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    STUDIA ROMANICA POSNANIENSIA

    UAM Vol. 25/26 Pozna 2000

    TERESA TOMASZKIEWICZ

    Universit Adam Mickiewicz

    LE SENS ET LINFORMATION TRANSMETTRE DANSLA TRADUCTION DES MESSAGES VERBO-VISUELS

    A b str ac t. Tomaszkiewicz Teresa, Le sens et l'in formation transmettre dans la traduction des mes

    sages verbo-visuels [The sense and information conveyed in the translation of the verbal-visual texts]. Studia Romanica Posnaniensia, Adam Mickiewicz University Press, Pozna, vol. XXV/XXVI: 2000, pp. 305-315, ISBN 83-232-0965-0, ISSN 0137-2475.

    This article focusses on the search for a solution to problems of translation of texts of a verbal-visual

    character. Despite appearance various images occurring in these texts are not automatically understood by a foreign recipient since they undergo a certain codification, characteristic of every culture individually.In the meantime the sense of these verbal-visual tramsmissions is a result of various relations into which

    enter with each other both semiotic elements (parallel, supplementing and interpretative meaning, equi

    valence and contradiction). The author tries to answer the question about the way in which the translatorof this type of texts may render their sense and transmit information contained in them for the use of aforeign recipient.

    1. LE SENS TRADUIRE

    Toutes les theories de la traduction saccordent sur la necessit de transmettre,pendant l opration traduisante, le sens. Mais en mme temps ce sens parait dans ces

    travaux, ainsi que dans dautres, relevant de diffrents courants ou adoptant dautresperspectives, comme quelque chose de difficilement mesurable. Selescovitch la exprim ainsi:

    Le sens est un vouloir dire extrieur la langue, antrieur lexpression chez le sujet parlant, pos-

    trieur la reception du discours chez le sujet percevant [...] Lmission de ce sens ncessite lasso-

    ciation dune ide non verbale lindication smiotique (parole ou geste, peu importe en soi le support

    qui se manifeste de faon perceptible! [...], la reception du sens exige une action dlibre du sujet

    percevant. (Selescovitch, 1976: 64).

    M. Lederer (1996: 57) la prcise encore plus, en disant que lunit de sens napas de longueur linguistique dtermine. Com me une ide ne se prte pas mesurer,une unite de sens non plus.

    Dans dautres travaux traductologiques (p.ex. Pergnier: 1993, Hurtado-Albir:1990, Delisle: 1980, 1984, 1993) on fait la distinction entre la signification, en tant

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    qu un concept qui sattache au signifiant, la signification actualisedans un contextenonciatif, qui perm et de reteir une signification (dun mot par exemple) de plusieurs

    potentiellement possibles et le sens qui dcoule de la combinaison et de linterd-

    pendence des significations pertinentes des mots et syntagmes qui le composent en-richies de paramtres non linguistiques et reprsentant le vouloir-dire de lauteur(Delisle, 1980: 59). Le sens se construit chaqu fois: dans chaqu acte de parole,les mots et les phrases produisent des sens inattendus en fonction du contexte et descomplements cognitifs du rcepteur. Le sens est done imprevisible et infini (HurtadoAlbir 1990: 75).

    Kleiber (1997: 24) soppose un tei constructivisme radicai: Postuler quil faut(re)construire toute portion de sens est absolument contre-intuitif. On ne peutconstruir avec rien et done 1existence de morceaux smantiques stables, ou sensconventionnel, est ncessaire au fonctionnement interprtatif.

    Dailleurs, mme si les traductologues constatent que le sens est quelque chosede difficilement mesurable et en mme temps ils se proposent de transmettre ce quelque chose de difficilement mesurable dans une autre langue, comments le font-ils?Autrement dit, comment peut-on songer lexistence de Fopration de traduction,sil ny avait rien de stable dans ce quon transiere?

    Dautre part, mme si nous partageons lavis de Kleiber (op. cit.), il faut aussireconnaitre que le sens dun texte qui est transmettre resulte de plusieurs phno-

    mnes. Si nous acceptons partiellement la vision constructiviste du sens, en admettantquil est quelque chose dindividuel, unique, imprevisible, fonde sur les caractristi-ques situationnelles et contextuelles precises, difficiles gnraliser, il faut au moinsessayer de prciser quels sont dautres facteurs qui participent la construction dece sens. Ailleurs, (Pisarska, Tomaszkiewicz 1996: 76) nous avons analyse la notiondu sens aux besoins de la traduction. Nous avons dit, que pour rpondre la question,quel est le sens de la phrase: Jean va en vacances, il faut avant tout prciser qui la

    prononce, qui, dans quel contexte spatio-temporel et pour quel but. Nous avons

    avance aussi que ces paramtres contextuis ne sont pas stables et ils ne peuventaucunement avoir des traits duniversali t quelconque. Ils dependent notamment:- des elements qui crent la situation de communication: metteur, rcepteur,

    temps, espace,- des caractristiques des partenaires de la communication, leur situation sociale,

    conomique, professionnelle, leur education, leur savoir etc.,- du fait si lobjet du discours se trouve dans le champ visuel des partenaires ou pas,- de la pluralit des moyens smiologiques (texte, image, schemas, couleurs, ca

    racteres typographiques, m imiques, gestes etc.) quon utilise pour transmettre le mes

    sage.En mme temps, en nous inspirant de Hurtado Albir (1990), nous avons analyse

    (Pisarska, Tomaszkiewicz 1996: 77-89) dautres phnomnes qui participent laconstruction du sens mais quil ne faut pas confondre avec celui-ci. Il sagit notamment:

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    - des relations entre 1information et le sens,- leffet de sens sur le rcepteur, qui n est pas toujours conforme avec limagi-

    nation et la volont de lmetteur,

    - lintention de lmetteur (amuser, mouvoir, informer, inciter faire...) qui peut

    toutefois ne pas tre ralise,- participation des valeurs connotatives dans la construction du sens,- relations entre limplicite et le sens,- influence des valeurs stylistiques du message, autrement dit de la forme sur le

    sens.

    Tous ces elements participent indubitablement la construction du sens mais cetteconstruction est un processus dynamique, qui se fait au fur et mesure de la production et de la reception du message. La construction du sens est en plus un processus

    rtroactif. Le sens une fois saisi, peut dans la suite, par exemple, dans le processusde comprehension, changer, tre vrifi, reconstruit.

    2. LINFORMATION ET LA SIGNIFICATION

    Nous avons done dit que parmi les elements qui participent la construction dusens il y en a ce quon a appel Vinformation. Il faut tout de suite avancer que lanotion dinformation apparait dans les differentes approches que nous ne pensons pas

    citer ici. Pour notre propos nous pensons adopter 1approche de Fleischer (1990). Sonpoint de vue consiste admettre la position centrale du rcepteur dans le modlecommunicatif. Cest lui quon adresse le message, cest en fonction de lui, de sescompetences quon va construir ce message et cest seulement quand il la reuquon peut parler dun acte de communication. Sans que le message soit reconnucomme tel, il ny a pas de communication. Par consequent, cest par rapport au rcepteur quon analyse les notions de signification et d information.

    Les significations nous sont donnes par les systmes de signes qui fonctionnent

    dans un contexte social et culturel donne. Mais dans chaqu acte de communication,ces signes sont actualiss dans les messages. On peut done dire que la significationdepend des systmes de signes et du contexte dutilisation. Ainsi Fleischer, commedailleurs dautres chercheurs, admet quil existe la signification potentielle et actua-lise. Mais videmment la signification actualise va dpendre du savoir du rcepteurconcernant le fonctionnement des systmes de signes dans un contexte donne. Or,les signes et ce qui en dcoule, les significations et les messages ont une valeur re

    petitive. Autrement dit, on peut produire et recevoir les memes messages plusieursfois.

    Linformation, par contre, cest quelque chose de nouveau pour le rcepteur, c estune nouveaut vhicule par le message. Elle va dpendre done de ltat de son savoiret elle a la facult daugmenter son savoir. Il est vrai que 1information est lie lasignification contextuelle du message et par consequent, indirectement aux systmes

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    de signes, mais le jugement du poids de sa nouveaut revient, chaqu reprise, aurcepteur, singulier ou multiple. Dans ce deuxime cas, on va dire que la nouveautde l information depend du savoir social generalise.

    Dans ce sens, la signification nous est fournie par le systme et elle nest que lasupposition de linformation. Le savoir concernant le fonctionnement de la signification dans les contextes determines est previsible et va dpendre dune part de laconnaissance des systmes de signes mais aussi du rcepteur, dans un contexte prcis.En opposition, le jugement de ce qui est nouveau, depend entirement du rcepteur.Il en resulte que 1analyse de ces deux phnomnes doit se passer des niveaux dis-tincts.

    Ainsi, le sens resulte dune part de la signification actualise, mais de lautre, ilest la source dune certaine information pour le rcepteur.

    3. LE SENS DES MESSAGES VERBO-VISUELS

    Si nous pensons maintenant aux messages qui intgrent la dimension visuelle,typique par exemple pour les mass-mdias, mais pas exclusivement, dune part nousavons affaire la signification du message verbal et de lautre, la signification dumessage visuel. La premire question quil faut se poser concerne les relations entre

    ces deux significations dans le mme message, pour en dduire le sens de la totalit.Nous avons analyse les differentes visualisations qui apparissent dans les commu

    nications aux masses que nous avons regroupes daprs le degr croissant de leuriconicit en quatre groupes:

    - graphiques,- dessins,- photographies,- film.

    Leurs fonctions, par rapport au texte, sont multiples, mais elles rsultent, entreautres, du niveau de leur analyse. Il est evident que beaucoup de visualisations sa-nalysent au niveau dnotatif, c est--dire elles reprsentent des fragments de la ralit.Dans ce fonctionnement limage peut:

    - introduire une forme,- crer une forme,- permettre didentifier une forme,- clairer quelque chose propos d une forme,- partager information concernant une forme ou les relations entre ses elements,

    - suggrer ce quon entend par ce quon dit,- suggrer do provient la parole,- raconter quelque chose,- prouver quelque chose,- enseigner quelque chose.

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    Ainsi 1image nous foumit certaines informations que le texte tout seul ne sauraitpas, ou saurait difficilement assurer.

    Pourtant, dans la majorit des eas, limage utilise des fins communicatifs, sa-nalyse au niveau symbolique ou connotatif. Adam, Bonhomme (1997: 197) ont pro

    pose une analyse de 1image publicitaire, tout en admettant que sa signification resultede plusieurs calculs interprtatifs quil faut effectuer pour la comprendre et pourcomprendre sa fonction:

    - Calculs rfrentielsqui amnent le rcepteur reconnatre l objet publicitaireet sa mise en scne.

    - Calculs topiquesqui permettent, la base de topo! archtypaux ou sociocultu-rels, de dire que tel scheme iconique rappelle tel concept ou marque tel concept (une

    jeune femme avec un bb - maternit; la plage, la mer les palmiers - vacances,

    detente, libert, joie).- Calculs axiologiquesqui consistent reprer sur l image les indices de valori

    sation ou de positivation du produit (le sourire et la mimique de contentement dune

    femme qui fume une cigarette de la marque pour laquelle on a conu cette publicit).Parmi ces indices on peut aussi envisager lutilisation des couleurs qui dune part

    peuvent tre dotes de certaines valeurs symboliques, socialement codes et de 1autre

    sont capables de dclencher certains sentiments qui sont projets sur le produit mme.

    - Calculs enthymmatiquesqui incitent le rcepteur se poser la question, dans

    quel but on a produit cette image. Ces calculs permettent de projeter les sentimentsprouvs en face de limage sur le produit.

    En nous inspirant de cette proposition, nous avons constate que beaucoup dautresdocuments visuels, utilises dans les mass-mdias, comme par exemple les photos de

    presse, peuvent sanalyser avec les mmes calculs ineterprtatifs. Or, il faut aussireconnatre que ces calculs sont effectus souvent par le rcepteur moyen dune manire momentanee ou mme inconsciente, mais cela ne veut pas dire que ces calculs

    sont effectus de la mme manire par des rcepteurs provenant des differentes so-

    cits. De mme quil y a des elements relevant des codes socio-culturels dans lestextes, il y en a aussi dans les images.

    Les differences de reception des images par les rcepteurs provenant des socits

    differentes concernent dune part limpossibilit de reconnatre des formes, des tres

    ou des objets provenant dune autre culture, mais de lautre un autre systme de valeurs (beau, laid, positif, ngatif etc.). Finalement, elles concernent aussi les diffe

    rences de conventions qui unissent les signens non linguistiques et leurs significa

    tions, cest--dire les differences des codes smiologiques fonctionnant dans lescultures differentes.

    On peut done avancer que dans le transfert du sens dune socit une autre, nonseulement la langue, mais aussi des codes visuels peuvent creer des obstacles decomprehension.

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    4. LES RELATIONS ENTRE L IMAGE ET LE TEXTE

    Si Ton revient maintenant au sens du message verbo-visuel, il nest srement pas

    la somme des significations de ces diffrents elements, mais la fonction de differentesrelations que le verbal entretient avec le visuel. Lanalyse de multiples messages quiintgrent la dimension visuelle nous a amene distinguer principalement cinq relations fondamentales entre le texte et la dimension visuelle qui laccompagne. Evi-demment, souvent plusieurs de ces relations entrent en compte en mme temps, mais

    pour la clart du propos, on va les envisager sparement.

    1) Signification en contrepoint: la couche verbale et la couche visuelle sont, cha-cune sparement, la source de certaines informations qui peuvent, en principe, treindpendantes les unes des autres. Autrement dit, le texte est la source dun type

    dinformations, tandis que limage dun autre type. Ainsi,- les images, peuvent nous fournir les informations concernant la forme des ob-

    jets, des tres ou des personnes dont il est question dans le texte,

    - elles peuvent reproduire les formes de certaines choses ou tres qui ne sont pasvisibles de loeil,

    - elles peuvent porter tmoignage de certains vnements qui ont eu lieu, en re-prsentant un mom ent donne de ces vnements,

    - elles peuvent fournir des informations concernant la description du cadre de

    certains vnements: quel endroit un vnement sest passe,- elles peuvent nous renseigner sur la source des paroles cites,

    - elles peuvent, paralllement au verbal, dvelopper toute une argumentation ico-nique (voir plus haut),

    - elles peuvent contribuer au dveloppement de certains sentiments, jugementsou attitudes par rapport aux vnements dcrits dans le texte etc.

    2)Relation de complementante:le verbal et le visuel se compltent pour vhiculerensemble le sens. Autrement dit, il est impossible de comprendre le message, sans

    prendre en compte les dimensions verbale et visuelle en mme temps. Un exemplepattant est fourni, entre autres, par le dessin humoristique et sa legende ou par la

    bande dessine. Le texte sans dessin ni le dessin sans texte ne sont, dans la majoritdes cas, com prhensibles. Il faut reunir les deux pour obtenir les effets humoristiquesou narratifs vises.

    3) Relation interpretative: le verbal apporte des commentaires ncessaires pourla comprehension du visuel et/ou le visuel illustre le verbal en facilitant sa comprehension. Ce cas de figure est par exemple attest par les photographies des tres ouobjets invisibles de loeil (cellules, microbes, mouvement des astres etc.) et le texte

    qui nous informe sur lidentit de ces objets. Le texte done nous informe ce quonest en train de voir, et la photographie illustre la ralit qui est dcrite dans le texte.

    4)Relation d 'equivalence: dans le mme message, le verbal et le visuel vhiculentla mme information. On pourrait done parler d une certame redondance, mais cetteredondance a pour fonction de pallier lventuel mauvais fonctionnement des divers

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    facteurs en cause, dans lacte de communication. Elle est ncessaire dans le discoursducatif, explicatif pour faciliter la comprehension et/ou la memorisation. Elle estaussi prsente dans les messages publicitaires.

    Il est pourtant vrai, que cette equivalence nest jamais totale, mais approximative.

    Tout dabord, parce que les moyens mis en oeuvre par les images et par la languesont de nature differente. Ensuite, elle est approximative parce que la visualisation,le plus souvent, ne reprend quun fragment du texte et non pas sa totalit. Sil estvrai quon peut parler dune certaine galit de linformation livre par le langage etun code iconique qui sapproche de celle-ci (par exemple les pictogrammes), il estplus difficile de parler de lgalit de l information vhicule par le texte et les imagesparticulires.

    Or, il existe certains types de textes, par exemple les descriptions, les portraits

    des personnages, les narrations qui se laissent reprsenter par limage, ou une sriedimages. Gauthier (1984) en analysant les illustrations des livres, a mis en evidenceque 1image peut tre un dispositif narratif concurrent vis--vis du texte et que, correlati vement, elle peut assumer son tour une certaine forme d ancrage.

    Or, si on songe mme des communications de masse les plus simples: communication routire, tourisme, informations la gare, on recupre le doublement desdeux codes: linguistique et iconique, pour transmettre la mme information.

    5) Relation de contradiction : 1information fournie par le verbal se met en contradiction aux donnes visuelles, en crant ainsi une figure de pense spcifique, comme

    par exmple lironie. Dans ce cas-l, la contradiction est dlibrement voulue par lau-teur du message, pour obtenir un effet special.

    Cette figure peut tre aussi compare au fonctionnement du discours paradoxal(cf. Landheer et Smith 1996), comportant une contradiction ou une incompatibilitapparente. Certains de ces cas se laissent rsoudre par 1introduction de la notion de

    polyphonie discursive. Un exemple du fonctionnement de cette polyphonie est foumipar les publicits du tabac et de lalcool, o par les images on vente ces produits,mais en mme temps on met en garde les consommateurs, en disant que leur consom-mation est dangereuse pour la sant.

    A cte de ce type de contradiction qui est evidente pour le rcepteur, il existe unautre domaine, nous dirions, demplois non adquats dillustrations, qui est la sourcede nombreuses manipulations de 1information.

    Certaines visualisations comme la photographie de presse, la photographie publicitaire, mais aussi certains dessins ou graphiques, ne mettent en evidence quunaspect particulier de la ralit. Or, grace au ralisme de la representation, elles laissentsous-entendre quelles reprsentent cette ralit. En plus, les lois optiques influencentla reception directe et momentanee des contenus vhiculs par ces moyens. Par ce

    fait, les visualisations attirent lattention, dirigent la perception, jouent sur le sub-conscient, dclenchent certains sentiments, facilitent la creation des stereotypes, influencent des jugements etc. Autrement dit, limage peut faciliter laccs au sens dutexte, mais elle peut aussi le bloquer. Cest alors dans ce sens que nous comprenonsla relation de contradiction entre la photograhie et le texte.

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    5. LA TRADUCTION DES MESSAGES VERBO-VISUELS

    La constatation de ces differentes relations entre le texte et limage dans les mes

    sages verbo-visuels ne peut pas rester sans influence sur la traduction de ce type detextes. Dune part il est vrai que dans la majorit des cas le traducteur ne peut pastoucher d autres elements du message que le verbal. De 1autre, dans ces messages,

    le sens est une resultante de la coexistence de plusieurs elements la fois. Au cinema,

    par exemple, ou la television il y en a cinq: 1image, les bruits, la musique, le texteorai et crit. Or, les possibilits de comprehension de 1image, par exemple, ne sont

    pas les mmes pour les rcepteurs provenant des diffrents contextes culturis.

    Les recherches sur les possibilits de reception de certaines mtaphores filmiques

    par un public tranger (Tomaszkiewicz, 1994) ont dmontr quil y a des differences,parfois significatives, dans la reception des images filmiques, par les rcepteurs do-

    rigines diverses. Il en resulte, que contrairement aux attentes, la comprehension duvisuel ne vas pas de soi.

    Quel est done le rle du traducteur en face de toutes ces constatations? Quest-cequil doit effectivement transmettre au rcepteur tranger?

    Du point de vue mthodologique, rpondre ces questions est relativement difficile, car les differentes disciplines ont des approches et des methodologies d analysediversifies et souvent contradictoires les unes, par rapport aux autres. II nous semble

    toutefois, que le point de depart dans l laboration d une mthodologie popice l ob-jet analyse est la prise en compte, avant tout, de la comprehension par le rcepteur

    tranger. Et c est en fonction de cette comprehension, qu il faut envisager la mtho

    dologie de 1analyse de la traduction des messages accompagns des elements visuels.Le traducteur dun texte cherche le sens dans ce texte mme, le traducteur dun

    document linguistico-visuel, dun film, dune emission tlvise doit rechercher lesens dans la relation entre le texte et dautres signes non linguistiques (images, bruits,musique), pour dcider quel texte darrive permettra au rcepteur de comprendre

    tout le message. Et mme si parfois le texte darrive na pas la mme forme queloriginal (au cinema sous-titr, par exemple, loriginal a la forme orale, par contre

    la traduction est crite; en plus la traduction est condense par rapport loriginal),

    leffet recherch est la comprehension de la totalit du message. Nous avons, dans

    ce cas, srement affaire une certame adaptation, mais cette adaptation a tous lestraits de la traduction fonctionnelle.

    II ne faut pas oublier non plus que les medias modernes imposent aux traducteurs

    beaucoup de contraintes extra-linguistiques qui ne restent pas toutefois sans influence

    sur le processus de la traduction. Ces contraintes concernant entre autres:- la necessit de condenser le texte original par rapport la traduction en forme

    de sous-titres au cinema ou la television,

    - la ncessit de synchroniser le texte de la traduction avec la longueur et la formede louverture de la bouche de celui qui parie,

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    - la necessit de synchroniser le contenu linguistique avec les gestes et la mimiquedes protagonistes,

    - la ncessit dobserver la mme organisation de lemplacement des elements(textuels et visuels) sur une page,

    - le ncessit de se soumettre la forme de certains modeles de textes, typiquespour les cultures en contact etc.

    Toutes ces contraintes supposent une certaine manipulation du texte original quiest soumis la traduction. Ceci fait que le nombre dinformations contenues dans la

    traduction peut tre different, par rapport aux informations vhicules par 1original.

    Cet tat des choses nous oblige de redfinir les concepts classiques de la thorie de

    la traduction, tel que: sens, signification, messageet information.En fonction de cesconcepts nouveaux et en fonction des contraites techniques de ce type de traduction

    (ncessit de synchronisation, ncessit de condensation) on doit absolument redfinir la notion defidlit, car la traduction dans les medias ne peut plus tre fidle loriginal, dans la comprehension classique de ce terme. Pourtant on peut l envisager

    en tant que fid lit par rapport au rcepteur.Dans la mme ligne de raisonnement, il faut rflchir sur les limites de la libert

    du traducteur. On sait dj, quil est oblige doprer certaines manipulations dans le

    texte de depart, mais jusqu quel point en est-il libre? Quant la notion de texte, il

    faut plutt parler du texte-message, cest--dire de tout le complexe smiotique si-

    gnifiant.Dune manire generale, il faut admettre que la traduction pour les mdias est une

    qualit nouvelle, mais il faut lenvisager au mme titre quon a envisage linterpr-tation simultanee ou consecutive, comme certaines variantes du mme processus.

    Nous pensons que malgr les differences notoires entre la traduction des docu

    ments verbo-visuels et la traduction des textes tout court, il faut admettre que ce type

    de traduction nest quune variante du mme processus. Ce processus se passe dansla tte du traducteur qui, la base des donnes dcoulant du complexe smiotique

    A, reconstruit, grosso modo, le mme complexe smiotique B, tout en admettantquune partie de ce complexe (image, musique, bruits etc.) reste intacte. Sil trouve,que certaines conventions de presentation, dans cette couche quil ne peut pas toucher, restent obscures pour le rcepteur darrive, il doit probablement les clairer,

    dans la couche linguistique, pour que le tout puisse vhiculer le sens, comprehensiblepour le rcepteur et conforme lintention de lmetteur. Ainsi, le transfert linguistique ajoute des informations celles contenues dans le texte originai et en negligedautres. Il ne peut jamais tenter de restituer chaqu atome d information d une langue dans une autre. II sagit plus ou moins dune traduction classique. Moins car il

    ne traduit pas tout et plus parce que le traducteur-auteur audiovisuel doit prendre des

    decisions rdactionnelles permanentes en ce qui concerne les omissions ou la conden

    sation du texte original, tandis que de nouvelles informations doivent tre insres.(Luyken et al. 1991: 167).

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    Ces decisions rdactionnelles du traducteur seront conditionnes par:- le type de document traduire (article de presse, feuilleton televis, film, pu-

    blicit etc.),

    - les finalits de ce texte (informer, amuser, faire comprendre, faire faire etc.),- et le type de relations entre les elements signifiants, constitutifs pour tout le

    message, que nous avons discute plus haut.

    6. POUR TERMINER

    Limage fait aujourdhui partie integrante de notre vie quotidienne. Nous la ren-

    controns dans la rue, dans la presse, la television, au cinema, sur lcran dun or-dinateur. On simagine de mois en mois un enseignement quelconque sans une pre

    sentation visuelle qui laccompagne. Limage devient ncessaire dans les

    communications sociales, communications aux masses.En mme temps, les recherches des annes 90 montrent clairement la naissance

    dune interdiscipline: sciences de linformation et de la communication (Bougnoux

    1993: 9). Discipline mal dfinie qui emprunte des approches et methodologies va-ries mais qui essaie dintgrer tout ce qui touche la communication et au transfert

    des informations. Par la force des choses elle doit prendre en compte les diffrentsmoyens qui coexistent dans les messages picto-verbaux ou audio-visuels.

    En mme temps la communication, notamment la communication de masse, doit lpoque actuelle penser aux communications exolingues. Que la television par sa

    tellites, le cinema, les congrs intemationaux en soient les meilleurs exemples. Enpresence de ces mdias mais aussi du multilinguism e on vit dans le monde des traductions. Ces traductions, qui oprent souvent en une grande vitesse et qui sont d-

    termines par dautres contraintes techniques, sloignent de ce quon sest habitu

    dappeler leprocessus de traduction,o on recherchait la correspondance maximaledu contenu et de la forme entre le texte de depart et le texte darrive. Ce nest pas

    sans raison que la thorie interpretative de la traduction de D. Seleskovitch et M.

    Lederer (cf. la bibliographie) postule de prendre en compte dans ce processus, commellment central, le sens du texte, quil faut transmettre dune langue une autre.

    Or, dans les traductions simultannes, conscutives, parfois de spcialit, au cinema

    en forme de sous-titres etc. on est oblige dappliquer certaines lois dconomie discursive qui sont imposes par les contraintes techniques. Parmi ces traductions, il y

    en a qui sont effectues en presence du ct visuel: donnes non-verbales commemimique et gestes, images, schemas, ou toute une srie d lments signifiants, comme

    p.ex. au cinema. Dans ces cas-l on a laffaire, comme nous lavons demontre dans

    ce qui prcde, non seulement la transmission du sens par le verbal, qui doit tre

    traduit (souvent dune manire concise) mais aussi des elements visuels qui seront

  • 7/26/2019 28_Teresa_Tomaszkiewicz_Le Sens Et I 'Information Transmettre Dans La Traduction_305_315 (1)

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    Le sens e t I inform ation transm ettre dans la traduc tion des messages verbo-visuels 315

    transmis, dans leur totalit, au rcepteur en deuxime langue. On ne peut pas compl-tement nier la valeur significative de ces elements dans le processus de traduction. II

    en font une partie integrante que le traducteur doit prendre en compte pour bien ef-fectuer sa tache.

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