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Le 30/08/2005 par Jean-Louis DUBRANA (Directeur Général Délégué) LES CASINOS en France : L'ÉTAT CROUPIER ? En préliminaire, je vais vous brosser un petit historique sur les jeux, notamment les jeux en France. On peut considérer que le jeu est intimement lié à la civilisation de l'homme puisque, parmi tous les vestiges archéologiques, qu'ils soient égyptiens, étrusques, romains ou même chinois, on trouve des instruments servant aux jeux. Bien sûr, le jeu est lié au désir de l'homme de se rapprocher de l'avenir et était vraisemblablement étroitement lié, autant qu'on puisse le savoir, à l'art de la divination. C'est ainsi que les Grecs pratiquaient la "pessomancie", c'est-à-dire le lancer de coquillages ou de pièces à des fins de divination. Partant de là, ils ont commencé à lancer des paris. C'est ainsi qu'on peut penser que les dés à jouer, comme ceux qu'on trouve partout maintenant, seraient nés de cette pratique, et notamment de la pratique qui consiste à lancer des astragales d'animaux, qu'on a pensé attribuer, à la fois, à la divination et aux jeux de hasard. Autre grand support des jeux, les cartes à jouer dont historiquement, on ne sait pas trop

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Le 30/08/2005 par Jean-Louis DUBRANA (Directeur Général Délégué) 

LES CASINOS en France : L'ÉTAT CROUPIER ? 

En préliminaire, je vais vous brosser un petit historique sur les jeux, notamment les jeux en France.

On peut considérer que le jeu est intimement lié à la civilisation de l'homme puisque, parmi tous les vestiges archéologiques, qu'ils soient égyptiens, étrusques, romains ou même chinois, on trouve des instruments servant aux jeux. Bien sûr, le jeu est lié au désir de l'homme de se rapprocher de l'avenir et était vraisemblablement étroitement lié, autant qu'on puisse le savoir, à l'art de la divination. C'est ainsi que les Grecs pratiquaient la "pessomancie", c'est-à-dire le lancer de coquillages ou de pièces à des fins de divination. Partant de là, ils ont commencé à lancer des paris. C'est ainsi qu'on peut penser que les dés à jouer, comme ceux qu'on trouve partout maintenant, seraient nés de cette pratique, et notamment de la pratique qui consiste à lancer des astragales d'animaux, qu'on a pensé attribuer, à la fois, à la divination et aux jeux de hasard.

Autre grand support des jeux, les cartes à jouer dont historiquement, on ne sait pas trop situer l'origine. On pense qu'elles viennent de Chine ou de Corée. Ce qu'on sait, par contre, avec certitude, c'est qu'elles sont arrivées en Europe via l'Italie, peut-être avec Marco Polo ? Le sait-on ? En tout état de cause, elles ont connu un grand succès, chez nous, dès le  XIVème  siècle. On peut affirmer que les dés et les cartes ont été vraiment les premiers supports du jeu dans notre fin de moyen-âge. 

C'est ainsi que beaucoup de tripots ont existé dans toutes les grandes villes et dans toutes les Cours, les grands de ce monde s'adonnant au jeu, tant et si bien que les autorités juridiques et religieuses ont essayé, plus ou moins, de canaliser cette pratique, voire de l'interdire, sans grand succès. Déjà, les Romains avaient

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légiféré dans ce domaine, et pourtant, tout comme les Grecs, ils s'y adonnaient particulièrement. Plus près de nous, c'est vers le XIVème siècle qu'on trouve les premières interdictions de jouer, mais plus on interdisait, plus le jeu se développait. Les rois français se sont trouvés dans une situation telle que certains ont autorisé le jeu à la Cour, mais ne le toléraient pas chez le bas peuple. Alors, de tolérance en interdiction puis, de nouveau de tolérance, on en est arrivé à ce qu'à Paris certains nobles ont obtenu une autorisation d'exploiter de véritables "maisons de jeu". C'est ainsi que Louis de Gesvres, duc et  pair du royaume de l'Ile de France, et le Duc de Carignan obtiennent le privilège pour les jeux de hasard. Les hôtels de ces messieurs furent de véritables tripots. Si on remonte encore plus près de nous, juste avant la Révolution, la maison du Duc d'Orléans,  le fameux "Philippe égalité" était aussi un véritable tripot où les gens de la Convention qui s'étripaient à qui mieux mieux sur les bancs de l'Assemblée, se retrouvaient le soir autour des salles de jeu du Palais Royal. Ceci a obligé les autorités à prendre des dispositions, notamment pour réglementer les pratiques du jeu. 

C'est à cette époque que l'on commence à trouver les premiers vocables qu'on utilise dans les jeux, notamment celui de "croupier". Le croupier aidait le banquier. Il animait les jeux, tandis que le banquier faisait la mise de fond. Le croupier aidait à mettre en ordre les jeux, mais n'avait pas de participation financière. De là est venue la convention de croupier qui subsiste encore en droit des affaires. Le croupier est quelqu'un qui "monte en croupe" mais qui n'a pas de participation financière. On a gardé le vocable juste pour les personnels des maisons de jeux. Et il est encore utilisé aujourd'hui pour désigner les employés des jeux traditionnels.

À la Cour du roi Louis XVI on joue beaucoup, surtout dans le salon de la Reine, et on joue à des jeux qui sont interdits à cause des tricheries nombreuses. Le lieutenant de police Sartine essaiera, plus tard, de mettre fin à ces filouteries en introduisant

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la roulette, appareil permettant, en principe, d’assurer une meilleure sincérité dans la détermination des chances gagnantes.  

 Louis XV  (je reviens en arrière)  avait déjà décidé, plutôt que

d'interdire les jeux, de les utiliser pour en retirer des bénéfices au profit de la ville de Paris et, en particulier, pour les services de police. Ce furent, les premières recettes de contributions sur les jeux.

Parallèlement à cette évolution, au début du XVIIIème siècle, il y eut le développement du thermalisme. Les eaux thermales étaient très courues par les riches étrangers, les nobles etc.… Et, à cette époque, pour occuper ces gens-là on autorisait les jeux de hasard. C'est ainsi que le premier casino en tant que tel à  être autorisé, fut celui de Spa (Station thermale belge). On appelait cela le "wauxhall", une curiosité historique. C'est l'évêque de Liège qui a accordé le "privilège des jeux" pour occuper les riches étrangers pendant la saison des eaux. Il y avait là certaines prescriptions qui perdurent toujours dans certaines stations. C'est ainsi que les commerçants et les habitants du lieu n'avaient pas le droit d'accéder aux jeux, qui étaient réservés aux étrangers à la ville.     

Le vocable CASINO vient de Venise. Les "casinos" y étaient des maisons très mal famées, car les "maisons de jeu" étaient aussi des "maisons de passe". Le vocable a perduré remplaçant l'appellation "maisons de jeu".

Pendant le Directoire, sous l'impulsion de Napoléon, qui n’aimait pas le jeu alors que sa femme le pratiquait avec passion, l’offre de  jeu a été étendue. Il a donc été décidé, malgré l'interdiction générale du code pénal, de faire une dérogation pour les stations balnéaires, climatiques, et pour Paris. 

À Paris, déjà sous l'Ancien Régime, s'était constituée une "ferme" des jeux. Il y avait une quinzaine de maisons de jeu. Les "fermiers" des jeux prélevaient de l'argent sur cette "ferme" et payaient une dîme à l'Etat, qui abondait en partie le budget de la ville de Paris. Par ailleurs les villes d'eaux se sont développées

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petit à petit en Europe, notamment dans les principautés allemandes. Et si on se fie à ce grand joueur devant l'Eternel qu'était Dostoïevski, ces villes d'eaux étaient le rendez-vous de toute la gentry européenne et également de toute la filouterie européenne. 

La "ferme" des jeux a subsisté, à Paris, jusqu'en 1836. A cette époque, Louis-Philippe a décidé de fermer les maisons de jeux de Paris, et en même temps, d'interdire la "roulette" qui était l'un des jeux les plus pratiqués, à cette époque. Donc, tous les gens qui exploitaient les jeux dans ces maisons se sont disséminés dans toute l'Europe. On parle de M. Bénazet qui a créé le casino de Baden-Baden, un magnifique établissement; et surtout, les Frères Blanc, qui étaient encore de petits besogneux du jeu, et qui sont allés créer un très beau casino à Bad Homburg. Ensuite, quand le Prince de Monaco a voulu créer un casino, après des déboires avec un ou deux exploitants, il a confié la gestion de son casino aux frères Blanc. Ce sont eux qui ont favorisé l'essor que l'on connaît à ce fameux casino. 

A l’heure actuelle, la position de  l'Etat français n’a pas évolué et conserve son ambiguïté. D'abord la répression ; le  jeu étant une affaire immorale, doit être réprimé. En même temps, par dérogation, celui-ci est autorisé pour pouvoir  abonder les finances publiques.

 Je vais évoquer maintenant le cadre juridique des jeux de

hasard et des casinos. L'article 410  de l'ancien code pénal interdisait toute forme d'exploitation des jeux de hasard. Mais, en 1907, une loi est sortie pour régulariser, en quelque sorte, les cercles de jeux des villes d'eaux qui fonctionnaient plus ou moins avec une certaine tolérance. Cette loi de 1907 fixe le cadre législatif des casinos, et je vous en donne lecture : "Par dérogation à l'article 410, il pourra être accordé aux casinos des stations balnéaires, thermales ou climatiques, sous quelque nom que ces établissements soient  désignés, l'autorisation temporaire d'ouvrir, au public, des locaux spéciaux, distincts et séparés, où seront pratiqués certains jeux de hasard sous les conditions

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énoncées dans les articles suivants : cette autorisation détermine la durée d'exploitation des jeux. Les stations dans lesquelles la disposition qui précède est appliquée ne pourront en bénéficier que sur avis conforme du conseil municipal. Toute autorisation ne sera accordée par le Ministre de l'Intérieur, qu'après enquête et considération du cahier des charges établi par le conseil municipal et approuvé par le Ministre de l'Intérieur. L’arrêté d'autorisation fixe la durée de la concession, détermine la nature des jeux de hasard autorisés, leur fonctionnement, les mesures de surveillance et de contrôle des agents de l’autorité, les conditions d'admission dans les salles de jeu, les heures d'ouverture et de fermeture, le taux et le mode de perception  du prélèvement prévus à l'article 4. L’autorisation peut être révoquée par le Ministre de l'Intérieur en cas d’inobservation du cahier des charges ou des clauses  de l'arrêté ministériel…" Bon ! Je ne vais pas continuer, mais je veux dire que cette loi a été faite pour régulariser une situation de fait qui existait déjà dans quelques casinos de stations thermales, et elle a permis à l'Etat de réglementer tout ce qu'il souhaitait faire dans ce domaine particulier. 

Un casino, selon l'arrêté du 23 décembre 1959 qui en donne la définition, est un établissement comprenant trois activités distinctes : le spectacle, la restauration et le jeu réunis sous une même direction, sans qu'aucune d'elles ne puisse être affermée. Donc, un casino n'est pas qu'une maison de jeux. On y ajoute des activités d'animation et de restauration. Ainsi, le concessionnaire du casino doit éviter d'être en désaccord avec les municipalités sur les clauses du cahier des charges, et plus particulièrement, pour les obligations d'animation et de spectacle. Le casino est considéré au plan juridique comme un service public délégué. Ceci peut paraître un peu curieux, mais c’est le Conseil d'Etat qui a déterminé que les casinos étaient une délégation de service public. Cela signifie pour les Mairies qui décident de mettre en concession un casino, l’obligation d’appliquer la loi Sapin de mise en  concurrence des marchés publics. Donc, c'est un contrat de droit public qui, curieusement, présente le jeu comme un

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accessoire alors que c'est l'activité principale des casinos, les autres activités étant, par nature, déficitaires. "Le casino est un établissement comportant trois activités, sans qu'aucune d'elles ne puisse être affermée" signifie qu'on ne peut pas déléguer, par exemple, la restauration ou le spectacle à une société tierce. C'est formellement interdit par la réglementation. 

Donc, le texte de base est constitué par la loi de 1907. Ajoutons deux autres textes fondamentaux que sont le décret du 22 décembre 1959 et l'arrêté du 23 décembre 1959 :  "Les casinos ne peuvent être installés que dans des stations thermales, climatiques ou balnéaires"  mais, depuis 1988 est sortie une loi qui étend ce privilège aux villes ou agglomérations de plus de 50.000 habitants qui ont à charge un certain nombre d'activités culturelles et sociales comme conservatoire, centre culturel, théâtre etc. Cette nouvelle loi qu'on appelle "amendement Chaban Delmas" parce qu'il fut proposé à l'Assemblée Nationale par M. Chaban Delmas, permet à de grandes métropoles, d'abord Lyon, puis Bordeaux, on parle maintenant de Toulouse, d'obtenir le privilège d'avoir des casinos. 

Faisons un aparté sur le cas du casino d'Enghien. Tout le monde pense que c'est Napoléon qui a interdit les jeux à moins de 100 kms de Paris, alors qu'on doit cela à une loi de 1920 votée au Parlement, par ce qu'on a appelé le "cartel des gauches" qui, pour protéger le prolétariat parisien des jeux, et notamment des petits chevaux (jeu comportant une machinerie figurant une course avec neuf chevaux, jeu d'ailleurs remplacé par la boule) présents au casino d'Enghien, a promulgué cette fameuse loi qui interdisait les jeux à moins de 100 kms de Paris. Mais, par dérogation, en 1931, une nouvelle loi a de nouveau autorisé l’exploitation des jeux, sauf la boule et les jeux similaires. Ce nouveau texte ne concernait que l’établissement d'Enghien. Cette situation juridique particulière a donné lieu à de longues polémiques juridiques qui perdureront jusque dans les années 80. Au final, le casino d'Enghien, qui était un casino atypique, puisqu'il n'exploitait que les "jeux de cercle" (banque et chemin de fer), a obtenu, par la suite, les jeux de

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contrepartie, puis la plénitude de tous les jeux. Et, grâce à l’arrivée récente des machines à sous, il est devenu, de loin, le premier casino français puisqu'il réalise un chiffre d'affaires colossal par rapport aux autres, étant de facto le casino de l’agglomération parisienne. 

 À présent, j'en viens sommairement au cheminement

juridique dans le détail. Donc, pour obtenir la création d'un casino, la première démarche est de se rapprocher de la municipalité. Soit vous êtes propriétaire, soit vous êtes concessionnaire d'un établissement municipal. Une fois que  l'appel d'offre a été fait, selon  le processus de mise en concurrence prévu par la loi Sapin, que le conseil municipal a délibéré et a choisi un concessionnaire, il est effectué une enquête "de commodo et  incommodo", et ensuite, le dossier chemine par la Sous-préfecture, la Préfecture, jusqu'à Paris où la Direction des Libertés Publiques et des Affaires Juridiques du Ministère de l'Intérieur  effectue l'instruction finale de ce dossier. Celui-ci est transmis à un organisme qu'on appelle la "Commission supérieure des jeux" qui émet un avis sur l'autorisation demandée, sur les jeux demandés etc., et qui regarde la conformité par rapport aux textes de loi réglementaires existants. Cette Commission est composée d'une vingtaine de personnes, beaucoup de hauts fonctionnaires des différents Ministères concernés, que ce soit l'Intérieur, les Finances, la Sécurité Sociale, le Tourisme et quelques représentants des élus, notamment les représentants des maires des communes des stations classées etc. Et, depuis très peu de temps, les exploitants eux-mêmes peuvent être entendus par cette Commission. Pour l'anecdote, le Président actuel de la Commission n'y est pas très favorable parce qu'il trouve que ce n'est pas très judicieux que ces personnes viennent y défendre leurs propres dossiers. Bien que n’ayant  qu’un rôle consultatif, la décision finale incombant au Ministre de l’Intérieur, cet organisme, dans ses avis, définit la doctrine en cette matière, qui est actuellement, autant que faire se peut, de freiner l’offre de jeu, compte tenu des problèmes posés par l’addiction au jeu, phénomène sociétal important apparu avec le boum des machines à sous. 

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Je poursuis en vous parlant des personnels qui concourent à la bonne marche de ces établissements.

Un casino est sous la responsabilité d'un comité de direction avec, à sa tête, un Directeur responsable. Ces personnes sont agréées, bien sûr. Et il est obligatoire qu'ils soient représentatifs de la société qui exploite les jeux, et au moins, Directeurs Généraux ou Administrateurs, selon les modalités. Ils sont agréés par le Ministère de l'Intérieur. Si le Ministère décide qu'ils n'ont ni la compétence professionnelle, ni la probité etc., on peut très bien leur refuser l'agrément et, partant de là, ils ne peuvent plus exercer leur fonction. Ce Comité de Direction aura la pleine responsabilité du fonctionnement du casino. C'est lui qui décide, notamment par la personne du Directeur, et engage ou licencie le personnel en toute indépendance. C'est une façon de parler,  mais, dans la réalité, c'est ce qui se passe. Tous les personnels, qui travaillent dans l'établissement, eux aussi, sont soumis à l'agrément ministériel. Vous voyez, c'est une profession très réglementée. Pour l'agrément ministériel, le service des Renseignements Généraux concourt, après enquête, à donner un avis. Ensuite, c'est la Direction des Libertés Publiques et des Affaires Juridiques  qui donne cet agrément.

     Auparavant, pour les personnels, il fallait, tous les ans, établir

une notice individuelle et il fallait fournir un certificat d'inscription sur les listes électorales, un casier judiciaire, etc. Maintenant, depuis quelques années, les personnels ont une carte "d'employé du jeu", valable en principe 10 ans. Si ces personnes perdent leur agrément pour des infractions pénales notamment, le casino est tenu de les licencier immédiatement. Les matériels, aussi, sont agréés par le Ministère de l'Intérieur. J'en viendrai ultérieurement, à un long chapitre sur les matériels. Mais, je veux vous dire que tout ce qui se passe dans les casinos : les horaires d'ouverture,  les horaires de fermeture, le nombre de tables, le nombre de machines à sous, les jeux autorisés,  etc., est contrôlé. Pour tout cela, l'exploitant demande et le Ministère accorde ou n'accorde pas. Vous voyez que c'est très surveillé et très

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réglementé; par exemple, pour les machines à sous qui sont le jeu le plus développé ces vingt dernières années, les exploitants ne sont pas maîtres du nombre de  machines qu'ils peuvent mettre dans leurs casinos. Souvent, le Ministère et la Commission des Jeux saucissonnent, par petits bouts, pour arriver, à la longue, à accorder, à peu près, ce que souhaitaient les exploitants au départ. Ensuite, il s'est créé une coutume, qui n'est pas écrite dans la réglementation, et qui dit qu'un casino ne peut avoir ses machines à sous tout de suite. Il lui faut un délai probatoire d'une année de fonctionnement avant d'obtenir l'autorisation pour ces machines. Un casino est donc bien un établissement très réglementé et très surveillé.

 Voyons donc ce qu'il comporte sur le plan des jeux, parce que

je pense  que c'est cela qui vous intéresse. Les seuls jeux possibles sont les jeux, dits de hasard dans lesquels le résultat du jeu est soumis à un phénomène aléatoire, où le parieur n’a aucune influence, comme la roulette, cela est facile à comprendre. La difficulté réside pour les jeux, notamment  les jeux de cartes où les participants reçoivent des cartes et les combinent entre elles. La jurisprudence définit les jeux de hasard comme des jeux où la part du hasard est supérieure à celle de l’intelligence. Par exemple, le bridge n’est pas considéré comme un jeu de hasard alors que le poker en est un.

Un casino, exploite deux types de jeux de hasard : les jeux, qu'on appelle jeux de table, et les machines à sous. Auparavant, les casinos n'avaient que les jeux de table. Dans les jeux de table, on considère selon la réglementation en usage, deux grands types de jeux : les  jeux de cercle et les jeux de "contrepartie". Les jeux de "contrepartie", c'est facile à comprendre. Le casino sert en fait de banquier, il met une somme en jeu et fait la contrepartie car il paye les gagnants  et il ramasse les perdants. Les jeux de "cercle", par contre, qui se pratiquent aussi dans les maisons de jeux appelées "cercles",  survivant encore à  Paris et dans quelques villes de province, sont des jeux où il n'y a pas de contrepartie; les gens jouent entre eux, et le casino est un prestataire de service,

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qui met à la disposition des joueurs, une table de jeu, des employés, des jetons et prélève une dîme de 5% ou 2% selon le jeu concerné. Mais, ces jeux-là sont tombés en désuétude, puisque ne subsiste maintenant, je crois, qu' une seule table "chemin de fer" en France;  il doit y avoir deux banques encore en activité dans les casinos de notre pays. Avant que la roulette soit réintroduite en 1933, c'étaient pourtant les rois des jeux. Lorsque, dans les films on voit des clients élégants, les croupiers avec la palette, le banco etc., c'est l'image qu'on a du casino traditionnel. Ça n'existe plus, sauf dans quelques endroits comme Monaco. Malheureusement, en France, c'est tombé en désuétude. Ces deux jeux sont deux formes d’un jeu originaire d’Italie, le baccara. Le principe en est simple : une somme est mise en jeu par un des participants, appelé banquier. Le pari contraire, le banco est tenu soit par un seul joueur soit par tous les autres, ceux-ci étant désignés sous le vocable de ponte. Dans le jeu de la "banque", un seul joueur (souvent un professionnel représentant un consortium d’intérêts financiers) fait le banquier alors qu’au chemin de fer, chaque participant est tour à tour banquier. Le résultat du pari est déterminé par la combinaison de deux ou trois cartes, le but étant d’atteindre ou d’approcher le total de 9. Les cartes ont leur valeur nominale et dans toute somme dépassant 10, il n’est tenu compte  que du chiffre des unités : 11 égale 1, 15 égale 5, etc. La possession de 3 cartes valant dix, c’est à dire 0, est appelée baccara d’où l’expression employée par les joueurs malchanceux qui déclarent être en plein baccara. Parlons maintenant des jeux de contrepartie. Alors, au sein des jeux autorisés, puisqu'il y a une liste limitative donnée par l'arrêté précité du 23/12/1959, vous allez trouver "la boule"; c'est le jeu le plus simple, le jeu de base qui existe depuis 1921 et qui fait suite à un jeu qui s'appelait les "petits chevaux". Les "petits chevaux", c'était une machinerie qui comportait une espèce de cylindre, où le croupier envoyait un plateau mobile avec neuf petits chevaux et le premier arrivé déterminait le  numéro qui gagnait. Ceci a été remplacé en 1921 par une grande cuvette avec 24 alvéoles en bas, dans laquelle au lieu d'envoyer des petits chevaux, on envoie une boule. C'est un jeu assez simple, très populaire. Il n'est pas soumis

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aux mêmes conditions d'accès que les grands jeux traditionnels, c'est-à-dire que l'entrée est libre. À l'époque il y avait un droit d'entrée qui était minime; il n'y avait pas de contrôle,  ni de paiement, ni de carte d'admission. Ce jeu a été très populaire et continue à l'être d'ailleurs, parce que c'est un jeu visuel; le joueur voit cette bille qui passe de godet en godet, d'alvéole en alvéole; il a une vraie sensation  physique qu'il n'a pas dans d'autres  jeux plus intellectuels. Donc, c'est le jeu le plus simple. Et, ensuite, pour les jeux de contrepartie, il y a la roulette. 

La roulette, à mon sens, c'est le vrai roi des jeux. C'est un jeu dont l’origine est controversée. On pense qu'il vient d'Italie, certains disent que la roulette a été inventée par Pascal.  Alors, comment se présente la roulette? Vous avez une partie fixe en bois qui fait 56cm, à l'intérieur de laquelle, sur un axe métallique, pivote un plateau mobile divisé, selon les cas, en 37 ou 38 alvéoles. Sur ces alvéoles figurent, bien sûr, les numéros de  0 à 36, et selon le type de roulette, un  0, ou  un 0 et un double 0. Alors le croupier  fait tourner le plateau mobile et lance la bille dans l’autre sens. La bille tourne dans la partie fixe, mais, entre la partie fixe et la partie mobile, il y a ce qu'on appelle des chicanes, des espèces de gros clous qui cassent la rotation régulière de la bille, et lui donnent un caractère aléatoire. C'est l'un des meilleurs appareils pour fabriquer du hasard. Alors, bien sûr, après, vous pouvez poser des questions sur les possibilités de trucage des roulettes. Bien sûr, cela a existé dans le temps, ça peut exister encore et on peut penser que cela existera toujours. Pourtant ce sont des matériels qui sont très surveillés. Comme je vous l’ai dit précédemment, cette roulette a été introduite en France, paraît-il, par le lieutenant de police Sartine pour apporter une plus grande sincérité dans les jeux, et pour remplacer une espèce de roulette, mise en œuvre par des tricheurs, qui s'appelait le Hocca. En 1833, je crois, ou en 1836, Louis-Philippe qui était contre les jeux, les a interdits. Cette roulette s'est retrouvée dans les casinos allemands, et surtout à Monte Carlo, où M. Blanc lui a donné un seul zéro, parce que vous avez des roulettes à un zéro et des roulettes à deux zéros. Il faut savoir que chaque jeu de

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contrepartie a un "avantage mathématique" au profit du casino. Ce n'est pas difficile à comprendre : si les jeux étaient vraiment équitables, il n'y aurait plus de casinos.  Donc, l'avantage mathématique du casino se détermine de la manière suivante : c'est la différence entre la probabilité de sortie d'une mise et le paiement que l'on en fait. Pour la roulette et la boule, c'est facile à calculer. Vous avez le tapis de jeu où l'on peut déposer des mises, vous avez trente sept possibilités de jouer un numéro, de 0 à 36. Si vous mettez une pièce à chaque possibilité, vous avez joué 37 pièces, vous allez gagner à tous les coups, mais on va vous en retirer 36, la mise reste toujours en place et on va vous en payer 35, donc vous perdez une pièce sur 37, 1/37ème, cela fait 2,70%. Chaque jeu de casino a un avantage mathématique théorique et, si cela ne se vérifie pas sur une, deux, trois journées, cela se vérifie sur le temps. C'est  donc pour cela qu'il y a toujours des casinos. La boule, c'est le même principe, a un avantage mathématique. Le black-jack a un avantage mathématique un peu plus compliqué à définir. Si vous voulez, c'est la dîme que prélève le casino sur les joueurs. Ça, c'est la théorie. En fait, je pense que le casino ramasse beaucoup plus de 2,70% à la roulette.  

Il y a trois formes de roulettes. Il y a la roulette traditionnelle que vous avez tous vue à la télé, avec les deux croupiers de chaque côté, au bout de la table. Les croupiers sont munis de râteaux qui leur permettent de ratisser les mises perdantes et de placer les mises gagnantes. C'est un jeu très populaire à Monte Carlo, puisqu'il y est né sous cette forme-là et qu'il y perdure avec un très grand succès.

Il y a deux autres formes de roulette : la forme dite "américaine", où les tableaux sont beaucoup plus petits et où les jetons ne sont pas valorisés, c'est-à-dire que chacun a sa couleur de jetons. Vous avez à la table de jeu 6 à 7 couleurs mises à la disposition des joueurs. Chacun choisit sa couleur et la valeur qu'il veut donner à sa mise. Donc, là, le croupier travaille de manière différente; il n'a pas de râteau et fait ses placements à la main. C'est un jeu beaucoup plus rapide. De plus, la roulette américaine

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a aussi deux zéros, donc elle est beaucoup moins équitable que la roulette traditionnelle, puisque -je poursuis ma démonstration- là, vous perdez deux pièces au lieu d'en perdre une, soit 5,35% au lieu de 2,70%. Mais, malgré tout, elle a un certain succès.

Et enfin, il y a un  troisième avatar de la roulette, la roulette dite "anglaise", en très nette augmentation dans les casinos français. C'est le "cylindre" français, le plateau mobile français à un zéro, et la façon d'exploiter à l'américaine. La roulette anglaise est en train de devenir le jeu le plus populaire, au détriment de la traditionnelle; et je dirai que pour la roulette américaine, il n'y a guère que dans les Dom Tom, notamment à Saint-Denis, ainsi que dans les casinos des Antilles, que l'on conserve ce type de jeu. Troisième jeu, bien connu dans les jeux de cartes, le black-jack. Ce dernier est tiré d'un vieux jeu français qu'on appelle le 21. Il est parti aux Etats-Unis avec les premiers pionniers et il  nous est revenu sous forme de black-jack. Le but du jeu est de faire le plus près possible de 21, avec deux ou plusieurs cartes et surtout de battre le croupier. C'est un jeu assez convivial car, autour de la table, les gens se mettent d'accord pour battre le croupier. C'est un jeu rapide, où, contrairement à la roulette, on a une certaine forme de responsabilité, à  savoir tirer ou prendre une carte supplémentaire. Mais c'est un jeu aussi, où les gens se disputent souvent, car ils ne sont jamais d'accord avec le tirage des autres, En effet, la carte, prise ou non par le joueur se prononçant le dernier, influe directement sur la carte que le croupier doit éventuellement prendre, celui-ci devant tirer une carte supplémentaire si son total initial des deux premières cartes distribuées est inférieur ou égal à 16. C'est un jeu qui connaît un grand succès dans les casinos et qui est très pratiqué dans le monde entier, notamment aux Etats-Unis, en Angleterre et chez nous. 

Autre jeu, le "punto banco", qui remplace le baccara. Le but du jeu est similaire; il faut faire  9,  ou au plus près de 9. Mais là, au lieu de s'opposer les uns aux autres, les participants  jouent contre le casino, c'est un jeu de contrepartie. Le casino paye les gagnants

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et ramasse les enjeux des perdants. Il existe d’autres jeux de tables autorisés, "l’écarté" et le "trente et quarante", jeux de cartes traditionnels, qui ne sont plus exploités, ainsi que le "craps", jeu de dés où les joueurs parient sur les combinaisons des points réalisés par le lancer de deux dés effectué par l’un d’eux. Ce jeu d’origine américaine, popularisé dans les films d’outre-atlantique, connaît peu de succès dans nos casinos. Enfin le dernier arrivé, est le "stud poker", qui semble appelé à un meilleur avenir.

Donc, tous ces jeux de table traditionnels, sont tombés en désuétude, et ont fait que les casinos ont périclité petit à petit jusqu'à l'arrivée des machines à sous en 1987 qui a totalement relancé la profession. Je vous donne à ce sujet  quelques éléments juridiques et techniques sur ces appareils. Qu'est-ce qu'une machine à sous? Il y a la définition lapidaire de la réglementation que je me permets de vous rappeler,  mais qui n’est pas très explicite. Elle se trouve au premier paragraphe de l'article 69-1 de l’arrêté du  23 décembre 1959 : "Les machines à sous sont des appareils automatiques de jeux de hasard entrant dans la catégorie dite "machines à rouleau et jeux vidéo". Elles permettent, après l'introduction d'une pièce de monnaie, d'un jeton ou d'une carte de paiement (il s’agit de cartes de paiement pré-créditées, achetées par les joueurs), la mise en œuvre d'un mécanisme entraînant l'affichage d'une combinaison aléatoire de symboles figuratifs. La combinaison est gagnante dans tous les cas où elle est conforme à une combinaison préétablie à cette fin". En fait, les machines à sous, au départ, ont été inventées à la fin du 19ème par M. Charles Fey, qui a fabriqué, du côté de San Francisco, des machines d'amusement, pour les bars, lesquelles ont connu un franc succès. C'étaient des mécaniques à rouleaux avec des figures, telles que melons, cerises etc. Elles se sont extrêmement sophistiquées, et maintenant, elles sont informatisées et très performantes. Quel est leur principe? Le cœur d'une machine à sous est un générateur de nombres aléatoires. Si vous prenez une machine à trois rouleaux, vous avez un certain nombre de symboles, y compris les blancs. Imaginons que vous avez 25 positions possibles, trois rouleaux, soit 25,

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multiplié par 25, par 25, ça vous donne un chiffre assez important de 15 625 combinaisons possibles. Le générateur de nombres aléatoires fait que tous les millièmes de seconde, il passe une combinaison différente dans le cœur de la machine, ce qui fait que lorsqu'un joueur met une  pièce, qu'elle est acceptée, à ce moment-là, le programme se bloque, les rouleaux entrent en action, et présentent la combinaison. Donc il est pratiquement impossible de savoir à l'avance ce qui va se passer, puisque tous les millièmes de seconde, passe une combinaison différente. Cependant, des joueurs  qui restent de nombreuses heures devant ces appareils ont la conviction que telle ou telle machine, qui n'a pas beaucoup payé depuis un certain temps, va bientôt payer. En fait, il se peut qu'une machine sorte deux ou trois fois la plus grosse combinaison, la plus lucrative, à très peu d'intervalle, et qu'ensuite elle ne sorte plus rien pendant des mois. Nonobstant, il est vrai que les machines à sous ont un certain rendement. La loi prévoit qu'il doit être au moins de 85% pour les joueurs.  Ça veut dire que sur 100 pièces, la loi dit d'en restituer au moins 85 au joueur. Alors, tout ça, c'est comme la théorie sur l'avantage mathématique, ça ne se vérifie pas toujours. De plus, si les machines à sous ne devaient payer que 85 pièces, les joueurs ne seraient pas intéressés. Beaucoup de machines, notamment les "pokers", ont un taux de redistribution au joueur au-dessus de 90%. 

Il y a deux types de machines à sous, les machines à rouleau que je vous ai décrites et les machines vidéo, pour la plupart des "pokers". La base est le jeu de poker que tout le monde connaît. Les gens parient sur les combinaisons de cartes en ayant la possibilité d’en écarter et d’en recevoir d’autres.  Il existe deux types de joueurs aux machines à sous.  Ceux qui sont sur les rouleaux  sont très passifs et attendent que la chance tombe, et ceux qui jouent sur les pokers  ont l'impression de défendre un peu plus leur argent puisqu'ils ont des possibilités de tirage supplémentaire. D'après la loi, ces machines à sous doivent redistribuer 85% au joueur, je l'ai  dit, mais, dans la réalité, elles payent beaucoup moins parce que le fabricant qui vend les

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machines à sous aux casinos, leur assure un taux de redistribution qui est calculé sur le nombre de pièces maximum que peut accepter la machine. Dans une machine à sous, on peut jouer une pièce, deux pièces, cinq pièces  voire vingt pièces, dans certaines machines. Donc, pour essayer d'approcher le taux de la machine, il faut jouer le maximum des capacités de la machine. Beaucoup de joueurs ne le font pas. Les joueurs de poker, selon les observations que j’ai pu faire, s'approchent de très près du taux de la machine, car le plus souvent, ils jouent au maximum. Une machine à sous, c'est un appareil merveilleux  parce qu'elle fait du bruit. Quand vous gagnez, elle fait du bruit, elle attire tout le monde; quand vous jouez, elle fait du bruit pour que vous ne vous ennuyiez pas. Comment fonctionne-t-elle? Il y a ce fameux générateur de nombres aléatoires. Á l'intérieur, se trouve également un appareil qui s'appelle la "trémie" qui, comme pour les tables de jeu, contient la mise en banque. Si vous avez une combinaison qui sort et qui correspond à une combinaison pré-établie, cette "trémie" va vous débiter le nombre de pièces. Par ailleurs, il y a des combinaisons qui sont plus importantes que la capacité de la machine. Ces combinaisons sont payées par la caisse et souvent, quand ça se passe, la machine joue une petite musique entraînante. Tous les clients se regroupent auprès de la personne qui a gagné, la congratulent, etc. Vous savez, tout est fait dans ces appareils, contrairement aux jeux de table qui n'ont pas beaucoup évolué, pour être amusants et attractifs. Ils évoluent en permanence sur le plan du design, sur le plan du bruit, du graphisme. C'est un produit innovant. 

Les machines à sous sont aussi des appareils qui s'autocontrôlent en permanence. Dans les jeux de table, il est très difficile de savoir ce qui se passe, si on ne regarde pas le fonctionnement d'une table. Seules la somme initiale mise en banque par le casino au départ et celle qui reste à l'arrivée, sont comptées. Et tout ce qui se passe dans l'intervalle, sauf si l'on est professionnel, on ne peut pas vraiment l'appréhender. Une machine à sous s'autocontrôle  en permanence parce que vous avez des compteurs "plombés" prévus par les textes

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réglementaires, notamment le compteur des entrées qu'on appelle le compteur "IN" et le compteur "OUT" qui comptent les sommes payées aux clients. Tous ces compteurs sont doublés, c'est-à-dire qu'il y en a un électronique et un électromécanique, qu'on ne peut pas remettre à zéro. Je vous donne toutes ces informations pour montrer que tout ce matériel est extrêmement contrôlé et qu'il ne subsiste aucune place pour des manipulations du résultat. Le casinotier n'a aucune influence sur le rendement des machines. Il achète un pourcentage et ensuite la puce informatique contenant le programme, est fermée. Seuls les contrôleurs de la police des jeux ont la clef, ainsi que les gens qui assurent l'entretien des machines. Ce sont des sociétés de fourniture de maintenance agréées par l'Etat. Le casino n'a  donc aucune influence sur le rendement des machines. Le phénomène des machines à sous a grandement contribué au sauvetage des casinos.

 

J'en viens alors à l'importance économique des casinos. Jusque dans les années 1987, il y avait à peu près 150 casinos et le nombre en diminuait. Ils faisaient un chiffre d'affaires oscillant grosso modo entre 150 et 170 millions d'euros.  En 1987, le ministre de l'Intérieur, M. Pasqua, a donné l'autorisation d'exploiter des machines à sous. Je crois qu'il y a eu 14 casinos qui se sont lancés dans l'aventure et qui en ont retiré de gros bénéfices puisque, pendant deux ou trois ans, pendant le passage de M. Joxe au ministère, qui était formellement hostile à ce type d'appareils, ils ont été les seuls à avoir le privilège d'exploiter ces machines. Ensuite, la libéralisation de la position ministérielle a créé un véritable boom pour les casinos puisqu'on est passé de 150 à 188 casinos l'année dernière et le produit des jeux a fait un bond prodigieux. Le produit des jeux, c'est ce qui reste au casino quand il a payé les gagnants et récupéré les perdants. C'est là-dessus qu'il est taxé. Je ferai après un aparté assez important sur les prélèvements au bénéfice de l'Etat et de la Commune. Ces machines à sous ont donc sauvé les casinos qui avaient  beaucoup décliné. Les jeux de table n'intéressaient qu'une élite un peu fortunée, mais qui disparaissait. Le produit des jeux a augmenté

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de pratiquement plus de 1000% en vingt ans. Il est passé de 150 millions d'euros à l'époque des jeux de table à 2 milliards 613 millions d'euros cette année (résultat du dernier exercice qui s’est achevé le 31 octobre 2004). Et sur ces 2 milliards 613 millions, les "machines à sous" représentent 2 milliards 440, c'est-à-dire 93,8%. En fait, les casinos sont devenus essentiellement des établissements de machines à sous. On peut considérer, pour faire un raccourci rapide, que, pour les casinos à l'heure actuelle, les seuls jeux rentables sont les machines à sous. Les jeux traditionnels ne sont plus rentables. Il y a plusieurs explications à cela. C'est que les jeux traditionnels reposaient, non pas sur un phénomène de clientèle de masse, mais sur une clientèle très restreinte, un peu fortunée, mais à laquelle il fallait faire des facilités de caisse, c'est-à-dire qu'un joueur ne venait pas souvent avec un carnet de chèques, mais il demandait des facilités de crédit. Les casinos étaient obligés de faire des facilités de crédit pour pouvoir fonctionner. Á partir du moment où on leur a donné des machines à sous, il n'y a plus eu besoin de faire des facilités de crédit. Les gens viennent avec  ce qu'ils ont dans la poche, ce qui explique la raison pour laquelle les tables de jeux ont périclité. Je pense qu'à l'époque, et j'ai participé à l'élaboration des textes, c'est la réglementation qui a sauvé les jeux de table traditionnels. Si on n'avait pas mis un texte obligeant l'exploitation des jeux de table pour avoir les machines à sous, il n'y aurait plus de jeux de table en France, pour des raisons de rentabilité. Nonobstant, après une progression très forte jusqu'en 2000, où le produit global des jeux progressait entre 15 et 16% tous les ans, on assiste à une stabilisation. Le résultat a progressé en 2001 de 7,81%, en 2002/2003  de 3,68% et, l'année dernière, la dernière saison de référence, il n'a progressé  que de 2,60%. En fait  il a stagné. Les faibles progressions enregistrées ces deux dernières années s’expliquent par le fait que 4 à 5 nouveaux casinos se sont ouverts, et qu'un nombre beaucoup plus important que l'année précédente, de "machines à sous" a été exploité. Á l'heure actuelle, pour vous donner un ordre d'idée, on compte à peu près 18 500 "machines à sous" autorisées en France. Et la Commission des jeux

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délivre les autorisations avec parcimonie. Souvent, les exploitants demandent un peu plus, pour en avoir un tout petit peu. 

 Je vais examiner maintenant le cas des personnels et, après, je

parlerai des joueurs, bien sûr. Il existe deux types de personnel dans les casinos: le personnel de restauration  et d'animation, et le personnel des jeux proprement dit; le personnel des jeux traditionnels a la particularité d'être rémunéré essentiellement par les pourboires. Il faut savoir que dans les tables de jeu, perdure encore de manière importante dans certains casinos une tradition, que la réglementation dit révocable en cas d'abus : chaque fois que les clients touchent quelque chose aux tables de jeu, ils donnent un pourboire. Ces sommes constituent une recette annexe à la recette principale des jeux. Dans  la plupart des casinos, le personnel n'était rémunéré que sur les pourboires. Souvent, ils avaient une garantie de salaire, mais n'étaient rémunérés que sur les pourboires, leur montant dépassant cette garantie. Et sur ce pourboire, par convention entre le casino et le personnel, une partie était conservée par le casino. C'est ce qu'on appelle la "deuxième masse", utilisée pour pouvoir rémunérer le personnel sous contrat, autre que les employés de jeu. Dans les grands casinos, à l'époque héroïque, dans les années 70, notamment à Divonne-les-Bains, tout le monde touchait des pourboires, les musiciens du dancing et même le professeur de golf. Á Monaco, je peux vous donner l'exemple où, à une époque, même l'archevêque recevait, pour ses œuvres, une part des pourboires. Cela faisait partie des habitudes de l'époque. Maintenant, malheureusement, cette pratique est tombée en désuétude, sauf dans quelques casinos très importants. Malheureusement, car dans la plupart des établissements, les pourboires ne suffisent pas à payer le personnel. Alors, le personnel, des jeux traditionnels, a une garantie de salaire que ne couvrent pas les pourboires perçus aux tables de jeux. Le personnel traditionnel est le reflet d'une certaine époque et d'une certaine forme d'activité. Le personnel des machines à sous est différent. Souvent, ce sont des techniciens, des caissiers, mais qui

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n'ont jamais approché des jeux autrement que par les machines à sous. Ce phénomène se retrouve aussi au niveau des dirigeants. Il y a vingt ou trente ans, les dirigeants des casinos, étaient des anciens employés de jeu. Je me souviens de directeurs de  casinos, de groupe même, qui avaient commencé comme grooms et qui terminaient comme directeurs, notamment l'un des dirigeants du casino de Deauville, il y a quelques années. Maintenant, c'est fini. On recrute pour les directions, des gens qui ont des diplômes importants et qui connaissent la gestion des entreprises. Alors qu'auparavant, on considérait le casino comme une société un peu à part, maintenant le casino se gère comme une entreprise. 

 Avant de vous parler des clients des casinos, je vais vous

donner un aperçu de l’intérêt pour les finances publiques, de l’activité des casinos. Comme je l'ai déjà dit, l'Etat essaie de réduire l'offre des jeux, s'occupe de moralisation, mais, également, tire un grand profit de cette activité qu'il autorise, par le biais des prélèvements effectués sur le produit des jeux. On distingue deux sortes de prélèvements. Les prélèvements fixes sont de création récente et pas très importants, mais enfin représentent  0,5% sur les jeux de table et 2% sur les machines à sous. Ensuite, vient le prélèvement progressif, qui existait depuis le tout début. Progressif, comme son nom l'indique, il peut aller jusqu'à 80% du produit des jeux, après un abattement de 25%. Donc, c'est un abattement assez conséquent. Sur ce prélèvement, 10% sont reversés aux communes, et la Commune, selon le cahier des charges bénéficie également d'un prélèvement qui peut aller jusqu'à 15%. Il y a pourtant certaines limites à ce cumul, c'est-à-dire qu'il ne faut pas que ça dépasse un certain montant avec la partie reversée par l’Etat par rapport au budget communal, autrement la Commune serait l'otage du casino, ce qui vous démontre que les casinos sont d'un grand intérêt pour les finances des Communes qui les accueillent. A côté de cela sont venus s'agréger, au fur et à mesure des aléas, je dirais de la politique budgétaire, des contributions pour le remboursement de l'aide sociale. La CRDS, plus la CSG qui est payée par les casinos et par les joueurs. C'est 12% des gains payés par caisse. Pour vous

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donner un ordre d'idée, parce que c'est assez conséquent, les casinos ont payé, en prélèvements totaux la saison dernière, près de 1milliard 500 millions d'euros et notamment,  pour les Communes, près de 225 millions d'euros au titre du cahier des charges et 10% du prélèvement de l'Etat (c'est-à-dire près de 10 à 20 millions d'euros). Au titre de la Contribution au Remboursement de la Dette Sociale (CRDS), les casinos ont payé 220 millions d'euros. Vous voyez que c'est  une manne. En fait si on fait un ratio entre les recettes des casinos et les prélèvements qu'ils payent, les casinos payent plus de 57% de leur recette à l'Etat, c'est pour cela que l'on peut dire que l'Etat est "croupier". Il ne fait pas de mise de fond, mais il participe aux bénéfices. C'est quand même assez important, mais ce n'est pas la seule contribution des jeux de hasard en France pour le budget de l’Etat. J'ai sous les yeux une étude qui fait le bilan des jeux de hasard en France. Les casinos voient leur niveau de prélèvement n'augmenter que de 2,4% d'une année sur l'autre, alors que la Française des Jeux, grâce à l' "Euro Million" notamment, a vu son prélèvement augmenter de 10,4%. Enfin, le prélèvement sur les courses a progressé, pour sa part, de 5,4%.

Avant d'en venir  à ceux qui sont à la base de cette activité, c’est à dire les joueurs, je vais vous présenter le hit parade des casinos français. Le premier casino de France, selon le récapitulatif  de la saison passée, était le casino d'Enghien, près de Paris. Il a eu la particularité, pendant des années, de n'avoir que des jeux de cercle parce que les jeux de contrepartie y étaient interdits, malgré des avis du Conseil d'Etat disant que la roulette n'était pas un jeu similaire à la boule. Il a végété pendant des années en ne pratiquant que le chemin de fer. Depuis, on lui a donné la roulette en maintenant les machines à sous; et grâce à ces dernières, son produit des jeux est de 137 millions d'euros, loin devant Charbonnières avec ses 70 millions; Aix-en-Provence, établissement du groupe Partouche qu'ils ont baptisé casino, 65 millions d'euros ; le casino Rhul de Nice ,62 millions ; Deauville 56 millions ; Amneville, qui est aussi un casino vraiment particulier, situé dans la Lorraine sinistrée par la fin de la métallurgie, un

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casino créé de toutes  pièces, et qui est maintenant parmi les tout premiers. On  trouve également les grands casinos traditionnels, Cannes-Croisette, Divonne. Et, plus près de chez nous, le casino de Saint-Pierre se situe à la 46ème place, avec un produit des jeux de 17,7 millions d'euros ; celui de Saint-Denis à la 54ème  place, 15 millions ; le casino de Saint-Gilles à la 66ème place, 12,5 millions. Les casinos de la Réunion sont donc très bien placés dans le classement, si on considère qu'ils sont parmi les 70 premiers (sur 188). 

 Maintenant, on va s'intéresser aux joueurs, parce

qu'effectivement, il n'y aurait pas de recettes sans les joueurs. Tous ces établissements de jeux, n'existeraient pas sans eux.

On considère qu'au moins 60% des Français jouent. Les données statistiques manquent   sur les joueurs: qui sont-ils ? quelles sont leurs motivations? Peu de recherches existent. Pourtant une étude a été faite, par un sociologue, à la demande d'un syndicat de casinos, émanation du groupe Barrière. Cette étude a plutôt porté sur la sociologie des clients des machines à sous. D'après les données statistiques qu'on peut avoir, on dit que pratiquement la moitié des adultes français ont fréquenté une fois un casino. 41% des habitués sont des inactifs, sans-emploi ou retraités. Aux machines à sous, 37% auraient de 30 à 50ans, 29% de 51 à 70 ans. Parmi ces clients de machines à sous, parce que ce sont eux que l'on connaît le mieux, 32% jouent plusieurs fois par semaine et 5%, voire 6%, jouent tous les jours. Et 70% de ces gens-là jouent pratiquement à tous les autres jeux, c'est à dire au PMU, à la Française des Jeux, etc. C'est donc un comportement "addictif", qui est l'un des problèmes majeurs posé actuellement à l'Etat et aux exploitants de casinos. Il faut savoir qu'avant, la fréquentation de ces établissements était l’apanage d’une clientèle moins nombreuse, cosmopolite et initiée à ce milieu particulier. Mais les "machines à sous" ont créé un véritable boom puisqu'elles ont démocratisé les casinos, touchant toutes les couches de la population. Cette inflation se voit au niveau des "interdits de jeu" qui sont une réponse de l'Etat pour protéger les joueurs contre leur prodigalité.

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Quel est le principe de l'interdiction de jeu ? Il y a deux sortes d'interdits, mais la majeure partie, à plus de 90%, concerne des gens qui se font interdire à leur demande, car ils n'ont pas la volonté de s'interdire eux-mêmes. La démarche à suivre est de faire un courrier au Ministère de l'Intérieur, mais en général, il faut aller voir les RG, lesquels reçoivent l'intéressé et vérifient qu'il est bien l'auteur de la demande. Et, ensuite, cette demande va à Paris, à  la Direction des Libertés Publiques et des Affaires Juridiques qui établit une liste des "interdits". Autrefois, avant les machines à sous, la fréquence était trimestrielle, maintenant elle est mensuelle. On considère qu'il y a actuellement entre 30 000 et 40 000 interdits de jeu. Pourquoi ce phénomène? Parce que les machines à sous ont touché à toutes les couches de la société, y compris les plus défavorisées, alors que jadis les casinos étaient réservés à une certaine élite. Je ne vous l'ai pas dit, mais pour entrer dans les salles de jeu traditionnelles, il fallait payer un droit d'entrée,  assujetti à un droit de timbre, présenter une carte d'identité et, souvent, il y avait des critères de tenue. Maintenant, avec les machines à sous, on entre n'importe comment, dans l'état vestimentaire où l'on est. Il n'y a pas de contrôle à l'entrée. Tout le problème des interdits est de savoir comment les empêcher d'entrer dans les salles de machines à sous? Pour ce problème d'addiction au jeu, certains pays sont en pointe, notamment le Canada, la Suisse, qui ont établi dans leur législation des critères bien précis pour obliger les casinos à s'occuper de ce problème-là. En France, l'Etat n'a pas pour l'instant légiféré, mais les casinos subissent une, je dirais, "amicale" pression et  leurs groupements professionnels ont décidé de s'occuper un peu de la question. Des associations se sont créées (comme l'Association Adictel) qui ont fourni aux casinos un affichage permettant de prévenir les joueurs contre le jeu excessif. Cela peut paraître hypocrite, mais les joueurs, s'ils le désirent, peuvent téléphoner à des numéros spécialisés, où des personnes les écoutent et les canalisent vers des psychologues puis vers des interlocuteurs dans les casinos pour essayer de trouver des solutions à leur problème d’addiction. Il est, à très court terme, certain que l'Etat sera amené à imposer

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le contrôle des identités à l’entrée des salles de machines à sous, ce qui n'est pas encore le cas puisqu'actuellement, n'importe qui peut entrer dans une salle de machines à sous, alors que dans les salles traditionnelles, il faut présenter une pièce d'identité et payer un droit d'entrée. Donc, c'est un véritable problème de société qui concerne l'Etat et la profession. 

Quelles sont la situation  et l’évolution  prévisibles de ce secteur sur le plan économique ? Cette activité  emploie à peu près 17000 salariés, que ce soit directement dans les salles de jeu ou dans les activités annexes. Le phénomène des machines à sous a favorisé la concentration  dans ce secteur et la création de quelques groupes. Pourquoi? Parce qu'avant il y avait beaucoup d'affaires familiales indépendantes qui étaient le fruit de la tradition. Avec le phénomène des machines à sous, les plus gros ont mangé les plus petits. Á l'heure actuelle, on assiste à une phase de consolidation, d'une part parce que le produit  "machines à sous", qui était très intéressant, semble avoir atteint une espèce de maturité car il n'a plus la marge de progression antérieure. Cette phase de consolidation se traduit par l'éclosion de grands groupes.  Le groupe Partouche tout d'abord est connu de tous. J'ai assisté aux débuts de ce groupe Partouche. Ces personnes arrivaient d'Afrique du Nord et ont acheté des boîtes de nuit à Saint-Amand-les-Eaux; puis ils se sont retrouvés propriétaires d'un petit casino qui périclitait, et maintenant, ils sont à la tête d'un groupe coté à la Bourse de Paris, qui annonce aujourd'hui 5000 salariés et a réalisé un bénéfice de 20 millions d'euros en 2003-2004. L'an dernier, ils ont acheté un autre groupe qui s'appelle "l'Européenne des casinos", et ils viennent de reprendre le grand casino de Divonne, plus Annemasse, etc. Parallèlement nous avons le groupe Barrière, qui est un groupe beaucoup plus ancien puisqu'il a été créé par François André dans les années 20. Il possède Deauville, Enghien, Le Touquet (revendu maintenant), Cannes. Ce groupe s'est associé avec le groupe Accor, groupe hôtelier bien connu, ce qui fait un pôle très important. Ces groupes-là sont cotés en Bourse et peuvent recevoir des capitaux étrangers notamment les fonds de pensions anglo-saxons qui sont

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apparus il y a peu. Je crois que la volonté de l’Etat, sans vouloir le dire, c'est de favoriser cette espèce de concentration, parce qu'il vaut mieux avoir 3 ou 4 opérateurs plutôt qu'un morcellement. Ces lignes que  j’ai trouvées dans une revue économique le confirment : "Le monde des casinos est en pleine phase de consolidation en Europe et sa transformation en fait une industrie comme une autre". On cite alors les groupes Barrière et Partouche partout en Europe : "Le ralentissement de la croissance des machines à sous, la limitation des opportunités de création de certains casinos pousse à cette concentration, permet la transformation du secteur en une industrie comme les autres".  Le rapprochement permet d'importantes synergies : une économie d'échelle ; une meilleure résistance à la pression fiscale ; la réglementation interne en matière de sécurité, de bruit, de tabagisme, selon les experts du secteur. Signe supplémentaire : la normalisation industrielle des casinos qui représentent 7000 emplois directs en France. On négocie avec les syndicats sur les conditions de travail de nuit ou l'on participe à la lutte contre l'abus de jeu, l'addiction. Il reste encore quelques petits exploitants  indépendants dont le casino de Saint-Pierre fait partie, mais cela durera-t-il longtemps? Qui le sait? 

Voilà!  Je sais que ce que je vous ai présenté est un peu touffu et je n'ai pas évoqué tous les sujets qui concernent les casinos, mais il faut savoir s’arrêter sans plonger désespérément comme dans l’enfer du jeu !