Une urticaire pas comme les autres - CHUV

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Une urticaire pas comme les autres

Julien Gaillard Service IAL

CHUV

Présentation clinique

• Patiente 33 ans, bolivienne en Suisse depuis 2005 • Contexte atopique avec rhinoconjonctivite allergique perannuelle

bilantée en 2008, allergie aux squames de chats, de chien et aux acariens. Pas d’asthme associé. Eviction Chat + manœuvres éviction acariens (housse matelas, etc…) avec bonne évolution

• Pas d’allergie alimentaire, médicamenteuse ou aux hyménoptères

• Maman de jour, vit à Lausanne, un hamster dans la chambre de son fils

Présentation Clinique

• Lésions papuloérythémateuse prurigineuses apparues depuis 07/2015 (3 mois) sur les bras et le dos

• Caractère migrant (va et vient de certaines lésions) mais présence également de tuméfactions très inflammatoires (bras, cuisse) persistantes sur deux jours et laissant un hématome lors de leur résolution.

• Angioedème des lèvres et des paupières objectivés à 3-4 reprises (persistance sur environ une journée)

Présentation clinique

Facteurs aggravants: Contact des habits Exacerbation nocturne (surtout dans les zones en contact avec les draps) Voyage en Bolivie (2 semaines) avec amélioration marquée (quasi régression des lésions). Récidive immédiate à son retour Cetallerg sans effet, Aerius 1x/j avec amélioration partielle des lésions et du prurit sans résolution Autres traitements (MT): Elocom, Fluoxétine, Mirena (stérilet hormonal)

Présentation clinique

• Etat général bon • Systèmes cardio-resp, digestif, ORL, loco-régional s/p • Cutané: urticaire atypique avec larges papules

inflammatoires (aspect tuméfié), va et vient de certaines lésions, présence également de lésions d’âge différent + hématomes séquellaires sur les sites des anciennes des lésions

• Atteinte très prurigineuse • Pas d’angioedème objectivé

Que faites-vous à ce stade ?

A) Arrêts des anti-H1. Bilan cutané B) Bilan d’urticaire chronique (FSC, VS, tests hépatiques, créatinine, sédiment urinaire, TSH, +/- Ac anti-thyroglobuline, +/- Ac anti-TPO) C) Recherche d’IgE spécifiques contres les acariens de la poussière. Prescription d’une nouvelle housse pour matelas D) Bilan urticaire chronique (détaillé ci-dessus) + recherche cause autoimmune (dépistage FAN, ANCAs, IS, C3c, C4, sérologie hépatite B + hépatite C + sérologie HIV+ Elispot Tb) E) Avis dermatologique pour biopsie cutanée

Labo • FSC alignée • ASAT, ALAT, gamma-gt, PAL, créatinine, sédiment urinaire, TSH dans la

norme • Ac anti-TPO, Ac anti-thyroglobuline négatifs • VS, CRP dans les limites de la norme • FAN positifs à 1/80 avec un aspect moucheté et sans spécificité, IS

dans la norme, sérologies hépatite B, hépatite C, HIV et Elispot Tb négatifs.

Attitude

• Majoration traitement anti-histaminique (Aerius 4x/j) • Contrôle à 2 semaines avec réponse partielle des lésions • Devant aspect atypique, demande avis des dermatologues

DERIAL le 26.11.2015

• Fait nouveau: les 2 enfants de la patiente ont également des boutons qui grattent

• Lésions papulaires inflammatoires de disposition linéaires (certaines en groupe par 3) des bras, du ventre et des lombes

• Caractère plutôt fixé, quelques lésions d’âge différent. Régression de la composante urticarienne précédemment retrouvée sous anti-H1

• Quelques lésions avec centre hémorragique

Punaises de lits

2 souches majeures dans le monde • Cimex Lecturialus (commune) • Cimex hemipterus (tropicale) Arthropode strictement hématophage de la famille des Cimicidae Réservoir préféré: sang humain, animaux domestiques. Repas dure 3 à 10 minutes 5 stades de maturation (1 mm à 5-6 mm). Stade adulte atteint en environ 30 jours en cas d’apport adéquat Peut vivre jusqu’à 10 mois sans être nourrie Noctambule

1 mois : 61 punaises de lit

Epidemiologie

Incidence en constante augmentation depuis les années 90 • NY: 537 foyers déclarés en 2004, 10’985 en 2009, notion d’un foyer

touché sur 5 en 2015 • Ville > campagne (tous les milieux socio-économiques touchés) • Localisation dans les fentes, les crevasses, le matelas • Apparition de souches de + en + résistantes aux insecticides

Manifestations cliniques

L’aspect et la durée des lésions varient d’un individu à l’autre et peuvent varier au sein d’un même individu. • Stades tardifs souvent + sévères que les stades initiaux

Macules rosées < 5mm, généralement très prurigineuses, groupe 3 lésions («breakfast, lunch, dinner») reporté à maintes reprises

Papules , aspect linéaire caractéristique

Papules coalescentes mesurant 2-3 cm de diamètre dont certaines présentent un centre hémorragique Erythème papulaire confluent, aspect urticaire diffus. Zones d’excoriations (grattage)

Mais aussi…. Atteinte neuropsychologique importante • Prurit, troubles du sommeil, irritabilité • Dépression, Anxiété, isolement social, stigmatisation Répercussion socio-économique • Plusieurs catastrophe dans les tentatives d’éradication (incendies, etc..)

surtout par les gens non formés • Coûts engendrés par intervention des professionnels (3 passages au

minimum recommandés) Anémie • 1 repas = en moyenne 13,2 ml de sang

Infectieux – le savez-vous ? Plusieurs études ont été effectuées dans des zones endémiques pour le HIV, l’hépatite B, l’hépatite C pour voir si les punaises de lits pouvaient servir de vecteur au virus (transmission interhumaine via la punaise de lit). Conclusions? A) Aucune transmission interhumaine pour le HIV, l’hépatite B et l’hépatite C

via des punaises de lit ne sera jamais possible B) Les hépatites B et C ne se transmettent pas via les punaises de lit, c’est

moins clair pour le HIV C) L’hépatite C et le HIV ne se transmettent pas par des punaises de lit, c’est

moins clair pour l’hépatite B D) L’hépatite B et le HIV ne se transmettent pas par des punaises de lit, c’est

moins clair pour l’hépatite C E) Le HIV, l’hépatite B et l’hépatite C sont tous 3 potentiellement

transmissibles par des punaises de lit

Infectieux – le savez-vous?

• HIV et HCV ne survivent pas dans les punaises de lit • Hbs Ag retrouvé de manière persistante et à des taux croissants (suggérant

une probable réplication du virus) sur une durée de 5 semaines (à travers les stades de développement de la punaise) Newkirk et al (1975), Gastroenterology 69:982-987

• HBV ADN détecté 35 jours après la contamination (Feeding) dans le sang et les fèces des punaises infectées. Pas de transmission verticale chez l’insecte. HCV ARN non persistant chez l’insecte. Silverman AL et al (2001), Am J of gastroenterol 96:2194-2198

• Absence d’études démontrant l’inoculation du virus de la punaise à l’homme laissant ouverte la question de la transmission interhumaine

Allergie, hypersensibilité ou toxicité? Glandes salivaires C lectularius • Nitrophorine (vasodilatateur) • Apyrase (inhibiteur agrégation + activation plaquettaire) • Inhibiteur du facteur X (formation du caillot) Pathogenèse • IgG anti-C.lectarius retrouvée c/o 15 patients/15 atteint d’un

urticaire papulaire Abdel Nasar MB et al (2006), patients with papular urticaria have IgG to bed bugs, Parasitol Res 98:550-556

• IgE spécifique anti-nitrophorine démontré chez un patient avec des lésions d’aspect bulleux. Leverkus M et al (2006), Bullous allergic hypersensitivity to bed bug bites mediated by IgE against salivary nitrophorin, soc Invest dermat. 126:91-96

ENCORE A INVESTIGUER

Diagnostic différentiel (misdiagnosis delay)

• Urticaire chronique idiopathique • Allergie médicamenteuse • Prurigo • Gale • Autre pathologies dermatologiques: maladie de

Grover, miliaire, dermatite herpétiforme…..

Traitement • Anti-H1 • Corticoides topiques de classe II ou III • EVICTION permet une résolution des symptômes cutanés

généralement dans un délai de 2 à 3 semaines Moyens d’éradication 1) mesures physiques 2) Insecticides apparition de souches de + en + résistantes

Eradication

Sahil M et al, RMS 2013 718-722

Autres approches

Merci pour votre attention !

Pour les intéressés au sujet

Stephen L et al (2012), Bed bugs: Clinical relevance and Control Options, Clinical microbiology reviews 25: 164-192

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