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avec le soutien du Ministère de la Communauté fran- Cette brochure s’inscrit dans les suites du colloque "Santé communau- taire" organisé en octobre 1998 à l’initiative et avec le soutien de la Commission Communautaire Française de la Région de Bruxelles- COLLECTION santé communautaire et promotion de la santé 3 "Le diagnostic communautaire"

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avec le soutien du Ministère de la Communauté fran-

Cette brochure s’inscrit dans les suites du colloque "Santé communau-taire"

organisé en octobre 1998 à l’initiative et avec le soutien de la Commission Communautaire Française de la Région de Bruxelles-

COLLECTION

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avec le soutien du Ministère de la Communauté fran-

Cette brochure s’inscrit dans les suites du colloque "Santé communau-taire"

organisé en octobre 1998 à l’initiative et avec le soutien de la Commission Communautaire Française de la Région de Bruxelles-

COLLECTION

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3"Le diagnostic

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Rédaction

Martine Bantuelle,

Jacques Morel, Denis Dargent

Relecture

Marie Anne Beauduin, Thierry Lahaye,

Patrick Trefois

Mise en page et production

asbl Question Santé

Maquette et illustrations

Sébastien Bontemps

© asbl " Santé, Communauté, Participation "Editeur responsable P. Trefois

72 rue du Viaduc 1050 Bruxelles n° dépôt D/2000/3543/14

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SSOOMMMMAAIIRREE

INTRODUCTION 6

LE DIAGNOSTIC COMMUNAUTAIRE 7

Définition 7Un modèle dynamique 8Planification et recherche-action 10

SUR QUOI PORTE LE DIAGNOSTIC COMMUNAUTAIRE ? 11

Besoins et problèmes 11Identification des ressources 11Déterminants de la santé 12Valeurs culturelles et représentations 14

QUI FAIT LE DIAGNOSTIC COMMUNAUTAIRE ? 16

Participation et conscientisation 16Les acteurs 16

ASPECTS METHODOLOGIQUES 18

Le choix du territoire d’intervention 18La dimension "quartier" 19La collecte des informations 20Le temps 21Les techniques 22

LE DIAGNOSTIC COMMUNAUTAIRE, POUR QUOI FAIRE ? 26

Initier l’action 26Eclairer l’action 26Prévoir l’évaluation 27Interroger la société 28

BIBLIOGRAPHIE 30

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Au fil des rencontres et des échangesentre acteurs de programmes com-munautaires de santé, des doutes,des craintes, des difficultés et desinterrogations font surface. La question du diagnostic est sansdoute l’une des plus récurrentes.Divers angles d'approche, commeson utilité, ses objets, sa méthodolo-gie et ses limites, sont questionnés.En quoi un repérage fin des pro-blèmes et de la manière dont ils sontperçus par les membres d'une com-munauté est-il un outil stratégiquepour l'intervention ? Ces informa-tions sont-elles plus significativesque les informations disponiblespour des zones plus étendues ?Comment sélectionner les informa-tions pertinentes et choisir lesbonnes sources ? Comment traiterles informations recueillies pourqu'elles puissent être facilement uti-lisées ? Tous les acteurs sont-ilsconcernés par le diagnostic ? Quelpourrait être le rôle des habitants ?Comment mettre en place un dia-gnostic dont la mise à jour puisseêtre permanente ?Quel est le rôle du diagnostic dans ladéfinition des priorités ? …

En considérant que santé et qualitéde vie sont intimement liées, l'inter-vention devient multidimensionnel-le et s'intéresse simultanément auxhabitudes de vie, aux loisirs, à la cul-ture, aux relations familiales etsociales, à l'environnement physiqueetc… Cette complexité justifie lamise en place d'une démarche systé-matique qui permet de cerner lasituation et sur laquelle reposera lechoix de l'intervention et des objec-tifs à poursuivre.Dans une dynamique communautai-re, le diagnostic est à fois un outild'analyse de la communauté, maiségalement, pour autant que celle-cisoit impliquée dans la réalisation,un outil de sa mobilisation. Dans le but d'encourager la compré-hension et l'engagement des acteurs,l ' a s b l " S a n t é , C o m m u n a u t é ,Participation" a réalisé cette brochu-re. Il s’agit d’une première approchequi permet de comprendre la fonc-tion du diagnostic et ses implica-tions, particulièrement en termes detemps à lui consacrer, de moyens àdégager et d'interlocuteurs àconvaincre.Nous espérons que cette lecturepuisse susciter le désir d'enconnaître plus et de partager vosexpériences et vos questions avecd'autres.

IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN

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DEFINITIONDEFINITION

LLEE DDIIAAGGNNOOSSTTIICC CCOOMMMMUUNNAAUUTTAAIIRREE

L’approche communautaire nécessi-te en effet l’investissement desacteurs concernés pour la définitionplus sensible des besoins et la mobi-lisation des protagonistes à leurprise en charge. "Le principe fonda-mental est donc de considérer le dia-gnostic comme un instrument visantà modifier des situations probléma-tiques, à concevoir et à conduire unprocessus de changement. Le dia-gnostic ne doit pas se focaliser seule-ment sur l’analyse des problèmesinhérents à une situation mais s’ef-forcer de repérer les potentialités dechangement qu’elle recèle et sur les-quelles il sera possible de s’appuyerpour générer un processus de déve-loppement. La qualité première d’undiagnostic est de susciter un échan-ge et une confrontation des points devue du territoire d’intervention. Ildoit provoquer une dynamique loca-le et permettre la constitution departenariats." (1)

1 In Méthode pour élaborer un diagnostic dans le cadre d’un programme de développement social urbain, Programme Med-Rehab (Marseille, Lisbonne, Anderlecht, Rabat, Sousse, Tripoli, Oran), S.N., page 7.

Le diagnostic constitue l’étapeinitiale d’une approche commu-nautaire de santé. Il doit initierune dynamique locale.

Avant l’action, avant la mise enœuvre ou la modification desactivités de santé dans unecommunauté donnée, ilconvient d’acquérir une

connaissance suffisamment fine desproblèmes de ladite communauté.Connaissance des tenants et abou-tissants de ces problèmes, de leurorigine historique ou culturelle, de lamanière dont ils se présentent et dela manière dont ils sont perçus parla population. On doit aussi bienconnaître les ressources disponiblesdans la communauté et les acteursen présence.La définition du diagnostic, au sensmédical du terme, correspond àl’"identification d’une maladie parses symptômes" (Larousse); demême le diagnostic communautairepermet de mieux connaître la naturedes dysfonctionnements au sein d’ungroupe en s’intéressant aux originesde ceux-ci. Il permet égalementl’évaluation de la dynamique localesur laquelle le travail des profession-nels pourra s’appuyer.

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appréciation de la situation au seind’une communauté déterminée,d’analyser ses problèmes, sesbesoins, ses ressources mais aussises traditions, sa culture et son his-toire, le diagnostic communautairerelève, par essence, d’un modèledynamique d’action collective, unmodèle "qui articule les processusd’action avec les logiques d’acteurs."(2) Dans un premier temps, il doitpermettre l’évaluation de la dyna-mique locale sur laquelle le travaildes professionnels pourra s’appuyer.A cet égard, le diagnostic commu-nautaire peut servir d’élément clef àla mise à jour ou à la revitalisationdes réseaux locaux, qu’il s’agisse deréseaux entre professionnels de lasanté ou de réseaux d’entraide plusinformels entre les habitants d’unmême quartier, d’une même ville.Contrairement à un modèle d’actionde type linéaire qui privilégie larationalité et l’observation distan-ciée et déductive du milieu, le modè-le dynamique repose sur un proces-sus inductif qui part des réalités duterrain et conduit à une analyse pluspointue des "déterminants de santé",compris comme l’ensemble des fac-teurs personnels, sociaux, écono-

Le diagnostic est l’occasion d’ini-tier des processus de participa-tion et de collaboration. C’est uni n s t r u m e n t d ’ a n a l y s e , d econnaissance, mais aussi dechangement.

L’organisation des sociétés démocra-tiques en phase post-industrielleposit ionne, classiquement, lesacteurs en trois ou quatre niveaux.Ceux-ci établissent entre eux desrapports codifiés, le plus souventselon un modèle hiérarchique.L’action communautaire postule lamobilisation et la conscientisationd’un nombre maximum d’acteurs,qu’ils soient professionnels de lasanté, représentants d’institutionspolitiques ou sociales, témoins ousujets du milieu de vie étudié.L’interaction entre ces différentsintervenants servira de préalable àl’établissement de nouvelles straté-gies permettant, notamment, l’inter-vention sur les facteurs détermi-nants de la santé. L’étape du dia-gnostic communautaire constituedonc le substrat sur lequel devrontse développer ces processus de parti-cipation et de collaboration. Parcequ’il a pour objet de procéder à une

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MODELEUN MODELE DYNAMIQUE

2 In Dumas (B), Séguier (M), Construire des actions collectives – Développer les solidarités, éd. Chroniques sociales, coll. "Comprendre la société", 1997, page 67.

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miques et environnementaux quiinfluencent le statut de la santé.Le résultat, à terme, est un diagnos-tic qui n’a d’intérêt que si l’on peut lerendre opérationnel, ce qui impliquequ’il ait été construit avec les parte-naires qui seront amenés à l’exploi-ter. Dans cette perspective élargie, ilapparaît donc nécessaire d’identifierles différents mécanismes et phéno-mènes sociaux qui conduisent à dessituations d’exclusion ou de carenceen matière de santé. Le diagnosticne doit pas se limiter à l’analyse duproblème. Il convient, en effet, deresituer l’individu "dans un environ-nement matériel et social, en luireconnaissant une place active etautonome." (3) Instrument d’analyseet de connaissance, le diagnosticcommunautaire est aussi un instru-ment de changement susceptibled’orienter de nouvelles pratiques enmatière de solidarité sociale et, par-tant, d’aborder une redéfinition desnotions de démocratie ou de liberté,souvent vidées de leur sens par despratiques institutionnelles essentiel-lement verticales. In fine, le dia-gnostic communautaire a donc éga-lement pour objectif de réintroduirele sens de l’horizontalité dans l’ac-tion sociale de santé en suscitant "unéchange et une confrontation despoints de vue sur le territoire d’in-tervention." (4)

3 In Bertolotto (F), Joubert (M), Arène (M), Brixi (O), Fatras (J-Y), Ville et santé, éd. CFES, coll. "La santé en action", 1995, page 107.

4 In Méthode pour élaborer un diagnostic dans le cadre d’un programme de développement social urbain, opcit, page 8.

Lesdéterminants de

la santéSous ce vocable sont

repris les divers élémentspouvant influencer l’état de

santé. Rappelons-en briè-vement quelques uns :

- l’environnement social et économique- l’environnement physique- les comportements et aptitudes de

santé individuels- les influences biologiques (notamment

héréditaires)- le recours aux services de santé.

Une autre manière de les présenter est deles répartir en : - facteurs environnementaux (biologiques,

physiques, chimiques, ergonomiques)- facteurs comportementaux psychologiques

et sociaux- services de maintien et de restauration de

la santé et du bien-être.

Le mérite de ces classifications est demettre en lumière la complexité desinfluences qui modulent l’état de santé. In Priorité à la santé : la santé publique dans la réformes

des services de santé. Revue canadienne de santé

publique, vol. 87 n° 1

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Le diagnostic communautaire ades liens étroits avec la méthodede recherche-action.

Les différentes étapes d’unedémarche de santé communautaires’appliquent, sous des modalitésdiverses, à ce que certains cher-cheurs appellent la "planification dela santé". "Planifier, c’est appliquer un proces-sus qui amène à décider quoi faire,comment le faire et comment éva-luer ce qui sera fait avant l’action etle changement, objets ultimes de laplanification." (5)Embarqué dans un processus de pla-nification, l’intervenant ne doit tou-tefois pas oublier que la réalité estmouvante, dynamique ; elle n’est enrien linéaire. Le diagnostic, envisagéici comme le premier stade de la pla-nification, intègre donc en perma-nence les mutations qui intervien-nent dans la communauté et ce, demanière à assurer efficacement lapoursuite de l’interaction entre lesdifférents acteurs. A cet égard, il estindispensable que le coordinateurd’une action sur le terrain entretien-ne un questionnement permanentquant à la validité du processus encours, de façon à l’adapter à l’insta-bilité du milieu.De fait, la notion de recherche-action

semble plus à même de traduire lemode de fonctionnement du diagnos-tic communautaire. La recherche-action est définie comme une "moda-lité de recherche fondamentale quirend l’acteur chercheur et qui amènel’action vers des considérations derecherche. Elle est différente de larecherche fondamentale, qui nefonde pas sa dynamique sur l’action,et de la recherche appliquée qui neconsidère encore les acteurs quecomme des objets de recherche etnon comme des sujets participants.

Les membres d’un groupe socialconnaissent mieux leur réalitéque les personnes extérieures augroupe.

La démarche de la recherche-actionvalorise une connaissance centréesur le changement social, elle metl’accent sur la connaissance pratiquedes individus et des groupes plutôtque sur la connaissance "scienti-fique" et elle fait sien un principe del’anthropologie qui veut que lesmembres d’un groupe social connais-sent mieux leur réalité que les per-sonnes extérieures au groupe." (6)On verra plus loin combien diagnos-tic et action sont, par nature, inti-mement liés.

PLANIFICATIONPLANIFICATION ET RECHERCHE-ACTION

5 In Pineault (R) et Daveluy (C), La planification de santé – concepts, méthodes, stratégies, Editions Nouvelles, page 32.6 In Lamoureux (H), Lavoie (J), Mayer (R) et Panet-Raymond (J), La pratique de l’action communautaire, Presses de l’Université du

Québec, 1996, page 159.

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BESOINSBESOINS ETPROBLEMES

SSUURR QQUUOOII PPOORRTTEE LLEE DDIIAAGGNNOOSSTTIICCCCOOMMMMUUNNAAUUTTAAIIRREE ??

S’il permet la participation etle développement de collabora-tions intersectorielles, le dia-gnostic communautaire a évi-demment comme objectif pre-

mier d’apprécier et d’analyser lasituation sanitaire d’un milieudonné. Il s’attachera donc, dans unpremier temps, à déterminer l’éten-due des problèmes et des besoins dela communauté concernée. Deuxnotions qu’il convient de distinguer.Le mot problème renvoie en effet à"un état de santé jugé déficient parl’individu, par le médecin ou par lacollectivité." (7) Le besoin, quant àlui, "se mesure en estimant l’écartpar rapport à la norme. Plus l’écart àla norme est grand, plus le besoin desanté est important." (8) On peutaussi définir le besoin comme l’écartentre une situation vécue et unesituation désirée. Les notions de problème et de besoinne sont pas forcément liées : certainsbesoins peuvent surgir en effet dansune situation où il n’y a pas de pro-blèmes. Les besoins, les problèmes et lesdemandes qui en résultent ne sontpas nécessairement perçus d’emblée.Leur mise à jour nécessite un travail

d’animation et d’expression.

L’identification des ressources per-met de déterminer l’écart (ou l’adé-quation) entre les services proposéset les besoins rencontrés, et donc dedéfinir jusqu’à quel point les besoinsidentifiés peuvent être satisfaitsavec ou sans ressources addition-nelles.L’un des phénomènes fréquemmentobservés lors d’une démarche de dia-gnostic communautaire est laméconnaissance des ressources dumilieu étudié par les acteurs directe-ment concernés. Il est donc nécessai-re de procéder à un inventaire desdites ressources, qu’elles soientstrictement professionnelles (insti-tutions, hôpitaux…), matérielles ouhumaines (réseaux informels d’en-traide, etc.). Cet inventaire est d’au-tant plus important qu’il concernedes éléments sur lesquels la commu-nauté devra pouvoir compter afin derésoudre ses propres problèmes.

RESSOURCESIDENTIFICATIONDES RESSOURCES

7 In Pineault (R) et Daveluy (C), La planification de santé – concepts, méthodes, stratégies, Editions Nouvelles, page 74.8 Ibidem

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SANTEDETERMINANTS DESANTEDepuis les années 80 et la ratifica-tion de la Charte d’Ottawa en parti-culier (1986), la notion de santé a vuson acception considérablementélargie. On est passé d’une concep-tion purement sanitaire, réduisantla santé à un état d’absence de mala-die, à une conception plus étendue –et par la même, plus positive –, défi-nissant la santé comme " un état debien être sur le plan physique, socialet mental. " (9)

Les environnements sociaux, éco-nomiques et culturels ont dèslors acquis un rôle déterminantdans l’analyse des problèmes etdes besoins d’une communautédonnée.

Une évolution d’autant plus néces-saire que, d’une part, on a assistédepuis la même période à une dégra-dation des conditions de vie socialed’une frange toujours plus large dela population et ce, malgré l’aug-mentation globale de l’espérance devie. D’autre part, des politiquesurbanistiques fonctionnelles maisirréfléchies ont accéléré la précaritééconomique et la dégradation desenvironnements physiques. La prise

en compte du statut de santé dansune perspective plus complexe sem-blait donc nécessaire à l’heure où,par exemple, les médias de masseentamaient leur quête du moindrefait divers dans ces "banlieues àr i sques " e t autres "quar t i e rschauds", véhiculant des imagesessentiellement négatives des ditsquartiers. "Sous cet angle, plusanthropologique, on commence àentrevoir les conditions écologiqueset culturelles qui peuvent conduirecertaines personnes à développerdes conduites à risques (alcoolisme,toxicomanie…) ou à subir plus qued’autres les effets d’une dégradationde leurs conditions socio-écono-miques et urbaines (mal-être, violen-ce, tensions familiales…), avec desincidences très directes sur lamanière de se sentir liées, partiesprenantes d’un tout social." (10)Dans cette optique, l’identificationdes problèmes et des besoins, lerepérage et la redynamisation desréseaux ainsi que l’inventaire desressources du milieu étudié neconstitueront en aucun cas les objetsd’une recherche en vase clos. Cesdonnées ne prendront sens, en effet,qu’une fois replacées dans un envi-ronnement social élargi. La validitédu diagnostic communautaire est àce prix.

9 In Burquel (C), Lambrechts (Y), Thomas (N) et Van Tichelen (B), Le diagnostic communautaire, outil pour une expérience de promotion de la santé mentale, Les Cahiers de la santé de la commission communautaire française, n° 7, 1998, page 5.

10In Bertolotto (F), Joubert (M), Arène (M), Brixi (O), Fatras (J-Y), Ville et santé, éd. CFES, coll. "La santé en action", 1995, page 26.

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Les modèles de recherche dits "écolo-giques" (au sens de l’environnementphysique et social de l’individu)envisagent ainsi le "statut de santé"par rapport à un ensemble de fac-teurs multiples appelés "détermi-nants de santé". Schématiquement,on peut se représenter l’importancede ces facteurs comme un assembla-ge de poupées russes. Au cœur dudispositif, on trouve l’individu, lui-même composant de la communauté.A ce stade sont pris en compte lesdonnées qui le définissent en tantqu’être humain : hérédité, sexe,nationalité, estime de soi, style devie… L’échelon suivant est celui queconstitue le milieu de vie de l’indivi-du, le contexte social rapproché danslequel il évolue. Ce milieu de viecontient des déterminants aussidivers que le cadre professionnel, lemilieu scolaire, le milieu familial,l’environnement physique, le réseaudes relations humaines, associativesou de soutien…Le dernier échelon est celui de l’en-vironnement global, soit la sociétédans son ensemble. Un espace com-posé de valeurs et de normes, de lois,de règlements, de conditions écono-miques fluctuantes, de possibilitésplus ou moins évidentes d’intégra-tion sociale ou professionnelle, etc.

La Charte d’Ottawa (1986)

La Charte d’Ottawa situe lasanté dans une perspectivelarge : ce ne sont pas seulementl’absence de maladie, l’accès auxsoins… qui en constituent le sub-strat. La santé est la capacité defonctionner au mieux dans sonmilieu. Elle est appréhendéecomme une ressource de la viequotidienne, comme un conceptpositif mettant en valeur les res-sources sociales et individuelles,ainsi que les capacités phy-siques. Une multitude de fac-teurs influence positivement ounégativement l’état de santé dela population, notamment l’envi-ronnement comme l’habitat, lecadre de vie, les conditions detravail, de loisirs, la pollution,l’accès à l’information, à la for-mation, à une éducation de qua-lité… In "Réflexions pour une Charte de la

Santé". Bruxelles Promotion-Santé n°2 ;

1995. Question Santé asbl.

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Le diagnost ic communautaireconstitue un outil par lequel on peutétablir (ou rétablir) la communica-tion et le dialogue entre les acteurs.Associer les acteurs (habitants, pro-fessionnels et institutionnels) auprocessus de réflexion et d’actionsignifie en effet qu’il est possible deconfronter des point de vues et opi-nions (parfois très divergents) ausein même de la communauté, duterritoire d’étude.

Dans une dynamique commu-nautaire se confrontent des sys-tèmes de valeurs individuels oucollectifs souvent opposés.

Dans un même milieu, ces valeurspeuvent différer fortement en fonc-tion de l’âge, du sexe ou du niveau de

vie des individus. La position socialedes acteurs entraînera, elle aussi,des différences notables. De même,les valeurs culturelles, très influen-cées par l’appartenance ethnique,religieuse et sociale de l’individu,peuvent entraver le dialogue, fut-ilpolémique, entre les acteurs. Le rôlede l’intervenant social, acteur lui-même, est à cet égard particulière-ment difficile, lui qui doit à la foisapprécier les antagonismes latentsau sein de la communauté et, dans lemême temps, faciliter la communica-tion entre ses divers représentants."Cette connaissance qui ne va pas desoi exige à la fois de la patience, del’observation et aussi une certainedose d’empathie et d’intuition." (11)Autre élément qui demandera toutel’attention de l’intervenant : lesreprésentations réciproques desacteurs.

Au sein d’un même quartier, leshabitants peuvent entretenir desreprésentations faussées les unsvis-à-vis des autres.

La position socio-professionnelle desuns, le sentiment de décrochagesocial des autres entraîneront forcé-

11Lamoureux (H), Lavoie (J), Mayer (R) et Panet-Raymond (J), La pratique de l’action communautaire, Presses de l’Université du Québec, 1996, 436 p

VALEURSVALEURS CULTURELLES ET REPRESENTATIONS

La pratique communautaire tendà la valorisation de l’individudans un environnement global oùl’interaction de phénomènes, sou-vent contradictoires, provoqueinégalités et exclusions sociales.En tant qu’étape initiatrice decette démarche, le diagnostic joueun rôle considérable.

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ment des différences d’appréciationde cet "autre ", de ce voisin sur qui sefocalisent idées reçues et préjugés.C’est particulièrement le cas entredes habitants d’origines ethniquesvariées.Ces représentations peuvent avoirun caractère plus matériel. Laméconnaissance des ressources etdes services d’aides au sein d’unmême milieu peut relever dumanque de communication et desreprésentations biaisées entre lesdifférents acteurs. Ainsi, le profes-sionnel de santé connaîtra-t-il trèsmal les réseaux d’entraide informelsentre les habitants d’un même quar-tier, alors que ces derniers ignore-ront les multiples services proposéspar les institutions locales. La santéelle-même peut faire l’objet de repré-sentations variables.

Ces problèmes de représentations’adaptent aussi au modèle écolo-gique de la définition des problèmeset des besoins. De manière quoti-dienne, le milieu de vie et l’environ-nement global des individus ren-voient à ces derniers des images etdes représentations très éloignées deleurs préoccupations journalières.L’offre détermine bien souvent lanature de la demande et la percep-tion des besoins. La publicité et ses

principaux vecteurs médiatiquesjouent à cet égard un rôle particuliè-rement pervers et sans doute encoremal cerné.

Quel est en effet le poids réel desvaleurs véhiculées par la publicité(conformisme social, exaltation de laconsommation et du bien être à toutprix) sur des individus qui, par leursituation sociale précaire, se heur-tent à ces mêmes valeurs?

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1612In Schapman (S), La démarche communautaire – Analyse de pratiques, Société française de santé publique, 1999, page 37.13In Dumas (B), Séguier (M), Construire des actions collectives – Développer les solidarités, éd. Chroniques sociales, coll.

"Comprendre la société", 1997, page 76.

PARTICIPATIONPARTICIPATION ETCONSCIENTISATION

QQUUII FFAAIITT LLEE DDIIAAGGNNOOSSTTIICCCCOOMMMMUUNNAAUUTTAAIIRREE ??

Le diagnostic communautaireest un outil qui permet de bri-ser la rigidité d’un système decommunication trop vertical.En réintroduisant la notion

d’interaction au sein de la commu-nauté, il doit servir de ciment pourla reconstruction du dialogue entreles acteurs. L’action de santé visantle plus grand nombre, il est de ce faitessentiel que le plus grand nombreparticipe à sa détermination et à samise en œuvre.

La participation, qui constituel’un des fondements de ladémarche communautaire, estl’élément moteur du diagnostic.

Elle est au cœur d’une pratique qui"part des difficultés exprimées parune communauté, les considère dansleur complexité et leurs relations etcherche des solutions avec la popula-tion." (12) On touche là à un proces-sus d’action collective appeléconscientisation, et défini comme "leprocessus par lequel des hommes etdes femmes des couches populairess’éveillent à leur réalité socio-cultu-relle, repèrent pour les dépasser lesaliénations et les contraintes aux-

quelles ils sont soumis, s’affirmenten tant que sujets, acteurs de leurdevenir et conscients de leur histoi-re." (13) Cela doit permettre auxhabitants – en particulier aux plusdémunis et aux plus isolés d’entreeux –, de sortir progressivement dela spirale descendante dans laquelleils sont trop souvent enfermés. Ens’inscrivant comme acteurs à partentière, voire même comme auteursde projets qui les concernent, cescitoyens commencent à retrouverleur dignité.

Trois grands types d’acteurs émer-gent lors de la mise en œuvre d’undiagnostic communautaire : la popu-lation, les professionnels (extérieursou de proximité) et les institution-nels (partenaires politiques, tech-niques ou financiers). Leur mobilisa-tion répondra bien entendu à desmotifs et à des intérêts divers. Ainsi,au sein d’une population donnée,vivant dans un même espace déter-miné (ville, quartier, rue…), lamanière de s’intégrer au processus

ACTEURSLES ACTEURS

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variera d’un individu à l’autre.Certains développeront un fort sen-timent d’appartenance et s’investi-ront plus facilement que d’autresdans une démarche de changement.La figure de l’intervenant (qu’onappellera aussi agent de développe-ment, chef de projet, coordinateur,etc.) reste, dans ce cas, tout à faitcentrale. "Le but principal de son interventionest de contribuer à redonner un sta-tut d’acteur et/ou d’auteur aux habi-tants, non comme acteurs isolésmais comme acteur au sein du col-lectif. (…) Il mise donc sur la capaci-té de tous les individus à percevoir età analyser leurs conditions de vie,ainsi qu’à développer des attitudescritiques envers les phénomènessociaux d’exclusion." (14)En ce sens, la manière de mener lediagnostic peut s’avérer inadaptée.S’il entend initier et entretenir unpartenariat efficace, l’intervenantdevra en effet posséder les compé-tences requises à l’animation et ladynamisation d’un groupe. Outre lechoix des acteurs du partenariat, lerecrutement éventuel d’enquêteursde terrain chargés d’interviewer leshabitants peut aussi occasionner descontroverses. Quel type de formationces enquêteurs devront-ils acquérirau préalable ? Doivent-ils apparte-nir eux-mêmes au milieu de l’enquê-te ou est-il préférable, et plus objec-tif, de recourir à des personnes exté-rieures ?Pour mener à bien le diagnostic, l’in-

tervenant devra pouvoir compter surl’aide des professionnels de proximi-té (médecins généralistes, infir-mières, éducateurs de rue…),acteurs d’autant plus importantsque leurs professions respectives lesamènent à s’intégrer à la vie quoti-dienne des habitants. Leurs compé-tences et leurs connaissances du ter-rain constitueront un plus pour éta-blir un diagnostic pertinent, sansque cela minimise le rôle des profes-sionnels extérieurs à la communauté(architectes des espaces publics,experts en développement local,etc.). Ces derniers, éloignés desenjeux locaux et des préoccupationsquotidiennes des habitants, bénéfi-cient en retour d’une capacité derecul, doublée d’une vision d’en-semble moins affective. Ils jouent àl’occasion un rôle de "médiateurs-experts" au service des acteurs dudéveloppement. Quant aux institutionnels, qu’ilssoient élus au sein des différentséchelons du pouvoir politique, admi-nistrateurs ou gestionnaires decaisses d ’assurances maladies(mutualités), d’hôpitaux et autresCPAS, ils peuvent apporter une légi-timité à l’action menée à travers ladéfinition d’un certain nombre depriorités et/ou un soutien d’ordrefinancier.

14In Schapman (S), opcit, page 69.

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18 15Jacquier (C), Voyage dans dix quartiers européens en crise, éd. L’Harmattan, cité dans Méthode pour élaborer un diagnostic dans lecadre d’un programme de développement social urbain (opcit), page 8.

INTERVENTIONLE CHOIX DU TERRITOIRE D’INTERVENTION

AASSPPEECCTTSS MMEETTHHOODDOOLLOOGGIIQQUUEESS DD UUDDIIAAGGNNOOSSTTIICC CCOOMMMMUUNNAAUUTTAAIIRREE

La pratique du diagnostic com-munautaire repose en partie surl’expérience et l’intuition desintervenants. Et cela se vérifieparticulièrement lors du choixdu territoire d’intervention.

"Il faut prendre en compte desensembles géographiquessocialement pertinents pourmettre en œuvre des actionscohérentes mais aussi pousser

les différents acteurs et notammentles administrations à imaginerd’autres modes de gestion." (15)Mais qu’est-ce qu’un ensemble socia-lement pertinent ? Le choix du terri-toire est-il décidé en fonction dedécoupages administratifs et poli-tiques ou en fonction des modesd’échanges et de communication deshabitants ? La délimitation du terri-toire dépend-elle de son rôle écono-mique, social, urbanistique, culturel,historique ? Pourquoi choisir ce ter-ritoire plutôt qu’un autre ? Il estimpossible de répondre à ces ques-tions de façon tranchée. La com-plexité sociale et l’entremêlementdes enjeux politiques et économiquesque cela sous-entend occasionnentdes réponses complexes et des

approches qui, de la part des opéra-teurs en santé, restent pour le moinspragmatiques. La littérature relati-ve au diagnostic communautairemontre à suffisance combien, à côtéde nécessaires cadres méthodolo-giques, la pratique repose en partiesur l’expérience et l’intuition desintervenants. Et cela se vérifie parti-culièrement lors du choix du terri-toire d’intervention. L’expérienceenseigne en effet qu’il faut d’abordparcourir ce territoire, le repérer,l’identifier, l’analyser avec ses pieds,son œil, son intuition première. Une"prise de contact" qui permet de sefaire une première opinion dumilieu.La plupart des diagnostics commu-nautaires sont mis en œuvre dansdes milieux urbains. Là où, commel’indique le chercheur MichelJoubert, l’approfondissement de lacrise économique et sociale à partirdes années 80 a rejailli très directe-ment sur les populations les plusdéfavorisées. "Le propre des grandes villes et deleurs quartiers périphériques estd’avoir laissé se développer des désé-quilibres importants, touchant desfractions de plus en plus significa-

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t i v e s d u c o r p s s o c i a l . " ( 1 6 )Conséquences : inégalités de laconsommation médicale et durecours aux soins, accentuations desinégalités sociales à l’intérieur de latendance générale à l’augmentationde l’espérance de vie. "Beaucoup dediagnostics effectués ces dernièresannées sur les quartiers en dévelop-pement social urbain ont confirméces logiques", précise encore MichelJoubert. (17)

Aborder la santé dans cette perspec-tive urbaine, celle des villes, desquartiers, des banlieues, supposeque l’état d’une population soitdéterminé en partie par son cadre devie. On rejoint ici le schéma d’analy-se écologique, tenant compte desinteractions du milieu sur les indivi-dus.

A cet égard, l’approche de la santé àl’échelle du quartier, caractéristiquedu diagnostic communautaire, com-porte de nombreux avantages. C’estdans le quartier en effet qu’on perce-vra de manière concrète les boule-versements engendrés par des poli-tiques urbanistiques pas toujours

DIMENSIONLA DIMENSION"QUARTIER"

avisées. L’existence de certains quartiers,leur développement lié à des consi-dérations de logement au sens strict,peuvent témoigner des déséquilibressociaux considérables qui s’opèrentau détriment des populations lesplus fragilisées. La dimension relati-vement "intime" du quartier permetpar ailleurs la grande proximité desacteurs, ce qui facilite le dialogue etl’expression des problèmes et desdemandes par les habitants. Lamobilisation des acteurs sera, elleaussi, facilitée en fonction des senti-ments d’identité et d’appartenanceau quartier.

Cela dit, il faut avoir à l’esprit que lequartier en tant que tel correspondrarement aux unités géographiquesdéfinies au niveau institutionnel,pas plus qu’il ne correspond forcé-ment aux territoires d’interventiondes services médico-sociaux. Les sta-tistiques sanitaires disponibles, parexemple, concernent le plus souventdes zones géographiques plus éten-dues. La collecte de données spéci-fiques au quartier entraîne souventun travail de recherche lourd et coû-teux, et parfois inutile car non sus-ceptible d’apporter des informationssignificatives.

16In Bertolotto (F), Joubert (M), Arène (M), Brixi (O), Fatras (J-Y), Ville et santé, éd. CFES, coll. "La santé en action", 1995, page 27.17Idem, page 25

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Un diagnostic communautaire sur lasanté peut se résumer, dans certainscas, à une enquête épidémiologiquedont l’objet est de collecter un maxi-mum de données existantes (statis-tiques et autres) sur l’état sanitaired’une communauté. Un certainnombre d’indicateurs purementsanitaires ou de type socio-démogra-phiques permettent ainsi de dresserle portrait type d’une population :répartition par âge et par sexe, tauxde natalité, taux de mortalité, tauxde croissance démographique, fluxmigratoire, taux global de fécondité,mais aussi revenu moyen, taux dechômage, taux de pauvreté, niveaude scolarité, taux de suicide, etc.Une fois recensées, ces donnéess’avèrent très utiles pour anticiper,prévoir d’éventuels changementsdans le milieu étudié. Ces informa-tions peuvent être obtenues auprèsd’institutions diverses, état civil,universités, ministères, institutionshospitalières, CPAS, mais aussiauprès d’organismes non gouverne-mentaux, services mutuellistes, etc.La mise en œuvre d’une enquête detype épidémiologique, surtout tech-nique et relativement mobilisatrice,

peut également conduire l’enquêteurà découvrir des différences impor-tantes entre des données établiespar les professionnels (ex : la morbi-dité diagnostiquée) et les problèmesressentis et exprimés par la popula-tion. Il en va de même pour lesbesoins. Ils diffèrent parfois du toutau tout selon qu’ils ont été détermi-nés par les professionnels seuls oupar la communauté dans sonensemble : ceci souligne l’importanced’une réelle participation des habi-tants. Un diagnostic communautaireapprofondi nécessitera donc, outrel’approche épidémiologique, desrecherches de type psychosociolo-gique. Le choix des méthodes utili-sées sera fonction du degré de parti-cipation escompté mais aussi desmoyens disponibles tant au niveauhumain que financier. Ces deuxapproches sont largement complé-mentaires. Elles permettent en effetde combiner des mesures quantita-tives (chiffrées) avec des mesuresqualitatives qui reflètent les pro-blèmes rencontrés, le vécu des habi-tants ou des autres acteurs par lebiais de témoignages des sentimentset des angoisses exprimés, et de la

INFORMATIONSLA COLLECTE DESINFORMATIONS

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18In Lamoureux (H), Lavoie (J), Mayer (R) et Panet-Raymond (J), La pratique de l’action communautaire, Presses de l’Université duQuébec, 1996, page 163.

19In Burquel (C), Lambrechts (Y), Thomas (N) et Van Tichelen (B), Le diagnostic communautaire, outil pour une expérience de promotion de la santé mentale, Les Cahiers de la santé de la commission communautaire française, n° 7, 1998, 41 p.

représentation de chacun quant àson propre environnement. "Dans cetype de recherche, les données nesont pas interprétées par le seulchercheur, mais par l’ensemble ducollectif de recherche. Lorsqu’il s’agitd’un groupe ou d’une communauté,l’analyse du matériel est plutôtd’ordre qualitatif, consistant enl’analyse du contenu des entrevueset des discussions. Les données doi-vent donc être clairement présen-tées, parfois avec l’aide de tableauxqui font ressortir les éléments prin-cipaux. L’analyse par le groupe faitressortir les liens entre les donnéeset leur explication. C’est précisé-ment cette analyse qui donnera lieuà des pistes d’action." (18)

La mise en valeur des objectifs et desnécessités du diagnostic communau-taire montre combien le facteurtemps conditionne la réussite oul’échec du projet.Le temps accordé à ce diagnosticfavorise, chez les habitants, la for-mulation des demandes, mais aussila réappropriation des outils et desinformations. Il permet égalementl’implication des acteurs dans ladétermination des actions à mettreen oeuvre.

TEMPSLE TEMPS

Par ailleurs, différentes expériencesde terrain, dont celle menée il y aquelques années dans deux quar-tiers de la périphérie bruxelloise(19), mettent l’accent sur la restitu-tion, sous forme de synthèse, desdonnées du diagnostic aux per-sonnes interrogées. Outre les rai-sons éthiques, cela permet aux parti-cipants d’émettre des idées nou-velles, des opinions ou des critiquespar rapport à la synthèse proposéeet donc, par rapport à la manièredont les intervenants ont analysé lesdonnées recueillies. Cela participed’un véritable travail d’auto-critiquede la part des intervenants.

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Respecter le temps:

"Les habitants ont besoin detemps pour se constituer en par-tenaires effectifs. L’adaptationdu rythme du projet aux rythmessociaux des habitants devraitêtre la première manifestationde l’estime qui leur est portée. Etpourtant, les rythmes adminis-t r a t i f s s o n t g é n é r a l e m e n tcontradictoires avec le tempsplus souple de l’information, dudialogue, de la négociation avecles habitants."In Lahaye (T), L’accompagnement social

dans le cadre des opérations de rénovation

urbaine, rapport interne.

Les techniques utilisées pour la réa-lisation du diagnostic communautai-re sont le plus souvent multiples.Elles intègrent les éléments consti-tutifs d’approches diverses, épidé-miologiques, sociologiques ouanthropologiques. Mais quelles quesoient les approches utilisées, celles-ci doivent, in fine, refléter le plusfidèlement possible l’état de santéd’une population donnée. Ellesdevront nécessairement être accep-tables, et acceptées, par les habi-

TECHNIQUESLES TECHNIQUES

tants et par les professionnels desanté présents sur le terrain.

L’approche par indica-teurs

L’approche épidémiologique procèdepar la compilation d’indicateurs(taux de natalité, seuil de pauvre-té…) qui, eux-mêmes, constituent latraduction chiffrée (pourcentage,ratio, etc.) de données diverses, sta-tistiques ou indices disponibles. Lescaractéristiques de la populationsont ici au premier plan. Le niveausocio-économique et les voyants sta-tistiques qui y sont associés serventà identifier les populations les plusvulnérables. Ces données restentessentiellement quantitatives. Sielles constituent une bonne photo-graphie d’une population, elles nepermettent pas de tirer des conclu-sions quant au comportement desindividus ou même des collectivités.A ce stade, toute généralisation,toute déduction sur base de modèleschiffrés serait risquée.

Estimation par extrapola-tion

Lorsque les données ne sont pas dis-ponibles pour une unité géogra-phique spécifique, il est possible de

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perception qu’ils ont de leur état desanté et de leurs besoins. Cet aspectpeut évidemment être considérécomme peu fiable si l’on vise à avoirun portrait "objectif" de la morbidi-té." (21) Ce défaut peut être combléen complétant ces données, fondéessur la perception des individus, àl’aide de différents types d’examenset d’analyses faits directement sur lapersonne. (22)

(22) L’enquête Santé Canada comprenait

deux questionnaires : le premier, adminis-

tré par entrevue, recueillait l’information

sur les caractéristiques socio-démogra-

phiques, sur l’état de santé et sur l’utili-

sation du système de soins ; le second,

auto-administré, recueillait de l’informa-

tion sur l’histoire médicale et sur les habi-

tudes de vie. Ces réponses étaient complé-

tées par la mesure directe de certaines

caractéristiques physiques, de l’état

immunitaire ainsi que d’éléments biochi-

miques.

L’enquête de santé, qu’elle soitmenée au niveau de tout un pays oud’une communauté, porte habituel-lement sur un échantillon représen-tatif de la population. Quelle sera,dès lors, l’unité de base utilisée pouranalyse ? L’individu, la famille, ledomicile ou l’organisation ? Quellessont les limites de la zone d’intérêt :

réaliser une extrapolation des tauxobtenus au niveau d’une plus grandeunité. Les taux obtenus dans lapopulation de référence seront doncappliqués à la population d’un terri-toire donné. Cette extrapolationn’est valable que pour des groupesdémographiques comparables. "Cetype d’estimation verticale (d’unegrande région à une plus petite) peutêtre également appliquée de maniè-re horizontale, à partir d’une entitégéographique de dimension compa-rable." (20)

L’approche par enquête

Les approches sociologiques ouanthropologiques élargissent lechamp des connaissances aux don-nées qualitatives, soit un type d’in-formations beaucoup plus subjec-tives puisqu’elles émanent desacteurs eux-mêmes, appelés à s’ex-primer sur leurs expériences, surleur vécu. Les enquêtes permettentainsi de produire de nouvelles don-nées sur la communauté et, dans lecas du diagnostic communautaire,de toucher des personnes qui entre-tiennent des rapports difficiles avecles services de santé. L’enquête est,de plus, "la meilleure source d’infor-mation quant à la morbidité ressen-tie ; les gens sont questionnés sur la

20In Pineault (R) et Daveluy (C), La planification de santé – concepts, méthodes, stratégies, Editions Nouvelles, page 212.21Idem, page 216.22 Voir encadré ci-dessus

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une région géographique naturelle,la région desservie par un établisse-ment de santé particulier ou uneunité socio-politique comme uneville, une province, une région admi-nistrative ? Certains groupes d’inté-rêt particulier sont-ils repris dansl’étude : ethnies, groupes d’âge, etc. ?La collecte se fera-t-elle par la poste,par téléphone, par entrevue ?"Pour que l’échantillon représentebien la population de laquelle il esttiré, la détermination de sa tailledoit d’abord tenir compte des carac-téristiques de cette population. (…)La décision quant à la taille del’échantillon repose en grande partiesur le degré de précision que l’onveut obtenir à l’aide de celui-ci ouencore sur le degré d’erreur que l’onest prêt à accepter". (23)Contrairement aux indicateurs,moins sensibles, l’enquête présentedonc l’avantage de mettre en valeurles différences socio-culturelles ausein d’une même population.

L’approche par consensus

L’approche dite "par consensus" pri-vilégiera pour sa part le travail avecdes personnes-relais ou des informa-teurs-clés (citoyens, profession-nels…), sensés bien connaître lacommunauté étudiée et aptes à défi-

nir ses problèmes et ses besoins demanière consensuelle. On privilégieici des techniques diverses destinéesà organiser la réflexion au sein dugroupe. La formulation d’une idée, laprise de parole ou d’autres formesd’expression individuelle nécessitenten effet un ensemble de stimulationspsychologiques que l’intervenant (icivéritable animateur d’une dyna-mique de groupe) devra s’efforcer defaciliter. Les informateurs-clés sontdes personnes qui résident ou tra-vaillent dans la communauté et quisont reconnues comme ayant unebonne connaissance de celle-ci.Différentes techniques s’adressent àces informateurs, notamment cellesdu groupe nominal, du brainwritingou du groupe Delphi.

La technique du groupe nominal sefonde sur une réflexion silencieuse,ce qui permet de surmonter lescontraintes et les inhibitions liées àla participation au groupe. Cettetechnique favorise la concentrationsur les tâches à accomplir dans legroupe. Durant cette phase deréflexion silencieuse, les membresdu groupe subissent une certainetension qui les pousse à se concur-rencer pour les bonnes idées. Cetteutilisation aide le groupe à éviter lesarguments superficiels ou les cli-chés.

23In Pineault (R) et Daveluy (C), opcit, page 219.

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La technique du brainwriting reposeelle aussi sur une réflexion silen-cieuse mais en privilégiant cette foisl’expression écrite. Des idées dedépart (problèmes et solutions pos-sibles) sont écrites préalablementpar l’animateur et placées au centrede la table. "On demande d’abord àchaque participant (de 6 à 8) d’ins-crire ses propres idées en silence.Lorsqu’il est à cours d’idées, iléchange sa propre liste avec une decelles qui sont au centre de la table.Il ajoute à celle-ci de nouvelles idéeset ainsi de suite jusqu’à épuisementdes idées. Par la suite, il est possiblede procéder à un tour de table suivied’une discussion et, finalement, à lamise en ordre des items." (24)

Les membres d’un groupe Delphi,pour leur part, ne communiquentpas directement entre eux, maisréagissent à l’information émise parles autres participants, de telle sortequ’ils en arrivent à un consensussans qu’il y ait eu discussion entreeux. Cette méthode utilise une sériede questionnaires adressés par laposte. Chacun de ces questionnairesest formulé à partir des réponsesdonnées au questionnaire précédent.La démarche s’arrête lorsqu’il y aconsensus ou que l’information obte-nue est suffisante.

D’autres techniques de groupe (grou-pe localisé, forum communautaire,brainstorming…) privilégient leséchanges libres et ouverts entre lesparticipants. Avec comme principaldéfaut, si le groupe formé n’est passuffisamment homogène, de créerdes rapports de force entre les parti-cipants en fonction de leur degréd’inhibition personnel. L’animateurjouera une fois encore une rôle cru-cial en favorisant la participation etla contribution de chacun à laréflexion.On perçoit ici combien ses compé-tences conditionneront la réussite deces expériences participatives. Latâche est plus complexe qu’elle n’yparaît. "Elle requiert certes la maîtrise decompétences techniques et méthodo-logiques, mais fait aussi appel à desqualités humaines essentielles,telles que la sensibilité et le respectà l’égard des personnes, la capacitéde s’adapter aux besoins du groupeet de s’ajuster aux imprévus qui peu-vent surgir". (25) Le processusacquiert donc ici la même importan-ce que le résultat.

24Idem, page 240. 25In Lamoureux (H), Lavoie (J), Mayer (R) et Panet-Raymond (J), La pratique de l’action communautaire, Presses de l’Université

du Québec, 1996.

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INITIERINITIER L’ACTION

LLEE DDIIAAGGNNOOSSTTIICC CCOOMMMMUUNNAAUUTTAAIIRREE,,PPOOUURR QQUUOOII FFAAIIRREE ??

Etant entendu que le diagnosticconsiste à acquérir un maximumd’informations sur l’état de santéet les ressources d’un milieudonné, on pourrait être tenté de

le réduire à son caractère scienti-fique de recherche et d’analyse.Selon ce point de vue schématique,le diagnostic précéderait l’action. Enpratique, ce n’est pas le cas. On adéjà signalé à ce propos tout l’intérêtd’un rapprochement avec ladémarche de recherche-action.

Dès lors qu’il enclenche la dyna-mique de participation et d’in-teraction entre les différentsacteurs, le diagnostic commu-nautaire constitue déjà, en lui-même, le vecteur de pratiquesnouvelles.

En ce sens, on peut estimer qu’il faitpartie intégrante de l’action. La lit-térature insiste beaucoup à cetégard sur la nécessité de ne pas dis-socier recherche et action, diagnosticet processus de changement. "Lesconnaissances acquises et l’implica-tion des professionnels permettent àla fois l’adaptation des actions encours et le choix des nouvelles priori-

tés. Les outils d’analyse élaborés àcette occasion favorisent l’évaluationimmédiate et future des actionsentreprises." (26) On perçoit bien icitoute l’importance de la restitutionsystématique des connaissancesacquises aux acteurs qui les ont pro-duites, à des fins d’évaluation, deremise en question. Le diagnosticconstitue en fait la force motriced’un processus dont les élémentsinteragissent les uns par rapportaux autres.

Le diagnostic produit égalementde la connaissance sur un milieudonné.

Cette connaissance permettra dedéfinir les axes prioritaires d’inter-vention dans ce même milieu. End’autres termes, après avoir identifiéles problèmes et besoins spécifiques,l’analyse des données recueilliesdébouchera sur la détermination desbesoins prioritaires. Là encore, onmesure combien les phases de dia-gnostic et d’action ne sont pas néces-

ECLAIRERECLAIRER L’ACTION

26In Santé et développement social urbain – outils et méthodes, document réalisé par Gres 31 et Santé et communication, édité par la délégation interministérielle à la ville et au développement social urbain, Paris, page 13..

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sairement séparées dans le temps.Que du contraire. La connaissancene se réduit pas en effet à un proces-sus de recherche en vase-clos.L’intervenant communautaire nedoit pas se contenter de connais-sances passives sur le milieu étudié.Son immersion dans ce même milieusuggère l’acquisition de connais-sances intuitives (la découverte sen-sible et subjective du milieu) etactives (l’interaction avec lesacteurs). L’intégration de ces troisniveaux de connaissance rapprocheune fois encore recherche et action.Cela étant, si la connaissance estliée à l’action, certains commenta-teurs font remarquer qu’il ne fautpas "attendre aveuglément de larecherche des directives immédiate-ment applicables à l’action ; laconnaissance ne donne pas le sensde l’action, elle ne peut que l’éclai-rer." (27) Cette distinction, pour lemoins subtile, indique combien dia-gnostic et action ne sauraient consti-tuer des actes à sens unique, desprofessionnels et des politiques versles citoyens, en d’autres termes desdirigeants vers les dirigés.

Les solutions dégagées et les actionsmises en œuvre à la suite d’un dia-gnostic communautaire feront l’objetd’une évaluation, soit une comparai-son entre les objectifs poursuivis etles retombées concrètes de l’actionsur le terrain.

L’évaluation, en tant qu’outild ’analyse , es t nécessaire àchaque étape d’un processus dechangement. L’évaluation per-met notamment de rester prochede la demande des habitants,d’ajuster la démarche le caséchéant.

Dès lors que le diagnostic commu-nautaire est constitutif de l’action,son déroulement fait appel à l’éva-luation. L’évaluation d’une enquêtepar exemple, au-delà des donnéesqualitatives récoltées, peut donnerdes informations utiles sur l’accueilréservé aux enquêteurs, sur les réac-tions des personnes interrogées faceà la nature des questions posées, etc.On peut également procéder à uneévaluation des objectifs définis, de lamobilisation effective des acteurs oudes premières retombées positives(ou négatives) pour lesdits acteurs.

PREVOIRPREVOIR L’EVALUATION

27In Lamoureux (H), Lavoie (J), Mayer (R) et Panet-Raymond (J), La pratique de l’action communautaire, Presses de l’Universitédu Québec, 1996, page 157.

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Autant d’éléments qui peuventcontribuer à réorienter, voire à modi-fier, les méthodes choisies pour réa-liser le diagnostic. En ce sens, l’éva-luation au stade du diagnostic per-met de prévoir et de préparer lesévaluations ultérieures du processusd’intervention. Elle assure le soutiende l’action, sa continuité.

Le document de synthèse d’uneexpérience de santé mentale menéeil y a quelques années dans deuxquartiers de la périphérie bruxelloi-se explique que la mise en œuvre decette intervention reposait sur uneconviction préalable, à savoir que"toute communauté porte en elle,d’une part, des capacités d’auto-développement qui peuvent êtrefacilitées et, d’autre part, des capaci-tés de réappropriation des res-sources et de ses compétences quipeuvent être renforcées". (28) Celarejoint en quelque sorte le "devoird’utopie" exprimé par MauriceTitran dans l’ouvrage collectif Villeet santé. (29) "On est en train dedécouvrir, écrit-il, que la vie associa-tive n’est plus une simple occasion,

INTERROGERINTERROGER LASOCIETE

un simple droit de s’associer (…)mais un devoir. Il faut introduirecette notion de devoir associatif auniveau des citoyens pour les aider àprendre conscience que l’Etat a deslimites et que ce n’est pas lui quipeut tout. Il y a des lois qu’il fautappliquer mais il y a en plus cedevoir associatif où chacun doit seprendre en charge. Si on veut quetout cela puisse fonctionner, il estplus qu’urgent de travailler dansl’utopie, de faire que le rêve devien-ne réalité. Il ne faut pas partir de laréalité, aujourd’hui, il faut partir durêve, de l’utopie."Encore faut-il aider la communautéà prendre conscience de ces capaci-tés mobilisatrices et associatives.Combien d’individus au sein d’unecollectivité seront réceptifs à cegenre d’appel au rassemblement ?L’association ne constitue-t-elle pas,par ailleurs, de nouvelles formes decloisonnement, de repli ? C’est toutl’enjeu d’un diagnostic communau-taire, compris dans son principed’action, que d’arriver à mettre enœuvre des structures de participa-tion ouvertes sur le monde extérieur.

2828In Burquel (C), Lambrechts (Y), Thomas (N) et Van Tichelen (B), Le diagnostic communautaire, outil pour une expérience de

promotion de la santé mentale, Les Cahiers de la santé de la commission communautaire française, n° 7, 1998, page 7.29Bertolotto (F), Joubert (M), Arène (M), Brixi (O), Fatras (J-Y), Ville et santé, éd. CFES, coll. "La santé en action", 1995,

page 150

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S’il a pour objet d’initier etd’éclairer une action socialeorientée vers le changement, lediagnostic communautaire desanté semble bel et bien consti-tuer la première étape d’un pro-cessus d’interrogation des struc-tures sociales en place.

Le diagnostic communautaire est unoutil dont la fonction est d’interrogerla société au travers des diversesformes de vécu recensées et analy-sées. Faire progresser la notion desanté vers des conceptions de bien-être mental et social implique évi-demment la remise en cause des dif-férents facteurs empêchant ce typed’avancée. Et l’on perçoit bien, àl’heure actuelle, l’importance de lachose. La mondialisation, de par sesfondements économiques, et lesconceptions néo-libérales dans leurensemble entrent en concurrenceavec les pratiques axées sur la pro-motion de l’entraide et de la solidari-té. Les Etats, par ailleurs, ont effec-tivement démontré leurs limites enmatière d’interventionnisme àl’échelon social. Le diagnostic com-munautaire, de par ses objectifs demobilisation et d’autonomie, peutdonc être envisagé comme une maintendue par la sphère politique, unesorte de planche de salut pour l’ini-

tiation de nouvelles politiquessociales. Encore faut-il que soit lais-sée une marge de manœuvre au rêveet à l’utopie.

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- Van Vlaenderen (J), Méthodologie de recherche en santé communautaire, notes decours, 1997-1998, 20 p.

Ces notes balayent les origines du concept de santé communautaire et définissent notam-ment les notions de communauté et de participation. Elles proposent aussi les éléments deméthodologie et de recherche en santé communautaire.

- Rapport d’activité concernant le projet : "Création d’un observatoire de santé commu-nautaire à Anderlecht (Cureghem)", 1994-1995, 82 p.

Ce rapport décrit la mise en œuvre d’un "observatoire de santé communautaire" dans unquartier bruxellois en crise. Cet observatoire constitue l’outil utilisé pour la réalisation dudiagnostic communautaire. On insiste beaucoup ici sur la participation des habitants,considéré à la fois comme moyen et finalité de ce programme de développement social dequartier (D.S.Q), initié à la demande de la commune d’Anderlecht.

- Pineault (R) et Daveluy (C), La planification de santé – concepts, méthodes, stratégies,Editions Nouvelles, 480 p.

Véritable vade-mecum des tenants et aboutissants d’une démarche de planification adap-tée à la santé communautaire. Les auteurs passent en revue les différentes étapes des pro-cessus servant à planifier des actions de santé publique, des services ou des ressourcessanitaires. La phase du diagnostic, qui occupe une large part, est ici présentée sous laforme d’une "étude des besoins".

- S.N., Méthode pour élaborer un diagnostic dans le cadre d’un programme de dévelop-pement social urbain, Programme Med-Rehab (Marseille, Lisbonne, Anderlecht, Rabat,Sousse, Tripoli, Oran), 22 p.

Outil destiné aux différentes villes engagées dans le programme de développement socialurbain Med-Rehab. Il met en évidence la nécessité de faire reposer l’édifice sur le socle deconnaissances intégrées que constitue le diagnostic communautaire.

- S.N., Santé et développement social urbain – outils et méthodes, document réalisé Cres31 et Santé et communication, édité par la délégation interministérielle à la ville et au

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développement social urbain, Paris, 29 p.

Outil de travail et de réflexion sur la notion de santé envisagée comme facteur d’insertion.Ce document français, réalisé à la demande de la Délégation interministérielle à la ville(DIV), met en évidence la pertinence des démarches communautaires dans des processusde développement social urbain complexes par nature.

- Burquel (C), Lambrechts (Y), Thomas (N) et Van Tichelen (B), Le diagnostic commu-nautaire, outil pour une expérience de promotion de la santé mentale, Les Cahiers de lasanté de la commission communautaire française, n° 7, 1998, 41 p.

Ce document présente une expérience de santé mentale communautaire menée sur deuxquartiers bruxellois dont la population est la plus touchée par la récession économique. Ilpasse en revue le cadre théorique de référence, les objectifs et étapes du projet, le diagnos-tic communautaire, la constitution d’un groupe de pilotage et le lancement de l’action enpromotion de santé mentale communautaire.

- Lamoureux (H), Lavoie (J), Mayer (R) et Panet-Raymond (J), La pratique de l’actioncommunautaire, Presses de l’Université du Québec, 1996, 436 p.

Cet ouvrage vise à transmettre l’expérience cumulée des quatre auteurs qui ont derrièreeux près de quarante ans d’action communautaire au Québec. Il situe dans un contextehistorique et éthique les pratiques de l’action communautaire. Il présente également uneréflexion critique sur ces pratiques et aborde les défis qui se posent en cette période deremise en question de nombreux acquis sociaux.

- Schapman (S), La démarche communautaire – Analyse de pratiques, Société françaisede santé publique, 1999, 147 p.

Etude théorique et pratique qui replace la participation au centre de la démarche de santécommunautaire. Histoire de démontrer qu’elle ne se décrète pas de manière arbitrairemais qu’elle nécessite, en effet, un certain nombre de conditions et de pratiques profes-sionnelles et institutionnelles.

- S.N., Regards croisés – Diagnostic-santé de cinq villes du Val d’Oise Est, édité parSanté et communication, 1995, 11 p.

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Rapport détaillant un diagnostic santé réalisé par Santé et communication en 1994, danscinq communes de la banlieue parisienne. Ce qui permet à cet organisme de démontrerl’importance de la "transversalité", soit la dynamique de participation entre habitants,professionnels et institutions.

- Dumas (B), Séguier (M), Construire des actions collectives – Développer les solidarités,coll. "Comprendre la société", éd. Chronique sociale, 1997, 226 p.

Centré sur les actions de développement social local, cette étude constitue une approcheméthodologique des démarches collectives, avec une attention toute particulière qui seporte sur les actions de conscientisation des acteurs et la mobilisation de ceux-ci.

- S.N., La promotion de la santé : concepts et stratégies d’action, coll. "Promotion de lasanté", Québec, 85 p.

Aperçu des stratégies utilisées à la fin des années 80 pour la promotion de la santé. Ledocument survole des thèmes tels que l’éducation pour la santé, le marketing social, lacommunication, l’organisation communautaire, l’action politique et la conscientisation.

- Collectif, La santé en action – Guide méthodologique et pratique en éducation pour lasanté, éd. CFES, France, 1995, 267 p.

Réflexion collective sur la nécessité et la mise en œuvre des actions sociales de santé enmilieu urbain. En filigrane : une mise en perspective des actions de santé publique afinde mettre à jour leurs effets contradictoires et les moyens de les corriger.

- Bertolotto (F), Joubert (M), Arène (M), Brixi (O), Fatras (J-Y), Ville et santé, éd. CFES,coll. "La santé en action", 1995, 269 p.

Guide pédagogique à l’usage des professionnels. Les auteurs y détaillent les diversesfaçons d’appréhender les problématiques sanitaires par rapport aux espaces urbains. Uneattention toute particulière est portée à la nécessité de recréer des espaces de sociabilité ausein des grands ensembles.

- Morel (J), Moulart (A), Swaelens (C), Vankelegom (B), Laruelle (X), Forest QuartiersSanté – Programme de santé communautaire, 1997, 96 p.

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Document-bilan sur une opération à long terme de promotion de la santé, initiée à Forestpar différents partenaires de terrain. Outre la description du travail effectué et un état deslieux après plusieurs années d’activités, ce document trace les pistes du développementultérieur du programme (période 1997-99).

- Approche des besoins de santé à la Goutte d’or (Paris XVIIIe), enquête réalisée parSanté et communication, sous la direction du docteur Elisabeth Feur, médecin de santépublique, éd. AIDDA, 1989, 107 p.

Rapport d’un enquête menée pendant un an par des professionnels et des institutions dansle quartier de la Goutte d’Or à Paris. Une attention toute particulière est portée aux condi-tions de vie des habitants (habitat, structures de santé…), comprises comme des détermi-nants évidents de l’état de santé général.

- Quartier – Santé, approche sociologique des besoins et des pratiques de santé desfamilles et des jeunes, sous la direction de Michel Joubert, 1991, 288 p.

Rapport d’un projet de recherche-action en santé communautaire menée dans la secondemoitié des années 80 dans le quartier de Franc Moisin – Bel Air (Saint-Denis). Lesauteurs insistent sur la nécessité d’intégrer leur réflexion et leur travail de terrain dansun cadre environnemental global, tenant compte forcément des atteintes portées au cadrede vie des habitants.

- Renaud (L), Gomez Zamudio (M), Planifier pour mieux agir, Ed. Réfips, coll. "Partage",Québec, 1998, 175 p.

Ouvrage méthodologique exposant les grands axes du modèle PROCEED (Canada) et ce,à destination des pays francophones (PRECEDE). Les auteurs envisagent le diagnosticsuivant différentes étapes : diagnostic social, épidémiologique, comportemental et envi-ronnemental, éducationnel et organisationnel, administratif et politique.

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