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Í ß 1970 L'ÉDUCATION A REFAIRE

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Í ß

1970

L'ÉDUCATION

A REFAIRE

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TRESORS

DE L'ART

MONDIAL

De la lettre à l'esprit

Cette miniature de l'an 686 de l'Hégire (1287), scribe transcrivant un texte, orneun manuscrit de Bagdad (Irak), les « Épîtres aux purs fidèles », recueil de lettresqu'échangeaient au 10 siècle de notre ère un groupe de savants de Bassora, enIrak, les « Frères de la pureté ». Exposés touchant aux mathématiques, à la logique,la métaphysique, aux sciences naturelles, les épîtres exprimaient des idées impré¬gnées de la pensée grecque et hindoue, parfois contraires à l'orthodoxie islamique,si bien que la plupart des 'uvres des «Frères» furent brûlées vers le 12'- sièclede notre ère.

Photo ' Archives Robert Laffont - Bibliothèque de la Suleymai iye, Istanbul (Turqui-)

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Le CourrierJANVIER 1970

XXIIIe ANNÉE

PUBLIÉ MAINTENANT

EN 13 ÉDITIONS

FrançaiseAnglaiseEspagnoleRusse

Allemande

Arabe

Japonaise

Pages

Italienne

U. S. A.

Hindie

Tamoule

HébraïquePersane

Mensuel publié par l'UNESCOOrganisation des Nations Uniespour l'Éducation,la Science et la Culture

Ventes et distributions :

Unesco, place de Fontenoy, Paris-7e

Belgique : Jean de Lannoy,112, rue du Trône, Bruxelles 5

ABONNEMENT ANNUEL : 12 francs fran¬

çais; 170 fr. belges; 12 fr. suisses; 20/-stg.POUR 2 ANS: 22 fr. français; 300 fr. belges;22 fr. suisses (en Suisse, seulement pour leséditions en français, en anglais et en espa¬gnol) ; 36/-stg. Envoyer les souscriptionspar mandat C. C. P. Paris 12598-48, LibrairieUnesco, place de Fontenoy, Paris.

Les articles et photos non copyright peuvent être reproduitsà condition d'être accompagnés du nom de l'auteur etde la mention «Reproduit du Courrier de l'Unesco», enprécisant la date du numéro. Trois justificatifs devront êtreenvoyés à la direction du Courrier. Les photos noncopyright seront fournies aux publications qui en feront lademande. Les manuscrits non sollicités par la Rédaction nesont renvoyés que s'ils sont accompagnés d'un coupon-réponse international. Les articles paraissant dans le Courrierexpriment l'opinion de leurs auteurs et non pas nécessaire¬ment celles de l'Unesco ou de la Rédaction.

Bureau de la Rédaction :

Unesco, place de Fontenoy, Paris-7e, France

Directeur-Rédacteur en chef :

Sandy Koffler

Rédacteur en chef adjoint :René Caloz

Adjoint au Rédacteur en Chef :Lucio Attinelli

Secrétaires généraux de la rédaction :Édition française : Jane Albert Hesse (Paris)Édition anglaise : Ronald Fenton. (Paris)Édition espagnole : Arturo Despouey (Paris)Édition russe : Georgi Stetsenko (Paris)Édition allemande : Hans Rieben (Berne)Édition arabe : Abdel Moneim El Sawi (Le Caire)Édition japonaise : Takao Uchida (Tokyo)Édition italienne : Maria Remiddi (Rome)Édition hindie : Annapuzha Chandrahasan (Delhi)Édition tamoule :T.P. Meenakshi Sundaran (Madras)Édition hébraïque : Alexander Peu (Jérusalem)Édition persane : Fereydoun Ardalan (Téhéran)

Illustration et documentation : Olga Rodel

Maquettes : Robert Jacquemin

Toute la correspondance concernant la Rédaction doit êtreadressée au Rédacteur en Che!

4 1970, ANNÉE INTERNATIONALEDE L'ÉDUCATION

par Léo Fernig

6 ÉDUQUER... MAIS QUI? ET COMMENT?

par Pierre Rondière

11 L'ÉDUCATION, PARENTE PAUVRE

par Howard Brabyn

13 4 000 MILLIARDS DE DOLLARS

Prix de la course aux armements

pour les 10 prochaines années

16 D'UNE CIVILISATION ÉCLATÉE

A UNE ÉDUCATION INTÉGRÉE

par René Habachi

21 Y A-T-IL VRAIMENT TROP D'ENSEIGNANTS?

par John Chesswas

24 NOUVEL ENSEIGNEMENT

DANS LES ÉCOLES SOVIÉTIQUES

par Joseph Nekhamkine

27 L'ÉDUCATION A REFAIRE

par Paul Lengrand

33 NOS LECTEURS NOUS ÉCRIVENT

34 LATITUDES ET LONGITUDES

2 TRÉSORS DE L'ART MONDIAL

De la lettre à l'esprit (Irak)

Notre couverture

A l'occasion de l'Année

Internationale de l'éducation en

1970, le « Courrier de l'Unesco »consacre le numéro de janvierà certains problèmes qui, dans lemonde entier, préoccupentaujourd'hui les enseignants et lesgouvernements, aussi bien quela jeunesse et les adultes. Dansun monde nouveau, issu

du foudroyant développementscientifique et technologique de cedernier quart de siècle, l'éducationest aujourd'hui à la croiséedes chemins. Nous aborderons dans

d'autres numéros de 1970 d'autres

aspects de ces problèmes.Maquette de couverture réalisée pour le- Courrier de ¡'Unesco » par Roman Ciesle-wtcz. Société Mafia, Paris.

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1970

internationale

'éducation

par Léo Fernig

LEO FERNIG est, depuis le 1" janvier 1970, directeur du Bureauinternational de l'éducation à Genève. Il était auparavant direc¬teur du Département de l'avancement de l'éducation, à ¡'Unesco,où II a joué pendant vingt ans un rôle déterminant dans l'éla¬boration et la m/se en Tuvré des programmes de l'Unescodans le domaine de l'éducation.

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sera l'Année internationale de l'éducation. Ainsi

en a unaniment décidé l'Assemblée générale desNations unies à la fin de 1968; c'est-à-dire que les repré¬sentants de tous les pays qui constituent les Nations uniessont tombés d'accord pour penser qu'une Année Inter¬nationale de l'éducation était non seulement utile, maisnécessaire. C'est à l'Unesco qu'a été confiée la respon¬sabilité de l'Année sur le plan international.

L'éducation est une vaste entreprise. On a dit que lesenseignants constituent le groupe professionnel le plusnombreux du monde ; quant à l'éducation, c'est un proces¬sus permanent qui occupe une proportion considérable dela population mondiale, que ce soit à l'école, à l'Universitéou hors du cadre scolaire.

Pourquoi, dans ces conditions, en faire l'objet d'unecélébration spéciale et pourquoi donner à cette célébrationla forme d'une Année internationale ?

Répondre à cette question, c'est nécessairement montreren quoi 1970 se distinguera, sur le plan de l'éducationde 1969 ou de 1971.

L'éducation se heurte, dans le monde entier, à desproblèmes de plus en plus graves, tant par leur ampleurque par leur nature même. Il est apparu, lors de laconférence internationale qui a eu lieu à Williamsburg, enVirginie (Etats-Unis), en octobre 1968, sur le thème « Lacrise mondiale de l'éducation (1) » que les carencesprofondes de la plupart de nos systèmes d'enseignementnous mènent à une crise imminente. C'est aussi à la

conférence de Williamsburg que l'idée d'une Année inter¬nationale de l'éducation a été lancée pour la premièrefois.

Dans les régions en voie de développement, les problè¬mes sont relativement bien connus, et les intéressés enont une conscience aiguë. Malgré l'importance dessommes que les Etats consacrent à l'éducation et lescourageux efforts de ceux qui y participent, il sembleque l'écart entre les objectifs et les réalisations ailletoujours s'élargissant.

Disons simplement que la plupart des pays qui ontrécemment accédé à l'indépendance se sont efforcés d'as¬surer à leurs citoyens un niveau d'instruction modeste,l'accès à l'éducation étant, en effet, l'un des droits fonda¬mentaux de l'homme ; ils ont cherché par ailleurs à déve¬lopper leur enseignement au-delà du premier degré, defaçon à pouvoir former les cadres moyens et supérieursqu'exige leur développement.

Or, malgré leurs efforts, ces objectifs, tant humanitairesqu'économiques, semblent aussi lointains aujourd'hui qu'ilsl'étaient il y a dix ans. Peu à peu, à mesure que les popu¬lations s'accroissent, sans que se développent au mêmerythme les structures économiques, la foi dans la valeurde l'éducation en tant qu'investissement économique estébranlée, car l'on constate la lenteur et le peu d'effi¬cacité du processus éducatif, sous sa forme actuelle.

Il ne faut pas espérer, par la création aujourd'hui denouvelles écoles, un profit économique qui permettra d'enconstruire de nouvelles l'année prochaine, ni même danstrois ou quatre ans. Bien plus, il a fallu se rendre à latriste évidence que les structures mêmes de l'enseignement(formes de scolarité, programmes d'études et méthodespédagogiques s'inspirant des systèmes mis en place avantl'indépendance) peuvent elles-mêmes être sources de gra¬ves gaspillages et se révéler en grande partie inefficaces.

Un grand nombre d'élèves abandonnent leurs étudesavant de les avoir terminées ou ratent leurs examens,ce qui les oblige à redoubler plusieurs fois la même classe.Dans la majorité des pays en voie de développement, il encoûte de deux à quatre fois plus à l'Etat pour menerun élève au terme du cycle d'enseignement primaire debase qu'il ne lui en coûterait normalement si l'élève pro¬gressait régulièrement d'une classe à l'autre.

1 Cf. Philip H. Coombs,(une analyse des systèmes),l'éducation, 1967.

« la Crise mondiale de l'éducation »Institut international de planification de

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Dans les pays développés, pour plus favorable que soitla situation économique, il n'est pas certain que la crisede l'éducation soit moins grave. L'ordre établi est actuel¬lement remis en question de mille manières. Dans certainscas, il est contesté par les étudiants eux-mêmes, surtoutles étudiants des universités, qui estiment que l'organisa¬tion de l'enseignement et son contenu laissent beaucoupà désirer et ne les préparent pas comme il convient à lavie professionnelle.

Dans d'autres cas, la contestation est le fait desemployeurs, des associations professionnelles ou du corpsenseignant lui-même. L'adéquation de l'éducation et de laformation des jeunes aux besoins de la société industrielleest mise en cause à mesure que s'accroît la complexité dela vie dans cette société. Ou plutôt, ce que l'on conteste,c'est la politique qui consiste à perpétuer l'ordre établi,à prolonger la scolarité et à inculquer une masse de connais¬sances toujours plus grande à un nombre d'élèves toujoursplus grand.

. Même sans pousser bien loin l'analyse, il est évidentqu'une telle politique ne peut qu'aboutir à surcharger l'éco¬nomie des pays développés, tout comme elle surchargecelle des pays en voie de développement.

ait ressenti la

cette vaste et

s'agit de faire

Il semblerait donc que le monde entiernécessité d'une pause momentanée dansperpétuelle entreprise qu'est l'éducation ; i!le point, de chercher à savoir à quelle vitesse nous avan¬çons et où nous voulons aller.

Alors nous nous apercevrons vraisemblablement que nousessayons d'affronter l'univers du vingtième, voire du vingtet unième siècle, en disposant d'institutions et de méthodesqui datent des dix-huitième et dix-neuvième siècles.

Nous découvrirons qu'un changement s'impose et peut-être une analyse collective nous permettra-t-elle de dis¬cerner ce qu'il doit être, comme de faire ce qu'il faut pourqu'il ait lieu. Telle semble être la conception généralequi est à l'origine de l'Année internationale de l'éducation.

QjU'EST-CE que l'AIE ? On pourrait la définircomme l'effort conjugué de tous les pays du monde pourfaire quelque chose de plus, ou quelque chose qui sortede l'ordinaire afin de chercher à résoudre leurs problèmesd'éducation et, pour reprendre les termes utilisés par l'auteurde la proposition initiale à l'Assemblée générale des Nationsunies, de « mobiliser les énergies et susciter des initiativesdans le domaine de l'éducation et de la formation ».

L'AIE est essentiellement une entreprise nationale, quirelève de l'initiative de chaque pays. Elle peut entraînerdiverses formes d'action : elle peut amener à des réflexionset des études à propos de l'éducation en général ou d'unaspect particulier de l'éducation nationale ; à déterminerles problèmes les plus graves ; à entamer des expériencesqui apporteraient une solution à ces problèmes ; à informerle public pour l'amener à participer pleinement à l'examendes problèmes d'éducation, autant d'éléments d'une sé¬quence qui doit déboucher naturellement sur une politiquenouvelle de l'éducation.

L'action de chaque pays portera essentiellement sur lesystème national d'enseignement, mais il est certains deses aspects qui débordent le cadre de la nation.

Chaque pays se rendra compte inévitablement qu'il peuts'inspirer et tirer parti de l'expérience de ses voisinset que, réciproquement, la sienne peut être utile aux autres ;cette prise de conscience pourrait même, sur ce dernierpoint, se traduire dans certains cas par un accroissementde l'aide des pays développés aux pays en voie de déve¬loppement dans le domaine de l'éducation.

Il ne s'agit là, bien entendu, que d'un aperçu théoriquetrès général.

Le point essentiel à souligner est que l'action spéciale¬ment entreprise dans le cadre de l'Année internationale de

Photo © Francisco Hidalgo, Pan

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SUITE PAGE 6

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ANNÉE INTERNATIONALE DE L'ÉDUCATION (Suite)

l'éducation devra être originale, porter la marque d'unecertaine spontanéité (puisqu'elle n'est pas prévue dansun plan établi de longue date) et être directement liéeau besoin ou au désir de changement.

A la suite de la décision prise par l'Organisation desNations unies et de l'appel de l'Unesco aux Etats membres,les programmes nationaux élaborés pour l'Année inter¬nationale de l'éducation deviennent de plus en plus nom¬breux. En voici, quelques brefs exemples.

En France, six importantes revues pédagogiques consa¬creront un numéro spécial à des questions figurant parmiles grands thèmes de l'AIE ; un stage d'études sur lesmécanismes du processus d'acquisition des connaissancesest prévu et la commission nationale française compteorganiser, à la fin de 1970, une conférence de spécialistessur l'évaluation de projets d'alphabétisation fonctionnelle.

Le Japon met au point un programme ambitieux qui com¬portera, outre des manifestations nationales (en particulierl'émission d'un timbre spécial de l'AIE), la création denouvelles institutions (une université et un centre de per¬fectionnement des enseignants en exercice) ; de plus, lesliens entre éducateurs japonais et étrangers seront renfor¬cés. L'aide aux pays en voie de développement constitueral'un des éléments importants de la contribution japonaise.

Quant au programme de la Tanzanie, l'essentiel en seral'organisation de cours de niveau supérieur, particulièrementaxés sur l'innovation et la réforme en matière d'éducation.

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N conçoit aisément l'Année internationale del'éducation comme un ensemble de programmes nationaux ;ce qu'il faut bien voir, c'est que ces programmes nationauxne doivent pas être du seul ressort d'un petit groupe defonctionnaires travaillant dans un ministère. Pour que

l'Année atteigne son objectif et cristallise l'attention géné¬rale sur la nécessité d'un changement en matière d'édu¬cation, il faut qu'il y ait participation, sous une formequelconque, de la collectivité nationale tout entière.

Il est indispensable que, dans chaque pays, une actioncollective soit entreprise au niveau des autorités locales oumême dans chaque école et chaque établissement d'en¬seignement supérieur. Enseignants, élèves et étudiants ontun rôle évident à jouer en la matière, puisque ce sont euxque le processus éducatif touche le plus directementpeut-être même les touche-t-il de trop près.

Mais il faut également que les autres institutions etgroupes nationaux parents, employeurs, églises, asso¬ciations professionnelles participent aux études, expé¬rimentations, débats et propositions novatrices.

Il est probable que les programmes nationaux les plusefficaces seront ceux qui parviendront à susciter un vastemouvement regroupant toutes les collectivités, associationset institutions du pays, ou qui seront issus d'un tel mou¬vement.

Rappelons toutefois qu'il s'agit d'une Année « inter¬nationale » de l'éducation ; parviendra-t-on à en faire davan¬tage qu'un agrégat de programmes nationaux isolés ? Telleest la question que l'on peut se poser. A cet égard, lesorganismes internationaux ont véritablement un rôle essen¬tiel à jouer.

Ce sont eux qui permettent aux pays d'échanger leursidées, qui constituent un cadre d'action commune et peu¬vent donner une dimension internationale à nombre d'en¬

treprises lancées à l'échelon national. Les organismes inter¬nationaux, non gouvernementaux et inter-gouvernementaux,ont été en grande majorité pressentis, et se sont déclarésdésireux de participer au programme d'action internationalede l'Année.

Le rôle essentiel reviendra toutefois à l'Organisation desNations unies elle-même et à celles de ses deux institu¬

tions spécialisées que l'éducation et la formation concer¬nent le plus directement, à savoir l'Unesco et l'Organisationinternationale du travail."

ÉDUQUER

Photo © Michel Hétler

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MAIS QUI? ET COMMENT?

P<OUR l'ensemble des pays

en voie de développement, en cettefin de siècle, l'essentiel est de trouverles raccourcis qui leur permettent decombler leur écart dans le laps detemps le plus rapide.

L'utilisation de la science et de la

technique s'impose alors d'embléecomme un moyen privilégié. Et leshommes, avec leur capacité à conce¬voir, coordonner, organiser, innoveret transformer, apparaissent commele moteur essentiel de cette mutation.

Ceci- est vrai partout, et dans tousles temps, au point que l'on a calculépuis affirmé à Washington que de1925 à nos jours, aux U.S.A., le facteuressentiel de l'expansion, bien avantles investissements par exemple, a étél'éducation : la formation des hommes.

Et nous sommes immédiatement

enfermés dans un cercle de constata¬

tions qui se multiplient en se réper¬cutant les unes sur les autres :

« Un enfant pour lequel la pen¬sée... a été dominée par les valeursaffectives ou sentimentales, ou à plusforte raison par des valeurs irration¬nelles ou magiques, aura probablementplus de mal qu'un autre à comprendreet à adapter les valeurs de la scienceexpérimentale », indique le sociologuefrançais Jean Fourastié.

M. René Maheu, Directeur géné¬ral de l'Unesco, affirme nettement :« Dans de nombreux pays... la carencede stimuli intellectuels due à l'absence

ou à l'insuffisance de la scolarisation...

a pour corollaire fatal une vie mentaleralentie. Nous savons de surcroit que,dans certains domaines, les retards

mentaux ne peuvent plus être rattra¬pés si certains apprentissages... n'ontpas eu lieu à un âge convenable. »

Le Comité consultatif des Nations

Unies sur l'application de la Science etde la Technique au développements'inquiète vivement : « Si les niveauxd'enseignement ne peuvent êtreconsidérablement améliorés dans la

plupart des pays en voie de dévelop¬pement, et élevés de façon à ce quel'appréciation de la valeur de lascience et de la technique soit unfacteur primordial, ¡I y a peu de chancepour que la science et la techniquesoient appliquées avec efficacité dansces pays. »

L'enchaînement logique mène debond en bond à des affirmations : sans

raccourcis pas de possibilité decombler les écarts, sans applicationde la science et de la technique pas

PIERRE RONDIERE, écrivain français, estl'auteur de « Rendez-vous 1980. La science

et la technique au secours du tiersmonde », Editions Payot, Paris, 1968(F 7,50), ouvrage publié en collaborationavec l'Organisation des Nations Unies.

de raccourcis concevables, sans édu¬cation et sans formation pas d'appli¬cation de la science et de la techniquepossible. Donc, sans éducation, pasde raccourcis.

Mais le débat n'est pas pour autanttranché, il s'ouvre à peine, et sur unequestion fondamentale : éduquer : oui.Mais qui, et comment ?

Les nations en voie de développe¬ment, gouvernements et peuples, sesont lancées à grandes foulées et avecdes appétits aiguisés dans l'alphabé¬tisation et la scolarisation. La ferveur

du savoir a embrasé trois continents.

En 1960, les ministres des Etatsasiatiques adoptaient « le plan deKarachi » qui prévoyait pour 1980 unescolarité obligatoire d'une durée desept années.

En 1961, les ministres de l'ensemblede l'Afrique décidaient l'applicationd'un plan qui devait amener pour la

par Pierre Rondière

même date la généralisation d'unenseignement primaire et obligatoirede six années, plan qui prévoyait enoutre pour la même époque l'entréede 20% des enfants du primaire dansl'enseignement secondaire, et la pré¬sence de 300 000 étudiants en faculté.

L'Amérique du Sud emboîtait le pasen 1962 pour décider d'octroyer sixannées de scolarité à la totalité de

ses enfants dès 1970.

Les budgets de l'Education se sontalors accrus vertigineusement dansl'ensemble du Tiers Monde : « A peuprès trois fois plus rapidement que lerevenu national pendant la période de1950-1960. Après 1960, le taux decroissance de ces dépenses a été plusque le double de celui du revenunational. »

L'effort des pays démunis a été etdemeure si considérable que la majo-

SUITE PAGE 8

Dans de nombreux

pays du Tiers Monde,les plus grandsefforts de

scolarisation

suffisent à peine àcompenser les effetsde l'explosiondémographique. AuMali, par exemple,68 000 enfants de

6 à 14 ans allaient à

l'école en 1961 ;

trois ans plus tard,ils étaient 113 000,

presque le double ;mais cela ne

représentait toujoursexactement comme

en 1961, que10 pour cent despetits Maliens en âged'aller à l'école.

Ainsi le nombre de

ceux qui ne trouventpas place sur lesbancs d'école ne

fait qu'augmenter.

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QUI? ET COMMENT? (Suite)Photo Documentation française

Les drames de l'enseignement-passoire

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rite d'entre eux, malgré leur pauvreté,consacrent à l'Education une part deleur budget national proportionnelle¬ment bien plus élevée que celle despays développés : 25 % et parfoisplus, contre 17% pour la France, parexemple.

A tel point que l'on a pu dire queles charges de l'Etat pour l'enseigne¬ment se sont, dans tous ces pays,accrues plus vite que les autresdépenses budgétaires. Si bien qu'ilest certain que les crédits publicsconsacrés à l'enseignement ne pour¬ront pas croître longtemps encore plusvite que les autres dépenses budgé¬taires sans remettre en cause les

objectifs gouvernementaux dans lesautres domaines.

Et nous voici à un carrefour de

décision : ou plus d'écoles et moinsd'hôpitaux, d'usines, d'engrais, deroutes ou de barrages, ou moins d'éco¬les que prévu et plus d'analphabètes,d'hôpitaux, d'usines, d'engrais, deroutes ou de barrages.

Eduquer, oui, mais qui ? La questionest posée dans la réalité avec la plustranchante nudité.

Pour répondre à ce désir intensed'apprendre, comme à l'exigence del'éducation génératrice de progrès, lesgouvernements des trois continentsde la faim ont adopté des solutionsdiverses que l'on peut diviser schéma-tiquement en deux groupes.

Dans le premier groupe de pays,pour l'essentiel africain, l'école pri

maire a été ouverte à tous, sans dis¬crimination. Les promotions d'écolesnormales étant insuffisantes, l'on a

engagé des « moniteurs » habituelle¬ment peu qualifiés : élèves recalés àl'entrée d'une classe de cinquième, ousimplement titulaires du certificatd'études.

La Côte-d'lvoire compte ainsi600 instituteurs diplômés sur les 7 500enseignants du primaire. Et la propor¬tion des « moniteurs » en Afriquefrancophone atteint « 70 à 80%,90% au Tchad ».

Le résultat, en ce qui concerne laRépublique démocratique du Congo,c'est que cinq ans après l'école pri¬maire, ces soi-disant alphabètes sontredevenus des analphabètes... auréo¬lés d'un prénom européen, et nantis,hélas, d'une forte dose de frustration.

Le processus est grossièrement lesuivant : le « moniteur » fait réciter

en ch à des classes de 50, 60, 80,voire 100 enfants, un manuel dont lecontenu est à peine compris. La sélec¬tion étant rigide pour le passage d'uneclasse à l'autre, les inacceptés redou¬blent ou triplent, éventuellement qua¬druplent avant d'abandonner... et obtu¬rent progressivement un enseignementdéjà faible. Ils forment ce que lesexperts appellent « le mur ».

Dans ce système incantatoire, lesredoublants ou triplants qui finalementforment un ch5ur, réduisent au silence

les nouveaux, même s'ils sont plusdoués. En fait, entre 10 et 20% seule

ment, dans les classes de 100 élèves,parviennent à passer dans la classesupérieure sans redoubler.

La « déperdition scolaire » est doncénorme. M. Amon Tanoh, ministre del'Education nationale de la Côte-

d'lvoire, a pu rapporter: « Sur 10 000élèves entrant, une année donnée, aucours préparatoire, 3 900 atteignent laclasse suivante, dont plus de la moitiéaprès avoir doublé ou retriplé laclasse.

« Environ 30% de ce groupe dedépart atteignent au cours moyen1" année, et 20% au niveau du coursmoyen 2e année, la plupart après sept,huit ou dix ans de scolarité. Sur ces10 000 entrées en cours préparatoire,1 585 seulement, moins d'un sixième

du groupe, obtiennent le certificatd'études primaires. »

Malgré des dépenses qui écrasentces pays démunis, le rendement estdonc très faible.

C'est dans un deuxième groupe quel'on peut grossièrement, à l'exceptionde quelques cas notables, ranger lespays d'Asie, d'Amérique latine ou duMoyen-Orient. Le processus y est dia¬métralement inverse : une importanteproportion d'enfants n'y sont pasencore acceptés à l'école primaire,mais ceux qui y entrent, dans leurgrande majorité en sortiront diplômésde l'enseignement secondaire.

C'est-à-dire, en fait, pour ces privi¬légiés, une scolarité débutant à six anspour finir à dix-huit. La connaissance

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LE PRIX DES

REDOUBLANTS

L'expérience des dernièresannées a mis en relief

les écueils rencontrés parles pays en voie dedéveloppement dans leurhâte à rattraper les retardsde l'éducation. Une énorme

déperdition scolaire et unnombre démesuré de

« redoublants » sont

Imputables, entre autres, àla pénurie d'instituteursqualifiés. Dans certainesrégions d'Afrique, parexemple, sur six élèves quientrent à l'école primaire,un seul parvient aucertificat d'études. Dans les

pays développés, où, parcontre, le nombre despostulants aux étudesuniversitaires double dans

bien des cas tous les

six ans, le problème de ladépertitîon se pose aussi,mais à un bien moindre

degré. Nos deux photossymbolisent les deux aspectsde ce problème.

Photo Université de Rochester, New York

des programmes n'y est guère exigée,et dans beaucoup de pays les élèvespassent sans grande difficulté d'uneclasse à la suivante. Le baccalauréat,

ou son équivalent, qui sanctionne ledéroulement d'une scolarité paisibleest finalement généreusement distribué.

Par exemple 98 % des candidatsreçus au lycée d'Ispahan (Iran). EnUruguay, 59% des enfants de six àquatorze ans sont scolarisés, et 50 %d'entre eux se retrouvent dans le

secondaire, jusqu'à dix-huit ans : legroupe n'a perdu en douze années que9 % de son effectif.

Le renforcement de l'enseignementsecondaire est évidemment la domi¬

nante dans ce second groupe. AuMexique, depuis 1955, la scolarisationprimaire n'a progressé que de 50%,tandis que la secondaire avançaitde 300 %. La même évolution est sen¬sible dans plusieurs pays d'Asie.

Les experts nomment ce typed'enseignement : « poreux » ou« accueillant ».

Il semble assez bien défini par unprofesseur de faculté de Téhéran :« La qualité de l'enseignement estplus que faible. On accepte tous lesélèves, même les plus nuls, au lycée.J'y connais des professeurs, décou¬ragés, avec 70 élèves ou même plus,qui renoncent à faire leurs cours. Lesbacheliers ont été si mal formés quej'ai vu, en faculté, des étudiants écrirephonétiquement, en alphabet arabe, le

cours d'anglais. Nous ne formeronsjamais une élite active avec un ensei¬gnement secondaire si accueillant. »

Le constat est cruel, mais il seraitindigne de le cacher : malgré d'énor¬mes efforts et des budgets écrasants,que ce soit par « déperdition » ou« porosité », l'enseignement du TiersMonde ne fournit à ce jour que peud'adolescents qui pourront demainpromouvoir le développement, encoreplus difficilement utiliser les possibili¬tés de la science et de la technique.

Eduquer, certes, mais comment ?

Oue s'est-il donc passé ?

D'abord une explosion démographi¬que dont les effets n'avaient pas étéou étaient mal calculés. Un gonflementgénéral des effectifs en a été la consé¬quence : au Mali, par exemple, en1961, 10% des enfants de six à qua¬torze ans allaient à l'école: 68 000.

En 1964, trois années plus tard, il n'ya toujours que 10% des enfants dumême groupe d'âge en classe, maisils sont 113 000: presque le double.

Depuis l'indépendance, depuis 1962,les effectifs scolaires algériens ontdoublé dans l'enseignement primaire :de 600 000 à 1 400 000, triplé dans lesecondaire: de 35 000 à 110 000,décuplé dans le supérieur : de 600à 7 000. Quel budget pourrait indéfini¬ment supporter ces augmentations,et assurer en même temps la forma¬tion de maîtres qualifiés à tous cesniveaux?

Ensuite une inversion par rapportaux processus de scolarisation que lemonde a connus jusqu'ici. Que ce soiten Europe, aux Etats-Unis, en U.R. S.S.ou au Japon, l'industrialisation a tou¬jours précédé l'éducation, au momentmême où baissait la natalité.

Longtemps, dans les pays aujour¬d'hui développés, il y eut plus d'usinesque d'écoles. Et c'est l'industrie quifinancièrement a supporté les frais del'éducation dont en même temps elleavait un urgent besoin pour s'enrichirde personnel qualifié. H fallut cepen¬dant plus d'un siècle à l'Europe pourparvenir de la sorte à une scolarisa¬tion primaire totale de tous ses enfants.

Dans les pays en voie de dévelop¬pement, par contre, les écoless'ouvrent avant les usines, en périoded'ascension de la natalité, et alors quela connaissance (particulièrement laconnaissance scientifique et technique)s'est multipliée par 20, 50 ou 100.

Il était fatal que des difficultés aussiconsidérables que le problème àrésoudre surgissent rapidement etavec acuité, alors même que l'on déci¬dait de réaliser des programmes aussigrandioses que la scolarisation totaleen vingt années.

Faudrait-il donc maintenant renoncer

et jeter les espoirs à cause desscories ? Certainement pas. Faudrait-ildonc alors calquer le mouvement dela scolarisation sur ce que fut le pro¬cessus européen et piétiner pen¬dant un siècle avant que tous les

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QUI? ET COMMENT? (Suite)

Il faudra 1500000 ingénieurs et techniciens en 1980

enfants des trois continents soient en

classe? Encore moins; l'imitation ne

peut être une solution. Eduquerdemeure une option fondamentale quiprend aujourd'hui, à l'expérience desdernières années, un sens plus pré¬cis : « Qui et comment ? »

Ce dont il s'agit, finalement, c'est delier la quantité à la qualité et de trou¬ver des raccourcis à l'intérieur des

modes d'enseignement eux-mêmes.

Les pays en voie de développementont maintenant une claire conscience

des maux nés de leur enthousiasme et

ne se réfugient pas pour autant dansles lamentations : ils prennent un tour¬nant avec beaucoup de courage.

Plusieurs Etats ont déjà abandonnéle principe de la scolarité obligatoirede huit années. Le Laos l'a ramenée

à trois années. Le Dahomey n'accroî¬tra pas le taux de la scolarisationprimaire dans les prochaines années.

Le gouvernement de la Tanzanie adécidé de n'accueillir que 49 % desenfants à 'l'école, le taux atteint en1964: M. Georges Skorov, économistesoviétique, spécialiste à l'Institut inter¬national de planification de l'éducation,fondé sous les auspices de l'Unesco,écrit à ce propos : « Il s'agit d'unedécision politique très difficile, car ellesignifie que la moitié de chaque classed'âge va grossir les rangs desanalphabètes qui représentent déjà85 % des hommes et 96 % des fem¬mes âgés de plus de quinze ans. »

L

10

Maroc se proposed'adopter une autre solution : accueillirun nombre croissant d'enfants à l'âgede six ans, mais éliminer rapidementles moins doués : les insuffisants

partiraient au bout de trois ans, lesmoins adaptés au bout de cinq.

Pour élaguer les classes terminalesdu primaire de leurs redoublants outriplants, l'Algérie a décidé d'appli¬quer la règle stricte de douze ans pourentrer dans le secondaire.

Le Nigeria, pour relever la qualitéde l'enseignement secondaire, adécidé de n'y laisser entrer que 15%de ceux qui auront achevé le primaire :1 000 élèves admis, cette dernière

année, sur 3 000 candidats. En Algérie,22 % admis dans le secondaire à lamême époque, contre 70 % l'annéeprécédente. Ce qui, entre parenthèses,approche les normes françaises de1939: 20% des enfants dans lesecondaire.

Et finalement, décision capitale surla question essentielle qui demeurel'amélioration de la qualification desmaîtres : l'Algérie, la Côte-d'lvoire etle Dahomey ont arrêté le recrutementdes moniteurs. Seuls seront admis à

enseigner, au minimum, les titulairesdu brevet : ce qui était le cas de

l'enseignement primaire en France au19« siècle.

C'est un début de réponse à laquestion : éduquer, mais qui ?

A la question : éduquer, maiscomment?, l'Unesco a répondu, à lademande de nombreux gouvernements,en concentrant beaucoup de sesefforts sur la promotion et la qualifi¬cation accrue des enseignants.

Pour la seule Amérique latine onpeut relever à son actif, en associationavec les universités de Sao Paulo

(Brésil) et de Santiago du Chili, laformation de 400 stagiaires de l'admi¬nistration de l'enseignement, de l'orien¬tation scolaire et professionnelle ; laparticipation d'experts de l'organisa¬tion aux cinq grandes écoles nor¬males du continent : Pamplona (Colom¬bie), San Pablo del Lago (Equateur),Jinotepe y San Marcos (Nicaragua) etTigulcigapa (Honduras). En deuxannées, 1 600 futurs instituteurs y ontsuivi des cours expérimentaux donnésen utilisant de nouvelles méthodes,

qui seront ensuite répercutées danstous ces pays.

L'Unesco, en sus, a participé àl'organisation de 40 stages d'étudeset tables rondes visant à l'améliora¬

tion des méthodes pédagogiques etle perfectionnement des maîtres enexercice en Bolivie, Colombie, Equa¬teur, Salvador, Guatemala, Haïti, Nica¬ragua et Pérou. Tandis que les problè¬mes propres à l'enseignement ruralétaient étudiés avec son aide au

Centre Interaméricain du Venezuela.

En Afrique, avec son aide et celledu Programme des Nations Unies pourle développement ont été fondées lesécoles normales supérieures du Mali,du Nigeria, de la Côte-d'lvoire, duCongo... Et des experts mis à la dis¬position de vingt et un pays.

Trouver des raccourcis à l'intérieur

même des modes d'enseignement,c'est à la fois un impératif, un desthèmes du Comité consultatif sur

l'application de la Science et de laTechnique au développement del'O.N.U., une exigence des paysdémunis et l'une des préoccupationsmajeures de l'Unesco.

« L'imitation aveugle des systèmesscolaires du monde développé seraità la fois une erreur et un danger »,a pu déclarer M. Thomas Balogh, del'Université d'Oxford.

L'Unesco a ainsi patronné, pendantune année, les travaux des vingt-sixprofesseurs de huit pays d'Améri¬que latine qui ont « fabriqué »cinq manuels d'enseignement pro¬grammé, huit trousses de matériel delaboratoire peu coûteux, onze courtsmétrages muets, etc., pour promouvoirun nouvel enseignement de la physi¬que à partir de méthodes et techni¬ques neuves.

Le même schéma a été repris enAsie, toujours sous les auspices del'Unesco, pour aboutir à des modesneufs d'enseignement de la chimie...et il se perpétue sous forme de pro¬jets pilotes aux mêmes buts pour labiologie en Afrique et les mathémati¬ques dans les Etats arabes.

Et il faudrait encore mentionner

les efforts de l'Organisation desNations Unies pour l'agriculture etl'alimentation, de l'Organisation météo¬rologique mondiale, de l'Organisationmondiale pour la santé, de l'Organisa¬tion internationale du travail, que cesoit pour l'agriculture ou la médecine,la météorologie ou la formationd'ouvriers qualifiés, qui multiplient lestentatives, les projets, les assistances,les réalisations ou les bourses pourvaloriser toutes les formes d'enseigne¬ment dans les pays pauvres.

Mais l'ensemble, même renforcé

par les aides bilatérales d'Etat à Etat,n'atteint pas à ce jour la moitié de lademande.

D 'ici 1980, la populationscolaire du Tiers Monde passera de400 à 600 millions d'enfants. On a

calculé aussi que pour « décoller »économiquement, les pays démunisdevraient disposer, en 1980, de 900 000techniciens moyens (quatre fois plusqu'aujourd'hui), de 600 000 ingénieurset spécialistes scientifiques (contre150 000 actuellement), sans compterles agronomes, administrateurscomptables ou médecins.

Où trouvera-t-on les capitaux pourformer maîtres et élèves, construireécoles et instituts ? Sans un énorme

effort des pays développés en cedomaine, il est tragiquement évidentque les pays en voie de développe¬ment ne commenceront pas à émergerà partir de 1980, l'écart se sera encorecreusé entre pays développés et paysen voie de développement. L'essorpasse inéluctablement et d'abord parl'éducation.

« Si les nations riches du monde

ne font pas un effort intense, etcoordonné, pour combler le fossé quise creuse entre les deux moitiés de

la planète, aucun d'entre nous nepourra plus assurer la sécurité de sonpays devant les catastrophes quiseront inévitables, devant les vaguesde violence qui emporteront nosdéfenses. Le chaos... que l'on peutprévoir devant de telles disparités, estplus menaçant pour la sécurité... queles armes atomiques... C'est aussi sim¬ple et aussi grave que cela. » Ainsis'exprimait, dès 1967, M. McNamara,alors secrétaire d'Etat à la Défensedes Etats-Unis, aujourd'hui présidentde la Banque internationale pour lareconstruction et le développement.

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par Howard Brabyn

L'ÉDUCATION

PARENTE PAUVRE

L 'HISTOIRE de l'humanité

prend de plus en plus la tournured'une course entre l'éducation et la

catastrophe », ainsi s'exprimaitH. G. Wells, il y a près de cinquanteans, dans son ouvrage « Esquissed'une Histoire universelle ». Et, si biendes gens firent fi de cet avertissement,donné en 1920, le jugeant d'une exagé-

HOWARD BRABYN est un écrivain et jour¬naliste anglais spécialisé dans les problè¬mes relevant de l'éducation et de la

science.

ration indéfendable, il est de nos joursgénéralement tenu pour évident.

Avec l'extension foudroyante de lacapacité de production au cours duXXe siècle, et particulièrement depuisla Seconde Guerre mondiale, on a prisconscience qu'il était possible d'élimi¬ner l'ignorance, la pauvreté et la mala¬die. Aujourd'hui, les déshérités, soitles deux tiers des 3 630 000 000 de

personnes qui vivent dans le mondeveulent en sortir.

Ainsi, de nos jours, ce sont les mas¬ses incultes elles-mêmes qui exigent,et toujours davantage, l'accès à l'édu¬cation, et non plus seulement une

minorité éclairée pour laquelle l'édu¬cation aide à la formation d'une main-

d'9uvre qualifiée, et de citoyens évo¬lués qu'exige l'intérêt national.

« Chacun de ceux qui naissent ence monde a naturellement droit à l'édu¬

cation », déclarait Horace Mann (édu¬cateur américain du début du 19e siè¬

cle) et les peuples de la terre enten¬dent que ce droit leur soit donné. »La « catastrophe » dont parlaitH. G. Wells, se produira si on leurrefuse leurs droits à l'éducation, soitpar calcul politique, soit par incapacitéd'estimer l'urgence et la portée de l'ef¬fort qui s'impose.

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L'ÉDUCATION, PARENTE PAUVRE (Suite)

12

Les études comparatives sur l'édu¬cation ont commencé par traiter lesdifférences de structures, de fond etde méthode. Certes, on peut tirer unvaste enseignement de telles études,mais elles ne peuvent nous donner lamoindre éducation sur l'ampleur de l'ef¬fort accompli en faveur de l'éducation.Elles ne nous renseignent guère quesur la qualité de cet effort.

Mais l'effort accompli du point devue financier, de 1950 à 1965, a été misen lumière par l'Office des Statistiquesde l'Unesco, grâce à un large échan¬tillonnage de divers pays. Il est certesnécessaire d'interpréter avec prudencedes statistiques de cet ordre, mais dumoins nous permettent-elles de déga¬ger les courants caractéristiques desdépenses en matière d'éducation.

Le trait dominant qui ressort del'étude des données rassemblées parl'Unesco, c'est l'augmentation desdépenses d'éducation en chiffre absolucomme en comparaison avec le totaldes dépenses nationales. L'augmenta¬tion est très nette entre 1960 et 1965,

dans un groupe de 90 pays la propor¬tion du revenu national dépensée pourl'éducation, passant de 3,6 pour centen 1960, à 4,5 pour cent en 1965.

Transposée sur le plan humain, cetteaugmentation représente une réalisa¬tion tout à fait remarquable. La scola¬risation mondiale, aux trois principauxniveaux primaire, secondaire etsupérieur a été évaluée au total à324 millions d'élèves pour l'année sco¬laire 1960-1961 (hormis la Chine conti¬nentale, la Corée du Nord et le Nord-Viêt-nam pour lesquels nous ne dis¬posons pas de chiffres récents). Lechiffre correspondant pour 1966-1967était de 428 millions, c'est-à-dire uneaugmentation de 104 millions d'élèves,soit 32 pour cent en six ans.

La scolarisation totale a progresséen moyenne de 4,8 pour cent par an,tandis que la population s'est accrue de1,9 pour cent par an. La forte crois¬sance de la scolarisation reflète les

progrès accomplis dans les pays envoie de développement pour géné¬raliser l'enseignement primaire. Bienqu'en Afrique et en Asie, une propor¬tion de la population totale qui fré¬quente l'école soit plus faible, cesdeux continents ont enregistré annuel¬lement, pendant la même période, leplus fort taux moyen d'accroissementde la scolarisation.

En accordant aux jeunes filles et auxfemmes les droits à l'éducation qui leuravaient été refusés depuis de si nom¬breux siècles, un grand progrès a étéaccompli. Il semble incroyable que,dans l'ancienne Chine, on pût tenir

l'ignorance de la femme comme allantde soi, que Sophie, dans I' « Emile »de Rousseau, ne reçoive guère qu'uneéducation morale et que l'on négligeâtson esprit, que Napoléon ait fondé àEcouen, en 1807, un collège de jeunesfilles pour qu'on y élevât « descroyantes et non des raisonneuses ».

Tous ces tabous ont été balayés aucours des dernières années. La scola¬

risation des jeunes filles et des fem

mes, aux trois niveaux, est passée de140 millions en 1960-1961, à 186 mil¬lions en 1966-1967, soit une augmen¬tation de 33 % en 1966-1967, commeen 1960-1961. Mais en Afrique, le pour¬centage des jeunes filles et des fem¬mes scolarisées n'est passé que de35 % pour 1960-1961, à 38 % pour1966-1967, et en Asie de 37 % à 38 %.

George Bernard Shaw déclarait, nonsans mépris : « agissent ceux qui ensont capables ; enseignent ceux qui nele sont pas », cependant, il n'est pos¬sible, quantitativement, de satisfaire àla demande et à la qualité de l'ensei¬gnement dispensé qu'en fonction dunombre d'enseignants disponibles, etde la proportion d'enseignants par élè¬ve. L'emploi de machine à enseigner,de la télévision ou d'autres procédésaudio-visuels n'intervient pas encorede façon décisive.

On a estimé qu'il y a quelque 17 mil¬lions d'enseignants pour 428 millionsd'élèves dans l'enseignement primaire,secondaire et supérieur pour 1966-1967. Depuis 1960-1961, l'accroisse-annuel moyen du corps enseignantdans le monde a été évalué à 3,9 %.

Cependant la scolarisation mondiales'est accrue au total plus rapidementque le nombre d'enseignants, si bienque le rapport élèves-enseignant, quise situait dans l'enseignement pri¬maire à 31 élèves pour 1 enseignant,contre 30 pour 1 en 1960-1961, n'aguère augmenté. Dans l'enseignementsecondaire, la moyenne était de 19 élè¬ves pour 1 professeur en 1966-1967,contre 16 pour 1 en 1960-1961.

L'effort accompli en général enfaveur de l'éducation, même dans lespays où l'enseignement du premierdegré reste la principale préoccupa¬tion apparaît nettement dans l'aug¬mentation des inscriptions dans l'en¬seignement supérieur. En 1966-1967,l'enseignement primaire représentait73 % de la scolarisation totale, l'en¬seignement secondaire 23 % et l'en¬seignement supérieur 4 %.

C'est l'Afrique qui témoigne du tauxde croissance le plus élevé avec deshausses respectives de 41 , 84 et 74 %pour le premier, le second et letroisième degré. En Asie égalementle développement de l'enseignementsupérieur est remarquable, et particu¬lièrement au niveau de l'inscription desfilles, où le taux d'augmentation est leplus élevé de tous les continents.

Des études statistiques, basées surun schéma établissant les facteursdéterminants de l'évolution internatio¬

nale des dépenses dans le domaine del'éducation font apparaître trois indi¬ces décisifs le revenu national, l'ex¬

tension des groupes d'âge correspon¬dant aux degrés d'enseignement et laproportion de la main-d' haute¬ment qualifiée dans la population.

Dans la plupart des pays, ces fac¬teurs influent de plus en plus sur lesfutures dépenses éducatives. D'autresimpératifs, en particulier l'exigence dechances égales d'accès à l'éducationainsi que la volonté d'améliorer la qua¬lité de l'enseignement officiel, sont

c'est le prixde la

course aux

susceptibles de pousser encore à aug¬menter des budgets d'éducation.

La plupart des prévisions de dépen¬ses dans le domaine de l'éducation

reposent, cependant, sur des prémis¬ses erronnées. On tend à supposerque toutes les nations devront suivrela même voie préétablie du dévelop¬pement. Les comparaisons des dépen¬ses internationales incitent à repren¬dre des schémas budgétaires anté¬rieurs.

A une époque où sont à l'ordre dujour de profondes modifications desprogrammes d'études, des techniqueset de l'organisation, comparer lesdépenses nationales ne signifie pasgrand-chose.

La liaison catégorique entre lesdépenses en matière d'éducation et lesautres charges publiques tend à fairecroire que l'enseignement doit êtreplanifié en tant que partie intégrantede l'effort national tout entier. Au lieu

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4.000 MILLIARDS

DOLLARS

armements

dans le monde

pour les,

dix prochaines

années

LES dépenses totales qu'entraînent les arme¬ments viennent de battre un nouveau record. En 1967, lesdépenses militaires engagées dans le monde entier ontatteint 182 milliards de dollars, selon le World MilitaryExpenditure , 1966-67 » (Dépenses militaires mondiales),étude qui fait état des résultats établis par une récenteenquête menée dans 120 pays par l'Agence américaine pourle contrôle des armes et le désarmement, en coopérationavec d'autres institutions gouvernementales américaineset plusieurs organisations internationales, dont l'Organisa¬tion mondiale de la santé et l'Unesco.

SUITE PAGE 14

d'établir des comparaisons internatio¬nales désobligeantes, il est peut-êtreplus important de comparer la propor¬tion du produit national consacrée àl'éducation et celle qui va à d'autrescharges publiques (voir page 14).

Quand on fait une comparaison dece genre, il est affligeant de constaterun redoutable glissement des valeurs :dans la plupart des pays, l'éducationfait figure de parente pauvre.

Le temps de lire cette phrase, etonze enfants naissent en ce monde.

Simultanément, cinq personnes meu¬rent. Cette formidable explosion démo¬graphique donne la mesure des verti¬gineux problèmes qu'il nous faut af¬fronter dans le domaine de l'enseigne¬ment, -de l'alimentation, et de la santé.

En dépit des efforts que nousvenons d'indiquer, le nombre d'illettrésdans le monde est probablement passéde 740 millions à 800 millions au cours

des dix dernières années. Sauf à

accomplir un prodigieux effort, leschoses iront en empirant. Car c'estl'éducation qui garde la clé des pro¬blèmes : contrôle des naissances,

augmentation de la production agricole,hygiène améliorée ; aussi, pour qu'elleprogresse, requiert-elle un surcroit deressources. L'éducation seule peutdésamorcer la « bombe » de la sur¬

population qui, à la longue, peut signi¬fier, pour notre planète, une menaceplus grande que les armes atomiques.

Le monde ne doit pas seulementclasser ses dépenses selon un nouvelordre de priorité, il doit redéfinir lesobjectifs de l'éducation. Au niveau dupremier cycle, on doit considérer quel'enseignement des principes d'hygièneet de diététique est aussi importantque celui de la lecture et de l'écriture.

Dans leurs universités, les pays envoie de développement doivent orien¬ter les étudiants vers les études quenécessitent les besoins du pays au

stade de développement atteint. Il estmoins important d'assurer à une mino¬rité un maximum de culture, que

d'armer la majorité d'un minimum fon¬damental de connaissances.

« Voulez-vous encore un peu dethé ? », dit le lièvre de mars à Alice.

Je n'en ai pas eu, répliqua Alice,aussi ne puis-je en prendre davantage.

Vous voulez dire que vous nepouvez en prendre moins, dit le cha¬pelier : c'est très facile de prendreplus que rien. » Ainsi s'exprime LewisCarroll avec Alice au pays des mer-velles.

Les résultats acquis ne permettentpas de pavoiser. Pour que le mondes'affranchisse des merveilles absur¬

des, il nous faut offrir aux massesincultes bien plus que « rien », ou .i nque ce presque rien qui jusqu'ici est I Aleur lot. Il faut s'y mettre de toutesnos forces, sans lésiner. Dans moinsde vingt ans il sera trop tard.

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PRIX DES ARMEMENTS (Suite)

Quelques bouleversantes précisions

Le monde dépense 40 pour cent de pluspour les armements que pour l'enseigne¬ment public.

Dans le monde, la dépense annuellemoyenne par soldat est de 7 800 dollars.La dépense annuelle moyenne par enfant,au titre de l'éducation, est de 100 dollars.

Les pays les moins développés comptent72 pour cent de la population mondiale,mais leurs dépenses pour l'éducation publi¬que ne représentent que 1 1 pour cent desdépenses mondiales.

Les pays les moins développés dépensentannuellement en moyenne 5 dollars pourl'enseignement, alors que les pays déve¬loppés en dépensent annuellement 100.

Les Etats-Unis et l'Union Soviétique inter¬viennent pour presque les trois quarts dutotal mondial de l'augmentation des dépen¬ses militaires effectuées de 1965 à 1967.

Au Japon, les dépenses pour l'éducationpublique sont plus de quatre fois plus éle¬vées que les dépenses militaires. AuCanada, deux fois. Autres pays développésqui dépensent plus pour l'éducation publi¬que que pour les armements : Belgique,Danemark, Italie, Pays-Bas, Norvège,Suède, Suisse.

Les pays en voie de développement n'ontpas accru autant que les pays développésleurs dépenses militaires, pour la période1964-1967. Par personne, les frais militairesy sont évalués en moyenne à 8 dollars(contre 170 dans les pays développés).Lourde charge eu égard au niveau de viepeu élevé dans ces pays (186 dollars parpersonne de produit national brut).

L'aide économique mondiale au TiersMonde représente au total 8 milliards de

' dollars, soit moins de la moitié du 1 pourcent du produit national brut des paysdonateurs, 1 pour cent représentant l'objec¬tif proposé par la Décennie du dévelop¬pement.

L'aide aux pays en voie de développementatteint en moyenne 8 dollars par personne

|4 dans les pays développés, lesquels dépen¬sent en moyenne 170 dollars par personneau titre militaire.

Comparés aux chiffres de 1962, année où les Nationsunies ont évalué les dépenses militaires à 120 milliards dedollars, ces chiffres attestent une augmentation de plusde 50 pour cent. A ce train, les dépenses militaires attein¬dront la somme astronomique de 4 000 milliards de dol¬lars au cours des dix prochaines années.

Pour l'homme de la rue, que peuvent bien signifier ceschiffres délirants ? Nous avons tenté de les rendre expres¬sifs dans nos représentations imagées de la page dedroite. On voit que, si chaque seconde un dollar tombait,il faudrait 5 750 ans avant que ne tombe le dernier des182 milliards de dollars dépensés en 1967 pour les arme¬ments, et 126 000 ans avant que ne tombe le dernier des4 000 milliards de dollars que pourraient coûter les arme¬ments dans les dix prochaines années.

On peut emprunter une autre image : empilons l'unesur l'autre les pièces de 1 dollar, dont chacun mesure2,5 mm d'épaisseur. La pile non seulement atteindrait laLune, mais la dépasserait de 70 000 km, rien que pour lesdépenses militaires effectuées sur la Terre en 1967. Quantaux dépenses des dix prochaines années, d'après le rythmeactuel, elles représenteraient une pile de pièces qui s'élè¬verait à 10 millions de kilomètres dans l'espace, soit30 fois la distance Terre-Lune.

Aujourd'hui, le monde dépense plus pour les arme¬ments qu'en aucune autre période de l'histoire (la secondeguerre mondiale exceptée), soit 7 pour cent du produitmondial brut. Ce qui équivaut au revenu annuel total d'unmilliard de personnes vivant dans les pays d'AmériqueLatine, d'Asie du Sud et du Proche-Orient.

Pendant la période î 964-67, les dépenses militaires ontaugmenté plus rapidement que ne s'est accrue la populationmondiale (7 pour cent) et beaucoup plus rapidement encoreque le produit mondial brut (16 pour cent).

DÉPENSES MILITAIRES...ET QUELQUES AUTRESdans le monde, en 1966

159

111

52

Milliards de dollars

200H

180-

160-

140-

120-

100-

80-

60-

40-

20-

Armements Enseignement Santé

8

l=3 -^- o-JAide O.N.U. et ses

0.5

public publique économique institutionsà l'étranger spécialisées

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Si chaque secondeon laissait tomber une pièce d'un dollar

il faudrait...

5.750 ANS

(mille ans de plusque l'âge

des Pyramides)

pour que tombe la dernière pièce

des 182 milliards de dollars que le monde

a dépensés en 1967 pour les armements

il faudrait...

126.000 ANS

(l'âgequ'aurait

aujourd'huinotre ancêtre

l'homme du

Neanderthal)

pour les 4000 milliards qui seraient

dépensés en armements dans les dix

prochaines années, si ces dépensescontinuent de s'accroître au taux actuel

d'escalade.

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« Un jour, nous passerons notre vie entière à l'école ;un jour, nous passerons notre vie entière au contactdu monde, sans rien qui nous en sépare. Ce jour-là,éduquer sera synonyme d'apprendre à aimer àprogresser, à s'améliorer ; ce jour-là, éduquer nevoudra plus dire former et maintenir des hommes àmi-chemin de leurs possibilités mais, au contraire,s'ouvrir à la plénitude de l'existence elle-même. »

(Marshall McLuhan)

A UNE

s._)UR cette civilisation quivole en éclats, l'accord n'est pas una¬nime. Maladie des sociétés occiden¬

tales développées, pour certains. Lespays socialistes ne la connaîtraientpas. Dans les régions du tiers-monde,elle se présenterait très différemment.Néanmoins, sous ces expressionsvariables, la brisure n'est-elle pascommune ?

Dans les pays occidentaux, les mani¬festations de jeunesse ne trompentpas. Grèves universitaires, engage¬ments politiques ou, au contraire,désengagement radical, mouvementshippies, drogue, exaspération erotique,dénoncent un malaise des profondeurset la soif d'un nouveau climat de civi¬lisation.

Il était normal que l'éducation révèlela gravité du mal, celui-ci ayant d'abordgermé dans des consciences solitairesou dans de petites constellations àsensibilité plus aiguë avant de se pro¬pager massivement dans les univer¬sités américaines (Berkeley, Columbia),européennes (Rome, Paris) ou japo¬naises fTokyo) et ailleurs.

Les socialismes, quant à eux, igno¬reraient ce malaise. Officiellement du

moins, ils déclarent que rien ne lesagite. Si le phénomène n'éclate pasau grand jour, est-il donc refoulé ?Peut-être faudrait-il nuancer la réponse.En fait, les idéologies socialistesavaient pris le tournant du siècle avecune certaine avance. Leur vision du

monde englobe une solidarité inter¬nationale en même temps qu'une inser¬tion de l'individu dans la cité active

qui constituent les cordes sensiblesde la crise éprouvée par les autres.

Et cependant, la politique contra¬riant l'idéologie, l'exigence de solida¬rité est mise en échec par la stra¬tégie des blocs et la distance aussi¬tôt apparaît entre la prétention et laréalisation. Un sentiment de frustra¬

tion rappelle donc le malaise des paysde l'Ouest.

RENE HABACHI, philosophe libanais, pro¬fesseur de philosophie aux universités de

Beyrouth, auteur de nombreux ouvrages,appartient actuellement à la Division de la

philosophie, à l'Unesco.Photo © Dolsneau - Rapho, Paris

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D'UNE CIVILISATION

ÉCLATÉE

ÉDUCATION INTÉGRÉE

par René Habachi

Quant aux pays en voie de dévelop¬pement, il est normal que leur crise,avec des manifestations semblables,soit différemment motivée. C'est là quele climat social est le plus désavan¬tagé, en quelque sorte. Une surimpres¬sion de modernisme sur du tradition¬

nel provoque dans ces pays une doubleattraction et une double tension.

L a tradition, bien que dé¬passée, veut être sauvée. Le moder¬nisme brusquement importé, éprouvel'écho des névralgies étrangères. Ceconflit interne échappe aux sociolo¬gues les plus avertis, et cette incons¬cience déporte l'impact de l'aide audéveloppement vers des efficacitésmarginales. L'émoi d'un Africain s'éveil-lant au 20« siècle diffère dans son

contenu psychique de celui d'un jeuneoccidental et s'accompagne d'autrestraumatismes.

Et cependant, pour tous, le mondeapparaît brisé. Quoi qu'il en soit de ladifférence des contextes, le texte estabsurde, indéchiffrable. Toutes lesjeunesses de l'univers éprouvent undérangement, un désordre dont lesfailles viennent du bout du monde

pour converger dans le creuset desconsciences en désarroi.

« Quelque chose est pourri dans leroyaume de Danemark », pressentaitHamlet avant d'être confronté avec

l'absurde : * Le temps est sorti deses gonds. O malheureux destin quede naître pour avoir à le rajus¬ter I » Destin malheureux sans doute,mais tellement passionnant malgrétout : quelle période plus que celle-cimérite-t-elle d'être vécue ?

Oui, le temps est sorti de ses gonds.Un cyclone de jeunesse souffle violem¬ment sur les portes que les adultespersistent à garder closes. Mais lesjeunes d'aujourd'hui ne s'arrêtent pasau dilemme « être ou n'être pas » :ils ont choisi d'exister en prenant desvoies que les adultes n'avaient pasprévues.

La démographie impose indubitable¬ment une donnée du problème : nous

sommes dans un nouvel âge de l'huma¬nité. Non seulement parce qu'au bordd'une mutation exceptionnelle, commec'est le cas de toutes les grandespériodes de l'histoire, mais au senslittéral du terme : physiquement etpsychiquement, l'humanité est plusjeune.

Plus de la moitié du globe a aujour¬d'hui moins de 25 ans. Si l'on songeque dans la seconde moitié figurenttous les vieillards dont la longévité estprolongée par la science, mais quin'en forment pas moins une masseinerte tournée vers le passé plus quevers l'avenir, on est frappé du faitque, globalement, pour 1 adulte il ya 3 jeunes. L'humanité n'a jamais étéaussi adolescente. Les nouvelles

vagues pressent irrésistiblement surdes digues de plus en plus fragilesafin de plonger dans un monde neuf.

Jusqu'à présent, le conflit des géné¬rations, d'abord tendu, s'est résorbéen dialogue jusqu'à ce que la nouvellementalité passe à l'ancienne en lamodifiant. Mais aujourd'hui, le drameest plus aigu et la discussion risquede s'achever sur une rupture. Celle-ci, d'ailleurs, au dire de certains, estpresque consommée. A moins d'unsursaut de dernière instance.

Pourquoi ? Parce que le « para¬doxe » pour se référer à unlangage abstrait ou le « révoltant »

pour se référer au vécu estque ce monde nouveau qui fait éclaterla civilisation est engendré par lesadultes eux-mêmes qui, pris de peuret manquant d'imagination, se contrac¬tent sur leurs leviers de commande,refusant d'aller au bout d'eux-mêmes

et de dérouler les conséquences logi¬ques de leur propre découverte.

Succinctement, comment sélection¬ner quelques structures essentiellesde ce nouvel univers ? Retenons-en

trois : craquement de l'espace, vitessede communication, crampes de solida¬rité internationale.

Insisterons-nous sur les deux pre¬mières structures ? Elles ont déjà re¬tenu les sociologues. Les limites dela terre sont désormais celles du cos¬

mos faisant sauter toutes les fron¬

tières connues : vue de la Lune, la

Terre est un petit îlot perdu dansl'océan des années-lumière.

Si inouï que soit ce nouvel espace,la communication électronique brancheimmédiatement sur nous l'événement

le plus lointain : un satellite jette surnotre écran le continent le plus étran¬ger plus près que notre voisin debureau. Le contact ainsi établi n'est

plus celui du mot abstrait parlant ànotre intelligence, mais l'image colo¬rée, sonore et savoureuse.

La « Galaxie Gutenberg », pourreprendre l'expression du sociologueaméricain McLuhan, est remplacéepar le « milieu télévision », et voicique l'univers concret, dans toute sadiaprure, presse sur la sensorialité dechacun. Une sorte d'omni-présencefait de chaque homme un citoyen dela nation humaine.

D e là l'importance de latroisième structure. L'homme, devenu

planétaire, a acquis simultanément lesens de la globalité, que certainssociologues, comme le Français Jac¬ques Berque, préfèrent appeler « mon-dialité ». Querelles de clochers queces conflits entre blocs en compéti¬tion I Futiles et dangereuses plaisan¬teries que ces contractions politiquessur les frontières des pays I Instinctsde possession anachroniques que cesentêtements à exclure les autres

comme des enfants s'agrippent à leursjouets de ces richesses qui appar¬tiennent à la société humaine. Alors

qu'à travers ces ruptures monte deplus en plus la lame de fond planétaireà la recherche de sa propre unité...

La nature recule devant l'industrie,

et la cosmologie devant la technologie.Or, celle-ci, en même temps qu'ellebrasse les sociétés, jette chacun dansun anonymat sans visage. De là, parréaction, la volonté des jeunes deredevenir maîtres de leur destin et

conscients de leur avenir, refusantcomme cela m'a été exprimé par desétudiants de Columbia, aux Etats-Unis,

qu'une société possédant les moyens-de gouverner se serve de sa puis¬sance pour régir impersonnellementle devenir de tous.

On comprend alors cette mise au mpilori d'une éducation qui, même | Jrécemment modifiée, fait déjà figurede traditionnelle et dépassée. Elle nesuit pas la brusque mutation des

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ACCABLER SOUS LE SAVOIR OU ÉVEILLER L'ESPRIT AU MONDE ? Lithographie inédite de l'artiste français Roland Topor© Topor-Olivetti. 1969

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CIVILISATION ÉCLATÉE (Suite)

Le miroir où la civilisation se brise

consciences. « Elle avance vers l'ave¬

nir en regardant le passé dans sonrétroviseur », comme dit McLuhan.

L'important, aujourd'hui, n'est plustellement de définir les fins de l'édu¬

cation que les nouveaux moyens néces¬saires à leur réalisation, car une telle

solidarité joint les fins et les moyensque la carence de ceux-ci fait déviercelles-là. Développer un homme inté¬gralement ouvert à la mondialité apour corollaire la formation d'unhomme intégral qui, des profondeursde sa solitude, s'engage dans la tota¬lité sans rien perdre de sa transcen¬dance et de sa personnalité.

Ce double souci d' « intégralité »impose aussitôt à l'éducation un dou¬ble impératif d' « intégration » : cellede l'homme à l'univers, en même tempsque celle de l'univers dans le coeurde chaque homme.

0.

20

Fuvrir l'horizon de l'édu¬

cation sur la largeur du globe c'estavant tout l'étendre sur la longueurde la vie. L'éducation ne se tassera

plus dans les premiers âges del'homme afin de mieux se dilater sur

toute la durée de son existence.

« L'éducation permanente » appelle unallégement des programmes tradition¬nels d'enseignement au bénéfice d'unrecyclage qui ne cesse qu'avec la vita¬lité de l'intelligence.

Les proportions d'enseignement pro¬prement dit et d'information en sor¬tent modifiées parce que plus intime¬ment brassées. L'information entre en

classe, pour ainsi dire, et l'enseigne¬ment respire au grand air. Les statutsde jeune étudiant et de travailleuradulte ne sont plus exclusifs l'un del'autre, une dominante seulement lesspécifie.

. Cette extension de l'éducation faci¬

lite l'accès à l'amplitude du monde.Les bâtiments scolaires proposent unesimple infrastructure pour les « pau¬ses » d'une éducation « hors les

murs » oti, encore mieux, itinérante.Le tourisme culturel, aujourd'hui, estune pâle et déplaisante ¡mage de cescaravanes universitaires pérégrinantde pays en pays, se croisant parfoisen de vastes forums, apprenant l'uni¬vers en le parcourant plutôt qu'en luisubstituant l'enseignement abstrait d'unmanuel ou l'optique limitée d'un maître.

Mais suffit-il de faire sortir l'éduca¬

tion de son orbite pour lui donner lemonde en pâture ? Inversement, ilfaudra faire entrer le monde dans

l'orbite de chaque conscience. Et c'estlà que la science la plus évoluée, seservant de satellites et de communi¬

cations électroniques, déversera surles écrans des cours car l'écran a

déjà remplacé la chaire professo

rale les images concrètes, les pro¬cessus de recherche scientifique etles analyses de culture comparées.

La puissance unifiante de l'espritscientifique peut épargner le cumuldes connaissances et leur embouteil¬

lage dans nos programmes-accor¬déons. Non point par une incohérenteabréviation," mais par une synthèsenouvelle.

A cette synthèse, le langage mathé¬matique sera sans doute largementmis à contribution, du moins dans tousles domaines qui en supportent larigueur, les autres domaines accroî¬tront leur spécifité grâce à l'image.D'ailleurs, l'abstraction mathématiqueelle-même pourrait se faire moinsinhumaine parce que, moyennantl'écran, le langage mathématiques'écartera moins de la réalité qu'ilsymbolise.

L'allure générale de l'éducation adonc substantiellement changé. Ellefait appel aux ressorts de l'initiativepersonnelle, et cela aussi bien dansl'apprentissage de la culture que dansle choix d'une orientation profession¬nelle. Au lieu de charger sa mémoire,l'étudiant confiera lui-même à son

computer de conserver la richesse du

détail, se réservant la vision générale,la comparaison, la décision.

L'enseignement programmé permet¬tant à chacun de se critiquer et des'évaluer, les étudiants choisiront

parmi les programmes ceux qui leurconviennent ou sélectionneront, parmiles enseignements proposés par desmaîtres d'un nouveau style, la durée etla variété dont un auto-examen leur

aura désigné l'opportunité.

Le choix d'une orientation profes¬sionnelle sera mieux guidé par destableaux révélant les besoins d'une

souple planification et initiant, par lefilm, aux aspérités et aux séductionsdu métier éventuel et à ses chances

de réussite et d'exploitation sociale.

Sans doute la distinction entre tra¬vailleur manuel et travailleur intellec¬

tuel en sera-t-elle atténuée quant àsa part commune, mais cependant elleen sera aussi accrue par sa part spé¬cifique. Le théoricien et l'artisandemeurent les pôles de l'arc mentalqui joint la pensée à la main.

De cette façon, mises au courant dudestin de leur cité, de ses optionséconomiques et politiques, toutes lesjeunesses du monde s'éprouveront etseront effectivement invitées au dialo¬

gue et à l'engagement dans le devenirde la totalité.

Evidemment, le rapport enseignant-enseigne s'est mué, entre-temps, enrelation d'équipe où le maître fait figurede meneur plus que de professeur.

Les maîtres seront davantage lesagents de la circulation de la cultureque ses détenteurs. Eux-mêmes pour¬suivront leur recherche, entraînantleurs coéquipiers dans une entreprisecommunautaire.

Bien sûr, nous n'avons pas échappéà la science-fiction, mais cela, peut-être, à cause de la pauvreté de notreimagination. Il est important pour lacivilisation de remarquer, tout demême, que si un certain niveau d'uti¬lisation des ressources techniquesépaissit la zone d'anonymat et d'im-personnalité dans les sociétés, unprogrès dans l'application des sciencespermettra un retour- à plus de choixpersonnels et une libération de plusde vocations originales.

L 'éducation résoudra-t-elle

ainsi la crise de civilisation ? Ce n'étaitpas son ambition. Mais elle collaboreà une solution qui ne sera d'ailleursjamais définitive. Elle est le miroir oùla civilisation se brise, elle peut deve¬nir le foyer où celle-ci se reconstitue.Elle aidera, pour sa part, à un huma¬nisme planétaire.

N'est-ce pas cet enjeu qui, finale¬ment, se dresse au terme de notreaventure ? Nous sommes à la recher¬

che d'un nouvel humanisme, d'unhomme à la fois enraciné et ouvert,d'une société où globalité et singu¬larité soient en même temps sauvées.

Une inadéquation les séparait tou¬jours, mais n'est-ce pas cette inadé¬quation comme les différences deniveaux sont sources d'énergie quiconstitue le ressort du progrès ? Saufqu'au lieu d'être subie par une por¬tion du monde, il faut qu'elle soitassumée par la totalité afin d'en déli¬vrer sans cesse la totalité.

Sommes-nous si loin du rêve de

Descartes qui était de « lire dans legrand livre du monde » ? Sommes-noussi étrangers à la ferveur des hommesdu Moyen Age qui sculptaient lagenèse de leur cosmos sur les mursde leurs cathédrales ?

Sauf que ce grand livre veut êtreécrit et déchiffré par tous les hom¬mes, sauf que ce cosmos exige quetous les peuples entrent ensembledans l'histoire.

Peut-être, précisément, dans lamesure où l'on a l'audace d'être

moderne, on rejoint la fidélité à latradition. Cette fidélité dans l'inven¬

tion est la réponse victorieuse del'humanité au défi du temps. Elle estla réconciliation de l'homme et de

l'univers, en même temps que cellede tous les hommes appelés aurendez-vous de la fraternité.

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Un citoyen sur cent est unenseignant, dans l'ensembledes pays développés. Ici, unamphithéâtre de la Faculté dessciences à Szeged (Hongrie). Y a-t-il vraiment

trop d'enseignants ?par John Chesswas

A notre époque où la produc¬tivité est partout à l'ordre du jour, leséconomistes font valoir que l'éducationest une activité hautement « ergati-que » ou, pour parler plus simplement,qu'elle est grosse consommatrice demain-d'uuvre, ce qui tient essentielle¬ment à son caractère conservateur, àla lenteur avec laquelle elle s'adapteaux impératifs de la vie moderne.

Cette critique est-elle justifiée ?L'éducation absorbe-t-elle un person-

JOHN CHESSWAS, attaché au Départe¬ment de la planification et du financementde l'éducation, à l'Unesco, a été directeur

de la planification de l'éducation enOuganda. Il avait appartenu auparavantà l'Institut international de planification del'éducation. Il est l'auteur d'ouvrages surla planification de l'éducation.

nel trop nombreux et avec cela unpersonnel instruit et compétent ? Ilsuffit d'un calcul simple, fait à partirdes statistiques (voir tableau page 23)concernant un certain nombre de payspour lesquels on dispose de toutesles données appropriées, pour obtenirles proportions entre la populationtotale et le corps enseignant, et entrele nombre total de salariés et celui des

enseignants.

Il apparaît donc qu'au Kenya, parexemple, il y a un enseignant sur278 personnes, ou un enseignant sur18 salariés.

Bien sûr, les données et projectionsstatistiques sont toujours plus oumoins sujettes à caution et, d'autrepart, le terme « employé » se prête àdes interprétations différentes quicompliquent encore la situation ; néan¬moins, même si l'on ne considère les

chiffres du tableau ci-dessus que com¬me une indication, un ordre de gran¬deur, les résultats obtenus n'en sontpas moins éloquents et donnent àréfléchir.

Dans les pays en voie de dévelop¬pement, dont les services d'éducationn'ont encore qu'une extension relati¬vement faible, les enseignants repré¬sentent une petite fraction de la popu¬lation globale. Mais comme l'effectiftotal des salariés, dans ces mêmespays, est également très limité, il setrouve que les enseignants représen¬tent une très grosse fraction de ceseffectifs ; cela est particulièrement vraides trois premiers pays inclus dans letableau de la page 23.

Mais plus intéressante sans douteest la situation des pays avancés, oùexiste une solide base d'enseignementobligatoire, prolongé par un système

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LA LEÇON

ÉLECTRONIQUE

Rien ne semble pouvoirdistraire de leur leçon cesenfants (à gauche) coiffés deleurs écouteurs. Au bout du fil,la voix de leur maître, tandisque défilent sur un écranles images qui illustrent la leçon.A droite, une petite fille devantun appareil électroniqued'enseignement programmé.Elle vient de porter sur lamachine la réponse du problèmeposé. Si la réponse est correcte,l'exposé du problème suivantparaîtra sur l'écran de gauche.La petite fille, entretemps, secouvre les yeux de ses mainspour se ménager la surprisedu verdict. Elle joue à sa manièreavec la machine.

TROP D'ENSEIGNANTS ? (Suite)

Au bas de l'échelle, ou presque

22

fort développé d'enseignement secon¬daire du deuxième cycle et supérieur,et dont la situation économique secaractérise par l'existence d'une gran¬de masse de salariés.

Les deux « pays de l'espace »,Etats-Unis et U.R.S.S., sont très pro¬ches l'un de l'autre, et figurent dansle même groupe que le Canada, l'Alba¬nie, la Norvège, l'Australie et la Nou¬velle-Zélande, ce qui est fort signifi¬catif.

L'Italie et l'Irlande suivent à quelquedistance, sans doute parce que leurssystèmes d'enseignement ne sont pastout à fait aussi développés que ceuxdes pays du groupe de tête.

Et il est assez surprenant de consta¬ter que, parmi les pays dits avancés,le Royaume-Uni ait proportionnelle¬ment le moins d'enseignants, tant parrapport à la population totale que parrapport à l'effectif global des salariés.

Pour l'ensemble de ces pays, grossomodo, un citoyen sur 100 et unsalarié sur 35 sont des enseignants,et si l'on tient compte de toute la gam¬me des activités qui y existent, cesproportions sont réellement trèsélevées.

Qui plus est, on y constate une ten¬dance générale à la prolongation de lapériode de scolarité pour une plusgrande fraction des jeunes, et par ail¬leurs une demande constante de maî¬

tres supplémentaires pour les petites

classes afin, dit-on, d'y améliorer laqualité et l'efficacité de l'enseigne¬ment ; d'où forcément une augmenta¬tion du nombre d'enseignants néces¬saires pour le même nombre d'élèves,à supposer que les méthodes d'ensei¬gnement restent les mêmes. De ce fait,l'éducation absorbe une fraction de

plus en plus importante de l'effectiftotal des salariés.

Dans tous les pays du monde, lecoût total de l'éducation s'accroît à un

rythme très rapide, certainement plusrapide que celui du revenu national,et cela surtout depuis la dernièreguerre mondiale ; certains pays consa¬crent désormais de l'ordre de 6 à 7 %de leur PNB à l'éducation.

D'aucuns affirment que, du point devue budgétaire, la limite a déjà étéatteinte. Cette limite existe nécessaire¬

ment pour chaque pays, car l'éduca¬tion n'est que l'une des nombreusesactivités entre lesquelles il faut parta¬ger les ressources nationales.

Or, la tendance indiquée plus hautne fera que relever la part déjà consi¬dérable de l'éducation.

Si donc on veut qu'un nombre deplus en plus grand d'enfants aillent àl'école et cela pendant un plus grandnombre d'années la durée idéale de

l'enseignement de type classique esten elle-même un problème à résoudre

il convient de reconsidérer l'ensem¬

ble des méthodes pédagogiques.

En fait, pour mener le raisonnementjusqu'à sa conclusion logique, celarisque de remettre sur le tapis lanotion même d'éducation, qui est évi¬demment un droit fondamental de tout

être humain.

Mais le présent article n'a pas pourobjet d'aborder ce domaine. Il selimite aux méthodes pédagogiques enfonction des enseignants qui les appli¬quent. Il est ici une considération im¬portante, dont dépend sans doute lemaintien des méthodes actuelles : si

l'éducation continue à mobiliser une

fraction aussi lourde que maintenantde l'effectif total des salariés, et si,

comme cela pourrait bien se faire,cette fraction s'accroît encore, les paystrouveront vraisemblablement difficile,voire impossible d'assurer à toute cettemasse de personnel de niveau moyenou supérieur des rémunérations que lesintéressés jugeront acceptables, étantdonné leur instruction, leur formationprofessionnelle et leur prestige, parrapport aux traitements offerts, touteschoses égales d'ailleurs, dans lesautres secteurs de l'économie.

Il en résulterait que l'enseignementcontinuerait, dans certains pays, àoccuper le même rang qu'aujourd'huiparmi les préférences individuellestout au bas de l'échelle, ou presque.Est-ce cela que nous voulons pour nosenfants ?

Dès lors, on peut se demander si,au lieu de réduire le rapport élèves-

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maître, c'est-à-dire de diminuer l'effec¬tif de chaque classe, il ne serait pasplus raisonnable d'augmenter aucontraire ce rapport, mais de tellemanière que la qualité et l'efficacitéde l'enseignement n'en souffrent pas.

C'est ici qu'interviennent les nou¬velles techniques pédagogiques

télévision, radio, instruction pro¬grammée et, le dernier venu, l'ordina¬teur. Dans un aperçu forcément breftel que celui-ci, il n'est guère pos-

EFFECTIFS DU PERSONNEL ENSEIGNANT PAR RAPPORTA

CEUX DE LA POPULATION ET DES SALARIÉS VERS 1965

Pays

KenyaRépublique arabe unie . .Honduras britannique . . .Canada

États-Unis d'Amérique . .JaponAlbanie

BelgiqueTchécoslovaquie République fédérale d'Al¬

lemagneHongrieIrlande

Italie

France

Norvège Royaume-Uni (moins Ir¬

lande du Nord)Australie

Nouvelle-Zélande

URSS

Population/Enseignants

Mon compris lesprofesseurs del'enseignement

supérieur

278:1

222 1

86 1

91 1

99 1

111 1

115 1

73 1

94 1

184:1

117 1

107 1

105 1

117 1

84 1

123:1

113 1

101 2

101 1

Y compris lesprofesseurs del'enseignement

supérieur

206

85

80

81

99

111

:1

:1

:1

:1

:1

:1

7

84:1

107

102

100

112

80

115

107

92

93

Salariés/Enseignants

Non compris lesprofesseurs del'enseignement

supérieur

18:1

15:1

11 :1

32:1

36:1

54:1

36:1

28:1

43:1

83:1

55:1

39:1

39:1

34:1

33:1

58:1

36:1

38:1

34:1

Y compris lesprofesseurs del'enseignement

supérieur

14

11

28

30

48

35

38:1

50

37

37

32

32

54

34

34

31

Ce tableau indique d'une part le nombre d'habitants pour un enseignant, d'autre partle nombre de salariés que ces différents pays comptent pour un enseignant. Ces chiffressont basés sur les données de l'Annuaire statistique de l'Unesco (1967), l'Annuaire des sta¬tistiques du travail (1968, OIT, Genève) et l'Annuaire démographique (1967, NationsUnies) ; pour la France, les chiffres concernant les salariés sont tirés des statistiquessur la main-d'ouvre (O.C.D.E., 1954, 1964).

sible d'examiner les avantages compa¬rés de chacune de ces techniques, oud'un mélange de ces techniques combi¬nées, éventuellement, avec les métho¬des traditionnelles.

Notre seul but est de bien faire res¬

sortir que les méthodes pédagogiquesactuelles doivent faire l'objet d'un exa¬men critique afin d'être éventuellementmodifiées de manière à devenir moins

grosses consommatrices de main-d'auvre, et de manière que l'ensei¬gnant dispose d'instruments plus effi¬caces pour remplir sa tâche tout enaméliorant et sa situation matérielle

et son prestige social.

Une conversion analogue a été opé¬rée dans bien des secteurs économi¬

ques et même, en dépit de certainsmauvais prophètes d'il y a une ving¬taine d'années, dans le secteur ter¬

tiaire de certains pays. Pourquoi pasdans l'éducation ?

Quels que soient les moyensessayés, il est indispensable de lessoumettre à une analyse économiqueapprofondie. Il serait vain d'économi¬ser sur les enseignants si, ce faisant,on devait en dépenser autant, voiredavantage, pour l'introduction de telou tel moyen de remplacement.

Dans certains cas, on a pu constaterqu'il fallait avoir recours à tout autantd'enseignants et que le coût de latechnique nouvelle venait simplements'ajouter aux dépenses antérieures.

D'un autre côté, il peut se fairequ'on économise sur les enseignants,mais que cette économie soit annuléepar la nécessité de recruter d'autrepersonnel, par exemple des techni-

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Nouvel enseignementdans les écoles soviétiquespar Joseph Nekhamkine

L/HUMANITE aborde le nou¬

veau siècle sous l'étendard du pro¬grès scientifique et technologique. Lamise en pratique des nouvellesconnaissances devient le facteur déter¬

minant du développement des forcesproductives de l'homme. Les formi¬dables changements qui s'accomplis¬sent modifient notre conception descritères qui devraient régir l'enseigne¬ment général.

Qu'apprendre ? Comment ensei¬gner? Qu'implique l'enseignement?Que doivent être nos écoles ? Lespédagogues, dans le monde entier,économistes, spécialistes et chefsposent ces questions. Sociologues,économistes, spécialistes et chefsd'Etat y réfléchissent aussi, car lescitoyens qui sont, aujourd'hui, encoreau berceau, ou qui commencent à allerà l'école, seront dans la force de l'âgeau début du 21e siècle.

Ils vivront dans un monde qui défienotre imagination. C'est à nous, cepen¬dant, qu'il appartient de décider quellesorte d'éducation fera, dans trenteans, de l'enfant des années 1970, unhomme et un citoyen responsable.

En URSS, le problème préoccupenon seulement les pédagogues sovié¬tiques, mais aussi l'Etat soviétique lui-même qui, dès le premier jour de sonexistence, a accordé une attention

toute particulière à l'enseignementpublic, à la formation des esprits età la diffusion de la culture. Même au

plus fort de la guerre civile et de l'in¬tervention étrangère, en plein cata¬clysme économique, pendant la famine,Lénine s'adressait en ces termes aux

délégués du premier congrès panrussede l'Education. « L'éducation est une

partie intégrante de notre lutte d'au¬jourd'hui. »

Aujourd'hui encore, comme lors desa naissance, l'Union soviétique donneà l'éducation absolue priorité. Il va

24JOSEPH NEKHAMKINE, écrivain et journa¬liste soviétique, spécialisé dans les do¬maines de l'éducation, de la science et

de la technologie, est rédacteur scientifi¬que de la revue « Union Soviétique » àMoscou.

sans dire que l'enseignement en Unionsoviétique n'est jamais resté figé ;comme d'autres pays, il a dû affrontersouvent les problèmes complexes, quefaisaient surgir les changements scien¬tifiques.

Par le passé, on les résolvait sim¬plement, en étendant la durée de lascolarité, en augmentant le nombredes matières enseignées, tandis qu'àprésent, ce simple expédient ne suffitplus. La somme des connaissances debase indispensable a fait boule deneige, à tel point que nos programmesscolaires, si démesurément chargés,arrivent à saturation.

De manière directe ou indirecte, cesprogrammes transformaient l'esprit del'enfant en un énorme réservoir de

fajts, de dates, de noms, de chiffres, deformules, de théorèmes et d'expérien¬ces. Et malgré (ou peut-être même àcause de cela) les écoles ne parve¬naient pas à donner aux élèves unereprésentation juste des idées et desproblèmes du 20e siècle.

Les élèves, ployant sous les connais¬sances classiques de base dans toutesles matières, se sentaient davantageles contemporains de Newton, de Lo-monossov et de Lavoisier que ceuxd'Einstein, de Kourtchatov et deWiener.

La question qui se posait aux écolessoviétiques comme à celles de tousles autres pays développés, dépassaitle cadre des écoles elles-mêmes :

comment améliorer un système d'en¬seignement pour répondre aux exi¬gences d'une époque ? Il fallait pourcela faire appel aux efforts concertésdes pédagogues, des psychologues,des médecins, des spécialistes de tou¬tes les disciplines, des parents, dugrand public et des organisationsscientifiques et gouvernementales.

H y a quelques années on créa unecommission mixte de l'Académie des

Sciences pédagogiques et de l'Acadé¬mie des Sciences de l'U.R.S.S. pourdiriger ces travaux. La discussion etla polémique firent rage dans les re¬vues scientifiques et, pour ce quiconcerne l'opinion publique, dans lesjournaux. On fit des expériences àgrande échelle, on fit aussi des expé

riences pilotes ; on tira au clair lespropositions les plus récentes de lamédecine, de la psychologie, de lapédagogie, de la didactique et de laméthodologie.

Toute cette activité et toutes ces

discussions tournaient autour de deux

thèmes principaux « but et contenude l'enseignement » et « méthodesd'enseignement » ce qui revenaità chercher comment former et déve¬

lopper harmonieusement l'élève, et luioffrir les meilleures possibilités d'épa¬nouissement de ses dons créateurs.

Recherche sans fin, il va sans dire.Mais aujourd'hui, alors que les pro¬grammes sont établis sur l'acquis deprojets pilotes mis en dans plu¬sieurs centaines d'écoles et touchant

un grand nombre d'enfants, nous som-

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Bon nombre d'écoles secondaires, en U.R.S.S., ont à leur programme des cours de formationpratique au profit de tous les élèves et surtout de ceux qui ne peuvent pas poursuivre leurs études à l'université.Ici, dans un lycée de Moscou, une classe équipée d'un grand calculateur électronique pourl'initiation des élèves à la profession de programmateur.

mes en mesure de résumer dans ses

caractéristiques le travail accompli.

A ce propos, je me souviens d'unentretien que j'ai eu il y a quelquesannées avec un eminent pédagogueaméricain, le Dr. R. Hall.

Il avait pris connaissance des tra¬vaux des pédagogues soviétiques etavait visité des écoles en U.R. S. S., et

rappelait l'observation que dès 1908avait faite Edward L. Thorndike, un

pédagogue et psychologue américain,déplorant que trop de résultats d'en¬quêtes statistiques et scientifiques fi¬nissent tout simplement dans destiroirs pour devenir, sans plus, cime¬tières de chiffres'. Les enseignants nes'y réfèrent pas et la recherche scien¬tifique ne peut influer sur l'élaborationdes programmes d'enseignement.

J'ai remarqué, disait-il, qu'en UnionSoviétique, vous vous efforcez d'éta¬blir, autant que faire se peut, uncontact étroit entre chercheurs spécia¬lisés de l'enseignement et enseignantseux-mêmes. Savants et enseignantstravaillent de concert sur des problè¬mes plus pratiques que théoriques.Liaison solide qui permet de trouveraux résultats de la recherche scienti¬

fique leur application pratique immé¬diate dans les écoles. »

Et II en est effectivement ainsi. L'un

des plus éminents physiciens soviéti¬ques, l'académicien Isaac Kikoïne, medéclarait : « Je me rappelle qu'un jour¬naliste dit une fois, en apprenant quequatre académiciens et plusieurs doc¬teurs es sciences étaient en train d'éla¬

borer ensemble des cours et des ma

nuels de physique à l'usage des écoles,que c'était là un noble sacrifice, carces savants auraient pu consacrer àleurs recherches personnelles le tempsqu'ils passaient à ces travaux.

« Mais nous n'avions cure de ces

louanges. Nous étions poussés par desconsidérations égoïstes, plus que parune volonté d'abnégation. Les savantsse veulent des successeurs compé¬tents et sont soucieux de les former.

Et pour ce faire, il faut améliorer l'en¬seignement, en hausser le niveau.

« Il y a bien d'autres groupes desavants comme le nôtre, à Novosi¬

birsk, Moscou, Kharkov, Kazan, Le- QCningrad et Kiev. Les plus grands don- ¿.Unent parfois des conférences, etbeaucoup d'entre eux font des coursréguliers dans des établissements se-

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ÉCOLES SOVIÉTIQUES (Suite)

condaires. Leur expérience, leur sa¬voir relèvent tout à la fois le niveau

des nouveaux programmes scolaireset celui de l'enseignement dispensédans les écoles soviétiques. »

Que sont donc ces nouveaux pro¬grammes et de quelle manière enri¬chissent-ils l'élève ? Avant tout, l'amasdes connaissances scolaires, en¬combré de questions accumulées aucours des siècles, fait l'objet d'unerévision minutieuse et d'un élagagestrict. Cependant, il ne s'agit pas deraboter simplement la masse desconnaissances mais de conférer une

méthode conceptuelle.

Pour parler clairement, la logiquescientifique, qui va du particulier augénéral, n'est pas la logique pédago¬gique et il est inutile, au cours duprocessus d'acquisitions des connais¬sances, de refaire aveuglément les dé¬marches de ceux qui ont dégagé lavérité scientifique.

En poussant plus loin ce principe,on a réduit tout le matériel de réfé¬

rence et d'information qui n'était mê¬me pas de « gymnastique mentale »,mais ne faisait appel qu'à la mémoire,ce qui eut pour conséquence d'amenerl'enseignement à maturité : aujourd'hui,on ne demande pas aux élèves d'êtresimplement capables de reproduire cequ'on leur enseigne, mais aussi d'ensavoir tirer les conclusions logiques etd'avoir une compréhension plus pro¬fonde de l'interdépendance des faitset des phénomènes.

On s'est aperçu alors que cette« maturation » des écoles n'entraînait

pas obligatoirement une augmentationdes heures de présence dans le se¬condaire, et le total de ces heures

de présence n'a pas été modifié.

Une étape particulièrement importan¬te a été franchie lorsque l'on est pas¬sé, dans le primaire, d'un enseigne¬ment de 4 ans à un enseignement de3 ans. Ce changement a nécessitéplusieurs années de travail et méritequ'on s'y attarde.

On a peine à imaginer devant letableau noir, un enfant de sept ans quirésoud tranquillement des équationsalgébriques. Or, aujourd'hui, ce n'estplus là le fait d'enfants exceptionnel¬lement doués, mais un aspect du tra¬vail scolaire dans bon nombre d'écoles

pilotes.

Ces expériences pédagogiques ontpermis certaines constatations curieu¬ses : il s'est révélé que de très jeunesenfants possèdent des aptitudes in¬tellectuelles insoupçonnées et éton-nament riches.

La maîtrise des abstractions algé¬briques est particulièrement concluan¬te. Des expériences menées pendantnombre d'années dans des écoles de

Moscou, de Kalinine et de Toula per¬mettent d'affirmer que les élèves dela première classe primaire ne res¬semblent plus à ceux d'autrefois.

Constat qui, pour être établi scien¬tifiquement, exigea du temps et du tra¬vail ; il fallut aussi convaincre les scep¬tiques, transposer les résultats des

expériences de base aux programmesappliqués dans certaines écoles. En¬fin, en tirer une conclusion : les quatreannées de cours élémentaire pouvaientêtre ramenées à trois, ce qui permet¬tait de regagner environ 500 heuresdévolues désormais à un enseignementscientifique systématique, si bien qu'ildevenait possible de réduire le nom¬bre total des leçons dans le programmedu secondaire.

« Juste ce que nous voulions : allé¬ger ce lourd fardeau, fléau des écolesde par le monde. », me disait avecsatisfaction le ministre de l'éducation

de l'U.R.S.S., M. A. Prokofiev.

Chercheur et éducateur, il saitqu'alléger les études, c'est permettreà l'élève de se consacrer à des travaux

personnels, d'étudier selon ses dons,selon ses capacités. Et c'est à quoivise le programme scolaire soviéti¬que : des cours facultatifs (formationpratique et travaux de laboratoire) ontété prévus pour les classes supérieuresdans des disciplines telles que le des¬sin industriel, les techniques de l'élec¬tricité et de la radio, la technologiechimique et mécanique, l'agronomie.

Au cours de l'année scolaire 1967-

1968, 40 à 60 % des élèves de 9e etde 10s année ont suivi ces cours fa¬

cultatifs tandis que dans 516 écolesprès de 2 000 classes nouvelles of¬fraient aux élèves des sections spécia

lisées en matière de mathématique, dephysique ou de chimie.

Ce passage de l'ancien au nouveauprogramme, à présent réalisé dans laplupart des 206 000 écoles de l'Unionsoviétique a mis 2 millions et demid'enseignants à rude épreuve. Lesécoles ont été réaménagées, les pro¬fesseurs recyclés.

Les méthodes d'enseignement, en¬richies de nouvelles idées, ont eurecours aux équipements modernes,télévision, magnétophones, films et cal¬culatrices électroniques. S'ajoutentaussi au tableau de nouveaux manuels

et de nouveaux auxiliaires pédagogi¬ques élaborés par les plus grands spé¬cialistes du pays.

Tout cela a demandé un gros effortet d'énormes crédits, si l'on pensequ'il y a près de 50 millions d'enfantsinscrits dans les écoles soviétiques,et si l'on tient compte de tous les au¬tres types d'enseignement dispensésdans les pays, nous parvenons à untotal d'environ 80 millions de person¬nes poursuivant des études. Ce quisignifie 300 millions de livres de classepar an, publiés en 47 langues.

J'ai entrepris de montrer quels sontles problèmes que notre époque poseaux écoles. Pour conclure, je veuxsouligner que notre époque elle-mêmepeut aider les écoles à les résoudre.

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L'ÉDUCATIONA REFAIREpar Paul Lengrand

E,,MILE a 200 ans. DéjàRousseau, dans les années 60 du18e siècle, s'étonnait de la manière dontles hommes étaient formés en son

temps. Faut-il vraiment que l'êtrehumain s'adapte à l'éducation ou, aucontraire, ne convient-il pas que l'édu¬cation s'adapte aux hommes ? La ques¬tion fondamentale était posée.

Depuis, régulièrement, à chaquegénération, le lien entre l'éducation etla vie est l'objet de réflexions, deméditations, d'expériences. La liste desprotestations, des propositions et des

PAUL LENGRAND est chef de la section

d'Education permanente au Département del'avancement de l'éducation à l'Unesco. Ilest l'auteur de nombreux articles sur l'édu¬

cation des adultes et l'éducation permanen¬te, publiés dans des revues spécialisées,et de l'ouvrage « Education permanente »,Edition Peuple et Culture, Paris 1966.

projets est abondamment fournie.Après Jean-Jacques Rousseau, citonsJean-Henri Pestalozzi, en Suisse, Frie¬drich Froebel, en Allemagne, BertrandRussell, en Angleterre, John Dewey,aux Etats-Unis, Célestin Freinet, enFrance, Anton Makarenko, en U.R. S. S.,Mme Maria Montessori, en Italie, ettant d'autres pionniers de la réformeéducative. Il faudrait prendre en comptetant de philosophes préoccupés, euxaussi, en priorité, de la formation etdu développement du modèle humain.

Qu'on relise Friedrich Hegel, AugusteComte ou Friedrich Nietzsche. A cha¬

que page on y trouvera le même souci :comment l'homme, au travers de sesexpériences, de ses réflexions, de sesrelations avec le monde, peut cons¬truire sa personnalité, devenir toujoursdavantage ce qu'il est, conquérir savraie, authentique et concrète liberté.

Certes, on dispose en surabondance

d'un matériel idéologique. Mais l'évi¬dence est que la pensée éducative n'arejoint la pratique de l'éducation qued'une manière très approximative. Lesstructures traditionnelles ont cons¬

tamment exercé une résistance pas¬sive, parfois même active, à unetransformation du processus éducatifconforme aux intérêts aussi bien des

individus que des sociétés.

Il apparaît bien que, de toutes lesentreprises humaines, l'éducation estcelle qui rencontre les plus grandesdifficultés à progresser. Les institutionsconnues pour leur stabilité, les égli¬ses, les armées sont, depuis desdécennies, en pleine évolution. Ladéfense nationale ne se prépare plusguère, désormais, dans la cour descasernes, mais bien dans le labora¬toire des savants.

A Rome, au moment où les évê-ques du monde entier discutent avec

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On doit au célèbre

peintre françaisHonoré Daumîer

(1808-1879) unesérie de

lithographies,caricatures sociales

où l'artiste a

recensé les grandsproblèmes de sontemps : travail,justice, transports,loisirs, etc., quiexpriment déjà lesmalaises de la

société industrielle.

L'enseignement etles problèmesscolaires ne lui ont

pas échappé,témoin, parmi biend'autres, cette¡mage de lasolennelle

distribution des

prix vers 1850 :« Chapoulard,Premier prixde santé ».

- Professeurs et

moutards », parH. Daumler,Edition Vilo

© André Sauret,Edition du Livre,Monte-Carlo

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EDUCATION A REFAIRE (Suite)

Des juges ou des interlocuteurs ?

le pape des modalités du « pouvoirecclésiastique », de simples prêtressiègent chez les protestants et récla¬ment de participer aux décisions.

Jusqu'à une date récente, on n'arien connu de semblable dans le

monde de l'éducation, du moins dansla mesure où celle-ci s'adresse à des

enfants ou des adolescents. Certes,

l'enseignement tel qu'il est dispenséaujourd'hui dans la plupart des paysà structures modernes, a franchi quel¬ques étapes depuis les amères ana¬lyses et sombres descriptions deCharles Dickens ou de Jules Vallès.

On ne fouette plus les enfants. Onn'obscurcit plus systématiquement leurintelligence. On n'apprend plus parcMur les affluents du Rhin ou de la

Tamise. L'état général des meurs afait des progrès, et la pratique del'enseignement se ressent de plusieursconquêtes décisives de la civilisation.

L'enfant est aujourd'hui générale¬ment respecté, au moins dans son inté¬grité physique. Jusqu'à un certainpoint, les « lumières » ont égalementeu accès aux programmes et à laméthodologie. Mais l'essentiel resteimmuable.

Les instruments dont la société dis¬

pose pour l'instruction et la formationdes futurs citoyens, l'école et l'univer¬sité, génération après génération, pré¬sentent toujours les mêmes caractéris¬tiques : liens épisodiques avec lavie, ignorance des réalités concrètes,divorce entre le plaisir et l'éducation,absence de dialogue et de partici¬pation.

L,

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i ES obstacles au change¬ment sont bien connus. Certains,

même, ont de solides raisons d'être.On ne saurait négliger la fonction detransmission du processus éducatif.Comment, autrement que par un ensei¬gnement, la génération présente peut-elle être reliée à celles qui ont pré¬cédé.

Il est normal et inévitable que lepassé, tous les passés, celui del'humanité en général et celui de cha¬que société particulière, occupent uneplace de choix dans la nature de toutenseignement. C'est une richessecommune, et on ne sait que trop laprivation que ressentent ceux qui n'onteu qu'un accès limité à l'héritageculturel.

Mais cette « tradition », si précieusequ'elle soit, devient obstacle quandelle n'est pas intégrée dans une visionprospective de l'existence, lorsqu'ellesert de prétexte et d'alibi pour refuserle jeu des forces vitales. En fait, c'estle système entier, tel qu'il est consti¬tué et tel qu'il fonctionne, qui faitobstacle.

L'obligation scolaire, dont personne

ne contestera le bien-fondé, paralysel'innovation. Pourquoi changer, pour¬quoi, faire mieux? Pourquoi trouverdes formules qui répondent mieux auxbesoins et aux aspirations de l'êtrehumain en transformation, puisqueautomatiquement, chaque année,l'école reçoit son contingent d'utilisa¬teurs. Le jeu de l'offre et de lademande, qui commande le progrès,est ici absent.

La profession enseignante, tellequ'elle est recrutée et façonnée, nefavorise guère non plus l'imaginationet l'invention. Par métier, l'enseignant,à quelque niveau qu'il soit situé, n'estjamais en situation de dialogue.

Il n'a pas à s'expliquer avec deségaux, mais il passe, par la vertu desexamens, d'un statut de soumission à

un statut de pleins pouvoirs. N'y a-t-il,du point de vue de l'autorité, dans lemonde tel qu'il est, rien qui ressembleà la concentration des pouvoirs dansla personne d'un enseignant? Il ins¬truit, il forme, il a le privilège de l'âgeet du savoir.

Il a raison par définition ; il est juge,pratiquement sans appel, et exécuteur.N'est-ce pas lui qui distribue les blâ¬mes, les punitions et les récompenses ?Ce n'est pas de cette manière, on lesait, qu'un homme devient adulte, qu'ilentre en possession de ses vraiespuissances.

Si la sagesse, la connaissance deshommes et des situations pénètrentdans ce monde fermé sur lui-même,

c'est heureusement que certainss'échappent et prennent contact avecle grand monde, celui où intervient larésistance des hommes et des choses :

la politique, l'art, la cité... et l'éduca¬tion des adultes.

De leur côté, les autorités de statut

ou d'institution n'ont pas d'intérêt àce que cela change, ni elles désirentle changement. Que ce se¡t la famille,que ce soit l'Etat, ce que visent cesinstitutions par l'éducation, c'estl'homme conforme.

La plupart des systèmes scolaireset universitaires aujourd'hui existantssont parfaitement au point pour pro¬duire un type d'individu qui assimilecomme vérités révélées les mythes etles références collectives. Ce qui estredoutable pour les pouvoirs, quelsqu'ils soient, c'est l'esprit d'interro¬gation.

C'est cet esprit qui fait le fils auto¬nome, le citoyen démocratique, enfinl'être adulte, individu par définitionpeu docile, difficile à endoctriner etcapable de s'appuyer sur son proprejugement pour les décisions et leschoix définitifs.

On comprendra, dans ces condi¬tions, l'étendue de l'étonnement etl'ampleur du scandale éprouvés parles milieux dont jusqu'ici dépendaitl'action éducative, lorsque leur pouvoir

et leur autorité ont été mis en ques¬tion, non plus timidement, comme parle passé, par les esprits éclairés, maismassivement, par la contestation et larévolte des intéressés.

Les événements de ces dernières

années sont trop connus pour qu'onait besoin de s'étendre à leur sujet.Qu'il suffise de rappeler ici l'impor¬tance d'un moment de l'histoire où la

contestation qui a été le ferment duprogrès dans tous les domaines essen¬tiels de la civilisation moderne (reven¬dication des ouvriers, des femmes,des hommes de couleur, des Etats

colonisés) a pénétré dans le domainejusque-là farouchement hérissé dedéfenses, de l'éducation.

Une brèche majuscule a été pro¬duite par l'action des étudiants dansle mur du conservatisme éducatif; parcette ouverture pénètrent irrésistible¬ment le flot des questions antérieures,grossi des questions nouvelles, ali¬menté par les impatiences et lesespoirs nouveaux.

Comme pour la misère, l'oppressionet l'injustice, les victimes ont cesséde se résigner. Le nombre de ceux quiacceptent les défauts et les insuffi¬sances de l'éducation comme l'expres¬sion d'un ordre naturel sont de moins

en moins nombreux.

Il semble que le monde soit parti àla conquête d'un ordre nouveau del'éducation qui, comme tout ordrevéritable, doit établir un équilibre entredes forces contradictoires, et accepterd'être fragile et temporaire. Si criseveut dire jugement, alors, vraiment,l'éducation est en crise.

0PN tenterait vainement

d'établir une liste exhaustive des ques¬tions posées, les unes fondamentales,les autres de détail. Mais certaines

s'imposent avec vigueur et insistance.

Quel est le champ d'application del'action éducative ? Quels sont leséléments de la personnalité auxquelselle s'adresse ? N'y a-t-il pas eu jus¬qu'ici des définitions trop étroites,trop restrictives ? N'a-t-on pas sacrifiéles valeurs physiques, sociales, affec¬tives et esthétiques au profit exclusifd'une conception limitée de l'intelli¬gence et de la connaissance ?

Quelles relations existent, en ce quiconcerne le développement de la per¬sonne, entre les données objectives(tenant au sexe, à l'ethnie, à la biolo¬gie et au statut socio-économique), lesdifférentes formes de l'action (sur leschoses et sur les hommes) et les diver¬ses entreprises éducatives ?

Dans quelle mesure l'éducation sedéfinit par une intervention du dehors,une transmission de savoirs et de

techniques. Dans quelle mesure dési-gne-t-elle une manière d'être au

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LA

CLASSE

DE

CHIMIE

Ce dessin du célèbre

humoriste françaisSempé est tiré de sonlivre « Sauve quipeut », éd. Denoël,Paris, 1964.

ti

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-..

monde, un effort dirigé et systémati¬que d'un individu pour intégrer lesdonnées de l'expérience dans unepersonnalité unifiée et harmonieuse.

Et comment articuler ces deuxnotions relatives à l'être et à l'avoir

éducatifs ?

Où situer l'action éducative ? A

l'école ? A l'université ? Dans la

famille ? A l'usine ? Au stade ? Au syn¬dicat ? Au théâtre ? Dans les program¬mes de radio ou de télévision ?

Y a-t-il une notion globale et envelop¬pante qui permet de saisir les apportsspécifiques de chaque situation et dechaque institution à l'instruction et à laformation des individus ? Comment

associer et harmoniser ces diverses

contributions ?

Y a-t-il un âge de l'éducation ? Ouplutôt ne faut-il pas considérer quechaque âge pose des problèmes spé¬cifiques, que l'être à chaque étapede son existence doit fournir un effort

original (et être aidé à cette fin pardes structures institutionnelles) pourcomprendre toujours les aspects nou¬veaux de la vie, pour se comprendreet se situer, en vue de s'équiper effec¬tivement aussi bien qu'Intellectuelle¬ment pour accepter les nouveaux défiset assumer ses responsabilités aveccompétence et discrétion ?

N'y a-t-il pas là une extension nota

ble du concept général de l'éducation,ainsi que des fonctions qu'elle estappelée à jouer dans tout destinhumain?

Comment concilier les besoins desélection avec ceux de la formation ?

Dans quelle mesure l'enseignement,tel qu'il fonctionne de nos jours, tientcompte de la diversité des natures,des tempéraments, des rythmes dematuration et de la variété des voca¬tions ?

L'éducation est-elle vraiment dans le

contexte actuel une aide au développe¬ment? A quelles conditions peut-elleremplir cette fonction ?

Dans quelle mesure les conquêtes

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L'ÉDUCATION PERMANENTE

vue par Pierri

Les quatre dessins de ces deux pages sont tirés de « Educationet Culture ». revue du Conseil de coopération culturelle du Conseilde l'Europe et de la Fondation européenne de la culture.

A toutes les étapes de

de l'esprit moderne, entre autres lesens historique, l'esprit scientifique,ont pénétré les programmes et lesméthodes de l'enseignement ? La pra¬tique éducative dans les établisse¬ments scolaires et universitaires ne

constitue-t-elle pas un obstacle redou¬table au développement normal de lacréativité chez l'enfant (et le futuradulte) ?

Comment répartir la fonction d'édu¬cation entre les activités scolaires

et les activités extra-scolaires ? Ne

peut-on pas utiliser les institutionséducatives comme centres d'activités

culturelles pour l'ensemble de lacommunauté ?

Quelle formation devraient recevoirles enseignants de tout ordre pour lespréparer aux tâches nouvelles del'éducation ? En particulier, l'ensei¬gnant ne devrait-il pas apprendre àécouter ; à observer autant, sinon

davantage, qu'à parler? Son rôle n'est-il pas d'organiser, de mettre en placedes structures de travail et de recher¬

che, plutôt que de faire étalage deson savoir ?

Quelle est la place, quel est le rôle,quelles sont les limites de la compéti¬tion au niveau de l'enseignement?Comment éviter que par le classementse détruise le principe de la solidaritéhumaine et de la collaboration, aussi

essentielles pour l'individu que pourla société ?

Comment utiliser les mass media,non seulement comme véhicule de

l'information et du divertissement, maiscomme instrument de formation de

l'esprit et de la sensibilité ?

Peut-on accepter que les ressourcesnationales, nécessairement limitées,

soient gaspillées, par exemple par leredoublement, par les déperditions, parles éliminations sans remèdes, etc. ?

Ce n'est là qu'un choix quelque peuarbitraire dans un n de questionsdont chacune recouvre des questionsconnexes regardant les structures dela société, la place de l'éducation dansla société et la manière dont elle

répond aux objectifs plus ou moinsexplicites des individus, des groupe¬ments collectifs.

Chacun en trouvera d'autres, pourson propre compte, et personne, mesemble-t-il, n'est en mesure d'en four¬nir un catalogue complet. Ce quiimporte, c'est de prendre conscienced'un fait central, dominant : l'éduca¬

tion, dans sa globalité, est en interro¬gation.

Certes, on peut choisir de ne rienmodifier, sauf à repeindre les mursde l'édifice et à mettre les images surles murs. On comprend les raisons del'immobilisme. C'est une entrepriseredoutable de susciter un ordre nou¬

veau. Elle s'accompagne de renonce¬ments et de sacrifices.

Elle signifie une masse impression-

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EDUCATION A REFAIRE (Suite)

la vie, le recyclage

nante de travaux de toute espèce et,pour cela, il faut du courage, de larésolution et une confiance inébranla¬

ble dans les puissances de l'homme.Elle exprime une vision optimiste dela vie qui vise à liquider les restesd'une vision pessimiste attachée àdes théologies périmées. Mais mêmepour ne pas bouger, il faut payer leprix, parfois très élevé.

D'autres ont choisi autrement. On

voit, en bien des endroits, se leverle vent de l'innovation. Ici le profes¬seur disparaît de sa chaire, et mêmen'est presque plus visible dans saclasse. Là, c'est l'idée même de classe

qui disparaît.

Dans certains pays, on construitmaintenant, non plus des écoles, maisdes « unités éducatives » qui englo¬bent l'ensemble du processus éduca¬tif du point de vue de la clientèle(enfants, adolescents, adultes), dupoint de vue de la substance (étude,formation pré-professionnelle, organi¬sation des loisirs, information et

communication) et du point de vue dela profession enseignante (appel à lacontribution de tous ceux qui, dans|a communauté locale, sont en mesure

de participer à l'oeuvre globale d'ins¬truction et de formation).

Et surtout, il y a le développementrégulier des structures et des métho¬des de l'éducation des adultes. Ici on

trouve à l'éuvre un certain nombre

de principes de la nouvelle penséeéducative : pas d'obligations, pas dediplômes (sauf dans quelques casexceptionnels), choix des activités enfonction des intérêts et des aptitudes

échange et dialogue travail encommun relations et égalité destatut entre enseignants et enseignésqui ont à apprendre les uns des autres

utilisation maximale de l'expériencede la vie, etc.

T.OUT cet aquis, si remar¬quable, si essentiel qu'il soit, ne pou¬vait sans doute pas être transféré àl'ensemble de l'éducation. Même si

l'enfant doit commencer très tôt

l'apprentissage de l'autonomie, il sub¬sistera toujours une part importantede sa formation où il est objet d'édu¬cation.

Il reste que l'éducation des adultesfournit des modèles d'une libre

expression, dont tout enseignementpeut légitimement et utilement s'ins¬pirer.

Nous sommes au seuil d'une nou¬

velle ère de l'éducation, où l'accent

sera toujours mis davantage sur lesujet et par là nous nous acheminonsau-delà d'une préhistoire où l'êtrehumain était avant tout objet d'édu¬cation.

On a vu qu'une partie des réponses

a commencé à provenir des milieuxmêmes de l'éducation. Mais ce sont

des réponses partielles et qui ne peu¬vent être que partielles.

L'entreprise dépasse la compétenced'un milieu particulier si qualifié qu'ilsoit et on comprendra que le mondede l'éducation n'est pas le mieux placé,pour les raisons exposées ci-dessus,et aussi parce qu'il n'est ni commode,ni éclairant d'être à la fois juge etpartie.

Une des contributions majeures deséducateurs conscients des insuffisan¬

ces de la pensée et de la pratiquede l'action éducative, c'est la recon¬naissance du caractère permanent dubesoin d'éducation. Mais le succès

actuel de la notion d'éducation per¬manente ne fait que mettre en lumièrel'ampleur des recherches et des expé¬riences grâce auxquelles ce conceptpeut devenir, non seulement une inter¬prétation du processus éducatif, dansses dimensions et ses étapes, mais unguide pour l'action.

Qui nous renseignera sur les condi¬tions et les rythmes du développementde la personne ? C'est le psychologue.C'est le spécialiste de la caractérolo¬gie. Qui fera les calculs justes sur larentabilité de l'action éducative, consi¬dérée en elle-même, et dans ses rela¬tions avec les autres formes d'inves¬

tissement ? C'est l'économiste.

D'autre part, c'est le sociologue,c'est le politique qui mettront enlumière le rôle de l'éducation, commeproduit et facteur, dans l'évolution dessociétés. N'est-ce pas l'artiste quinous apportera les leçons les plusprécieuses sur les relations entre laconstruction d'une quelle qu'ellesoit et le développement de l'être ?

Pour que cet ordre nouveau auquelon aspire prenne forme et s'institue,il faudra une mobilisation de toutes

les ressources d'ordre intellectuel,

sensible et pratique, ainsi que desforces qui soutiennent l'ensemble del'édifice social.

L'expérience du travail dans lesusines, dans les champs, dans lesbureaux, n'est-elle pas aussi décisivepour élaborer la nouvelle doctrine del'éducation, que la sagesse des philo¬sophes, l'inspiration des poètes, et lesconstructions théoriques et pratiquesdes savants ?

Grâce à la nouvelle éducation, se

dégagera progressivement un nouveautype d'homme accordé aux progrès del'esprit et aux conquêtes sociales. Cethomme sera moins intéressé à se

munir des réponses accumulées.

Mais il sera l'homme de l'interroga¬tion. Par un effort éducatif à caractère

permanent, il maniera avec aisance etbonheur les trois formes essentielles

de l'interrogation : l'interrogation poéti¬que, l'interrogation scientifique etl'interrogation politique.

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Y A-T-IL VRAIMENT TROP D'ENSEIGNANTS ? (Suite de la page 23)

ciens chargés d'entretenir l'équipementélectronique requis.

Ainsi, l'investissement initial qu'im¬plique l'acquisition d'un équipementcoûteux, ainsi que les frais d'entretienet d'amortissement correspondantsprennent une importance capitale. Et ilest capital aussi de veiller à ce que cetéquipement ne soit pas maltraité. Celapose la question de maturité, des moti¬vations et du sens des responsabilitésdes élèves. Laisser une classe de

gamins de neuf ans sans surveillanceauprès d'une coûteuse machine desti¬née à les enseigner, c'est se préparerdes ennuis certains et aller au-devant

de la cessation prématurée du proces¬sus d'enseignement.

Il en ira sans doute tout autrement

si l'on place dans une situation ana¬logue un groupe d'élèves du deuxièmecycle du secondaire préparant leurexamen d'entrée à l'université ; et il

est fort possible que, dans ce secondcas, les contacts directs entre lesenseignés et l'enseignant puissent êtreconsidérablement réduits.

Telle est, en vérité, la raison d'êtredu remplacement d'une partie au moinsdu personnel enseignant par de nou¬velles techniques pédagogiques.

Mais au niveau du primaire, la pré¬sence humaine reste essentielle. Il

s'agit en fait des années où les enfantssont « obligés » d'aller en classe, etoù il faut donc les surveiller et les gui¬der, alors qu'aux niveaux plus élevés,les élèves sont devenus conscients de

la nécessité des études, les poursui¬vant de leur plein gré et comprenantfort bien qu'il leur faut prendre soinde la précieuse machine à enseigner,à l'égard de laquelle ils se comporte¬ront donc en personnes sensées,sérieuses.

A propos du coût des techni¬ques nouvelles, il importe de signalerqu'il en est une qui se recommande parson caractère peu onéreux : il s'agit del'enseignement programmé. Beaucoupde gens pensent que cet enseigne¬ment ne va pas sans une machinecompliquée qui règle la présentationsystématique de la matière enseignée.

Or, c'est justement cette régulationqui compte, et non pas la machine, etl'enseignement programmé a pu êtreprésenté avec de très bons résultatssous forme de brochures impriméessimples (1).

L'élève est simplement invité à nepas regarder les réponses données à

32(1) Il en a été ainsi, par exemple, à l'Insti¬

tut pédagogique national de l'enseignementtechnique (PNET) de Beyrouth, au Liban, pro¬jet commun de l'Unesco et du PNUD.

la suite de chaque question, et de pas¬ser ainsi successivement de l'une à

l'autre, au lieu d'avoir recours à unemachine compliquée et coûteuse quiferait ce même travail pour lui. En finde compte, il s'agit pour lui d'agir enhomme raisonnable, et si on réussit àlui démontrer que faire preuve de pro¬bité intellectuelle est plus avantageuxpour lui-même que « tricher », le butest atteint.

L'élaboration de ces programmesd'instruction demande beaucoup desoin et de compétence, et bien que lestextes de cet enseignement pro¬grammé coûteront sans doute plusque les manuels traditionnels, ilsreviendront beaucoup moins cher quel'achat de machines compliquées ; celaimplique en particulier que l'acquisi¬tion des connaissances courantes, que

beaucoup d'enfants reçoivent actuelle¬ment au moyen de cours marginaux detype traditionnel, peut être obtenuesans -la présence d'un enseignant, àcondition qu'on puisse faire confianceaux intéressés.

Cela dit, il reste à répondre à unequestion importante : dans quelle me¬sure l'influence personnelle de l'en¬seignant sur l'enseigné est-elle un élé¬ment essentiel du processus pédago¬gique ?

D'aucuns affirment qu'aucune formed'instruction mécanisée ne pourrajamais remplacer un bon maître, ilsmaintiennent que les échanges conti¬nus entre enseignant et enseigné sontindispensables pour obtenir que lesconnaissances transmises soient cor¬

rectement comprises et pour quel'élève devienne en mesure d'utiliser

ces connaissances d'une façon intelli¬gente et constructive.

Leur argument est que la machine nepeut pas, comme un maître intelligentet compréhensif, développer l'imagina¬tion et l'adaptabilité des individus : ellepourra peut-être aider le maître à cetégard, mais certainement pas prendresa place.

Et puis il est un autre aspect decette question de l'influence humaine,moins précis et moins systématique,mais dans certaines philosophies del'éducation, tout aussi important sinonplus que la transmission des connais¬sances et de l'art de s'en servir : la

préparation morale de l'élève, la for¬mation de son caractère.

Autrefois, avant qu'ait apparu notrestyle actuel d'éducation consciemmentorganisée, l'influence personnelle étaitautomatiquement celle de la famille etde la communauté. Tel est encore le

cas dans beaucoup de pays, mais danscertains autres, l'exercice de cette

influence incombe désormais, en par¬tie au moins, à l'école.

En fait, lorsqu'un enfant se trouve,dans le contexte de l'école, en contact

social avec d'autres enfants et avec

des adultes, cette influence s'exerceipso facto, qu'elle soit voulue ou non.et, au demeurant, il se peut que ce nesoit pas une influence favorable. Dèslors, ne faut-il pas conclure que l'écoledoit obligatoirement assumer une par¬tie au moins de cette tâche ?

D'ANS certains cas, c'estsans aucun doute une nécessité pour

un Etat moderne d'organiser ce genred'influence humaine corrective sur les

enfants qui viennent de foyers pertur¬bés, et bien souvent l'école cherche ef¬fectivement à créer à cette fin une

atmosphère appropriée. On pourraitavancer que les services auxiliairesde cette sorte peuvent être assurés endehors de l'école, mais cela reviendraità déplacer simplement les données duproblème : car cette influence-là estbel et bien éducative, dans la pleineacception du mot « éducation » et sil'on recrute des travailleurs sociaux

pour remplir cette tâche, l'argent et lamain-d' ainsi utilisés servent en

réalité une fin éducative, quelle quesoit l'institution dans laquelle cetteaction s'exerce.

L'influence humaine est-elle donc

indispensable au processus pédagogi¬que, que ce soit pour transmettre lesconnaissances et le savoir-faire, poursurveiller, contrôler et orienter le tra¬

vail des élèves, ou pour exercer sureux une influence d'ordre moral ?

Là encore, cela dépend des niveaux.Car on adopte forcément une attitudedifférente selon qu'on a affaire à unélève d'école primaire ou à un étudiantdéjà adulte de par la loi, ayant le droitde voter et pouvant se marier sans leconsentement de ses parents.

Lorsqu'on en vient au fond des cho¬ses, si une société décide que cegenre d'influence humaine est un élé¬ment indispensable du processus orga¬nisé d'éducation, alors, quelles quesoient les techniques et les machinesemployées, il deviendra inévitable quel'éducation soit une activité grosseconsommatrice de main-d' enraison de la nature même des fonc¬

tions qu'elle implique. En outre, si cetimportant service doit être assumé parjun personnel compétent et spécialisé,la société doit être prête à lui offrirune rémunération qu'il jugera compa¬tible avec sa condition.

Etant donné que la population sco¬laire et universitaire d'un pays repré¬sente entre 20 et 25 % de sa popula¬tion totale, il semble quasi-inévitableque ce pays doive en arriver, en finde compte, à consacrer à l'éducationune fraction de son produit nationalbrut supérieure aux 6 ou 7 %actuels.

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Nos lecteurs nous écrivent

ENFIN, UNE AUBERGE

ESPAGNOLE...

« L'énigmatique merveille » révéléedans vos « Trésors de l'art mondial »

(octobre 1969, page 2) pourrait être unetige de cadran solaire. L'animal est sansdoute un capricorne.

Colin M. Leitch

Dunoon, Grande-Bretagne

Bien que ressemblant vaguement auBambi de Walt Disney, la créature quia inspiré « L'énigmatique merveille »est évidemment un décapode (classedes céphalopodes), parent des seicheset des poulpes. La taille est à peu prèsla même, et la ressemblance frappantesi vous regardez le motif à l'envers.

Paul S. Robson

Newcastle, Grande-Bretagne

« L'énigmatique merveille » est unobjet à la fois votif, symbolique et pra¬tique représentant tous les pouvoirs parleurs attributs et indicatifs, et notam¬

ment la table numérique complète dusystème primitif utilisé pour élaborerles formes. Autrement dit, l'objet n'aabsolument rien d'énigmatique.

J. E. Giraudel

Bordeaux, France

UN FAMEUX CIRCUIT

Peut-être vous intéressera-t-il de sa¬

voir que chaque mois je lis le « Cour¬rier de l'Unesco » d'un bout à l'autre,

et depuis des années. Après quoi monmari en fait autant, puis j'expédie larevue à mon père, en Angleterre, quià son tour, la passe à ses voisins. En¬suite, elle est expédiée à mon frère, quila retransmet à ma slur, infirmière àLondres. Au-delà, je perds sa trace.Mais ça s'appelle faire circuler unerevue, non ?

Betty JohnsonNew York, Etats-Unis

DE L'UNIVERSEL

AU PARTICULIER

Harmonies et dissonances : affaire

d'appréciation culturelle ? Tel est leproblème que vous soulevez dans votrenuméro de juin 1969 (« Refus de l'in¬solite » par Tran Van Khê). C'est enpartant de cette conception qu'on atenté d'imposer une notion de la musi¬que et de l'art en général, par laquelletoute harmonie « nouvelle » peut êtrecréée délibérément et devenir par lasuite aussi valable que les harmoniesclassiques ; constituer de la sorte unélargissement de l'adaptation physiolo¬gique.

Certes, dissonance en un lieu peut-être consonance ailleurs ; mais il y ades limites imposées par la physiqueelle-même et par le complexe physio¬logique qui interdisent l'extension de cetarbitraire. Il ne faut pas oublier quel'harmonie se définit par la résonancedes objets entre eux, et du point devue humain par la résonance de noscellules aux forces du milieu dont elles

sont Issues. Tout être vivant est marquépar son biotope à travers ses chromoso¬mes : c'est ce qui fait son accord avecson milieu (phénomène neuro-végétatifmal connu, auquel le mimétisme se rat¬tache). On ne peut donc pas espérerque l'art devienne demain universel...

N'est-ce pas mieux ainsi ? et que laculture, en apportant la tolérance, pren¬ne pour but de faire communiquer leshommes en les intrigant réciproquementde leurs différences mineures ?

J. DupagnyFeignies, Nord, France

TRAVAIL OU AVILISSEMENT 7

Le travail des hommes occupe enmoyenne 50 pour cent de leur vie acti¬ve ; si ce travail n'est qu'une besognesans valeur humaine, l'existence ne vaut

pas la peine d'être vécue. Tous lesavantages matériels, confort, loisirs,etc., ne pourront jamais remplacer lacollaboration de l'esprit qui crée et dela main qui exécute. Le progrès aengendré un nombre considérabled'oeuvres nouvelles servies par desupermachines qui rejettent l'homme auplus bas de la servilité. Nous sommesloin de la grandeur et de la dignité del'homme qui doit aimer son travail eten vivre. Après son numéro de juilletdernier consacré à l'Organisation inter¬nationale du travail, le Courrier de

l'Unesco ne pourrait-il envisager unevaste enquête sur ce sujet, afin quenous puissions retrouver la paix et lebonheur auxquels nous avons tousdroit ?

Jean Durand

Rouen, Seine-Maritime, France

D'UNE GÉNÉRATION A L'AUTRE

Il y a dix ans que j'ai commencé àlire le « Courrier de l'Unesco ». J'étais

alors étudiant, et je suis toujours re¬connaissant à celui de mes professeursqui m'a fait découvrir votre revue. Au¬jourd'hui je suis assistant au CollègeSt. Michael d'éducation, à Malte, et jecherche de mon mieux à intéresser mes

étudiants à l'Unesco et à ses travaux.

Philip TortellSt. Julian's, Malte

EXPÉRIENCE ARTISTIQUE

ET VIE QUOTIDIENNE

Permettez-moi de vous témoigner maprofonde reconnaissance pour votrenuméro de mai 1969 « Les Arts et la

Vie ». Préparant des concours adminis¬tratifs où les sujets sur la civilisationtechnique et artistique prolifèrent, jen'avais cependant jamais réussi à dis¬cerner clairement la valeur de l'art dans

la vie de tous les jours. Grâce à cenuméro, j'ai pu apprécier combien l'artest indispensable et « traduit les qua¬lités universelles de l'homme ».

Denis Dutertre

Trainel, Aube, France

ÉMANCIPÉS OU ABANDONNÉS?

A propos de votre intéressant numé¬ro sur la jeunesse (avril 1969), permet¬tez-moi un commentaire. Professeur

dans l'enseignement secondaire, je suisen contact quotidien avec des jeunes.Votre article « De la contestation au

dialogue » commence par ces mots :« Nombre de jeunes restent en margede l'activité sociale... » Est-ce que cesont vraiment les jeunes qui se sont misen marge ? Est-ce que ce ne sont pasplutôt les adultes qu'îles ont abandonnésà leur sort ? La « tendance à l'éman

cipation » ne vient-elle pas de ce queles jeunes ont été forcés de prendredes responsabilités auxquelles leurs pa¬rents se sont dérobés ? Qu'un enfantou un adolescent ait un vrai foyer, etnon seulement vêtements, école, gîteet couvert, n'est-ce pas l'exception ?

Si grande que soit l'influence del'école, celle-ci ne tiendra jamais lieude foyer familial. Je pourrais parler decette écolière de 13 ans qui doit passertous ses week-ends seule à la maison

parce que ses parents ont leur propreprogramme de sorties ; on bien de cettejeune fille de 16 ans qui a dû vivreseule dans l'appartement pendant queses parents faisaient un voyage de troismois en Europe. Il y a ces garçons, de13 à 15 ans, qui viennent toujours enclasse avec la clé de la maison en

poche car leurs parents sont presquetoujours absents. Il y a ces petits éco¬liers qui, chaque jour après l'école, doi¬vent attendre des heures chez la

concierge le retour de leur mère quiest allée au cinéma ou ailleurs. Il y aces parents qui se désintéressent del'école au point de ne même pas sedéranger lorsque leur fils reçoit un prixpour son bon travail.

Frederica Mueller de Hauser

Ramos Mejía, Argentine

TOUJOURS A DÉCOUVRIR,

L'AFRIQUE

J'ai vivement apprécié dans votrenuméro de mai 1969 l'article de Fran-

cine N'Diaye, « Poulies africaines demétiers à tisser ». La riche illustration

(et surtout dans les pages en couleur)est très belle et mérite d'être soulignée.Jusqu'ici repliée sur elle-même, l'Afri¬que noire tend à s'ouvrir au mondemoderne, sans renier les valeurs du

passé. Le premier festival culturelpanafricain, inauguré le 21 juillet, etqui prit fin le 1er août 1969, est à cetégard un exemple typique. La quasi-totalité des nations africaines y étaitreprésentée. Chaque pays y put faireconnaître sa musique (folklorique oumoderne), son théâtre, son cinéma, etson art original.

Farid Younsl

Alger, Algérie

A LA MÈRE

DE TOUTES LES VILLES RUSSES

Comme je m'intéresse aux problèmesde la préservation des monuments histo¬riques et des vestiges culturels, je mepermets de vous suggérer de consacrerun article à l'architecture de Kiev, cette

mère de toutes les villes russes ».

Il y a certains noms qui, de par lemonde, recouvrent de hautes périodesde l'histoire de l'art : ainsi d'Athènes,pour l'antiquité, Constantinople (Istan¬bul), pour l'art byzantin. Pour ce quiest de Kiev, où s'épanouit l'art russeentre le 1 2* et le 15= siècle, le phéno¬mène est le même. Ses somptueuxédifices, comme la cathédrale Sainte-Sophie, par exemple, qui fut le premiermonument, en Russie, à être magnifi¬quement décoré de mosaïques et defresques, sont célèbres dans le mondeentier. Quant à l'histoire de la cité elle-même, elle n'est pas moins riche demerveilles.

L. Vasilieva

Kiev, U.R.S.S.

Page 33: 1970: l'éducation à refaire; The UNESCO Courier: a …unesdoc.unesco.org/images/0005/000567/056740fo.pdf · Irak, les « Frères de la pureté ». Exposés touchant aux mathématiques,

GS lu

Etudes paraséismiquesL'Unesco a envoyé récemment une

équipe de spécialistes du génie paraséis-mique à Banja Luka, en Yougoslavie, oùun tremblement de terre avait fait, en octo¬bre 1969, une cinquantaine de victimes.La ville de Banja Luka avait été détruiteà 80 pour cent. Les experts' de l'Unescoet les experts yougoslaves ont étudié deconcert les divers types de détériorationdes bâtiments pour déterminer quels typesde construction peuvent être envisagésdans cette région, exposée à de nouvellessecousses sismiques.

Les arts et l'espaceDe la beauté d'agrément à la connais¬

sance du monde et des hommes, la recher¬che esthétique a emprunté, à travers lesâges et les civilisations, des voies trèsdiverses, apparemment parfois contradic¬toires, mais qui tendent toutes à donnerdes dimensions nouvelles à l'existence et

à l'univers. L'ouvrage d'Henri Van Lier,« Les Arts de l'Espace », éclaire de façonmagistrale les origines des arts plastiqueset donne à réfléchir sur la recherche inces¬

sante de l'esprit humain, qui remet enquestion et dépasse sans cesse ce quisemble acquis. Ajoutons que le lecteur ytrouvera une mine d'informations sur l'évo¬

lution des techniques et la dialectique desformes. (Editions Casterman, Paris. Prix :21,50 F.)

L'océan et l'atmosphèreLes océanographes soviétiques vont ins¬

taller, en février prochain, dans l'Atlantiquenord et pour une durée de six mois, unvaste réseau de dix-sept stations d'obser¬vations, équipées pour mesurer les cou¬rants océaniques à des niveaux variant de10 à 3 000 mètres de profondeur. Ellesseront ancrées non loin des îles Canaries

et desservies par trois navires laboratoires.Les observations océanographiques et mé¬téorologiques recueillies permettront derésoudre divers problèmes sur la variabi¬lité physique de l'Atlantique nord. Expéri¬menté en 1967 dans la mer d'Oman, undispositif de recherche analogue avait per¬mis de constater que les propriétés chi¬miques de l'Océan varient d'un point à unautre.

34

Les menaces de l'époqueLa Fédération française des Clubs

Unesco organise, en mars 1970, ses jour¬nées d'études annuelles à Albi (France) ;elles auront pour thème « L'homme et sonmilieu ». Diverses questions ont été pro¬posées à la réflexion des clubs. Elles ser¬viront de cadre à des enquêtes locales, quipermettront de regrouper dans une vasteétude d'ensemble toutes les informations

susceptibles d'éclairer le problème alarmantdes menaces de la civilisation industrielle

et mécanique envers l'homme et la nature.Différents groupes de travail sont organi¬sés pour travailler à l'examen de ce phé¬nomène des temps modernes, considérésous trois aspects fondamentaux : l'hom¬me et la nature ; l'espace habité ; l'hommeet son avenir. La Fédération française (10,rue Berthollet, Paris-5e) demande aux clubsétrangers d'apporter à cette étude leur col¬laboration.

L'enseignement techniqueau Koweit

Pour améliorer l'enseignement techniqueau Koweit, l'Unesco fournira au pays desexperts qui s'occuperont de la formationdes professeurs en cours d'emploi, de lamise au point et de la production de ma¬tériel d'enseignement technique et de l'éta¬blissement de programmes d'enseignementdans le domaine du génie mécanique,électrique, chimique et civil. Une enquêtepar les autorités du Koweit a, en effet,montré que 10 pour cent seulement desdiplômés de l'enseignement secondaireavaient une formation technique et qu'ilétait nécessaire de donner une meilleure

formation aux jeunes techniciens de l'in¬dustrie.

Lecture et bibliothèquesY aura-t-il trop de bibliothécaires en

Grande-Bretagne 7 Un rapport récemmentpublié par le - Library Advisory Councilsfor England and Wales » indique que ledéveloppement rapide des cours destinésaux futurs bibliothécaires peut entraîner,dès 1971, un surcroît de personnel inutili¬sable. Il existe actuellement quatorze écolesde bibliothécaires en Angleterre, Pays deGalles, Ecosse et Irlande du Nord ; ellesauront formé, en 1971, 1 400 bibliothécairesqualifiés, alors que, pour cette même an-

L'ART EN MINI-FORMAT

INITÏ0 «TONS F KtÍO'nsTmES ïï

Deux détails d'une mosaïque d'Haidra, Tunisie

(III9 siècle) font le sujet de timbres émis par les

Nations Unies, en deux valeurs de 6 et 13 cents

dans la série « L'art et les Nations Unies ». La

mosaïque d'Haidra montre, en son entier, les

quatre saisons et le génie de l'année; offerte

en 1961 aux Nations Unies par la République tunisienne, elle a attiré des millions

de visiteurs au siège des Nations Unies, à New York. Comme agent en France

de l'Administration postale des Nations Unies, le Service philatélique de l'Unesco

détient tous les timbres des Nations Unies en vente. Pour tous renseignements,

s'adresser au Service philatélique de l'Unesco, place de Fontenoy, Paris 7e.

LECTURES

Dictionnaire raisonné

des mathématiques

(Mathématiques modernes)par André Warussel

Prix scientifique Camille Flammarion.Editions du Seuil, Paris, 1969

Prix : 48 F.

Cinétique chimiquepar Ficini, Depezay. Lumbroso-BaderEditions Herman, Paris, 1969Prix : 30 F,

Professeurs et moutards

par Honoré Daumier

Editions Vilo, Paris, 1969

Prix : 72,5 F.

BIBLIOTHEQUE D'ARTUNESCO-ALBIN MICHEL

La Sculpture de la Grèce antiqueIntroduction de François Chamoux.

Art de l'Océanie (Nouvelle-Guinée,région du Sepik)Introduction de Jean Guiart

Van Dyck

Introduction de David Piper

GauguinIntroduction de John Russe)

Matisse et le nu

Introduction de Alan Bowness

Calder, mobiles et stabiles

Introduction de Giovanni Carandente

La Bibliothèque d'art Unesco-AlbinMichel est publiée aux éditions AlbinMichel, Paris, en accord avec

l'Unesco. 1968. Prix de chaque vo¬lume : 4,70 F.

née, la demande n'est que de 1 220. Il enressort qu'il serait nécessaire de releverla qualité de la formation. Cependant, sil'on tient compte de l'accroissement de lapopulation au cours des vingt-cinq prochai¬nes années, le nombre des bibliothèques,et surtout des bibliothèques municipales,devrait augmenter sensiblement.

En bref..

Aux termes d'une étude du Conseil de

la recherche de l'Académie des Sciences,aux Etats-Unis, 90 % des ressourcesactuellement évaluées de pétrole et degaz naturel seront utilisées au cours des65 prochaines années.

D'ici 1973, la République de Coréeéliminera les caractères chinois jusqu'iciemployés parallèlement à l'alphabet « Han-gul » coréen, créé en 1446.

Quatre écoles supérieures du Népal ontadhéré au Programme d'éducation et decompréhension internationale des écolesassociées de ¡'Unesco, qui compte aujour¬d'hui 666 écoles dans 58 pays.

Le fond de la mer entre le Japon etTaiwan est peut-être l'un des plus richesréservoirs de pétrole du monde, selon unerécente enquête géophysique effectuéedans l'est de la mer de Chine et la mer

Jaune.

Avec la scolarisation de 400 000 nou¬

veaux élèves, les effectifs de l'enseigne¬ment primaire en Al gèr i e atteindront1 770 000 élèves. Le pays consacre le quartde son budget à l'éducation nationale.

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Vient de paraître à l'Unesco...

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Volume II

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Ont déjà paru dans cette collection :

m TENDANCES NOUVELLES DE L'ENSEIGNEMENT DE LA BIOLOGIE

Vol. I (1966), 2e ¡mpr. 1968. 298 pages. 16 F. 27/-stg. $4.50

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Vol, I (1964-1965), 2e ¡mpr. 1968. 359 pages. 24 F. 35/- stg. $7

TENDANCES NOUVELLES DE L'ENSEIGNEMENT DE LA PHYSIQUE

Vol. I (1965-1966), 2e ¡mpr. 1968. 271 pages. 23 F. 39/- stg. $6.50

TENDANCES NOUVELLES DE L'ENSEIGNEMENT DES MATHÉMATIQUES

Vol. I (1966), 2a ¡mpr. 1968. 438 pages. 21 F. 36/- stg. $6

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entre parenthèses, après les adresses des agents.

ALBANIE. N. Sh. Bocimeve, Nairn Frasheri, Tirana.ALGÉRIE. Institue Pédagogique National, 1 1, rue

Ali-Haddad, Alger. Société nationale d'édition et dediffuston (SNED). 3, bd Zirout - Youcef, Alger.ALLEMAGNE. Toutes les publications : R. OldenbourgVerlag, Unesco-Vertrieb für Deutschland, Rosenheim-erstrasse 145,8 Munich 80. Unesco Kurier (Editionallemande seulement) Bahrenfelder Chaussee 1 60,Hamburg-Bahrenfeld, CCP 276650 DM 1 2). AUTRI¬CHE. Verlag Georg Fromme et C*. Spengergasse 39,Vienne V. ( AS 82 ). BELGIQUE. Toutes les publi¬cations : Editions «Labor», 342, rue Royale, Bruxelles3. Presse Universitaires de Bruxelles, 42 av. Paul

Héger, Bruxelles 5. Standaard. Wetenschappehjke Uitge-verij, Belgielei 147, Antwerpen 1. Seulement pour « leCourrier » (1 70 FB) et les diapositives (488 FB) : Jean deLannoy, 112, rue du Trône, Bruxelles 5. CCP 3 380.00.

BRÉSIL. Librairie de la Fundaçao Getulio Vargas,Caixa Postal 4081-ZC-05. Rio de Janeiro, Guanabara.BULGARIE. Raznoîznos 1, Tzar Assen, Sofia. CAM¬BODGE. Librairie Albert Portail, 14, avenue Boulloche,Phnom Penh. CAMEROUN. Papeterie Moderne,Maller & Cíe. B. P. 495, Yaounde. CANADA.Imprimeur de la Reine, Ottawa, Ont. (S 4.00).CHILI. Toutes les publications : Editorial UniversitariaS.A., casilla 10220, Santiago. « Le Courrier» seule¬ment : Comisión Nacional de la Unesco, Mac-lver764, dpco. 63, Santiago (E-). RÉP. DEM. DUCONGO. La Librairie, Institut politique! congolais. B. P.23-07, Kinshasa. Commission nationale de la Républiquedémocratique du Congo pour l'Unesco, Ministère de l'ɬducation Nationale, Kinshasa. COTE-D'IVOIRE. Cen¬

tre d'Edition et de Diffusion Africaines. Boîte Postale 4541,Abidjan-Plateau. DANEMARK. Ejnar Munksgaard Ltd.6. Norregade 1 1 65 Copenhague K (D. Kr. 1 9). ESPA¬GNE. Toutes les publications : Librería Científica Medina-celi, Duque de Medinaceli 4, Madrid, 14. Pour « le

Courrier de l'Unesco » : Ediciones Iberoamericanas, S.A.,calle de Oñate 15 Madrid. (Pts 180). Ediciones Liber,Apartado de correos, 1 7, Ondárrao (Vizcaya). ÉTATS-UNIS. Unesco Publications Center, P.O. Box 433,New York N.Y. 10016 ($ 5). FINLANDE.Akateeminen Kirjakauppa, 2, Keskuskatu, Helsinki.(Fmk 1 1,90). FRANCE. Librairie Unesco, Place de Fon¬tenoy, Pans. C.C P. 12.598-48. (F. 12). GRÈCE.Librairie H. Kauffmann, 28, rue du Stade, Athènes.Librairie Eleftheroudakis. Nikkis, 4. Athènes. HAITI.Librairie «A la Caravelle », 36, rue Roux, B.P. 111, Port-au-Prince, HONGRIE. Akademiai Kónyvesbolt, VaciU 22, Budapest V., A.K.V. Kónyvtárosok Boltj'a, BudapestVI. Nepkoztirsasag U. 1 6. ILE MAURICE. NalandaCo. Ltd., 30, Bourbon Str. Port-Louis. INDE. OrientLongmans Ltd. : 17 Chittaranjan Avenue, Calcutta 13.Nicol Road, Ballard Estate, Bombay 1 ; 36a. Mount Road,Madras 2. Kanson House, 3/5Asaf Ali Road, P.O.Box 386,Nouvelle-Delhi I.Indian National Commission for Unesco.att.The Librarian Ministry of Education, "C" Wing, Room214, Shastri Bhawan, Nouvelle-Delhi 1. Oxford Bookand Stationery Co , 1 7 Park Street, Calcutta' 1 6. ScmdiaHouse, Nouvelle-Delhi. (R. 13.50) IRAN. Commissionnationale iranienne pour l'Unesco, 1/154, Av. Roosevelt,B.P. 1533, Téhéran. IRLANDE. The National Press. 2Wellington Road, Ballsbridge, Dublin 4. ISRAEL. Ema¬nuel Brown, formerly Blumstein's Bookstore : 3 5. AllenbyRoad and 48, Nahlat Benjamin Street, Tel-Aviv. I L. 1 2,50- ITALIE. Toutes les publications : Librería Commissiona-naSansoni, viaLamarmora, 45.Casella Postale 552, 50121Florence, et, sauf pour les périodiques : Bologne : LibreríaZanichelh, Piazza Galvani 1/h. Milan : Hoepli, via UlricoHoepli, 5. Rome : Librería Internazionale Rizzoli GalleríaColonna, Largo Chigi. Diffusione Edizioni Anglo-Amen-cane, 28, via Lima, 001 98, Rome. Turin .-Librairie Française,Piazza Castello 9. JAPON. Maruzen Co Ltd. P.O. Box5050, Tokyo International, 1 00.31. LIBAN. Librairie

Antoine. A. Naulal et Frères. B. P. 656, Beyrouth.LUXEMBOURG. Librairie Paul Brück, 22. Grand'Rue,Luxembourg. (170 F. L.). MADAGASCAR. Toutesles publications : Commission nationale de la Républiquemalgache. Ministère de l'Education nationale, Tananarive.« Le Courrier » seulement : Service des post etpéri-scolaires. Ministère de l'Education nationale, Tanana¬rive. MALI. Librairie Populaire du Mali, B. P 28,Bamako. MAROC. Librairie «Aux belles images»,281, avenue Mohammed-V, Rabat. CCP 68-74. « Cour¬rier de l'Unesco » : Pour les membres du corps ensei

gnant : Commission nationale marocaine pour l'Unesco20 Zenkat Mourabitine, Rabat (C.C.P. 324.45).TINIQUE. Librairie ]. Bocage, rue Lavoir. B.P. 208,Fort-de-France MEXIQUE. Editorial Hermes IgnacioMariscal 41, Mexico D. F., Mexique (Ps. 30).MONACO. British Library, 30, bid des Moulins, Monte-Carlo. MOZAMBIQUE. Salema & Carvalho Ltda.,Caixa Postal 1 92, Beira. NORVÈGE. Toutes les publi¬cations : A.S. Bokhjornet, Akersgt 41 Oslo 1. Pour «leCourrier» seulement : A S. Narvesens, LitteraturjenesteBox 6125 Oslo 6. (Kr 2 75) NOUV.-CALÉDONIE.Reprex. Av. de la Victoire, Immeuble Paimbouc. Nouméa.

PAYS-BAS. N.V. Martinus Ni|hoff Lange Voorhout9. La Haye (fl. 10) POLOGNE. Toutes les publica¬tions : ORWN PAN. Palac Kultury, Varsovie. Pour lespériodiques seulement : « RUCH » ul. Wronia 23 Varso¬vie 10. PORTUGAL. Dias & Andrade Lda, LivrariaPortugal, Rua do Carmo, 70, Lisbonne. RÉPU¬BLIQUE ARABE UNIE. Librairie Kasr El Nil 3, rueKasr El Nil, Le Caire, Sous-agent : la Renaissance d'Egypte,9 Tr. Adly Pasha. Le Caire. ROUMANIE. Cartimex,P.O.B. 134-135, 126 Calea Victoriei, Bucarest.

ROYAUME-UNI. H. M. Stationery Office. P.O. Box569, Londres S E.l. (20/-). SÉNÉGAL. La Maisondu livre, 13, av. Roume, B.P. 20-60, Dakar. SUÈDE.Toutes les publications : A/BCE. Fntzes, Kungl. Hovbok-handel, Fredsgatan 2, Box 1 6356, 1 0327 Stockholm, 1 6.Pour « le Courrier »seulement : Svenska FN- Forbundet,Vasaga-tan 1 5, IV 10123 Stockholm 1 - PostgiroI 84692 (Kr. 18) SUISSE. Toutes les publications :Europa Verlag, 5, Ramistrasse, Zürich. C.C.P. Zürich VIII

23383. Payot, 6, rue Grenus 1211 Genève, 11 C.C.P.1-236. Pour « le Courrier » seulement : GeorgesLosmaz, 1, rue des Vieux - Grenadiers, Genève,C. C. P. 12-4811 (FS. 12). - SYRIE. LibrairieSayegh Immeuble Diab, rue du Parlement. B P. 704,Damas. TCHÉCOSLOVAQUIE.S.N.T.L.,SpalenaS1,Prague 2. (Exposition permanente) ; Zahranicni Literatura,II Soukemcka,4, PragueL TUNISIE. Société tunisiennede diffusion, 5, avenue de Carthage, Tunis. TURQUIE.Librairie Hachette, 469, Istiklal Caddesi, Beyoglu, Istanbul.U.R.S.S. Mezhdunarodnaja Kniga, Moscou, G-200.URUGUAY. Editorial Losada Uruguaya, SA. LibreríaLosada, Maldonado, 1092, Colonia 13 40, Montevideo.

VIETNAM. Librairie Papeterie Xuan Thu. 185.193, rue Tu-Do, B.P. 283, Saigon. YOUGO¬SLAVIE. Jugoslovenska-Knijga, Terazije 27, Belgrade.Drzavna Zaluzba Slovenije, Mestni Trg. 26, Ljubljana

Page 35: 1970: l'éducation à refaire; The UNESCO Courier: a …unesdoc.unesco.org/images/0005/000567/056740fo.pdf · Irak, les « Frères de la pureté ». Exposés touchant aux mathématiques,

CRÉÉ PAR

VASARELY

LE SYMBOLE

DE L'ANNÉE

INTERNATIONALE

DE L'ÉDUCATION

Faite d'anneaux concentriques, la tête de l'homme universel est illuminée par le savoirrayonnant de son cerveau : ce dessin est dû à Victor Vasarely, l'un des maîtres incontestés deTop art et de l'image cinétique. Photo Unesco