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20 COMMENT FAVORISER LA MOBILITÉ INTERNE Pour Suez Environnement, la mobilité fait partie de la culture d’entreprise mais elle est moins facile à concrétiser aujourd’hui. Des outils et programmes y contribuent, comme le montre également l’exemple du Groupe Auchan. Depuis les années 1990, Suez Environnement a fait le choix de la mobilité comme dispositif central de gestion des carrières, à la fois fonctionnelle et géographique. « Elle concerne essentiellement les managers mais cette dynamique est moins fluide aujourd’hui, malgré les fortes incitations, indique Frédéric Henrion, senior VP human resources development. À la Lyonnaise des Eaux, 15 % des managers évoluent chaque année. Il faut également trouver des arguments pour inciter d’autres populations à bouger, dont les seniors. » Le Groupe a ainsi développé la notion de transfert de savoir-faire, avec une répartition (et une valorisation) des expertises sur l’ensemble des activités. « Notre approche se veut pragmatique, insiste Frédéric Henrion. S’il existe des voies royales sur lesquelles les collaborateurs veulent se positionner, elles ne sont pas les seules. » AIDER LES MANAGERS À ÊTRE ACTEURS DE LEUR CARRIÈRE L’un des principaux outils est le programme accélé- rateur de carrière. Il cible les collaborateurs qui ont le potentiel d’aller sur des fonctions d’encadrement. « Ce programme, dont l’ambition est de favoriser l’as- censeur social, a débuté par un échec : il prévoyait un nombre arbitraire de personnes devant évoluer chaque année, sans se préoccuper des possibilités réelles de promotion. À peine une personne sur deux obtenait satisfaction. » En prenant en charge ce programme, Frédéric Henrion choisit de poser le problème autre- ment : « On part des possibilités internes de mobilité pour déterminer le nombre de personnes concernées et atteindre ainsi les 100 % de réussite ». Désormais, c’est une trentaine de collaborateurs qui sont sélection- nés et accompagnés tous les 18 mois dans ce cursus de deux semaines de formation. « 90 % de la dernière promotion est déjà placée sur une nouvelle fonction. » Les programmes destinés aux managers s’appuient sur un plan d’accompagnement qui débute par le repérage de potentiels. « Les réorganisations permanentes du Groupe ne facilitent pas la visibilité sur les postes, estime Frédéric Henrion. Nous avons investi dans des outils pour aider les managers à devenir acteurs de leur carrière. » Au sein de la Lyonnaise des Eaux, le recours au test de personnalité SOSIE permet l’évaluation de préférences et de compétences. Pour Frédéric Henrion, « les managers peuvent mieux comprendre leurs moti- vations et identifier les axes d’amélioration ». Les réfé- rents RH vont ensuite soit proposer un parcours adapté, soit décourager les aspirations auxquelles l’entreprise ne peut pas répondre. Les prochains axes d’améliora- tion des programmes en faveur de la mobilité ? « Nous tenons à proposer des dispositifs alliant la préparation du collaborateur, la formation au moment de la prise de poste et l’accompagnement dans la durée pour s’assu- rer de la réussite. » Frédéric Henrion NUMÉRO SPÉCIAL D.R.

Comment favoriser la mobilité interne

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COMMENT FAVORISER LA MOBILITÉ INTERNEPour Suez Environnement, la mobilité fait partie de la culture d’entreprise mais elle est moins facile à concrétiser aujourd’hui. Des outils et programmes y contribuent, comme le montre également l’exemple du Groupe Auchan.

Depuis les années 1990, Suez Environnement a fait le choix de la mobilité comme dispositif central de gestion des carrières, à la fois fonctionnelle et géographique. « Elle concerne essentiellement les managers mais cette dynamique est moins fluide aujourd’hui, malgré les fortes incitations, indique Frédéric Henrion, senior VP human resources development. À la Lyonnaise des Eaux, 15 % des managers évoluent chaque année. Il faut également trouver des arguments pour inciter d’autres populations à bouger, dont les seniors. »

Le Groupe a ainsi développé la notion de transfert de savoir-faire, avec une répartition (et une valorisation) des expertises sur l’ensemble des activités. « Notre approche se veut pragmatique, insiste Frédéric Henrion. S’il existe des voies royales sur lesquelles les collaborateurs veulent se positionner, elles ne sont pas les seules. »

AIDER LES MANAGERS À ÊTRE ACTEURS DE LEUR CARRIÈREL’un des principaux outils est le programme accélé-rateur de carrière. Il cible les collaborateurs qui ont le potentiel d’aller sur des fonctions d’encadrement. « Ce programme, dont l’ambition est de favoriser l’as-censeur social, a débuté par un échec : il prévoyait un nombre arbitraire de personnes devant évoluer chaque année, sans se préoccuper des possibilités réelles de promotion. À peine une personne sur deux obtenait satisfaction. » En prenant en charge ce programme, Frédéric Henrion choisit de poser le problème autre-ment : « On part des possibilités internes de mobilité pour déterminer le nombre de personnes concernées et atteindre ainsi les 100 % de réussite ». Désormais, c’est une trentaine de collaborateurs qui sont sélection-nés et accompagnés tous les 18 mois dans ce cursus de deux semaines de formation. « 90 % de la dernière promotion est déjà placée sur une nouvelle fonction. » Les programmes destinés aux managers s’appuient sur un plan d’accompagnement qui débute par le repérage de potentiels. « Les réorganisations permanentes du Groupe ne facilitent pas la visibilité sur les postes, estime Frédéric Henrion. Nous avons investi dans des outils pour aider les managers à devenir acteurs de leur carrière. » Au sein de la Lyonnaise des Eaux, le recours au test de personnalité SOSIE permet l’évaluation de préférences et de compétences. Pour Frédéric Henrion, « les managers peuvent mieux comprendre leurs moti-vations et identifier les axes d’amélioration ». Les réfé-rents RH vont ensuite soit proposer un parcours adapté, soit décourager les aspirations auxquelles l’entreprise ne peut pas répondre. Les prochains axes d’améliora-tion des programmes en faveur de la mobilité ? « Nous tenons à proposer des dispositifs alliant la préparation du collaborateur, la formation au moment de la prise de poste et l’accompagnement dans la durée pour s’assu-rer de la réussite. »

Frédéric Henrion

NUMÉRO SPÉCIAL

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RETOURS D’EXPÉRIENCE

QUELS RESSORTS, POUR QUEL PROFIL MOTIVATIONNEL ?Pour le Groupe Auchan, un enjeu RH important visait à rendre chaque collaborateur acteur de sa mobilité. Le recours à la solution Motiva Mobilité s’est imposé pour le concrétiser, comme l’explique Valéria Mascellani, consultante RH pour Pearson France–ECPA. « Il s’agit d’une plateforme interactive qui permet de faire le point sur ses moteurs personnels, ses préférences, et d’utiliser ces données pour construire un projet profes-sionnel. » Pour la consultante, il s’agit d’un changement de paradigme : « Les entreprises sont focalisées sur les compétences, davantage que sur la motivation. Or disposer des compétences sans avoir un niveau motivationnel suffisant ne permet qu’une exploitation partielle du potentiel. De plus, de nombreuses études confirment le rôle de la motivation dans l’acquisition de compétences ».

Motiva Mobilité permet donc de répondre à plusieurs questions : quels sont les ressorts de motivation d’un individu ? Quels postes correspondent à son profil motivationnel ? « En donnant aux collaborateurs la pos-sibilité de mieux se connaître, ils peuvent ensuite relier leur profil motivationnel aux opportunités proposées par l’entreprise. » Pour le Groupe Auchan, la probléma-tique de fidélisation des collaborateurs se heurtait à une limite, rappelée par Valéria Mascellani : « De nombreux collaborateurs veulent devenir directeur de magasin, or il n’y a pas suffisamment de postes pour répondre systématiquement à cette attente. De plus, on observe souvent une représentation "magique" de cette fonction, en décalage avec la réalité. L’idée était donc d’ouvrir le champ des possibles. »

LA SOLUTION MOTIVA ET SON IMPACT SUR LA MOBILITÉLe questionnaire permet de se positionner par rapport à une centaine de motivations, puis de déterminer douze ressorts clés qui sont ensuite hiérarchisés – par exemple, l’immersion internationale ou le travail en équipe. « Le collaborateur peut repérer le gain de ressorts motivationnels associé aux autres métiers – et la perte de ceux qui s’expriment dans le métier actuel », indique Jérôme Iborra, consultant RH pour Pearson France–ECPA. Depuis trois ans, le Groupe Auchan mène deux campagnes Motiva par an, et la plateforme est devenue un outil important de la politique RH. Comme l’explique Jérôme Iborra, « des collaborateurs ont pu mûrir leur réflexion et envisager de nouvelles pistes ».

La plateforme Motiva s’adapte aux besoins de l’entre-prise, par exemple en intégrant des vidéos sur les trois critères du métier idéal, décrits par le consultant : « Le métier me correspond ; le métier apporte de la valeur aux autres ; je suis capable d’acquérir les compétences nécessaires à son exercice ». Si les deux premiers points sont remplis, nous sommes dans le domaine du rêve, qui peut être concrétisé par de la formation. « Le cas le plus fréquent correspond à un individu capable d’exer-cer un métier qui a de la valeur, mais qui ne correspond pas à ses ressorts motivationnels, indique Jérôme Iborra. La priorité est de devenir un expert de soi-même pour identifier ses motivations les plus pro-fondes. »

De nombreuses études confirment le rôle de la motivation dans l’acquisition de compétences.

Valéria Mascellani

Valeria Mascellani

D.R

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