2009 Bruxelles 14C

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CHAPTER SIXTEEN ENTRE EFFET RSERVOIR ET EFFET DE PLATEAU: LA DIFFICILE DATATION DU MSOLITHIQUE DE BRETAGNE GRGOR MARCHAND, CATHERINE DUPONT, CHRISTINE OBERLIN, EMMANUELLE DELQUEKOLICRsumPour lintervalle 10.000-5000 avant J.-C., 41 dates obtenues par la mthode du radiocarbone permettent de distinguer deux pics doccupation de la Bretagne, lun dans la premire moiti du huitime millnaire avant J.-C., lautre au sixime millnaire avant J.-C. Pour le premier Msolithique, les effets de plateau dans la courbe de calibration sont un cueil majeur pour esprer comprendre lorganisation chrono-culturelle. Pour le second Msolithique, le calcul de lge apparent de la mer a pu tre ralis Beg-an-Dorchenn sur diffrentes espces de coquillages, avec une moyenne de 18060 ans et donc un R de -26065. En utilisant ce nouveau paramtre, les dates sur coquille mais aussi sur ossements humains provenant du littoral sont vieillies denviron 250 ans, avec plusieurs consquences concernant les modles de nolithisation.

AbstractA series of 41 radiocarbon dates from Brittany, ranging between 10,000 and 5000 cal BC shows two peaks: one in the first half of the 8th millennium cal BC, the other during the 6th millennium cal BC. For the Early Mesolithic, the plateau effect on the calibration curve considerably hinders a further refinement of the typochronology. For the Late Mesolithic, the calculation of the sea reservoir effect297

Chapter Sixteen

has been achieved at Beg-an-Dorchenn on different species of shellfish, with an average of 18065 and therefore a R -26065. Following this, the dates on shell, but also on human bone from coastal areas, have been found to date approximately 250 years older than previously observed. This has major consequences for the neolithisation models. Mots-cls: Bretagne, Msolithique, coquille, effet rservoir, nolithisation Keywords: Brittany, Mesolithic, shell, reservoir effect, Neolithisation

1. IntroductionLobjectif de cet article est de proposer un inventaire critique des dates disponibles en Bretagne et en Loire-Atlantique pour la priode msolithique. Il comprend, dune part un premier Msolithique au huitime millnaire avant J.-C., dautre part un second Msolithique au sixime millnaire. Lusage de ces dates impose de reconnatre au pralable certains cueils : effet de plateau dans la courbe de calibration, effet rservoir pour les chantillons dorigine marine, effet de vieux bois pour les dates sur charbons Les consquences de ces corrections sont particulirement importantes pour comprendre la dynamique de la nolithisation de lOuest.

2. Histoire des recherchesLtablissement dun cadre chronologique pour le Msolithique de Bretagne et des Pays de Loire a dabord t ralis par analogies typologiques avec le reste du territoire franais. Aprs les travaux de P. Du Chtellier puis de Bnard Le Pontois, le niveau coquillier de Beg-an-Dorchenn (Fig. 16-1) fut le principal site de rfrence. Mais, la connaissance du Msolithique de Bretagne a vritablement dbut dans les annes 1920 et 1930 avec les travaux raliss sur les amas coquilliers de Tviec et Hodic (Fig. 16-1). Ils ont apport les premires informations sur lanthropologie physique et le mode de vie de ces populations (Pquart et al. 1937 ; Pquart et Pquart 1954). Au dbut des annes 1960, deux dates radiocarbones furent demandes au Laboratoire de Groningen sur des chantillons issus du niveau coquillier de Beg-an-Dorchenn (Vogel et Waterbolk 1963). Nous ne savons pas de quelle partie du site elles provenaient ; elles pourraient mme tre issues de restes coquilliers dont des poches rsiduelles stendaient ailleurs sur lperon. Aujourdhui, ces dates semblent bien rcentes,

298

Entre effet rservoir et effet de plateau

Fig. 16-1: Carte des sites msolithiques fouills et dats sur le Massif armoricain (Bretagne, Pays-de-la-Loire, Basse-Normandie) et indication des groupes culturels concerns. Le nombre de dates 14C obtenu est exprim par des cercles de surface diffrente. 1 : Roc de Gte (Auderville) ; 2 : Centrale EDF (Flamanville) ; 3 : Kerlizoc (Plouvien) ; 4 : Lannuel (Guipronvel) ; 5 : Toul-an-Naouch (Plougoulm) ; 6 : Le Bilou (Le Conquet) ; 7 : Le Crann (La Forest-Landerneau) ; 8 : Quillien (Le Clotre Saint Thgonnec) ; 9 : Beg-an-Dorchenn (Plomeur) ; 10 : Tviec (Saint-Pierre-Quiberon) ; 11 : Beg-er-Vil (Quiberon) ; 12 : PortNehue (Hodic) ; 13 : Saint-Gildas (Prfailles) ; 14 : La Gilardire (Pornic) ; 15 : LOrganais (Sainte-Reine-de-Bretagne) ; 16 : Er-Grah (Locmariaquer).

299

Chapter Sixteen

avec leur positionnement la fin du sixime et surtout au cinquime millnaire avant J.-C. Un peu plus tard, Y. Rollando fit raliser Gif-sur-Yvette une date sur des charbons prlevs Hodic. Affecte dun intervalle de confiance de 350 ans, elle nen est pas moins contemporaine des dates obtenues ultrieurement. Cest J.-G. Rozoy qui proposa enfin un calage chronologique bien tay, par une mthode de sriation typologique et danalogies (Rozoy 1978). Cette priodisation sera ensuite affine par O. Kayser, grce notamment ses fouilles sur les niveaux coquilliers de Beg-an-Dorchenn et de Beg-er-Vil (Fig. 16-1); les premires datations aux normes actuelles seront alors ralises (Kayser 1985, 1992). A la fin des annes 1990, R. Schulting obtint quatorze datations sur des ossements humains de Tviec et Hodic (Schulting et Richards 2001), dont trois seront corriges ultrieurement (Schulting 2005). Ces travaux montraient une occupation longue de Hodic, du sixime au quatrime millnaire avant J.-C., tandis que lhabitat de Tviec tait occup dans lintervalle 5300-5000 avant J.-C. Le problme de lge apparent des ossements des hommes ayant consomm des produits marins fit alors irruption dans le dbat, avec la ncessit de dfinir la valeur de leffet rservoir. Cest pour aborder cette question que deux dentre nous (CD et GM) ralisrent un sondage Beg-an-Dorchenn en 2001, en prenant soin de faire dater un charbon et des coquilles provenant de sept espces de mollusques issues de la mme unit stratigraphique. Le nombre de dates disponibles pour la priode msolithique en rgion Bretagne et en Loire-Atlantique est de 6 pour le premier Msolithique (Tab. 16-1) et de 35 pour le second Msolithique (Tab. 16-2). Parmi ces dernires, 33 sont issues de niveaux coquilliers. Les coquilles de noisette brles, qualifies dchantillon vie courte, ne concernent que le premier Msolithique. Le second Msolithique est marqu par une diversification des lments dats, qui rpond parfois une absence de charbon, parfois la ncessit de dater directement des tombes (pour Tviec et Hodic). Les rsultats doivent alors tre moduls en fonction des incertitudes propres la nature des chantillons dats.

3. Le premier Msolithique : consquences des effets de plateau dans la courbe de calibrationDfini sur les caractres typologiques de lindustrie lithique, le groupe de Bertheaume occupe lactuel dpartement du Finistre. Une premire date a t obtenue par O. Kayser Toul-an-Naouch (Fig. 16-1), sur des coquilles de noisette brles recueillies dans un niveau organique visible dans une coupe de falaise (Kayser, Le Goff et Rou 1990). Deux autres dates ont t ralises ensuite sur de semblables matriaux issus de sondages, au Bilou et Quillien (Fig. 16-1, Blanchet300

Entre effet rservoir et effet de plateau

et al. 2006). Dans les trois cas, la courbe de calibration est affecte par le mme plateau. Il a pour effet dtaler lintervalle des dates corriges entre 8300 et 7500 avant J.-C. Dans la mesure o il sagit de sites trs vastes, occups de multiples fois, la succession typologique des armatures ne permet pas de les organiser entre eux. Ce problme de construction typo-chronologique ne concerne dailleurs pas que la Bretagne mais le systme chronologique franais dans son ensemble. En effet, le taux de triangles isocles est couramment utilis pour juger du passage entre les stades ancien et moyen du Msolithique (Thvenin 1990, 1991), que lon paralllise grossirement avec le passage de la priode pollinique prborale borale, date autour de 8800-9000 BP par les palynologues (grce au radiocarbone). La disparition des triangles isocles qui signerait cette transition intervient donc au pire moment sur la courbe de calibration... Il nous semble prfrable en ltat des donnes de renoncer mettre en parallle cet indicateur typologique et une transition environnementale, dont les dates souffrent dautant dapproximation. Les plateaux observs dans la courbe de calibration vers 8200 ou 8000 BP signalent dautres augmentations du taux de 14C dans latmosphre (Fig. 16-2). Lorsque la courbe est abrupte entre deux plateaux, dautres effets artificiels sont redouter puisque deux dates proches pourront avoir des calibrations loignes. En consquence, le bilan chronologique du premier Msolithique de lOuest, entre 8500 et 6500 avant J.-C. est vraiment dplorable et ncessitera des batteries de dates dans des contextes assurs, pour en proposer une premire organisation.

4. Le second Msolithique : le problme des datations en contexte littoral4.1 Les matriaux dats et les problmes rencontrsLes dates sur charbon de bois ont t ralises sur la plupart des sites. Seuls les travaux les plus rcents de Beg-an-Dorchenn prennent en compte la nature de lchantillon, une brindille. Cette prcaution na pas t prise pour les autres datations sur charbon et il est thoriquement possible quun arbre mort depuis des sicles ait t utilis comme combustible par les hommes de la Prhistoire ou encore que le charbon dat provienne de la partie intrieur du tronc, soit dans les deux cas un effet vieux bois (Zilho 2004). Les dates sur coquille sont souvent en situation stratgique pour nos301

Chapter Sixteen

BP

Dpart.

13C

protines marines

Commune

Site

US

Rfrence

Nature du matriel

CALIB 5.0.1(deux sigmas)

44 Sainte-Reine- L'Organais de-Bretagne 44 Sainte-Reine- L'Organais de-Bretagne 29 Le Conquet Le Bilou Gif-6170 5990100 Gif-6171 6100100 878090 8830180 880560 -25,00 x ? x Noisette Noisette -25,00 x Noisette ? x Charbon ? x Charbon Sondage 1 Carr A Couche C3 Couche 2 (-55 cm sous la surface) ? ? ? x x x

Fosse (carr B1) Sol (carr C3)

29 Plougoulm

Toul-anNaouch

29

Le Clotre St Thgonnec

Quillien

Lyon1911 Gif -Tan 89 339 Lyon1912 (OxA) Charbon Noisette Noisette

52094623 52974792 82057605 83427540 82077677 66336234

Gallais et al. 1985 Gallais et al. 1985 Blanchet et al. 2006 Kayser, Le Goff et Rou 1990 Blanchet et al. 2006 Giot, Hallegouet et Monnier 1977

29

La ForestLanderneau

Le Crann

14 Auderville

14 Flamanville

Roc de Gte Centrale EDF

Couche de Gif-2631 7580105 charbon (1 m sous la surface) Concentration Gif-Tan. 8460170 orientale 89337 Gif-Tan. 8990180 89334

79547063 85667609

Guesquire et al. 2000 Guesquire et al. 2000

Biblio.

Entre effet rservoir et effet de plateauSpulture 3 907565 907070 921565 5760185 624090 724570 7310110 8420110 869595 876595 ? ? ? x x x ? x ? x ? x Charbon Charbon Charbon Charbon Charbon Charbon ? x ? x ? x ? x Os humain 85358007 Duday et al. 1998, 434

17

Saint-Jeand'Angely Spulture 7 Spulture 10

La Vergne

La Vergne

17 Saint-Jeand'Angely 17 Saint-Jeand'Angely 17 Geay Gd-6936 Ly-147 Gd-6938 Gd-6937 Ly-116 Ly-117

La Vergne

OxA6698 (Lyon 368) OxA6699 OxA6700 Ly-6800 Os humain Os humain Charbon

17 Geay

17 Geay

17 Geay

17 Geay

17 Geay

17 Geay

La PierreSaint-Louis La PierreSaint-Louis La PierreSaint-Louis La PierreSaint-Louis La PierreSaint-Louis La PierreSaint-Louis La PierreSaint-Louis

Structure 5 secteur V Structure 1 Secteur VI Structure 4 Secteur VI Couche 5b SecteurIV Structure 2 Secteur VI Structure 6 Secteur III Structure 15 Secteur III

85347988 86058293 52014236 54634956 62375994 64075998 76107090 81847571 82047598

Duday et al. 1998, 434 Duday et al. 1998, 434 Foucher et al. 2000 Foucher et al. 2000 Foucher et al. 2000 Foucher et al. 2000 Foucher et al. 2000 Foucher et al. 2000 Foucher et al. 2000

Table 16-1: Corpus de datations par le radiocarbone du premier Msolithique sur le Massif armoricain. Pour comparaison, nous donnons les datations de sites importants de louest de la France.

Chapter Sixteen

Fig. 16-2: Projection sur la courbe de calibration atmosphrique des dates maximales des principaux sites du Msolithique de Bretagne. Leffet de plateau qui affecte les dates du Msolithique de type Bertheaume est particulirement perceptible, de mme que le grand cart chronologique de la ncropole de Hodic. 304

Entre effet rservoir et effet de plateau

questionnements (par exemple Beg-er-Vil) et leur manipulation demande des prcautions. Le taux de 14C dans les couches profondes de locan est en gnral plus bas que celui des eaux superficielles et donc de latmosphre. Ainsi, les compositions isotopiques vieillissent les eaux les plus profondes. Les upwellings viennent compliquer le problme comme cela a t dmontr au Portugal (Soars 2004). Ainsi, lge apparent de la mer varie au cours du temps. Les coquillages qui utilisent le carbone des ocans pour former leurs tests prsentent donc un ge apparent plus ancien lors des comptages isotopiques du Carbone. A ces biais sajoutent des taux dabsorption en 14C diffrentiel suivant les espces et les conditions paloenvironnementales auxquelles le mollusque doit sadapter. Aprs la mort de lanimal, la coquille peut aussi subir des contaminations postdpositionnelles ou des recristallisations qui viendront modifier les taux en 14C (Mellars 1987 ; Soars et Sousa 2004). En dfinitive, des estimations de lge apparent de la mer (ou effet rservoir) doivent tre faites pour chaque segment de cte, pour chaque priode, pour chaque espce de coquillage aprs un examen attentif des tests. Nous disposons de six dates AMS sur os humain Hodic (dont une corrige) et de huit Tviec (dont deux corriges). La calibration de ces dates propose dans cet article sest faite laide de la courbe mixte marine/atmosphrique du programme Calib 5.0.1., en prenant en compte le taux de protine marine dans lalimentation, et la variation de leffet rservoir (R) calcul Beg-an-Dorchenn.

4.2 Estimation de leffet rservoir pour le sud de la Bretagne au sixime millnaire avant notre rePlusieurs campagnes de fouille furent entreprises sur le niveau coquillier de Beg-an-Dorchenn ds la fin du XIXme sicle jusquaux annes 1980. Les dchets alimentaires les plus communs comme les coquilles et les plus petits comme les os de poissons nayant pas t conservs lors de ces diffrentes fouilles, deux dentre nous (CD et GM) sommes retourns sur le terrain pour y raliser des prlvements systmatiques en 2001. La stratigraphie observe est la mme que celle dcrite quelques annes auparavant par O. Kayser (Fig. 16-3). La couche de coquilles est scelle par plusieurs niveaux de sable (couches 1 et 2 dO. Kayser). Lamas coquillier (couche 4) a t fouill par passes (sept de 5 6 cm dpaisseur). Il est constitu de lits trs denses de coquillages mls un sdiment noir organique. Quelques concentrations prfrentielles de certains coquillages ont t observes la fouille (Dupont 2006). La passe 7 est moins dense en coquillages et annonce la base de lamas coquillier. Lapparente abondance de charbons et de vertbres de poissons dans cette zone peut tre lie la migration de ces petits lments vers la base de lamas.305

Chapter Sixteen

Pour nos travaux sur leffet rservoir, il convenait de dater des chantillons de diffrents mollusques issus du cur de lamas (passes 3, 4 et 5) et de comparer les datations obtenues celle faite sur charbons de bois concomitants. Les coquillages dats Beg-an-Dorchenn sont majoritairement reprsents par des bivalves. La scrobiculaire (Scrobicularia plana) est en gnral intertidale (Poppe et Goto 1993). Enfouie dans les sdiments vaseux, elle est souvent prsente en estuaire ou en fond de baie. Elle supporte bien les eaux dessales. La palourde (Ruditapes decussatus) est quant elle infode des substrats meubles plus varis (vase et sable plus ou moins grossier) (Poppe et Goto 1993). Elle vit de la zone intertidale jusqu plusieurs mtres de profondeur dans des eaux gnralement calmes. Elle peut vivre dans des zones abrites comme les fonds de baies, les lagunes ou les estuaires, mais elle ne supporte pas de fortes dessalures. La coque commune (Cerastoderma edule) vit sur des fonds sableux ou vaseux de la zone intertidale ou subtidale (Poppe et Goto 1993). La forme observe Beg-an-Dorchenn semble correspondre des individus vivant enfouis dans le sable. Ils nont donc sans doute pas subi linfluence deaux douces. Lhutre plate (Ostrea edulis) vit sur des substrats fermes vaseux, rocheux ou de graviers. A la fois intertidale et subtidale, ce bivalve se retrouve aussi bien sur lestran quau large en eaux profondes. Lhutre plate peut vivre aussi bien dans des conditions strictement marines questuariennes correspondant de lgres dessalures (Poppe et Goto 1993). Le bigorneau noir (Littorina littorea) est ubiquiste et prfre la zone intertidale (Poppe et Goto 1991). Il se retrouve aussi bien sur des ctes rocheuses assez exposes que dans les fonds de baies les plus abrites comme des vasires un peu fermes voire mme dans les schorres. Les patelles (Patella sp.) vivent du haut de lestran jusqu sa partie basse. Cette espce est fixe aux rochers et ne supporte pas de dessalure. Dans un premier temps, nous avons test les sept dates obtenues sur coquilles. Ces dernires couvrent un intervalle de temps relativement court et on peut se demander si elles sont significativement diffrentes les unes des autres. Le test du Chi carr a t appliqu en posant comme hypothse pralable que la srie de dates est reprsentative du mme vnement archologique (Ward et Wilson 1978). Les sept dates sur coquilles ne satisfont pas le test du Chi carr (p< 0,05). Si on exclut les deux datations faites sur le bigorneau, les cinq autres ne sont pas statistiquement diffrentes. Elles nous permettent de calculer leur moyenne pondre: 6870 20 BP. A partir de cette valeur, nous avons dtermin le R moyen en convertissant la date terrestre 14C 1 vers la courbe marine, grce une interpolation linaire des courbes atmosphrique (mesure) et marine (modlise) (Stuiver et Brazinias 1993). La variation de leffet rservoir (R) est la diffrence entre la moyenne de la courbe marine et lge marin mesur, avec une erreur drive des deux intervalles derreur (Reimer et al. 2002).306

Entre effet rservoir et effet de plateau

Fig. 16-3: Stratigraphie du site msolithique de Beg-an-Dorchenn (Plomeur, Finistre) releve lors dun sondage ralis en 2001 par C. Dupont et G. Marchand.

La composition des coquilles a t vrifie par diffraction X sur les chantillons dats (patelle, palourde et coque commune). Seules ces deux dernires sont composes uniquement daragonite, la patelle tant compose plus de 90% de calcite. Comme on ne peut pas souponner de vieillissement des datations par la prsence de calcite secondaire, nous avons fait la moyenne pondre pour les deux coquilles en aragonite. Elle est de 6855 30 BP pour un R de -260 65.

307

Chapter Sixteen

BP

13C

% protines marines

Dpart.

Commune

Site

US

Rfrence

Nature du matriel dat

Cal. CALIB 5.0.1 (deux sigmas)

44 Gif3531 ? ? ? ? x x x x Gif4847 6520120 597080 679090 (712090) 7520140 (7850140)

Prfailles

Beta194786 800040 -5,00 x 7046-6630

Dupont et al. 2007

44 Lentille de coquilles

SaintUS D4 Gildas 1b (lentille de coquilles) Prfailles SaintCoupe Gildas 1b

Coquille Scrobicularia plana Coquilles diverses

6607-5980 Tessier 1984 (7064-6330) 5799-5382 Tessier 1984 (6111-5659) 5664-5226 5197-4622

44

Prfailles

SaintGildas 1c

44

Pornic

29

Plomeur

La Niveau 3A Gilardire Beg-anAmas Dorchenn coquillier GSY65 5440400 637070 758080 ? ? ? x x x

AA8436 GRN2001

Coquille Scrobicularia plana Terre charbonneuse Elements organiques Charbon

29

Plomeur

Beg-anAmas Dorchenn coquillier

5219-3372 5413-4972 6573-6121

29

Plomeur

29

Plomeur

Beg-anDorchenn Beg-anDorchenn

Sommet de l'amas Base de l'amas

Gif6857 Gif6858

Coquille (Patella sp. ?) Coquille (Patella sp. ?)

Marchand 1999 Vogel et Waterbolk 1963 Vogel et Waterbolk 1963 Kayser 1986 Kayser 1986

Biblio.

Entre effet rservoir et effet de plateau

29

Plomeur

Base de Beg-anl'amas Dorchenn (charbons pars) Gif6859 6590110 ? x Charbon 5711-5344 Kayser 1986 Lyon2267 (Poz) 667555 ? x Charbon 5702-5489 Ly12284 676545 0,33 x Coquille Ruditapes decussatus 5711-5439 Indit

29

Plomeur

29

Plomeur

Couche 4 Beg-anDorchenn passe 5 carr A Carr C Beg-anpasse 4 et Dorchenn Carr A passe 3

Indit

29

Plomeur

Carr C Beg-anpasse 4 et Dorchenn Carr A passe 3 Ly12285 692545 -0,96 x

Coquille Scrobicularia plana

5873-5558

Indit

29 694045

Plomeur

Carr C Beg-anpasse 4 et Dorchenn Carr A passe 3 Ly12286 1,32 Ly12287 725565 0,78

x

Coquille Cerastoderma edule x Coquille Littorina littorea

5887-5570

Indit

29

Plomeur

Beg-anCarr A Dorchenn passe 7

6223-5834

Indit

Chapter SixteenLy12288 681045 690540 719570 0,52 x Coquille Littorina littorea 6180-5762 Charbon 6206-4721 0,97 x Coquille Patella sp. 5847-5542 Indit Indit 1,46 x 5740-5466 Indit Ly12289 Ly12290 Coquille Ostrea edulis

29

Plomeur

Beg-anCarr A Dorchenn passe 3

29

Plomeur

Beg-anCarr A Dorchenn passe 3

29

Plomeur

Beg-anCarr C Dorchenn passe 4

56

Hodic

PortNehue 6575350 ? x

Foyer dans la partie basse Gif-227 du dpt coquillier Spulture A Squelette 12 716560 -13,30 78 Spulture F1 Squelette 5 664560 -12,90 Spulture C1 OxASquelette 2 6706 628060 Spulture H Squelette 8 OxA6707 608060 -13,10 OxA6709 81 OxA6708 Os humain

Delibrias et al. 1966

56

Hodic

PortNehue

6123-5769

56

Hodic

PortNehue

Os humain

5623-5338

56

Hodic

PortNehue

78

Os humain

5308-4939

Schulting et Richards 2001 Schulting et Richards 2001 Schulting et Richards 2001 -13,70 73 Os humain 5100-4700 Schulting et Richards 2001

56

Hodic

PortNehue

Entre effet rservoir et effet de plateauSpulture K Squelette 9 575555 -13,60 74 Os humain 4684-4356 Spulture B Squelette 1 508055 -14,20 76 Os humain x OxA6705 OxA6710

56

Hodic

PortNehue

56

Hodic

PortNehue

Schulting et Richards 2001 Schulting et Richards 2001

56

Hodic

PortNehue

Spulture B Squelette 1 (nouvelle date) OxA11776 575035 -14,70 70 Os humainSpulture M Squelette 13 674060 -15,20 64 Spulture L Squelette 20 651565 -14,30 71 Spulture K4 OxASquelette 10 6664 651050 -16,00 56 OxA6704 OxA6665 Os humain

4662-4370

Schulting, 2005

56

5704-5475

56

Os humain

5520-5226

56

SaintTviec PierreQuiberon SaintTviec PierreQuiberon SaintTviec PierreQuiberon Spulture K6 OxASquelette 16 6703 650065 -14,10 63

Os humain

5513-5296

Schulting et Richards 2001 Schulting et Richards 2001 Schulting et Richards 2001 Os humain 5510-5227 Schulting et Richards 2001

56

SaintTviec PierreQuiberon

Chapter SixteenSpulture K1 OxASquelette 8 6663 644055 -15,60 60 Os humain 5468-5215 Spulture H1 OxASquelette 14 6701 600060 -16,00 49 Os humain x

56

56

SaintTviec PierreQuiberon SaintTviec PierreQuiberon

Schulting et Richards 2001 Schulting et Richards 2001

56

SaintPierreTviec Quiberon

Spulture H1 Squelette 14 OxA10936 (nouvelle date) 651545 -15,80 58 Os humainSpulture H3 OxASquelette 15 6702 653060 -16,00 49 Spulture B Squelette 2 568050 -17,00 44 OxA6662 Os humain

5506-5301

Schulting, 2005

56

5547-5305

56

SaintTviec PierreQuiberon SaintTviec PierreQuiberon

Os humain

x

Schulting et Richards 2001 Schulting et Richards 2001

56

SaintPierreTviec Quiberon

Spulture B Squelette 2 (nouvelle date) OxA12895 632240Gif7180 OxA602080 745045 ? -16,70 Amas coquillier Couche 3B -

Os humain

5336-5076

Schulting inditx x Coquille Os (sanglier) 5041-4529 6414-6235 Kayser 1989 Schulting,

56

56

Quiberon Beg-erVil Quiberon Beg-er-

Entre effet rservoir et effet de plateauPasse 6 ou 7 10962 indit

Vil

29

Carr 17 Plouvien Kerliezoc niveau 1 passe 2 648550 -25,29 x Charbon 5534-5330

Lyon1871 (Poz1010)

Josselin et al. 2003

Table 16-2: Corpus de datations par le radiocarbone du second Msolithique. La calibration a t ralise l'aide du logiciel Calib 5.0.1, deux sigmas. Les corrections apportes par R. Schulting certaines dates de Tviec et Hodic sont signales en gris. Pour les sites de Saint-Gildas, nous proposons d'utiliser le mme fractionnement isotopique que pour la date obtenue Beta Analityc, soit 5,0 (la nouvelle valeur est place entre parenthses) ; les deux calibrations sont toutefois proposes. Les coquilles marines sont calibres avec la courbe marine et une variation de l'effet rservoir de -26065. Cette valeur est galement utilise pour les ossements humains de Tviec et Hodic, mais avec la courbe mixte qui intgre la proportion de protine marine dans lalimentation.

Chapter Sixteen

Les datations de la couche 4 de Beg-an-Dorchenn sont homognes et comprises dans lintervalle 7260 - 6770 BP (Tab. 16-2). Les deux plus anciennes sont celles obtenues sur coquille de bigorneau. Cette espce semble vieillir particulirement les datations. Cependant, il est possible que celle de la passe 7, fort comparable celle obtenue par O. Kayser la base de lamas, corresponde vritablement un vnement ancien et non pas seulement un vieillissement artificiel propre cette espce. Il conviendrait de raliser des datations sur cette dernire dans dautres sites afin de savoir sil convient de lviter pour ces mesures isotopiques. Il faut noter galement que la palourde et lhutre plate scartent de la moyenne, en subissant visiblement un vieillissement apparent nettement moindre que les autres espces. Pour lhutre, une certaine mfiance tait pourtant de mise, daprs les observations dA. Monge Soars ; la palourde quant elle supporte de lgres dessalures. Elle devrait thoriquement prsenter de larges variations de dates.

5. Implication de ces marges derreur sur les modles historiques concernant le second Msolithique5.1 Lapparition des industries trapzesLes trois sites de la pointe Saint-Gildas, encore bien isols, tmoignent de lapparition des industries trapzes dans louest de la France (Fig. 16-1, Marchand 1999). En 2003, lors dune opration de sauvetage (CD et GM), une datation radiocarbone a t ralise sur des scrobiculaires prleves dans une petite poche de coquilles prserve dans un creux du rocher (Dupont et al. 2007). Lge mesur est de 7670 40 BP ; lge conventionnel est de 8000 40 BP ; la calibration deux sigmas est comprise entre 7046 et 6630 av. J.-C. (Beta-194786 ; 13 12 C/ C Ratio = -5,0 ). Il nest pas ais de comparer cette date celle obtenue Gif-sur-Yvette dans les annes 1980 (7520140 BP). En effet, lpoque la valeur du ratio 13C/12C, qui dfinit le fractionnement isotopique, ntait pas mesure. De plus, nous ne savons pas si une correction forfaitaire des dates sur coquille a t ralise. Avec un ratio 13C/12C de -5 , tel que propos par le laboratoire Beta Analytic Inc., il faudrait ajouter 330 annes la date mesure si aucune correction na t prise en compte. De ce fait, la date obtenue initialement Saint-Gildas 1b deviendrait 7850140 BP aprs la correction isotopique et sa calibration se placerait dans la fourchette 7060-6330 avant J.-C., lorsquon calibre avec la courbe marine. Leur contemporanit est donc tout fait envisageable. Si on applique une semblable correction du fractionnement isotopique la date obtenue sur le locus 1c, la date mesure (679090 BP) donne une date conventionnelle de 712090 BP; sa calibration la place alors entre 6110 et 5660 avant J.-C., juste avant loccupation314

Entre effet rservoir et effet de plateau

de Tviec. Le matriel lithique ne contredit pas cette position chronologique, car si le Gildasien de Loire-Atlantique partage de nombreux caractres avec le Tviecien du Morbihan, le premier comprend nettement plus de triangles scalnes, tandis que le second est marqu par la domination des trapzes symtriques et asymtriques. Il faut dailleurs noter pour appuyer cette hypothse de transition typologique progressive, que le taux de triangles scalnes est justement trs fort Hodic, le plus ancien des sites tvieciens. Les trapzes semblent se dvelopper progressivement sur les sites de Saint-Gildas et le dbitage laminaire montre encore peu dusage de la percussion indirecte, contrairement au Retzien ultrieur. La fouille rcente par S. Hinguant dun lambeau de couche du second Msolithique dans la Grotte Rochefort en Mayenne nous montre que cette technique de production de lames larges et rgulires est dj connue dans lintervalle 6300 6000 avant J.-C. (dates sur ossement humain). Lapparition des trapzes et du dbitage de lames rgulires semble se faire dans la premire moiti du septime millnaire en Europe occidentale et louest de la France nest pas en retard dans ce vaste renouvellement du bagage technique.

5.2 Construction et position du Tviecien 5.2.1 Beg-an-DorchennLes datations sur charbon (Gif-6859 et Ly-2267) de Beg-an-Dorchenn sont presque identiques, celle ralise Lyon ayant un cart-type plus restreint. La date obtenue par O. Kayser provenait de charbons pars la base de lamas tandis que la plus rcente a t faite partir dune brindille brle issue de la passe 5, au sein de lamas. Les dates sur coquillages, mme aprs calibration, sont plus anciennes que celle sur charbon, alors que ce dernier a t prlev SOUS les chantillons de coquilles marines. Les deux dates sur coquilles (probablement des patelles) obtenues par O. Kayser respectent la stratigraphie et donnent un encadrement cet amas. La couche, paisse de 40 50 cm lemplacement des fouilles, est prise entre lintervalle 6570-6120 avant J.-C. (Gif-6858) et lintervalle 5410-4970 avant J.-C. (Gif-6857), soit une dure de 700 1600 annes. Les dates les plus anciennes sur coquille seraient compatibles avec un lot darmatures qualifies darchaques (triangles scalnes larges et trs allongs, pointes troncatures obliques) trouves la base de lamas, mais dans un lambeau de couche infrieure (Kayser 1985). Si seuls les chantillons les plus rcents sont pris en compte, sans les bigorneaux, le315

Chapter Sixteen

Fig. 16-4: Prsentation des dates disponibles pour le Msolithique et le Nolithique ancien en Bretagne et en Loire-Atlantique, selon les bornes chronologiques maximales. La nature des diffrents matriaux dats est signale, car les dates qui en rsultent ne peuvent tre strictement compares. Pour information, les principaux sites de rfrence en Vende et dans le Cotentin sont signals gauche. 316

Entre effet rservoir et effet de plateau

niveau coquillier de Beg-an-Dorchenn a t dpos dans lintervalle 5800-5400 avant J-C. Les nouvelles dates viennent confirmer le positionnement assez ancien de cette occupation, contrairement aux premires estimations de J.-G. Rozoy qui voyait une phase terminale du Tviecien (Rozoy 1978, 798).

5.2.2 Tviec et HodicA Tviec, si lon ne considre que les tombes centrales H, J, K et L (soit six dates sur huit), lhomognit est remarquable et placerait la ncropole dans lintervalle 5300-5000 avant J.-C. (Schulting et Richards 2001) ou deux cent annes plus tt, dans lintervalle 5500-5300 avant J.-C. avec la valeur de leffet rservoir propos dans notre article. Dans les deux cas, cest la courbe mixte qui a t utilise, en tenant compte du taux de protine marine dans lalimentation. Aprs les nouveaux comptages isotopiques (Schulting 2005), il est apparu que le second corps de la spulture H na pas t install cinq cent ans aprs le premier, mais dans un intervalle rduit, tandis que la spulture B, un peu excentre vers le sud, se rapproche de la moyenne des autres dates, tout en restant la plus rcente (intervalle 5340-5080 avant J.-C.). Par ailleurs, la spulture M, au nord de la ncropole, reste la plus ancienne, dans lintervalle 5700-5480 avant J.-C. A Hodic, la situation est nettement diffrente et la succession des inhumations est gradue sur plus dun millnaire et demi. Il faut observer que sur ce site, et au contraire de Tviec, les individus dune mme tombe nont pas t dats, si lon excepte les tombes F et H qui semblent partager certains amnagements et qui pourtant sont spares par 600 ans environ. Lensemble stale donc de 6120 4360 avant J.-C., sans regroupement apparent. Notons que sur cette le, le taux de produits marins est beaucoup plus fort qu Tviec et que lchantillon est donc encore plus complexe manipuler.

5.2.3 Beg-er-VilLe comptage isotopique obtenu sur des coquilles de Beg-er-Vil (602080 BP) apparat comme le pivot de la discussion sur la nolithisation dans le Morbihan littoral. En partant du principe quelle ne rsulte pas dune erreur de laboratoire et quelle date lindustrie lithique associe, sa calibration avec la courbe marine donne un intervalle de 5040-4530 avant J.-C. Suivant cette hypothse, nous aurions alors des Msolithiques contemporains du Nolithique ancien Villeneuve-SaintGermain, connu 130 kilomtres de l en Ille-et-Vilaine (Blanchet 2003) et avec plus de rserve 70 km en Centre-Bretagne (Marchand, Pailler et Tournay 2006). La largeur de lintervalle autorise mme voir une contemporanit avec les premiers btisseurs de tertre du Nolithique moyen 1 sur des aires gographiques317

Chapter Sixteen

restreintes (treize kilomtres vol doiseau de Beg-er-Vil au Tumulus SaintMichel, mais davantage en circulant par la cte). En effet, un caveau du Tumulus Saint-Michel (Carnac) a donn sur charbon la date de (AA-42784) 566554 BP, soit 4684-4380 avant J.-C. (Ptrequin et al. 2003).

5.2.4 Quelques nouveaux questionnement sur le TviecienLes bitroncatures symtriques (trapzes) sont les armatures largement dominantes dans le second Msolithique de Bretagne. Elles dpassent couramment la moiti des carquois. Laugmentation de la proportion de bitroncatures symtriques a t conue comme progressive au cours du Msolithique par O. Kayser, grce notamment au site de Beg-er-Vil o ces armatures dominent totalement, en fin de cycle tviecien (Kayser 1992). Cette position allait lencontre de lhypothse de J.-G. Rozoy, qui voyait dans ces bitroncatures un caractre archaque, puisquon en trouvait dans des sites de son stade moyen (Rozoy 1978). Suivant la chronologie tablie par O. Kayser, il tait alors possible dtablir un lien entre les bitroncatures symtriques du Msolithique et celles du Nolithique ancien mditerranen, les secondes ayant inspires les premires (Marchand 1999). Rcemment, une date sur charbon obtenue sur le site de Kerliezoc (Fig. 16-1 ; Josselin et al. 2003) venait se placer dans lintervalle 55305330 avant J.-C. Les bitroncatures symtriques abondantes sur ce site semblaient effectivement se trouver au-dessus du charbon dat. Mais labondance de ces armatures Beg-an-Dorchenn, des dates comprises entre 5800-5400 avant J.-C. ractive le dbat, car cette poque, le Nolithique ancien ne semble pas encore avoir atteint la faade atlantique franaise (Joussaume 1986 ; Marchand et Manen 2006) et il naurait donc pas pu inspirer les armatures msolithiques ! Enfin, si lon accorde crdit aux dates et aux contextes archologiques du locus 1b de SaintGildas, la part des bitroncatures symtriques nest pas ngligeable dans lintervalle 7000-6500. Ces armatures, interprtes comme des flches tranchantes, se dveloppent donc conjointement dans les deux civilisations au sixime millnaire, et apparaissent peut-tre mme au septime pour le Msolithique. Il est dsormais difficile de maintenir la proportion des bitroncatures symtriques comme un caractre chronologique univoque ; il y a srement plusieurs paramtres qui viennent influer dans ces proportions. Des tudes technologiques et typologiques des industries lithiques ont permis de bien distinguer les productions msolithiques et nolithiques dans louest de la France ; au Tviecien : les rseaux dacquisition de matriaux locaux, la production lamellaire, les armatures trapzodales ; au Villeneuve-Saint-Germain : limportation de roches sur longues distances, les lames standardises produites au percuteur tendre ou au punch, les burins, les grattoirs, les armatures asymtriques318

Entre effet rservoir et effet de plateau

(Marchand 1999, 2005). Ce canevas gnral ne pourra connatre que des assouplissements, si lon considre que ces communauts ont pu coexister sur des territoires limitrophes pendant des centaines dannes. Ainsi, une phase encore vanescente semble apparatre en Morbihan, qui sillustrerait dans des fosses antrieures au tertre de Lannec-er-Gadouer, avec un mobilier difficile classer car peu abondant. Sur ce site, les fosses 2 et 5 ont t dates respectivement de lintervalle 4900-4500 et 4700-4400 (Cassen 2000). De mme, devant le cairn primaire dEr-Grah, mais sous une extension secondaire du monument, la fosse e4 contenait les restes en connexion de deux bovins dallure domestique avec une date sur charbon de 5960 65 BP, soit lintervalle 5000-4700 avant J.-C. (Fig. 16-1 ; Le Roux 2006). Cette fosse recoupait un foyer plus ancien (c3), dat de 6305 70 BP, soit 5419-5069 avant J.-C. La proximit de ces structures en creux, contenant des vestiges archologiques singuliers, et de monuments funraires monumentaux ne nous semble pas fortuite. Lors de la premire moiti du cinquime millnaire, le Morbihan continental serait donc occup par des communauts dont la culture matrielle est difficile qualifier, mais dont les choix dimplantation annoncent dj ceux des constructeurs de mgalithes. Ils sopposeraient des sites tvieciens installs sur la presqule de Quiberon et sur lle de Hodic, lconomie extrmement lie au monde littoral.

6. De nouvelles frontires chronologiquesDes charbons de brindilles ou de petites branches et des coquilles de mollusques marins ont t slectionns dans le niveau coquillier de Beg-anDorchenn, dans le but de les dater conjointement et de comparer les carts obtenus en fonction de la nature des lments traits. La variabilit des datations obtenues incite la plus grande prudence dans le calcul de leffet rservoir sur ce segment de cte de lAtlantique. Ce type danalyse demande tre multipli sur dautres assemblages. Cependant, les rsultats prsents dans cet article permettent denvisager de manire renouvele plusieurs problmes. Pour la fin du Msolithique, les travaux sur le vieillissement apparent des chantillons marins doivent imprativement tre prolongs, par exemple sur les chantillons de Beg-er-Vil, et sur dautres priodes. Dans le cadre de la problmatique des zones de contact Msolithique / Nolithique, laffinement de la chronologie est impratif. Dans limmdiat, il existe des chelles chronologiques diffrentes suivant les trois principaux matriaux dats, coquille, charbon et os humain et ce malgr les efforts consentis par notre quipe dans la rsolution des problmes de calibration. Nous appelons donc la plus grande prudence lheure de comparer les comptages isotopiques raliss sur les diffrents matriaux. En reculant dans le temps, lindigence des lments notre disposition est patente.319

Chapter Sixteen

Lintervalle 7500-6000 avant J.-C. nest jalonn que de dates parses, issues de contextes archologiques perturbs (Grotte Rochefort), ou mal dfinis (Le Crann), ou encore de dates sur coquilles obtenues anciennement (Saint-Gildas). Cest pourtant ce moment que les industries trapzes se mettent en place. La perception de lvolution des groupes de chasseurs-cueilleurs ptit donc de larges marges derreurs des datations par le radiocarbone, tout autant que de labsence de stratigraphies sur de vastes surfaces. Les vnements brusques sont invisibles ; il semble alors que tous les changements sont graduels et infimes. Il est craindre que limage de groupes de chasseurs-cueilleurs qui ne connaissent aucune variation autre que naturelle c'est--dire des hommes en dehors de lhistoire - ne reste encore dominante pour reprsenter la priode msolithique. Pour corriger cette association perverse entre de mauvaises datations radiocarbones et des images mentales cules, les futurs travaux de terrain doivent tendre privilgier les habitats de petite superficie en petits abris-sous-roche ou en plein air, susceptibles de fournir des sries restreintes correctement dates.

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