare pour être un de ses té
moins; et quand le moment en sera venu, ce même
amour saura bien t’indiquer quand et comment tu de
vras agir.
« Ce même esprit de l’amour, mon très-cher, t’ap
prendra aussi à prier pour toi et pour les autres. Oh!
continue, pour l’amour de Jésus, à te retirer dans la
fente du rocher, pour tes proches. Si tu ne trouves
point de paroles, contente - toi de soupirer; et l’esprit
de l’amour qui procède du Père et du Fils, priera lui
même pour toi par des soupirs inefl'ables. 0 mon bien
aimé, heureux, heureux celui qui sait prier! Le Dieu
d’amour, le cœur du Père le plus fidèle, agréera tes
requêtes, et remplira tes désirs à l’égard de ceux qui
te sont chers, au tenis de ses faveurs, et cela d’une
manière glorieuse. Vous avez déjà tous des preuves de
la facilité avec laquelle sa miséricorde se laisse toucher:
oh! continue donc, et le Dieu d’amour fera au-delà de
tes demandes, au- delà même de ce que tu es en état de
comprendre. Combien tu auras à te réjouir, quand tes
tendres sollicitations auront pénétré jusqu’ausein de
Dieu; quand l’ami éternel qui entend chaque prière,
chaque soupir, chaque désir secret même, aùra béni ta
main, et qu’elle aura conduit dans la bergerie du Bon
Pasteur ceux qui te sont chers! Oui, mon ami, la prière
du juste est puissante et efficace, 10rsqu’elle est sé
rieuse. Elle retire les âmes de la perdition, comme on
retire des tisons du feu; elle fait violence au ciel; elle
transporte des ténèbres dans la lumière , et de la mort
y,_l
—-192—
à la vie. Continue de prier, le SEIGNEUR, ton Dieu, con
tinue d’exaucer; car il veut que tu parviennes enfin à
t’écrier : Le SEIGNEUR a fait de grandes choses en moi.
Et tandis que tu crieras en moi, les âmes des délivrés
crieront : en nous. Oui, mon cher, crois-moi, et n’en
doutes pas, le SEIGNEUR a résolu toutes ces choses à
ton égard. Il commence souvent une œuvre d’une ma
nière incompréhensible; mais Il la termine toujours
glorieusement; car le SEIGNEUR est bon et miséricor
dieux; il est patient, et d’une grande bonté etfidélité.
Oui, Amen, à toute éternité! Il ne nous traite pas
selon nos iniquités, Il ne nous châtic pas selon nos
péchés; mais Il a pitié de ses pauvres. Que le SEIGNELR
notre Dieu bénisse en toi cette parole de l’amour! Oui il
la bénira; car il accomplira sa promesse sans faute. Oh!
loue donc le SEIGNEUR, chère âme, chante des psaumes
et des cantiques spirituelles d’un cœur joyeux; élève
ce cœur vers Lui, le Sien est déjà à toi. ' qW'
La veuve profondément touchée, I’interrompit ici
par ces mots: 0 ciel! que l’amour du SEIGNEUR est donc
grand et incompréhensible! -— Je ne pus m’empêcher
moi-même de m’écrier: Quel malheur que mon cœur
soit si insensible et si peu propre à le sentir! — Oh!
ne dites pas cela, ajouta Madame, et Lineweg reprit:.t
« Le péché avait bien dans le principe endurci ton
cœur; mais vois-tu, mon ami, le SEIGNEUR lui—même, le
Dieu d’amour a neutralisé les suites de ton péché, et
et il t’a donné un cœur sensible pour les choses d’en
hant; rends honneur à sa grâce, et le reconnais avec
humilité. — Mais ceci n’est qu’une parenthèse, ajouta-4
t-il d’un ton d’amitié; puis il acheva son discours par
ces mots: c Console-toi, et ne crains plus; la crainte
—’195——
n’est point dans l’amour, car la crainte entraîne le
tourment. Que l’amour, en toi, tue la crainte; que
l’amour surmonte et anéantisse tout le reste. Il te ren
dra fort et courageux sur le champ de bataille; il sera
ton casque et ta cuirasse. Donne ton cœur en entier à
l’amour qui est le roi du ciel; alors toute ta vie sera
céleste , même sur la terre. Amen. »
Mon cœur était tellement abattu à cette époque
par les tentations et les chagrins, que ces paroles mêmes
ne purent me toucher autant que j’aurais voulu; elles
me déchiraient plutôt qu’elles ne m’attendrissaient. Je
voulus une fois me soulager entièrement: Je suis forcé,
dis-je, d’y revenir encore: Non, je ne sens pas l’amour
du SEIGNEUR. ,
Lui. Remarque, mon bien-cher, que si tu Sentais
cet amour continuellement, tu n’aurais plus besoin de
patience ni de longanimité. Cet amour se cache quel
quefois pour qu’on le redemande avec anxiété. Tu sais
. bien que puisque tout est grâce de la part de Dieu,
tout aussi doit être demandé, désiré; si tu frappes et
que ton ami ne t’ouvre pas, frappe deux fois , frappe
trois fois; fais-toi entendre! et il t’ouvrira.
JŸIoi. Il peut y avoir en cela sans doute un peu de
pusillanimité de ma part; mais il me semble quelque.
fois, en vérité, que mes cris doivent importuner le
SEIGNEUR.
Lui. Tu n’es pas encore devenu un mendiant assez
adroit. Tu sais combien les mendiants ont de courage;
ils ne se tiennent point toujours à la porte; ils entrent,
ils passent par deux, trois portes, jusqu’à ce qu’ils
obtiennent quelque aumône. Ils disent: la pusillanimité
ne m’avance pas beaucoup. Aie donc aussi du courage;
15
—194—
demande avec ardeur; insiste sans honte aucune: et je
t’assure que tu seras exaucé. Car, vois-tu, le SEIGNEUR
ton Dieu est prêt en tout tems , à toute heure; et plus
tu ressembles à un importun mendiant de la terre, plus
tu Lui es agréable. Mon ami, si ton Dieu n’était que
SEIGNEUR et Roi , ta timidité pourrait sans doute être à
sa place: mais comme le SEIGNEUR est devenu aussi ton
SAUVEUR, comme Il s’est fait aussi Fils de l’homme,
la crainte doit céder à la confiance: Venez à moi, vous
tous qui êtes malheureux et chargés, et je vous soula
gerai! Venez tous, dit-Il; tu y es donc aussi compris.
Moi. Sans doute je suis chargé; mais mon cœur
plein de convoitises et de désirs bas et terrestres,
m’empêche d’aller à Lui.
Lui. Rien, mon cher, rien n’est trop vil, trop
mauvais, pour qu’Il n’en puisse tirer le salut. Ne dit
Il pas : Quand vos péchés seraient d’un rouge de sang
comme l’écarlate, je saurai vous rendre blancs comme
la neige.
Moi. Mais comment dois -je faire , quand mon in
quiétude devient si grande que je ne suis plus capable
de rien?
Lui. Dans ces moments, dis du fond du cœur:
SEIGNEUR aie pitié de moi! Et alors attends avec pa
tience. Tous ceux, mon ami, qui se sont exercés dans
l’imitation de JEsvs-Cmusr, ont en de grands combats,
et des combats de toute espèce à livrer. Mais le SEI
GNEUR est venu à leur aide; il en sera de même de toi.
Seulement n’oublie jamais qu’à ceux qui aiment Dieu,
toutes choses, sans exception, doivent enfin tourner à
leur plus grand bien; que ce soit le combat ou la joie
du triomphe , Toutes choses est- il dit.
«—’195*—
Moi. Oui, je le sais; mais à ceux qui aiment Dieu
seulement: et moi,l’aimai-je, avec un cœur encore sous
la puissance des passions?
Lui. Au moins, mon bien-cher, tu as le désir
prononcé de l’aimer: tu ne nieras point cela. Eh bien!
crois-tu que ce désir vienne de toi? Déjà ce désir est
un produit de l’Esprit; et ce désir, ce vouloir seul,
serait déjà une preuve du bien que te veut l’ami éter
nellement fidèle. Tu veux aimer le SEIGNEUR: eh bien
donc , permets que je te donne l’assurance que réelle
ment tu l’aimes , bien que dans ta faiblesse! -— Mais
Il te fortifiera, Il te fera croître, Il consolidera ton
amour. Il est si fidèle! Souvent il ôte à ses enfants tout
ce qu’ils ont, absolument tout; et cela, pour leur rendre
sept fois, mille fois autant. Oh! qu’Il aime à exciter
dans un cœur ce cri des saints livres: Crée en moi
SEIGNEUR un cœur pur, et donne-moi un esprit nouveau!
"— Vois-tu, mon cher; ce qui te tourmente souvent, et
te tourmente beaucoup, c’est au fond l’impatience. Tu
voudrais te voir croître et avancer : mais sache que tu
ne supporterais point maintenant un pareil état ; tu se
rais enfin embarrassé, arrêté dans ta carrière. Apprends
que la marche du SEIGNEUR est lente, mais qu’enfin Il
arrive comme l’éclair. Il est capable de commencer en
toi son œuvre, de la continuer et de la terminer, sans
que tu le voies ni ne t’en aperçoives. Oui, sa puissance
va jusque -là. Rends donc l’honneur à sa grâce; et
comme dit un cantique: au lieu de te plaindre, prie
davantage. Sois sûr que le SEIGNEUR ne te laissera plus;
abandonne-toi seulement à Lui entièrement; demande
que tout se fasse selon son bon plaisir: SEIGNEUR, ta
volonté soit faite, sur moi, en moi et par moi! alors
15‘
je te réponds qu’Il te conduira au triomphe, aussi in
dubitablement qu’Il est indubitable, qn’ll a racheté
ton âme au prix de son sang , pour être sa propriété à
jamais. Amen. »
Mme Lineweg rentra alors dans la chambre; et il
lui dit: J’ai été obligé de tancer un peu notre cher ami.
— Pour moi j’avais fini par fondre en larmes; et quand
je me retrouvai seul chez moi, je pus de nouveau prier
mon Dieu avec amour et confiance.
Du 29 Novembre 1855.
Notre chère veuve eut une espèce de maladie du
pays, en pensant à sa vraie patrie. Aussi son ami ne
manqua-t-il pas de venir la consoler. A cette occasion
il dit de même aux autres personnes de la maison les
choses les plus touchantes et les plus amicales. Enfin
il lui dicta, pour elle et pour les autres membres
de sa famille, en général enfants adoptifs de son ar
dente charité, les consolations et les encouragements
suivants:
« Un disciple de Rabboni est là, et dit:
« Femme, pourquoi pleures-tu? pour qui ces lar
mes? Quelle privation te fait ainsi soupirer? Quelle
perte, chère âme, as-tu à déplorer? —— Je le vois, tes
désirs se portent vers celui qui t’est uni à jamais. Ame
chérie, quelques heures encore, une courte attente
arrêtée par le SEIGNEUR! Les pleurs, les regrets ne
durent qu’une soirée. Ma chère femme, Babboni se
hâte d’essuyer tes larmes , d’appaiser tes regrets et ta
douleur; Il t’aime. Pleure, pleure; ce soulagement est
L_
—-I97—
permis; fais seulement aussi, ma chère, ce que je
vais te dire:
Que le cœur de Rabboni soit ta retraite,
Ce cœur qui de Marie calma la douleur.
Il avait sur toi des vues d’amour,
Voilà pourquoi je fus si tôt retiré.
Tu me retrouveras à la fleur des ans ,
Occupé à tresser les couronnes
Dont le SEIGNEUR voudra t’orner;
Ce ravissement me l’envierais—tu ?
Il est près l’éternel matin
Du jour qui terminera tes maux;
Ce jour est près pour tous mes bien-aimés!
Chantez donc à Dieu un joyeux Alléluia.
- Et toi aussi, chère âme , tu es arrivée,
Tu as quitté la sombre vallée!
Ton Rédempteur a lavé ton péché ,
Femme bien-aimé viens à moi! w
Voilà comment je t’accueillerai. .
Toutefois sois au SEIGNEUR plus qu’à moi; iO'ËË“
Que Lui seul soit tout pour toi, Lui seul: î«‘*I'ËIJ <‘ '
Qui est aimable comme Lui ? Qui? —- A. {MM
. trw-- . à._uuxæ,nl‘
Marguerite aussi je dois la conduire dans la patrie ,
Après qu’elle aura été ornée, ,
Par son Epoux, par son SEIGNEUR , ”"°3fi"fQui est son Dieu , l’étoile de son matin. ’ 3"“-’""
Oui, mets à profit toutes ces heures de grâce:
Ah! comme elles passent, comme elles s’écoulent!
Sois fidèle jusqu’à la mort
Et de tout le SEIGNEUR te fera triompher.
-—198——
Amélie, laisse-toi bien préparer ,
Peur être digne des joies du SEIGNEUR;
Demande instamment son saint Esprit,
A toute heure, Il peut te former puissamment.
Saisis le SEIGNEUR, l’éternelle vie;
Que Lui seul, Lui seul, soit le but de tes efforts:
Alors un jour je te saisis par la main
Et te conduis dans la véritable patrie!
Pour toi, quand ton heure arrivera
Elisabeth , oh quel bonheur sera le mien!
Quand je pourrai te porter vers Canaan,
Vers l’homme de douleurs couronné de gloire!
Veux-tu vraiment faire sa volonté ,
Alors tiens- toi tranquille , tiens — toi en paix;
Tu seras plus forte alors que tu n’es;
Car ton SEIGNEUR JESUS te soutiendra! Amen.
En ce moment j’entrai dans la chambre: Il Salut et
bénédiction, ' me dit-il, d’un ton extrêmement amical!
Alors il continua à dicter; en faisant remarquer qu’il
s’adressait à celle lui servait d’organe.
Toi aussi, mon enfant, deviens plus fidèle,
Exempte de plus en plus de l’amour de toi.
Alors la paix, la joie seront ta part,
L’ennui, le souci fuiront au loin.
Oh! prépare-moi donc la joie , toi aussi,
De te venir conduire aux gras pâturages,
Brebis de Cnn1sr, où JESUS t’attend ,
Le bon Pasteur; ah! demeure—Lui toujours fidèle.
Et toi aussi Gustave , on me permet de te dire:
Que ravi je te porterai
Au lieu où le bonheur seul est connu,
Qui ne retentit que de l’éternelle Louange,
—199—
En attendant prépare-Lui bien ton cœur;
Par les plaisirs, par les peines
Il te conduit d’une main sûre;
Ami confie ton sort à l’homme de douleurs.
Enfin annonce au disciple Pierre,
Qu’il est aussi membre de ce troupeau;
Le Bon Pasteur lui donnera
D’être fidèle , inébranlable :
Oh! combien je me réjouis d’avance
De le présenter au milieu de ces légions
Dont Jnsus est le maître et le chef!
Le SEIGNEUR l’agréera, qu’il n’en doute pas.
Amen.
Personne n’avait été oublié. Il dit alors : Je ne
parlerai plus en vers maintenant; et tu peux prendre la
plume, mon ami, et écrire à la place de ma femme les
bénédictions du SEIGNEUR. J’écrivis:
c Oui, mes bien—aimés, le SEIGNEUR, le Dieu fidèle,
je Le prie de continuer à se tenir à vos côtés, dans votre
pèlerinage à travers le désert de la vie terrestre, afin
que vous l’acheviez tous pour sa plus ’grande gloire.
Ne craignez point, mes bien-aimés, bien que le chemin
devienne quelquefois étroit et rude: le Dieu vivant est
votre bâton et votre soutien. Il vous fortifie dans votre
faiblesse; Il vous porte sur ses mains, comme un père
son enfant: Il a même juré qu’il ne vous laissera point
que toutes les promesses de sa grâce ne soient accom
plies. Et quand Il a dit oui et Amen, on peut y compter.
0 mes enfants! fiez -vous à une pareille bonté; rendez
honneur à une pareille fidélité; Lui, l’amour sans bor
nes , Il donne plus qu’il ne promet, et tout ce qu’il fait
est bien fait. Vous savez qu’un cheveu même sur votre
—200—
tête ne sera pas dérangé sans sa volonté: comment
donc pourriez vous encore vous troubler, vous inquiéter?
Pensez-y toujours, mes bien-chers , tous vos cheveux,
Il les a comptés! Pouvez-vous vous imaginer que c’est
un être sans vie, qui a dit toutes ces choses, et qui a
promis d’être avec vous tous les jours jusqu’à la fin du
monde? Non assurément, c’est le Dieu vivant qui a
parlé, et qui a parlé pour votre consolation. Mes bien
aimés , croyez seulement, et vous verrez; vous verrez
nécessairement. Et déjà en ce moment vous commencez
à voir! Toutefois,
Mille choses là seulement vous seront dévoilées,
OiI mille légions de bienheureux jettent des cris de joie,
Au pied du trône de Jéhovah.
Le Fils vous revélera lui-même cette gloire;
Il fera tomber de vos yeux le bandeau de la terre:
Oh! ne rougissez jamais de Lui devant le monde,
Il n’a pas rougi, Lui, de vous traitèr en frères.
Oh! que d’événements dans son règne éternel,
Que maintenant vous ne sauriez comprendre!
En vain , en vain, je vous en parlerais.
Mais soyez et demeurez fidèles ,
Et le SEIGNEUR vous al’franchira pour jamais.
« Loué et exalté soit le saint nom de Jésus! Amen.
« Oh! combien de trésors le SEIGNEUR a menagés
aux esprits naïfs et aux cœurs simples! L’esprit de
Dieu agit sur des milliers de personnes, et de mille
manières différentes! Qui peut Lui assigner des bornes?
Que celui qui le désire vienne puiser aux sources de la
vie pour rien : cela est dit à tout le monde. Mais les
hommes fiers et hautains croiraient se dégrader en re
cevant quelque chose pour rien. *
—201—
Après une pause, il me dit: «Le nom qu’on t’a
donné , est vraiment un beau nom! » — N’est-ce pas ,
dit Mme Lineweg, il signifie: Dieu est mon soutien? Je
lui dis qu’oui. « Eh bien , » reprit Lineweg, et Dieu est
en effet ton soutien; et Il le restera jusqu’à la fin de
tes jours. Jésus n’abandonne jamais sa brebis. Il accom
plit tout ce qu’il a promis. »
« Je le sens bien, mes bien - aimés, vous resteriez
ainsi à causer jusqu’à minuit, et même jusqu’au matin;
mais Dieu est un Dieu d’ordre. Il y a un tems et un
moment arrêté pour toute chose. Tu peux donc main
tenant, ma chère femme, réveiller l’intermédiaire. Après
la nourriture corporelle prise, vous relirez tout ceci
pour votre édification; puis vous chercherez encore
quelques miettes dans la parole de Dieu; et ce Dieu de
toute bonté voudra bien les bénir.
Du 5 Décembre 1855.
Un hôte , désigné comme incommode par un flux
de paroles peu profitables, avait été cause depuis quel
que tems que nous ne pouvions jouir de_l’agrément de
nos conversations accoûtumées : aussi Mme Lineweg
n’entendit-elle pas dimanche dernier, le 16" de l’avent,
les signes extraordinaires par lesquels son fidèle époux
lui annonçait d’ordinaire sa présence ou son arrivée,
et on se retira sans nouvelles spirituelles; mais la nuit
avant de s’endormir, Madame apprit que le bienheu
reux avait été envoyé ce jour là dans la compagnie
d’autres anges du SEIGNEUR, pour écouter et apprécier
la prédication de l’Evangile dans toutes les Eglises de
la contrée; et qu’au milieu de toutes les misères dont
— 202—
I
ils avaient été témoins, ils avaient néanmoins reconnu,
qu’en certains endroits, le SEIGNEUR était encore annoncé.
L’hôte embarrassant ayant quitté enfin la maison,
nous nous trouvâmes aujourd’hui entre nous, et nous
passâmes l’après -dîner à causer de ce qui nous était
cher à tous. Vers le soir une foule de carosses vint à
passer par la rue, pour se rendre à une soirée dans
les environs; et en ce moment notre père de famille
revint nous visiter.
« Nous pouvons aussi, dit-il, avoir notre soirée. '
—- Pour celle-ci, dis- je, je ne leur envierai pas la
leur. —-— c Tu as raison, mon ami, reprit-il; tu as
choisi la meilleure part. Sans doute, notre soirée ne
sera pas aussi brillante; mais nous avons le noyeau, et
eux ne recherchent que l’écaille. ’ Il dicta ensuite ce
qui suit:
un Enfants , louons le SEIGNEUR , le Dieu Zébaoth ,
Jéhovah aux cieux des cieux;
A Lui l’honneur, la puissance et la gloire!
A Lui, que les Chérubins chantent!
Portons-Lui aussi notre chétive offrande,
A Jéhovah dans le lieu de sa sainteté!
Chantez à sa gloire , son grand jour est arrivé.
Alléluia! Le Roi approche , JESUS se hâte;
L’esprit et l’épouse s’écrient: Viens. ‘)
« Enfants bien- aimés de notre Père céleste, chers
rachetés de notre Grand Prêtre, vous les temples vivants
‘) L’esprit et l’épouse s’écrient: Viens. Ces mots de l’Apoca
lypse signifient dans leur sens spirituel, que la Nouvelle
Eglise des Cieux et celle de la terre soupirent après l’avè
nement du SEIGNEUR. (Apoc. rév. 955.)
-- 205..
du saint Esprit! JÉSUS-CHRIST-JÉBOVAH, le Dieu triple
et un, qui est, qui a été et qui sera, le Tout-Puissant,
l’Alpha et l’Oméga , le Premier et le Dernier, le Com
mencement et la Fin, le Rédempteur, auquel soit rendue
la gloire éternellement, vous fait dire:
Oui , déjà ici, au sein de vos ténèbres ,
Un rayon de lumière vous doit luire ,
Un rayon parti de l’Orient.’
Voyez, le grand Conquérant se hâte,
Déjà il assemble les enfants de la Paix ,
Aux bords de la mer de crystal.
c Salut! cher petit troupeau , au nom du SEIGNEUR,
salut, membres du peuple de Dieu; ton Roi arrive,
ton Libérateur vient; l’Époux déjà s’est levé; courez
au-devant de Lui, votre Salut, votre Paix, la Paix
unique et véritable. Oui, c’est le Dieu des armées qui
est le Prince de la paix. Où Il est, là règne la paix;
où Il règne, la paix éclate. Il crée la paix et Il apporte
la paix. Petits enfants, adorez, adorez! Au moment
que le Prince de la Paix nacquit sur notre terre, tout
ce qui vivait et pouvait sentir, éprouva l’influence d’une
paix profonde: Le cri de jubilation: Paix sur la terre,
retentit au loin, et tout ce qui en était susceptible
éprouva le sentiment de la paix.
O douce Paix, anime les cœurs,
Que tout ce qui sent, te connaisse;
Et touche ce qui ne sent pas.
0 Prince de la Paix, Prince de la gloire ,
Mille cœurs encorg après toi soupireront;
Car tes bénédictions sont inefi‘ables.
Viens, Dieu fidèle, prépare-toi des âmes,
Brillant, comme des flambeaux célestes.
—204—
De la paix que tu leur donnes,
Toi dont l’amour est de feu et de flammes.
u Oui, mes bien-aimés, là où règne Jésus, là règne
son Esprit; et là est la paix et la joie, la véritable
paix, la véritable joie; une paix durable, et non chan
geante comme celle du monde. 0 mes enfants! faites
souvent cette demande: Ouvre mon cœur, SEIGNEUR,
ouvre-le de plus en plus, pour recevoir ta paix. Fais
moi attacher un grand prix à cette promesse si riche
en bénédiction: Je vous donne ma paix. Apprends—moi
à conserver avec soin et avec sagesse ce don de Dieu,
dont tu m’as enrichi, en me donnant ta paix; soutiens
moi, SEIGNEUR Jésus , et demeure toujours à ma droite.
« Oh! pourquoi tous les cœurs ne sollicitent-ils
pas cette paix? Pourquoi ceux qui l’ont reçue, etne la sentent pas toujours vivante, ne peuvent-ils aller
voir, de leurs propres yeux, le Prince de la paix, le
Dieu ressuscité, arrivant au milieu de ses disciples,
les portes étant fermées , et leur disant : La paix soit
avec vous! Cette parole d’amour, mes bien - aimés , il
faut la bien comprendre; elle‘n’était pas simplement
une salutation ordinaire et passagère: mais le divin
Maître , qui voulait former ses disciples à devenir des
pêcheurs d’homme, leur voulait apprendre par-là à
aller avec courage, avec fermeté, et avec une intrépi
dité inébranlable, prêcher et annoncer tout ce qu’ils
avaient vu et entendu; savoir: que JEsus-Cumsr, le
Prince de la paix, peut pénétrer aussi dans les cœurs
fermés; et que partout où on Lui laisse la moindre en
trée libre , Il y porte la paix. Aussi allèrent - ils et an
noncèrent- ils partout la paix de Dieu, et louèrent et
. —205—
exaltèrent-ils artout le nom trois fois saint du PrinceP
de la paix.
( Oh! mes bien-aimés! heureux, heureux celui
qui se laisse préparer à recevoir sans cesse la divine
paix; heureux les pacifiques! C’est le Dieu de la paix
lui—même qui le dit; car ils seront appelés par excel
lence les enfants de Dieu. Quel nom, mes amis: un
enfant de Dieu! heureux celui qui reçoit ce nom, celui
qui l’a reçu et celui qui le recevra.
Soyez attentifs, voici venir l’Époux pour prendre son
épouse:
Heureux celui, qui de bonne heure se lie au SEIGNEUR
avec intimité!
Allez, restez à son École, c’est la paix qu’il vous
donne,
Devenez , devenez tous , enfants de Dieu en son
royaume.
u Oui, enfants, le SEIGNEUR vient pour assembler
ceux qui aiment la paix et qui la recherchent. La paix,
mes bien-aimés, elle appartient à l’éducation sainte
d’une âme; sans cette paix personne ne peut voir Dieu.
A la première arrivée du SAUVEUR sur la terre , au m0
ment de sa naissance, les anges dans leurs félicitations
firent retentir le mot de paix; lors de son second avè
nement, c’est-à-dire lors de son entrée dans une âme,
Il lui dit Lui—même avec bonté et avec amour: La paix
soit avec toi! Enfin, maintenant, quand le SEIGNEUR
arrivera avec ses saints, dans sa majesté , accompagné
de toutes armées célestes , ceux qui lui seront dé
meurés fidèles , entendront encore ce cri, ce chant de
triomphe:
.— 206 -
Venez tous, enfants de la paix,
L’époux de vos âmes est arrivé.
Venez admirer le divin Roi
Car sa grande journée à lui.
Vous qui connaissiez-l’amour ,
Voyez, le Dieu d’amour est là !
Venez le contempler;
Son regard respire la bonté.
Venez, venez en sa présence;
Il Vous traite tous avec indulgence.
Venez contempler sa charité
Qui vous conduisit avec tant de douceur;
Venez reconnaître les sentiments
Qui si souvent touchèrent vos cœurs.
Tombez sur vos faces , adorez avec nous!
Chantons , exaltons
L’homme de douleurs.
- Oui, enfants, le règne de Dieu est extrêmement
proche; encore un moment de patience;
Patientez encore un peu
Voici votre Roi qui vient,
Il veut pour toujours vous délivrer
De tous les maux, de t0us les tourments.
« Je vous le dis en vérité, quiconque est sincère
avec son Dieu, quiconque l’aime de cœur, bien que
dans sa faiblesse; quiconque même désire seulement,
mais sérieusement, l’aimer et le connaître, celui-là le
possède déjà, et avec Lui sa divine paix. Tachez , mes
bien-aimés, de conserver le SAUVEUR dans vos cœurs ,
au milieu des tentations qui vont survenir. Laissez-vous
tout enlever; pourvu que vous gardiez Jésus. Chantez
souvent le cantique, mais chantez-le de cœur, pour
qu’il aille au cœur du SEIGNEUR: Je ne laisserai point
207
mon Jésus. Alors vous pourrez vous réjouir, et être
assurés que ce Jésus, notre unique salut, vous conser
vera, et vous marquera de son sceau, comme sa pro
priété, pour son grand jour qui va paraître. Oui, Lui,
le Dieu de paix, vans marquera au front de son sang
précieux; afin que quand l’ange de la mort, l’Anti
Christ, sera révélé, vous ne soufl'riez aucun dommage
en vos âmes. Pensez souvent à cette parole du SEIGNEUR:
j’aime ceux qui m’aiment. O mes enfants, allez et aimez;
et veillez et priez , afin que vous restiez dans l’amour;
alors vous resterez en Dieu, et Dieu en vous: alors
vous serez heureux , car le Prince de la Paix, en arri
vant , vous trouvera dans la paix. Amen. Alléluia! —
a Edifiez-vous les uns les autres en repassant toutes
ces choses; puis vous puiserez quelque grains de fro
ment dans la Parole de Dieu.
« Celui qui lit la parole, et la garde dans un cœur
simple et pur, elle se développe et croit en lui d’une
manière admirable, et elle lui produit d’inappréciables
trésors. —
« Eh! si vous saviez combien le SEIGNEUR aime
ceux qui se tiennent dans le calme au sein de son
Église! C’est sur ceux-là que son Esprit peut agir, et
produire des fruits abondants. Il ne sait combien il fait
de tort à son âme, cet homme à l’intempérance de la
langue que vous connaissez; jamais il n’est en paix,
jamais son esprit n’a de repos. Il court d’un lieu à un
autre, d‘une personne à une autre, pour parler ou
pour entendre. Il lui est impossible d’entendre la pa-'
role de Dieu , quand sa bonté veut se manifester à lui
en quoi que ce soit. Pourvu qu’il parle, il est content;
il ne s’inquiète pas de ce qui est dit. Oh! qu’il me tari
.\
(
-208_.
dait de vous voir libres pour pouvoir vous entretenir
en paix de vos espérances immortelles.
Moi. Je m’estimerais heureux d’être débarrassé
de mes propres distractions; si des distractions exté
rieures venaient encore souvent s’y joindre, je ne serais
plus capable de rien.
Lui. Satan tourmente tous ceux qui veulent appar
tenir au SEIGNEUR, soit d’une façon soit de l’autre; la
distraction est en ce moment ton tourment.
Moi. Mais faudra-t-il que j’endure tranquillement,
les moqueries et les railleries insultantcs qui me vien
nent toujours à l’esprit au moment que je désire le
plus de m’occuper en paix de choses saintes? -—-—
Lui. Tu ne veux pas de ces distractions, de ces
moqueries; tu les hais; tu veux être au SEIGNEUR: ate
tends donc, attends avec patience; ces attaques auront
leur fin.
Moi. Que faut-il faire aussi quand l’enfer attise
incessamment et sans relâche le feu de mes passions?
Lui. Fais souvent cette prière : SEIGNEUR Jésus
aide-moi à surmonter le monde au dehors de moi et le
monde au dedans de moi. —C’est une chose fort diffé
rente que de chercher les distractions et les tentations,
et d’en être tourmentées. Tu ne les cherches pas, tu ne
les veux pas; le SEIGNEUR t’en fera donc nécessairement
triompher.
Moi. Suis-je coupable, si l’enfer me contrarie sou
vent par des songes affreux, comme il m’en arrive?
Lui. Sur ce point aussi, tranquillises-toi. Recom
mande-toi seulement avec ferveur, en tout et pour tout
au SEIGNEUR Jésus , à ton MAÎTRE; et puis laisse rugir
Satan tant qu’il voudra. — Ton sang est souvent très
—209—
agité; et la vie de l’homme est dans son sang. Lave
toi souvent tout le corps avec de l’eau fraîche: c’est un
bon remède, et qui m’est connu. De la fleur d’orange
dans de l’eau Sucrée rafraîchit aussi bien, et calme les
nerfs. Ces choses tiennent en partie à notre pauvre
nature.
Moi. Je devrais peut-être renoncer au café?
Lui. Tu peux en prendre un peu; et pas trop fort.
Tu as à parcourir une carrière naturelle et terrestre à
peu près semblable à la mienne : grâces à Dieu, tu as
le même Médecin.
Moi. Au milieu de la guerre et des cris de guerre,
je ne trouve sonVent pas même le moment de Lui té
moigner ma reconnaissance.
Lui. Il lit dans ton cœur; il voit ce que tu vou
drais Lui di‘re. Tourne ton cœur toujours vers Lui;
quand tu ne dirais pas un mot, tu le pries alors, et tu
l’adores. — Vois -tu , l’enfer sachant que le SEIGNEUR
veut te préparer pour devenir un instrument de ses
grâces, il est en émoi; il hurle; il te suscite toutes
sortes de contrariétés, et te tente de toutes les manières.
Mais ne t’inquiète pas: le SEIGNEUR est fidèle; Il te sou
tiendra comme il m’a soutenir
« Nous nous arrêterons ici pour cette fois, mes
Amis. "
Je marquérai encore les sentences qui nous échu
rent, parce qu’elles semblèrent singulièrement adap
tées à notre position du moment:
Coloss. 1 , 18; Jérém. 50, 22; Isaïe 45, 6 —7;
Bom. 15, 15; Isaïe 17, 7; II. des Rois 6, 15 -— 16;
II. de Jean 4, 1»; Luc. 18, 1 -— 8.
14
—210—
Du 6 Décembre 1855.
On aura de la peine à le croire; mais malgré tout
ce qui m’avait été dit, ma misère intérieure, l’entier
abandon de Dieu dans lequel je me croyais, les persé
cutions incessantes des mauvais esprits , devinrent tels
que je commençai de nouveau à tomber dans un abat
tement complet. Tout était bouleversé chez moi; tout
ce qui pouvait soutenir mon esprit m’échappait : mon
âmen’était qu’un désert et une solitude. Je ne pouvais
aimer Dieu, étant retombé dans le vague, en voulant
scruter et concilier ensemble ses divers attributs: il ne
me restait en tout qu’une certaine velléité d’être utile
aux hommes, autant que mes forces affaiblies par le
péché pouvaient le permettre: et encore, pensais- je
souvent, les hommes en seront-ils plus avancés, quand
tu les auras amenés à l’état de misère intérieur, dans
lequel tu languis toi -même?
’ J’étais dans cet état lamentable, quand tout-à-coup
je reçois par Lineweg la communication qu’on va lire.
Le déchirement intérieur qu’elle me causa, fut tel que
j’aurais voulu pouvoir jeter des hauts cris: le contraste
d’abord avec mes dispo‘sitions intérieures était insup
portable. Je n’y comprenais plus rien. Et néanmoins je
‘parvins enfin à un état, dans lequel j’aurais renoncé
à tout ce qui m’était cher, même aux communications
de Lineweg, pour ne plus.voir que Jésus en tout et
partout. Ce moment devint pour moi le jour de mon
sabbat, c’est-à-dire le jour de ma paix et de mon repos.
J’avais demandé des signes; mais le SEIGNEUR n’en
donne d’autre que celui de Johas le prophète. Il faut
que l’on perde réellement tOut, que l’on sacrifie tout,
4211—
pour l’unique perle précieuse de la connaissance. du
SEIGNEUR et de l’abandon complet aux seuls soins de
son amour. Voici comment Lineweg me parla:
« Une soirée de bénédictions, mes bien-aimés
dans le SEIGNEUR!
« L’amour me presse de nouveau de venir vous
entretenir, et de vous parler en particulier de votre
trésor qui demeure éternellement. Chaque fois que je
puis annoncer à la terre quelque chose, touchant le
royaume de Dieu, ma félicité prend une activité nou
velle. 0 mes bien-aimés, elle est bien proche la grande
soirée, après laquel’e soupire l’ouvrier fatigué. Béjouis
sez-vous au souvenir de ces paroles: Rien n’est impos
sible à Dieu. Il pourra faire que sous peu il n’y ait
plus qu’un Berger et qu’une bergerie. Oh! que ne trouve
t-il partout sur la terre, à son avènement, une foi vive,
une foi active par l’amour, ce Dieu éternellement fidèle!
Pourquoi tous ceux qui se sentent faibles dans la foi,
ne se mettent-ils pas à demander sérieusement la force
d’enhaut? elle ne leur serait certes point refusée!
a 0 mon ami, quand tu viens me demander ce que
tu dois faire pour être sauvé, je ne puis que te dire:
Crois au SEIGNEUR Jésus - Cumsr; et tu seras sauvé, toi
et ta maison. Jésus dit: Celui qui croit en Moi, des
fleuves d’eaux vives se répandront en sa présence. Viens
seulement, viens, tonRénmruun toujours fidèle, ton
RÉDEMPTEUR immuable dans son amour, fortifiera ta foi,
il trempera ton courage comme l’acier; il te bénira
jusqu’à ce que tu aies reçu la force nécessaire pour
préparer la semence d’une riche moisson.
« Vois, mon ami, il y a un grand nombre de chré
tiens qui voudraient contempler les fruits de leurs tra
14‘
-——‘212—
vaux au moment même que leur semence vient d’être
confiée à la terre. Mais pourquoi cela? C’est qu’ils vou
draient se complaire dans leur œuvre, et flatter leur
amour-propre. Mais celui qui voit le fond des cœurs,
a pitié de leur faiblesse; Il les préserve d’un semblable
mal; Il leur cache les fruits de leurs travaux, jusqu’à
ce qu’ils soient devenus sages. N’est-ce pas, mon bon
ami, tu penses bien aussi comme ce sage laboureur,
qui, après avoir confié sa semence à son champ , s’en
va, et attend avec patience que le tems de la moisson
arrive et lui apprenne ce qu’il a gagné? Travaillant
dans l’intervalle à d’autres choses utiles, et c0ntent du
témoignage de sa conscience, qui lui dit que de son
côté il a fait tout ce qu’on lui demandait, il attend
avec patience. Enfin la moisson arrive, et il récolte,
avec elle, le fruit même de sa patience. Fais donc
comme ce laboureur, mon ami, sème tranquillement
par la prière et l’intercession, jusqu’à ce que le Dieu
d’amour, qui veille sur toi comme un père, t’ouvre une
autre porte; car Il ne te tient pas attaché à un lieu dé
terminé, comme un exilé; Il te laisse une certaine la
titude, et te erie seulement dans sa sollicitude comme
Prince des pasteurs : Pais mes brebis! — Où cela se
fera-t-il? et quand te mettras-tu à l’œuvre plus immé
diatement? tu n’as pas besoin de le savoir: cela se verra
plus tard. — S’il t’arrive de dire, comme autrefois Jé
rémie: Vois, SEIGNEUR, je suis trop jeune, l’ami de ton
âme te répond: Mon enfant, ne dis pas je suis trop
jeune; car moi, le SEIGNEUR ton Dieu, je toucherai tes
lèvres , et je mettrai dans ta bouche les paroles que tu
dois dire. Tranquillise- toi par conséquent, mon ami,
et rends-toi à la voix de ton RÉnnmreva. Contemple
—- 215 —
son amour indicible pour toi; rappelle-toi bien vive
ment cet amour avec tous, ses détails; alors ton cœur
s’enflammera, et tu prépareras les voies au SEIGNEUR.
Oui, prépare les voies à ton SAUVEUR , nettoie ses sen
tiers; et si Satan vient rugir autour de toi, pour te
troubler et te décourager, rappelle-toi la parole du
SEIGNEUR; rends-Lui la gloire , et dis comme Lui: Re
tire-toi, Satan; et alors (quel bonheur, quel ravissement
pour moi, d’être chargé de te le faire savoir!), alors
les anges , les bienheureux , les messagers de paix du
Très-Haut viendront près de toi et te serviront.
«Le SEIGNEUR, ton Rédempteur, ton Dieu, ton
Berger, ton Ami, ton Frère, ton Protecteur te fait
dire: Confie-toi à moi, que risques-tu? Je te donnerai
le courage de la foi, je te donnerai les flammes de
l’amour.
(l 0 mon ami; tu ne sais encore, il est vrai, ence
moment quel chemin le SEIGNEUR t’ouvrira, si c’est à
gauche, si c’est à droite; mais crois-moi , tu le verras.
Il a besoin d’ouvriers dans sa vigne; et celui qu’il choi
sit peut être sûr de recevoir les instruments nécessaires.
Ne sois point en peine, Il te couvrira du casque du
salut; il te revêtira de la cuirasse qui repousse tous les
traits de Satan; Il te donnera la ceinture de sa force;
Il placera le bouclier de la foi dans ta main et autour
de ton cœur; l’épée à double tranchant de la parole de
Dieu sera attachée à ton côté, et sa parole sera dans
ta bouche. *) 0 âme précieuse! crois seulement, et tu
.____—
‘) Il est inutile de faire remarquer que toutes ces images na
turelles ont une signification spirituelle particulière; la
——2*14—-—
verras. Celui qui aida David à abattre le vieux géant,
sera ton appui; tu recevras de sa propre main la fronde
de l’évangélisation, et avec ton Dieu tu feras tes ex
ploits; avec Lui tu escaladeras les murailles , tu feras
fendre les rochers. Mais aussi avec Lui, mon ami, il
te faut patienter, et attendre les moments de son im
muable fidélité. Rappelle-toi, que ceux qui sèment dans
les larmes, recueilleront dans la joie: ils vont en pleu
rant, porter leur semence; mais ils reviendront avec le
chant de triomphe allélm'a, et porteront à leur Dieu, à
leur Roi, les riches gerbes; et leur Dieu les récom
pensera en séchant toutes les larmes de leurs joues. Il
les réjouira éternellement, pour les travaux de quel
ques heures et la chaleur supporté un seul jour terrestre;
Il les chargera de couronnes , Il leur mettra la palme
à la main, Il changera leur honte en gloire, leur peine
en repos , leur combat en chant de triomphe, leur in
quiétude en paix, et leur douleur en joie De la foi,
mon ami, ils les transportera dans la vue claire et sans
fin de l’objet seul aimable et seul digne d’être aimé.
Pour te décrire ces choses , mon bien-aimé, il faudrait
être plus qu’un ange, plus qu’un séraphin. Tous les
royaumes et toutes les principautés de la terre, tous
ses trésors, tous, ses joyaux, tout ce que le ciel et la
terre renferment de beau , n’est rien, absolument rien,
au prix du bonheur que cause un seul de ses Lregards.
0 mes petits enfants,
langue des correspondances les explique toutes; il est
même facile de les deviner.
Note du» Trad. .
—2’15—
Patientez avec joie encore un petit instant,
Vous aurez un regard de votre Roi;
Rien ne sont les peines de cette vie
Auprès d’une pareille gloire!
SEIGNEUR JEsus, daigne accorder aussi
Un de tes regards à ceux qui me sont chers!
Un de tes regards , SEIGNEUR ,
Enflammera pour toujours leurs cœurs.
Oh! déchirons le voile, qui couvre le ciel!
Soyons tous des Pierre par la foi!
SEIGNEUR, porte sur nous tes yeux de flammes,
Ils nous changeront en d’autres hommes.
Ton regard fend les rochers ,
Il chasse Satan de tous les cœurs.
SEIGNEUR JESUS, Roi, Homme de douleurs,
Un regard d’amour sur ceux qui me sont chers!
Amen.
« Tu sais bien , mon ami, que tu es aussi compté
parmi les miens?
Moi. Je le sais ; et c’est un grand besoin pour moi.
Lui. Ton grand défaut, mon ami, c’est d’être crain
tif dans ton cœur. Sois plus ferme, sans cela l’enfer
parvient facilement à te dérouter, et à t’empêcher de
monter au trône de grâce.
Moi. Il est très -vrai que le génie du mal me dé
route; je ne sais plus en vérité où j’en suis.
Lui. As-tu peur, quand une ou deux fois l’an, aux
foires, il y a plus de boutiques, plus de bruit et de
mouvement dans la ville? Non. Eh bien, la même chose
arrive dans ton cœur. Il y a là aussi des changements
de saison, l’été , l’hiver , le printemë et l’autômne s’y
succèdent sans cesse. Rappelle-toi ce que dit l’Evan
gile : Au moment de l’hiver , Jésus se tenait retiré
—216—
dans le temple, en dedans, sous le portique de Sa
lomon. ') Monte souvent sur le Golgotha , mon ami; et
tu trouveras la paix, tu la trouveras immanquablement.
C’est là que coule la source éternell: de l’amour: et
tout homme, quel qu’il soit, qui cherche là son repos,
le trouve. Lève souvent tes yeux vers ton SAUVEUR et
Lui dis: SEIGNEUR Jésus, tu es assis maintenant sur ton
trône éternel et tu règnes; tu te souviens de toutes tes
créatures; oh! souviens -toi aussi de moi; viens et te
prépaÿe toi - même une demeure dans mon cœur; viens,
établis-y ton trône: si je te possède, je possède la vie
et tout ce que mon cœur souhaite: SEIGNEUR JEsus, fais
que je renonce à moi, que je ne vive que de Toi; viens
JESUS à mon aide! -- Dis-Lui souvent ces choses, dis
lcs à son cœur; et il viendra à toi avec la même joie
qu’il témoigne incessamment à des millions d’âmes
faibles qu’il soulage. Sois sûr que tu serais la première
brebis dont le bêlemcnt ne serait point parvenu à Lui.
Il est l’amour, hier et aujourd’hui, et Il le sera éter
nellement. Porte tes regards au-delà de tes péchés,
jusqu’à Lui, qui seul sait les anéantir.
Jlloi. Je le voudrais bien; mais leur souvenir me
poursuit malgré que j’en aie.
Lui. Mon ami, le souvenir t’en restera jusqu’à ton
dernier soupi'; tu le porteras partout avec toi. Tant
que tu auras un pied sur la terre, la laideur de ton
') L’hiver signifie les orages dans la partie volontaire de
l’âme chez les régénérés (Arc.cæl. , 955. 956.); Salomon,
le SEIGNEUR par abstraction à son royaume céleste et spic
rituel. (Apoc. expl. 654.)
‘217’
.“
péché te pressera comme un poids. Mais s’il est vrai
que le péché ne règne plus en toi, et que tu lui fasses
la guerre journellement, alors le péché n’a plus de part
en toi, tu n’as plus de part en lui; vous êtes séparés.
Que ce soit là ta consolation. Mais quand tu entrerais
dans le réduit le plus caché , la tentation te suivrait.
Moi. C’est-là précisément ce qui me rend si
craintif; je ne me sens jamais en sûrêté contre les sé
ductions. .
Lui. Il y a un combat éternel entre l’esprit et la
chair : mais tu sais bien, mon cher, que Satan, l’an
tique serpent, peut bien chercher à séduire, mais qu’il
ne peut point forcer la volonté. Je puis t’assurer que
par des prières sérieuses et soutenues, que par des
soupirs même sans paroles, par les désirs, les vœux
de n’être qu’à JEsvs, tu vaincras. Une prière sérieuse
fait trembler tout l’enfer; un seul soupir vers JESUS fait .
frissonner le lion rugissant. Dis -moi , mon bien-cher,
y a«t-il jamais en de victoire sans combat? Je t’en prie
donc, je t’en conjure, au nom de JÉsns et de ton salut,
jette-toi avec tout le poids de tes péchés, dans les bras
de Jésus; porte-Lui tes plaintes , et Il te délivrera de
tout mal, aussi véritablement, que son sang a coulé
pour toi. Mais, vois, c’est Lui qui s’est réservé de te
purifier. C’est Lui, Lui seul , qui veut te laver! laisse
Lui donc l’honneur de ton salut, et sois assuré qu’Il
ne laissera pas son œuvre inachevée; mais qu’Il la me
ncra à une glorieuse perfection; quand même tu ne t’en
apercevrais pas pour le moment. Si tu t’es véritablement
donné à Lui, il ne te reste plus d’autre soin; tu n’as
plus qu’à dire: SEIGNEUR , me voici; fais de ton serviteur
selon ton bon plaisir. Amen." ‘
——218—
Du 8 Décembre 1855.
(Dixième Dimanche de l’Avent.)
Dans nos entretiens de cette soirée, nous vînmes
à parler d’abord des distractions. Chacun s’en plaignit;
on déplora surtout qu’il se mêle tant d’écarts et de peu
sées étrangères aux prières. Enfin on parla des com
munications spirituelles, en particulier par songe; et
je racontai à cette occasion un songe remarquable que
j’avais en la nuit précédente. Je me vis, dis -je, dans
la maison de M" Scozzino , un habitant de la ville qui
souffre d’une mélancolie noire depuis plus d’un an. Cet
homme, que je n’ai vu qu’une fois en passant, mais
dont je connais beaucoup la femme qui est ma payse,
_me faisait de la peine par son état vraiment digne de
pitié; et depuis quelque tems j’avais senti le besoin de
prier pour lui. Dans mon rêve donc, il se trouva avec
sa femme dans son salon, et moi, j’étais au piano,
chantant un motet. Il en fut touché jusqu’aux larmes;
et à la fin il vint se jeter à mon cou , me priant de re
venir une autre fois, puisque ce chant lui avait fait tant
de bien. Je me réveillai alors, profondément touché.
Mais je n’ai encore osé prendre le songe au sérieux.
Tandis que je terminai ce récit, les signes précur
seurs de l’arrivée du père de famille se montrèrent chez
Arma; le bien-aimé défunt fut là et dit:
«Un des surveillants de Sion, que vous connaissez
et qui vous aime ardemment, est ici et parle ainsi:
. Le SEIGNEUR m’envoie vous bénir, mes bien-aimés.
J’étais déjà au milieu de vous, quand vous vous plai—
——219—
'gniez de vos distractions, et je vous dirai à ce sujet
un mot de consolation et d’encouragement. Moi aussi
j’ai en à combattre le même défaut, et cela jusqu’à la
fin de ma vie; mais il diminua toujours , et me fatigua
toujours moins. Je vous dirai donc d’après ma propre
expérience: ne vous laissez pas décourager par cette
tentation, la principale que l’ennemi du salut dirige
contre les enfants de Dieu. Ne vous laissez pas par-là
détourner de l’exercice de la prière; priez sans cesse,
avec persévérance, malgré toutes les distractions; ne
renoncez à la prière sous aucun prétexte. Faites comme
ce patriarche qui s’écriait de tout cœur : SEIGNEUR, je
ne te quitte pas que tu ne m’aies béni, et je vous assure
qu’Il vous bénira abondamment, quand Il saura qu’il
en est tems, mais non pas quand vous vous imaginez
qu’il en est tems. Quand vous auriez mille choses à
dire a votre BÉDEMPTEUR, et que vous n’en dissiez pas
une seule sans distraction; ne vous en inquiétez pas;
continuez toujours : Il lit dans vos cœurs ce que vous
voulez Lui dire. Satan veut-il vous faire accroire que
vous ne devez pas importuner le SEIGNEUR de trop de
demandes; rappelez-vous que le BÊDEMPTEUR aime les
demandeurs importuns; et que plus ils l’importunent
plus ils Lui sont chers. Laissez-vous encore moins dé
tourner de la prière par le souvenir de vos péchés;
confiez-en le poids à votre Dieu, et priez tranquille
ment. C’est surtout en ces jours mauvais qu’il faut
vous réunir en sa présence, mes bien-aimés, et
l’honorer du sacrifice de vos prières et de vos louan
ges : hélas! il en est si peu qui l’honorent aujour
d’hui! et il en est tant qui le déshonorent et se
montrent ingrats! '
-220—
Alors il fit une prière qui rappela toutes les prières
les plus ferventes qu’il nous faisait entendre de son vi
vant: puis il ajouta : «Si j’avais la langue et les paroles
de tous les cieux des cieux, je ne serais pas en état de
vous décrire l’amour du SEIGNEUR; mais je Lui rends
grâce de savoir que vous connaîtrez tous un jour cet
amour. ' —— Enfin, s’adressant à moi, il me rappela
de bien me garder d’oublier l’intercession pour l’infor
tuné qui m’avait été montré en songe; m’assurant qu’elle
aurait son efl'et.
Mme Lineweg qui se réjouit si fort de voir parti
ciper aux bénédictions célestes toutes les personnes
qui lui sont chères, demanda à M“e Palmettas, si,
malgré sa surdité, elle avait entendu ce qui avait été
dit: elle répondit qu’oui. Nous en fûmes étonnés, vu
qu’elle ne s’était point rapprochée d’Anna, quand celle
ci avait commencé à parler, nous faisant observer que
cela était superflu, puisqu’il lui faudrait coller l’oreille
sur la bouche pour l’entendre. Mais Lineweg nous ex
pliqua cette circonstance par ces mots: « Celui à qui le
SEIGNEUR ouvre les oreilles , entend toujours. Main
tenant, ma chère femme, D ajouta - t - il , a heureuse
amie de la Bible, tu voudras, sans doute, que ces
poussins reçoivent encore quelques grains de la Pa
role de Dieu? — Assurément, répondit-elle. — En
ce cas là tu peux réveiller au nom de Jésus, jusqu’au
tems heureux où le réveil pour la terre n’aura plus
lieu. ’
Madame réveilla Anna , et nous recueillimes tous
avec joie la portion de nourriture spirituelle qui échut
à chacun.
_221_.
Du 9 Décembre 1855.
En terminant sa prière d’hier, Lineweg nous avait
promis qu’il ne tarderait pas de revenir prier avec nous.
Je me trouvai donc aujourd’hui à la maison, ne sachant
pas quand cette prière aurait lieu. Je pensais à me re
tirer un peu avant le souper, quand Anna entra un
moment en extase, mais simplement pour que le céleste
visiteur pût dire à sa femme de me retenir à souper,
puisque la prière aurait lieu immédiatement après. Je
restai donc; et en effet, aussitôt la fin du repas, Anna
devint de nouveau l’instrument de communication de
son oncle. c Je saisis ce moment, nous dit-il, parce
que demain l’état de la santé d’Anna ne permettrait
pas aussi bien qu’aujourd’hui de tenir la séance.” Il
prononça ensuite une prière fervente, dans laquelle il
recommanda instamment au SEIGNEUR tous les siens,
Lui demandant surtout pour eux la connaissance de
soi-même , et par elle l’humilité , afin qu’incessawment
la fête de la naissance du Très-Haut comme simple en—
fant des hommes , pût être célébrée dans leurs cœurs.
Ayant achevé, il nous dit: « Savez-vous bien ce
que c’est que l’intercession, ou la prière pour ses
frères? — Ce n’est autre chose qu’un fruit de l’amour.
Continuez donc à prier les uns pour les autres. Mon
cher ami, l’intercession c’est de l’amour; et l’amour,
et tout ce qui en provient, réjouit d’une manière si
ineffable l’oreille du SEIGNEUR qu’ll se hâte de secourir
ceux pour qui tu pries. Ce sont là les sons qui ont si
fortement ému ton infortuné.
I Quand on dit: marchez dans les sentiers du ciel,
cela signifie, marchez dans l’amour, marchez dans la
charité; car la charité est la reine du ciel, et elle y
règne éternellement.
« Maintenant, mes bien - aimés , ajoutez à ce pain
de la grâce encore quelque rayon de miel. ‘) n
Ilier avant le coucher, Mme Lineweg avait su par
son mari que le docteur Fischer avait été mon gardien
de la nuit , et que ce soir ce Serait mon grand-père.
Du 12 Décembre 1855.
( Je fus dans le cas de chercher un nouveau paquet 31
la douane, ce qui était pour moi la course la plus dès
agréable qu’on se puisse imaginer. Je ne sais si c’est
la disposition inquiète de mon esprit, ou le défaut de
mesure et de procédés honnêtes dans cet établissement
qui me donnait un secret frisson chaque fois qu’il fal—
lait m’y présenter: ce qui est sûr c’est que mon carac
tère exige aussi impérieusement un accueil bienveillant
_et humain, que mon corps exige le manger et le boire.
Dans ce lieu où règne souvent la fraude , la violence,
la grossièreté, l’orgueil, le désir du gain, je ressentais
comme des accès de fièvre. Les employés, en général,
n’étaient pas fort gracieux, et surtout les subalternes
parlant allemand, m’avaient froissé. Je ranimai toute
fois le peu de courage qui me restait, et me recom
mandant au SEIGNEUR, je m’y rendis. On me remit au
lendemain matin. Comme le paquet était une chose
pressée, et que je désirais bien plaider mon affaire , je
') Rayon de miel signifie le Bien provenant du vrai. (Apoc.
expl. 619..)
_225__
pris alors avec moi un ami. Malgré cela je fus encore
remis à une autre heure: Il faut venir à midi, me dit
on; et votre paquet devra passer à la préfecture. A
midi, je me présente; et point du tout; en ce moment
on ne me laisse pas même entrer. Etonné et contrarié,
je prends de l’humeur; l’inquiétude me gagne; et déjà
je pense à ne m’y plus présenter, quand comme une
voix intérieure me dit : Dans le monde vous aurez de
l’inquiétude; mais consolez-vous, j’ai vaincu le monde.
Je repris donc un peu de confiance. Pour l’augmenter
j’allais tirer une sentence de l’Ecriturc, et je tirai Za
charie 9, 8: «Et je m’établis autour de ma maison
pour la défendre contre des armées , contre des peuples
vagabonds; et aucun oppresseur ne s’y présentera plus;
car j’ai vu le désordre de mes propres yeux.” Cette
promesse si frappante, dont je n’attendais pas sans
doute l’accomplissement littéral, mais que je regardais
comme un mot de consolation en général, me porta à
faire avec une ferme confiance la prière suivante:
Donne-moi la force SEIGNEUR de supporter toute espèce
d’injustices. Je ne demande pas que tu les détourne;
fais seulement par ta grâce que je supporte avec pa
tience toute tracasserie , tout mépris; et que du moins
ils m’attirent quelque bénédiction spirituelle. Et je re
tournai ensuite à la douane avec résolution , bien que
toujours poursuivi d’une secrète horreur dont je ne
pouvais me défendre. Mais il arriva alors qu’un des
premiers chefs, un Français, le plus affable de tous,
entreprit l’examen de mon paquet, et ne m’épargna
pas seulement la course de la préfecture, mais me mon
tra lui-même avec bonté le bureau, dans lequel tout
pouvait être terminé. Tout fut ainsi fait en un instant.
Dieu! dis -je, si les hommes savaient Seulement quel
baume ils font souvent couler dans les cœurs par un
seul mot d’amitié!
Plein de joie et de reconnaissance j’allai dans la
famille Lineweg raconter la manière dont j’avais été
délivré de mon inquiétude. On m’écouta avec joie,
mais à peine ma relation faite, Arma sentit l’influence
d’enhaut, et la voix connue me dit:
«Celui qui prie souvent pour vous et avec vous
est là. Je désirais beaucoup, mes bien - aimés, de vous
parler. Le Pasteur qui conduit vos âmes dans les pâtu
rages le long des ruisseaux, m’envoit pour vous bénir.
Je dois te dire, cher ami, que ce qui t’est arrivé, était
une petite épreuve à laquelle a été mise ta foi. Ne crains
jamais plus, le Dieu d’Israël est ton gardien, le puis
sant Dieu de Jacob est ta protection. Ce fut ton SEI
GNEUB et ton Dieu qui parla à ces cœurs et les disposa.
Si vous voulez me tourmenter, dit-il , laissez du moins
aller celui-ci en paix. Car quand ils tourmentent les
brebis du SEIGNEUR, ils tourmentent en elles le SEIGNEUR
lui-même. Quand tu fus dans la peine, ton Protecteur
te cria: Ne crains pas, mon fils; vois , avant que tu te
misses à prier j’avais déjà dit à mes anges de te porter
sur leurs mains, afin que tu puisses réussir au milieu
de ces hommes durs et sans entrailles. Notre roi t’aime,
jamais il ne t’abandonnera.
Il sera toujours prêt pour tdn secours;
Ses divins conseils ne te manqueront pas.
C’est Lui qui t’a dit par sa parole,
Sois consoIé, mon fils, sois consolé.
...225..
«Apprends que cette seule parole du SEIGNEUR:
C’est moi! brise les cœurs comme les rochers. Il faut
alors que les plus révêches agissent contre leur volonté
pour faire la volonté du SEIGNEUR. Chez les cœurs durs
règne la loi de la contrainte, il faut; chez les disciples
du SEIGNEUR celle de la bonne volonté, nous allons faire.
0 mon ami! tu es heureux; Jésus enfant est avec toi,
comme Dieu, comme SEIGNEUR et comme Roi; comme
SAUVEUR, comme Conseil et comme Soutien- Oui, on
peut dire:
Rien n’est pour Lui trop chétif,
Il soigne les plus petites choses;
Et en elles Il se montre grand.
Reste au sein de ton Rédempteur,
Jamais son secours ne te manquera.
Aussi n’as-tu rien à Lui cacher,
Il entre avec bonté dans tous les besoins;
Frappe avec courage, et toujours Il t’ouvrira.
«Voilà ce que le Dieu d’amour m’envoie te faire
savoir; l’épreuve surmontée de la sorte, tu dois agir
avec plus de confiance par la suite. D
Maintenant, dit Mme Lineweg, que vous avez
goûté combien le SEIGNEUR est bon, il vous faut aussi
demeurer plus ferme dans la foi. Je le voudrais bien,
répondis-je; mais vous savez qu’après l’été revient
l’hiver. -
« La mère, reprit Lineweg , se cache parfois, afin
que l’enfant l’appelle avec plus de force; mais elle ne
l’abandonne pas dans sa peine; elle vient, elle accourt,
elle le prend dans ses bras, elle le serre sur son cœur:
voilà au juste ce qui t’est arrivé.
.C’est par des vues de grâce et de miséricorde
15
.— 226-—
que le SEIGNEUR a fait marquer, comme tout le reste,
les fautes et les faiblesses de ses disciples, dans son
Évangile, afin que leurs successeurs ne perdissent pas
courage, et ne renonçassent point à l’espérance. N’est
il pas vrai, mon ami, que Pierre vit le SEIGNEUR avec
lui dans la barque, et que toutefois il eut peur de périr?
Eh bien, toi aussi, tu as vu souvent le SEIGNEUR près
de toi avec toutes ses grâces, et t0utefois la pusillani
mité rentre quelquefois dans ton cœur. L’apôtre Paul
connaissait très-bien cette vérité, quand il disait: nous
sommes inquiets, mais nous ne perdons pas courage.
Fais de même; aies recours à ce moyen qui brise le
cœur paternel de Dieu, savoir la prière. Avec la prière
tu réussiras toujours; et jamais tu ne seras délaissé
dans tes embarras, quels qu’ils soient; car c’est ton
Protecteur à jamais fidèle, qui est devant toi, avec toi,
au-dessus de toi, et grâce à Dieu, en toi, qui te donne
cette assurance: qu’il te soit fait selon ta prière. Reçois,
mon ami, ces miettes, ces grains des bénédictions d’en
haut; ils sortent des greniers des grâces de JEnovm;
recueille-les comme une douce colombe, et témoigne ta
reconnaissance à ton Dieu , comme celle qui roucoulait
en recevant de Noë sa nourriture journalière. ‘) Amen.
«Ma bien-aimée , j’ai désiré de tout cœur de vous
entretenir; et aussitôt quej’ai vu l’instrument nécessaire
‘) La colombe représente l’esprit de ceux qui vivent dans la
foi (Arc. cœl. , 870.); Noë conduisant à travers le déluge,
représente le SEIGNEUR , comme l’arche représente les états
intériezws de l’homme (Ibid. , 605.); enfin le déluge repré—
sente l’état de tentation on les attaques des mauvais esprits.
(lhid. , 605.)
227
rétabli, je me suis empressé de revenir. Celui que
l’amour de Jésus presse, celui-là est vraiment pressé. ”
Du 15 Décembre 1855.
Hier soir, au moment du coucher, me dit Mme Li
neweg dans ma visite d’aujourd’hui, mon mari est re
venu encore une fois me parler, accompagné d’un hôte
céleste très-élevé en gloire, et qui n’était autre que
Lézay-Marnésia, notre ancien préfet. Agréablement
surprise, je dis à mon mari: mais je n’ai pas connu ce
Monsieur pendant sa vie. Alors Lézay prit la parole et
me dit: Ce qu’aime mon ami, je l’aime aussi. Mon mari
me raconta ensuite que, peu de jours après sa mort, il
s’était une fois réveillé la tête appuyée sur la poitrine
d’un être qui ressemblait à un prince; qu’en voulant se
détourner par un sentiment de surprise et de respect,
ce prince lui avait dit : Ne reconnais-tu plus ton ami
Lézay? Car Lézay, ajouta-t-il, est Prince dans l’autre
monde. ‘)
Lineweg disait de plus à sa veuve, que Lézay et lui
m’avaient accompagné chez moi, et qu’ils en revenaient.
—Je me rappelai en effet que depuis bien longtems je
ne m’étais senti si heureux en me retirant, ni ne m’étais
reveillé avec un cœur si joyeux. ——
Pendant notre réunion de ce soir, le père de fa
mille vint aussi se mêler parmi nous. Mme Lineweg
m’avait montré un cantique dont le sujet était la mort
de ceux qui nous sont chers; pendant la lecture le sou
“) Bois et Princes dans le sens spirituel signifient ceux qui
sont dans le vrai, et sont capables d’enseigner et de guider
les autres. Note du Trad.
15‘
venir de son cher défunt lui fit venir les larmes aux
yeux; à l’instant même Anna se trouva en esprit et
Lineweg dit :
« Ma chère femme, pourquoi pleures-tu? Si tu
veux verser des larmes, verse donc des larmes de joie!
Le SEIGNEUR maintenant est ton protecteur, cet échange
ne doit exciter que le sentiment d’une profonde grati
tude. Encore un peu de tems, oui un peu de tems, et
tu t’écrieras dans ton triomphe et ta joie: T0ut ce que
le SEIGNEUR a fait, est bien fait. 0 mes bien-aimés,
adressez-vous donc en tout et partout à votre SAUVEUR.
Il est en état de guérir toutes vos blessures, car le
baume de Guiléad est chez lui en abondance. Son ma
gasin est riche, et pourvu de tous les simples, pour
toutes les maladies. Il n’est pas seulementvotre roi; car. Il
savait que les pauvres sonthonteux et timides dans la pré
sence d’un roi; Il est donc aussi devenu votre SAUVEUR,
afin que tous les êtres, même les plus misérables, pussent
l’approcher avec confiance. Comme les grands et les ri—
ches méprisant, d’un autre côté, ce qui est petit et humble,
et n’en peuvent espérer leur salut, le SEIGNEUR se montre
aussi comme roi, et comme un roi glorieux, afin d’être
ainsi Tout à tous. Voilà la bonté avec laquelle le SEI—
GNEUR prend soin de tous ses enfants. Restez donc au
près de Lui, mes bien—aimés, restez auprès de Lui, et
votre joie sera entière. Alléluia! Amen. —
« Ajoutez à cela un grain de la parole de Dieu;
car en vérité, vous ne sauriez trop amasser, tandis que
le moment est encore favorable, et que la tempête du
déhors n’est pas arrivée à vous; car vous serez alors
en état de partager avec ceux qui seront indigents et
pauvres en biens spirituels.
-—— 229* —-—
Le 15 Décembre 1855.
(Un Dimanche.)
Ce . soir nous chantions nos cantiques spirituels
d’une voix claire et forte et avec des cœurs pleins de la
joie du SEIGNEUR; aussi entendîmes-nous bientôtles
avertissements de l’arrivée, et enfin l’être chéri et trans
formé se trouva au milieu de nous, disant:
c Un chantre de la Sion céleste est ici. Je viens
vous dire, mes bien-aimés, qu’un grand nombre de
bienheureux a accompagné vos chants. JÊSUS lui—même,
sous sa forme d’enfant, était au milieu. de vous, selon
sa parole , Partout où deux ou trois sont assemblés en
mon nom , je suis au milieu d’eux. Restez donc toujours
avec ce JESUS qui s’est donné à vous; et qui veut vous
enrichir de tant et de si précieux dons, de tous les
dons du Père. Vous sentirez alors qu’en Lui il vous est
né un enfant dont le nom est Conseil, Force , Héros,
Admirable, Père de l’éternité, Prince de la paix. Vous
l’avez éprouvé pendant cette année, combien son nom
est Admirable; mais vous l’apprendrez mieùx encore
l’année qui vient; car il se fera de grands et importants
changements. Certes, cen’est pas sans raison que je
vous répète si souvent que son nom est admirable; je
suis autorisé à cela par tout ce qui arrive dans ces tems.
Mais attachez-vous toujours fermement à‘ votre SAUVEUR,
alors vous reconnaîtrez aussi que les autres noms ne
Lui ont pas été donnés en vain. Vous pourriez trouver
étrange que je vous recommande si souvent de'rester
auprèsde JEsus, dans l’atmosphère delaquelle on se sent
si heureux: mais il faut Savoir que le chemin qui mène
à Lui, et à sa suite, est quelquefois rude et raboteux,
-250
au point que les brebis s’ensanglautent les pieds, et
qu’alors l’envie leur prend de s’arrêter et de se coucher
à terre. Un encouragement continuel est donc nécessaire
pour les faire avancer. Rappelez-vous le vieillard Jean;
quand il n’eut plus la force de se tenir sur ses jambes,
et qu’il sentit sa fin approcher, il fit assembler les
fidèles et se fit placer au milieu d’eux. Ceux-ci pen
sèrent qu’il devait avoir quelque chose de bien impor
tant à leur communiquer, puisqu’étant si faible et si
malade, il voulait encore leur parler: mais que leur
dit-il? Mes petits enfants, demeurez en JEsus, afin que
quand Il sera révélé, vous ayez de la joie, et afin que
vous n’ayez point à rougir en sa présence lors de son
avènement. Changez donc, vous aussi, votre cœur en
une crèche, où l’enfant Jésus puisse naître; et puis soi
gnez-le avec zèle, afin qu’il vous devienne fils. Il ne
suffit certes pas de connaître le nom de JEsus composé
de ses deux syllabes; il faut que la vie intime du cœur
éprouve toute la force de ce nom. Vous n’avez pas seu
lement sur terre à combattre contre la chair et le sang;
mais contre les esprits mauvais; et ici le nom seul de
Jésus est efficace, même quand on le prononce simple
ment, ou qu’on y pense avec foi. Prenez donc l’enfant
JEsus avec vous, jour et nuit, et quand vous vous ré
veillerez, faites-le chaque fois assister à toutes vos en
treprises et à toutes vos démarches. Amen.
« Chantez bien souvent des cantiques de louange
à la gloire du SEIGNEUR; chantez avec joie. Pour moi je
me suis uni à vos chants de toute ma voix; j’étais dans
des transports de Jubilation; et Reiseisen, que vous
avez connu, était aussi avec moi. '
Ce Reiseisen était de son vivant un médecin très
—-254-—
distingué de cette ville. Ses services et son noble ca
ractère lui avaient mérité un beau monument, que ses
concitoyens érigèrent sur sa tombe. — Il mourut sans
doute jeune? dis—je à Mme Lineweg, qui me donnait
ces éclaircissements. Pas très-jeune , répondit-elle; mais
il n’était point marié. - «Il a part maintenant, dit
Lineweg, aux noces de l’Agneau. —
a Ton ancien ami intime , appelé ici Timidus ,
ajouta-t-il ensuite, en s’adressant à moi, avancera beau
coup à la première grande fête des grâces; car les grâces
s’étendent, ces jours là, dans tous les empires.
«Dans très -peu de tems je vous parlerai de nou
veau : pour aujourd’hui il faut borner ici la béné
diction. ’
Au moment de mon départ, Mme Lineweg m’ap
prit encore que la veille, au moment du coucher, son
mari lui avait dit que maintenant je pouvais cesser
l’imposition des mains sur son bras, vû que l’effet avait
été obtenu, par la grâce du SEIGNEUR. Il ne faut pas,
avait-il ajouté, qu’il se fasse un devoir de venir ici par
un si mauvais temps. Toutefois je sais que cela ne lui
fera point de plaisir de ne plus pouvoir te rendre ce
service; d’autant plus que c’était aussi le moment le
plus favorable auquel je pouvais 'm’entretenir avec ce
cher ami.
Du 16 Décembre 1855.
Quand j’arrivai ce soir chez l’intéressante veuve,
elle écrivait déjà ce qu’on lui dictait par Anna. Je le
recopiai ensuite, ainsi qu’il suit:
«Enfants du Très-Haut, édifions-nous les uns les
—- 252—
autres; et ajoutons une petite pierre pour la construc—
tion de l’Eglise de la Nouvelle Jérusalem. Parlons du
royaume de Dieu, et exaltons les bontés infinies de
notre SEIGNEUR JEsus-Cmusr; chantons, célébrons son
nom glorieux, et adorons-le en esprit et en vérité. Ho
sianna dans les lieux très -hauts! Hosianna, loué soit
celui qui se hâte de venir au nom du SEIGNEUR, pour
racheter et sauver de nouveau la société chérie, et la
transplanter dans le royaume éternel de sa grâce. ")
Gloire à notre Maître , à notre Roi,
Tout enfin lui sera soumis;
Gloire à Lui, à l’agneau de Dieu! “)
ParLui son petit troupeau triomphera.
Il paraît quelquefois prêt a succomber,
Mais il triomphera par le héros de la croix.
Jettez des cris de joie,
Chantez votre Roi.
Il sera fidèle,
Il vous conduira,
Jusqu’à ce que vous voyiez sa sainte face. “‘)
« Mes bien-aimés, vous arrivez à une époque bien
remarquable; l’heure n’est pas éloignée où chacun devra
prendre son parti, et déclarer à qui il veut appartenir.
Es-tu pour ou contre le Crucifié? demandera-t-on. Et
on répétera le mot: celui qui se fait roi est contre César.
") Le nom de Dieu, dans la langue spirituelle, signifie son
essence. (Apoc. expl. 102. 148. 186. 650.)
“) Agneau de Dieu signifie Jéhovah selon sa nature humaine
divine. (Apoc. expl. 220. 1527. 1555.)
"") Voir la face du SEIGNEUR signifie le connaître et l’aimer,
et par conséquent lui être uni. (Arc. cœ}., 5816. 5825.
9546.)
—255-—
0 mes très-chers! je vous conjure au nom de la dou
loureuse passion et de la mort de notre SEIGNEUR et SAU
VEUR, et au nom du salut de vos âmes immortelles, de
meurez inébranlablement attachés à l’unique roi vérita
ble, au Fils unique du Père, au Rédempteur JEsus
CHRIST. Si jusqu’ici vous vous êtes attachés à Lui, mes
bien-chers, mes très-chers, par la suite liez-vous à Lui
par des chaînes de métal à toute épreuve: car Il est
seul le rocher de votre salut: à Lui la louange et la
gloire au siècle des siècles. Souffrez -vous de la soif,
mes amis? prenez la verge de la foi, recourez à la pa
role de Dieu, à la parole de vie; frappez ce rocher, et
des torrens de lumière et de vertu couleront sur vous;
toutes les bénédictions viendront vous inonder. Oui,
demeurez liés à ce rocher, mes amis, la manne céleste
alors ne vous manquera pas. A l’ombre de ce rocher
vous trouverez la vie et la joie; vous vous sentirez
l’envie de vous élancer connue des jeunes aiglons.‘)
Que ce rocher, mes bien - aimés , soit le corps mort où
vous vous assemblerez. Faites cela, et je vous le jure
par la proximité de la venue du SEIGNEUR , vous serez
secourus.
«0 vous, enfants du Père céleste, frères et sœurs
de notre SEIGNEUR JEsvs-Cumsr, reconnaissez que si
l’ami de vos âmes vous a donné son esprit, comme le
‘) L’aigle, dans le sens favorable, signifie les connaissances
spirituelles, telles que les auront ceux de la Nouvelle
Église. Mais dans le passage de Saint-Mathieu, 24, 28.,
cet emblème est pris en mauvaise part ( Apoc. expl.
739.); Corps mort, ou chair corrompue, signifie l’intime de
la doctrine, ou la dévise , d’une église. (Arc. cœl., 5900.
6155.) ‘
_254_
seul vrai conducteur vers le royaume de vérité et de
justice qui est la vie éternelle, c’est une pure grâce,
une pure miséricorde, une bonté pure de sa part. 0
mes petits enfants, cet écoulement de Dieu Jéhovah
Zébaoth, cet écoulement vivifiant du rocher qui est le
CHRIST, et les bénédictions dont il vous inonde, doivent
être pour vous le gage de l’amour paternel le plus
tendre et le plus profond, le cachet de l’amitié frater
nelle la plus inaltérable, que le SEIGNEUR a voulu vous
donner, afin que vous puissiez distinguer ce qui est
droit, et comprendre ce qui est convenable pour un
imitateur de CHRIST, pour un fidèle serviteur du seul
roi véritable. Enfants d’un Père plein de grâces et de
bontés, obtenez tous les jours de Lui, qu’ll vous con
serve ce conducteur céleste; car, en vérité, c’est dans
ces derniers jours qu’il s’agit de ne pas broncher. Exa
minez tout, et retenez ce qui est bon. Que le SEIGNEUR,
mes bien- aimés, vous accorde pour cela la grâce, la
sagesse, la lumière et la force d’enhant. Mes petits en
fants , demeurez avec JE sus; vous serez attachés , il est
vrai, à un Etre méconnu et méprisé par le grand
. nombre ,
Mais voici votre consolation;
Cet attachement inaltérable
Vous conduira dans le royaume,
Où JEsus est la vie, la joie;
Vous serez transférés dans Sion ,
Dans les tabemacles éternels,
Où vous chanterez vos triomphes,
Tandis que le monde se lamentera.
Amen.
a Lisez cqla maintenant pour votre édification mu
...255
tuelle, puis vous y ajouterez quelques perles des tré
sors de la parole de Dieu. "
Mme Lineweg me dit qu’avant mon arrivée elle
s’était entretenue avec sa famille des progrès de la
secte des Saint-Simoniens, et qu’elle croyait que ce
discours avait quelque rapport à cela. Je lui fis obser
ver que cette secte était près de sa fin. Là - dessus Li
neweg dit encore: I Il n’en sera bientôt plus question,
quelque bruit qu’on en ait fait. '
Les perles que nous reçûmes jettèrent encore un
brillant éclat sur tout ce qui avait été dit. Pour moi,
qui étais très -souvent tourmenté de ma pusillanimité
en pensant aux devoirs que j’aurais à remplir, j’eus
Isaïe 41 , 14. ") Les autres eurent : Rom. 10, 15;
Psaumes 46, 4 -— 6; 57, 18 —-— 19; Luc. 22, 24;
Hébr. 9 , 24.
Du 17 Décembre 1855.
Nous nous entretenions ce soir des merveilles de
la nature; et nous étions ravis à la vue de la grandeur
et de la sagesse du Créateur. Nous parlions en particu
lier de l’étonnante économie d’une ruche d’abeilles: en
ce moment le bienheureux vint aussi, et réjouit nos
cœurs par des vérités plus douces encore. Voici ce
qu’il me dicta:
c Sois béni, mon bien- cher, et sois le bien-venu
au milieu des miens, comme si mille devoirs t’y appe
laient. Que le Tout-Puissant te rende au centuple pour
‘) Ne crains point, vermisseau de Jacob , pauvre petit trou
peau d’Israël. Je viens à ton aide, dit l’Eternel, et ton
Rédempteur est le Saint d’Israël.
-——256 ——
le zèle, la piété et la fidélité avec laquelle tu t’es ae
quitté de l’œuvre de charité que tu as remplie auprès
de ma chère femme. Cette œuvre a été richement bénie
en elle par l’assistance du SEIGNEUR. Apprends, mon
cher ami, que bien qu’il y ait une interruption dans
cette œuvre de charité, dans sa bonté notre SEIGNEUR
et notre Dieu, te conservera toujours la même faculté
de soulager dans l’occasion les personnes sonfl'rantes.
Apprends en passant un phénomène merveilleux: si
cet enfant qui me sert ici d’organe, était dans le cas
d’avoir les mains imposées, ou de recevoir des frictions
comme ma femme, elle s’endormirait sous tes mains;
en lui tenant la main seulement cinq minutes entre les
tiennes , elle s’endormirait encore (et son esprit alors
serait ouvert pour le monde spirituel); c’est un phéno
mène surprenant, mon ami, mais en même tems bien
majestueux. Il y a dans tout cela une action, une force
divine. En vérité Dieu fait pour les hommes au-delà de
ce qu’ils lui demandent, au- delà de ce qu’ils peuvent
comprendre.
« Encore une fois, mille bénédictions pour l’œuvre
de charité que tu as accomplie à l’égard de ma chère
femme. Je prie Celui de qui provient toute grâce de
t’accompagner toujours, et de t’accorder incessamment
des dons plus précieux: car il faut que tu saches, mon
bien-cher, que tu portes le ciel et la terre en toi. Toute
la création est enfouie dans l’être intime de chaque
homme *). Ah! si tu pouvais voir les couches des plus
belles fleurs , qu’ofl'rent les atômes de ton sang! quelles
‘) Il en faut absolument revenir au microc0smc des anciens.
Note du Trad.
-- 257 —
plantes, quels fruits! Et ce qui est plus étonnant en
core ; chez une âme qui aime le SEIGNEUR, tous ces fruits,
ces fleurs, répandent un parfum exquis! et ce parfum
s’élève vers le Créateur tout-puissant, vers le Dieu
d’amour! —
c Sois aussi, mon ami, et demeure de ton côté,
unepetite abeille, capable de tirer du miel des plantes
les plus vénéneuses. Si tu es fidèle dans les petites
choses , mon frère , le Dieu grand et riche se manifestera
à toi de plus en plus; et tu monteras de clarté en clarté,
jusqu’à ce que tu puisses Le contempler Lui-même, le.
Dieu d’amour, l’incompréhensible Jéhova, qui te con
duit comme une mère conduit son enfant par les lisières.
Chère âme , oh! confie-toi à Lui entièrement, au con—
ducteur vers l’éternelle félicité, à l’architecte royal de
la ville de Sion. Sache qu’Il est incessamment occupé
à bâtir, à édifier et à former; et Il ne s’arrêtera que
quand son œuvre sera terminée en toi. -— Oui, cher
Natbanaël, ton Jésus , ton maître, Il a bâti aussi dans
la Canaan céleste une demeure pour toi. Lui -même a
préparé la place, Il a orné la couronne qui t’attend,
Il a disposé le vêtement blanc; et dans sa bonté, sa
fidélité, Il veut te retirer de la souillure du péché , et
t’attirer en Lui, et t’élever dans son ciel. -— Qu’il soit
loué éternellement celui dont la fidélité est éternelle;
Il a soin de toi comme un père, oui comme un père.
Apprends aussi d’avance, que si tu tombais malade,
pour ce cas éventuel aussi il est peurvu; ton Dieu tient
prêt le conseil et le secours nécessaire. Il m’a chargé
de t’annoncer, Lui qui ne t’oublie jamais un instant,
Il m’a chargé de t’annoncer tout ce bien par ces ton
chantes paroles : Fils , voilà ta mère, mère, voilà ton
_258_
fils! oui, mes bien-aimés, telle est l’alliance étroite que
le SEIGNEUR a établie entre vous à jamais; et ce qu’Il a
uni, ne peut jamais plus être séparé. Le SEIGNEUR soit
loué par nons tous! Tu vois, mon ami, que sous aucun
rapport tu n’es abandonné ni négligé par Lui. Comme
je te l’ai déjà dit: Il te porte sur ses mains, Il te place
sur ses épaules. Comme tu es en pays étranger, Il veut
être ton père et ta mère; et cette femme , du nombre
heureux de ses disciples , est chargée de tous les soins
à ton égard.
« Oh! mes chers enfants! qui pourra raconter
tout ce que le SEIGNEUR, la Bonté suprême, a fait pour
ceux qui l’aiment! Que de bénédictions! quelle sollici
tude! Il se conduit absolument comme s’Il ne pouvait
point se passer d’eux. Un pareil amour est sans bornes,
sans fond, inconcevable! Et même, mes très- chers,
quand il vous arrive quelquefois d’être plus mauvais,
plus faibles qu’à l’ordinaire, ne perdez point courage,
ne perdez point l’espérance. Il sera toujours le même à
votre égard; et comme il vous a déjà été dit, autant
Il haït le péché , autant Il aime les pécheurs. C’est pour
les pécheurs qu’Il est venu; c’est pour eux qu’Il a
quitté le sein du Père. Il a choisi la honte pour vous
préparer la joie; Il voulut être méprisé afin que vous
fassiez honorés; Il s’est laissé prendre prisonnier, afin
que vous devinssiez libres; Il s’est laissé frapper, en
sanglanter, afin de vous donner le baiser d’amour et de
paix de la part du Père. Il permit qu’on lui crachât au
visage, afin que vous devinssiez plus dignes d’amour;
Il porta le manteau de pourpre, afin que vous fassiez
ornés du vêtement du salut; Il eut faim, afin que vous
fassiez rassasiés; Il eut soif, afin que vous ne soufris
_259_.
siez plus d’aucune chaleur; Il mourut sur la croix,
afin de vous procurer le repos. Il fut élevé entre le ciel
et la terre, afin de vous faire tous rois et prêtres; Il
s’est laissé tourmenter de mille épines, afin de vous
couronner de lumière, de vous entourer de l’iris de la
gloire; Il se fit placer dans le tombeau, afin de vous
préparer une glorieuse ascension vers le ciel; Il res
suscita pour vous introduire dans son royaume, dans
la vie éternelle. Tel est, mon ami, tel est celui qui
reste avec toi tous les jours, qui te soutient, qui te
garde , qui te défend , et qui fait prospérer tes faibles
efforts. Béjouis-toi donc, chante ta délivrance, et que
tous tes os tressaillent de joie. Ce que je viens de te
dire, le tems viendra que tu le verras.
Que ce Dieu de grâce entièrement te soulage
Du poids de ton péché;
Jette des cris de joie, de ce que déjà ici bas ,
Tu trouvas miséricorde:
Il est à toi, tu es à Lui;
Peux-tu encore te plaindre?
Etouffe, étouffe tous tes soupirs!
«Va maintenant en paix avec cette bénédiction;
continue à prier, à solliciter, à intercéder , et à expri—
mer ta reconnaissance. Porte tes yeux sur l’étoilete conduit, sur la parole de Dieu; ne la perds jamais
de vue; et tu arriveras infailliblement au vrai but, au
but éternel que t’a proposé Celui qui est mort d’amour
pour toi. Amen. »
J’étais extrêmement touché: avec quelle bonté,
quelle fidélité, m’écriai -je, ce SEIGNEUR accomplit en
moi sa promesse: Celui qui abandonne son père ou sa
mère p0ur moi, en recevra cent fois davantage!
Mme Lineweg, que depuis longtems j’aimais et
respectais comme une mère , dit lia-dessus: Je n’aurais
pas dû m’attendre à un pareil bonheur. J’étais humilié
en présence de si nobles sentiments. « Oh! s’écria Li
neweg, l’amour en CHRIST est inventif: il a les clefs de
tous les trésors.
« Continue, mon bien-cher, dans ton intercession,
surtout pour ton ami; elle a déjà porté d’excellents
fruits. Il croît, le feu de l’amour du SAUVEUR s’enflamme
en lui peu à peu; c’est pour cela que tu t’es senti
échaufl'er en sa présence. ' ’
Pour l’intelligence de cette réflexion il faut savoir
que quelques jours auparavant, étant à moitié endormi,
un être était sauté dans l’obscurité sur mon lit et s’était
appuyé sur mon épaule. Je pensais que ce pouvait être
le chat de la maison. Je voulus le chasser, mais me
trouvai pendant plusieurs secondes comme paralysé;
enfin je me réveillai tout-à-fait, et ne trouvai rien; seu
lement je ressentais une chaleur douce au cou , à l’en
droit où l’animal m’avait touché. — Déjà la veille j’avais
raconté ce singulier accident à Mme Lineweg, et le soir
son mari lui avait dit, qu’en effet cet être n’avait été
autre que l’âme de mon ami, qui m’avait embrassé, et
avait voulu me remercier d’avance des prières que j’al
lais faire le matin pour lui. Si cette apparition était pro
venu d’un être méchant, avait -il ajouté, comme il l’a
cru, il eût ressenti du'froid au même endroit. — Au—
jourd’hui donc je fis moi—même la réflexion, que je dus
être étonné que mon ami apparût sous une pareille
forme. — Cela est fort naturel de ta part, me dit Li
neweg. —
« L’amour peut faire des miracles; il peut retirer
—241 -—
des âmes de l’enfer, il peut les arracher aux ténèbres .
et les transporter dans la lumière! Et qu’est-ce que la
prière pour un autre , si ce n’est de l’amour? — Ap
prends que ton ami est devenu déjà beaucoup plus
petit “) qu’il n’était sur terre.
Moi. Depuis quelque tems je puis penser à lui avec
plus de plaisir.
Lui. Cela est dans l’ordre; quand un membre est
heureux, l’autre doit s’en réjouir.
« 0 mes bien-aimés, en ce moment les Esprits des
airs et des eaux font un bruit horrible.
Elle. Serait - ce pour cela qu’il arrive tant de dés
astres causés par les eaux et les orages? (Plusieurs
personnes venaient de se noyer coup sur coup dans la
ville; des .contrées avaient été submergées; et les ga
zettes étaient remplies de malheurs causés par les tem
pêtes et les inondations dans différents pays.)
Lui. Hélas! tous les éléments exigent leurs victi
mes! Ce ne sont que les suites de la chûte toujours
plus profonde du genre humain. Oh! si les oreilles de
votre homme-esprit pouvaient être ouvertes —— mais
vous ne l’endureriez pas — vous entendriez les horri
bles grincements de dents de ces infortunés. Un froid
glacial les tourmente; le frisson de la fièvre n’est rien
en comparaison. Ils cherchent la mort et ne peuvent la
trouver! Ce sont des cris, des lamentations! les airs
ne retentissent que de plaintes déchirantes! Et à chaque
minute ils attendent le moment de leur jugement et de
leur condamnation. Ceux qui ont»idôlatré leur corps
‘) Devenir plus petit, c’est devenir plus humble.
Note du Trad.
16
—242—
sur la terre, sont aussi très à plaindre; ils sont rongés
de vermine , et toutefois n’en peuvent mourir : Tu l’as
ainsi voulu, s’écrient-ils avec désespoir! -— O que bien—
heureux est celui qui s’abandonne de bonne heure au
SEIGNEUR, et se laisse sanctifier par Lui; car rien de
souillé ni d’impur n’entre dans son royaume. Mais celui
qui se jette dans les bras de Jésus, le SAUVEUR le guérit
avec amour, et sa guérison est complète. Soumettez
vons donc, de plus en plus, mes bien-aimés, à ce trai
tement de l’amour du SEIGNEUR; bien que les remèdes
paraissent quelquefois amers, et que la chair et le sang
en murmurent: oh! soumettez-vous, suivez Jésus d’abord
par le désert, puis à la croix; vous arriverez en Ca
naan , vous arriverez au pied de son trône. Amen.
« J’avais un bien grand désir, mon cher ami, de
t’entretenir.
Moi. Je me sentais aussi le cœur bien plein toute
la journée, et il me semblait que je pouvais m’attendre
à quelque manifestation remarquable.
Lui. Je te le répète encore , mon bien-cher; tu es
le bien-venu aujourd’hui au milieu des miens , comme
si tu avais mille devoirs à leur rendre. Celui qui con
naît et aime le SEIGNEUR sent un profond besoin de
s’entretenir de Lui avec ses frères, et de s’édifier au
souvenir de son amour. Jouis donc encore en attendant
de la conversation de ma femme, ta bonne mère, le
plus souvent que tu pourras. Amen. '
Du 19 Décembre 1855.
Dans ma visite d’aujourd’hui chez Mme Lineweg,
je fus accompagné de Chandani. Le chemin de notre
-245—
quartier chez elle, nous conduisait par la grande place,
au milieu de laquelle se remarque encore l’endroit où
avait été érigée la guillotine, sur laquelle un homme
de sang, l’écelésiastique Éloi Schneider, avait déployé
dans le tems ses fureurs infernales. Nous parlions de
ces tems affreux en entrant dans la maison de Lineweg;
la conversation de notre petite société roula sur le même
sujet, et enfin nous vînmes à parler des destinées de la
France en général, et de l’avenir présumé de ce beau
pays. Nous pensâmes presque tous que ce serait là que
s’agiteraient les dernières grandes questions touchant
le bonheur du genre humain; mais en même tems nous
eûmes à ce sujet des données plus solides que crut de
voir y ajouter notre ami immortel:
«Venez , brebis chéries, et placez-vous aux pieds
percés de votre Berger divin. Écoutez les révélations
du SEIGNEUR tout-puissant , qui a été, qui est et qui va
venir; de celui qui se hâte en‘ ce moment d’arriver avec
tous ses saints entourés de lumière, afin de donner des
bornes au débordement de l’iniquité. Remarquez, mes
bien-aimés, comment cette iniquité fait des progrès, et
comment en même tems la charité se refroidit. Les
hommes deviennent partout des tigres, et se jettent sur
ceux qui n’approuvent pas leurs horreurs. Rappelez
vous, en voyant de ces tigres , de ces monstres, de ces
chiens altérés de sang, de cette écume de l’enfer, que
vous vivez à l’époque qui est désignée sous le nom de
l’époque de l’abomination. Et quel doit être le peuple”
contre lequel le SEIGNEUR est forcé d’envoyer de pareilles
verges, de pareils fléaux! Ce ne peut être qu’Israël
impénitent, Israël s’attachant toujours d’autant plus au
veau d’or, que le SEIGNEUR se montre plus indulgent et
16‘
-—-244—
plus magnifique. Israël a abandonné le vrai Dieu, et
s’est fait des idôles que son cœur ne peut laisser;
Israël veut être repris, il veut être châtié, et frappé
de verges.
« Oh! mes bien- aimés , ces verges là ne peuvent
point être prises‘ parmi ce qui est pur et noble. Le SEI
GNEUR prend ce qui est endurci; et après que sa sainteté
en a fait un usage convenable, sa justice éternelle et
incorruptible jette l’instrument au feu éternel. Tous
ces chiens altérés de sang jettent maintenant dans le
monde des esprits, des hurlements efl'royables! car vous
apprendrez avec horreur, quejournellement, ainsi qu’on
s’exprime chez vous, ces infortunés sont déchirés par
la plupart de leurs victimes, qui, sous des formes ana
logues, leur rongent les chairs jusqu’aux os. Maudit
sois—tu! tu nous a abrégé le tems de grâce! peut-être
en vivant plus longtems nous aurions fait pénitence!
tels sont les reproches que ces hurlements font enten—
dre! -— C’est là , mes bien-aimés , ce ver qui-ne meurt
point, . ce feu qui ne s’éteint point. Quand un ange de
paix s’approche de ces monstres, même de loin, leurs
tourments deviennent tels qu’ils s’écrient pleins de rage
et de désespoir: Retire-toi , retire -toi , messager bril
lant du Dieu de miséricorde; sa bonté nous tue! —
En vérité, mes amis, les expressions me manquent
pour vous faire comprendre ce que souffrent ces infor—
tunés : leur demeure est du feu, et leur société sont les
serpents et les vipères, leur chant est le grincement
des dents, et leurs jouissances, c’est d’être exposés
incessamment aux insultes et aux ris moqueurs des Sa
tans de l’enfer! -Quand ils font quelquefois un efl'ort
pour remonter, alors l’enfer les tient chargés de
-— 245»—
ses chaînes , les attire six fois plus profondémentdans
l’abîme. — Ce que je vous dis ici, en vérité, n’est
qu’une partie de ce que j’ai vu de mes yeux: voilà le
sort des méchants.
« Toutefois , mes bien-aimés, les tems , dans les
quels vous vivez, deviendront encore malheureux de
plus en plus; la méchanceté croît d’une manière éton
nante; la charité est presque éteinte; on trouve à peine
des traces de fidélité; et quant à la foi, elle rappelle
la femme de l’Evangile cherchant son denier perdu, et
ayant besoin d’une lumière. Les transactions du com
merce ne sont que mensonge et fourberie. Il semblerait
que les enfants du SEIGNEUR dussent succomber honteu
sement, et céder la victoire aux suppôts de Satan! Les
sujets du Roi des rois sont opprimés, tourmentés, per
sécutés , chassés , écrasés! Le juste a vraiment beaucoup
à endurer en ces jours déplorables; mais remercie-z le
SEIGNEUR avec moi, mes bien- aimés; car ce Dieu éter
nellement fidèle le délivrera de tous ses maux. Le nombre
des méchants est grand, celui des justes est chétif;
mais celui qui marche à la tête du petit nombre est le
héros qui leur crie: Ne craignez pas, nous ne laissons
pas d’être encore les plus nombreux.
( Si donc , mes bien -aimés , vous voyez de vos
yeux, que le ciel s’obscureit de plus en plus , que les
nuées orageuses s’entassent: ne vous troublez point;
vous savez que le Dieu du tonnerre est votre Père, que
le maître de la foudre est votre Ami. Rappelez - vous ,
que le Jugement doit commencer par la maison de
Dieu; que la société du SEIGNEUR doit être pour un tems
la société méprisée; mais, qu’au moment arrêté, le
Chef de cette société l’élevera en gloire. 0 mes bien
—246 —
aimés! réjouissez-vous d’être du nombre de ces mépri—
sés; ne supportez pas seulement vos peines , mais sup
portez-les avec patience, avec joie. Ce n’est point la
contrainte, c’est la bonne volonté qui doit vous conduire.
Tout vous sera facile avec le SEIGNEUR. Il faut absolu
ment que la maison de Dieu passe par cette épreuve du
feu : si elle le fait avec une entière résignation, avec
une pleine volonté, son triomphe sera aussi glorieux
qu’il est assuré.
' a 0 mes enfants! il se pourrait que vous eussiez
encore à supporter des épreuves plus rudes que toutes
celles qui vous ont atteints. Écoutez la voix du SEIGNEUR,
du grand Triomphateur, qui dit : Celui qui n’est point
avec moi est contre moi; celui qui n’amasse pas avec
moi, disperse (et sera dispersé): cette voix est opposée
à cette autre du prince des ténèbres : Voie , toutes ces
choses je te les donne, si tu tombes à genoux et m’a
dores. Remarquez bien, mes bien-aimés, qu’il n’y—a
plus de moyen terme: il faut être pour ou contre le
SEIGNEUR; il faut être Chrétien ou Antichrist. Plus que
jamais il faut veiller et prier, plus que jamais il faut
acheter de l’huile pour la lampe, et de l’onguent pour
les yeux. Tâchez , enfants , de vous remplir du Saint
Esprit; par lui seul, vous pouvez voir clair et marcher
dans la lumière; lui seul vous instruire sur tout ce que
vous aVez'à faire dans ces malheureux jours. Le com
bat le plus terrible , mais aussi le dernier, s’approche;
il faudra que les vrais chrétiens sachent renoncer aux
honneurs, à la considération , aux emplois, aux biens,
et même peut-être à la vie; et toutefois la joie doit rè
guer dans la cité de Dieu , car son Dieu est au milieu
d’elle. Ne craignez rien , mes bien - aimés , quand bien
—247 —
même Satan , par ses suppôts , parviendrait à faire ré
pandre votre sang; ne craignez rien , vous dis-je; car,
contre sa volonté, il vous conduira ainsi au sein de
votre Dieu. Heureux celui qui appartient à Jésus et que
Jésus aime, son Dieu lui sera en aide, et cela d’une
manière admirable. Et bien que vous marchiez encore
un tems par la vallée obscure (car le soir est arrivé;
minuit même s’approche *); consolez-vous , le Dieu de
Jacob est votre Dieu: et ce sera précisément à cette
affreuse époque que le Dieu de l’éternelle miséricorde
fera éclater sa gloire d’une manière ineffable sur ceux
qui lui appartiennent. Le lieu de refuge pour cacher les
fidèles du SEIGNEUR est déjà préparé; il leur sera dit
quand et comment ils doivent fuir; le Dieu Tout-puis
sant est en même tems immuable: aujourd’hui, comme
au tems de Joseph, il envoie son ange, et les siens
sont avertis dans le sommeil.
a Je ne vous dis pas tout cela, mes bien-aimés ,
pour vous inquiéter, ni vous donner de la crainte; le
SEIGNEUR m’a chargé de vous le dire , et j’aurai encore
autre chose plus tard à vous communiquer: soyez seu
lement fidèles, et faites valoir ce que vous avez reçu,
alors vous en recevrez davantage. Oh! votre SAUVEUR,
Il veut devenir et demeurer votre lumière sur la route
qui conduit à la patrie. Tenez-vous toujours fermement
attachés à la parole de Dieu; ne vous laissez point en
lever un iota de ce livre des livres. Si vous entendez
qu’on en torture le sens, l’expliquant d’une manière
humaine , détournez - vous , et allez faire cette prière:
‘) Le soir signifie la fin de l’église (Arc. cœl. , 2525.); minuit
signifie le dernier moment. (Ibid. , 6000.)
_24s_
SEIGNEUR envoie ton esprit; SEIGNEUR ton règne vienne!
Oui,viens bientôt, SEIGNEUR JEsus! —- Le retard, mes
bien-aimés, que le SEIGNEUR a apporté à venir, ne vient
absolument que de sa bonté, de sa longanimité. Il y a
longtems que JEnovxn -DIEU a étendu. le bras de sa co
lère ; et toujours le sang du Fils a crié: Père, patiente
encore cette année. Maintenant néanmoins la mesure se
remplit, et de tous côtés on entend ces cris et ces san
glots entremêlés de larmes amères : Viens enfin , SEI—
GNEUR JÉSUS, viens! et de milliers de milliers d’âmes
sous l’autel ‘), crient au SEIGNEUR à haute voix: Jusqu’à
quand , SEIGNEUR, ne juges-tu pas , et ne venges-tu pas
notre sang? Mais , je le répète, mes bien-aimés, le re
tard maintenant n’est plus possible, et le moment dé
cisif est là. Bientôt, bientôt, mes chers , par la grâce
de Dieu et la miséricorde de Jésus, nous pourrons nous
embrasser de nouveau. Patientez encore un peu: l’Epoux
') Ces mots de l’Apoealypse , chap. 6 , vers. 9 : Et je vis sans
l’autel les âmes de ceux qui avaient été mis à mort à cause
de la Parole de Dieu, et à cause du témoignage qu’ils
avaient, signifient ceux qui sont hais, insultés et repoussés
par les méchants. L’autel signifie l’adoration du SEIGNEUR
par l’attrait de l’amour. Par les âmes de ceux qui ont été
tués, il ne faut pas précisément entendre ici les martyrs;
mais seulement ceux qui sont hais. A cause de la parole de
Dieu et du témoignage qu’ils avaient, signifie, la cause d’une
vie conforme aux vérités de l’Ecriture, et de la foi a la di—
vine humanité du SEIGNEUR. Dans le ciel nul ne reçoit le
témoignage, si ce n’est ceux qui reconnaissent que l’huma
nité dans le SEIGNEUR est divine; car c’est le SEIGNEUR qui
témoigne, et charge les anges de témoigner. C’est pour
quoi il est dit: le témoignage de JÉSUS est l’esprit de pro
phétie. (Apoc. rêvé]. 525.)
—249—
se hâte, son rival sera couvert de honte, et Il glorifiera
son épouse éternellement.
u Tous les trônes chancellent; mais il viendra
Quelqu’un qui les gouvernera avec un sceptre de fer;
des milliers de milliers s’attacheront à lui; mais il ne
les reconnaîtra comme siens, que quand ils auront reçu
l’empreinte de son image {leur main et leur front de
vront témoigner à qui ils appartiennent. Et celui qui ne
voudra point consentir à recevoir cette marque, il le
regardera comme un adversaire, comme un ennemi, et
il le poursuivra par son armée. L’ambitieux obtiendra
par lui des honneurs , l’avare des richesses, l’orgueil
leux de la considération, le vain de la pompe, et l’homme
sensuel des plaisirs. Et toutefois, mes bien-aimés, tou
tefois il gouvernera avec un sceptre de fer : son règne
sera la mort temporelle de'ses ennemis, et la mort éter
nelle de ses adhérents. Cependant le Dieu éternellement
fidèle mettra enfin un terme à ce désordre : soudain il
apparaîtra avec ses armées, il précipitera tous les mé
chants dans l’abîme , où ils seront liés. Quant à sa pe
tite troupe, il l’élevera en triomphe avec Lui. 0 quelle
joyeuse ascension, mes bien-aimés, attend ceux qui
auront été fidèles jusqu’à la fin! Soyez assurés d’une
vérité , c’est que si vous souffrez beaucoup, vous rece
vrez aussi de grandes forces; et Celui qui connaît le
peu de ressources de la nature humaine , ne permettra
pas que vous soyez tentés au-delà de ces forces. Il con
duit toujours les choses de manière que la tentation puisse
être surmontée; car Il ne veut que vous aider à rem
porter le prix de votre foi, savoir le salut de vos âmes.
«Ainsi préparés, mes amis, les orages peuvent
donc venir éclater sur vous dans le courant de l’année
—250—
prochaine : vous ne craindrez pas. Ce Dieu tout—puissant,
à qui tout est soumis, sur un seul signe duquel des lé
gions tombent à ses pieds, sera à votre tête. Il est
fidèle; et celui qui bâtit sur Lui, ne bâtit pas sur le
sable. Oui, mes bien-aimés, le ciel et la terre vont
passer; les choses anciennes vont disparaître et tout va
être renouvelé. Dieu seul, et sa volonté seront éternels.
C’est avec une grande majesté que le Tout-puissant se
prépare; et comme je vous l’ai déjà dit, sa marche est
lente; mais il viendra enfin comme l’éclair , comme le
voleur au milieu de la nuit. Oh! mes bien-chers, soyez
donc assidus à la prière, exacts à veiller, afin que
quand Il apparaîtra, le grand Rémunérateur, vous puis
siez prendre part à son éternelle triomphe, et recevoir
la récompense sans fin de vos souffrances et de vos
travaux. .
Si vous vous laissez guider par le SEIGNEUR ,
Avec lui vous triompherez;
Patientez encore un moment ,
Il vous délivrera du joug
Qui aujourd’hui vous oppresse.
Toutefois , enfants , aimez l’abaissement:
Et Dieu vous élevera en son tems.
Vous vous tiendrez a sa droite;
Jésus fera cette merveille. Amen.
c Plus , mes bien-aimés , les tems seront affreux
au déhors, plus sera grande la gloire avec laquelle le
SEIGNEUR se manifestera au dedans, au milieu de ses
enfants. Et quand quelques-uns s’écriaient: Mon père,
ma mère, l’univers entier m’a abandonné , une voix du
ciel leur répondrait: mais le SEIGNEUR t’a recueilli. Croyez
donc, et préparez au SEIGNEUR le plaisir de vous intro
-—251-—
duire dans son sanctuaire pour l’y contempler face à
faceaAmen.
c Le SEIGNEUR a été avec vous , Il est avec vous;
’Il veuille aussi demeurer avec vous! ' -—‘I“
Du 20 Décembre 1855.
Aujourd’hui aussi nous fûmes réjouis par une vi
site céleste, et encouragés par des paroles de consola
tion et de conseil. Notre immortel ami nous dit ce
qui suit:
I Il est inconcevable, mes amis, quelle faim se
manifeste chez les païens pour la parole de Dieu; et
avec quelle ardeur ils la reçoivent. Aujourd’hui même
il est arrivé qu’une famille païenne a fait près de cin
quante lieues pour entendre annoncer la bonne nou—
velle. O combien ils font de honte aux prétendus chré
tiens de nos jours! Ceux-ci ont le trésor de la vie au
milieu d’eux; mais au lieu de recevoir dans leurs cœurs
ce doux rayon de miel, ils le foulent aux pieds. Voilà
pourquoi aussi le chandelier leur sera enlevé, et trans
porté aux nations infidèles. Il y aura parmi les chrétiens
une telle sécheresse, et une telle disette, qu’il leur
faudra enfin faire plusieurs lieues pour trouver un seul
grain, un seul petit grain de la parole de vérité. Oui,
un grand malheur menace la chrétienté. Cette ville
même, où vous demeurez, eût déjà été visitée — car
elle est une Sodome comme les autres —si le SEIGNEUR
n’y possédait encore un certain nombre de justes. Déjà
plusieurs fois Il y a envoyé des messagers de paix; et tou
jours il s’y est trouvé encore quelques âmesjustes, bien
qu’en petit nombre, ont détourné son bras vengeur.
—- 252—
. Ah! l’ingratitude de ces chrétiens de nom , en
vers leur éternel Bienfaiteur, est inexprimable. C’est
bien d’eux que le SEIGNEUR peut dire: Celui qui mange
le pain de ma table, a levé le pied contre moi. Cette
ingratitude cause au SAUVEUR ses douleurs les plus cui
santes. Les malheureux! ils font de nouveau saigner
ses plaies; ils Lui crachent de nouveau à la figure! et
si aujourd’hui ils crient : béni soit celui qui vient
au nom du SEIGNEUR; ils crient demain : crucifie , cru
cifie - le.
c 0 mes bien-aimés! rapprochez-v0us d’autant
plus, serrez-vous par les liens de la charité, et de
venez une petite société entièrement adonnée au SEI—
GNEUR: vous ferez couler ainsi un baume doux et rafraî
chissant sur ses plaies brûlantes. Aimez le SEIGNEUR en
observant ses commandements; car ses commandements
ne sont point difficiles. Lui-même le dit: Mon joug est
doux et mon fardeau léger. Oh Dieu! si vous saviez
comme JEsus enfant est bon et aimable! Il demande à
chacun d’entre vous : Que veux-tu que je fasse pour
toi? — 0 mes bien-chers! faites donc en sorte que
v0us ayez aussi quelque chose à Lui répondre. Exami
nez—vous ces jours-ci, pour que vous sachiez ce que
vous devrez lui dire; et vous éprouverez le secours du
SEIGNEUR. '
Ici il récita une prière fervente; puis il nous fit
donner la main les uns aux autres, ce qu’il faisait quel
quefois dans ses assemblées terrestres, et il dit:
- Nous tous ici assemblés
Nous nous donnons la main,
Te jurant au nom de ton martyr,
SEIGNEUR, une éternelle fidélité.
— 155-—
Pour n0us prouver que notre zèle
-' Est pour Toi une offrande agréable ,
Dis , SEIGNEUR , ainsi soit - il,
de vous donne ma paix! Amen.»
Du 22 Décembre 1855.
(Quatrième Dimanche de l’Avent.)
Nous causions aujourd’hui du sermon plein de
force et d’onction que le ministre Baether avait pro
noncé devant une nombreuse assemblée, sur les mal
heurs provenant de l’ignorance de Jésus et de sa doc
trine, dans laquelle la génération actuelle est plongée;
et nous chantions de tems en tems quelques couplets
de cantiques, quand quelques instants avant le souper
Arma fut ravie en esprit, et la voix connue dit:
« Votre père de famille est ici. -—- Je viens sim
plement vous dire, mes bien-aimés, que je vous bénirai
encore aujourd’hui; mais prenez d’abord votre nourri
ture corporelle: Dieu est le Dieu de l’ordre: la nourri
ture plus précieuse viendra après.
«1 Beaucoup de bienheureux se sont unis à vos
chants.
Moi. Je m’en suis bien aperçu, je ressentais quel
quefois un saint frissonnement.
Lui. J’étais si près de toi que tu aurais pu me sai
sir la main. Aussi dans le temple aujourd’hui j’étais
présent avec huit autres bienheureux. Si les yeux de
votre homme-esprit avaient été ouverts, vous nous auriez
vus. Nous avons porté le sermon du fidèle serviteur
dans le sein du SEIGNEUR , et Lui -même l’a béni et y a
appliqué un baiser de paix. —- La femme du ministre
était aussi présente au temple.
—254-—
Moi. (A Mme Lineweg.) C’était sans doute, sur
terre , une bonne chrétienne?
Elle. Oui, sa mort a mis Raether‘à une grande
épreuve; il l’aimait extraordinairement.
Lui. L’amour naturel qu’il avait pour elle, a été
surmonté, et il a été changé par le SEIGNEUR en un sur
croît d’amour spirituel.
: Je puis souvent entendre maintenant des con
certs de jeunes vierges (pendant sa vie Lineweg avait
beaucoup cherché à en former dans ses assemblées);
mais ce qu’il y a d’admirable, c’est qu’ici chaque vierge
chante son hymne particulier, et pourtant tous ces
hymnes réunis forment une seule harmonie dans le
SEIGNEUR. Chacune a été conduite par Lui sur une route
difi‘érente; mais toutes ensemble forment ici un concert
de louanges.
c (A Mlle Palmettas): Toi aussi, ma chère, le tems
s’approche que tu distingueras les nuances les plus lé
gères du son.
Moi. (A Mme Lineweg.) : Serait-il question de sa
mort prochaine , ou d’une guérison dans le tems?
Elle. Sans doute d’une guérison naturelle.
Lui. Non, non; c’est pour le tems que le sourd
entendra et que le boiteux sautera comme le cerf. (A
Mlle Palmettas) : Tu es privée de bien des choses; tu
n’entends pas beaucoup de ce qui est dit: mais console
toi; et sois seulement fidèle à faire valoir le peu que
le SEIGNEUR veut que tu apprennes: Il n’en demande
pas davantage. C’est la fidélité seule qu’Il récompense.
Il dit Lui-même: Bon serviteur, prends courage, car tu
as été fidèle dans les petites choses. D
-255
Il fit ensuite réveiller Anna, et nous nous mimes
à table. Après le souper il revint et dit:
« Votre père de famille est de nouveau présent.
N’est-ce pas, ma chère âme, tu ne trouves pas mauvais
que mon bon secrétaire reprenne sa plume? 1' —
Tandis que je m’apprêtais, il dit à Mlle Palmettas
qui souffrait d’un mal (1’ yeux: Tu pourras te laver ma
tin et soir les yeux malades avec l’eau préparée par
notre ami; cela te fera du bien. Quoique je ne sois plus
matériellement avec vous, je m’occupe cependant en
core en père de tout ce qui peut vous être salutaire ou
nuisible. »
J’étais prêt; et il me fut permis de recueillir ce
qui suit: '
1 Mes bien-aimés en Dieu notre unique maître!
Enfants bénis du Père universel, amis, frères de notre
Roi, Temples de son Saint-Esprit! Que le SEIGNEUR
soit avec vous, et qu’Il demeure avec vous à toujours
et à jamais. Amen. (Nous voyant touchés , il nous dit
avec amitié : « N’est ce pas , c’est aussi là une saluta
tion angélique? »)
c Mes chers enfants , louez avec tous les bienheu
reux le nom de notre grand Dieu, du SAUVEUR Jénovxn,
qui vous délivre tous de tout mal. Chers rachetés! vous
ne l’avez pas été au prix de l’or ni de l’argent; mais
au prix du sang d’un innocent petit agneau , qui vous
conduit maintenant près des eaux vives, et qui vous
cenduira plus tard dans les gras pâturages pour l’éter
nité. Cet agneau, mes bien-aimés , est à la fois brebis
et berger. Et ce berger des bergers a soin des troupeaux
de ceux de ses subordonnés qui ont été appelés àBeth—
léhem. Ces hommes simples de Bethléhem, maintenant
—-256—
princes de la cour céleste et éternelle, dont parle
l’Evangile , avaient véritablement la foi des enfants. Si
JÉHOVAH nous envoie vers Bethléhem, dirent-ils, Il
saura bien en attendant avoir soin de nos troupeaux.
Ils laissèrent tout, mes bien-aimés, ils abandonnèrent
tout pour courir contempler leur SEIGNEUR et leur Dieu,
et l’adorer avec simplicité de cœur. Oh! quelle confiance
d’enfant, quel abandon filial, de croire si vite que le
Dieu puissant de majesté soit né enfant dans la dernière
pauvreté, et soit couché dans une crèche , où se place
d’ordinaire la nourriture des animaux! 0 mes amis!
dites-moi, où trouve-bon une pareille foi sur la terre
de nos jours? Les vains ornements, la pompe exté
rieure , ont seuls du prix à nos yeux. Mais je vous le
demande, à qui était-il plus facile de reconnaître la
divinité ainsi abaissée : est- ce aux hommes’ qui virent
le roi dans la crèche ou aux chrétiens du XIX. siècle?‘)
Assurément les chrétiens d’aujourd’hui sont plus avan—”
tagés que les anciens sous ce rapport; car ils peuvent
se représenter JEsus-Cnmsr comme triomphateur de la
mort, assis comme roi des rois sur le trône de JÉHOVAH,
et dont la contreapparition a changé l’univers; tandis
que les anciens n’apercevaient le MESSIE promis qu’au
sein d’une pauvreté extrême, n’ayant où reposer sa
tête. Et pourtant, il faut le dire à la honte des chré
tiens de nos jours, plusieurs d’entre eux crurent sans
hésiter, qu’ils voyaient devant eux le roi promis, et le
Libérateur d’Israël.
') Amélic éternua dans ce moment, et Lineweg s’interrompit
pour la recommander à Dieu, avec la remarque que chaque
fois que l’on éternue on peut mourir de mort subite.
257 ,—
- ôn pourrait dire, il est vrai, que les premiers
fidèles virent auSsi beaucoup de miracles que nous ne
voyons pas: mais je réponds à cela , qu’à cette époque il
y avait aussi des magiciens faisaient des choses ana—
logues, et pouvaient les dérouter. — Ah! pourquoiÿ,r
les chrétiens de nos jours n’ouvrent - ils pas les yeux? ’
ils verraient bien, s’ils voulaient, que ce seul Roi véri
table, auquel appartient l’honneur et la gloire à jamais,
opère encore au milieu d’eux des merveilles aussi éton
nantes que les anciennes; qu’Il nourrit encore aujour—
d’hui , avec un peu de grain , des millions d’individus
et t0utes les bêtes des champs? Ah! pourquoi ne trou
ve-t-Il plus de foi, Celui qui est toujours le même , et
qui sait encore guérir.les boiteux, les aveugles, les
sourds , les paralytiques, et toutes les maladies? (Bien
qu’il attache plus d’importance à la nourriture et à la
santé des âmes qu’à tout ce qui n’est que terrestre et
passager.) Tous les jours Il crie au milieu de la chré
tienté: Peux-tu croire? et tu seras guéri. Mais on ne le
voit ni ne l’entend. Le sens propre de chaque esprit,
et de tantfi’csprits différents réunis sur ce globe, cause
un bruit d’eaux si terrible, qu’on ne saurait entendre .
la douceur du mouvement intérieur, ni sentir l’haleine
du Saint-Esprit. Pauvre Israël, quand seras-tu un peu
en repos? Si tu pouvais l’être quelques instants, tu en—
tendrais bien frapper ton roi. Et alors tu Lui ouvrirais;
car qui serait assez endurci p0ur tenir alors sa porte
fermée? 0 mes bien-aimés! Les chefs des sociétés,
ceux qui devraient luire comme des flambeaux, voilà
les cœurs endurcis! voilà les sourds, les aveugles! voilà
ceux se trouvent riches et rassasiés! qu’ils sont à
plaindre! c’est à eux pourtant que s’est adressée, avant
M?
‘ F
C,—.
"’Ÿ%- v
17
-258
tous les autres, cette parole éclatante et admirable:
Aujourd’hui il vous est né un sauveur. Ce sont eux,
les bergers du troupeau, qui devraient accourir les
premiers à l’étable de Bethléhem, pour y recevoir le
,don de l’Esprit, et pouvoir ainsi préparer la nourriture
des brebis : mais voulez-vous savoir ce qui les arrête?
Ils sont trop grands, trop élevés pour entrer par la
porte si petite et si basse de l’étable de Bethléhem. Il
faut se baisser là , on se briser la tête.
« 0 mes bien- aimés! tous les jours se vérifie ce
qui est dit dans ce cantique que nous chantons souvent:
Voyez ces bergers, ah! ils ont plus d’ardeur etc. . . . .
Combien de larmes cette tiédeur des pasteurs de notre
époque a déjà contées au Prince des pasteurs! — Quel
ques âmes fidèles et bonnes s’écrieront ici : Oh! que
ne savent—ils toutes ces choses, ces pasteurs! ils seraient
bien forcés de l’aimer. Mais , mes bien - aimés , si l’un
d’entre eux le sait, tous le pourraient savoir; la source
est ouverte à tous: mais le mal est qu’encore ici il
faille se baiser; car on ne boit pas autrement, comme
vous savez, à une source qu’en se baissant. ‘) — Lors
qu’il s’agit de se baisser, comme vous pouvez le voir
tous les jours, il faut pour la plupart qu’il y ait à terre
quelque trésor qui flatte leurs yeux et leur cœur; sans
‘) Boire, dans le sens spirituel, signifie apprendre. (Apocal.
expl. 617.) — Vers ce moment Mad. Lineweg voulait me
donner une autre plume; je lui dis que je n’en avais pas en
core besoin , que j’écrivais près d’une année avec la même
plume. Lineweg dit à cette occasion que Jean dans l’île de
Patmos n’était pas mieux monté; que du reste ma manière
était celle d’un grand économe.
_259__
cette circonstance, ils passent leur chemin. Oh! que
bienheureux sont les Petits! ceux- là se baissent sans
peine : ils entrent commodément par la porte basse de
Bethléhem, et s’arrangent à leur aise près de la crèche
de l’Enfant , qui sait les élever à la dignité royale!
' Mais apprenez, mes bien-aimés, une circonstance igno
rée , c’est que le petit nouveau-né présenta avec amitié
sa petite main à chacun de ces bergers: et qu’ils senti
rent en la pressant une force et une bénédiction céleste!
Ils furent remplis du Saint - Esprit , et poussés par cet
esprit à aller publier aussitôt dans tout Bethléhem ce
qu’ils avaient vu et entendu.
« 0 mes bien - aimés! Comme tant de milliers de
chrétiens de nos jours méprisent cette grande nouvelle,
et en tournent la simplicité en dérision, unissez-vous
aux anges , unissez - vous à la petite troupe de ces mo
destes pasteurs, et réjouissez le SEIGNEUR par votre
amour. Et bien que vous soyez aussi de grandeur fort
diverse, que cela ne vous arrête pas; car, en vérité,
en présence de ce Dieu-Enfant toute grandeur humaine
disparaît; le cœur seul est pris en considération. Je
vous en conjure; resserrez les liens de votre petite so
ciété, resserrez les liens de la charité et de la perfec
tion dans le SEIGNEUR. Croissez dans la simplicité, dans
l’humilité: approchez-vous de votre Dieu, et consacrez
Lui, à Lui qui seul en est digne, esprit, âme , corps,
or , encens et myrrhe ’). Alors le Dieu - Enfant viendra
‘) L’or, l’encens et la myrrhe signifient dans le sens intérieur
l’attrait de l’amour céleste, spirituel et naturel (Apoc.
expl. 324.); ce qui correspond à celui de l’esprit, de l’âme
et du corps.
17‘
— 260—
en v0us , il prendra sa demeure en vous; et vous vous
écrierez avec Jean: Il faut que je diminue , et qu’Il
croisse. 0 enfants! aimez donc à vous faire petits, afin
que le Messie qui vient de naître , devienne grand en
vous: et soyons tous à Lui pour l’éternité. Amen.
« Mes bien - aimés, j’aurais encore mille choses à
vous dire; mais restons - en là pour aujourd’hui: bien
tôt je vous entretiendrai de nouveau. Je remercie le
SEIGNEUR avec vous de ce qu’Il me permette de le faire
si souvent. -
« Tu avais bien raison , mon ami, dans ta remar
que à Anna , que Dieu entend les cœurs plutôt que les
voix. (Anna m’avait dit dans son état de veille, qu’elle
ne concevait pas comment les bienheureux, après avoir
entendu les accords célestes des anges , pouvaient en
core trouver du goût à nos cris si peu harmonieux; et
je lui avais répondu qu’ils entendaient sans doute chan
ter nos cœurs plutôt que nos bouches.) Il faut que le
cœur monte au trône de l’Eternel avec le cantique,
sans cela on ne produit qu’un vain son se dissipe
dans les airs.
« Que le SEIGNEUR notre Dieu vous comble de
mille bénédictions , et qu’Il demeure toujours avec vous
par son infinie miséricorde. '
Du 25Décembre 1855.
J’avais passé la veille de Noël le cœur malade et
l’esprit oppressé et comme délaissé. La matinée de ce
grand jour m’avait paru plus triste encore. Je désirais
qu’à une époque où tant de chrétiens se réjouissent et
se sentent soulagés quant au corps comme quant à
-—- 264 —
l’âme, le SEIGNEUR me ménageât aussi quelque joie et
quelque consolation; mais j’osais à peine le demander.
Je m’étais flatté depuis longtems que ce serait dans la
famille de Lineweg que je recevrais mon cadeau de
Noël, mais la veille je fus absolument empêché de m’y
rendre, et par conséquent de prendre part à ses vivi
fiantes exhortations. Je me résignai enfin, et je cher
chai de la lumière, de la force et de la paix dans la
parole de Dieu; et, en effet, au bout de quelques
heures je me sentis peu à peu soulagé et consolé. Tou
tefois il me manquait toujours encore quelque chose ,
une entière et claire assurance d’être agréable à Dieu ,
et d’être aimé de Lui.
Quelques jours avant nous nous étions entretenus,
Chandani et moi, de la sainte Cène; et nous avions
reconnu que ce serait une grande consolation pour
nous, si, dans son usage, n0us pouvions ranimer et
enflammer notre foi et notre amour, et recevoir ainsi
le SEIGNEUR dans toute sa plénitude.
En moi-même je pensais que la manière la plus
touchante de communier pourrait avoir lieu, entre nous,
dans la famille Lineweg, si le bienheureux voulait ser
vir de prêtre: mais je n’osais pas même former un sou
hait à ce sujet.
Ce soir je me rendis au sein de la famille; mais
au lieu de me sentir plus tranquille, mon inquiétude
et mon abandon, devinrent successivement plus fati
guants , quand tout-à-coup Anna entra en esprit, et le
bienheureux dit par elle à sa femme : «x Qu’en penses
tu, mon cher cœur, si je vous préparais ce soir une
fête dans le SEIGNEUR, et si je vous invitais au banquet _
de son amour? Vois, l’agneau de Dieu est Lui-même
l.
—262—
au milieu de vous, et désire se communiquer à vos
cœurs. '
L’inquiétude et la crainte étaient alors chez moi
à leur comble; et quand il ajouta: « Mon ami, et le
vôtre sera le prêtre! » je me sentis attéré et confondu.
La maîtresse de la maison ayant néanmoins pré
paré le pain et le vin d’après son ordre; il prononça
une fervente prière, dans laquelle il conjura le SEIGNEUR,
en particulier, de nous faire connaître à chacun le filet
dans lequel le péché nous retenait encore captifs, et de
nous donner en même tems la force de nous délivrer.
La prière avançait et Chandani n’arrivait pas, cela ajou—
tait encore à mon trouble. Enfin pourtant il entra. Le
Bienheureux le reçut par ces paroles : « Sois le bien—venu
de tout mon cœur, mon frère. Voyez encore une brebis
que le SEIGNEUR veut vivifier par sa chair et son sang
précieux. ' Il acheva ensuite la prière, puis il ajouta:
« 0 mes bien- aimés! des anges du ciel se tiennent au
tour de vous; et s’ils étaient capables de quelque sen
timent de ja10usie , ils vous envieraient les j0uissances
divines qui vous sont préparées! Oui l’Agneau est lui
même au milieu de vous; de sa main Il veut vous nour—
rir de sa chair sacrée, et vous abreuver de son sang.‘
Il m’invita ensuite à distribuer le pain et le vin:
et la distribution faite , il nous engagea à faire nos ac
tions de grâce. Chaque fois que quelqu’un recevait la
communion, Anna manifestait un transport de joie,
tandis que moi, je soupirais , la crainte et la terreur
me bouleversant le cœur et le corps; et je priais le
SEIGNEUR de bénir les autres , quoique je fusse indigne
de ses bénédictions moi-même. La sainte Cène , pen
sais-je, est pour tous ceux qui la reçoivent, le cachet
——265——
de l’assurance qu’ils sont enfants de Dieu; mais comme
je ne me sens point pénétré d’amour, je ne suis pas
encore entièrement son enfant.
Anna fut ensuite réveillée, et se réjouit extrême
ment en apprenant l’admirahle fête qu’il nous avait été
donné de célébrer.
Malgré mon saisissement je pensai à faire chanter
le cantique: J’adore la puissance de l’amour etc., dont
lés paroles sont aussi belles que l’air est touchant.
Quand nous arrivâmes au verset: 0 Dieu! quelle est ta
bonté, et combien mon cœur te désire ; soudain le poids
qui m’oppressait, tomba; le soleil de la foi et de l’amour
donna dans mon âme; *ses glaceslËse fondirent; mes
larmes coulèrent; et la douceur et l’attendrissement
pénétrèrent de plus en plus mon cœur , qui pour la
première fois sentit la plénitude de l’amour du SEIGNEUR.
Oui, maintenant, m’écriai -je, je sais que le SEIGNEUR
m’aime!
Après que nous eûmes chanté encore quelques
cantiques avec l’accompagnement d’Anna qui s’était mise
au piano, le Bienheureux i%vint, mit Anna en extase
et nous dit: «1 L’amour de CHRIST me presse de revenir,
{et de vous dire encore quelques mots. Il y a parmi vous
un cœur paternel qui saigne , et que je dois consoler.
— Pleure donc , pleure, âme désolée; tout le monde
te méconnaît, personne ne te comprend. -— Ta femme
elle-même, t’avait juré fidélité, a foulé ses serments
à ses pieds. -— Et maintenant ils t’ont encore ravi ton
trésor le plus cher , tes bien - aimés petits enfants! —
Il ne te reste plus rien , absolument plus rien! Mais le
SEIGNEUR voit ton cœur paternel prêt à se briser, et Il
me charge de te dire: Sois consolé; toutes tes larmes,
l7:
264
je les recueille , je les compte , et plus tard je te les
rendrai changées en autant de perles précieuses. Tu es
abandonné; mais je suis avec toi; je te tiendrai lieu
d’épouse, de père, de frère, d’ami, de tout! Aucun
de tes enfants ne périra! encore un peu, et ces enfants
qui te sont si tendrement attachés , seront entièrement
à toi, et tu seras leur père éternellement. Aie seule
ment pleine confiance en Moi; et sois assuré que quand
tu paraîtras un jour devant le trône de mes grâces, ce
sera justement ce qui te fait maintenant le plus de
peine, qui alors te causera le plus de transports de
joie et de jubilation. ——Telles sont les consolations du
SEIGNEUR; et bientôt, oui bientôt, il te sera donné d’en—
trer dans le lieu où tous tes ennuis se changeront en
un triomphe éternel. '
Ces paroles de consolation qui se succédèrent
comme des éclairs, et tombèrent sur le cœur de ce père
désolé, nous pénétrèrent tous si vivement, que nous
n’eûmes pas le loisir de les bien saisir dans leur en
semble. Ce que j’en rapporte, ne sont que des frag—
ments d’un plus bel ensfl1ble. Nous pleurions tous
d’attendrissement, de joie et de reconnaissance. Chan
dani était surtôut vivement touché. Lineweg dit enfin;
. Ah! quelle jouissance, de pouvoir consoler des âmes
soufl'rantes, et de relever le courage des cœurs abattus!
- Après que vous aurez achevé vos hymnes de louanges,
œuronnez toute l’œuvre en choisissant encore quelques
sentences. Que la plénitude des grâces de Dieu repose
sur vous! '
Nous achevâmes notre cantique, consolés, c0ntents,
heureux comme nous n’avions jamais été. Cependant
la bonté du SEIGNEUR n’était pas encore épuisée: chacun
—265—
de nous obtint encore une sentence qui rendit sa joie
parfaite. Quand je tirai, par exemple, pour moi,
Psaume 107. 10 — 15 ‘); et pour Chandani , Psaume
81. 11“ ; tout le monde fut saisi de joie et d’éton
nement. '
Le soir de la veille de Noël j’avais dit en soupi
rant: Quelle triste fête de la naissance du SEIGNEUR!
jamais tu n’en as vu de semblable; mais le soir de ce
grand jour je m’écriai avec transport : Jamais fête de
Noël n’a été, p0ur qui que ce soit, plus réjouissante!
Du 26 Décembre 1855.
Après que nous eûmes passé la soirée à nous en
tretenir agréablement par le chant des cantiques, le
Père de famille vint après le souper se mêler à notre
société:
4 Votre ami est là, dit-il. J’étais déjà pendant une
grande partie de la soirée au milieu de vous, mes bien
aimés. Celui qui hier a consolé son disciple dans l’af
fliction, veut encore vous vivifier tous aujourd’hui; et
toi avant tous les autres ma fidèle compagne. Quoique
hier il semblât que tu eusses eu la moindre part aux
grâces répandues , tu n’as pas laissé d’être avantagée.
L’Enfant JÉSUS s’est lui-même donné à toi. Toi aussi,
mon ami, tu as reçu ce don précieux. Et vous tous,
‘) Que ceux qui sont assis dans l’obscurité et les ténèbres,
chargés de chaînes et d’entraves , rendentgrâce au SEIGNEUR
à cause de sa bonté et de ses merveilles, qn’Il fait éclater
au milieu des enfants des hommes.
“) Je suis le SEIGNEUR ton Dieu qui t’ai retiré de l’Eggpte: ouvre .
ta bouche , afin que je la remplisse.
-—-266-—
petits enfants du SEIGNEUR, ne vous attachez pas sim
plement aux dons extérieurs; mais appliquez-vous à
vous approprier de plus en plus la grâce de Dieu en
CHRIST. Faites tout ce que vous voudrez, en aucun cas
vous ne pourrez vous en passer.
«Ton ami, mon bien-cher, a passé maintenant
dans une classe d’esprits plus avancés. Continue à in
tercèder pour lui: le SEIGNEUR met ces sortes de prières
à profit, pour le bien spirituel de ceux pour lesquels
on intercède. A l’occasion de cet anniversaire, le SEI
GNEUR a répandu les dons les plus riches et les grâces
les plus insignes parmi ceux du ciel, et parmi ses en
fants sur la terre; on s’en est même ressenti dans les
régions inférieures.
c 0 mes bien-aimés! unissez-vous de plus en plus
dans l’amour, dans le véritable amour de CuRIST: et
si, alors, quelque membre de votre petite société, soit
jeune, soit vieux, vient à être appelé, vous ne serez
pas pour cela séparés, et vous vous retrouverez dans
la patrie céleste. Là , mon ami, tu n’auras plus besoin
de penser à ton départ par l’obscurité de la nuit.
« Maintenant donnez-vous encore une fois tous la
main, en signe d’alliance, et prions. '
Il commença alors par les vers d’introduction rap
portés au 20 Décembre; puis il pria le SEIGNEUR de
nous conserver fidèles, vû la proximité de son grand
jour. Par la même raison, il conjura le SEIGNEUR, si
c’était sa sainte volonté, de nous conserver encore
notre bonne et fidèle mère, si nécessaire à ses enfants,
chétifs et pauvres. Comme le SEIGNEUR l’avait déjà re
tirée deux fois des portes de la mort, il le pria de la
faire vivre encore un tems, bien que déjà plusieurs
—-267—
saints désirassent son arrivée; ses soins étant encore
si utiles ici bas. Toutefois , ajouta-t-il, heureux seront
toujours ceux qui peuvent dire de tout cœur: SEIGNEUR,
ta volonté soit faite, et non la nôtre.
Mme Lineweg nous assura, ce‘ que nous avions du
reste vu nous-mêmes, qu’il était vraiment miraculeux
qu’elle eût survécu à l’état de faiblesse et de dépéris
sement dans lequel elle était tombée après la mort de
son mari, et qu’elle ait pu redevenir forte et bienpor
tante comme peu de personnes le sont à son âge.
Du 29 Décembre 1855.
Il y avait plusieurs jours que Lineweg ne s’était
pas manifesté. Lorsque ce soir j’arrivai chez sa veuve,
elle était occupée d’afi'aires de famille, et elle lisait
justement un protocole; mais bientôt l’ami désiré s’y
trouva aussi, et nous dit: «Votre ami est là; si tu veux,
ma chère femme, je te dicterai aussi quelque chose du
protocole céleste, qui vaudra bien l’autre. » Puis il
nous dicta ce qui suit: '
c Mes chers petits enfants, je désirais de tout mon
cœur de pouvoir encore m’entretenir avec vous , et je
me réjouis de la permission qui m’est encore donnée
de vous bénir au nom de Jésus. Tous ceux qui ont été
purifiés par son sang, et justifiés par sa grâce, peuvent,
en Lui et par Lui, répandre ses bénédictions. Ainsi,
mes bien-chers, que celui le désire, reçoive aussi
la présente bénédiction, et qu’il la conserve dans un
cœur pur et bien disposé. Jésus, l’ancien, l’éternel
Jésus, vous fait dire, qu’ll entrera avec vous dans cette
nouvelle année; et Il vous prie de l’y faire entrer aussi
—-268 —
avec vous par la foi, la charité et l’espérance. 0 mes
bien-aimés, prenez avec vous Celui qui commande à la
tempête, Celui qui marche sur les eaux’), Celui qui
peut vous protéger dans toutes les circonstances; pre
nez-le avec vous, Celui qui veut faire de vous les com
pagnons de son royaume éternel, lequel, croyez-moi,
s’est beaucoup rapproché et est aux portes.
« Pendant cette nouvelle année, mes bien-aimés ,
vous apprendrez encore une fois par une triste expé
rience, combien ce JEsus que vous aimez, que vous
adorez, est méprisé partout, et de plus en plus aban
donné! Vous verrez le nombre inconcevable des infor
tunés qui courent après tout le reste, et ne négligent
que Lui, le seul aimable, le seul fidèle. Mes chers en
fants, il va se faire par tous les pays une grande sépa
ration; déjà la division s’avance; les brebis s’assemblent
en petits troupeaux, et les boues entrent en fureur.
Mes bien-aimés, si vous aimez Jésus, si vous m’aimez,
si vous vous aimez vous-mêmes, abandonnez tout le reste,
et persistez uniquement à dire: Jésus me restera. Lais
sez mari, femme, enfants, honneurs, biens, laissez
tout, v0us dis-je; mais gardez le seul trésor , vraiment
de prix, votre JEsus. Oh! je vous en prie, surtout au
commencement de cette nouvelle année qui se présente,
renfermez-vous souvent dans le secret de votre petite
chambre, quand ce ne serait que pour quelques minutes,
embrassez avec un amour vraiment filial, avec un amour
d’enfant, votre Jésus, le neuveau-né et l’ancien des
jours, et dites—Lui:
‘) Les tempêtes signifient les attaques des mauvais esprits
(Apoc.expl. 540.); la mer dans le sens défavorable, l’enfer.
(lbid. 403. 659. 815.)
—269—
Jésus je ne te laisserai point;
Tu me délivras de mes chaînes.
Donnes-moi , Jésus , ce qui me manque,
Hâtes-toi de venir à mon secours!
0 bêtes-toi , SEIGNEUR Jésus,
Et sauve ce qui peut être sauvé!
«Pour ranimer votre courage dans vos combats sur
la terre , apprenez qu’à mesure que les légions des té
nèbres s’assemblent en armées formidables , et que
l’enfer entier s’émeut pour venir saisir sa proie , votre
Maître, votre Jésus, éternellement fidèle , fait entrer
de son côté ses anges parmi'vous, et qu’ainsi les lé
gions des bons, non—seulement s’augmentent, mais ap
prennent aussi à se défendre; et reçoivent avec la foi,
la force de Jénovm, qui triomphera de l’univers. —
«0 mes bien-aimés, réjouissez-vous, je vous le
dis encore , réjouissez -vous quand une brebis du SEI
GNEUR est recueillie dans le sein du Bon Pasteur, car
elle y repose en une éternelle paix. —-Apprends , mon
ami, que c’est l’esprit de grâce qui t’a appris cette vé
rité, que c’est une folie de se lamenter quand une âme
échappée au combat, est appelée au triomphe et aux
joies éternelles. Rappelez-vous tous , mes bien-chers,
rappelez-vous cette grande vérité: et dans toutes les
rencontres, rejettez tous vos soins, toutes vos inquié
tudes, sur votre ancien ami, sur votre Jésus, qui entre
avec vous dans cette année nouvelle. Levez-vous avec
Lui, prenez votre repos avec Lui, priez avec Lui, tra
vaillez avec Lui; tout ce que vous faites, que vous
buviez, que vous mangiez, faites tout pour la gloire de
votre*Jésus. Oh! combien cet ami ancien et sûr, se
propose de vous bénir, de vous surveiller avec soin,
——270 —
de vous conduire et de vous maintenir dans la perfec
tion et le bonheur, pendant l’année nouvelle qui se
présente!
«O mes chers enfants! vous ne marchez pas seul,
votre ami toujours ancien et toujours nouveau, Jésus,
le principe de la vie, est avec vous. Vous entendez
bien quelquefois le hurlement des loups, le rugissement
des lions; vous recevez même quelquefois quelque mor
sure de serpent en passant: mais tout cela , -— dis-le
bien à notre ami" souffrant, à notre frère persécuté, —
tout cela ne durera qu’un temps. Si vous attendez en
paix et avec patience, et dans la foi des saints, alors,
mes bien- aimés , vous êtes dès le moment une proie
pour le royaume de Dieu! Vous serez enfants du
royaume , et le royaume sera à vous. Et tandis que les
‘ contempteurs de CHRIST, les moqueurs, les persécuteurs
de ses fidèles, sécheront de frayeur en voyant arriver
les choses annoncées, et qui ne tarderont plus de se
révéler, tandis qu’ils crieront aux montagnes et aux
collines de les couvrir devant la face de Celui est
assis sur le trône, et devant la colère de l’Agneau;
tandis qu’ils rechercheront les fentes des rochers pour
s’y cacher, et conjureront la terre de s’entr’ ouvrir pour
les engloutir, vous serez dans la jubilation; et il vien
dra se joindre à toutes leurs souffrances le plus grand
tourment, celui de voir triompher dans la splendeur
et la gloire, ceux qu’ils auront méprisés à cause de leur
fidélité à Jésus leur SAUVEUR. Oh! mes petits enfants:
ils seront saisis de terreur à cette vue; ils voudront
fuir! — Mais où fuir? Cette voix de Jéuovxn se fera
entendre par le puissant organe d’un archange: Terre,
rends tes victimes! mer, rends tes morts! levez-vous,
_271_
vous tous dormez, et paraissez au Jugement! —
Mes bien-aimés, quelles seront les plaintes et les la
mentations de la troupe qui n’aura pas voulu s’humilier
devant JÉSUS crucifié! Ils n’auront alors en Lui ni un
roi ni un Rédempteur; car eux-mêmes en auront fait
leur Juge! Mes bien-aimés , aucune langue ne peut ex
primer les tourments de ceux qui ont à endurer la co
lère de l’agneau. Je vous conjure donc au nom de JÉSUS,
soyez et demeurez ses imitateurs, comme ses enfants
bien-aimés. Persévérez dans la prière pour vous et pour
les vôtres; aucune prière, aucun soupir n’est perdu;
une prière sérieuse et pleine de foi et de confiance, est
bien puissante auprès du SEIGNEUR: une pareille prière,
mes bien-aimés, peut arracher des pères à l’abîme, des
mères aux lacs de satan, des frères à la puissance des
ténèbres. Toutes ces prières seront reproduites, et se
présenteront au grand jour du SEIGNEUR comme autant
de témoins qui crieront miséricorde. C’est Jésus, Jésus
l’éternel ami, qui sera le juge des revèches; et Il dira
à ceux auront ainsi prié : Tu es heureux, mon en
fant; vois ce que ton zèle a produit par ma grâce: par
ta prière tu as amené à ma droite ton pauvre père arrêté
dans les liens du péché; tu as obtenu que ta mère, in
crédule, vint se ranger près de moi. Tu es heureux!
Si tu n’avais pas ainsi prié, ainsi sollicité, tu entendrais
maintenant les lamentations déchirantes de celui qui t’a
donné le jour, de celle t’a enfanté avec douleur.
Oui, mes bien-aimés, l’interccssion est précieuse de
vant le SEIGNEUR, elle prépare des joies inexprimables
à celui qui la fait, des joies qui en s’épanchant devien
dront un océan de jouissances éternelles. Priez donc,
mes bien-aimés, pour vous et les vôtres;
—272—
Votre ancien ami vous accorde ce que vous demandez,
Pourvu que vous Lui ouvriez votre cœur avec sincérité.
Entrez donc, au nom de votre Jésus ,
Dans l’année nouvelle, qui arrive;
Restez avec Lui, vous avez la meilleure part;
Dites , en Lui seul se trouve le salut et la gloire.
Amen.
« Le SEIGNEUR, mes bien-aimés, me permet de vous
révéler une infinité de secrets. Celui d’aujoud’hui était
sérieux et terrible; une autre fois nous pourrons nous
entretenir de nouveau de scènes de gloire et d’amour.
Toutefois ce qui a été dit, peut vous offrir un étang,
riche en grâces, où chacun pourra s’attraper quelque
poisson pour sa nourriture *). Que le SEIGNEUR vous bé
nisse de ses plus riches bénédictions. *
Du 50 Décembre 1855.
Cefut sans doute pour empêcher que mon esprit
ne s’élevât trop en recevant toutes ces sublim‘es commu—
nications, que le SEIGNEUR enfonça profondément l’ai
guillon dans ma chair. Les suites du péché tourmen
taient à la fois mon corps et mon esprit. Et la convic
tion que le SEIGNEUR ne voulait me pardonner que comme
au paralytique de l’Evangile (Saint -Marc 2, ’1.), dont
l’exemple m’avait encore frappé tout récemment, comme
m’étant applicable, me mit de nouveau à de grandes
épreuves. Je mis fin à la longue, au combat et au dé
‘) Les poissons signifient des connaissances du Vrai provenant
du Bien (Apoc. expl. 515.); un étang, un certain ensemble
de vérités révélées (lbid. 455.).
—275—
chirement intérieur, par la résolution inébranlable de
ne point me laisser détacher de Jésus , quand mon corps
et mon esprit y devraient périr. Je le priai uniquement
de me préserver du péché. Ainsi résigné, je me rendis
avec calme et tranquillité dans la maison où j’avais si
souvent été consolé. Aussi l’ami ne tarda pas un moment
à venir. Tandis que nous étions encore ‘ns l’anti
Æhamhre, il prit déjà possession d’Anna, et dit à sa
femme avec beaucoup d’amitié: L’époux qui t’a échappé,
mais qui ne laisse pas d’être souvent autour de toi, est
ici. N’est-ce pas tu chanterais volontiers :
Si j’étais un petit oiseau
Et que j’eusse deux petites ailes,
Je volerais près de toi;
Mais comme cela ne peut être,
Force est de rester ici. n
(Chans. popul.)
Il lui dit que la principale raison qui l’avait em
pêché de venir les premiers jours après les fêtes de
Noël, c’étaient les nombreuses grâces que le SEIGNEUR
avait fait répandre au ciel, sur la terre et jusque dans
les lieux bas de la terre, et qui avaient occupé une in
finité de bienheureux. Il la pria alors de me faire entrer,
m’annodçant qu’il avait quelque chose à me dire à
l’oreille. «Viens, cher ami, me dit-il, quand je parus,
reprends ta petite place. ' Mme Lineweg me rapporta
alors le petit salut gracieux qu’il lui avait fait; et il
ajouta qu’il n’y manquait que la conclusion: Que la
volonté du SEIGNEUR soit faite. Il s’adressa alors à moi
et me dit du ton de la plus vive joie:
« La bénédiction du soir, mon cher et, bien-aimé;
18
—-274——
sois béni à la fin de l’année, sois béni au commence
ment de l’année; sois béni tous les jours et à toute
heure, de la part de Celui que tu n’as point vu, mais
que tu aimes; de Celui qui t’a toujours aimé et qui t’a
attiré à Lui; qui a donné son sang pour toi, le prêtre
et Roi JESUS-CIIRIST. Qu’Il soit loué, Lui, l’ami éter
nellementfldèle , et qui est occupé jour et nuit auprès
de ceux qui désirent être à Lui. Ah! si tu pouvais voir,
mon bien-cher, avec quelle tendresse, que] amour,
quelle douceur, quelle bonté, Il étend ses bras vers
toi! que! regard plein de grâce Il porte sur toi! quelle
attention il fait à toi! avec quelle sollicitude Il conduit
tous tes pas et tous tes désirs: et cela non-seulement
pour un tems, mais pour l’éternité! Ah! une fois que
le Père, le meilleur des pères, a agréé un enfant et
l’a reçu dans son sein, Il ne revient jamais sur ses pas;
c’est une alliance éternelle qu’il contracte; une alliance
qui subsistera quand les montagnes et les collines ne
seront plus, quand le ciel et la terre auront passé!
C’est une alliance de grâce , de paix que l’amour éter
nel conclut pour jamais. 0 mon ami bien-aimé, ami du
SAUVEUR . . . (Mmc Lineweg l’interrompit ici pour me dire:
J’espère que vous n’aurez plus la pensée maintenant
que le SEIGNEUR ne vous aime pas? «Tu as raison, ma
femme , dit-il; cet amour ne ressemble pas à l’amour
du monde , il est immuable”) — Il continua: «Ami du
SAUVEUR , enfant du Père céleste, propriété du Seigneur
des seigneurs, enfant du roi des rois... crois-tu à
tous ces titres? je te le demande. -— J’ai bien de la
peine, lui dis -je. —» Heureux, mon bien-aimé, si tu
peux y croire: car par-là tu honores et tu glorifies
l’amour de Dieu en CHRIST, cet amour qui répandrait
—-275 — .
encore sept fois ‘) tout son sang pour toi s’il le fallait!
0 chère âme, crois, car plus tard tu verras, et tu sau
ras par expérience. Comment , mon cher ami! n’as -tu
pas été forcé, il y a peu, d’éprouver l’amour profond de
l’ami de ton âme? Ne t’a-t-Il pas serré contre son
cœur, en te disant, regarde-moi, pauvre et chère co
lombe; entre dans la plaie de mon côté, dans le lieu
de ta retraite, et notre union sera éternelle. Ne s’est-Il
pas approché de même de notre ami souffrant, et
éprouvé dans le creuset, et ne lui a-t-ll pas dit avec
une bonté et un amour infinis: Patiente encore un peu;
vois, mon ami, je t’enlève, il est vrai, tout ce que tu
possèdes; mais c’est pour te rendre. sept fois autant!
C’est un échange que nous faisons, un échange infini
ment avantageux pour toi: tu me donnes tout ce que tu
as, je te donne tout ce que je possède, tout ce qu’il y
a de plus grand au ciel et sur la terre, je te donne
moi-même! et dans ce don tu retrouves tout! —— Rap
pelle-toi le, tel était le vœu de la nouvelle année, de
votre éternel Ami à tous deux, âmes éprouvées , mais
bénics, âmes châtiées, mais comblées de grâces comme
peu d’autres! Oh! crois-moi, mon ami, celui qui a Jésus,
a tout; il ne manque d’aucun bien. Il est fidèle, Il est
bon , Il est l’ami de vos âmes: Lui-même Il descendit
dans l’enfer avant de célébrer sa glorieuse ascension.
Et puisque vous voulez réellement être les disciples de
‘_) Sept est un nombre sacré qui signifie Tout. Les sept cou
leurs pour l’œil, les sept tous pour l’oreille, les sept
voyelles pour l’organe de la voix, montrent assez qu’une
division par sept n’est pas étrangère à la nature intime de
notre être.
Note du Trad.
18‘
—276——
notre glorieux Maître à tous, qui vous a appelés et
vous a dit: suivez-moi, ô mes enfants, patientez donc
ce court moment; baissez -vous sous votre croix, et la
portez contents à sa suite : l’ami de vos âmes en porte
toujours la plus grande part. C’est le Père de l’amour,
le Dieu de la paix , qui fait toutes ces choses. Sans lui
aucun cheveu de votre tête ne peut être dérangé; Il les
a tous comptés. Mon ami, y a-t-il quelque chose de
plus chétif qu’un cheveu? —— On en jette tous les jours
des milliers, sans s’en mettre en peine; et Lui, Celui
qui règne au plus haut des cieux, au milieu de ses
saints, il ne permet pas qu’il vous soit fait, au—delà de
ce que vous méritez , au-delà de vos forces, pas même
de la largeur d’un cheveu! et le tout pour votre plus
grand bien! —
« 0 mon très-cher, si vous étiez seuls, toi ou ton
pauvre ami, alors sans doute vous pourriez trembler;
mais vous avez avec vous Celui qui dit, que la lumière
soit et la lumière est. Il est le Tout-puissant; Il peut
changer tout votre sort en un clin d’œil : mais en vé
rité, ce sont ceux qui sur la terre endurent les plus
grandes épreuves, qui jubileront dans les cieux plus
que toutes les légions des autres bienheureux, ceux
dont le chant de triomphe couvrira celui de tous les
autres. Heureux donc celui qui peut prier, on dire en
soupirant:
Tu le veux ainsi, 6 mon maître, ô mon Dieu,
Eh bien, ta volonté sera la mienne aussi.
Que le monde me méprise
Pourvu que Tu sois adoré!
Je ne pense qu’à Te suivre
Chargé de croix et d’humiliations,
Selon ton éternelle volonté. Amen.
—‘277——
«C’est ainsi, mon cher ami, que l’on prie au
saint des saints. Venez, et apprenez de nous à prier.
Montez avec nous sur le mont des oliviers, vous enten
drez encore ces paroles:
Que ta volonté soit faite , SEIGNEUR , et non la mienne.
Je me soumets à tout ce qui vient de toi.
Aide-moi seulement SEIGNEUR à tout surmonter.
«Voilà, mes bien-aimés, les prières que les saints
se disputent le plaisir de porter dans le sein de JÉROVAII.
Voilà les prières qui brisent le cœur paternel, qui for
cent la Mère de se lever, de descendre sur la terre,
pour venir demeurer dans le cœur d’athlètes qui savent
faire de tels efforts. De telles prières, de tels soupirs,
mes bien-aimés, se changent enfin, enfin, remarquez-le,
en d’éternels Alléluia. Béni soit Celui, s’écriera-t—on,
qui m’a visité, qui m’a purifié, et qui ne s’est arrêté
que quand il eut achevé son œuvre en moi. C’est ainsi,
que se forment les Alléluia sur les bords de la mer de
crystal: ils s’échappent comme de brillants papillons
des chrysalides de la croix. 0 chères âmes, au nom de
votre salut, restez donc avec Jésus! En Lui vous trou
vez force, consolation, lumière, joie; en Lui vous trou
vez tout ce dont vous avez besoin, à toute heure, et
pour votre éternelle félicité. Alléluia. Amen.
« Oh! que tout cela est admirable! n s’écria la
veuve. —- N’est-ce pas, dit Lineweg; c’est une parole
douce, dite à l’oreille? — Mon ami, me dit-il ensuite,
si Satan vient de nouveau pour te tourmenter, pour
t’inquiéter, te faire des reproches, te ravir la foi et le
courage, imite ces saintes âmes qui pour approcher du
SEIGNEUR ont en l’ingénieuse idée , de démolir le toit, et
-— 278—
de faire descendre leur paralytique par cette ouverture.
Satan t’entonre d’une foule de pensées inquiétantes , il
élève tes péchés comme autant de murs entre toi et le
SAUVEUR, afin de te fermer le passage: suis donc ces
quatre pieux frères, au nom de Jésus, pour sa gloire,
etÆà la honte de Satan; passe par-dessus ces murs,
monte sur le toit, ôte les tuiles de ton incrédulité; re
garde, et tu apercevras Jésus, le destructeur du pé
ché. Les anges envoyés pour ton salut te lieront des
cordes de l’amour, et t’aideront à pénétrer jusqu’aux
pieds de ton SAUVEUR, lequel ne manquera pas de te
dire: « Mon fils, tes péchés te sont pardonnés. Reçois
le courage de la foi, les flammes de l’amour, la force
de l’espérance, et suis jusqu’au ciel, le sentier semé
d’épines que je t’ai frayé. Au nom du Dieu vivant, je
te promets de te retirer de ton péché, et de te conduire
par les combats , dans le vrai chemin, et enfin au triom
phe éternel. Au moment où tu ne seras plus rien par
toi-même, alors je serai tout pour toi. C’est au moment
que tu meures tout entier que je commence à vivre en
toi. ' -— Voilà ce que ton SAUVEUR te dira. 0 mon ami!
Pense que celui qui reconnaît son péché en présence
de l’Ami de son âme, son péché lui est déjà pardonné!
Car cet ami est fidèle, bon et juste; Il pardonne au pé
nitent et aide au malheureux. Entre dans ces sentiments,
et que le SEIGNEUR ton Dieu, notre Rédempteur à tous,
te fortifie dans la foi, pour la gloire de son saint nom.
Amen.
4 C’est parce que Satan voit que tu avances, qu’il
suscite toute cette tempête; et plus tu avanceras , plus
il remuera les passions, les charmes, les craintes et
tout ce qui peut te tr0ubler; d’autant plus que tu ne
veux pas te sauver seul, mais que tu veux lui enlever
encore quelques proies. Mais ne t’arrête pas, mon ami;
combats sans relâche, jusqu’à ce que l’ennemi succombe,
et que tu aies la palme à la main. -—
r Le SEIGNEUR, dit—il en terminant, aime singuliè
rement ceux qui ont la maladie du pays. C’est Lui qui
ordonne que la paix des chrétiens de ce caractère soit
souvent plus ou moins troublée; car ces circonstances
augmentent l’intensité de leur maladie. Confie-toi au
SEIGNEUR, mon ami, avec Lui tu réussiras, je le sais.
Du 51 Décembre 1855.
Le fidèle père de famille ne voulut pas nous lais
ser passer au nouvel an sans nous bénir encore une
fois; mais cette fois il nous prêcha la pénitence. Il
chercha à nous porter à l’occupation sérieuse de l’exa
men et de la connaissance parfaite de nous—mêmes; et
il nous représenta avec beaucoup de force nos nom
breuses infidélités envers le SEIGNEUR. Je pouvais cette
fois entrer parfaitement dans les sentiments qu’il cher
cha à nous inspirer, bien mieux que quand il apportait
des paroles de paix et d’amour. Que j’aimai cette ex
pression, et que je la trouvai vraie: Que le juste me
reprenne avec amitié, et me reproche ma faute; ce sera
plus que répandre des huiles de senteur sur ma tête.
Voici ce que j’ai pu retenir de ses paternelles ex
hortations:
« Mes bien-aimés, examinez-vous bien vous-mêmes
à la fin de cette année si remarquable pour vous; et
tâchez de réparer tout ce que vous avez perdu par né
gligence. Vous avez reçu tant de grâces du SEIGNEUR!
_280_
et toutefois vous n’avez pas avancé autant que vous
auriez dû. Combien de fois vous avez contristé votre
SAUVEUR par votre peu de foi et votre peu de confiangg!
Ah! ne soyez jamais prompts à juger les autres! Dites
plutôt : Si d’autres avaient reçu tout ce qui nous a été
donné, ils en auraient fait un bien meilleur usage. Tenez
vous dans le recueillement; ne vous distrayez pas par
des conversations inutiles, par des aller et venir sans
but. Ne perdez pas même votre tems à causer sans
fruit de choses spirituelles; car ces conversations aussi
sont condamnables quand le cœur n’y est pas , quand
la vie n’y répond pas. Quelquefois en courant dans
beaucoup de réunions religieuses, on néglige les de
voirs de son état: remplir fidèlement ses devoirs est
bien plus agréable au SEIGNEUR. Avez-vous aussi été
fidèle à remplir avant tout ce qui est expressément
commandé? Chaque chrétien, depuis le roi jusqu’au
mendiant, a des devoirs à remplir: et votre Rédemp
teur veut que vous n’y manquiez pas ; quand bien même
ces devoirs ne consisteraient que dans des choses, hu
mainement parlant, matérielles. Il faut même faire le
travail des mains avec conscience et exactitude. Dieu
apprécie la fidélité: et si vous n’êtes point fidèles dans
les petites choses, Il ne vous en confiera pas de plus
grandes. Et tout ce que l’on ne fait pas aussi bien qu’on
le peut, est fait avec infidélité!
c Ainsi, par exemple, les maîtres doivent com
mander et conseiller leurs serviteurs de leur mieux,
quant au corps , comme quant à l’âme; mais aussi les
serviteurs doivent -ils remplir leurs devoirs avec zèle,
“ardeur et fidélité, et se tenir dans la paix et la mo
destie.
—281—
« Et votre amour, votre charité, où en est- elle?
N’est-ce pas un grand malheur que le SEIGNEUR soit en
core forcé de découvrir dans vos cœurs des mouve
ments de haine, de jalousie, d’envie, de mécontentement,
et des choses qui sont abominables à ses yeux? Com
bien vous êtes encore éloignés de l’amour véritable!
Certes ce n’est point de l’amour, que de s’attacher à
\ telle ou telle personne qui vous plaise, de se montrer
l’ami de ses amis; de se louer, de se flatter mutuelle
ment: non, le véritable amour ne règne qu’entre des
gens qui se portent mutuellement au bien, qui cherchent
à se débarrasser mutuellement des défauts qui les éloi
gnent du SEIGNEUR et du bonheur qui est en Lui; et qui
se disent ces défauts et cherchent à les détruire le plus
qu’ils peuvent.
« Ne permettez donc pas que votre amour soit si
étroit et si exclusif: qu’il devienne tonjours plus géné
ral et plus ardent; qu’il s’étende avec une profonde
tendresse à tous les fidèles de Dieu, et avec tendresse
et commisération à tous ceux qui ne le connaissent
point encore.
«Faites une pénitence sincère, tant qu’il en est
encore temps. — Et savez - vous au juste ce que c’est
que pénitence? C’est ne plus pécher.
« Ne croyez pas que vous valiez mieux que d’au
tres, parce que vous ne commettez pas de fautes gros
sières: dans votre cœur se trouvent les mêmes pen
chants que chez les autres; et si vous n’y cédez pas,
c’est à la seule protection de votre SAUVEUR que cela
est dû.
u Voyez, les tempêtes qui exercent maintenant
partout leurs ravages, elles ne sont que l’ombre de
18 n
—282-—
celles qui s’élèveront encore : comment donc subsiste
rez-vous , si vous n’avez pas rendu votre vocation cer
taine en CHRIST?
«Ne vous laissez pas non plus faire illusion par
les louanges que les hommes peuvent vous donner. Et
quand des millions de personnes auraient de l’estime
pour vous, tout cela disparaîtra en présence du soleil
de la vérité, de la gloire et de la justice de votre Ré
dempteur et de votre Juge. Il ne demande pas, Lui, qui
es - tu? mais qu’es - tu? Il ne voit que la réalité, et ne
s’arrête pas aux vaines apparences.
« Et quand le SEIGNEUR vous ehâtie , le prenez—vous
réellement à cœur? Je vois bien que vous vous plaignez,
que vous vous lamentez; mais je ne vois pas toujours
que vous cherchiez à mettre vos peines à profit pour
vous corriger.
« 0 mes bien-aimés! soyez en tout plus reconnais
sants envers votre gracieux SEIGNEUR. Combien de mal
heurs Il a détourné de vous cette année! avec quelle
bonté Il vous a assistés et soulagés dans vos combats
et vos souffrances! Il vous a donné la nourriture, le
vêtement, une retraite. Non—seulement Il ne vous a pas
laissés manquer du nécessaire; Il vous a encore accordé
le superflu, afin que vous pussiez le répandre. Quant
aux biens spirituelles; il est bien inutile de vous les
rappeler: qui a jamais été favorisé comme vous? _
« Aimez donc aussi votre SEIGNEUR de tout votre
cœur; et témoignez-le Lui en accomplissant ses com
mandements et en aimant vos frères. Levez-vous avec
Lui, prenez avec Lui votre repas; faites tout avec Lui.
Donnez-vous tout entiers à Lui comme présent de bonne
année, et en retour Il se donnera aussi tout entier à vous. '
’
—285 —-*
Il fit ensuite une prière dans le même sens; il de
manda pardon au SEIGNEUR pour nous; Le conjurant
d’oublier tout le passé, et de nous prendre toujours
pour la suite sous sa protection puissante, pauvres pé
cheurs que nous sommes.
Il nous fit enfin tirer des sentences; qui se trou
vèrent presque toutes avoir rapport avec la pénitence ,
et la gratitude envers le SEIGNEUR pour desbienfaits
non mérités.
Comme il était déjà dix heures du soir, il ajouta:
c Je pense que vous ne regrettez pas qu’il se fasse si
tard: ce sont ici des heures d’or pour nous. Toi aussi,
mon ami, ne t’inquiète pas de ton retour à la maison:
le SEIGNEUR est ton appui; et par sa grâce il m’est donné
de t’accompagner. » J’étais en effet devenu un peu in
quiet à l’égard de mon retour; car la nuit du nouvel
an se passe d’une manière très -bruyante En Argentine ,
et l’on y est facilement attaqué par des ivrognes et des
gens sans règle, sans pudeur et sans frein de toute
espèce. Mais, sous la protection promise, je passai en
paix à travers la foule agitée.