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Archives départementales de l'Orne Service éducatif

PRATIQUER L'HISTOIRE LOCALE

A L'ÉCOLE

DOSSIER PÉDAGOGIQUE

NIVEAU ÉCOLES

par Patrick BIRÉE

professeur des écoles Service éducatif des Archives départementales de l’Orne

avec la collaboration de Jean-Claude MARTIN, Joëlle BODENÈS, Gérard BOURDIN, Christophe LETELLIER, Isabelle HUBERT (Arch. dép. Orne),

Rémi JANNEAU (Professeur d'Histoire-Géographie à l'I.U.F.M. d'Alençon),Michel PICART (Conseiller pédagogique, Alençon I),

Thierry DELAMOTTE (Conseiller pédagogique départemental T.I.C.E.)

sous la direction de Jean-Pascal FOUCHER

- 2001 – révisé 2006 – ISBN 2-86061-023-05

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SOMMAIRE

AVANT-PROPOS ....................................................................................................................... p. 5

1 - L'HISTOIRE GENERALE .................................................................................................. p. 61.1 - Epistémologie de l'histoire 1.2 - Historique de la didactique de l'histoire

2 - L'HISTOIRE LOCALE ET LE PATRIMOINE DE PROXIMITE................................. p. 9

3 – DEMARCHE PEDAGOGIQUE ........................................................................................ p. 103.1 - Type de démarche................................................................................................................ p. 11 3.2 - Objectifs inhérents à la recherche en histoire locale ........................................................... p. 11 3.3 - Les sollicitations historiques du milieu ............................................................................... p. 12

3.3.1 - Les Archives ........................................................................................................ p. 13 - Définition - Centre de ressources - Méthodologie de recherche - Exemples d'études de documents : - Le Moulin d'Auvieux - Liste nominative de Champsecret - Lettre de 1799

3.3.2 - Les paysages ........................................................................................................ p. 28 - Définition - Les ressources du milieu - Méthodologie de recherche - Exemples d'études : - Un paysage urbain : la ville d'Alençon - Un paysage rural : la commune de Radon

3.3.3 - Les monuments ................................................................................................... p. 41 - Définition - Les ressources du milieu - Méthodologie de recherche - Exemples d'études : - Les moulins d'Argentan - Le château de Carrouges

3.3.4 - Les objets du passé.............................................................................................. p. 51 - Définition - Les ressources du milieu - Méthodologie de recherche - Exemple de réalisation : - Un musée de classe

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3.3.5 - Les sources orales ............................................................................................... p. 54 - Définition - Les ressources du milieu - Méthodologie de recherche - Exemple de recherche : - Enquête réalisée par des CM1-CM2 3.4 - Quelques recherches et sujets d'étude possibles .................................................................. p. 58 4 - EXPERIENCES PEDAGOGIQUE……………………………………………………….. p. 59

4.1 - Une séance basée sur l'exploitation d'un document local .............................................. p. 59 4.1.1 - Préparation de la séance 4.1.2 - La séance 4.1.3 - Après la séance

4.2 - Un sujet d'étude en histoire locale.................................................................................... p. 64 4.2.1 - Présentation du projet 4.2.2 - Objectifs inhérents à cette recherche 4.2.3 - Démarche générale 4.2.4 - Mise en place et évaluation du projet 4.2.5 - Une rencontre-témoignage

4.3 - Une Classe Patrimoine avec une thématique locale........................................................ p. 69 4.3.1 - La Classe Patrimoine industriel dans l'Orne 4.3.2 - Les objectifs 4.3.3 - Déroulement et évaluation de la C.P.I. Métallurgie Mars 1999 4.3.4 - Une sortie de classe 5 – ANALYSE ............................................................................................................................ p. 73 6 – BIBLIOGRAPHIE............................................................................................................... p. 76 7 – ANNEXES ............................................................................................................................ p. 79

Doc. 1 - Programmation de CM2, Histoire, P. Birée, année 1998-1999 (cf. 4.1). Doc. 2 - Cahiers des doléances de Radon, Arch. dép. Orne, 70 B 200, 1789 (cf. 4.1). Doc. 3 - Un panneau d'exposition (cf. 4.2). Doc. 4 - Présentation Classe Patrimoine Industriel "Métallurgie", 1999 (cf. 4.3). Doc. 5 - Emploi du temps, Classe Patrimoine Industriel "Métallurgie" (cf. 4.3). Doc. 6 - "Fiche d'identité" d'un site industriel "Métallurgie" (cf. 4.3). Doc. 7 - Dossier réalisé par les élèves suite à la C.P.I. "Métallurgie" (cf. 4.3). Doc. 8 – Etude de la population de St Germain du Corbéis au XX siècle (Classe de CM2 de M.Peccatte)

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AVANT-PROPOS

Depuis 1983, le service éducatif des Archives de l'Orne a une mission importante auprès de classes du premier degré de l'Orne. De nombreux enseignants et élèves ont pu être ainsi sensibilisés à la démarche historique et s'investir dans des études en histoire locale. Cette publication est le fruit de toute cette recherche et balaye les différents champs du milieu local :

- La documentation écrite, visuelle et audiovisuelle, - Les paysages, - Les monuments, - Les objets du passé, - Les témoignages.

Des exemples concrets d'exploitation de ces sources, ainsi que quelques productions représentatives du travail que l’on peut mettre en place, reproduites dans le texte en annexe, permettront de guider les enseignants sur les chemins de l'histoire locale. L’outil informatique n’est pas oublié et une remarquable recherche sur Aube, effectuée par l’école de ce village (comme beaucoup de recherches maintenant), peut être consultée à l’adresse suivante :

http://perso.wanadoo.fr/ecole.comtesse/

Toute cette démarche s’inscrit bien dans les nouvelles instructions officielles par rapport au socle commun de connaissances et de compétences (encart – BO n°29 du 20 juillet 2006), explicité dans la cinquième partie « la culture humaniste ». Cinq travaux de classes s’appuyant sur projets ayant une démarche pluri-disciplinaire illustrent ces propos. Patrick Birée septembre 2006

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1 - L'HISTOIRE GENERALE 1.1 – Epistémologie de l'histoire

L'histoire est souvent définie comme "l'étude et la science des événements passés"1 ou "science des hommes dans le temps" selon Marc Bloch. Ce statut de science accordé à cette discipline peut être remis en cause pour au moins trois raisons : tout d'abord contrairement au domaine scientifique, il ne peut y avoir d'observation directe du fait historique puisque le passé, par essence est ce qui n'est plus. D'autre part, la perception et la connaissance du passé sont plus de l'ordre de la subjectivité que de l'objectivité, non à cause du manque de rigueur ou de probité de l'historien mais plutôt de son système de valeurs et de pensées non contemporains aux faits historiques étudiés qui peuvent l'amener à un manque de distanciation. Enfin l'expérimentation étant impraticable en histoire, aucune loi ne peut être posée. Ce qui fait dire à Paul Veyne que "l'histoire n'est pas une science, elle n'explique pas et n'a pas de méthode"2. On parle donc de science par commodité de langage. L'histoire se trouve intégrée dans les sciences humaines, l'ensemble des disciplines qui ont pour objet l'étude des attitudes des comportements humains. Cela est certainement dû au fait qu'au XIXème siècle "la méthode historique, cet ensemble de procédés techniques éprouvés a acquis la respectabilité"3.

On oppose souvent une histoire événementielle (ou institutionnelle) à une "nouvelle histoire". La première prend naissance avec l'école grecque au Ve siècle avant J.-C. Sous l'implusion d'Hérodote et de Thucydide. Ce genre nouveau a pour but de relater des événements passés à partir d'enquêtes sur le terrain et de témoignages oraux et écrits, en se fondant sur deux exigences : la critique des sources et la recherche de la vérité. Au fil des siècles, cet idéal sera mis de côté pour l'élaboration d'une histoire souvent inféodée au pouvoir. Celle-ci s'appuie sur le récit des événements, la mémoire des grands hommes et le devenir politique des Etats4. Il s'agit donc d'une histoire "essentiellement littéraire et rhétorique dans sa forme, apologétique dans ses fins"5. Au XVIIIème siècle l'œuvre de Voltaire, faisant suite à la réflexion de Bodin dès le XVIème siècle, constitue une première évolution vers l'histoire totale où les aspects sociaux, les conditions de vie, les institutions ou les pratiques religieuses sont pris en compte6. Sous la Révolution Française, Condorcet poursuit sur cette voie avec son ouvrage "Esquisse d'un tableau historique des progrès de l'esprit humain" qui se veut être une histoire utile et vraie.

1 Dictionnaire Larousse, édition 1995. 2 Paul Veyne, comment on écrit l'histoire, Histoire, Editions du Seuil, 1971, p. 9. 3 Pierre Chaunu, Histoire, Sciences sociales, p. 21. 4 Ainsi en est-il de L'abrégé chronologique ou extraict de l'Histoire de France, par le sieur de Mézeray, historiographe de France, Paris, 1668, Arch. dép. Orne Société Historique et Archéologique de l'Orne, 660/1. 5 M.-L. Coll, L'enseignement de l'Histoire aux Cycles 2 et 3, Armand Colin, 1993, p. 37-38. 6 Notamment dans Essay sur l'histoire générale et sur les mœurs de l'esprit des nations.

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Au XIXème siècle, le positivisme donne de nouvelles finalités à l'histoire, celle-ci prenant un sens, non déterminé par Dieu mais par les lois humaines. Elle reste cependant cantonnée dans un genre littéraire et politique (Augustin Thierry, Jules Michelet, ...). Malgré ses limites, cette histoire se fonde sur la critique scientifique des sources facilitée par la création des Archives de France en 1823. Linéarité et Foi dans le progrès guident l'histoire méthodique (Charles Seignobos), "l'historien est alors un scientifique en quête de vérité"7. Dans la première moitié du XXe siècle, sous l'impulsion de l'Ecole des Annales (Lucien Febvre et Marc Bloch) naît ce que l'on a appelé plus tard la nouvelle histoire. Ainsi, à une histoire où prime l'événementiel (des faits, des dates, des lieux) se substitue une histoire quantitative et sérielle, qui ouvre son territoire de recherche à des sources écrites non exploitées jusqu'alors et à d'autres domaines que les sources écrites. Ainsi sont sollicitées la géographie, l'archéologie, l'anthropologie, la palynologie mais aussi la linguistique, l'ethnologie... Est recherchée une histoire totale où "on traque l'homme avec son corps, son alimentation, son langage, son imaginaire, ses croyances pour chercher des invariants derrière l'accélération des événements et la permanence de longues périodes derrière les ruptures apparentes8". La nouvelle histoire, sous l'impulsion entre autres de Georges Duby et Fernand Braudel se veut une histoire-problème qui aspire à l'histoire globale9. Dans la deuxième moitié du XXe siècle, elle annexe de nouveaux champs (psychanalyse, histoire politique, culturelle et immédiate...) dont "la ligne directrice la plus claire qui s'esquisse depuis deux décennies concerne la promotion de l'individu comme objet historique aux dépens du collectif"10, c'est-à-dire une histoire non-événementielle. Ainsi à une histoire-récit où les faits politiques sont mis en avant s'oppose une histoire-problème où les faits de civilisation sont primordiaux11.

1.2 - Historique de la didactique de l'histoire

L'enseignement de l'histoire en France est lié à toute cette évolution structurelle et à d'autres considérations plus politiques. Si au XVIIIe, l'histoire devient matière d'enseignement, les premiers professeurs d'histoire n'apparaissent dans l'enseignement secondaire qu'en 1829 pendant la restauration, avec pour buts la réhabilitation de la monarchie et la formation de l'élite. En 1842 cet enseignement est surtout centré sur l'histoire de France12.

7 Jacqueline Le Pellec, Enseigner l'histoire un métier qui s'apprend, Hachette Education, 1992, p. 42. 8 Télérama n° 2558, article consacré à Jacques Le Goff, 20 janvier 1999, p. 34. 9 Fernand Braudel, L'identité de la France, Arthaud Flammarion, 1986. 10 Daniel Oster, "les nouveaux champs", Précis d'Histoire, Nathan, 1996, p. 20. 11 Ainsi les programmes d'Histoire de la 6ème à la Terminale sont-ils organisés selon le concept braudelien de civilisation. Clés de l'Enseignement de l'Histoire, Collection démarches pédagogiques, Série enseigner l'Histoire, C.R.D.P., Académie de Versailles, 1996, p. 20. 12 Le registre de délibérations du conseil royal de l'instruction publique dans le Procès-Verbal de la séance du 10 mai 1842, Titre 1er, objet de l'enseignement article 1er, précise que : "Les éléments de la géographie et de

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Il faut attendre les lois de Jules Ferry de 1881-1882 pour que l'enseignement de l'histoire, dans une école primaire obligatoire jusqu'à 13 ans ait "par une double mission civique et éducative, objectif de faire adhérer les fils et filles du peuple aux concepts républicains"13. De la fin du XIXème aux années 1960, l'enseignement historique en primaire comme en secondaire, souffrant d'une absence d'instructions officielles jusqu'en 1975, s'appuie sur une histoire institutionnelle ayant pour base la chronologie, les faits, les hommes, les dates (ce que d'aucuns appellent "l'histoire bataille")14 ; une histoire finaliste, "dans la mesure où elle reposait sur la croyance que tout fait s'inscrivait dans un enchaînement inéluctable de causes et de conséquences15". La nouvelle histoire remet progressivement cet enseignement en cause. La réforme Haby dans les années 70 développant une démarche d'éveil, adopte une rupture avec l'histoire nationale et la mise en place de thèmes transversaux induisant un enseignement problématique et thématique (les transports à travers les âges, l'évolution de l'habitat...), déstabilisant enseignants, parents et historiens tel Alain Decaux qui s'insurge contre la disparition de la chronologie. Les instructions de 1981 et 1985 complétées par les projets de 199916 redonnent place à la chronologie par un retour à l'histoire nationale en relation avec les principaux événements européens et mondiaux. A l'intérieur de grandes périodes s'inscrivent des dates, des lieux, des personnages, des réalisations de caractère culturel ou scientifique. Mais sont prises en compte dorénavant la relativité des durées historiques, des rythmes et des évolutions. L'utilisation de différentes sources comparées dans un esprit critique est de même préconisée. La démarche propre à l'historien est mise en avant dans le document de 1999 : "sensibiliser les enfants aux

interrogations des historiens", p. 40 ; "le travail sur documents d'époque a l'avantage de

familiariser les élèves avec les démarches propres de l'historien", p. 40. On y voit tout l'apport de la nouvelle histoire ! Ces valeurs consensuelles précisent pour l'histoire de nouvelles finalités : former des Républicains, former des citoyens français17.

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l'histoire et surtout de la géographie et de l'histoire de France, pourront y être enseignés", Arch. dép. Orne, Archives du Service Educatif. 13 Jacqueline Le Pellec, op. cit., p. 28. 14 Cette histoire institutionnelle a longtemps eu pour référence l'ouvrage d'Ernest Lavisse Histoire de France (éditée de 1884 à 1950 environ !) où "l'enseignement de l'histoire aux tout petis doit être comme une suite d'histoires comme en racontent les grands-pères à leurs petits-enfants". 15 Jacqueline Le Pellec, op. cit., p. 29. 16 Les cycles à l'école primaire, et les programmes de l'école primaire, C.N.D.P., Hachette Education, 1991 et 1995, Document d'application des programmes de l'école élémentaire, B.O. n° 7, 1999. 17 Les cycles à l'école primaire, op. cit., p. 113.

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2 - L'HISTOIRE LOCALE ET LE PATRIMOINE DE PROXIMITE Comment dans ces conditions, enseigner l'histoire ? se demande Gilles Baillat en 1996. D'après lui "la mise en activité de l'élève se fait dans une perspective constructiviste de l'apprentissage. La construction de sens suppose une confrontation avec des objets qui l'interpellent (pièces historiques, monuments, documents, témoignages...) qui reproduisent les traces du passé. Une activité productrice de sens des élèves sur ces objets suppose un questionnement approprié qui est garant d'un résultat en terme d'évolution de représentation18". Au cœur de l'appropriation de l'histoire par l'élève se trouvent donc les traces du passé. D'autre part, les travaux de Piaget ont montré les difficultés rencontrées par l'enfant pour acquérir les notions de temps et maîtriser ses éléments constitutifs. A l'école élémentaire, les enfants se trouvant essentiellement au stade des opérations concrètes, le recours au milieu est un moyen pédagogique adapté à la psychologie enfantine c'est-à-dire une pratique historique à la mesure du sujet et de ses capacités mentales19. Pierre Giolitto pense que l'histoire locale est plus proche de l'enfant que l'histoire nationale, qu'elle vise à enraciner l'enfant dans son espace régional lui permettant de se construire sa propre identité. Pour lui, le milieu est le point de départ ou l'illustration de l'enseignement historique20. Cette recherche qui s'appuie sur les ressources du milieu permet à l'enfant de s'interroger sur l'origine et l'évolution du cadre dans lequel il vit. Cette prise en compte du milieu n'est pas étrangère à l'évolution de la notion de patrimoine qui est depuis plusieurs années mis au service de la didactique. Ainsi depuis 1976, plusieurs circulaires en précisent les objectifs et les contenus21. Les programmes officiels concernant l'école primaire font aussi souvent référence à cette notion de patrimoine et d'histoire locale22. Pourquoi et comment intégrer le patrimoine et l'environnement dans les activités pédagogiques, pose fort justement une équipe d'enseignants dans un dossier consacré au patrimoine et à l'environnement23.

18 Gilles Baillat, "Quelques propositions relatives à la didactique en histoire", Fenêtres sur cours, n° 114, novembre 1996. 19 Jean-Noël Luc, L'histoire par l'étude du milieu, Editions E.S.F., 1984, p. 11-25. 20 Pierre Giolitto, L'enseignement de l'histoire aujourd'hui, Armand Colin Bourrelier, 1986, p. 74 et 121. 21 La circulaire 76123 du 26 mars 1976, tout en précisant que l'étude des patrimoines locaux n'est pas une discipline spécifique, prend en compte la dimension du patrimoine dans l'enseignement. En effet celui-ci peut être étudié à travers : - l'évolution des différents systèmes d'occupation des sols, - la découverte active des vestiges des périodes antérieures, - la toponymie, - l'étude dans l'art et la littérature de l'évocation du milieu naturel ou des traditions locales. D'autres circulaires sur les musées (78096 du 2 mars 1978), sur les classes du patrimoine (87-268 et 88-063 des 4-09-87 et 10-03-88) (loi d'orientation du 10 juillet 1989) complète ce dispositif. 22 Les cycles à l'école primaire, 1991, op. cit., p. 114, le contexte local par sa richesse favorise l'étude de questions d'histoire et de géographie ; p. 62 utiliser les différentes sources historiques et les comparer dans un esprit critique ; p. 63 notion de milieu ; p. 113-114 sujets d'histoire locale ; p. 72 notion de patrimoine. 23 Patrimoine et environnement, activités pédagogiques pour l'école, C.D.D.P. Marne, 1994.

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A la notion psychologique évoquée ci-dessus peuvent être invoquées d'autres raisons :

- le devoir de mémoire d'une histoire commune, vécue sur un territoire commun,

- l'ouverture de l'école sur le monde extérieur24,

-la recherche de racines dans une société connaissant une évolution rapide. Cependant plusieurs écueils sont à éviter lors de la prise en compte de ce patrimoine :

- la rétromanie, délectation nostalgique d'un passé révolu25,- le localisme, vision étriquée du patrimoine, réduit à son champ local sans ouverture sur le général, conduisant "au cloisonnement des identités et à l'enfermement intellectuel et social"26,- le lieu du repli identitaire et l'outil de nouvelles exclusions27, le tout confortant l'enfant dans un certain égocentrisme,- la reconstruction inexacte du passé, exprimée lors de témoignages manquant d'objectivité.

Pris dans sa dimension globale, dans un esprit d'ouverture, le patrimoine se situe entre l'histoire, la mémoire et l'éducation à la citoyenneté.

[sommaire]

3 - DEMARCHE PEDAGOGIQUE 3.1 - Type de démarche

Démarche générale :

Elle se veut active : rechercher une documentation locale, aller sur le terrain, observer, rencontrer des gens, prendre des notes, chercher des indices, mettre en commun, analyser, ...

Ainsi l'on passe :

du VECU

approche

� au PERCU

observation,

émission d'hypothèses

� au CONCU

mise en relation des éléments,

compréhension

Opérations intellectuelles :

Cette démarche s'appuie essentiellement sur deux modes de raisonnement discursif utilisés successivement ou de façon complémentaire :

24 Consulter à ce sujet En sortant de l'école..., Musées et Patrimoine, Hachette Education, 1992. 25 Dominique Borne, "Avant-propos", p. 7-8, Art et Patrimoine n° 6, Automne 1998. 26 Editorial, Art et Patrimoine, op. cit., p. 5. 27 Pierre Beghain, Le patrimoine : culture et lieu social, Presse de Sciences, 1999.

11

- le raisonnement déductif, qui procède du général au particulier, - le raisonnement inductif, qui de l'analyse des faits dégage une loi.

Principes généraux :

Les principes de l'histoire locale sont différents de ceux de l'histoire générale. Elle est individuelle (histoire d'un individu, d'un village) et ne permet pas de raisonner à grande échelle ; elle est différencielle : elle permet de mesurer l'écart entre l'évolution générale et l'évolution particulière ; elle est plus proche : les problèmes de la vie quotidienne, de l'aménagement de l'espace y sont à privilégier.

Cette histoire plus concrète touche l'enfant dans le domaine de l'émotionnel mais présente quelques pièges à éviter : le déterminisme (vouloir démontrer à tout prix), l'anachronisme (raisonner à une époque donnée avec les préjugés actuels), le manque de

problématique (la définir clairement et vérifier ses hypothèses à l'aide de documents de toutes sortes), la prétention (toute recherche est par nature incomplète, elle repose sur les données du moment et elle est toujours quelque peu subjective).

Stratégie par rapport aux documents :

Pour l'enseignant, le document peut avoir plusieurs fonctions28 : - illustrative (illustre le propos), - inductive (aide au questionnement), - critique (permet la remise en question des représentations ou permet d'avoir l'attitude

critique par rapport au document), - informative (fournit des éléments pour confirmer ou informer une hypothèse), - d'évaluation (maîtrise d'un savoir-faire, la mise en œuvre d'une capacité méthodologique ou le réinvestissement d'une connaissance). 3.2 - Objectifs inhérents à la recherche en histoire locale

� Compétences transversales :

- avoir une démarche d'investigation, d'auto-documentation, de confrontation d'idées, - élaborer un projet et le faire évoluer dans le temps, - communiquer le produit de sa recherche.

� Compétences dans le domaine de la maîtrise de la langue :

- affiner l'apprentissage de la lecture et en développer la pratique, - multiplier les occasions de manier une langue dont le fonctionnement sera bien maîtrisé pour faciliter les activités de communication, d'expression et de création, - aider les élèves à exploiter efficacement l'information dont ils disposent pour accroître leurs connaissances et à se constituer progressivement des méthodes de travail conduisant à l'autonomie. 28 D'après Jean Maréchal, La fonction des documents, la leçon d'histoire-géographie, C.N.D.P. Bourgogne, 1995, p. 23-24.

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� Compétences d'ordre disciplinaire :

- acquérir une méthodologie de base de l'histoire adaptée aux élèves de l'école primaire et concernant les lieux de ressources (bibliothèques, mairies, archives…) et le traitement des documents (type, provenance, authenticité, auteur, date, intérêt…),

- acquérir un vocabulaire de base, - chercher à faire saisir quelques caractéristiques d'une époque donnée, - poser des jalons dans le temps. Cette problématique historique est nécessairement un travail en interdisciplinarité. "La polyvalence des maîtres donne sa spécificité à l'école primaire. Loin d'imprimer une simple juxtaposition d'enseignements disciplinaires, elle favorise la mise en œuvre de démarches faisant appel à plusieurs disciplines pour construire ou conforter un apprentissage29. Tout ce travail peut être adapté au cycle 2 ou au cycle 3, l'objet historique étant appréhendé en rapport avec le niveau des enfants, mais ayant comme but premier de mieux comprendre le passé.

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3.3 – Les sollicitations historiques du milieu Chaque recherche s'appuiera sur le document, qui comme le précise Paul Veyne est "tout événement ayant laissé jusqu'à nous une trace matérielle"30.

Tout cet ensemble de matériaux historiques se présente selon :

- l'aspect archivistique qui sous-tend toute recherche en histoire et propose le document à l'état brut (souvent dans les livres celui-ci est découpé, élagué, transcrit, traduit, mis en forme...). "A travers les archives, le passé s'intègre dans la civilisation de notre temps (...) elles sont la mémoire du temps à venir"31. Cette recherche des archives peut s'effectuer dans l'environnement proche de l'enfant (école, mairie, archives municipales, maison, ...). Elle intègre les documents écrits, figurés (photographies anciennes, reproduction d'œuvres authentiques, des cartes postales et des photographies récentes) ou planimétriques (cartes, plans, terriers, ...), sonores (témoignages enregistrés, musique, ...), filmiques (films-documents de diverses époques).

- l'aspect paysager, qui permet à l'enfant de comparer l'espace où il évolue, avec des espaces antérieurs.

- l'aspect monumental, traité pour comprendre l'implantation et le rôle des monuments, l'évolution de la morphologie d'un quartier, d'un village, d'une ville ; 29 Les programmes à l'école primaire, C.N.D.P., Hachette, 1995, p. 39. 30 Paul Veyne, Comment on écrit l'histoire, Points-Histoire, Ed. du Seuil, 1971, p. 74. 31 Jean Favier, Les archives, P.U.F. édition corrigée 1980, p. 75-77.

13

- l'aspect muséographique, qui prend place à travers les objets du passé et que l'enfant peut appréhender dans son environnement proche ;

- l'aspect témoignage, qui rend compte de la mémoire collective.

[sommaire]

3.3.1 LES ARCHIVES Définition

Les archives sont l'ensemble des documents reçus ou constitués par une personne

physique ou morale, ou par un organisme public ou privé, résultant de leur activité, organisé

en conséquence de celle-ci et conservé en vue d'une utilisation éventuelle32.

Les documents écrits ne constituent pas à eux seuls les fonds d'Archives. Aux textes

manuscrits ou imprimés peuvent être ajoutés, les documents planimétriques (plans, cartes,

relevés, ...) ou iconographiques (dessins, gravures, ...), les documents photographiques,

cinématographiques, sonores, etc.

Tous ces documents peuvent se présenter de manière très différente :

- feuille, livret, rouleau, livre, affiche, pour les écrits, films, cassettes audio et vidéo,

pour les documents audio-visuels.

L'étude archivistique sous-tend toute recherche en histoire.

Centres de ressources

Les premiers lieux où la documentation est présente sont les lieux proches :

- chez les particuliers,

- à l'école,

par lesquels il faut commencer la recherche et impliquer tous les jeunes partenaires. Viennent ensuite les centres institutionnels : mairies, bibliothèques, archives communales et départementales et fonds notariaux éventuellement.

Méthodologie

L'explication d'un document historique se plie à des règles précises qui permettent de

le définir :

a) Lecture, voire transcription si le document est ancien (problème de paléographie),

b) critique externe du document :

32 Favier J., Les Archives, P.U.F., 1991, revue corrigée, p. 3.

14

* environnement historique,

* analyse du document : son intérêt par rapport à la problématique choisie,

* sa crédibilité (original ?).

Un tableau synthétique de l'étude d'un document nous est proposé par le C.R.D.P. de Nancy33.

.

FAIRE LE COMMENTAIRE D'UN DOCUMENT, C'EST...

... DECRIRE le document, c'est-à-dire repérer et indiquer les INFORMATIONS qu'il contient

... MOBILISER des savoirs,

des connaissances

POUR

... SITUER le document dans

... EXPLIQUER le document, c'est-à-dire associer à ces informations des savoirs pertinents

son contexte historique ou géographique et par rapport à son auteur

... IDENTIFIER la nature de ce document, mais aussi exploiter

POUR ABOUTIR A ...

... DEGAGER les LIMITES et l'intérêt de ce document, c'est-à-dire : le critiquer

33 D'après "Histoire-Géographie en O. R. Pratiques des Objectifs de Référence", C.R.D.P. Nancy, p. 55.

15

16

Une grille d'étude de document peut aider l'élève dans sa recherche.

Travail sur documents d'archives Thème de la recherche :

Type de document

AuteurDestinataire

Techniqued'écriture et

support

Date Intérêt du document

17

Etude de document n° 1

Carte postale du moulin d'Auvieux à Domfront-Saint-Front.

a) Intitulé et provenance

Carte postale du Moulin d'Auvieux à Domfront-Saint-Front, début XXe siècle, Arch. dép. Orne, 3 Fi Topo.

b) Contexte historique :

Au début du XIXe siècle, près de 900 moulins et usines hydrauliques sont

recensés dans l'Orne. A la fin du siècle, beaucoup de ces sites ont disparu puisqu'en 1888

il ne reste plus que 163 moulins. De même la grosse métallurgie a disparu au milieu du

XIXe siècle.

Cependant, dans de nombreuses activités, l'énergie hydraulique reste prioritaire

au début du XXe siècle. Puis progressivement la vapeur d'eau et l'électricité la remplacent.

c) Vocabulaire / notions :

- Meunier

- Minotier

- Lecture de plans et cartes

- Technologie du moulin

d) Intérêt du document :

Cette carte postale du début du XXe (entre 1904 et 1914 vraisemblablement)

est superbe pour la qualité de l'image du moulin et de sa roue, près duquel pose

majestueusement une femme en habit d'époque (la propriétaire ?) et un couple, probablement

le meunier et son épouse.

e) Prolongements possibles à l'étude :

- Etude similaire sur un moulin local

- Technologie du moulin à eau ou à vent

- Etude systématique

Source d'énergie

Mécanisme :

Moyen de transmission

+

Matière première

Produit fini

Carte postale du moulin d’Auvieux à Domfront-Saint-front, Début XIXe siècle,

3 fi topo,Arch. Dép. de l’Orne

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Etude de document n° 2

Liste nominative des habitants de Champsecret en 1901.

a) Intitulé et provenance :

Liste nominative des habitants de Champsecret établie lors du recensement de

la population de 1901, Arch. dép. Orne, M 1466.

Livret imprimé rempli de façon manuscrite.

b) Contexte historique :

Quinquennaux au long du XIXe siècle et jusqu'à 1936, les recensements de

population sont plus espacés ensuite.

Les listes établies à cette époque comportent de nombreux renseignements sur

les personnes elles-mêmes et aucune donnée statistique contrairement aux recensements après

1950.

La démographie y trouve en premier lieu, un terrain d'étude fort riche que

complètent d'autres recherches :

* Composition de la population (tranches d'âges)

* Répartition de la population

* Etudes onomastiques

* Etudes socio-économiques

c) Vocabulaire / notions :

Liste nominative

Profession

Situation

Lecture sélective

Calculs de statistiques

d) Intérêt du document :

Etudiée lors d'une recherche sur les anciens métiers du bois (Champsecret est

située près de la Forêt d'Andaines), l'étude de la liste nominative de 1901 a fait ressortir que

158 personnes sur 2508 étaient en relation avec cette activité (voir tableau).

Une page du registre de la liste nominative de Champsecret,

1901, M 1466, Arch. Dép. de l’Orne

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D’après l’étude du document, Les artisans du bois à Champsecret en 1901 :

Bûcherons .........................................................................................................…………..... 71

Charbonniers .......................................................................................................………….. 49

Lattiers .................................................................................................................………..... 15

Boisseliers ..........................................................................................................…………... 8

Sabotiers .....................................................................................................…………........... 5

Charrons ......................................................................................………….......................... 3

Vanniers ............................................................................................................………….... 3

Cercliers .................................…....................................................................….….…...….. 2

Cuilleronniers ....................................................................................………...................…. 2

___________________________________________________________________________

TOTAL ………………………………………………………………………..……158

(population total de la commune : 2 508 hab.).

e) Prolongements possibles à l'étude :

- recherche de témoignages d'anciens artisans du bois,

- visite d'une scierie,

- la filière bois actuellement,

- collection d'objets anciens.

Deux cartes postales de Champsecret, début XXe siècle,

3 fi topo, Arch. Dép. de l’Orne

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Etude de document n° 3

Lettre de 1799, Tinchebray. Recherche préparée par Mme Rose-Blanche

Le Meur (Service Educatif, Arch. dép. Orne, 2nd degré).

a) Intitulé et provenance du document :

Lettre manuscrite de l'administration municipale du canton de Tinchebray à

l'administration centrale du département de l'Orne.

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b) Contexte historique :

Contexte historique (d’après Abbé L.V. Dumaine, Tinchebray et sa région au bocage normand, t. III, 1885). "Pour éviter toute surprise et résister à une attaque de vive force, si elle était tentée, l'administration locale avait jugé indispensable de fortifier Tinchebray. On avait donc entouré de fortifications improvisées le centre de la ville, de manière à en faire comme une sorte de citadelle, le cœur de la place et le lieu de refuge contre le danger. Des redoutes furent établies vers le Haut–Hamel, à la Porte de Condé, dans la rue de Vire, aux Basses-Rues, dans les rues de la Geôle, du Commerce et de la Prison. Ces redoutes n'étaient que des espèces de barricades, formées d'amas de pierres et de terre, construites à la hâte, mais suffisantes cependant pour arrêter un ennemi dépourvu d'artillerie"

Le bourg de Tinchebray fut effectivement attaqué par Frotté durant la première guerre, le 11 germinal an IV (31 mars 1796) . La lutte fut acharnée, les assiégeants mirent le feu à la ville mais, malgré l'incendie qui détruisit 84 maisons, les habitants de Tinchebray résistèrent et, au bout de 7 heures de combats, Frotté donna le signal de la retraite. En 1799, "Frotté brûlait du désir de s'emparer de Vire, afin de s'en faire un point d'appui dans la contrée. Ce fut pendant cette marche sur Vire, qu'eut lieu une fausse attaque sur Tinchebray, le 3 brumaire an VIII (25 octobre 1799). Sans doute la journée du 11 germinal avait été trop funeste à Frotté pour qu'il tentât de prime abord à en courir de nouveau les chances ; il lui fallait de l'artillerie, il n'en avait pas. Cependant les ressources de Tinchebray pour la défense étaient bien faibles à ce moment. Les fournisseurs, n'étant pas payés, se refusaient à procurer des approvisionnements, la moitié de la compagnie franche était sans armes, et l'autre moitié avait en grande partie des armes de chasse empruntées. Les volontaires ne touchaient point de solde. Le général Digonnet avait autorisé à prendre 300 cartouches à Domfront, mais par suite de l'état de guerre du pays, il était impossible d'aller les chercher. Telle était la situation de Tinchebray… Mais Frotté ignorait ce qu'il en était ; il se borna donc à envoyer cet Avis aux habitants" :

"Mais si nous retrouvons en vous des ennemis tels que vous l'avez été, vous pouvez vous attendre au même

châtiment et vous ne pouvez pas douter que nous n'ayons plus que jamais la possibilité de l'effectuer. C'est à vous de choisir ; vous pouvez compter dans l'un et l'autre cas sur notre parole.

Fait et signé ce 25 octobre pour être affiché dans Tinchebray. Le comte Louis de Frotté, commandant pour le Roy la province de Normandie.

Dans peu de jours vous devez décider" En réalité, l'Avis aux habitants n'est pas un ultimatum. Il somme les habitants de Tinchebray de chasser

les réfugiés, c'est à dire les Républicains, de la ville et de cesser de porter les armes contre l'armée royale.

c) Vocabulaire (notions) :

1. Le 3 brumaire an 8, du calendrier révolutionnaire, correspond au 25 octobre 1799, calendrier grégorien.

2. Frotté (Louis de) : Né à Alençon, le 5 août 1766, fusillé à Verneuil, le 19 février 1800. Il dirigea les chouans organisés en Armée catholique et royale durant les deux guerres civiles (1795-1796 et 1799-1800). Blondel était le pseudonyme qu'il s'était choisi.

3. Chouans : rebelles contre-révolutionnaires qui provoquèrent des troubles dans le département de l'Orne, particulièrement dans l'Ouest (région de Domfront, Flers, Tinchebray) de 1795 à 1800.

4. Digonnet ( 1762-1811) : général commandant du département de l'Orne de 1798 à 1800.

5. Condé : Condé-sur-Noireau ; Lonlay : Lonlay l'Abbaye.

Notions complémentaires :

- la Révolution française ;

- les Chouans ;

- correspondance des calendriers révolutionnaires et républicains ;

- paléographie du XVIIIe : transcription.

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LES CHOUANS A TINCHEBRAY EN 1799Archives départementales de l'Orne, L 528

Tinchebray, le 3 brumaire an 81 de la République française, une et indivisible à 8 heures du soir

L'Administration municipale du canton de Tinchebray à

L'Administration centrale du département de l'Orne.

Citoyens,

Nous vous envoyons copie de la lettre que Blondel-Frotté2 a écrite aux habitants de Tinchebray qui a été déposée à notre secrétariat sur les quatre heures après midi.

A quatre heures et demie, cinq à six cents chouans3 armés se sont présentés à une des redoutes, sans doute pour savoir si, d'après la lettre, on allait se rendre. A l'instant, la générale a battu, chacun s'est porté au poste qui lui était assigné ; on a tiré sur eux cinq à six coups de fusils, un d'eux a laissé sur la place un morceau du mouchoir de son col ; ils ont disparu et, jusqu'à l'heure présente, nous ne les avons pas entendu.

Mais, citoyens, en sommes nous quittes ? Quelle pourra être l'issue de cette affaire ? Sans troupe, sans armes, sans munitions que pouvons nous espérer ?

Bientôt sans doute, vous apprendrez que notre cité sera réduite en cendres et que nous serons ensevelis sous les débris de nos murailles (car nous périrons plutôt que de céder aux brigands).

Vous devez maintenant reconnaître combien vous êtes coupables ainsi que le général Digonnet4, n'ayant cessé de vous faire part de notre position et vous ayant sans cesse inutilement demandé de la troupe, des armes et des munitions.

Nous allons, avant de périr ou de vaincre, faire part au ministre, au Directoire exécutif et au Corps Législatif de votre conduite à notre égard.

Quoi, administrateurs insouciants, pour ne pas dire plus, vous savez les brigands en force dans nos environs et vous nous retirez une malheureuse compagnie que nous avions pour nous défendre, tandis que Domfront, Mortain, Vire et Condé5 sont remplis de troupes, tandis que Lonlay, beaucoup moins conséquent que Tinchebray en a ! Vous nous savez presque sans armes et sans munitions et vous direz après cela que vous et le général ne voulez pas nous détruire ?

Vous répondrez de nos malheurs ! Salut, respect.

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d) étude du document et intérêt :

Etude du document 1. Cherchez le sens des mots "redoute", "générale". 2. Reconstituez (en une seule phrase) le contenu de la lettre que Blondel-Frotté a fait

déposer au secrétariat. 3. Que s'est il passé à quatre heures et demie ? 4. Quelle est la situation à huit heures ? 5. Relevez les deux mots qui font penser que la ville est fortifiée. 6. Les chouans ne disposant pas d'artillerie, quel moyen peuvent-ils utiliser pour obliger la

ville à se rendre (l'administrateur y fait allusion) ? 7. Que reproche l'administrateur municipal à l'administration centrale ? De quoi menace-t-il

les administrateurs ? 8. Situez sur la carte les lieux cités.

Plan de la ville de Tinchebray, avec le périmètre de défense

à la journée du 11 germinal an IV

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Réponses 1. Redoute : ouvrage de fortification isolé.

Générale : batterie de tambours ou sonnerie de clairons appelant les militaires au combat.

2. "Rendez-vous, sinon nous attaquerons à quatre heures et demie." 3. A quatre heures et demie, 5 à 600 chouans se sont présentés à une des redoutes mais les

habitants de Tinchebray se sont défendus et ont touché un des attaquants. Ceux ci se sont retirés.

4. A huit heures, la situation n'a pas changé mais les habitants de Tinchebray ont peur. 5. La ville est fortifiée car il y a des redoutes et des murailles. 6. L'incendie est une technique souvent utilisée par les chouans. L'administrateur parle de

sa cité réduite en cendres. 7. L'administrateur municipal reproche à l'administration centrale de ne pas leur avoir

fourni des troupes, des armes, des munitions. Il reproche aux administrateurs leur insouciance et les menace de mettre le gouvernement au courant de leur conduite.

e) Prolongements possibles à l'étude :

- Lecture d'ouvrages sur la question :

Ouvrages consultés : Desdoits C., " La division de Saint-Jean-des-Bois, aspects de la chouannerie dans le bocage normand", Le Pays Bas-Normand, 1992, n° 3 & 4.

Abbé L.V. Dumaine, Tinchebray et sa région au bocage normand, t. III, 1885.

La Sicotière L., Louis de Frotté et les insurrections normandes. 1793-1832, Paris, Plon, rééd. 1989.

Balzac H. (de), Les Chouans.

- Visite des lieux concernés, ainsi que par exemple le château de Couterne où

réside encore un descendant de Louis de Frotté.

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3.3.2 LES PAYSAGES

Définition

La notion de paysage a bien évolué ces dernières années. Les données naturalistes

concernant la simple observation d'un terroir, par exemple, ont pris une dimension historique.

En effet, l'homme depuis le Néolithique, a apporté sa marque de façon irréversible au milieu.

Gérard Chouquer34 précise que le paysage actuel est constitué de strates successives et

qu'il contient lui-même les indices de sa propre histoire.

Dans leur Guide de l'histoire locale (Seuil), Alain Croix et Didier Guyvarc'h abondent

dans ce sens :

"le paysage peut être considéré comme la mémoire où s'entassent, se recouvrent et

donc parfois s'effacent les traces que laissent les sociétés humaines à la surface de la terre".

Chaque époque a vu se développer des paysages différents comme l'expose Robert Pitte35

dans ses ouvrages.

Etudier le paysage s'avère donc indispensable dans une étude sur le milieu et aide à

appréhender de façon pertinente les notions d'espace et de temps.

Les ressources du milieu

Le milieu est un fonds inépuisable de paysages. Qu'ils soient ruraux ou urbains, un

simple regard permet de les repérer. L'analyse de documents donnera des informations quant à

leur évolution puisque, bien sûr, ils ne possèdent pas de datation précise.

Les activités en relation avec l'étude du paysage sont nombreuses :

- situation du village, de la ville, du quartier ;

- plan de l'habitat et des zones d'activités économiques ;

- évolution des formes paysagères avant et après remembrement ;

- voies de communication récentes et anciennes ;

- toponymie (nom de la ville, du village, des lieux-dits) et micro-toponymie (noms des parcelles).

34 Chouquer G., Histoire d'un paysage de l'époque gauloise à nos jours, Ed. Errance, 1995. 35 Pitte R., Histoire du paysage français, Tallandier, 2 volumes.

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Méthodologie de recherche

La démarche

La démarche hypothético-déductive s'impose dans ce genre de recherche qui

est un va-et-vient continuel entre le terrain et les documents. Partir du présent pour analyser

les éléments de manière régressive.

Analyser le paysage actuel "de visu"

Comparer � � Identifier sa représentation Cartographique actuelle

Etudier (Questionner) des documents anciens ou très anciens

Les moyens

Toute cette étude n'est possible que si l'enfant acquiert un certain nombre de

compétences pour / à travers :

- La lecture d'un paysage :

* découpage par plan

* description des éléments

* représentation graphique...

- La lecture de cartes et plans :

* différents types de cartes et plans (la carte topographique permet de situer les paysages)

* codes

* échelles

* interprétation (toponymie, population, classement des routes...)

* relief (courbes de niveaux)...

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- Les prolongements éventuels :

� étude de la photo aérienne (verticale : clichés I.G.N., oblique : photo prise

d'avion)

� étude de tableaux anciens de paysages (peintures, gravures)

� la toponymie

�le repérage sur plan et sur le terrain (itinéraires et / ou lieux)

� symbolisation des formes

� graphismes et arts plastiques : hachures, pointillés, ...

Exemple d'étude n° 1

Un paysage urbain : la ville d'Alençon

L'étude de différents plans anciens permet de définir l'emprise médiévale de la

ville d'Alençon.

Sur le plan actuel (1996), le report des rues et éléments urbains anciens (portes,

enceinte, tours) retrouvés sur un plan de 1745 donne le contour d'Alençon au milieu du

XVIIIe siècle avant le début de son expansion et la destruction de sa "gangue" médiévale.

Un plan de 1823 nous montre l'extension d'Alençon encore bien loin de celle

de la 2e moitié du XXe qui voit l'émergence de nouveaux quartiers (Perseigne, Courteille,

Alençon Village, La Croix-Mercier, ...) s'implantant dans des espaces autrefois réservés à

l'agriculture.

Les vues anciennes complètent cette étude.

Échelle en toises N �

32

Échelle 1/4000 N �

33

Échelle 1/9000 Nord �

34

Vue d’Alençon vers l’ouest, aquarelle, environ 1860

35

Vue aérienne vers l’est du nouveau quartier de Perseigne en cours d’aménagement (les

voies sont tracées, avant la construction des H.L.M.). Service municipal d’urbanisme

d’Alençon, 1964.

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Exemple d'étude n° 2

Un paysage rural : la commune de Radon

L'analyse de manière régressive des plans donnent de l'information concernant

les éléments du paysage rural : parcellaire, habitations, réseaux routiers. Il ne s'agira pas

d'obtenir une chronologie absolue en terme de datation mais d'une chronologie relative

(tel élément n'existait pas sur ce document donc il est postérieur à tel autre lui visible).

La comparaison de plans anciens (notamment du cadastre napoléonien) avec la carte I.G.N.

ou le cadastre actuel permet de retrouver les formes paysagères les plus récentes (nouvelles

voies de communications, nouvelles constructions) et les plus anciennes ou d'autres disparues

(voies, parcellaire, habitations, ...). Bref de mesurer l'évolution d'un paysage.

Radon, carte postale du bourg, environ 1920

37

Radon, évolution de la structuration des voies entre le début du XIXe siècle (cadastre

napoléonien) et la fin du XXe ( cadastre actuel). Fonds de carte, carte I.G.N., 1995, Échelle

1/2500 N �.

Légende : voies disparues

voies nouvelles

voies communes aux deux systèmes

� limites communales

38

RADON - Etude paysagère.

En surimpression sur une carte I.G.N. actuelle, les formes paysagères les plus anciennes

(parcelles) ayant disparu (vert), les voies dont certaines n’existent plus (rouge) et les

éléments nouveaux depuis deux siècles ( fond de carte). Source : Cadastre napoléonien

1808.

39

Vue du bourg, 3P2/141, Arch. dép. de l’Orne, Échelle 1/2500 N �

40

Radon, cadastre, 1995, vue du bourg, Échelle 1/2000 � N

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3.3.3. LES MONUMENTS

Définition

La notion de monument s'appuie sur la notion de site telle qu'elle est définie en

archéologie. Elle suppose des restes de lieux occupés par un établissement humain, soit

détruit et comprenant des vestiges immobiliers (ruines, substructions, matériaux de

construction) et des vestiges mobiliers (céramique, objets usuels, ...) dans le sol, ou soit non

détruit, partiellement ou bien conservé, présentant des vestiges immobiliers importants

encore en élévation (église, châteaux, écoles, maisons, ...).

A l'école primaire la seconde catégorie est le plus souvent prise en compte car plus

facile à appréhender. Il faudra cependant ajouter d'autres types de monuments qui de

prime abord ne semblent pas appartenir à ces catégories (cimetières, monuments

commémoratifs, …).

Les ressources du milieu

Elles sont bien sûr innombrables tant par leur nombre que par leur spécificité

puisqu'elles concernent l'activité humaine dans sa globalité.

Plusieurs catégories de monuments sont repérables ayant (ou ayant eu) chacune une

fonction précise :

Les édifices civils :

* militaires : châteaux, casernes, ...

* publics : mairie, écoles, hôpitaux, gares, lavoirs, ...

* économiques : commerces, artisans, entreprises, usines.

* privés : maisons, demeures.

Les édifices religieux :

* dolmen, menhir ;

* église, chapelle, abbaye, cathédrale ;

* cimetière.

Les monuments du souvenir :

* monuments funéraires, aux morts ;

* plaque commémorative, inscription, statue ;

plaque des noms des rues.

La méthodologie

Plusieurs études complémentaires peuvent être mises en place : l’étude historique, l'étude analytique, l’étude systémique et l’étude esthétique. L'étude historique

La documentation peut permettre de traiter un monument d'un point de vue chronologique et d'en mesurer l'évolution en terme de structure. Une telle recherche peut fournir des éléments précis concernant la localisation, la fonction, l'architecture et un cadrage chronologique (début d'implantation et / ou d'activité, phase d'évolution, de déclin d'arrêt, d'abandon) d'un site. L'étude analytique

Elle s'appuie plus sur une démarche expérimentale, qui se met en place lors de sorties exploratoires qui permettent des rencontres (architecte, propriétaire, guide, …) pour mieux appréhender le bâtiment.

observer � analyser � comparer

(partir du vécu, pour aller au perçu, puis au conçu)

1 – Localisation dans l’environnement plan de l’édifice

2 – Renseignements divers date de construction et / ou réaménagement

usages d’origine / actuel

état actuel

3 - Technique constructive et matériaux

Agencement général (extérieur et intérieur : mesures, formes, volumes et aménagements)

Matériaux de constructions

Maçonnerie extérieure

charpente et menuiserie intérieure

ouvertures

décors architecturaux

L'étude systémique

Elle concerne le bâtiment dans sa fonction et son utilisation.

1 – Le bâtiment dans son utilisation

Qui l’a fait construire ? Qui l’utilise ?

Quand l’a-t-on construit ? Quant l’utilise-t-on ?

Comment a-t-il été construit ? (Matériaux locaux ou non) Comment fonctionne-t-il ? (réseaux extérieurs : eau, gaz, électricité, déchets, …) � l’éco-système urbain

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2 – Le bâtiment dans sa fonctionnalité

disposition des pièces, fonction (dormir, manger, stocker, travailler, se réunir, …)

fonctionnement : ascenseurs, éclairage, chauffage, …

L'étude esthétique

Elle complète toutes ces données à travers le jeu :

* des lumières, des couleurs ; * des volumes, des proportions ; * des symétries, des formes…

Les compétences en jeu :

* la notion de chronologie absolue (datation) et / ou relative (avant / après) ; * la notion d'échelle ; * le dessin (de plan, en élévation, de décors architecturaux...).

Les prolongements

* construction d'une maquette * étude comparée de monuments de même type * apprentissage à la visite de tel site, etc.

Exemple d'étude n° 1

Les moulins - Argentan36

Les moulins sont des sites liés à l'implantation humaine et ont traversé les siècles. Ceux d'Argentan ne dérogent pas à la règle. Cette ville a vraisemblablement une origine gallo-romaine ainsi que l'attestent plusieurs vestiges de cette époque. Elle semble souffrir des invasions normandes puisqu'alors elle se couvre des premières fortifications. A partir du Moyen Age, Argentan devient un centre important qui a, au fil des siècles, une riche histoire. La dentelle du Point d'Argentan est certainement le plus beau fleuron de cette cité qui a beaucoup souffert des combats de 1944.

Les documents médiévaux conservés ne mentionnent apparemment pas les moulins mais leur origine doit certainement remonter à cette époque. Il faut attendre un document de 153137, pour en trouver trace.

La première représentation authentique de la ville d'Argentan date de 1690 où deux moulins sont repérables, dont celui d'Orion (l'autre étant sûrement celui de Lanoë)38. 36 Recherche effectuée en 1998 avec la classe CM1/CM2 de Mme Namont 37 Procédures intentées par les fermiers des moulins d'Argentan, pour contraindre les religieuses de Sainte-Clair de faire moudre leurs grains à leurs moulins (Arch. dép. Orne, H 4232).

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38 Il existe trois plans, réalisés au cours du XXe siècle, restituant l'organisation ancienne de la ville : en 1035 pour la première, en 1120 pour la seconde et au XVe pour la dernière et figurant ces deux moulins.

Vue de la ville d'Argentan vers l’ouest (1690), original Mairie d'Argentan

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Exemple d'étude n° 2 : Le château de Carrouges

Extrait d'un document pédagogique d'aide à la visite, élaboré par le service d’actions

éducatives du château.

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3.3.4 LES OBJETS DU PASSÉ

Définition

Une exposition à Rouen en 1999 s'intitule ainsi : "Pots de terre, fragments d'histoire39"

démontrant l'importance de ces objets pour la connaissance historique. Ils sont témoins d'une

histoire au même titre que les documents et l'iconographie.

Ainsi l'objet n'est pas seulement (mais il doit l'être aussi !) la belle pièce conservée

dans un musée. L'objet, même le plus banal, constitue un document historique porteur de sens.

Un livre connu abonde dans ce sens puisqu'il s'intitule 50 objets du temps passé, pour s'initier

à l'histoire (voir bibliographie à la fin du recueil).

Les ressources du milieu

Dans cette optique chaque objet a sa valeur et sera un moyen pour l'enfant d'entamer

des recherches dans son environnement proche et ainsi de s'initier à la démarche de l'histoire

dans sa quête de documentation.

Les objets "archéologiques" attirent facilement les regards (silex, hache polie,

monnaies anciennes, voire céramique ou armes...). Les objets de la vie quotidienne d'autrefois

(porte-plume, ancien fer à repasser, matériel pour laver le linge au lavoir...) excitent la plus

vive curiosité.

Les musées consacrés à l'archéologie ou au patrimoine en général sont nombreux,

facilement accessibles et disposent souvent d'une aide à la visite (fiches, livrets,

commentaires...).

Méthodologie de la recherche

Les recherches dans le grenier, la cave, la grange ou auprès des grands-parents seront

fructueuses n'en doutons pas. Un lot important d'objets anciens peut ainsi arriver en classe.

Reste l'analyse.

Chaque objet pourra être "traité" par une fiche d'identification de la date du prêt, des

propriétaires, du lieu de trouvailles, sa catégorie, c'est-à-dire les renseignements externes.

Les renseignements internes, correspondant à l'analyse de l'objet, nécessiteront

un travail plus approfondie ;

* rapport du témoignage du propriétaire de l'objet quant à la fonction, la date... ;

* recherche bibliographique pour déterminer l'identité de l'objet (voir bibliographie jointe) ;

*Comparaison avec des objets similaires dans des musées.

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39 "Pots de terre, fragments d'histoire", Musée des Antiquités, Rouen (Exposition tenue du 28 juin au 15 novembre 1999).

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3.3.5 LES SOURCES ORALES

Définition

Les sources orales constituent la méthode la plus simple d'avoir des informations sur le

passé. Pour l'enfant, elles peuvent constituer les premières données du discours historique :

"mon grand-père m'a raconté qu'il a fait la guerre..., ma grand-mère lavait le linge au lavoir

quand elle était petite...".

A ce titre, ils représentent de précieux témoignages mais restent confinés sur les

souvenirs personnels et la vie quotidienne et aussi peuvent être "déformés" par le temps.

Peut-il d'ailleurs en être autrement car la mémoire et l'analyse propre à chacun ont leurs

limites ? De plus, ce genre de recherche ne peut remonter à plus que trois ou quatre

générations, c'est-à-dire environ un siècle.

Au-delà de ses limites, cette méthode présente d'indéniables intérêts :

- ouverture de l'école sur le monde ;

- place de chacun dans la vie collective ;

- ouverture à la notion d'espace et de temps ;

- maîtrise de la langue.

Les ressources du milieu

Le milieu familial constitue le premier cercle de relations. Selon les projets, des

personnes différentes peuvent être contactées (lavandière, ancienne maîtresse d'école,

personnes ayant participé à la guerre, etc.).

L'audio-visuel et l'écrit permettent d'avoir accès à d'autres témoignages.

Méthodologie de la recherche

L'interview constitue la phrase clé de la recherche. Ses implications dans le domaine

de la maîtrise de la langue sont évidentes pour :

- prendre contact ;

- élaborer le questionnaire ;

- interviewer ;

- transcrire ;

- rédiger, présenter...

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L'interview nécessite la rencontre d'interlocuteurs disponibles et adéquats (contacts

avec les enfants, élocution aisée, expression claire, mémoire fournie...).

La prise de note ne peut être réservée qu'aux rencontres courtes. Dans le cas contraire,

un magnétophone ou mieux un camescope s'impose.

Exemple de recherche

L'alimentation de nos grands-parents. Enquête réalisée par les CM1-CM2 de l'école du

Pin-la-Garenne, année 1990.

Résultats du dépouillement de l’enquête :

L’ALIMENTATION DE NOS GRANDS-PARENTS

(quand ils avaient notre âge)

Les questions de notre enquête étaient sur les thèmes suivants :

1 - La composition des différents repas

- Les aliments du petit déjeuner, du déjeuner, du dîner ; - La composition du goûter ; - La nourriture des bébés ; - Les repas de tous les jours : repas du dimanche et jours de fêtes.

2 - La consommation des fruits et légumes

- Fruits et légumes qui consommés fréquemment autrefois ne le sont presque jamais maintenant ;

- Fruits et légumes que l’on consomme couramment aujourd’hui alors qu’ils étaient rares ou introuvables autrefois.

3 - La consommation de la viande

- En mangeait-on tous les jours ? - Quelles sortes de viande mangeait-on le plus souvent ? - Achetait-on la viande chez le boucher ?

4 – La conservation des aliments

- Avait-on un réfrigérateur ? - Mangeait-on des conserves, des surgelés ?

5 – Les boissons

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- Y a-t-il des changements dans leur nature ou leur présentation ?

6 – La préparation des plats

- Etaient-ils préparés de la même façon ? - Passait-on plus ou moins de temps à les préparer ?

7 – La variété des menus - Etaient-ils plus ou moins variés qu’aujourd’hui ?

8 – Le ravitaillement

- Où et comment se ravitaillait-on ? ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ ~ Parmi toutes les réponses apportées, voici celles qui sont revenues le plus souvent : 1 – La composition des différents repas (inventaire des aliments) - Petit-déjeuner : soupe, tartine, hareng, fromage, œufs, lard

- Déjeuner : viande : porc ragoût de bœuf ou de mouton pot au feu soupe ou légumes fromage (parfois)

- Goûter : tartine : avec un morceau de sucre ou fromage ou confiture faites à la maison fruits du jardin (surtout des pommes cuites)

- Dîner : soupe au lait à la citrouille aux légumes œufs ou harengs fromage ou fromage blanc

- Nourriture des bébés : lait de vache allaitement maternel bouillies de céréales à partir de 6 mois

- Les dimanches et les jours de fêtes :

Plats plus recherchés : volailles (le plus souvent élevées à la maison) pot au feu tartes faites à la maison 2 – La consommation des fruits et des légumes :

- fruits et légumes consommés fréquemment autrefois : trèfles, oseille, rutabagas, topinambours, fèves. - fruits rares ou introuvables autrefois : fruits exotiques, oranges, bananes, ananas, kiwi, pamplemousse, raisin, melon.

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3 – La consommation de la viande :

- on ne mangeait pas de viande tous les jours. ; - la viande la plus consommée était la viande de porc ; on mangeait également du lapin et des volailles ; - on achetait très rarement la viande chez le boucher ; on l’achetait chez le fermier ; on élevait soi-même très souvent les volailles. 4 – La conservation des aliments :

- on n’avait pas de réfrigérateur mais un garde-manger placé dans une pièce fraîche ; - les conserves industrielles étaient extrêmement rares ; les conserves étaient surtout familiales (fruits et légumes du jardin) ; les produits surgelés étaient inexistants.

5 – Les boissons :

- la boisson la plus répandue était le cidre (conservé en fût), le vin était plus rarement consommé ; - les gens ne buvaient pas de bière ; - l’eau était tirée très souvent d’un puits ; - les bouteilles en plastique étaient inexistantes.

6 – La préparation des plats :

- On consacrait plus de temps à la préparation des plats : . mode de cuisson (cuisinière à bois) ; . viandes en sauce (ragoût, pot-au-feu) ; . pas de conserves industrielles ; . les fermes ne travaillaient pas à l’extérieur. 7 – Les menus étaient beaucoup moins variés qu’aujourd’hui 8 – Le ravitaillement :

- On achetait la viande chez le fermier ; - on se ravitaillait : à l’épicerie du village (quand il y en avait une) ; - aux commerçants ambulants (tournées hebdomadaires) : pain, épicerie. Informations complémentaires : toutes les personnes qui ont répondu au questionnaire vivaient alors à la campagne.

Merci à tous ceux qui ont voulu participer à cette enquête et qui nous ont ainsi permis de faire des comparaisons intéressantes avec notre alimentation actuelle. La Classe des CM1-CM2

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3.4 - Quelques recherches et sujets d'étude possibles40

* Etude et / ou illustration de l'histoire générale par des documents locaux ; * recherches des données historiques proches ; * histoire d'un lieu (école, château, église, ...) ; * histoire d'un événement (que l'on peut traiter selon le plan : cause, déroulement, conséquence, plus pour le côté pratique que par cette logique qui est souvent battue en brèche, car trop simpliste pour relater un événement) ; * histoire d'un groupe social ou d'une population donnée ; * histoire économique, sociale, culturelle, sportive, ... ; * histoire des paysages, des routes, ... ; * histoire thématique sur l'eau (la place de l'eau dans la vie quotidienne, l'alimentation, la santé, le travail, les loisirs…, à plusieurs époques), la forêt (son rôle, sa gestion depuis plusieurs siècles), les bâtiments communaux (type, fonction sociale, architecture…).

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40 A ce sujet consulter : Jean-Noël Luc, L'histoire par l'étude du milieu, op. cit., et Alain Croix et Didier Guyvarc'h, Guide de l'histoire locale, Seuil, 1990.

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4 – EXPERIENCES PEDAGOGIQUES 4.1 - Une séance basée sur l'exploitation d'un document écrit d'origine locale

"Les cahiers de doléances, de Radon" (voir annexe). Ecole de Radon - classe de CM1-CM2, année 1998-1999. 4.1.1 - Préparation de la séance

Cette séance s'intègre dans une programmation chronologique (l'Ancien Régime puis la Révolution Française, voir programmation dans les annexes). Elle aurait pu aussi s'intégrer dans une autre conceptuelle (la notion de pouvoir, de régime politique par exemple). Contenu de la séance en termes de savoirs problématisés

* notion-noyau : la réunion des Etats Généraux à l'initiative du roi (assemblée élue par les trois ordres : clergé, noblesse, tiers état) est précédée au début de l'année 1789 par la rédaction des plaintes et demandes de la population consignées dans des cahiers manuscrits. Ces doléances mêmes refondues ou réécrites reflètent dans l'ensemble l'état d'esprit de la population qui se plaint avant tout de la lourdeur du régime seigneurial et de la difficulté quotidienne dans la fin du XVIIIe siècle.

* concepts organisateurs : - la monarchie, - la société d'ordres, - le système seigneurial. * vocabulaire spécifique : tiers état, paroisses, privilèges, corvées, doléances, droits de péages, ... Objectifs de connaissances , de démarches, de comportements

* Connaissances :

- la Monarchie Absolue, l'administration royale, - les trois ordres de la Société de l'Ancien Régime, - les acteurs de la rédaction (participants, écrivains, ...), - le contenu des doléances (plusieurs articles étudiés dans l'ordre de rédaction), - le vocabulaire spécifique.

* Démarches :

- comprendre l'interaction entre histoire locale et histoire générale, - repérer le cadrage chronologique (frise),

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- acquérir et / ou compléter une méthodologie de base concernant, l'analyse d'un document,

- affiner l'apprentissage de la lecture, - analyser un paragraphe, - déchiffrer (des problèmes de paléographie et d'orthographe peuvent apparaître), - élaborer un tableau synthétique en trois parties qui permettra aux enfants de

fixer les relations entre les différents éléments :

partie 1 : les doléances, partie 2 : les défauts de l'Ancien Régime qui ont suscité ces doléances, partie 3 : les réalisations qui satisferont les revendications énoncées (partie à garder pour l'étude de la France révolutionnaire). * Comportements :

- savoir travailler en petit groupe, - accepter la confrontation d'idées (mise en commun des recherches

et élaboration du texte de synthèse). Place de la séquence dans la programmation En amont : - la vie quotidienne au XVIIIe siècle (la vie rurale, la forêt, ...) - les différents ordres de la Société - le système seigneurial En aval : - la Prise de la Bastille - les événements qui déclenchent la Révolution Française (Juin 1789) création de l'Assemblée Nationale, réaction du roi et prise de la Bastille le 14 juillet). 4.1.2 - La séance (voir tableau synoptique pages suivantes)

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4.1.3 - Après la séance

- Analyse de la séance (évaluation de la concordance entre les objectifs et la tenue de la séance) :

- Les objectifs cognitifs :

Le contenu global des cahiers de doléances a été dans l'ensemble compris. Sont bien apparues les interactions entre les différents ordres. Le vocabulaire spécifique malgré une liste de mots et leur définition pose problème et reste à approfondir.

- Les objectifs de démarches :

La dimension locale de ces documents s'intégrant malgré dans une histoire générale permet aux élèves d'avoir une meilleure représentation de ces événements et de cette époque. L'analyse qui passe d'abord par la lecture de documents et leur transcription, reste un exercice délicat pour les enfants qui ont besoin de l'aide de l'enseignant pour cette tâche et pour remplir la première partie de leur tableau (doléances) et la seconde partie (défauts de l'Ancien Régime). La partie 3 sera exploitée plus tard.

- Objectifs comportementaux :

Le travail a été correctement mené par groupes et la confrontation a été fructueuse. - Conclusion :

Globalement, séances pleines d'intérêt. L'évaluation reste cependant difficile dans ce genre d'exercice. Elle pourra être pratiquée lors de l'étude d'autres cahiers de doléances en terme de connaissances (les acteurs, le contenu des articles, …) et en terme de méthodologie (travail sur le tableau à trois colonnes, …).

Un texte de synthèse a été collectivement élaboré :

"Les cahiers de doléances de la paroisse de Radon ont été écrits en mars 1789. Ils

contiennent cinq articles précédés d'un long texte d'introduction. Les habitants de Radon y

remettent en cause le système seigneurial (banalité des moulins et droit de colombiers),

le système fiscal (suppression des privilèges et des différents impôts répartis en un seul).

Ils demandent de plus le rétablissement des droits d'usage et de chasse en forêt d'Ecouves.

Mais ils sont très respectueux du roi".

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- Pour les séances suivantes :

- Suite de l'élaboration d'un tableau synthétique en trois colonnes ; - étude de nouveaux documents (autres cahiers de doléances - ville par

exemple) pour une décontextualisation des acquis ;

Ces deux éléments doivent permettre de mettre en évidence les causes profondes telles que l'inégalité sociale, le système politique absolutiste, l'absence de liberté, sans oublier les facteurs déclenchants que sont la crise économique sévère et la grave crise financière. - évaluation sommative sur les contenus en terme de connaissances et de démarches.

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4.2 - Un sujet d'étude en histoire locale41

"Radon il y a 100 ans" 4.2.1 - Présentation du projet

Dès le début d'année scolaire, la proposition de participer à un concours organisé par les Archives départementales de l'Orne et ayant pour thème "Des lieux, des gens... notre histoire communale" été proposé aux enfants. Il a été défini ensemble une problématique plus précise traitée selon trois aspects : - la vie quotidienne, - le travail des gens, - le bourg de Radon. Un échéancier a été fixé ; il a ainsi été convenu de prendre tout le 1er trimestre pour se "documenter", récupérer un maximum de matériaux historiques (objets, documents écrits et audio-visuels, témoignages, ...).

A partir du second trimestre l'étude doit être abordée selon les trois aspects, chaque enfant se déterminant selon son choix sur une des trois recherches possibles.

Au 3e trimestre, l'exposition et les livrets seront élaborés.

41 Mis en pratique en classe de CM1-CM2, école de Radon, année scolaire 1997-1998.

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4.2.2 - Objectifs inhérents à cette recherche

� Compétences transversales : - élaborer un projet et le faire évoluer dans le temps, - avoir une démarche d'investigation, d'auto-documentation, de confrontation d'idées, - communiquer le produit de sa recherche. � Compétences dans le domaine de la maîtrise de la langue :

- affiner l'apprentissage de la lecture et en développer la pratique, - multiplier les occasions de manier une langue dont le fonctionnement sera bien

maîtrisé pour faciliter les activités de communication, d'expression et de création, - aider les élèves à exploiter efficacement l'information dont ils disposent pour

accroître leurs connaissances et à se constituer progressivement des méthodes de travail conduisant à l'autonomie.

� Compétences d'ordre disciplinaire :

- acquérir une méthodologie de base de l'histoire "accès des documents" pour comprendre le passé, - acquérir un vocabulaire de base, - chercher à faire saisir quelques caractéristiques d'une époque donnée (en l'occurence ici la 2e moitié du XIXe siècle et le début de XXe siècle). au niveau local et au niveau national, - poser des jalons dans le temps. 4.2.3 - Démarche générale

Cette problématique historique a été le point de départ d'un travail en pluri-disciplinarité.

Cette idée est accréditée par Pierre Giolitto, qui pense "que l'histoire peut s'intégrer dans un processus pluri-disciplinaire"42.

42 Pierre Giolitto, L'enseignement de l'histoire aujourd'hui, op. cit., p. 80.

Programmation de type pluri-disciplinaire autour d'un projet en histoire locale :

Tableau synoptique

Production d'écrits :

Ecrits en relation avec le projet : questionnement, compte-rendu, lettres...

Lecture : Arts plastiques :

- recherche en B.C.D. - lecture suivie "Le tour de France de deux enfants".

La photo et la carte postale au début du XXème siècle.

"Radon il y a 100 ans"

Géographie : Mathématiques :

- Etude de cartes, de plans, de cadastres.

- statistiques / population. - Repérages dans le temps. - Notions d'échelle.

Histoire :

- La Société Française au début du XXème siècle : la vie politique, la vie quotidienne en ville et en campagne, la vie économique, la vie culturelle…

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4.2.4 - Mise en place et évaluation du projet

Cette recherche interdisciplinaire a beaucoup intéressé les enfants qui se sont bien investis et ont assimilé la démarche globale. L'exploitation de ce thème de façon "pluri-dimensionnelle" a permis de rebondir et de relancer l'intérêt quand la lassitude se faisait sentir. En histoire, les trois aspects ont été traités simultanément par la classe lors de plusieurs séances de type différent : recherche et exploitation de documents, visites de patrimoine bâti, rencontres-témoignages. La phase de communication a eu lieu mi-juin (concours des Archives de l'Orne et fête de l'école). La presse a été invitée pour relater le travail accompli et le présenter à un plus large public. La production des élèves s'est faite sous deux aspects : - huit panneaux collectifs : - Radon, notre commune au début du XXe siècle (titre général), - le bourg de Radon, - les habitants en 1906, - la vie quotidienne ; - des livrets personnels que les enfants ont gardé comme trace de leur activité. Les enfants tout au long de ce projet ont été confrontés à la démarche de l'historien (définition d'une problématique, recherche et questionnement de différents matériaux historiques, synthèse et communication).

De plus, ce travail a pu montrer que l'environnement proche peut être pour la classe le point de départ d'investigations et servir des objectifs de comportements, de connaissances et de démarches. 4.2.5 - Une rencontre-témoignage

Un des objectifs de cette recherche sur le village vers 1900 était la rencontre avec des personnes âgées ayant vécu dans la commune ou localement proche à cette époque. Par l'intermédiaire de la bouchère du village, deux personnes, un homme de 85 ans M. Leloup et une femme de 87 ans Mme Lurson ont accepté de nous rencontrer, d'ailleurs au domicile de cette dernière, qui nous a fièrement expliqué habiter dans la maison d'un ancien sabotier !

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Objectifs de l'activité :

* de connaissances :

- prendre connaissance d'éléments factuels concernant la vie quotidienne au début du XXe siècle (école, habillement, métiers, loisirs…).

- recaler chronologiquement ces témoignages et les aspects évoqués. * de démarches :

- travailler en liaison avec le Français pour la préparation d'un questionnaire écrit et la transcription des notes prises pour le texte de synthèse.

- savoir traiter l'information. * de comportements :

- être curieux - être attentif (pour éviter de poser des questions déjà oralisées et savoir rebondir dans le dialogue). Activité préliminaire :

L'explication de la rencontre effectuée (nom des personnes, présentation sommaire, lieu de la rencontre), les enfants ont vite compris l'intérêt de cette activité et ont préparé des questions écrites selon l'aspect qu'ils avaient à développer en petit groupe.

La validation des questions se faisait par lecture à l'ensemble de la classe (pour vérifier de leur pertinence et de la non reprise de mêmes interrogations).

La visite

Les deux personnes nous ont donc accueillies dans la maison de l'une d'elle.

Le contact s'est facilement établi et elles n'ont pas hésité à répondre le plus précisément possible aux questions posées éclairant les enfants sur la jeunesse, très différente, qu'ils ont vécue (située approximativement à l'époque de la Première Guerre mondiale).

Les enfants ont pris de nombreuses notes utilisées ensuite pour leurs textes de synthèse auxquels été jointes les photos prises par le maître.

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Evaluation

Ce genre de rencontre est très enrichissant pour les enfants qui peuvent se situer dans leur histoire familiale (les personnes interrogées étaient de l'âge de leurs arrière-grands-parents) et dans une histoire sociale (histoire de ces personnes). Les enfants se sont donc facilement investis dans cette activité, qui par son côté témoignage, leur a montré un des aspects du travail de l'historien, peut-être le plus concret mais aussi très délicat en terme de vérité historique. La photo de M. Pasdeloup, posant devant l'école de Radon en 1923 avec son maître et ses camarades de classe était ainsi particulièrement touchante, si proche et en même temps si lointaine. Importance de ces témoignages ou l'émotion et la sympathie avec les générations précédentes sont présentes et formatrice pour le jeune enfant.

La relecture des notes prises et l'élaboration de textes de synthèse ont permis un travail approfondi dans le domaine de la maîtrise de la langue.

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4.3 - Une Classe Patrimoine avec une thématique locale43

4.3.1 - La Classe Patrimoine Industriel dans l'Orne44

L'Orne contrairement aux apparences est riche d'un patrimoine industriel varié. A l'initiative de la D.R.A.C. de Basse-Normandie une recherche a été menée pour concevoir à l'implantation d'une classe patrimoine industriel dans ce département, ce qui en ferait une expérience pilote en France. Depuis trois ans, l'Inspection Académique de l'Orne aidée entre autres par le Service Educatif des Archives s'investit dans ce projet tant au niveau de l'enseignement primaire (classes de cycles 3 écoles) que du secondaire (collèges et lycées). Cette classe patrimoine industriel se présente sous la forme d'une recherche thématique. Il existe à ce jour 4 thématiques possibles qui impliquent des visites sur des sites de l'Orne:

- eau source d'énergie,

-agro-alimentaire,

- métallurgie,

- filière bois,

- terre-pierre,

- textile,

- papier/imprimerie

43 Texte de référence sur les classes de découvertes, se référer à la note de service n° 82-399, B.O. n° 33 du 13 septembre 1982. 44 Expérimentée dans le cadre de ma fonction de professeur des écoles détaché au Service Educatif des Archives départementales de l'Orne.

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4.3.2 - Les objectifs

* Les objectifs généraux (cf. plaquette de présentation des C.P.I.) A travers l'étude et la visite de nombreux sites désaffectés ou en fonctionnement, les élèves découvrent les différents secteurs industriels du département et s'initient à l'histoire et en particulier à l'histoire des techniques industrielles anciennes et actuelles. La découverte du monde de l'entreprise et la nécessité civique de protection d'un tel patrimoine peuvent constituer un second volet de l'apprentissage et "construire une culture technique pour laquelle se fait une appropriation cognitive authentique : lire le monde du travail avec ses lieux, ses espaces où s'exercent les métiers et se construisent des rapports entre les hommes, ..."45. * Les objectifs spécifiques (exemple : classe métallurgie, mars 1999)

Rendre les élèves capables d'appréhender l'environnement industriel.

Prendre conscience de l'évolution industrielle à l'échelle régionale en lien avec l'histoire générale.

S'initier aux techniques industrielles anciennes de la métallurgie.

Réinvestir des méthodes de travail et de recherche, notamment au niveau de l'interrelation entre patrimoine bâti, documents écrits, objets muséographiques, mémoire collective et paysages et établir des relations entre un espace physique et un eespace social.

Amener l'élève à comprendre à travers les différentes visites (une fiche d'identification était à remplir à chaque visite de site) et les différentes recherches l'ensemble systématique suivant :

MATIERE PREMIERE

� COMBUSTION �SOURCES

D'ENERGIE

Minerais Bois fondant eau électricité

MECANISME

Moyen de transmission

PRODUIT FINI

Grosse métallurgieréduction du minerais

en fonte �

Petite métallurgiemétallurgie de transformation

45 Colette Dalle, "La culture technologique", Fenêtres sur cours, n° 114, novembre 1996, p. 20-21.

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Produire un document de synthèse (dossier, exposition ou autre...). 4.3.3 - Déroulement et évaluation de la Classe Patrimoine Industriel Métallurgie,

mars 1999

La classe de CM2 de Saint-Ouen-sur-Iton s'est investie pendant toute l'année scolaire 1998-1999 sur ce projet. Bien sûr la période la plus intense a été la semaine transplantée (du 1er au 5 mars - 4 jours + 1 nuitée). Mais cette recherche a nécessité en plus d'un long travail en amont (sensibilisation aux techniques, organisation de la semaine transplantée, répartition du travail...) et en aval (classement des données, préparation des livrets et de l'exposition...). Cette recherche a nécessité un investissement important tant de la part des élèves que de l'enseignant. Le comportement des enfants a été remarquable tout au long de l'année à l'image de la qualité des travaux effectués (voir en annexe le dossier réalisé par les enfants). L'évaluation des acquisitions étant laissé à l'appréciation de l'enseignant. 4.3.4 – Une sortie de classe

Plusieurs sorties étaient prévues lors de la semaine "métallurgie". Une concernait l'usine Tréfimétaux de Rai où sont fabriqués des produits en laiton (rouleaux de métal ou baguettes). Elle a eu lieu le mardi matin.

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Objectifs de l'activité

* de connaissances :

- comprendre le rôle et la place de cette usine dans la chaîne technologique "du produit brut au produit fini". Les produits réalisés par l'établissement sont destinés à subir une seconde transformation, chez les clients, avant leur utilisation finale :

� obtention du laiton brut par fusion, � obtention de produits en laiton (barres, fils, profilés).

- Acquisition d'un vocabulaire précis concernant cette activité (fusion, tréfilerie…). * Objectifs de démarches :

. savoir rédiger un questionnaire . savoir observer . savoir prendre des notes . comprendre la vie de l'usine dans sa complexité par une mise en réseau de ses différentes composantes (personnel hiérarchisé, agencement, organisation…). . savoir traiter l'information.

* Objectifs de comportements :

. être respectueux des consignes de visite . être curieux et attentif.

Activité préliminaire L'enseignant ayant pris contact avec le responsable technique de l'usine, a pu obtenir un livret de présentation.

Les élèves ont pu prendre connaissance avec cette entreprise : localisation, production, nombre d'employés et premier contact avec des termes liés à cette industrie.

La visite

Les enfants ont été accueillis par M. Prentout responsable technique et chargé de la visite qui leur a présenté l'établissement par vidéo dans une salle (insonorisée !) : historique rapide, production, consignes pour la visite.

La classe ayant été séparée en 3 groupes de 8 sous la responsabilité d'un employé de l'usine, la visite a pu commencer. Elle a duré 1 heures 15. Les enfants ont pu suivre tout le processus du matériau le laiton de sa fusion jusqu'à l'obtention de petits objets (bobines ou barres). Ils ont été impressionnés par le bruit, l'odeur, la chaleur, les conditions de travail difficiles (certains employés à la fusion travaillent dans des conditions décrites par Zola !) et le fait qu'ils n'ont pas eu l'autorisation de prendre des photos à cause de l'espionnage industriel. Ils ont pu se rendre compte de toute la chaîne technologique et par des notes garder traces de leur visite.

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Evaluation

Une visite très enrichissante par son contenu scientifique (un premier schéma synthétique dressé la veille lors de la visite des Forges d'Aube a pu être ainsi complété) mais aussi par son contenu humain. Les enfants ont été ainsi transplantés dans un autre monde : celui de l'usine qu'ils connaissaient peu ou pas du tout (la même remarque est à faire pour les adultes qui accompagnaient le groupe !). Leur attitude a été tout à fait adaptée :

- respect des règles de sécurité - attention soutenue à travers des questions variées et des prises de notes réutilisées pour un texte de synthèse et la rédaction du livret final (cf. annexe).

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5 - ANALYSE

L'enseignement de l'histoire pose problème à l'école primaire. De nombreux collègues avouent ne pas se sentir à l'aise dans cette discipline et s'interrogent sur les méthodes, les discours, les documents ainsi que le traitement de ces derniers.

Le patrimoine local, sous ses différentes formes, peut aider à l'enseignement de l'histoire.

L'enfant est ainsi confronté à la démarche de l'historien dans le cadre d'une problématique (le plus souvent posée par le maître) :

- recherche des sources (écrites ou non) dans l'environnement, - analyse de ces données et synthèse.

Deux exemples situés dans un village proche d'Alençon où se trouve une église romane et les ruines d'un château fort, témoins d'une histoire locale fort riche à l'époque féodale, illustrent ces propos. La recherche autour de l'église romane a été menée de manière inductive. Les observations prises lors d'une visite ont permis de dresser une typologie de cet édifice (dimensions restreintes, plan en forme de croix, arcs en plein cintre, petites fenêtres étroites, clocher avec baies géminées…). La recherche documentaire en classe avait pour but de déterminer le style de l'édifice. Il a ainsi été possible de le classer de l'époque romane puis d'étudier le rôle de l'église aux siècles féodaux et de replacer cette construction dans son contexte historique. Pour le château voisin, la visite n'est guère riche en enseignements, l'ensemble présentant quelques pans de murs au sommet d'un promontoire. Il a donc fallu adopter une démarche inverse à celle utilisée pour l'église. D'abord poser le cadre général de la féodalité puis par l'apport de renseignements sur le château et le village, en déduire le rôle, l'architecture, l'histoire de cet édifice dans une démarche déductive. Dans ces deux cas, la richesse historique locale est exploitée même si le point de départ est différent. Cependant cette histoire ciblée sur le local ne se suffit pas à elle-même. Elle s'inscrit dans une histoire

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plus large, l'histoire générale. Ces deux histoires s'irriguent mutuellement. Une étude historique locale ne prend sens qu'à partir du contexte général !

L'épisode de la libération de notre région en 1944 en est l'exemple puisqu'ici l'histoire de chaque village ou ville est "englobée" dans le mouvement général de libération contre l'Allemagne hitlérienne.

Une difficulté pour l'enseignant réside dans l'afflux des données, de leur traitement et de leur mise en réseau. En effet, celui-ci peut se sentir perdu devant l'abondance de la documentation.

L'analyse de toutes ces données demande bien sûr un minimum de méthodologie (statut du document, intérêt historique et synthèse à initier). La résolution de ces problèmes pour l'enseignant passe de plus :

- par le respect de la problématique définie au préalable. (Pourquoi une église romane et un château fort dans notre village ?).

- par la différenciation entre le conjoncturel (les données factuelles : faits, dates…) et le structurel (fondements de la société féodale) c'est-à-dire entre les connaissances ponctuelles et les notions / concepts.

Une frise chronologique, des plans et dessins pourront fixer les données conjoncturelles. Un texte de synthèse sur la société féodale (le rôle de l'église, le pouvoir des seigneurs…) viendra en complément.

On s'éloigne ainsi des pièges du localisme et du patrimoine réduit à son champ local, dénoncés plus haut.

Différents types d'exploitation du patrimoine local (de l'utilisation d'un document dans le cadre d'une séance, à un projet lourd comme une classe patrimoine industrielle - l'échelle est large) induisent la présentation d'objectifs différents en terme de connaissances, de démarches et d'attitudes.

L'enfant ayant visité une église romane ou un château médiéval est vraisemblablement plus sensibilisé à ce monument (architecture d'un tel édifice) que suite à une étude sur document uniquement.

Dans l'un et l'autre cas, il pourra acquérir des savoirs.

La différence réside peut-être plus dans les objectifs d'attitude. Ouvrir l'enfant sur le monde lui permet d'acquérir des connaissances par une meilleure compréhension de ce monde dans sa diversité et son évolution.

L'enseignement de l'histoire peut-il bénéficier de telles pratiques ?

Un certain nombre de collègues de l'Orne les utilisent en histoire sur des sujets très variés, allant de la Préhistoire au XXe siècle.

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Voici livrés quelques réflexions émanant de collègues justifiant un investissement dans des recherches en histoire locale avec leur classe : Mme G. - Saint-Maurice-du-Désert :

- entrer en contact avec des documents originaux,

- appréhender des événements qui semblent lointains mais en fait sont proches : 1 siècle = 4 générations,

- comprendre que nous faisons tous partie de l'histoire. Nous sommes descendants donc héritiers :

- d'un forgeron de la Sauvagère,

- d'un tisserand de Saint-Maurice-du-Désert,

- d'une bergère de la Coulonche. Mme C. - Randonnai :

- prendre des repères par rapport à une situation locale, - donner vie à l'histoire, - l'histoire locale permet de mieux se situer dans l'histoire générale.

M. P. - Alençon :

- travailler sur des documents authentiques, - travailler par groupe et en interdisciplinarité, - donner une dimension locale à l'enseignement de l'histoire. Mme G. - Alençon :

- Par des documents qui touchent sa propre région, l'histoire prend un sens. - Mieux comprendre le passé pour agir sur le présent, en citoyen actif.

Mlle G. - Carrouges :

- Motiver les enfants. Le projet en histoire locale les passionne et ils sont toujours prêts à s'y investir avec enthousiasme.

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BIBLIOGRAPHIE

I – L'HISTOIRE

BLOCH Marc, Apologie pour l'histoire ou Métier d'historien, "Références" Histoire, Armand Colin.

FAVIER J., Les archives, Ed. Que sais-je ?, Presses universitaires de France, 1981.

La pratique archivistique française, Direction des Archives de France, Paris, 1993.

L'Histoire de France, Repères pratiques, Nathan, 1986.

THUILLIER Guy, La Méthode en Histoire, P.U.F., 1991.

VEYNE Paul, Comment on écrit l'Histoire, Points Histoire, 1978.

II – LA DIDACTIQUE DE L'HISTOIRE

GIOLITTO P., L'enseignement de l'histoire aujourd'hui, Ed. Colin A. / Bourrelier, 1985. Histoire et géographie, vers une pédagogie différenciée, C.N.D.P. Nancy, Metz, 1988. La France des origines au XXème siècle, Tome I-II-III cycle III, C.R.D.P. Lille, 1991. LE PELLEC J. et MARCOS-ALVAREZ V., Enseigner l'histoire : un métier qui s'apprend, Hachette Education, 1991. MARECHAL Jean, La leçon d'histoire-géographie, C.R.D.P. Bourgogne, 1995.

BIREE Patrick, Pratiquer l'histoire locale à l'école, dossier pédagogique, Archives départementales de l'Orne, 2001.

III – LE PATRIMOINE ET L'HISTOIRE LOCALE

Art et Patrimoine, I.R.E.H.G., n° 6, 1998. Art, Culture et Patrimoine, Actes du XXXIIe Congrès de l'Association Nationale des conseillers pédagogiques, Hachette Education, 1997. CROIX A. et GUYVARC'H D., Guide de l'histoire locale, Seuil, 1990. FAUBLEE E., En sortant de l'école... musées et patrimoine, Hachette Education, 1992. LEVRON Jacques, L'Histoire communale, Ed. Gamma, 1972. LUC J.-N., L'histoire par l'étude du milieu, Ed. ESF, 1984. Patrimoine et citoyenneté, Ministère de la Culture et de la Communication, 1999. Patrimoine et didactique, collèges et lycée, C.R.D.P. Lille, 1994. Patrimoine et environnement, C.D.D.P. Marne, 1994.

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IV – THEMATIQUE

DIVERS

BEASSE A.-M., 50 objets du temps passé, illustrations Lutter I., Ed. Albin Michel, 1993. CHOUQUER G., Histoire d'un paysage de l'époque gauloise à nos jours, Ed. Errance, 1995. DELATAN J., Le Guide de l'Orne et du Perche, la Manufacture, 1990. JOFFROY R. et THENOT A., Initiation à l'archéologie de la France, Ed. Tallandier, 1980. LA TORRE M. (de), Orne le guide complet de ses 507 communes, Ed. Deslogis-Lacoste, 1990. Lire la carte. Notre commune au 1:10 000, B.T. n° 975, 1986. PITTE J.-R., Histoire du paysage français, Ed. Tallandier, 1987. Villages et bourgs, P.E.M.F., Ed. Periscope, 1998.

TERRE-PIERRE / ARCHITECTURE La Brique, Le Monument et ses artisans, Ed. du Patrimoine, 1998. ESPINASSOUS L., Pistes pour la découverte de la nature et de l’environnement, Ed. Milan, 1989. Le Perche, fiches architecturales et paysagères, Parc naturel régional du Perche, juin 2000. Les maisons des hommes, Les yeux de la découverte – Gallimard, 1995. PEROUSE de MONTCLOS J.-M., Vocabulaire de l’Architecture, Ed. Imprimerie Nationale, Paris, 1993 RENAULT C., LAZE C., Bien connaître les styles, Ed. Jean-Paul GISSEROT, 1998. Vieilles pierres, vocations nouvelles, Patrimoine régional, Région Basse-Normandie, 2000.

LA METALLURGIE

La métallurgie ancienne, B.T. n° 1097, 1998. La métallurgie ornaise, Catalogue d'exposition, Arch. dép. Orne, 1981. L'Homme et l'Industrie en Normandie, du néolithique à nos jours, S.H.A.O., Bulletin spécial, 1990.

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LA REVOLUTION FRANCAISE

BRAUDEL F., L'identité de la France, Tome I-II-III, Arthaud Flammarion, 1991. Goubert P., L'Ancien Régime, Tome I "La Société", Tome II "Les Pouvoirs", Armand Colin, 1971. L'Orne de la Préhistoire à nos jours, Editions Jean-Michel Bordessoules, 1999.

Mutations et permanence, "L'Orne et la Révolution", S.H.A.O., Tome CVIII, décembre 1989.

Répertoire Numérique de la sous-série 70 B, documents relatifs à la convocation des Etats Généraux de 1789, Arch. dép. Orne, 1988.

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ANNEXES Doc. 1 - Programmation de CM2, Histoire, P. Birée, année 1998-1999 (cf. 4.1). Doc. 2 - Cahiers des doléances de Radon, Arch. dép. Orne, 70 B 200, 1789 (cf. 4.1). Doc. 3 - Un panneau d'exposition (cf. 4.2). Doc. 4 - Présentation Classe Patrimoine Industriel "Métallurgie", 1999 (cf. 4.3). Doc. 5 - Emploi du temps, Classe Patrimoine Industriel "Métallurgie" (cf. 4.3). Doc. 6 - "Fiche d'identité" d'un site industriel "Métallurgie" (cf. 4.3). Doc. 7 - Dossier réalisé par les élèves suite à la C.P.I. "Métallurgie" (cf. 4.3). Doc.8 – Dossier sur l'historique du lavoir de Bellou-sur-Huisne, classe de G.S., C.P., CE1, école de Bellou-sur-Huisne, 1999-2000, Mme Rey. Doc. 9 - Dossier sur l'étude de la population de Saint-Germain-du-Corbéis entre 1906 et 1936, classe de CM2, école de Saint-Germain-du-Corbéis, 2000-2001, Mr Pécatte. Doc. 10 - Dossier sur la rivière Briante à Damigny, classe de CE1-CE2, école Jean Monnet, Damigny, 2003-2004, Mme Schlaich. Doc. 11 Dossier sur la Seconde Guerre mondiale à Alençon (roman historique), classe de CM1, école Masson, Alençon, 2004-2005, Mr De Mautor. Doc. 12 Dossier sur Les noms de rues du quartier de Perseigne à Alençon, classe de CM2, école Jean de la Fontaine, Alençon, 2005-2006, Mr Le Caignec.

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