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Dr. Dale S. ROGERS Professor of Supply Chain Management, University of Nevada, Dr. Ronald S. TIBBEN-LEMBKE Assistant Professor of Supply Chain Management, University of Nevada, Les gestionnaires accordent un intérêt grandissant à la « reverse-logistics » . Celle-ci occupe une place beaucoup plus importante qu’il y a quelques années. Le présent document décrit synthétiquement plusieurs stratégies et technologies nouvelles que les responsables de « reverse-logistics » peuvent utiliser aujourd’hui pour amé- liorer les « flux à rebours », et dont ils devraient disposer dans le futur. Introduction Si la « reverse logistics » n’a fait l’objet que d’un intérêt limité dans le passé, cette situa- tion commence à changer. La parution de ce numéro spécial qui lui est consacré, de même que le nombre croissant d’articles de la presse commerciale 1 et de conférence 2 qui lui sont consacrés, en sont la preuve. En outre, plu- sieurs ouvrages 3 et documents 4 ont été publiés sur le sujet récemment. Il est évident que davantage d’entreprises accorderont un inté- rêt très significatif à la « reverse logistics » à l’avenir. Les travaux de recherche existants proposent plusieurs définitions de la « reverse logis- tics ». Le présent document retiendra la défi- nition suivante : Processus de planification, de mise en œuvre et de contrôle, de manière rationnelle et avan- tageuse, des flux de matières premières, de produits semi-finis, de produits finis et d’in- formations y afférentes, du point de consom- mation jusqu’au point d’origine, dans le but de récupérer ou de créer de la valeur ou d’améliorer l’élimination des déchets 5 . Ce document cherche à montrer aux entrepri- ses les possibilités d’amélioration de leurs pratiques de reverse logistics. Les conclusions qu’il présente sont le fruit d’une récente étude menée par les auteurs sur la reverse logistics. La finalité de ces travaux consistait en partie à déterminer l’importance des activités reverse logistics aux Etats-Unis et, au-delà, à détermi- ner les pratiques actuelles, à examiner ces pra- tiques et à collecter des données sur les tendances dans le domaine de la reverse logis- tics. Les chercheurs ont contacté 1 200 responsa- bles américains de reverse logistics en vue de leur participation à l’étude. Au total, 258 questionnaires n’ont pas pu être livrés aux destinataires et 311 réponses exploitables ont été reçues – soit un taux de réponse de 29,53 %. L’équipe de recherche a également mené des entretiens approfondis avec plus de 150 responsables de reverse logistics, y com- pris en Europe. Elle a visité des entreprises afin d’observer les processus reverse logistics. Les problèmes de retour de produits rencontrés récemment par des entreprises spécialisées dans le commerce électronique ont dévoilé l’impor- tance de la reverse logistics, ainsi que les diffi- cultés qui lui sont inhérentes. L’avantage du commerce sur Internet réside en partie dans le fait que le détaillant n’a pas besoin de bâtir une Logistique & Management Vol. 7 – N°2, 1999 15 « Reverse logistics » : stratégies et techniques 1 - Marcia Jedd, “Going Forward with Reverse Logistics”, Inbound Logistics, août 1999, pp. 46-52 ; “Shifting Logistics into Reverse”, Transport Topics, 18 janvier, 1999 ; Julie Ritzer Ross, “Returns Gatekeeping Seen as Key to Efficient Reverse Logistics”, Stores, février 1998, pp. 49-50 ; Jodi E. Melbin, “The Never-Ending Cycle”, Distribution, octobre 1995, pp. 36-38. 2 - Par exemple : James R. Stock, “Development and Implementation of Reverse Logistics Programs,” CLM 1998 Annual Conference ; Dale S. Rogers, “Going Backwards: a Study of Reverse Logistics Trends and Practices,” CLM 1998 Annual Conference ; James H. Austhof, Omar Keith Helferich et Arthur H. Otis, “Achieving an Effective Supply Chain: Color My Pipeline Green”, CLM 1997 Annual Conference.

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la logistique inverse

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Dr. Dale S. ROGERSProfessor of Supply Chain Management, University of Nevada,Dr. Ronald S. TIBBEN-LEMBKEAssistant Professor of Supply Chain Management, University of Nevada,

Les gestionnaires accordent un intérêt grandissant à la « reverse-logistics » . Celle-cioccupe une place beaucoup plus importante qu’il y a quelques années. Le présentdocument décrit synthétiquement plusieurs stratégies et technologies nouvellesque les responsables de « reverse-logistics » peuvent utiliser aujourd’hui pour amé-liorer les « flux à rebours », et dont ils devraient disposer dans le futur.

Introduction

Si la « reverse logistics » n’a fait l’objet qued’un intérêt limité dans le passé, cette situa-tion commence à changer. La parution de cenuméro spécial qui lui est consacré, de mêmeque le nombre croissant d’articles de la pressecommerciale1 et de conférence2 qui lui sontconsacrés, en sont la preuve. En outre, plu-sieurs ouvrages3 et documents4 ont été publiéssur le sujet récemment. Il est évident quedavantage d’entreprises accorderont un inté-rêt très significatif à la « reverse logistics » àl’avenir.

Les travaux de recherche existants proposentplusieurs définitions de la « reverse logis-tics ». Le présent document retiendra la défi-nition suivante :

Processus de planification, de mise en œuvreet de contrôle, de manière rationnelle et avan-tageuse, des flux de matières premières, deproduits semi-finis, de produits finis et d’in-formations y afférentes, du point de consom-mation jusqu’au point d’origine, dans le butde récupérer ou de créer de la valeur oud’améliorer l’élimination des déchets5.

Ce document cherche à montrer aux entrepri-ses les possibilités d’amélioration de leurs

pratiques de reverse logistics. Les conclusionsqu’il présente sont le fruit d’une récente étudemenée par les auteurs sur la reverse logistics.La finalité de ces travaux consistait en partie àdéterminer l’importance des activités reverselogistics aux Etats-Unis et, au-delà, à détermi-ner les pratiques actuelles, à examiner ces pra-tiques et à collecter des données sur lestendances dans le domaine de la reverse logis-tics.

Les chercheurs ont contacté 1 200 responsa-bles américains de reverse logistics envue de leur participation à l’étude. Au total,258 questionnaires n’ont pas pu être livrés auxdestinataires et 311 réponses exploitables ontété reçues – soit un taux de réponse de29,53 %. L’équipe de recherche a égalementmené des entretiens approfondis avec plus de150 responsables de reverse logistics, y com-pris en Europe. Elle a visité des entreprisesafin d’observer les processus reverse logistics.

Les problèmes de retour de produits rencontrésrécemment par des entreprises spécialisées dansle commerce électronique ont dévoilé l’impor-tance de la reverse logistics, ainsi que les diffi-cultés qui lui sont inhérentes. L’avantage ducommerce sur Internet réside en partie dans lefait que le détaillant n’a pas besoin de bâtir une

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« Reverse logistics » :stratégies et techniques

1 - Marcia Jedd, “GoingForward with ReverseLogistics”, Inbound Logistics,août 1999, pp. 46-52 ; “ShiftingLogistics into Reverse”,Transport Topics, 18 janvier,1999 ; Julie Ritzer Ross,“Returns Gatekeeping Seen asKey to Efficient ReverseLogistics”, Stores, février 1998,pp. 49-50 ; Jodi E. Melbin, “TheNever-Ending Cycle”,Distribution, octobre 1995,pp. 36-38.

2 - Par exemple : James R.Stock, “Development andImplementation of ReverseLogistics Programs,” CLM 1998Annual Conference ; DaleS. Rogers, “Going Backwards: aStudy of Reverse LogisticsTrends and Practices,” CLM1998 Annual Conference ;James H. Austhof, Omar KeithHelferich et Arthur H. Otis,“Achieving an Effective SupplyChain: Color My PipelineGreen”, CLM 1997 AnnualConference.

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boutique, ni un réseau de boutiques en dur afinde proposer ses produits aux clients. De nom-breuses entreprises pensent de ce fait que lesmoyens et les processus physiques ne sont pasimportants dans le commerce électronique.Malheureusement, elles n’ont pas su tirer les le-çons de l’expérience passée de la vente par cor-respondance. Les détaillants sur catalogueavaient fini par se rendre compte que si lesclients ne peuvent pas examiner les produitsphysiquement avant de les acheter, ilsretourneront probablement un pourcentage éle-vé d’articles par la suite. Force est de constaterque les entreprises de commerce électroniquen’échappent pas à cette règle, bon nombred’entre elles ayant vu leurs perspectives de ren-tabilité sérieusement compromises du fait deleur incapacité à gérer de manière rationnelle etefficace les flux à rebours de leurs produits.

De nombreuses entreprises n’ont pris cons-cience de l’importance de la reverse logisticsque depuis relativement peu de temps, mais nese sont pas encore rendu compte du rôle straté-gique qu’elle peut jouer. Afin de réduire lescoûts de reverse logistics, les entreprisesdevront s’atteler à améliorer avant tout cer-tains aspects de leur logistique à rebours,notamment :

� Améliorer leur technologie de filtraged’accès aux flux à rebours (”gatekeepingtechnology” chez les Anglo-saxons) ;

� Prendre plus tôt les décisions en matièred’élimination des déchets ;

� Accélérer le traitement/réduire le tempsdes cycles ;

� Améliorer la gestion des données.

Le présent document examine essentiellementla manière dont les entreprises peuvent réduirele coût de la gestion de leurs flux logistiques àrebours. L’un des moyens les plus simples pourréduire le coût des flux logistiques à rebours estde réduire le volume des produits qu’elles sontamené à transporter. Cela implique deux cho-ses : premièrement, empêcher les produits nonqualifiés d’entrer dans les flux ; deuxième-ment, une fois que des produits sont entrés dansles flux, les écouler et les faire sortir du systèmeaussitôt que possible.

Réduire les flux logistiquesà rebours

Pour réduire les flux de produits dans le sys-tème reverse logistics, il existe plusieurs tech-nologies et techniques nouvelles qu’on peututiliser pour s’assurer que chaque produit quientre dans les flux logistiques à rebours rem-

plit les conditions requises pour être dans lesystème.

Gestion du cycle de vie des produits

On peut considérer qu’une bonne gestion de lareverse logistics s’inscrit dans le cadre d’unconcept plus large dénommé gestion du cyclede vie des produits. Dans le futur, les entrepri-ses à la pointe du progrès commenceront pro-bablement à mettre l’accent sur la gestion del’ensemble du cycle de vie des produits. Leconcept de gestion du cycle de vie des pro-duits signifie que l’entreprise met en œuvrel’appui logistique et marketing approprié enfonction, du moins en partie, du stade où leproduit se trouve dans son cycle de vie.

L’idée maîtresse du concept de cycle de viedes produits est que tous les produits ont unevie limitée et passent par différents stades.Généralement, la courbe du cycle de vie d’unproduit se divise en quatre phases distinctes, àsavoir le lancement, la croissance, la matura-tion et le déclin. Les quantités du produit aug-mentent dans les phases de lancement et decroissance. Lorsqu’un produit se trouve austade de maturation, les ventes commencent àse tasser, puis à diminuer. Durant la phase dedéclin, les ventes enregistrent une très fortebaisse et les profits générés par le produitdiminuent.

Selon le stade où il se trouve dans son cycle devie, un produit a besoin d’un type de gestion etd’un type d’appui différents. La gestion logis-tique requise durant le stade du lancement esttrès différente des besoins d’appui au stade dematuration. En outre, la gestion de la chaînelogistique requise à la fin de la vie d’un pro-duit diffère par rapport aux autres stades.

Le cycle de vie n’est pas uniforme d’un pro-duit ou d’un secteur d’activité à un autre.C’est un concept théorique qui peut être utile ;cependant, dans la pratique, il est difficile dedéterminer le stade où un produit se trouvedans son cycle de vie une fois qu’il a dépasséles stades de lancement et de croissance. L’en-treprise doit surveiller les tournants de lademande du produit. Elle ne peut les identifierque si elle comprend bien l’historique et lemarché dudit produit.

Malheureusement, dans de nombreusesentreprises, les départements Marketing etLogistique se focalisent seulement sur ledébut et le milieu du cycle de vie des produits.La mission de ces départements est beaucoupplus claire au début du cycle de vie : lance-ment du produit nouveau, développement desventes et appui y afférent sont alors leurs

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3 - Dale S. Rogers et Ronald S.Tibben-Lembke, Going Back-

wards: Reverse Logistics Trendsand Practices, Pittsburgh, PA,RLEC Press, 1999 ; James R.

Stock, Development and Imple-mentation of Reverse Logistics

Programs, Oak Brook, IL, Coun-cil of Logistics Management,

1998 ; Ronald Kopicki, MichaelJ. Berg, Leslie Legg, Vijetha Da-sappa et Cara Maggioni, Reuse

and Recycling–Reverse Logis-tics Opportunities, Oak Brook,IL, Council of Logistics Mana-

gement, 1993; Hans RonaldKrikke, Recovery Strategies and

Reverse Logistic NetworkDesign, Enschede (Pays-Bas),

University of Twente, 1998.

4 - Craig R. Carter et Lisa M.Ellram, “Reverse Logistics:

A Review of the Literature andFramework for Future Investiga-

tion”, Journal of BusinessLogistics, 19:1, 1998,

pp. 85-102; Martin Thierry,Marc Salomon, Jo van Nunen etLuk van Wassenhove, “Strategic

Issues in Product RecoveryManagement”, California

Management Review, 37:2, hiver1995 ; Leo Kroon et Gaby Vri-jens, “Returnable Containers:an Example of Reverse Logis-tics”, International Journal of

Physical Distribution and Logis-tics Management, 25:2, 1995;

Terrance L. Pohlen et M. Theo-dore Farris II, “Reverse

Logistics in Plastic Recycling”,International Journal of Physi-

cal Distribution and LogisticsManagement, 22:7, 1992).

5 - Dale S. Rogers et Ronald S.Tibben-Lembke, Going Back-

wards: Reverse Logistics Trendsand Practices, Pittsburgh, PA,

RLEC Press, 1999 ; Dale S.Rogers et Ronald S. Tib-

ben-Lembke, “An Examinationof Reverse Logistics Processes”,

soumis au Journal of BusinessLogistics.

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préoccupations principales. Par ailleurs, il estparfois difficile pour une entreprise d’ad-mettre qu’un produit se trouve en fin de vie.Les décisions sont différées parce que desgestionnaires pensent qu’ils peuvent prolon-ger d’un peu plus la vie d’un produit. Lesdépartements Ventes et Marketing peuventmême essayer de camoufler une baisse desventes d’un produit, pensant qu’une tellebaisse serait interprétée comme une baisse deleurs propres performances.

Lorsque le produit approche la fin de sa vie,les coûts de détention de stocks augmentent.Ces coûts incluent notamment le coût respec-tif de l’argent, de l’assurance, des taxes, despertes physiques, de l’entreposage et de l’ob-solescence. Au fur et à mesure qu’un produitévolue dans son cycle de vie et se rapproche dela fin de sa vie commerciale, les coûts d’obso-lescence passent d’un niveau très faible à 100%. Les coûts d’entreposage du produit irontaussi en croissant. Cela signifie qu’une entre-prise ne peut pas se baser sur un coût uniquede détention de stocks tout au long du cycle devie du produit. Le schéma 1 présente un scé-nario d’évolution du coût de détention desstocks.

Il importe tout autant de bien gérer les pro-duits à la fin de leur vie qu’au début. Commele montre le schéma, il peut s’avérer plus cru-cial de bien gérer les stocks à la fin de la vied’un produit qu’au début.

Lorsqu’un produit atteint la fin de sa vie, il ades chances d’entrer dans les flux logistiquesà rebours. Une bonne reverse logistics est unélément fondamental de la gestion du cycle devie des produits. Une fois que le produit adépassé le stade de la vente en grandes quanti-tés dans son cycle de vie, l’entreprise doitcommencer à « débarrasser » le canal par unegestion reverse logistics appropriée. Les ges-tionnaires doivent planifier la fin de la vie duproduit, de même qu’ils doivent bien penserles autres stades du cycle de vie. S’ils sontcapables de planifier une bonne partie desaspects de la gestion à la fin de la vie d’un pro-duit, plutôt que de réagir tardivement devantl’obsolescence des stocks, le bénéfice totaltiré du produit en question par l’entreprisesera supérieur.

Système d’information

Afin de mieux gérer la reverse logistics, lesentreprises devront améliorer leur systèmed’information dédié à la reverse logistics.L’environnement de la logistique à rebours estassez différent de celui de la logistique « avant

», de telle sorte que le système d’informationconçu pour la logistique avant ne fonctionnegénéralement pas bien pour la reverse logis-tics.

La majeure partie des processus de retourimpliquent beaucoup de paperasserie. L’auto-matisation de ces processus est difficile parceque les processus reverse logistics se caracté-risent généralement par des exceptionsnombreuses. Par ailleurs, la reverse logisticsconsiste généralement en processus embras-sant plusieurs entreprises ou unités différentesde la même entreprise. La conception d’unsystème d’information qui doive fonctionnerà l’échelle de plusieurs entités compliquedavantage le problème. Pour bien fonctionner,un système d’information dédié à la reverselogistics doit être flexible.

Un tel système d’information devrait utiliserdes programmes informatiques précis à mêmede réaliser des mesures reverse logisticsimportantes, telles que la conformité avec lesbesoins des magasins, les taux de retour, lestaux de recouvrement et, enfin, la rotationdes stocks de retours. Dans certains cas, lecontrôle des retours nécessitera de toute évi-dence une extension et une améliorationsignificatives du système informatique.

Même si elles ne mettent pas en place cecontrôle, les entreprises développeront unmeilleur système d’information dédié à lareverse logistics dans le futur. Il faut soulignerque le système d’information actuel de nom-breuses entreprises ne leur permet pas desuivre la situation de leurs retours.

D’autre part, les outils tels que le marquagepar radiofréquence sont utiles. Les innova-tions telles que les codes à barres à deuxdimensions et l’identification par radiofré-quence – qui permet de doter chaque articled’un numéro d’immatriculation – deviendrontcourants peut-être sous peu.

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Schéma 1. Coût de détention des stocks.

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Technologie de filtrage d’accès aux flux à re-bours

L’un des aspects essentiels de la réduction ducoût de la gestion des flux à rebours est laréduction du nombre de produits qu’on laisseentrer dans le système alors qu’ils nedevraient pas s’y trouver. Le processus dedécision quant aux produits à admettre dans lesystème est dénommé filtrage d’accès (”gate-keeping”). Si un produit est destiné à être jeté,le coût de son transport du magasin jusqu’aucentre de traitement des retours avant qu’ilsoit jeté est encouru en pure perte. L’améliora-tion du filtrage d’accès aux flux à rebours peutpermettre de réduire le volume de ces flux, etpartant de réduire sensiblement leur coût.

Afin d’améliorer le filtrage d’accès aux flux àrebours, il est indispensable de fournir auxemployés en première ligne des informationsappropriées sur les produits à admettre dansles flux logistiques à rebours, tâche qui n’estpas aisée. Sa difficulté tient notamment au faitque les employés en première ligne qui pren-nent les décisions d’admission des retourssont pour une bonne partie des personnesinexpérimentées rémunérées au salaire mini-mum. Les détaillants sont réticents à engagerdes dépenses importantes pour la formationde ces employés, car le taux de rotation de cesderniers a tendance à être élevé. Des efforts deformation permettraient d’améliorer à coupsûr le filtrage d’accès aux flux à rebours, maisdes mesures importantes de formation sur unebase permanente ne seraient pas rentables.

S’il n’est pas faisable d’offrir au personnelresponsable de l’admission des retours unniveau élevé de formation, de nombreuxfabricants ont cherché à mettre en place desgarde-fous dans le système de retour en indi-quant aux employés des éléments à suivre lorsdu processus d’admission d’un retour. Ceséléments permettent à l’employé de connaîtreles produits qui peuvent être rendus, le délaiautorisé de retour après l’achat ou encore leséléments qui devraient accompagner l’articleprincipal. Par exemple, dans le cas d’unmagnétoscope, l’employé devrait s’assurerque le magnétoscope lui-même, la télécom-mande et les cordons sont tous présents, et quela télécommande correspond bien à l’appareil.Afin de faciliter aux détaillants le traitementdes retours, un fabricant bien intentionné peutmettre au point un classeur contenant unefiche synthétique sur chacun des éléments quidevraient être présents pour chacun de sesproduits.

Malheureusement, ces éléments mis au pointavec grand soin deviennent souvent obsolètesjuste quelques mois ou semaines après leurimpression en raison des changements de pro-duits. Le principal inconvénient de ces élé-ments est qu’ils impliquent beaucoup depaperasserie. Prenons l’exemple banal d’unService retour : une demi-douzaine de fabri-cants ou plus lui ont envoyé chacun leurpropre classeur, et lui envoient périodique-ment des mises à jour. En peu de temps, leService retour est submergé d’éléments, etaucun de ses employés ne sait où se trouventl’ensemble des éléments, ni les éléments quisont obsolètes ou qui sont à jour. Plutôt qued’essayer de se retrouver dans cet enche-vêtrement de procédures et de règlements,les employés préfèrent tout simplement lesignorer.

Filtrage d’accès aux flux à rebours surInternet

Pour améliorer le filtrage d’accès aux flux àrebours, certains détaillants investissent dansdes systèmes de filtrage d’accès. Une solutionqui semble prometteuse consiste en une pageweb sur l’Internet ou sur un intranet qui guidel’employé dans la procédure de retour pourchaque produit. Lorsqu’un client vient rendreun article, l’employé balaie le code à barresUPC sur l’article. L’ordinateur demande alorsautomatiquement au système informatique dufabricant la procédure de retour pour ce pro-duit particulier. Puis, une page web apparaîtsur l’écran de l’employé afin de le guider dansla procédure de retour pour ce produit.

Si l’on reprend l’exemple du magnétoscope,une fois que l’employé a balayé le code UPCde l’article, apparaît sur son écran une pageweb qui présente une image et une brève des-cription du produit. Il est demandé à l’em-ployé si l’appareil qu’il a en main correspondau modèle présenté à l’écran. Si tel n’est pas lecas, l’employé peut choisir le modèle corres-pondant sur un menu. La page peut aussiinclure une image de tous les éléments quidevraient accompagner l’appareil, à savoir latélécommande, les cordons et le mode d’em-ploi. A côté de chaque élément, il peut y avoirune case, que l’employé cochera si l’élémentest présent.

Les détaillants et les fabricants interrogésdans le cadre de la présente étude ont fait état àmaintes reprises d’un problème, à savoir queles employés n’ont pas pleinement consciencede l’importance de la présence des accessoireset autres éléments. En effet, certains fabri-cants n’accepteront pas le retour d’un article

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si certains éléments essentiels manquent, oun’accorderont alors qu’un crédit partiel audétaillant. Il se peut que ce dernier ait rem-boursé intégralement au client le prix d’unmagnétoscope rendu, mais qu’il ne reçoive enfin de compte du distributeur qu’un crédit de50 % du prix parce qu’il manquait la télécom-mande, par exemple.

C’est la raison pour laquelle tant les fabricantsque les détaillants ont fait part de leur souhaitd’informer, autant que possible, les employésdu coût facturé au magasin pour l’absence decertaines pièces. Comme nous l’avons expli-qué plus haut, il n’est malheureusement paspossible de tenir à jour les systèmes de filtragede retours basés sur le papier pour chaque pro-duit de chaque distributeur proposé à la vente.Par contre, il est possible de mettre à jour rapi-dement les matériaux dans le cas d’un sys-tème de filtrage basé sur un web.

Par exemple, la page web pourrait inclure, àcôté des images de la télécommande et descordons du magnétoscope, le coût qui seraitfacturé au détaillant s’il manquait chacun deces éléments. Cela ferait prendre conscience àl’employé de l’importance de la présence dechacune de ces pièces. Le coût facturé pourcertaines pièces peut être supérieur à celuifacturé pour d’autres ; il est possible qu’unetélécommande égarée coûte 5 USD au détail-lant, et qu’un cordon égaré ne coûte rien. Lapage web pourrait même calculer le rembour-sement auquel aurait droit un client en fonc-tion des éléments que l’employé a vérifiés.

Outre le coût facturé pour les éléments requispar le distributeur, le détaillant peut imposerdes pénalités supplémentaires pour les autreséléments. L’emballage, par exemple, est trèsimportant pour la protection des produits lorsde leur acheminement dans les flux à rebours.Le détaillant peut imposer une pénalité sup-plémentaire pour emballage manquant afin decouvrir les dommages susceptibles d’être cau-sés à l’article en raison de l’absence d’embal-lage.

Échange de données informatisées

L’échange de données informatisées (EDI) estégalement une technologie importante. Sil’EDI n’est pas nouveau, la plupart des entre-prises ayant participé à l’étude ne l’ont pasencore totalement adopté. Certes, de nom-breux processus peuvent être automatisés ausein d’une organisation, mais il est difficile demobiliser les ressources nécessaires pourmettre en place l’ensemble des transactionsd’EDI dont une entreprise pourrait souhaiter

disposer. De toute évidence, pour la plupartdes entreprises, la logistique à rebours ne faitpas partie des priorités en termes d’adoption etde mise en place d’outils.

L’ensemble de 180 transactions d’EDI a étéconçu pour automatiser le traitement desretours6. Malheureusement, aucune des nom-breuses entreprises avec lesquelles l’équipede recherche s’est entretenu n’avait adopté cetoutil.

Le filtrage d’accès aux flux à rebours surInternet permet d’améliorer le systèmereverse logistics d’un autre point de vue, àsavoir qu’il fournit aux détaillants un outil detraitement des retours, voire même au distri-buteur des données sur les produits qui entrentdans les flux à rebours et lui parviendrontéventuellement sous peu.

Enregistrement au point de vente

Dans certains cas, les fabricants sont disposésà accepter les retours des clients pendant unepériode de temps limitée après l’achat initial.Si un détaillant rend un produit au fabricantaprès l’expiration de ce délai, le fabricant nelui accordera pas de crédit. Dans ce cas defigure, le détaillant doit connaître la dateexacte de l’achat du produit.

Une technologie peut fournir cette informa-tion au détaillant, à savoir l’enregistrement aupoint de vente : il suffit au détaillant de balayerpar un lecteur optique et d’enregistrer ainsi lenuméro de série du produit au moment de lavente. Les chercheurs ont découvert l’exis-tence d’un système de ce type lors de la phasede collecte de données. Dans ce système, ledétaillant envoie par voie électronique le nu-méro de série et la date de la vente au fabri-cant. Le fabricant archive le numéro de série,la date de la vente et le nom du magasin qui avendu le produit. Lorsqu’un client tente derendre un produit par la suite, le détaillantconsulte le fabricant pour savoir si le produitest toujours sous garantie.

Si un système de retour basé sur un web ana-logue à celui décrit plus haut est mis en place,on pourrait inclure cette fonction dans la pageweb. Dès que l’employé balaie le code UPCdu produit, apparaît une page web qui luidemande de balayer le numéro de série de l’ar-ticle. Ensuite, la page web accède à la base dedonnées et dit à l’employé si le produit a étéacheté dans ce magasin et s’il peut en principeaccepter le retour de l’article.

Un tel système permet d’éliminer pratique-ment les retours indus. Dans le cas décrit, le

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6 - Rogers et Tibben-Lembke,“Appendix D: EDI 180Transaction Set”.

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fabricant verse au détaillant 0,5 USD pourchaque produit enregistré. De toute évidence,ce système a un coût pour le fabricant : outre lecoût de l’enregistrement des produits, le fabri-cant doit prendre en charge le coût élevé dudéveloppement et de la mise en place d’un telsystème.

En dépit du coût d’un tel système, il peut géné-rer des retombées substantielles pour certainsproduits. Les avantages seront d’autant plusimportants qu’il s’agit de produits de valeurélevée à cycle de vie court. Le fait qu’un pro-duit ait un cycle de vie court peut inciterdavantage le client à essayer de le rendreau-delà de la période autorisée de retour(période de garantie). Lorsqu’une nouvelleversion d’un produit sort sur le marché, denombreux clients veulent rendre l’ancienneversion afin d’obtenir la nouvelle. S’il s’estécoulé trop de temps depuis l’achat pour quele fabricant autorise le retour, certains clientsessaieront d’abuser le système de retour. Plusfréquente est la sortie de nouvelles versions duproduit, et plus les clients sont enclins à abuserle système. De même, plus élevée est la valeurdu produit, et plus les clients sont enclins àabuser le système.

Lutter contre les retours abusifs

L’enregistrement au point de vente est l’illus-tration d’une technologie dont l’utilisationpourrait se répandre dans le futur, sachant quedétaillants et fabricants se donnent la mainpour lutter contre les retours abusifs. Il est évi-dent que le retour abusif de produits par lesconsommateurs cause un préjudice tant auxfabricants qu’aux détaillants. Même si lesfabricants et les détaillants ont souvent desintérêts divergents sur de nombreuses ques-tions, la lutte contre les retours abusifs est undomaine dans lequel les deux parties peuvents’entendre pour coopérer.

Identification par radiofréquence

Déterminer la position et la destination de pro-duits dans la chaîne logistique à rebours peutexiger beaucoup de temps. De nombreux pro-duits sont rendus sans l’emballage original ouavec un emballage endommagé. Dans ces cas,il est très difficile d’utiliser un lecteur de codesà barres pour suivre le mouvement des pro-duits dans les flux logistiques à rebours.

L’identification par radiofréquence (ci-après« IRF ») est une technologie relativement nou-velle qui peut s’avérer pratique dans ces situa-tions. Les méthodes usuelles d’identificationdes produits sont passives. Pour déterminer laprésence d’un article particulier, le seul

moyen est de se rendre à l’entrepôt pour véri-fier si l’article s’y trouve. Par contre, l’IRF estune forme d’identification plus active ; elleconsiste à incorporer à chaque produit unémetteur radio de très petite dimension et defaible puissance qui émet un signal très faible.Malgré sa taille modeste, la mar-que d’IRFcontient une pile qui peut durer plusieurs an-nées. Le signal est assez fort pour pouvoir êtrecapté par les récepteurs disposés dans l’entre-pôt. Chaque article peut émettre un signal dif-férent. On peut fabriquer jusqu’à 10 millionsd’articles (micro-ordinateurs, par exemple) etincorporer une marque d’IRF différente danschacun qui émettrait ainsi un signal propre.

On peut utiliser l’IRF de deux manières : lamanière passive et la manière active. Dansl’IRF passive, une « sentinelle » disposée àl’entrée de l’entrepôt enregistre l’identité dechaque produit lorsqu’il entre dans l’entrepôt,puis lorsqu’il en sort. En toute logique, toutélément qui est entré dans l’entrepôt mais quin’en est pas sorti doit toujours s’y trouver.Dans l’IRF active, des récepteurs sont dispo-sés à plusieurs endroits dans l’entrepôt. Pourdéterminer si un article particulier se trouvedans l’entrepôt, les récepteurs recherchent lesignal dudit article. Si ce signal est capté parplus d’un récepteur, on peut alors déterminer,par triangulation, l’endroit de l’entrepôt où setrouve l’article.

Par exemple, l’utilisation de l’IRF pour aider àla gestion du retour des micro-ordinateurspourrait s’avérer judicieuse. Le système quiconsisterait à placer une marque d’IRF surl’appareil lors de son montage permettraitd’éviter les erreurs inhérentes à la chaîne desdocuments et aiderait à la gestion du cycle devie des micro-ordinateurs.

Une entreprise interrogée dans le cadre del’étude avait mis au point un système d’IRF àmême de lire simultanément les différentesmarques passives émettant depuis les diffé-rents cartons contenus sur une palette, sansque ce balayage ne nécessite le déballage desarticles. Pour certains produits, la marqued’IRF pourrait être placée sur la carte de cir-cuit ou encastrée dans le boîtier plastique (mi-cro-ordinateur, par exemple).

L’IRF peut aider les opérations reverse logis-tics de plusieurs manières. Comme nousl’avons souligné plus tôt, elle peut être utilepour suivre la trace d’articles dans un entre-pôt. De plus, elle peut servir au filtrage del’accès aux flux à rebours. Enfin, elle peut êtreutilisée pour enregistrer l’identité des articleslors de leur vente, informations qui peuvent

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servir ultérieurement à déterminer ceux dontle retour peut être accepté.

Codes à barres à deux dimensions

Le codage à barres à deux dimensions est uneautre technologie qui s’annonce prometteusepour les opérations reverse logistics. Les sys-tèmes de codes à barres à deux dimensionstels que PDF417, MaxiCode ou Aztec permet-tent à l’utilisateur d’incorporer beaucoup plusd’informations dans un code à barres que lessystèmes à une dimension tels que l’UPC. Lessystèmes à une dimension contiennent unchiffre ou un code que l’ordinateur doit tra-duire et faire correspondre à des informationsdéjà présentes dans ses fichiers. Avec les sys-tèmes de codes à barres à deux dimensions, lecode à barres peut contenir non seulement uncode, mais en plus une description et d’autrescommentaires relativement longs.

Les transactions et les processus de reverselogistics se caractérisant généralement par desexceptions, il est possible que les informa-tions nécessaires pour actualiser les fichiersde l’ordinateur excèdent la capacité d’un codeà barres à une dimension. Ce handicap dessystèmes de codes à barres à une dimensionpourrait signifier que, pour les applications re-verse logistics, les nouvelles technologies– telles que l’IRF ou les codes à barres à deuxdimensions – deviendront la règle plutôt quel’exception.

Collecte de données

Grâce à l’utilisation de technologies amélio-rées de suivi des articles, telles que celles quenous venons d’examiner, et de systèmes d’in-formation améliorés pour le suivi des flux deces articles, les entreprises disposeront debeaucoup plus d’informations sur leurs pro-cessus reverse logistics. Et le défi sera alorspour elles de savoir utiliser ces informationsde manière efficace à leur profit.

Dans le cadre de l’étude, les chercheurs ontobservé plusieurs exemples d’entreprises quiont employé des systèmes d’informationdédiés à la reverse logistics pour contrôler lesproblèmes de qualité de leurs produits. En sur-veillant le nombre de retours pour un produit,une entreprise peut mettre à jour une anomalieet prendre les mesures appropriées. Dans unde ces exemples, le prestataire tiers en chargede la gestion des retours pour le compte d’undétaillant avait remarqué qu’un nombre anor-malement élevé d’articles en provenance d’undistributeur étaient rendus pour cause dedéfauts. Le prestataire tiers a alors recomman-dé au fabricant de procéder à une enquête, qui

a permis de découvrir un vice de conception.Le fabricant a pu ainsi remédier au problème,et les taux de retours ont diminué par la suite.Sans un système efficace de collecte et d’ana-lyse de données, le problème aurait bien pupasser inaperçu.

Conception adaptée à la reverse logistics

Certaines entreprises se sont employé àconcevoir des produits plus faciles à fabriquer– Conception adaptée à la fabrication(”Design For Manufacture “ ou “DFM” chezles anglo-saxons). D’autres ont conçu des pro-duits plus faciles à traiter par la chaîne logis-tique – Conception adaptée à la gestion de lachaîne logistique (”Design For Supply ChainManagement” ou “DFSCM”). Dans unproche avenir, il est possible que davantaged’entreprises commencent à réfléchir à laconception de produits dont la gestion reverselogistics serait plus facile. Nous suggérons unterme pour cette idée : la Conception adaptée àla reverse logistics (”Design For ReverseLogistics” ou “DFRL”).

Dans certains cas, les entreprises ont tenucompte de besoins reverse logistics dans laconception du produit (par exemple, embal-lage conçu pour permettre une lecture optiquedu numéro de série sur le point de vente). Laplupart des entreprises de vente directe auxconsommateurs fournissent avec le produitune étiquette comportant leur adresse afin queles clients puissent retourner facilement leproduit si nécessaire. Certaines entreprisesencouragent les consommateurs à rendre leproduit avec son emballage, ou encore àrendre les produits usagés (cartouches d’encrede photocopieuse ou d’imprimante, parexemple) lorsqu’ils achètent des produitsneufs. La Conception adaptée à la reverselogistics consiste à tenir compte des besoinsreverse logistics dans la conception et l’em-ballage du produit, autrement dit à intégrerbesoins reverse logistics et besoins de protec-tion de l’environnement, d’une part, et produitet chaîne reverse logistics, d’autre part.

Remboursement partiel

Une fois qu’un système d’information dédiéau retour est en place, une entreprise peutdéterminer de manière plus précise le montantdu crédit qu’un client devrait recevoir. Au lieud’accorder un remboursement intégral auclient et de prendre sur lui le coût de la télé-commande manquante, par exemple, le détail-lant peut choisir de n’accorder au client qu’unremboursement partiel, lui faisant ainsi assu-mer le coût de l’élément manquant. Le détail-

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lant peut même aller plus loin et ajouter à cecoût une pénalité pour retour incomplet.

Dans certains cas, si le client a égaré un élé-ment accompagnant l’article principal, il sepeut que l’employé ait pour instruction derefuser le retour. Le remboursement partielconstituerait un juste milieu par rapport à lapolitique qui forcerait l’employé à opérer unchoix entre l’acceptation ou le refus d’un rem-boursement intégral de l’article. En effet, sil’employé refuse d’accepter le retour de l’ar-ticle parce que le client a, dans la réalité, égaréun accessoire, le client peut en être contrarié ;il vaut peut-être mieux alors donner à l’em-ployé l’option supplémentaire d’accorder auclient un remboursement partiel.

Le remboursement partiel incitera fortementle client à s’assurer de l’état complet du pro-duit avant de le rendre, et aura ainsi pour effetde réduire le coût des retours pour le détail-lant.

Indépendamment de la mise en place chezun détaillant d’un système d’informationmoderne, l’amélioration des moyens techno-logiques mis à la disposition des employésresponsables du filtrage d’accès aux flux àrebours sera un facteur important pour laréduction des coûts de reverse logistics.

Gestion des flux logistiquesà rebours

Une fois que des produits ont été admis dans lesystème reverse logistics, les entreprises doi-vent gérer les flux de ces produits afin deminimiser leur impact sur les profits.

Standardisation des processus

L’une des difficultés les plus courantes quel’équipe de recherche a observée au niveaudes systèmes reverse logistics actuels est lemanque de standardisation des processus ausein des entreprises. Si les processus ne sontpas standardisés, il est très difficile pour lesemployés de l’organisation d’échanger desidées sur les moyens de résoudre les problè-mes reverse logistics.

La mise en place de processus reverse logis-tics efficaces commence au point de vente audétail par la simplification et la standardisa-tion des politiques et des procédures enmatière de retour. Ces politiques et procéduressimplifiées devraient se traduire par unebaisse du temps consacré au traitement desretours, ainsi que par des décisions de meil-leure qualité.

Pour des raisons diverses, la reverse logisticsest souvent perçue comme un domaine depriorité secondaire dans de nombreuses entre-prises. Dans le futur, les entreprises prendrontde plus en plus conscience de l’importancestratégique de la reverse logistics, ce quidevrait se traduire par l’affectation de ressour-ces accrues à la gestion des flux logistiques àrebours.

Un grand nombre d’entreprises ont découvertque les avantages majeurs de la certificationISO 9000 de leur canal « avant » découlent dela standardisation de l’ensemble de leurs pro-cessus. Même s’il se peut que de nombreusesentreprises ne choisissent pas d’obtenir unecertification ISO pour leurs processus reverselogistics, compte tenu de l’accroissement desressources disponibles, elles apprécieront lesavantages de la standardisation.

Centres de centralisation des retours

L’une des conclusions de l’étude est que lesrépondants qui avaient mis en place un centrede centralisation des retours (« CCR »ci-après) étaient d’accord sur le fait que l’uti-lisation d’un CCR distinct du centre de distri-bution « avant » (« CD » ci-après) présentaitde nombreux avantages. Dans un CCR, lesemployés traitent un volume nettement plusimportant de produits qu’ils ne pourraientjamais le faire dans un magasin de vente audétail. Cela leur permet de développer descompétences pointues, qui peuvent s’avérertrès profitables à l’entreprise.

De plus, l’utilisation d’un CCR distinct per-met au personnel affecté au traitement desretours de se consacrer exclusivement à cettetâche. Demander à un employé de « servirdeux maîtres » en lui confiant à la fois la distri-bution « avant » et la distribution à rebours nesemble pas donner de bons résultats. Le pro-blème ne réside pas dans la séparation phy-sique du CCR et des CD « avant », mais dansla séparation du contrôle.

Dans le futur, les entreprises continuerontà pratiquer la séparation, avantageuse, ducontrôle des canaux « avant » et à rebours.Cependant, elles apprendront vraisemblable-ment à traiter les retours dans un CCR qui setrouve physiquement peut-être dans le mêmesite qu’un CD « avant ». Cela leur permettrad’installer le CCR dans le meilleur emplace-ment géographique, indépendamment de laprésence ou de l’absence d’un CD.

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Prestataires tiers

Dans les années 80 et 90, l’une des tendancesmajeures dans le domaine de la logistique aété la reconnaissance de la logistique commeune fonction en soi. Ayant analysé leurscompétences de base, de nombreuses entre-prises se sont rendu compte qu’elles ne possé-daient pas le savoir-faire, ni les compétences,ni l’expérience pour assumer certaines fonc-tions internes. Dans le futur, de nombreusesentreprises estimeront peut-être que la reverselogistics rentre dans la catégorie des activitésqu’il est préférable d’externaliser.

Les entreprises se rendront compte que le trai-tement efficace des flux à rebours et la maxi-misation des revenus tirés des marchéssecondaires nécessitent des compétences spé-cialisées. De nombreuses entreprises, quin’auraient jamais envisagé d’externaliser leurdistribution il y a trente ans de cela, estimentaujourd’hui qu’elles peuvent réduire sensible-ment leurs coûts en recourant à des prestatai-res de logistique. Dans le futur, il est possiblequ’une bonne partie de ces mêmes entreprisesparviennent à des conclusions similaires en cequi concerne les activités reverse logistics.

Marchés secondaires

Le terme de « marché secondaire » est utilisépour désigner l’ensemble des intermédiaires,distributeurs et détaillants spécialisés dans lesproduits qui ont déjà été proposés à la vente audétail une fois. Pour une bonne partie, ces pro-duits ont été retirés des magasins de vente audétail parce qu’ils ne se vendaient pas bien, ouont été vendus mais retournés. Plutôt que dejeter ces produits, on les vend généralement àl’une des nombreuses entreprises présentessur le marché secondaire7.

Ce recyclage de produits est souvent désignésous le terme de recouvrement d’investisse-ment ou d’actifs. Le recouvrement d’actifs estdevenu une source de revenus beaucoup plusimportante pour les entreprises qui écoulentdes produits sur le marché secondaire. Lesconsommateurs américains y achètent beau-coup plus volontiers des articles que dans lepassé. En raison de ce phénomène, les entre-prises qui vendent sur le marché secondaire demanière organisée et efficace sont en mesurede récupérer une plus grande valeur de l’actifinitial. Il y a quelques années de cela, unimportant détaillant s’est lancé dans lacommercialisation de produits en provenancedes flux à rebours et a constaté qu’à la fin del’année elle avait tiré 25 % de son bénéfice netdu recouvrement d’actifs.

Dans le futur, les entreprises vont probable-ment coopérer beaucoup plus étroitementavec leurs partenaires sur le marché secon-daire. Le paradigme logistique actuel del’acheminement des matériaux de l’usine aucentre de distribution de produits finis, puis aumagasin, s’élargira pour inclure l’écoulementdes stocks de produits invendus ou retournéssur le marché secondaire.

Ces 10 dernières années, les magasins d’usinesont passés d’une modeste quote-part du totaldes ventes à une quote-part nettement supé-rieure. Ils avaient été conçus à l’origine pourécouler les marchandises invendues ouretournées. La croissance du segment desmagasins d’usine a exigé de plus grandesquantités de produits pour assurer son appro-visionnement à un niveau suffisant. De nom-breuses entreprises ont saisi cette opportunitéen commençant à fabriquer des produits spé-cialement destinés au marché des magasinsd’usine.

Il est difficile de prédire quel sera l’avenir dumarché secondaire. Toutes les indicationslaissent à penser qu’il continuera à croître. Aufur et à mesure de cette croissance, certainsfabricants prendront des mesures pour mieuxmaîtriser le sort de leurs produits après leursortie du canal « A » .

Marchés secondaires sur Internet

L’utilisation de l’Internet fait partie des modesd’écoulement de marchandises qui ont connule développement le plus spectaculaire. Ellereste quelque peu limitée à ce jour, mais se dé-veloppe rapidement, et il semble qu’elle de-viendra dans le futur un mécanisme importantpour l’écoulement d’articles en provenancedes flux logistiques à rebours. Une étude ré-cente qui a utilisé un moteur de recherche surInternet a identifié plus de 1 500 sites de venteaux enchères, et plus de 2,5 millions de pagesweb incluant le terme anglais « auction »(c.-à-d. vente aux enchères). Même si ces chif-fres ne constituent pas des estimations scienti-fiques, ils indiquent clairement que le web esttrès utilisé pour la mise aux enchères d’arti-cles.

L’Internet permet d’établir un lien direct avecles consommateurs. En éliminant plusieursétapes intermédiaires, une chaîne logistiquebasée sur l’Internet peut être plus efficacequ’un canal classique, ce qui peut être trèsutile lorsqu’on vend des articles en prove-nance de flux logistiques à rebours.

Certains produits sont vendus aux enchèressur le marché secondaire par voie électro-

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7 - Rogers et Tibben-Lembke,“Chapter 3: Disposition and theSecondary Market”.

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nique, c’est-à-dire sur l’Internet. Une venteaux enchères sur l’Internet permet auxconsommateurs de faire une offre pour desarticles jusqu’à un temps de clôture fixé àl’avance. Les sites Internet tels que ou permet-tent de liquider des marchandises tout enmaximisant les revenus. Généralement, cessites Internet proposent quelques unités d’unproduit et permettent aux consommateurs defaire une offre d’achat. Plutôt que de vendreces articles à un prix déterminé, on les vendaux enchères, ce qui signifie que les clientsferont monter le prix jusqu’à un point d’équi-libre entre la demande et l’offre. Le fait deretenir une certaine quantité du produit inciteles consommateurs à faire monter le prix pourle nombre limité d’unités qui est disponiblepour les enchères ce jour là. Cela permet auvendeur de maximiser les revenus tirés d’unproduit qui, autrefois, aurait pu être liquidéavec une perte substantielle.

Les revendeurs du marché secondaire s’ap-provisionnent également dans le cadre de ven-tes aux enchères à accès restreint. Un courrierélectronique est envoyé à un groupe de reven-deurs du marché secondaire, message quiinclut généralement un lien avec un fichiercontenant la liste des articles proposés. Il estainsi demandé aux revendeurs de faire uneoffre pour les marchandises figurant sur laditeliste. Les offres doivent être soumises dans undélai préétabli. Ce mécanisme a accru l’effica-cité du recouvrement d’actifs.

L’Internet constitue pour l’entreprise unmoyen-test rapide pour savoir s’il existe unmarché rentable pour le produit. Si le produitne rencontre pas de succès lors de la vente auxenchères sur l’Internet, alors l’entreprisedevrait peut-être envisager une autre optiond’écoulement.

L’un des aspects contraignants des ventes auxenchères sur l’Internet est que seul lesconsommateurs qui ont accès à l’Internet peu-vent les utiliser. Au fur et à mesure du déve-loppement de l’utilisation de l’Internet, ceproblème ira en s’atténuant. Actuellement, lamajeure partie des articles du marché secon-daire proposés via l’Internet sont des produitsinformatiques ou connexes. Par ailleurs, onnote une certaine appréhension à l’égard desventes aux enchères, due au fait que leur utili-sation peut porter atteinte à l’image des mar-ques.

Retour zéro

En guise de solution de gestion des flux àrebours, plusieurs entreprises expérimentent

des programmes de retour zéro. Dans un pro-gramme de retour zéro, le fabricant ne reprendjamais un article une fois celui vendu. Ledétaillant assume la responsabilité de l’écou-lement du produit conformément aux stipula-tions du fabricant. En échange, le détaillantreçoit une somme destinée à couvrir le coûtdes articles qui lui sont rendus et de l’écoule-ment de ces articles. En transférant les besoinsde gestion des retours, le fabricant escomptedes économies de coûts suffisantes pour plusque compenser la somme supplémentaireversée au détaillant.

Dans le cadre de certains programmes deretour zéro, le magasin reçoit toujours un cré-dit équivalent à un certain pourcentage desventes, indépendamment du taux de retoureffectif. Si le crédit est de 6 %, et si les retourseffectifs n’atteignent que 2 %, le détaillant estgagnant. Dans un cas de figure opposé où lecrédit est fixé à 2 % et où les retours effectifss’élèvent à 6 %, le détaillant est perdant. Dansces programmes, l’idée est quand même defixer le crédit à un niveau suffisant pour excé-der le niveau moyen de retour enregistré par ledétaillant. Cependant, étant donné le pouvoirdes grandes chaînes de vente au détail, il peuts’avérer difficile pour le fabricant de faire pré-valoir son point de vue par rapport à celui dudétaillant dans cette situation.

Malheureusement, étant donné le laxismeavec lequel de nombreuses entreprises suiventleurs retours, les programmes de retour zérone font pas l’objet d’un contrôle suffisant.Certains fabricants accusent les détaillants de« vouloir le beurre et l’argent du beurre », enprenant de l’argent du fabricant pour détruirele produit et en écoulant ensuite tranquille-ment le produit par un circuit dérobé à unintervenant du marché secondaire.

Amélioration des processus

En cherchant à améliorer les processusreverse logistics, une entreprise peut êtreconfrontée à une multiplicité de pratiques par-ticulières. La standardisation des processusest utile à cet égard. La reverse logistics ayanttendance à se caractériser par des exceptions,souvent les processus ne suivent pas une règlegénérale et sont propres à chaque lieu ou ges-tionnaire. La standardisation des processuspeut aplanir les problèmes et permettre demieux rentabiliser le recouvrement d’actifs.

De même, l’équipe de recherche a observéque la prise en compte du cycle de vie des pro-duits permet d’améliorer les processusreverse logistics. Les possibilités d’écoule-

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ment sont susceptibles de varier en fonctiondu stade où le produit se trouve dans son cyclede vie. Les produits qui se situent au début deleur cycle de vie peuvent être plus faciles àrendre au fabricant et s’écouler à un prix plusélevé sur le marché secondaire.

En fonction du cycle de vie des produits d’unfabricant, et de la valeur de ces produits,les entreprises découvriront que différentescombinaisons des stratégies examinées dansle présent document seront nécessaires pourtraiter de manière efficace et rationnelle leursretours.

Pour les produits de valeur élevée et à cycle devie court, tels que les micro-ordinateurs, lesjeux vidéo ou les camescopes par exemple, unsystème d’enregistrement au point de ventepeut constituer pour les détaillants et les fabri-cants un moyen très efficace pour réduire lecoût des retours abusifs. Cependant, le coût dusystème d’enregistrement au point de ventepeut rendre l’adoption de ce système dissua-sive pour de nombreux articles. Par exemple,le coût du suivi d’une unité d’un produit àfaible coût, tel qu’une paire de jeans, interdi-rait probablement l’utilisation du système enquestion.

Résumé et conclusions

De toute évidence, la reverse logistics occupeune place de plus en plus importante. Lesentreprises sont en train de se rendre comptequ’une bonne gestion de la reverse logisticspeut contribuer à la fois à accroître leurs reve-nus et à réduire leurs coûts d’exploitation.Lorsqu’une entreprise consacre des investis-sements au développement d’outils tels que lagestion du cycle de vie des produits et les tech-nologies améliorées de filtrage d’accès auxflux logistiques à rebours, ces outils produi-sent généralement un bon rendement.

Si la majorité des gestionnaires ne se préoccu-pent pas encore beaucoup des flux à reboursde produits, ils sont de plus en plus nombreux

à commencer à se rendre compte que lareverse logistics est un volet important et sou-vent stratégique de leur gestion. Dans le cadrede cette étude, l’équipe de recherche a observéde nombreux exemples d’incidence significa-tive de la gestion reverse logistics sur la renta-bilité. En effet, des gestionnaires brillants quis’emploient à améliorer les processus reverselogistics de leur entreprise font actuellementréaliser des économies et des profits substan-tiels à celle-ci. De toute évidence, même si onla qualifie parfois d’un ton dérisoire de « gainsde chiffonnier ferrailleur », une valeur nonnégligeable peut être récupérée de manièreavantageuse des produits sur le marché secon-daire. Certes, le traitement et l’écoulementefficaces des produits rendus ou invendus nedeviendront probablement jamais la prioritéde la gestion d’une entreprise, mais ils peu-vent lui donner un avantage compétitif.

Les auteurs

Dale Rogers PhD est le directeur du Center for LogisticsManagement et professeur de Gestion de la chaîne logis-tique à l’University of Nevada. Il est titulaire d’un docto-rat, d’une maîtrise de gestion et d’une licence de laMichigan State University. M. Rogers est l’auteur de plu-sieurs articles publiés dans des revues logistiques et lecoauteur de trois ouvrages sur la logistique, notammentGoing Backwards: Reverse Logistics Trends and Practi-ces, écrit avec Ron Tibben-Lembke.

Ron Tibben-Lembke est professeur assistant de Gestionde la chaîne logistique à l’University of Nevada. Il esttitulaire d’un doctorat et d’une maîtrise de sciences enIngénierie industrielle de la Northwestern University,ainsi que d’un diplôme en Mathématiques et informatiquedu St. Olaf College (Northfield, Minnesota). M. Tibben-Lembke, qui a collaboré avec plusieurs entreprises dansle domaine de la conception de réseaux de distribution,est le coauteur de Going Backwards: Reverse LogisticsTrends and Practices, écrit avec Dale Rogers.Dr. Ronald S. Tibben-Lembke(775) 784-6993 x318Fax : (775) [email protected]

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