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A.C.T.I. septembre 2017/5778 Numéro 38

A.C.T.I. septembre 2017/5778 Numéro 38synagogue-montevideo31.com/wp-content/uploads/2017/09/Montevide… · anciens ; André Neher qui fut l’un des pre-miers intellectuels juifs

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A.C.T.I. • septembre 2017/5778 • Numéro 38

S o m m a i r e

A.C.T.I. • septembre 2017/5778 • Numéro 38

Directeur de la publication :Charly Bronner

Rédacteur en chef :Marc Kogel

Secrétaire de rédaction :Joëlle Dayan

Réalisation, régie et impression :SAB-Print

contact : Pascal Karsenti01 30 25 25 57

Conception graphique :Christelle Martinez

A.C.T.I.31 rue Montevideo - 75116 ParisTél. 01 45 04 66 73Fax 01 40 72 83 [email protected]

« Il revient à chacun de vérifiersi les prestations de cacheroutproposées par les annonceurssont conformes à ses propresexigences ».

Le mot du rabbin■ Au delà de la subjectivité Jacky Milewski

Le mot du Président■ Charly Bronner

L’édito du rédacteur en chef■ Marc Kogel

activités communautaires■ Cycle de conférences et de rencontres

hebdomadaires animées par David Temstet■ Conférence sur la vision juive de la dette

par le Rabbin Milewski et Pierre Lazar■ Talisman sur ton cœur de David Haziza■ Beit Midrach Lenachim par le Grand Rabbin

Gilles Bernheim et Alexandre Adler■ Fête de fin d’année du Talmud Torah

Histoire■ Grandes figures du sionisme : Ahad Haam

(1856-1927) Marc Kogel

Culture■ Retour à Odessa Léon Borocin

musique■ De Heinrich Schütz à Michaël Levinas

De la Passion à la Passion après Auschwitz Michaël de Saint-Cheron

médecine israélienne■ En direct de l’Israeli Medical Association (IMA)

et des hôpitaux israélien Professeur Bernard Lobel

Voyage■ ZAKHOR - Comment la ville de Thessalonique

commence à se souvenir du massacre du quart de ses habitants Claude Trink

il y a 50 ans■ Libération de Jérusalem– Ma JERUSALEM D’OR Bernard Picard– Jérusalem et la musique Raymond Cicurel– Jérusalem notre lumière Professeur André Neher

Humour■ La page d’Avidan Avidan Kogel

Carnet de famille■ Naissances, décès…

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L e m o t D U r a b b i n

A u d e l à d e l a s u b j e c t i v i t é

A.C.T.I. • septembre 2017/5778 • Numéro 384

■ J a c k y M i l e w s k i

U ne grave discussion opposa les Sages aux saducéens concernant l’un des rites

essentiels de la journée de Kip-pour : l’offrande de l’encens dans le Saint des saints. Selon les saducéens, le Grand Prêtre devait faire fumer l’en-cens en dehors du Saint des

saints de sorte qu’il y entre alors que la fumée des parfums s’élevait déjà.

Selon la tradition rabbinique, le Grand Prêtre pénétrait dans le Saint des saints en tenant les braises et l’encens et c’est à l’intérieur de cet espace qu’il versait les parfums sur les braises (Yoma 53a). La concrétisation de ce système était pour les saducéens de la plus haute importance ; ils en faisaient une question de prin-cipe (cf. Yoma 19b). C’est la raison pour laquelle les Sages faisaient jurer le Grand Prêtre de ne rien changer à la tradition avant qu’il n’entre seul dans le Saint des saints. Or, fait si judicieusement remarquer le Rav Hirsch à qui nous empruntons ce développement (dans son commentaire sur Lévitique 16, 13), alors que les sadu-céens ne prennent en considération que la littéralité du texte biblique, ils la violentent ici ! La Torah dit bien : « il prendra un encensoir plein de braises… et une poi-gnée pleine d’encens, il [les] emmènera

à l’intérieur du rideau [qui donne accès au Saint des saints] et il versera l’encens sur le feu devant D.ieu » (versets 12 et 13). C’est donc que l’opération de l’en-cens suit l’entrée dans l’enceinte sacrée. Les saducéens disaient s’appuyer sur un autre verset : « Car c’est dans de la fumée que J’apparaitrai ». Les Sages déduisent de celui-ci que l’encens doit comporter un ingrédient qui permet de former une fumée montante. Pourquoi les saducéens ont-ils préféré interpréter ce verset alors qu’une autre interprétation était possible (celle rap-portée par les Sages) négligeant ainsi l’évidence du texte biblique qui géné-ralement constitue leur seul point de référence ? C’est que les saducéens en appelaient aux conventions : « Si on n’agit pas ainsi devant un être de chair et de sang, va-t-on agir ainsi devant D.ieu ? ». La référence des saducéens est choisie pour coïncider avec des conven-tions sociétales ! On prépare l’encens avant d’entrer dans l’espace que l’on veut encenser ; pas dans celui-ci. La vie de la société modèle leur style religieux. Le fait de faire fumer l’encens à l’extérieur du Saint des saints, puis de faire pénétrer cet encens dans l’espace sacré, expriment une conception selon laquelle la pratique religieuse se nourrit d’apports étrangers et subjectifs. Le Grand Prêtre, fidèle à la tradition, fait fumer l’encens dans le Saint des saints ; sa vie religieuse s’alimente de l’espace sacré lui-même, se nourrit à sa propre source, loin des conventions tou-jours changeantes, lui assurant par là son autonomie, l’assurance de sa vérité non compromise. ■

« Si on n’agit pas ainsi devant un être de chair et de sang, va-t-on agir ainsi devant D.ieu ? ».

La rédaction remercie tous les annonceurs qui permettent à notre bulletin de s’autofinancer.

Nous demandons à nos lecteurs de les privilégier dans leurs achats.

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■ C h a r l y B r o n n e rL ors de mes précédentes interventions certains lecteurs ont sans doute dû ressentir des propos quelque peu pes-

simistes. Je ne suis pas pessimiste mais il m’appartient d’exprimer des vérités même si elles ne sont pas agréables à lire. Je me dois de m’interroger quant à l’avenir de notre communauté. Rien n’étant acquis pour l’éternité, nous ne pouvons pas nous contenter de l’existant.

Quelle est donc la situation de notre com-munauté à ce jour ? A ce propos, Il faut sans doute distinguer la synagogue et son culte du centre communautaire Edmond Weil. Presque 3 ans après sa réouverture

suite à d’importants travaux de réhabili-tation, le centre Edmond Weil fonctionne relativement bien. Comme par le passé, nous y abritons les classes du talmud torah et nos activités traditionnelles.

Nous y proposons également de nouvelles activités culturelles telles que l’antenne de l’ouest parisien de l’institut Elie Wiesel qui va dispenser pour la 3e année consécu-tive de nouveaux enseignements dont le contenu sera diffusé prochainement. Cou-rant juin dernier, nous avons inauguré un nouveau cycle de conférences proposé par le Docteur David Temstet sur des thèmes de société très variés sous l’éclairage des textes bibliques. Ces conférences hebdo-madaires destinées prioritairement aux célibataires ont rencontré beaucoup de succès et ont donc repris le 6 septembre.

En ce qui concerne la synagogue, il s’agit d’une toute autre affaire. De nombreux fidèles nous ont quittés et l’arrivée des nouveaux membres n’est pas significa-tive. Pourrons-nous maintenir notre rite et nos traditions tels que les créateurs de

notre communauté les avaient institués avant guerre ? Pour les maintenir, il faudrait un sursaut de tous les fidèles qui restent attachés à ce que Montevideo représente. Mais en sont ils motivés ? Telle est la question.

Tous mes vœux de chana tova à tous les fidèles de Montevideo et à la communauté d’Israël. ■

L e m o t D U P r é S i D e n t

Rien n’étant acquis pour l’éternité, nous ne pouvons pas

nous contenter de l’existant.

Appartenir à la solidarité !

Les grandes fêtes de Tichri, Roch Hachana et Yom Kippour, sont l’occasion de nous retrouver. C’est alors que beaucoup manifestent leur appartenance à la communauté juive. Mais il est plusieurs façons de lui appartenir.

Le soutien à la Fondation Casip-Cojasor en est un exemple probant. Laïques ou religieuses, actives dans la communauté ou non, proches de ses ensei-gnements ou non, des milliers de personnes mani- festent leur appartenance à notre communauté,

depuis plus de deux siècles, par leur fidélité à l’action sociale de la Fonda-tion Casip-Cojasor.Pas seulement, pas toujours par conviction religieuse ! Elles affirment leur appartenance à une communauté de destin (que l’antisémitisme toujours présent nous rappelle), à une communauté solidaire, généreuse, préoccu-pées par le sort des plus déshérités.

Appartenance à une action commune autour d’une institution, la Fonda-tion Casip-Cojasor, dynamique, innovante, compétente, efficace et qui a tant apporté à l’effort national de lutte contre la pauvreté et les difficultés sociales de tous ordres.

A ceux qui appartiennent déjà à notre communauté de solidarité humaine, merci ! Nous savons que nous pouvons compter sur vous !

Aux autres, rejoignez-nous ! Avec vous, nous ferons plus et mieux pour les 20 000 personnes que nous aidons !

Que la nouvelle année juive 5778 vous soit favorable, ainsi qu’à tous ceux qui ont besoin de nous !

Chana Tova et amicalement,

Gabriel VADNAIDélégué général aux dons et aux legs

8 A.C.T.I. • mai 2017/5777 • Numéro 37

L ’ é d i t o d u r é d a c t e u r e n c h e f

A.C.T.I. • septembre 2017/5778 • Numéro 388

Bonne année 5778Que l’année qui vient apporte à chacun de nous

la satisfaction des besoins nécessaires et auxquels nous aspirons, qu’elle éclaire les dirigeants de la planète en général et du Proche-Orient en particulier, afin qu’ils agissent en faveur de la paix et que tous protègent les hommes, les

animaux et la nature. Que 5778 inspire à la communauté juive des sentiments de fraternité dans le respect de sa diversité.

Kiddouch Hachem C’est le sentiment éprouvé après le décès de Simone Veil, car rarement on aura entendu une telle unanimité dans l’éloge et dans l’admiration. à défaut de carré juif - s’il faut être quatre - elle ira rejoindre au Panthéon, René Cassin, prix Nobel de la paix et qui fut Président de l’AIU. Simone

Veil a longtemps présidé le Jury du prix Corrin qui récompense chaque année des classes d’écoles de toute la France, pour des travaux réalisés autour de la Shoah.Je vous encourage à lire le témoignage émouvant publié par Libération :http://www.liberation.fr/debats/2017/ 07/04/simone-veil-ministre-de-la-sante-pas-que-devant-les-cameras_1581535Et je ne résiste pas à citer les derniers mots du discours de Jean D’Ormesson qui accueillait Simone Veil à l’académie française en 2010 : « Beaucoup, en France et au delà, voudraient vous avoir, selon leur âge, pour confidente, pour amie, pour mère, peut-être pour femme de leur vie. Ces rêves d’enfant, les membres de notre compagnie les partagent à leur tour. Aussi ont-ils choisi de vous prendre comme consœur. Je baisse la voix, on pour-rait nous entendre : comme l’immense majorité des français, nous vous aimons, Madame. Soyez la bienvenue au fauteuil de Racine, qui parlait si bien de l’amour ».

50,100,120Ce sont trois anniversaires que nous célébrons cette année : les 50 ans de la réunification de Jérusalem, le centenaire de la déclaration Balfour et le cent-ving-tième anniversaire du premier Congrès Sioniste de Bâle. Aussi je vous propose plusieurs articles sur Jérusalem, publiés en 1968 dans le numéro spécial du Trait-d’Union sur la Jérusalem d’or ; J’ai retenu parmi des dizaines d’articles, les témoi-gnages de personnalités bien connues des anciens ; André Neher qui fut l’un des pre-miers intellectuels juifs français à rejoindre Israël après la guerre des six jours, Bernard Picard qui fut directeur de l’école Lucien de Hirsch, puis de l’école Yabné et qui s’installera en Israël en 1992, et Raymond Cicurel (père d’Ilana), qui fréquentait notre synagogue avant son décès en 2008. Je vous propose une biographie de Ahad Haam, personnage fascinant, haut en couleurs et méconnu en France. Pour couronner le tout, notre ami Léon Borocin, nous parle d’Odessa, Carrefour de l’intel-ligentsia juive à la fin du XIXe siècle où l’on pouvait croiser Ahad Haam, Dubnov, Bialik, Mendele Mo’her Sefarim et bien

d’autres des grandes figures du sionisme et de la littérature juive.

Hineni« hineni héani mimaash » (me voici, dépourvu de tout mérite), sont les pre-miers mots de la tefila que le hazan prononce avec émotion avant la amida de Moussaf des yamim noraïm. Yossele Rosenblatt a marqué des générations de hazanim par l’originalité et la profondeur de sa composition. Nous qui n’avons pas son talent, nous pouvons écouter ses enregistrements disponibles sur youtube. Le Grand Rabbin Haïm Korsia m’a fait remarquer que dans son dernier album, Léonard Cohen, en propose une version post-moderne et protestataire, mixée avec des extraits chantés par le hazan Gideon Zelermyer et le choeur de la synagogue Shaar Hashomayim de Montreal.

Jonas, Ninive et MossoulComme nous le lisons chaque année dans la Haftara de Min’ha de Kippour, le Pro-phète Jonas est envoyé par Dieu à Ninive pour appeler ses habitants à la repen-tance. Contre toute attente, les habitants de Ninive - roi en tête - font Techouva et la ville est sauvée. Au XXIe siècle, quel mes-sage porter à la ville de Ninive (Mossoul) et qui pourrait encore en être le messager ?

La couverture de notre magazine J’ai décidé de représenter Jérusalem par un autre mur que celui auquel nous sommes habitués. Un mur moderne et sans vécu tragique ou plutôt un mur dans le mur et qui raconte l’histoire de la Jérusalem moderne construite en dehors des murailles à la fin du XIXe siècle sous l’impulsion de Moses Montefiore. Les quartiers de Mea Chearim ou de Nahalat Chiva ont abrité alors des familles coura-geuses qui ont accepté de vivre sans la protection des murailles, bien avant que les Netouré Karta ne s’installent à Mea Chearim et ne le transforment en quartier ultra-orthodoxe.Cette ville moderne est désormais traver-sée d’Est en Ouest par un Tramway, moyen de transport confortable, propre et silen-cieux ; tout un symbole. ■

■ M a r c K o g e l

Que 5778 inspire à la communauté juive des sentiments de fraternité dans le respect de sa diversité.

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a C t i V i t é S C o m m U n a U t a i r e S

C y c l e d e c o n f é r e n c e s e t d e r e n c o n t r e s h e b d o m a d a i r e s

a n i m é e s p a r D a v i d T e m s t e t

C o n f é r e n c e s u r l a v i s i o n j u i v e d e l a d e t t e p a r l e R a b b i n M i l e w s k i e t P i e r r e L a z a r

L e Dr David Temstet a entamé en juin dernier un cycle hebdomadaire de conférences destinées aux céliba-

taires, afin de favoriser les rencontres de personnes étudiantes ou engagées dans la vie active.

L e Rabbin Milewski et notre ami Pierre Lazar ont chacun préparé un exposé sur la dette.

Le rabbin Milewski nous a donné succes-sivement une interprétation éthique des versets de la Torah qui parlent de l’an-nulation des dettes contractées par des

Les premières conférences ont rencontré un grand succès auprès d’un public très divers. Brillant orateur et débordant d’énergie, le Docteur Temstet anime avec brio ces conférences qui portent sur des sujets contemporains très variés mêlant poli-tique, science, médecine et Torah en leur donnant un éclairage personnel, mais qui ne s’écarte jamais d’une vision traditionnelle. Si vous connaissez des personnes célibataires,

individus dans le cadre de la chemita, puis la halakha qui intervient à l’issue des dis-cussions talmudiques sur le sujet.

Pierre Lazar est parti des problèmes contemporains, notamment du surendet-tement d’Etats comme la Grèce afin de

savoir s’il fallait ou pas annu-ler la dette, la réaménager, en s’interrogeant sur les droits accordés aux créditeurs ou aux débiteurs, à la lumière du Prozbul institué

faites-leur part de ce cycle de conférences qui a lieu le mercredi soir dans les locaux du centre Edmond Weil.

Une collation permet aux participants de faire connaissance après la conférence. ■

par H i l l e l pour amé-n a g e r u n espace éco-n o m i q u e v i a b l e ( T i k o u n olam) afin de pallier les risques de découragement des prêteurs et le blocage de l’économie.

Le sujet est loin d’avoir été épuisé, car le format de la soirée n’a pas permis d’ap-profondir les sources talmudiques qui scrutent les textes de la Torah, du Midrach et de la Michna qui traitent du sujet, ni de rapprocher les points de vue exprimés par les deux orateurs... à suivre donc ! ■

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B e i t M i d r a c h L e n a c h i m p a r G r a n d R a b b i n G i l l e s B e r n h e i m e t A l e x a n d r e A d l e r

C ’est devenu une tradition pour notre communauté que d’accueillir le Grand Rabbin Gilles Bernheim et

Alexandre Adler pour une conférence à deux voix au profit du Beit Midrach Lena-chim dirigé par Joëlle Bernheim.

Le thème de cette année : « Des réponses juives au problème de la fracture en France » a donné lieu a de brillants déve-loppements teintés d’optimisme de la part d’Alexandre Adler, qui ne cède pas, loin s’en faut, à la vague de macronisme ambiant.

Alexandre Adler a notamment fait part de sa conviction que les pays arabes et les élites musulmanes évoluaient dans le bon sens, même si elles n’aiment pas

se désolidariser à haute voix des islamistes et autres extrémistes qui se réclament de l’Is-lam. De son côté le G ra n d R a b b i n

Bernheim a évoqué le risque que font courir en France les zélotes de l’écolo-

gisme, doctrine qui au prétexte d e d o n n e r une place aux « sans voix » : animaux, végé-taux, nature, enfants, s’op-

pose à des pratiques religieuses (mila, che’hita) ancestrales. ■

a C t i V i t é S C o m m U n a U t a i r e S

T a l i s m a n s u r t o n c œ u r d e D a v i d H a z i z a

D avid Haziza est venu nous présenter son premier livre : Talisman sur ton cœur, polyphonie sur le cantique des

cantiques et répondre aux quelques ques-tions que je lui avais posées sur l’histoire de l’exégèse allégorique de ce texte, sur les raisons de son choix, l’apport et ori-ginalité de son travail et au final sur son actualité aujourd’hui en France.

L’auteur a répondu avec brio et beaucoup de pédagogie à toutes ces questions en montrant notamment les interprétations que l’Islam donne des textes bibliques qui

sont inconciliables avec une vision juive, comme la soumission ou l’autonomie du sujet et l’importance aujourd’hui de faire

parler des textes qui présentent plusieurs niveaux de lectures dont aucun ne se substitue ni n’exclut l’autre. ■

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F ê t e d e f i n d ’ a n n é e d u T a l m u d T o r a h

L a fête de fin d’année du Talmud Torah a été parfaitement

organisée. Le rabbin Milewski a distribué les prix aux enfants pré-sents et une collation a été offerte aux enfants et à leurs parents. Notre Talmud Torah se développe et a vu ses effectifs dépasser les 50 enfants inscrits. Et pour la prochaine étape, nous visons 70 enfants. Un grand merci à Madame Sha-piro et aux Morot.

Nous espérons revoir tous les enfants à la rentrée, accompagnées peut-être des petits frères et sœurs et de tous leurs amis. ■

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H i S t o i r e

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G r a n d e s f i g u r e s d u s i o n i s m e A h a d H a a m ( 1 8 5 6 - 1 9 27 )

a sher Ginsberg, qui choisit comme nom de plume Ahad Haam (un parmi le peuple selon l’expres-

sion de la Genèse 26,10) est né à Skvyr en Ukraine en 1856 dans une famille hassidique. Elevé de manière tradition-nelle, il fréquente la yechiva avant de prendre ses distances avec le monde religieux. Brillant essayiste, journaliste, polémiste, il fut l’un des leaders du sionisme pré-Herzlien et le fondateur du courant appelé sionisme culturel. Pour lui, la régénération culturelle du judaïsme passe par la renaissance de l’hébreu ; aussi, dès les années 1880, il écrira exclusivement en hébreu, alors que ses contemporains se satisfont du Yiddish ou du russe.

Ses premières interventions publiques ont lieu dans les années 1880, en tant que membre du mouvement Hovevei Sion qui prônait l’installation des juifs dans la Palestine ottomane avec l’appui financier traditionnel des juifs de dias-pora et des riches mécènes. Il n’était ni question de reconnaissance, ni d’auto-nomie économique ou politique, Ahad Haam fait très tôt entendre sa diffé-rence, en rejetant à la fois le sionisme romantique des Hovevei Zion, et le sionisme politique ; il considérait que le problème principal auquel il fallait s’at-teler n’était pas le salut physique des juifs d’Europe de l’Est, opprimés par l’Empire russe, mais la créa-tion, en Erets Israël, d’un centre spirituel capable de rayonner et d’éclairer l’ensemble du monde juif. En ce sens, il s’opposa vio-lemment au sionisme politique et diplomatique inspiré par Herzl, lors des premiers congrès sionistes, qu’il boycotta, se contentant de s’opposer à Herzl à travers ses jeunes disciples et admirateurs,

comme Haïm Weizman. Il est vraisem-blable qu’il considérait le leadership de Theodore Herzl illégitime, parce qu’il ne venait pas d’Europe de l’Est – là où les choses importantes se passaient – mais surtout parce qu’il n’avait ni vécu ni culture juive et ne comprenait pas l’hébreu.

Sa forte personnalité, sa culture, sa connaissance du judaïsme, la virtuo-sité de ses écrits ont impressionné ses contemporains ; de Bialik à Weizman, dont il fut à Londres pendant la première guerre mondiale, l’ami et le confident et c’est à lui en tout premier que Weizman ira montrer la déclaration que Lord Bal-four lui avait remise en novembre 1917.

Il fut également un ami de longue date de l’historien russe Doubnov et l’inspi-rateur de la vision sioniste de Gershom Sholem.

Dans la biographie très fouillée qu’il lui a consacrée et dont je me suis inspiré pour rédiger cet article, Steve Zipperstein appelle Ahad Haam : « The elusive prophet » (le prophète insaisissable). Zipperstein, sans tomber dans l’hagio-graphie, excelle à montrer la complexité du personnage depuis sa première apparition publique à Odessa, jusqu’à sa mort, en 1927, à Tel Aviv.

Pendant son enfance, Ahad Haam fré-quente successivement le héder et la yechiva. Il apprend l’allemand, le fran-çais, l’anglais, le latin et le russe en autodidacte, mais n’entrera jamais à l’université. Il s’intéresse à la littéra-ture de la haskala et poursuit après son mariage des études de philosophie et de sciences. En 1884, il s’installe à Odessa, centre principal de l’Intelligentsia juive à cette époque.

Ahad Haam a fait plusieurs voyages en Palestine, avant de s’y installer définiti-vement en 1922. Chacun de ces voyages exploratoires donnera lieu à une critique sans concession du mode de vie et des

mœurs sociales et politiques qu’il y avait observé. Il n’hésite pas à insister sur l’impréparation, les difficultés que rencontraient les nouveaux émigrants ainsi que les erreurs et les défaillances des cadres chargés de l’achat des terres ; il note également le décou-ragement d’une grande partie des émigrants qui retournaient en Rus-sie après un séjour éprouvant de quelques mois seulement.

■ M a r c K o g e l

Ahad Haam et Bialik

Ahad Haam

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En 1888 il publie dans la revue HaMe-litz un article important intitulé « Lo ze haderekh » dans lequel il critique les buts du sionisme pratique qui envoyait chaque année des colonies en Israël, insistant sur le fait que la Palestine ne pourrait absorber tous les émigrants pour des raisons économiques et qu’il fallait éduquer au préalable les juifs, renforcer leur valeurs sionistes afin que munis d’un véritable idéal, ceux qui étaient volontaires pour la Alya, puissent affronter les difficultés qu’ils allaient rencontrer sur le terrain.

Pour amplifier l’impact de cet article, il cherche à créer au sein du mouvement Hovevei Zion un noyau de militants attachés à ses idées. C’est ainsi que naît le groupe des Bné Moché, qui fonc-tionnera comme une société secrète. Il fallait être introduit par un membre existant, adoubé par Ahad Haam, et signer une charte pour en faire partie. Mais cette société secrète ne subsis-tera pas longtemps car ses membres répartis dans les principales villes de l’empire russe (Odessa, Varsovie et Vilna) ainsi qu’à Jaffa étaient partagés sur de nombreux points ; de plus, ils se trouvèrent incapables de s’accorder sur une ligne commune, d’autant que Ahad Haam souhaitait conserver les objectifs des Bné Moché… secrets. Il était plus un idéologue qu’un leader et était peu enclin à faire des compromis. Il aurait sans doute aimé que les Bné Moché fonctionnent à l’image d’une cour has-sidique, où formés dans les mêmes lieux, on se comprend à demi-mot sans que les raisons et les objectifs ne soient expli-cites et où l’autorité du maître n’est pas discutée.

S’il est un domaine, où incontestable-ment il fut prophète, c’est bien en ce qui concerne les relations avec les habitants arabes de la Palestine ; ainsi, en 1891, au retour de son premier voyage, il écrit dans un article intitulé Emet me-Erets Israël (la vérité sur ce qui se passe dans la terre d’Israël) :« Nous avons l’habitude de croire, à l’étranger, que la Palestine est une terre presque entièrement désolée, un désert non cultivé, un champ en friche, où qui-

conque désireux d’y acheter des terrains pourrait se rendre et en acquérir à sa guise. En réalité, elle ne l’est pas ; sur toute cette terre, il est difficile de trouver un champ de terre arable non semée. Il n’y a plus que des champs de sable et des collines pierreuses tout juste bons à des plantations – et encore, après un long travail et de grands efforts pour les nettoyer et les mettre en état – inex-ploités pour le moment, car les arabes n’aiment pas trop investir dans le présent pour un avenir lointain. C’est pourquoi, on ne trouve pas facilement de bonnes terres à acquérir. Ni les paysans, ni les propriétaires ne sont prêts à vendre de bon cœur une parcelle sans défauts… Nous avons l’habitude à l’étranger de croire que les arabes sont tous des sau-vages du désert, un peuple pareil à l’âne, incapables de voir et de comprendre ce qui se passe autour d’eux. C’est là une grande erreur, l’arabe, comme tous les fils de Sem, a une intelligence aiguë et rusée. Toutes les villes de Syrie et de Palestine sont pleines de commerçants âpres au gain qui savent fort bien exploi-ter les masses… Les arabes, notamment ceux des villes, voient et comprennent le sens de nos actions et de nos aspi-rations en Palestine… ils se taisent… mais en secret ils se moquent de nous… Le jour où la présence de notre peuple prendra une dimension telle qu’elle empiète, de peu ou de beaucoup, sur les positions des autochtones, ce n’est pas de bon gré qu’ils nous cèderont leur place... Si vraiment, et de bonne foi, nous voulons parvenir à nos fins sur la terre de nos aïeux, il ne faut pas nous cacher que nous allons vers une guerre

difficile qui demande à être soigneuse-ment préparée. Il nous faut surtout des chefs intelligents et doués qui, placés en première ligne, iront unifier les actions conformément aux objectifs. Et que per-sonne ne contestera ».

En 1896, il devient rédacteur en chef de la revue HaShilo’h et y consacre l’essentiel de son temps. Ce rôle édito-rial va lui permettre de développer son corps de doctrine ; la prévalence d’un centre culturel animé par une élite (les Bnei Moché) sur l’émigration de masse, son opposition aux efforts déployés par Herzl pour obtenir une reconnaissance internationale et un statut pour les colonies juives installées en Palestine. La tonalité critique de ses articles pro-voque des controverses à répétition et lui procure une posture d’intellectuel non conformiste, dont il tirera une cer-taine jouissance, au point sans doute de se laisser enfermer dans ce rôle d’opposant systématique et pessimiste au sionisme politique et utopique de Théodore Herzl. Pendant toutes ces années, il est associé avec son père - qui continuera quant à lui à fréquenter des Shtibler hassidiques après son installation à Odessa - dans une affaire de commerce de spiritueux, qui finira par faire faillite. Il rejoint alors l’entreprise de thés Wissotsky comme agent à Odessa. En 1900, il visite à nouveau Erets Israël avec une délégation des Hovevei Zion. à son retour, il critique la manière dic-tatoriale dont le baron Edmond de Rothschild et ses représentants dirigent leurs institutions, ainsi que les lacunes dans le domaine de l’éducation juive dispensée par les écoles de l’Alliance.

En 1903, après les pogroms de Kishinev, fortement choqué, il prend position pour la formation de groupes juifs d’autodé-fense. Il voit aussi dans la question de l’Ouganda, l’illustration du détachement manifesté par les sionistes politiques, sans enracinement dans la tradition et la culture juives, vis-à-vis de la centralité et de l’unicité de la terre d’Israël qu’il ne cessait de dénoncer.

Ahad Haam

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H i S t o i r e

16 A.C.T.I. • septembre 2017/5778 • Numéro 38

Ahad Haam émigre à Londres en 1908 où il dirige pendant 15 ans le comp-toir de la société Wissotzky, dont le propriétaire éponyme était un grand philanthrope et un ardent sioniste. Pendant sa période londonienne, Ahad Haam délaisse son activité éditoriale. Eloigné d’Odessa, il apparaît comme privé de l’énergie dont il avait besoin pour être créatif et combatif. Il ne trouve pas vraiment sa place dans cette société policée ou la communauté aspire à s’in-tégrer à la bonne société, où l’élite juive est composée de notables plus que de militants, et où le sionisme semble une cause bien lointaine.

Il accueille la déclaration Balfour avec des réserves, notamment en raison de la question arabe non résolue, mais il voit dans la création de l’Université hébraïque de Jérusalem, en 1918, la réalisation de ses vœux visant à créer

en Erets Israël un centre culturel de haut niveau.

Ahad Haam fait son alya en 1922 et consacre une partie de son temps à l’édition de ses articles sous forme de quatre volumes. à la demande de Dizengoff, premier maire de Tel Aviv, il consentira à devenir un membre actif de la municipalité de la ville et ce, jusqu’à sa mort en 1927.

Sans jamais avoir rempli de poste officiel dans l’organisation sioniste mondiale, Ahad Haam a exercé une très forte influence à travers ses écrits. On peut dire, sans crainte de se tromper, que sa pensée exigeante a fertilisé tous les courants du sionisme par ses analyses pertinentes.

Ahad Haam reste aussi, comme de très nombreux pères du sionisme historique,

un représentant de cette intelligentsia russe marquée par la pensée sociale et le tolstoïsme et qui voit dans le retour à la terre un moyen de régénération des juifs, après 2000 ans de diaspora. Il est aussi un des pionniers de la littérature israélienne du XXe siècle. Toutefois, sa vision pragmatique de la question arabe le distingue de tous les autres penseurs du sionisme, car aucun d’eux n’a entrevu avec autant de lucidité que le dévelop-pement du sionisme ne pouvait faire l’économie, de manière symétrique, du développement du nationalisme arabe dans la population autochtone qui vivait déjà dans le pays.

Un siècle plus tard, les difficultés qu’en-trevoyait Ahad Haam ne semblent pas être dépassées. ■

Bibliographie sommaire :

Sionismes, textes fondamentaux réunis et présentés par Denis Charbit, Albin Michel, 1998.

Walter Laqueur, Histoire du sionisme, Calmann-Levy, 1973.

Steven Zipperstein, Elusive prophet - Ahad Ha’am and the origin of zionism, University of California Press, 1993.

Tous les écrits d’Ahad Haam ont été réédités en hébreu, en 1956, sous le titre Kol kitvei Ahad Ha’am.

On trouvera, dans le livre de Denis Charbit, quelques textes d’Ahad Haam, dont celui que j’ai cité dans l’article.

Ahad Haam, modeste quidam ou figure royale ?

Ahad Haam a semé ici et là quelques cailloux blancs : L’ori-

gine du nom Ahad Haam vient du verset de la Genèse 26,10 ;

Avimelekh, roi des Philistins, utilise cette expression pour

désigner un quidam de son peuple. Toutefois Ahad Haam ne

pouvait ignorer l’opinion de Rachi qui précise que le quidam

en question, désigne le roi par euphémisme, donc derrière le

modeste quidam se cache en fait une figure royale...

Quand il parle des arabes qui habitent la Palestine, Ahad Haam

utilise le qualificatif de “peré adam” (âne sauvage), qui dans

Genèse 16, 12 désigne Ismaël ancêtre des arabes. Ainsi Ahad

Haam critique les préjugés que les habitants juifs manifestent

vis à vis de leurs voisins arabes.

“lo ze haderekh” (le mauvais chemin) est le titre d’un article

d’Ahad Haam écrit en 1889 critiquant l’impréparation dont

font preuve les dirigeants des Hovevei Sion. Cette expression

qui se trouve dans le livre des Rois, renvoie au prophète Elisha

qui dénonce l’aveuglement dont sont frappés tous ceux qui

veulent faire taire le véritable prophète.

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18 A.C.T.I. • septembre 2017/5778 • Numéro 38

C U L t U r e

R e t o u r à O d e s s a

e n France, quand quelqu’un vit bien, on dit en Yiddish : ‘’Er lebt wie Gott in Frankreich (il vit comme D. en

France)‘’. Dans le Yiddish que j’entendais autour de moi dans mon enfance, quand on voulait dire que quelqu’un vivait bien, on disait ‘’Er lebt wie Gott in Odess’’. En cherchant mes racines, j’ai voulu donc comprendre comment vivaient D. et les Juifs à Odessa.

Je dois préciser ici que ma famille (des deux côtés) était originaire d’Ukraine, quelque part entre Odessa et la frontière roumaine, frontière qui a bougé plusieurs fois dans les deux derniers siècles. Quant à moi, je suis né, j’ai grandi et j’ai vécu en Roumanie, dans ses frontières actuelles. Néanmoins, j’ai gardé dans ma mémoire des conversations autour de la table où on parlait de Odessa et des ‘’shtetls’’ étalés jusqu’à la frontière roumaine (en compre-nant aussi la Bessarabie, territoire qui a changé de main plusieurs fois).

Au mois de mai dernier, mon épouse Irène et moi avons participé au voyage d’un groupe juif qui voulait comprendre la vie juive à Odessa dans le passé et dans le présent.

Odessa a été officiellement fondée en 1794 par Catherine ll sur le territoire de la petite ville forteresse de Khadjibey, annexé après la guerre russo-ottomane de 1787 à 1791. Son rêve était de créer un port sur la Mer Noire comme celui créé sur la Mer Baltique par Pierre le Grand. Dès le début, Odessa fut nommée d’après le nom d’Ulysse (Odysseos en grec), fémi-nisé selon le vœu de l’Impératrice. En quelques décennies, la ville était deve-nue un centre commercial important, le plus grand centre d’export de céréales de l’empire russe. Pour en arriver là, on a encouragé l’établissement à Odessa de Grecs, d’Allemands et d’autres popula-tions européennes.

De 1803 à 1814, le Gouverneur d’Odessa et de la nouvelle Russie fut Armand de Plessis, duc de Richelieu. Ayant fui la

Révolution française, il servit dans l’ar-mée russe contre les Ottomans. On lui attribue le tracé de la ville et l’organisa-tion des infrastructures. C’est lui qui avait encouragé l’arrivée des nouveaux colons de Russie intérieure, de Galicie, de Molda-vie, qui étaient attirés par l’exemption de taxes les années suivant leur installation. Le duc de Richelieu fut aidé dans sa tache par un officier d’origine espagnole, Joseph de Ribas (Iosif Deribas en russe).

Odessa a été aussi la seule grande ville de l’empire incorporée dans la ‘’zone de résidence’’ où les Juifs avaient le droit de s’établir. La ville s’est développée rapide-ment. Sa population est passée de 4 573 personnes (dont 3 182 hommes) en 1799, à 25 à 30 000 en 1813 et entre 80 à 90 000 en 1851.

La population a triplé entre 1862 et 1892, quand on a recensé 404 000 habitants. Parmi eux il y avait 124 511 Juifs, qui for-maient le deuxième groupe ethnique en nombre, presque aussi nombreux que les Russes. Il y avait aussi de nombreux Armé-niens, Turks, Tatars, Polonais, Allemands, Grecs, Italiens, ainsi qu’un petit nombre de Français et Anglais.

Le Duc fit agrandir le port par lequel s’ef-fectuait l’exportation du blé vers Marseille et la ville était ouverte vers l’Europe. En 1823, quand le poète russe Alexandre Pouchkine fut envoyé en exil à Odessa où il a vécu pendant environ une année, il a écrit dans ses lettres que Odessa était une ville ‘’où on peut sentir l’Europe’’. Et les Juifs dans tout ça ?

En 1797, il y avait dans la petite ville de Khadjibey 135 Juifs, une petite com-munauté qui avait une synagogue, une Hevrah Kadisha, un hospice pour les pauvres, un Talmud Torah. Dix ans plus tard, les Juifs représentaient le groupe ethnique le plus dynamique de la ville sur le plan commercial. Le noyau dur était formé par les Juifs venus de

Galicie, surtout de la ville de Brody, qui travaillaient comme intermédiaires dans le commerce de céréales. Entre 1820 et 1830, environ, 300 familles se sont éta-blies dans la ville. Ils ont pris rapidement le leadership communautaire, organisé et démarré la première école juive moderne. Son directeur, Betsalel Stern et un grand nombre d’enseignants faisaient partie du mouvement de la Haskalah.

Vers 1860, Odessa était devenue un important centre culturel juif. Des jour-naux comme Razsvet, Sion et Den’ apparaissaient en langue russe, Ha-Me-lits en hébreu et Kol mevasser en yiddish.De nombreux écrivains, poètes et pen-seurs juifs ont vécu à Odessa : Mendele Moykher Sforim (Shalom Yakov Abra-movitch), appelé “le grand-père de la littérature yiddish’’, Shalom Aleikhem (Shalom Rabinovitch), Haïm Nachman Bialik, Shaul Tchernikovsky, des historiens qui ont mis les bases de l’étude moderne de l’histoire juive comme Shimon Dubnow (qui a créé les bases de l’enseignement scientifique de l’Histoire Juive) ou Yosef Klausner (qui émigra en Palestine man-dataire en 1918, et fut ensuite professeur d’histoire juive, spécialiste de la période du deuxième temple, à l’Université Hébraïque de Jérusalem), Ahad Haam (Ascher Hirsch Ginsberg), promoteur du sionisme spirituel opposé au sionisme politique de Herzl et beaucoup d’autres, sans oublier Zeev (Vladimir) Jabotinsly qui avant d’être le fondateur et la figure la plus importante du sionisme révisionniste avait été journaliste dans sa ville, Odessa.Le centre nerveux du sionisme russe était le Comité d’Odessa de Hovevé Zion, dirigé par le médecin Lev Pinsker, auteur d’un ouvrage de réflexion bien connu qui s’ap-pelait ’’ l’Auto-émancipation’’. Le port d’Odessa était le principal port de départ vers l’Empire Ottoman et servait donc comme point de départ pour beau-coup de Juifs partant vers la Palestine.

■ L é o n B o r o c i n

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Alors, tout était parfait à Odessa du point de vie juif ?

Il est vrai qu’en 1897 le nombre de Juifs à Odessa était de 139 984, représentant 34,6 % de la population locale. Il y avait une vie culturelle juive intense, les institu-tions communautaires se développaient, le Talmud Torah était à un très bon niveau, l’hôpital juif (qui acceptait aussi des malades non-juifs) occupait quatre pâtés de maisons, l’école professionnelle locale Troud était connue dans tout l’empire. A la fin du 19e siècle, plus de 70 % du commerce et environs 50 % des entre-prises industrielles étaient dans les mains des Juifs. Plus de la moitié du personnel médical de la ville (médecins, dentistes, sages femmes, pharmaciens) étaient Juifs.

Mais…

Un grand nombre de Juifs ‘’éduqués‘’ avaient tendance à s’assimiler en quittant la communauté. Cette tendance se mani-festait surtout parmi les Juifs de Brody, venus de Galicie et qui avaient subi l’in-fluence ‘’des lumières’’.

Par ailleurs une grande partie de la popu-lation juive vivait dans des conditions très précaires. Environ un tiers était inscrit sur les listes de la Communauté pour rece-voir une aide leur permettant d’acheter des matzot pour Pessah. Le quartier Moldovanka (qui existe tou-jours) était peuplé de juifs très pauvres. Il avait une mauvaise réputation, car il y avait aussi une mafia juive. D’ailleurs sur les 36 maisons de tolérance enregistrées dans la région de Kherson (Odessa et les territoires avoisinants) 30 appartenaient à des Juifs.Le personnage de Benya Krik dans Contes d‘Odessa d’Isac Babel est basé sur un personnage mafieux réel Moishe-Yakov Vinitzky surnommé Misha Yapontchik.

Des pogroms ont eu lieu à Odessa en 1821, 1859, 1871, 1881 et en 1905. Pen-dant trois jours en 1905, environ 400 Juifs ont été tués et des milliers ont été blessés. Des milliers de juifs sont restés sans abris.

Avant la Pâque orthodoxe, on craignait souvent la tension entre les Juifs et les

Grecs et ça pouvait donner lieu à des bagarres ou même à des meurtres de Juifs.

Pendant la Révolution d’Octobre et la guerre civile qui a suivi, Odessa est pas-sée neuf fois entre les mains des Russes ‘’blancs’’, des nationalistes Ukrainiens, des troupes françaises et des Commu-nistes. Des Juifs étaient souvent tués par des combattants anti-communistes ukrainiens. Le pouvoir soviétique s’est consolidé en 1920. Peu après, des écoles juives, synagogues et presque toutes les institutions culturelles non-communistes ont été fermées. La Evsektsya et le Kom-somol ont mené une campagne contre les « Hebraïstes ». Bialik et autres écrivains et poètes qui écrivaient en hébreu ont reçu la permission de quitter le pays en 1921.Des mauvaises langues disent même que certains des voyous juifs de Moldovanka étaient devenus des commissaires poli-tiques…

Entre les années 1917 et 1919 Odessa avait produit 60 % des livres édités en hébreu dans toute la Russie. En 1923 il n’y avait plus à Odessa que 12 écoles offi-ciellement dénommées ‘’écoles en langue Yiddish‘’ (aucune en hébreu). Les nom-breuses bibliothèques juives avaient été fusionnées en une seule, la bibliothéque Mendele Moykher-Sforim. Un seul journal en Yiddish a continué à paraître trois ou quatre fois pas semaine. Toute activité sioniste avait été interdite.Dans les années 1920 et le début des années trente, il y avait encore une faculté de langue Yiddish à l’université locale et des tribunaux où les débats avaient lieu en Yiddish… En 1925, la grande Synagogue Brody est devenue le “Club des Travailleurs Rosa Luxembourg’’. (à ce sujet, il faut mention-ner que le Conseil Municipal n’a voté que très récemment la restitution du bâtiment à la Communauté juive (même si le “club des travailleurs’’ n’existe plus depuis des décennies …).La seule institution culturelle juive qui a continué à fonctionner pendant les années trente a été le Théâtre Yiddish. Ce qui est resté aussi pendant cette période était une sorte de dialecte local, un mélange d’ukrainien, russe et yiddish qui résonnait souvent dans la rue.

En 1939, le nombre de Juifs à Odessa était d’environ 200 000 (à peu près un tiers de la population de la ville).

Pendant l’été 1940, conformément au pacte Ribbentrop – Molotov, l’URSS a annexé la Bessarabie et le sud de la Buco-vine (territoires roumains). En Juin 1941 l’armée allemande a attaqué l’Union Soviétique, la Roumanie étant alliée aux Allemands.

Odessa a été occupée par les troupes rou-maines et allemandes le 16 octobre 1941 après un siège de deux mois. Environ la moitié de la population juive avait réussi à quitter la ville avant l’occupation et à partir vers l’est (souvent vers les répu-bliques soviétiques d’Asie Centrale) ou avait été mobilisée dans l’Armée Rouge dès le début de la guerre. Néanmoins entre 80 000 et 90 000 Juifs étaient res-tés sur place.

Odessa faisait partie de la zone d’occu-pation roumaine, une zone géographique assez étendue et que le Maréchal Antonescu, dictateur de la Roumanie, espérait pouvoir garder après la victoire des Allemands. Cette zone dénommée à l’époque Transnistrie (rien à voir avec la petite Transnistrie actuelle, région séparatiste de la République de Mol-davie d’aujourd’hui) avait comme gouverneur un général roumain nommé par Antonescu.Dès l’occupation de la ville, le Gouverneur roumain ordonne le recensement de tous les hommes y résidant, les Juifs devant se faire enregistrer séparément.Plusieurs milliers de Juifs sont pris comme otages. Ceux qui étaient accusés d’acti-vité communiste étaient fusillés. Tous les Juifs d’Odessa devaient porter l’étoile jaune. Pendant les premiers jours d’occu-pation 8 000 civils (d’après des sources soviétiques), la plupart faisant partie de l’intelligentsia juive, sont tués. Des militaires roumains pillent des maisons juives, battent les hommes et violent des femmes. Beaucoup de Juifs sont arrêtés dans la rue sans aucune raison.

Le 22 octobre 1941, des partisans sovié-tiques ont posé une bombe au siège du commandement militaire roumain

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C U L t U r e

d’Odessa, tuant un grand nombre de militaires roumains et aussi quelques allemands. En représailles, durant la nuit, 5 000 Juifs sont exécutés, pendus à chaque lampadaire le long des boule-vards. Le 23 octobre 19 000 Juifs sont exécutés et leurs cadavres arrosés d’es-sence et brûlés. Des milliers sont encore tués les 24 et 25 octobre.Le 1er novembre 1941 il n’y avait plus à Odessa que 35 ou 40 000 Juifs qui furent transférés dans un ghetto situé dans une commune de banlieue (Slobodka).Ensuite ils furent emmenés dans des camps à Berezovka, Domanevka et Bog-danovka. Là ils mouraient de froid, de faim et de maladie. à Bogdanovka, des milliers furent assassinés.

L’Armée Rouge a libéré Odessa le 10 avril 1944. D’après les estimations de Yad Vashem, 99 000 des 201 000 Juifs vivant à Odessa avant la guerre, ont péri dans la Shoah.

Après la libération la ville était en partie ruinée et dépeuplée et l’ambiance était devenue antisémite. Les Juifs qui avaient été démobilisés ainsi que les familles qui étaient réfugiées dans d’autres régions de l’URSS reviennent. Après les années sombres d’après guerre la ville commence à se développer. La déstalinisation ouvre les portes et la majorité des Juifs odessites comme les Juifs du reste de l’ex-URSS émigrent vers Israël, vers les Etats-Unis et vers l’Europe de l’Ouest. Le départ vers Moscou et Léningrad a été aussi très important, tandis qu’à Brooklyn on trouve maintenant un quartier surnommé Little Odessa…

Je ne veux pas m’attarder sur les impres-sions personnelles qui sont forcément subjectives, par exemple le goût du Borsht, du Schnitzel, des Varenikes ou des Knishes qu’on peut manger (parmi beaucoup d’autres bonnes choses) au res-taurant casher qui se trouve au sous-sol de la Grande Synagogue et qui me rap-pelaient le goût des merveilles cuisinées par ma mère ou ma grand-mère z’l, mais tout de même : la balade dans les rues de la ville, le marché plein de fleurs et de parfums familiers, l’escalier de Potemkin refait à neuf et descendant directement

du film d’Eisenstein… et de l’autre côté de cette mer bleue (mais dite Noire), les plages roumaines, que j’ai bien connues il y a soixante ans… Ensuite les pensées m’envahissent et je me demande par les-quelles de ces ruelles est passé un de mes grands parents ou grands oncles ? Je voudrais aussi dire un mot de l’office de Kabbalat Shabat de la même Synagogue. J’ai rarement vu une telle ferveur dans la prière ainsi que dans la danse hassi-dique, partagée par des Juifs portant un Shtreimel et un long caftan noir, d’autres le chapeau noir des Loubavitch et des jeunes portant une casquette tournée à l’envers et habillés de telle manière que, si je les avais rencontré dans la rue, j’aurais eu tendance à changer de trottoir.

Il y a aujourd’hui à Odessa une com-munauté forte de 30 000 âmes, des synagogues, deux journaux juifs, une Université Populaire Juive avec envi-ron100 étudiants, un organisme d’aide aux personnes âgées. Le Musée juif, un petit musée situé dans le fond d’une cour, concentre beaucoup d’in-formations sur la Shoah à Odessa, mais aussi des objets donnés par des familles et qui nous rappellent la manière dont vivaient les gens avant. Je dois avouer que certains objets de la vie de tous les jours m’ont donné l’impres-sion de me trouver dans la maison de mes grands parents…

Il y a à Odessa des écoles juives, dont l’école Habad-Avner qui est une des plus grandes écoles juives de l’ex-URSS. Le jardin d’enfants Habad est ouvert aux enfants à partir de 9 mois. Ils y apprennent aussi l’hébreu et l’anglais. D’autres éta-blissements ouverts aux enfants juifs sont situés dans les grands quartiers d’Odessa.L’école ORT dont 80 % des élèves sont Juifs offre une éducation juive et une for-mation technique moderne de très bon niveau.

En se baladant dans les rues du centre-ville (propres, avec de belles vitrines), on tombe parfois sur des plaques accrochées aux murs extérieurs et qui mentionnent que dans tel immeuble avait vécu tel Membre de l’Académie des Sciences de

l’URSS ou tel Héro de l’Union Soviétique. Les noms sur ces plaques ont très souvent une résonnance juive. La ville est propre et belle. D’ailleurs beaucoup d’architectes juifs y ont contribué. De même on peut voir des maisons comme celle dans laquelle a vécu long-temps Shalom Aleikhem ou celle de David Oistrakh.Il faut mentionner aussi que le bâtiment de l’Opéra est magnifique (où nous avons écouté une Dame de Pique très bien chan-tée) ; que la très belle salle des concerts du Musée de la Littérature n’a pas beau-coup changé depuis le temps où Vladimir Zeev Jabotinsly y donnait des conférences pour défendre ses idées ; qu’au-dessus de la porte d’entrée du bâtiment qui avait abrité au 19e siècle le Comité Juif d’Odessa il y a une inscription (en russe et en hébreu) : “Ici est né l’Etat d’Israël moderne’’. En effet, ce Comité collectait des fonds qui avaient permis d’acheter les premiers terrains sur lesquels avait été fondée la ville de Tel Aviv, ainsi que le pre-mier terrain pour l’Université Hébraïque de Jérusalem.

Pas loin du quartier Moldovanka, on trouve un monument à la mémoire des Juifs morts dans la Shoah et un autre monument à la mémoire des Justes parmi les Nations qui ont sauvé des Juifs en ris-quant leurs vies.

Par ailleurs il faut remarquer que l’aspect du quartier Moldovanka n’a pas beau-coup changé avec les années, même si le célèbre mafieux Benia Krik (décrit par Isaac Babel dans ses « Contes d’Odessa ») n’est plus là. Qui sait, ses descendants y sont peut-être…

Et maintenant, je sens le lecteur (ou la lectrice) de ces lignes impatient(e) de me poser la question : “nou, wie azoï lebt Gott jezt in Odess ?’’. En bon Juif je serais tenté de lui répondre par une autre question :‘’und wie azoï lebt er jetzt in Frankreich ?‘’. ■

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« Nous devons aider les personnes handicapées et leur entourage à mieux vivre et notamment leur permettre de partir en vacances. »

Aidons les plus fragilesà vivre mieux

Une école juivede qualité et ouverte« Si on fait le choix de l’école juive, on désire que nos enfants évoluent dans un encadrement sécurisé et bénéficient de la meilleure éducation. »

David et Sarah P.Entrepreneur finance / Avocate

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Nos enfantssont une priorité« Aider les enfants malheureux à s’en sortir est une priorité, ils sont l’avenir d’Israël et nous devons miser sur eux. »

« Des familles entières ne peuvent pas se nourrir correctement. Régler une simple facture, immédiatement, peut parfois changer une vie. »

Il faut savoir agirdans l’urgence

Laurence S.Maman à temps plein

Action Féminine de CollecteParis

“Je soutiens l’Appel Unifié Juif de France”Barbara B.

RadiologueAUJF Comité médicalSaint-Mandé

Oui, je donne sur aujf.org

Jeunesse

Vie associative

Education

Culture

Social

Israël

Fonds Social Juif Unifié

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m U S i q U e

De Heinrich Schütz à Michaël Levinas De la Passion à la Passion après Auschwitz

V oici juste trois mois, à l’église Saint-François de Lausanne fut créée

par l’Orchestre de chambre et l’ensemble vocal de Lausanne sous la direc-tion de Marc Kissoszy, la « Passion selon Marc, une Passion après Auschwitz » de Michaël Levinas pour le 5e centenaire de la Réforme. La cathédrale Saint-Pierre à Genève puis la cathédrale Saint-Nicolas à Fribourg prolongèrent la création de l’œuvre. à quand la création en France ? Un livre, Une Passion après Auschwitz ? Autour de la Passion selon Marc de Michaël Levinas (Beauchesne, Paris) paraît sous la direction de deux théologiens protestants helvètes, Jean-Marc Tetaz et Pierre Gisel. Dans le même temps paraissait en Allemagne le 1er volume de l’Œuvre complet (die Gesamteinspielung) de Heinrich Schütz (1585-1672), le génial précurseur de Bach, contemporain de Monteverdi. Le volume de 8 cds interprété par le Dresdner Kammerchor, direction Hans-Christoph Rademann (Carus-Verlag), comprend en particulier Musikalische Exequiem, ses Cantiones sacrae, les Psaumes de David, la Lukas-Passion et les Sept Paroles du Christ (Die sieben Worte, vers 1643). Confronter ou mettre en perspective le très luthérien Schütz et le musicien juif Michaël Levinas, fils du grand philosophe Emmanuel Levinas, que séparent quelques 380 ans, donne assurément le vertige. Si au hiératisme et au génie baroque de Schütz, né tout juste un siècle avant Bach, répond la postmodernité de Levinas, il y bien sûr un autre élément à prendre en considération : la Shoah, nommée à dessein par Jean-Paul II « le Golgotha du monde contemporain ». Rupture abys-sale, inchoative pour toute la culture et l’art d’Occident. On ne peut que se lais-ser entraîner à la contemplation par la beauté de la partition des Sept Paroles,

une épure de musique, quasiment sans en com-prendre le sens, alors qu’il y va tout autrement pour M. Levinas.

Avec Levinas aujourd’hui, comme avec l’Auschwitz Oratorio (1967, Oratorium ob memoriam in pernicei

castris in Oswiecm necatorum inexstingui-bilem reddentam – Oratorio pour perpétrer à jamais la mémoire des victimes du camp d’extermination d’Auschwitz-Birkenau) de Krzrysztof Penderecki (né en 1933), une Passion assurément catholique et polonaise après 1945, ou Darius Milhaud (1892-1974) avec son oratorio Ani Maa-min sur un texte d’Elie Wiesel, ou tout autre compositeur qui se soit peu ou prou confronté à la question de la Passion du Christ, l’événement central de l’histoire de l’Occident, avec la Shoah, seul un déchire-ment de la musique permet d’appréhender l’anti-monde ou « royaume de la nuit », que fut cette extermination-là. Les musi-ciens qui se sont vraiment confrontés à cette horreur, ont accompli dans la synes-thésie de l’âme une composition à la fois apocalyptique et théologique.

Une Passion composée depuis 75 ans ne peut être par essence qu’une Passion après Auschwitz. Après l’Auschwitz-Ora-torio – Dies Irae et le Passion selon Saint-Luc de Penderecki, voici donc cette Passion selon Marc de Levinas !

Les chromatismes, l’émancipation de l’harmonie classique, dans le travail de la voix humaine, font toute la modernité de ces Passions ou de ces puissants orato-rios depuis Schoenberg dans Un Survivant de Varsovie autant que dans son ultime opéra Moses und Aron (Moïse et Aaron) ; ils atteignent leur paroxysme avec des œuvres comme celles de Penderecki ou aujourd’hui Levinas.

Le travail sur les textes y est aussi capi-tal : suivre l’Evangile pour dire la Passion du Christ, comme suivre l’ordinaire de la messe, est la contrainte dont s’étaient déjà affranchis quelques compositeurs, en particulier le génial Schubert dans ses Messes, quand il coupait dans le texte latin traditionnel ce qui ne lui plai-sait pas, ou Brahms dans son Deutsche Requiem (/Requiem allemand/). Pour dire la Passion des Juifs sous Hitler, la Passion de l’Homme partout où il fut – où il est – exterminé, torturé, écrasé, Penderecki, dans son /Dies Irae/ à la mémoire des victimes d’Auschwitz, se libère complè-tement du rituel latin qui ne dit rien de l’horreur de la tragédie incommensurable qu’il met en musique. Il cite alors par bribes la Bible hébraïque ou chrétienne, Eschyle, Aragon, Valéry, Wladyslaw Bro-niewski et Tadeusz Rózewicz. Œuvre terrible et magnifique où l’horreur des cris des victimes traverse la musique.

C’est ce que fait Michaël Levinas en créant une liturgie en trois langues et trois temps, « le premier est en araméen et en hébreu. Il reprend les prières pour les morts [Kaddish et El molé Hakhamim] et l’énumération des noms, le deuxième est le récit de la Passion selon Marc jalonnée par les ritournelles de la souffrance de la Mère, le troisième chante la poésie de Paul Celan et la souffrance du fils qui a survécu à une mère qui n’aura jamais de cheveux blancs et qui ne reviendra pas. » Ainsi parle Michaël Levinas, qui est probable-ment le premier ou parmi les tout premiers compositeurs à avoir grandi dans la tradi-tion juive observante, et qui ait composé une Passion en écho aux extraordinaires Passions de Bach et Schütz. M. Levinas explique que pour être fort loin de l’esprit de Bach – et on le conçoit sans mal – il n’en a pas moins été saisi dès son jeune

■ Michaël de Saint-Cheron

Michaël Levinas

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âge par la Matthaüs-Passion, dont il a « étudié [l’écriture] très attentivement et dont je connais les moindres détails » . Remarquons qu’il a choisi une traduction française du XIIIe siècle, transcrite pour l’occasion par son confrère Michel Zink, de l’Institut, où lui-même siège à l’Aca-démie des beaux-arts. Il affirme, dans son dialogue avec sa femme, la philosophe et musicologue Danielle Cohen-Levinas, à l’œuvre importante, un élément capi-tal, à savoir « qu’un point névralgique de l’approche de Bach a consisté à faire entendre dans le récit des évangiles un chant liturgique qui est à la fois récit, action et communion » (Une Passion après Auschwitz, op. cit., p,245).

Personne avant Michaël Levinas n’avait encore osé – si l’on peut dire – mettre en quasi parallèle le Eloï Eloï lama sabachtani (mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ?) de Jésus juste avant de mourir, et le Kaddish que tant de Juifs parmi les plus pieux devaient réciter ou hurler dans les chambres à gaz ou dans les fossés où ils étaient abattus nus avant de tomber sur un lit de cadavres. Nous sommes là avec M. Levinas devant un double abîme d’horreur, d’une part, la mort d’un prophète, adoré comme le Messie, le Fils de l’Homme, par les chré-tiens du monde entier, d’autre part, la

mort de 6 millions d’êtres humains, de la famille, de la race de Jésus, exterminés parce que Juifs et donc en quelque sorte parce qu’étant le peuple même d’où vint l’idée de Salut et de Rédemption. Michaël Levinas a réussi dans son œuvre avec ses chœurs et ses quatre personnages un exploit théologique comme jamais, ainsi que nous le disions. Les quatre voix sont l’évangéliste joué par Guilhem Terrail, Jésus par Matthieu Dubroca, qui l’incarne avec tant d’humanité, Mariam, la mère éplorée, par Magali Léger et sans doute la voix la plus troublante et poignante, celle de Marie-Madeleine, chantée par Marion Grange, qui transfigure son rôle.

Le chœur de Lausanne chante les par-ties dévolues aux Juifs, de toute éternité, dans la Passion, sauf que dans celle-ci, la Passion s’inverse imperceptiblement en une époustouflante « Passion d’Israël » comme la nomma Emmanuel Levinas le premier sans doute, avec cette autorité qui faisait que même les plus rigides des Juifs n’osaient pas tout à fait le contredire. Oui, il y a bien une Passion d’Israël et c’est là tout le grand talent de Michaël Levi-nas, que de la rendre en musique – après Penderecki dans son Auschwitz-Orato-rio. Mais l’introduction du Kaddish dans l’œuvre est aussi dû à l’apport sensible et si clairvoyant de Danielle Cohen-Levinas.

S’il est sans doute moins périlleux (et encore !) d’aborder les Passions de Schütz et Bach « en prose », c’est qu’elles sont célébrissimes, que ce soit la Mat-thaüs-Passion ou la Johannes-Passion du Cantor de Leipzig, alors qu’aborder la musique de Levinas pour des lecteurs qui ne la connaissent pas est fort complexe, sinon impossible. Nous attendons avec impatience – le mot est faible – qu’une firme de disque publie enfin le cd de cette Passion selon Marc – Une Passion après Auschwitz, signée par l’un de nos compositeurs contemporains majeurs, au même titre que Milhaud, Mes-siaen ou Penderecki.

L’œuvre sera créée en France au Festival Musica à Strasbourg le 21 septembre (1er jour de Rosh hashana) avec les mêmes interprètes de Lausanne sous la direc-tion toujours habitée de Marc Kissoczy, auxquels l’honneur d’avoir créé cette Passion après Auschwitz revient. Longue vie à cette œuvre qui fait événement, « epochemachend » comme disent les philosophes ! ■

Avec l’aimable autorisation du Huffington Post France et des Cahiers Bernard-Lazare.

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m é D e C i n e i S r a é L i e n n e

Eliahu de Luna Montalto (1567-1616), un grand médecin et un juif fier de son appartenance dans la période la plus noire de l’Inquisition

ala période médiévale et pendant la Renaissance, les théologiens catholiques, la Papauté en tête, se

sont acharnés contre les juifs. Ainsi en 1536 au Portugal, sont mises en place persécutions et conversions. Les juifs convertis sont appelés Conversos ou Maranos (c’est-à- dire « Porcs »). Les médecins juifs étaient interdits d’exercice en France par le « bon » Roi Henri IV. En dépit de cette atmosphère nauséabonde, les médecins juifs étaient tenus en haute estime et les Rois, sans se départir d’une belle hypocrisie, recouraient surtout aux médecins juifs lorsqu’ils étaient malades. Une anecdote est rapportée par G.M. Weisz dans le Rambam Maimonides Medical Journal de janvier 2017 : Le roi François 1er, en grande difficulté de santé, fit appel à un médecin juif espa-gnol ; pourtant, il refusa de se confier à lui lorsqu’il apprit que ce médecin n’était pas un « vrai juif », mais « un juif récem-ment converti ». Revenons à notre Elie Montalto. Il naquit au Portugal en 1567 de parents maranes et n’apprendra ses origines qu’à l’âge adulte. Il fit en tant que chrétien de très belles études à l’Uni-versité de Salamanque (Espagne), avant de voyager en Europe et notamment en France. Sa renommée vint de ce que, appelé par la Reine Marie de Médicis, au chevet de sa confidente, Leonora Gali-gai-Concini. Il sut l’apaiser, si ce n’est la guérir au grand dam du Roi Henri IV, antisémite convaincu, l’époux de Marie de Médicis. Montalto, de plus en plus attaché à ses origines juives, chan-gera son prénom de Felipe (amoureux des chevaux) en Philotheo (amoureux

L’hôpital Rambam (Haifa) rend hommage à Shimon Péres

L’hôpital Rambam est profondément ému par la disparition de Shimon Péres, 9e Pré-sident d’Israël. C’était un homme avec une vision et capable d’agir pour promouvoir la paix et la sécurité. R. Beyar, directeur de Rambam, ajoute : « Il fut un ami de notre

hôpital et reçut en 2015 la médaille de Rambam, le plus grand honneur que nous puis-sions lui rendre. Nous avons apprécié son rôle de visionnaire en matière de technologie. Laissez-moi rappeler un souvenir : C’était à la fin de Chavouot, en Galilée,nous étions devant un paysage serein et Shimon Péres parlait du nécessaire besoin d’amour dans l’humanité, mais aussi de la complémentarité entre médecine et technologie et de la vie quotidienne. Une autre fois, Shimon Péres dans un discours devant 2 000 personnes réunies à l’hôpital Rambam, eut des propos passionnants sur le futur de la médecine. Il insista particulièrement sur l’aspect multi culturel de notre hôpital où se côtoient Juifs, Chrétiens et Musulmans, sur la fraternité de ceux qui se penchent sur les malades et l’espoir qu’il avait dans une coexistence pacifique dans un futur proche Que sa mémoire soit bénie ».

Est-il légitime d’enfreindre les interdits du Chabbat pour aller soutenir moralement un proche parent malade et hospitalisé ?

Cette question religieuse se réfère essentiellement à l’utilisation inter-dite de la voiture le jour du Chabbat.

Elle a été traité par le doyen de la Faculté des Sciences et de la Santé de Jérusalem, Chaya Greenberger (Rambam Medical Journal, octobre 2016). Les éléments du débat sont intéressants en ce qu’ils montrent le souci permanent des auto-rités rabbiniques de soutenir partout et toujours « tout ce qui favorise la vie ». Encore faut-il comprendre ce en quoi la présence d’un proche parent au lit d’un malade éprouvé est potentiellement utile au maintien de sa vie. Traditionnellement les hôpitaux ont tendance à restreindre, voire interdire les visites, chez les patients gravement malades ou admis en soin intensif. Les raisons invoquées sont liées au risque infectieux que pourrait induire le visiteur, ainsi qu’à la gêne aux

soins liés à sa présence. La maladie grave est une agression physique, mais aussi existentielle. Le malade, dans un environ-nement étranger, peu propice à apaiser son angoisse sur un futur incertain, déve-loppe anxiété et dépression. Ces troubles majorent son état, participe à sa détresse et favorisent son incapacité à tirer profit des soins apportés par l’équipe médi-cale… Un malade qui s’abandonne est bien plus difficile à apaiser par les drogues !C’est pourquoi l’Association Améri-caine pour les soins intensifs autorise les proches de la famille à rester en permanence auprès du malade. Ces considérations ont conduit les autori-tés rabbiniques à lever les restrictions concernant les déplacements le jour du Chabbat, lorsque la présence d’un ou des proches peut bénéficier au soutien moral d’un grand malade.

En d i rect de l ’ I s rae l i Medica l Assoc ia t ion ( I MA) et des hôpi taux israé l ien par le Professeur Bernard Lobel, Paris

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de Hachem) et quitta la France pour Livourne où le Duc de Toscane, Ferdinand Premier de Médicis, favorisait l’implanta-tion d’une communauté juive. Montalto pourtant, après avoir brillamment réussi, décida d’abandonner honneurs et richesses à Florence, pour se consacrer à la population juive et pauvre du ghetto de Venise. Il restera 4 ans dans cette ville avant d’accepter l’invitation du Roi de France en 1612 auquel il soumettra ses conditions. Il devient alors à nouveau le médecin privé de Marie de Médicis. Montalto est au plan médical un suiveur d’Hippocrate et Galien, un précurseur de Freud. Il s’intéresse autant au psychique qu’au somatique, ce qui plaisait à la Reine et sa confidente dont les ennuis étaient plutôt psycho-somatiques. Il s’il-lustre dans la publication de deux livres, l’un à propos de l’œil « Optima – théorie de la vision » (1606) où il démontre que

la vision ne se fait pas dans l’œil mais dans le cerveau. Il tire sa conviction des textes de l’Exode 20*18 : « …et tout le peuple vit les voix – kol haam roim et hakolot… ». Le deuxième livre « Archi-pathologia » (1614) est un traité sur les troubles neurologiques et mentaux où il décrit aussi bien les maux de tête et l’épi-lepsie, la mélancolie et les cauchemars que les vertiges. Les traitements qu’il propose dans chaque cas sont remar-quables. Montalto débattra, en forme de disputation, avec un théologien domi-nicain, à propos des différences entre les deux testaments. Convaincu de ses croyances juives, Montalto sera le pre-mier polémiste juif à qui l’on n’interdira pas d’exercer son art. Il affirmera sa foi en la complétant de son grand profes-sionnalisme médical. Il mourut en mai 1616 après avoir été contaminé à Tours par la peste. Et comme il n’y avait pas de

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cimetière juif en France, il sera enterré à Amsterdam à la demande de la Reine de France. Sur sa tombe sera écrit en latin et hébreu : « Eliahu Montalto, médecin de la Reine de France ». Ironie de l’histoire, sa patiente bien-aimée, Leonora Galigai Concini sera décapitée en 1617, un an après la mort de Montalto comme « sor-cière juive ». Il s’en fallut de peu qu’un tel sort n’échut à notre héros. ■

Avec l’aimable autorisation du Huffington Post France et des Cahiers

Bernard-Lazare.

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V o y a g e

ZAKHOR - Comment la ville de Thessalonique commence à se souvenir du massacre du quart de ses habitantsLa catastropheEn l’espace de six mois, entre le 15 mars et le 7 août 1943, les 48 500 juifs de Thes-salonique étaient déportés par les Nazis vers Auschwitz et Bergen-Belsen : 46 091 y ont été assassiné (96 %). (A titre de com-paraison, en France 76 000 juifs ont été déportés). Seulement environ 1 500 sont revenus dans leur ville à la fin de la guerre et ont rencontré de grandes difficultés à se réinstaller. Non seulement les vivants mais aussi les morts ont été effacés : déjà à la fin de 1942 le cimetière juif, un des plus grands d’Europe avec environ 350 000 tombes sur 324 000 m² était rasé et le ter-rain nivelé, terrain sur lequel a été construit l’actuelle Université Aristote.

Ainsi prenait fin une des plus anciennes communautés juives d’Europe, celle qui était appelée la « Mère d’Israël » et la « Jérusalem des Balkans », une rare ville européenne où les Juifs avaient été majo-ritaires dans la population, au point que le port cessait son activité le Chabbat.

Ce qu’était SaloniqueSalonique est la dénomination utilisée par les Juifs - qui parlent le judéo-espagnol- à la ville dont le nom grec est Thessalonique. Aujourd’hui Thessalonique, située au nord de la Grèce, est la deuxième ville du pays avec une population de 330 000 habitants (agglomération de 800 000 habitants). Avec son port commercial et son nœud de com-munications terrestres et maritimes, c’est un pôle important de transports et d’activités pour les pays de l’Europe du Sud-Est.

La ville a été fondée en – 315 par le géné-ral Cassandre, qui lui a donné le nom de son épouse, Thessalonikè, sœur de Alexandre. La présence juive remonte à l’Antiquité, comme l’atteste l’épître aux Thessaloniciens de Paul de Tarse destinée

aux Juifs de la cité. En 1170, Benjamin de Tudèle dénombre 500 Juifs à Salonique. A partir de 1430, et jusqu’à 1912, les Otto-mans occupent Salonique.

Ce n’est qu’après l’expulsion des Juifs d’Espagne en 1492 que Salonique devint progressivement un foyer d’accueil pour de nombreux Juifs en provenance d’Espagne, soit directement, soit après un passage par le Portugal ou par l’Italie du Sud. A partir de 1540, ce fut au tour des Portugais qui cherchaient refuge à la suite de la politique d’expulsion ou de persécution des mar-

ranes. En plus de ces sépharades arrivèrent des ashkénazes originaires d’Autriche, de Transylvanie, de Hongrie, parfois transférés de force à la suite des conquêtes de Soliman le Magnifique en 1526. En 1519, les Juifs représentaient déjà 56 % de ses habitants, et en 1613 68 %, mais ils n’exerceront jamais de pouvoir politique. Les principales activités étaient le négoce et la filature de la laine, exportée dans tout l’Empire ottoman ou destinée aux armées du Sultan.

La particularité des Juifs saloniciens étaient qu’ils occupaient toutes les niches économiques, et n’étaient pas cantonnés à quelques secteurs comme c’était le cas là où les Juifs étaient minoritaires. On les retrouvait à tous les niveaux de l’échelle sociale, du portefaix, du docker, du pêcheur jusqu’au grand négociant.

Salonique devint aussi un grand centre intellectuel et d’éducation avec de nom-breuses yechivot, et l’introduction de l’imprimerie. Elle fut la terre d’accueil du faux messie Sabbataï Tsvi, et ses adeptes furent à l’origine d’une conversion à l’is-lam de 300 familles parmi les plus riches (les Dönme qui existent toujours). Après un déclin, les Juifs de Salonique connurent à partir de la seconde moitié du XIXe siècle une véritable renaissance, notamment dû à l’apport des techniques modernes et au processus d’industriali-sation. Une nouvelle immigration due à des Juifs venant de pays catholiques (les « Frankos »), et plus particulièrement de Livourne, eu lieu. Un véritable entre-preneuriat juif apparut, avec de grandes familles (Allatini, Modiano, Fernandez,…) qui établissaient minoteries, industries ali-

■ C l a u d e Tr i n k

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mentaires, briqueteries, industrie du tabac, du drap. En même temps apparaissait une importante classe ouvrière juive.

A partir de 1874, grâce à la détermination et au mécénat de de Moïse Allatini, un des plus grands industriels locaux, première fortune de Salonique et troisième de l’Em-pire ottoman, et malgré la pression des rabbins qui n’admettaient pas de nouvelles structures éducatives, une école de l’Al-liance Israélite Universelle (AIU) s’ouvrait. Le réseau de cette institution s’étendit rapidement : en 1912, on comptait neuf nouvelles écoles de l’AIU fournissant une éducation aux garçons comme aux filles, de la maternelle au secondaire. Ceci eut pour effet d’implanter durablement la langue française au sein de la communauté juive de Salonique. Ces écoles s’occupaient de la formation intellectuelle mais aussi manuelle de ses élèves, en phase avec les évolutions du monde moderne et apte à intégrer le marché du travail d’une société en voie d’industrialisation.

Au début du XXe siècle, Salonique compte 120 000 habitants, dont 80 000 juifs, 15 000 Turcs, 15 000 Grecs, 5 000 Bul-gares et 5 000 Occidentaux. C’est la quatrième ville de l’Empire ottoman, une des plus modernes et un de ses plus grands ports commerciaux.

Les évènements précurseurs de la catastropheDifférents évènements – politiques, naturels, sociaux- ont provoqué le déclin de cette communauté à partir de 1912

jusqu’à la catastrophe de 1943 : certains ont su en tirer des leçons et le développement d’une émigration, vers l’Europe occidentale, l’Amérique du Sud ou la Palestine, avait ramené la population juive de 93 000 personnes à environ 50 000 au début de la Deuxième Guerre Mondiale.

En 1912, le Royaume de Grèce s’est emparé de Thessalonique (ce que les Grecs d’aujourd’hui appellent la « libération » de la ville) et a imposé la langue grecque (alors que les Juifs parlaient essentiellement le judéo-espagnol, voire l’italien ou le français), de nouvelles institutions étatiques et le renforcement de la présence et de l’influence de l’Eglise orthodoxe. En 1917, un grave incendie affecta de manière marquée la communauté juive alors concentrée dans la ville basse, la plus touchée par le sinistre. Les Grecs décidèrent d’un réaménagement urbain se traduisant par des expropriations massives. La reconstruction n’était pas achevée que la ville a connu à partir de 1923 (conséquence du Traité de Lausanne) une arrivée massive de 100 000 Grecs venant d’Asie Mineure, dans la cadre d’un transfert de populations (départ d’un million de musulmans de Grèce vers la Turquie et réinstallation en Grèce de cinq

cent mille grecs d’Asie Mineure). Toute la démographie de la ville s’en est trouvée bouleversée et les Juifs - qui maintenant représentaient moins de 40 % de la population- se trouvaient en concurrence avec les nouveaux arrivants grecs pour le logement et le travail. La montée de l’antisémitisme se traduit en 1931 par un pogrom : un quartier juif fut entièrement brûlé, ce qui laissa 500 familles sans abri et causa la mort d’un juif.

Les efforts actuels de mémoire Thessalonique a longtemps tardé à recon-naître son passé juif et la déportation des Juifs. La mention de la Shoah ne fait l’ob-jet que d’une ligne en fin du cours sur la seconde guerre mondiale.

Après 1945, un millier de Juifs sont reve-nus à Thessalonique et ont rebâti des institutions juives.

Avant la 2e guerre mondiale, Salonique comptait 43 synagogues, plus environ 5 synagogues familiales. La plus ancienne

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V o y a g e

« Ets Haïm » datait du 1er siècle de notre ère et les autres s’étaient créées au fur et à mesure de l’arrivée de nouveaux immi-grants en portant le nom de leurs origines (Italia, Catalunia, Aragon, Majorca,…). Aujourd’hui Thessalonique – dont la popu-lation juive est d’environ 1 200 personnes (ce qui en fait la deuxième communauté juive de Grèce après Athènes : il y a envi-ron 5 000 juifs en Grèce aujourd’hui) – dispose d’une seule synagogue active et d’un centre communautaire construits après-guerre. Une petite école juive a été créée. Sur les murs intérieurs de la syna-gogue, des plaques de marbre énumèrent les noms et date de création des différentes syna-gogues. Une autre synagogue « Monastir », bâtie en 1926, a été restaurée splendidement en 2016 (avec un financement alle-mand) et sert pour les fêtes et les mariages.

Seulement en 1997 un mémorial a été placé à la gare de banlieue d’où partaient les trains de dépor-tation. Un autre monument, cette fois au centre de la ville, a été inauguré en 2006 sur la place de la Liberté, là où furent rassem-blés, le Chabbat 11 juillet 1942, les hommes âgés de 18 à 45 ans, furent contraints à faire des exer-cices physiques humiliants sous la menace des armes. Quatre mille d’entre eux furent ensuite envoyés faire des travaux de construction sur des routes dans des zones où sévissait le paludisme (en moins de dix semaines, cinq cents d’entre eux moururent d’épuisement et de maladie).

Un musée juif a été ouvert en 2001 dans un ancien bâtiment juif dans la ville basse. Il a une vocation pédagogique pour mon-trer que l’histoire des Juifs fait partie de l’histoire de la ville, et est aussi un mémo-rial des victimes de la Shoah. Le musée reçoit notamment la visite des écoliers de la ville et forme les enseignants. Le musée recueille aussi les innombrables pierres tombales provenant de la destruction du cimetière juif et qui ont été utilisées comme matériau de construction. Elles se retrouvaient dans le pavement des trot-toirs, les pavements d’églises, chez des collectionneurs,…

C’est seulement en 2014, après avoir essuyé de nombreux refus de la part des administrateurs de l’Université Aristote, qu’a été érigé sur le terrain de ce que fut le cimetière juif, un monument de mémoire représentant des stèles pen-chées, sur le thème : « une communauté qui réémerge ».

Mais c’est avec l’arrivée d’un nouveau maire en 2012, M. Yiannis Boutaris, vigne-

Liste (non exhaustive) de personnalités dont la famille

est originaire de Salonique

- Maurice Abravanel (1903-1993), chef d’orchestre américain, né à Salonique- Nicolas Sarkozy, dont le grand-père maternel Benedict Mallah (1890-1972) est né à Salonique.- Georges Amarragi, industriel, dont la pierre tombale de l’ancêtre le médecin Moïse Amaraggi, décédé en 1648, a été retrouvée après le saccage du cimetière- Renée Beja (1908-1979), artiste peintre française née à Salonique- Abraham Benaroya (1887-1979), fondateur de la Fédération socialiste ouvrière de Salonique, né à Salo-nique et mort en Israël- Françoise Giroud (1916-2003), née Lea France Gourdji, journaliste, écri-vaine et femme politique française, dont la mère Elda Faraggi, est née à Salonique- Patrick Modiano prix Nobel de lit-térature 2014, dont le grand-père paternel est né à Salonique- Elie, Marcel et Joseph Nahmias, industriels, nés à Salonique, fonda-teurs de la société Pétrofrance- Leon Yehuda Recanati (1890-1945), banquier né à Salonique, fondateur de Palestine Discount Bank, devenu Israel Discount Bank- Shlomo Venezia (1923-2012), écri-vain italien né à Salonique, déporté et écrivain sur la Shoah- Mauricio Hassid Michael (1905-1979), peintre espagnol né à Salonique- Marcel Dassault (1892-1986), né Marcel Bloch, petit-neveu par sa mère, Noémie Allatini, de Moïse Allatini.- Darius Milhaud (1892-1974), com-positeur de musique, descend aussi de la famille Allatini.- Edgar Morin, né Edgar Nahoum, dont l e pè re Vida l Nahoum (1894-1984) est né à Salonique. Le philosophe lui a consacré un ouvrage : « Vidal et les siens », publié au Seuil en 1989.

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Tableaux

Mobilier

Objets d’art

Bijoux

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Vins

Livres

Souvenirs historiques

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ron et propriétaire d’une des plus grandes entreprises vinicoles grecques, qu’une véri-table reconnaissance de la composante juive de Thessalonique a été engagée, afin que la présence juive soit bien comprise et mise en valeur. En 2013, et pour la première fois, la muni-cipalité de Thessalonique a participé avec une importante délégation à la « Marche des Vivants » à Cracovie. Le maire Bou-taris était le chef de la délégation et il a allumé une des six bougies à la mémoire des Juifs qui ont péri dans la Shoah. C’est aussi en 2013 que la municipalité a orga-nisé une marche silencieuse dans la ville en souvenir du premier convoi des Juifs de Thessalonique, 70 ans après la Shoah. Cette marche silencieuse est un évènement qui se tient désormais chaque année. En 2016, le maire de Tel-Aviv était présent. Le maire a réactivé le jumelage avec Tel-Aviv, notamment dans le domaine des échanges concernant les approches efficaces sur des solutions aux problèmes sociaux (3e âge, systèmes d’éducation, enfants en diffi-culté). En outre il a décidé l’organisation par la municipalité d’un enseignement du judéo-espagnol.

Lors de la cérémonie d’inauguration du conseil municipal pour le renouvellement de son mandat en 2014 (jusqu’en 2018), M. Boutaris portait l’étoile jaune comme un geste de rappel de la Shoah face à l’élection pour la première fois de deux conseillers municipaux appartenant au parti d’extrême droite Aube Dorée.

Le maire Boutaris est un signataire très engagé de la Déclaration contre l’An-tisémitisme des maires à l’initiative de l’Aerican Jewish Comittee (AJC), et à ce titre, il a été choisi parmi des centaines d’autres maires européens, pour prendre la parole au cours de la session plénière du Forum mondial AJC à Washington le 6 juin 2016.

Enfin le maire soutient la création d’un Musée de l’Holocauste et Centre Educatif à proximité de la gare d’où sont partis les convois de déportation des Juifs saloni-ciens. Il s’agit d’un projet et d’un bâtiment conséquents pour lequel des accords ont été passés avec la Compagnie nationale

des Chemins de fer pour garantir les droits sur le terrain, avec le Mémorial de la Shoah de Paris pour l’assistance scientifique, avec des sources de financement (10 M€ du gouvernement allemand, 10 M€ de la Fondation Niarchos). Le 15 juin 2017, le Premier Ministre Netanyahu est venu à Thessalonique consacrer, en présence du Premier Ministre grec Tsipras, du Président chypriote Anas-

tasiades et du Maire Bouaris, le site sur lequel va s’édifier le futur Musée de l’Ho-locauste.

On voit ainsi comment pour préparer son développement futur et retrouver sa stature internationale, Thessalonique com-mence à retrouver sa composante juive : comme M. Boutaris nous l’a déclaré, « quand on ne connaît pas son histoire, on ne peut pas construire le futur ».. ■

30 A.C.T.I. • septembre 2017/5778 • Numéro 38

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L i b é r a t i o n d e J é r u s a l e m

M a J E R U S A L E M D ’ O R (Extrait de Trait-d’Union numéro Spécial sur Jérusalem)

■ B e r n a r d P i c a r d m on père – alav hachalom – aimait raconter des anecdotes dont mon grand-père était le principal acteur.

Mais dès mon enfance, j’ai été frappé par le fait qu’il ne savait pratiquement rien de son grand-père – celui dont je porte le nom hébraïque. Il n’en parlait qu’une fois dans l’année, au temps merveilleux et hélas passé, où il « donnait » le seder entouré de toute notre famille. C’était au moment où nous nous levions pour chanter : « Lechanah habaah birouchalayim » ; mon père racon-tait qu’au même moment son grand-père Barmé mettait brusquement le plat du seder sur son épaule et criait en dialecte judéo-al-sacien : « Mamelé, viens nous partons… ». Il paraît que mon aïeule Mamelé implorait alors, mi-effrayée, mi-souriante : « Attends encore un peu, Barmé, pas tout de suite… ». Pas tout de suite… Pour moi, juif croyant, mais qui n’a pas encore été à Jérusalem, ce cri de mon aïeule est un reproche et une justification. Pas tout de suite… Combien de juifs sont morts parce qu’ils ne sont pas montés « tout de suite » en Israël, combien sentent que leur place est là-bas et pas ici et n’y vont pas… tout de suite. Mais « pas tout de suite » c’est aussi la parole de celui qui veut que sa joie soit fine et pure. Celui qui veut balayer de lui toutes les poussières avant de se parer de celle de la Terre Sainte.

Je n’ai pas encore battu de mes semelles le sol d’Israël mais depuis toujours le mot Yerou-chalayim chante dans mon esprit et dans mon cœur. La douceur de ce nom – que l’on ne peut que chanter – m’a saisi en même temps que la splendeur de la Ville lorsque, tout petit, j’ai eu comme prix du Talmud-Torah une magnifique Haggadah, sans laquelle je ne puis encore aujourd’hui concevoir de vivre un Seder. Au milieu du livre, il y avait une vue très stylisée et assez inexacte du Temple de Salo-

En avril 1968, le Trait-d’Union publie un numéro spécial de 260 pages sur Jérusalem ; d’une richesse et d’une qualité exceptionnelles. J’ai choisi de vous présenter 3 de ces articles ; mes coups de cœurs, mais plusieurs dizaines d’autres articles auraient mérité de trouver place dans notre revue.

mon ; l’artiste anonyme qui a fait ce tableau aurait sans doute été heureux de savoir qu’un jeune garçon avait contemplé des milliers de fois son œuvre, sans se rassasier. Au soleil couchant, une ville merveilleuse et inhumaine étale ses ors sur toute la double-page. Tout est d’or, le Temple, le ciel, les maisons. Pas jaune ou ocre ou orange, mais doré comme une pièce, comme une montre, comme un lin-got. Cet or écrase tout, il n’y a pas le moindre souffle de vie… j’étais fasciné et effrayé. Je trouvais la ville étrangement belle, mais je me disais que je n’aurais pas voulu y vivre. En même temps je sentais confusément que ce n’était pas seulement cela Jérusalem. Un si beau nom fait deviner quelque chose de doux, de plus tendre…

Sous cet or, il devait y avoir une vie secrète qui ne demandait qu’à s’étaler au grand jour. Cette image nous montrait la ville au crépus-cule, mais il devait y avoir un grand jour où les hommes sortaient de leur maison d’or et mar-chaient dans les rues d’or de cette ville d’or et, qui sait, montaient dans ce beau Temple d’or qui s’appelait Beth Hamikdach. Il devait y avoir une sève sous tout cet or…

J’ai vu ces derniers jours un documentaire sur Jérusalem. Une voix chante « Jérusalem d’or, de fer et de lumière ». La voix est douce mais les mots évoquent cet aspect magnifique et terrible et dur de la Ville. Cependant les images du film nous montrent une ville où les gens marchent, vaquent à leurs affaires, prient au pied du Mur Occidental… Brusquement la lumière décroît sur la cité et l’image montre la Ville d’Or de ma Haggadah, et le chant doux modèle le nom merveilleux…

Jérusalem dure et tendre, je ne te connais pas, mais je t’aime comme tous les amants de tous les âges.Tu es la ville du Temple et des prêtres et des sanglants sacrifices, mais

Tu es la ville où travaillent et chantent et pleurent mes amis,Tu es la ville tant de fois assiégée, usée et blessée, maisTu es la ville où mon fils travaille, plaisante et vit.En toi sont les pôles de ma géographie secrète.Je t’aime et je ne te connais pas.

Lorsque mon père racontait l’histoire de mon aïeul Barmé, il disait : « C’est drôle, la seule chose qu’il songeait à emporter lorsqu’il se levait brusquement, c’était le plat du Seder ». Pendant longtemps j’ai cru, interprétant ainsi le sourire de mes parents, que c’était peut-être l’effet de la légère euphorie dans laquelle, même un solide Alsacien peut être plongé avoir bu quatre coupes – ou plus… – de vin. Mais peut-être n’était-ce pas cela, peut-être était-ce la certitude plus ou moins nette, née du plus profond de l’âme juive de mon aïeul en plein 19e siècle alsacien, qu’un jour, il faudra bien partir, retourner à Jérusalem et que la seule chose valable à emporter était le souvenir de toute la misérable et glorieuse histoire de notre peuple en exil, symbolisée par le plat du Seder. Quitter et se souvenir…

Ni mon aïeul, ni mon grand-père, ni mon père – que leur mémoire soit bénite – ne sont allés à Jérusalem. Mais voici qu’un de leurs petits-fils déambule dans les rues de la Ville.

Et moi je suis là, entre les générations, les sou-liers encore sales, en exil et les yeux tournés vers Yerouchalaïm.

Mériterai-je de voir la Ville d’Or et de Ver-dure ?...

J é r u s a l e m e t l a m u s i q u e (Extrait de Trait-d’Union numéro Spécial sur Jérusalem)

■ R a y m o n d C i c u r e l L ’étonnante musicalité du mot Yeroucha-laïm fait d’emblée pressentir le rapport étroit qu’entretiennent la ville sainte

et le plus abstrait des arts. La plasticité, la souplesse, la variété des sonorités expri-ment une nostalgie douce qui peut devenir facilement intense jubilation, comme dans tous ces chants du folklore où Jérusalem est un cri de joie. Il semble que Dieu fit déjà de la musique en créant ce mot. La richesse syllabique n’est pas contredite par le redou-blement du « a ». Une répétition, dans un contexte absolument diversifié, prend toute sa valeur et sa puissance.

Cette répétition, par ailleurs, amène un surplus de poids, divisant ainsi Yeroucha-laïm, sur un seul plan phonétique, en deux tronçons inégaux dont le rapport des lon-gueurs pourrait bien être celui du célèbre nombre d’or. Cette perfection esthétique se retrouve peut-être dans l’emplacement de la Mezouza clouée environ aux deux-tiers des portes de Jérusalem et des nôtres. L’eu-phonie même du mot préfigure l’aventure extraordinaire que Jérusalem et la musique vivront au cours des temps.L’histoire de la Jérusalem chantée est en effet bien riche. C’est entre autres, « l’Oratorio Saint-Paul » de Félix Mendels-sohn. C’est la chanson « Jérusalem » du musicien anglais Sir Hubert Porry sur des paroles du peintre-poète William Blake, qui devint si célèbre qu’elle rivalisa vers 1920 avec l’hymne national anglais. C’est aussi Stravinsky qui composa, il y a environ dix ans, ses « Threni » où il emploie pour la première fois exclusivement la technique sérielle. De cette nouvelle méthode de com-position musicale, inaugurée en 1923 par un juif génial, Arnold Schönberg, Stravinsky fut considéré comme le chef de file des opposants durant une quarantaine d’an-nées. Dans « Threni » alors que le restant du texte est en latin, les lettres numérotant les divers chapitres de ces sublimes lamen-tations du prophète Jérémie sont chantées en hébreu.

Enfin la musique dite « légère » célèbre Jérusalem particulièrement aujourd’hui avec des chanteurs compositeurs comme Naomi Shemer et Charles Aznavour.

Quant à la Ville Sainte, elle chanta elle-même son Créateur comme jamais on ne le fit : Dans le Temple c’est par centaines que les trom-pettes d’argent des Lévites accompagnaient le Service. Déjà à l’époque du Second Temple était utilisé un orgue, le magrépha, dont on entendait à des lieux les sons puissants.

Seul Paris peut être comparée à Jérusalem pour avoir tant de musique. Mais quelle ville fut à l’origine d’une musique qui se tait ?

Dès la destruction du Premier Temple, les musiciens s’abstinrent spontanément de jouer, comme le raconte le Psaume CXXXVII : « Sur les rives du fleuve de BabyloneLà nous nous assîmesEt nous pleurâmes au souvenir de SionAux saules qui les bordentNous suspendîmes nos harpesCar là nos maîtres nous demandaient des hymnesNos oppresseurs – des chants de joie – :« Chantez-nous, disaient-ils, un des can-tiques de Sion ! »– Comment chanterions-nous l’hymne de l’Eternel En terre étrangère ?Si je t’oublie jamais, Jérusalem Que ma droite me refuse son service !Que ma langue s’attache à mon palais,Si je ne me souviens toujours de toi,Si je ne place Jérusalem au sommet de toutes mes joies ! »

La ruine du second Temple, en ces dates fatales des 9 et 10 Av entraîna une stupeur désespérée chez tous les juifs. En signe de deuil, ils décidèrent d’arrêter toute musique et de ne plus même célébrer des mariages. C’était, si l’on veut, comme un chantage envers Dieu qui avait promis de rendre la postérité d’Israël pareille au nombre des étoiles et au sable de la mer. Il lui fallait donc reconstruire le Temple afin que les juifs conti-nuent à se multiplier et qu’Il puisse réaliser Sa promesse. Cependant, les Sages, dans la crainte que les ignorants seuls se marient, engendrant ainsi comme peuple d’Israël uniquement des descendants d’hommes ignares, autorisèrent le mariage.

La musique non plus, ne resta pas en disgrâce. Si l’on peut proscrire l’usage d’ins-truments, il est difficile d’empêcher l’homme de chanter. Peu à peu, la musique instrumen-tale elle aussi, se réintroduisit au cours des cérémonies de mariage d’abord et pour d’autres occasions joyeuses ensuite. Le deuil reste cependant encore marqué. Le service religieux n’est jamais accompagné d’instru-ments, on n’écoute de musique ni à table, ni pendant les périodes de l’Omer, ni pendant les trois semaines de deuil ; seules les zemi-roth traditionnelles sont admises le chabbat. Enfin, les orthodoxes ne la tolèrent pas dans l’enceinte de la Ville Sainte et certains vont jusqu’à la supprimer complètement jusqu’au jour béni de la restauration du Temple.

Seule entre les villes, Jérusalem sut, après l’avoir provoquée, arrêter le jaillissement de la musique. Comme l’affligé dont les san-glots s’étouffent dans la gorge, la musique en se taisant, montre le plus grand amour pour Jérusalem.

יברכך ה’ מציון וראה בטוב ירושלים כל ימי חייך : וראה בנים לבניך שלום על ישראל :

Que le Seigneur te bénisse de Sion !Goûte le bonheur de JérusalemTous les jours de ta vie.Puisses-tu voir les fils de tes filsEt que toujours soit la paix sur Israël ! (Psaume 128, 5-6)

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J é r u s a l e m n o t r e l u m i è r e (Extrait de Trait-d’Union numéro Spécial sur Jérusalem) ■ Professeur André Neher « Tes sept lettres, tout comme les sept

branches du chandelier, même dans la plus obscure des obscurités, ont distillé sur nous une lumière éternelle… »

(David Chimoni)

J érusalem est, depuis le 7 juin 1967 – 27 Iyar 5725, une lumière, allumée dans le cœur d’Israël et des juifs du

monde entier, une lumière droite et ver-ticale, transcendante à la broussaille de l’histoire horizontale, – une lumière dont l’éclat demeure, irréversible, qui brûle et ne se consume pas, comme la flamme du Buisson ardent.

Un bouleversant Midrach raconte com-ment Dieu dut s’y prendre au Buisson ardent pour ne pas manquer la rencontre avec Moïse. Allait-il faire entendre Sa Voix grondante comme le tonnerre et l’ouragan ? C’était courir le risque de voir s’effondrer Moïse, dans son inex-périence grossière de la Chose Divine. Fallait-il l’aborder dans le murmure sub-til et ténu de la Voix silencieuse ? Mais dans sa naïve impéritie, Moïse eût passé à côté de la Voix sans même la percevoir. Que fit Dieu ? Il imita la voix d’Amram, le père de Moïse. Et, saisi au tréfonds de ses entrailles, Moïse se précipita vers le Buis-son, lançant le cri de l’enfant qui retrouve soudain la Maison d’où il avait été si lon-guement exilé : « Mon père est-il encore vivant ? » – Non, réponds la Voix divine, ton père Amram n’est plus vivant, mais Je suis l’Eternel, le Dieu de ton père, et Je suis l’Eternel-Vivant ! ». N’est-ce pas que dans la rencontre avec Jérusalem, il y a eu pour tous les juifs du monde, une expérience semblable à celle de Moïse, un appel débordant de tendresse maternelle, la reconnaissance immédiate, par l’orphelin-exilé, de la voix de sa Mère dans celle de Jérusalem, – Jérusalem, l’Eternelle Vivante, parlant à chacun d’entre nous le langage de la Mère perdue et soudain ressuscitée en elle ?

Mais les beaux vers de David Chimoni, placés en exergue, avertissent que la

Lumière n’est pas, lorsqu’on parle de Jérusalem, une simple métaphore. Sept lettres composent son nom en hébreu et ainsi comme une Menora, portant les sept lumières des sept lettres qui permettent de l’énoncer. Et chaque fois que l’on énonce « Jérusalem », c’est la Menora que l’on allume.

Mais cette Menora aux sept branches, voici que devant nos yeux elle est deve-nue plénière : Yerouchalaïm hacheléma, unifiante : Yerouchalayim hameou’hedet. Une déchirure, divisant en deux Jérusalem depuis bientôt vingt ans, et traversant le cœur de tout juif et de tout homme, vient d’être résorbée. Ce qui était divisé devient un. Ce qui était mutilé, devient intègre, entier.

Ce serait une grave erreur de n’apercevoir dans cet événement qu’un accroissement physique, une extension spatiale. Non, tous ceux qui ont eu et ont encore le privilège de participer à l’événement de l’unification et de la plénification de Jérusalem, ressentent qu’il ne s’agit pas de conquête mais de rédemption, pas de thème spatial, mais d’une intériorisa-tion, d’un dépassement dialectique. Une déchirure a été rédimée. Une gueoula s’est faite au-dedans de la blessure. A Jérusalem nous sommes aujourd’hui les témoins d’un tiquoun (perfectionnement) de caractère prophétique, mystique et messianique.

Or la signification de ce tiquoun, une simple lecture de la Bible permet, peut-être de la découvrir. Dans la Bible, en effet, le nom même de Jérusalem est comme traversé par une déchirure. Il y apparaît plus de six cents fois, mais en écriture déficiente, avec six lettres seulement : Yerouchalem.

Cette divergence continue entre les six lettres de Ketib et des sept lettres de Keri, voulue par la Bible et respectée par la tra-dition, n’invite-t-elle pas à reconnaître en Jérusalem le symbolisme du six et du sept, et ce symbole ne cristallise-t-il pas dans la réalité concrète, devant nos yeux, dans la Jérusalem plénifiée et unifiée ?

Car le six, c’est la créativité profane, le chantier d’un univers qui évolue, se développe, progresse, alors que le sept, c’est le Chabbat, avec son repos sacré, son cran d’arrêt de la technique et de la productivité. Or, la plénitude de Jérusalem, n’est-elle pas dans l’union maintenant réalisée entre la « Nouvelle » et la « Vieille » Jérusalem, entre le présent et le passé, le progrès et la tradition, le travail et la prière ? n’est-ce pas le Altneu-land dont rêvait Herzl, qu’Israël, dans son ensemble, comporte en lui, en puissance, mais que l’unification de Jérusalem a fait passer maintenant en acte ?

Six et sept, c’est aussi l’homme et le juif, l’homme-Adam, créé le sixième jour, et l’homme-Israël, élu le septième jour, par le Chabbat. Or, de même que l’univers du progrès et celui de la tradition ont été réunifiés en Jérusalem, de même y ont été réunifiés l’univers des hommes et l’univers des juifs. En faisant sauter les barricades, les barbelés, les bunkers de béton armé, et en les transmutant en routes ouvertes, en chemins communiquant, les juifs israéliens ont fait l’un des plus prodigieux paris sur l’homme que l’histoire ait jamais connu : voici maintenant juifs, musul-mans et chrétiens, unis librement dans leurs prières respectives qui remplissent Jérusalem de leurs bourdonnements pai-sibles ; voici juifs et arabes coexistant dans des rencontres quotidiennes, nor-males et pacifiques. Voici toute une vie à timbre messianique, préfigurée par la volonté courageuse de l’homme juif en Israël, à Jérusalem. A titre expérimental, on y a remplacé la haine par l’amour. Et, depuis des mois, l’expérience réussit. Mais le secret de la réussite, n’est-il pas dans le secret de ce nom de Jérusalem, asso-ciant intimement le six au sept, puisque six et sept font treize, et que treize est, en hébreu, la valeur numérique des deux principes qui constituent, aujourd’hui, l’essence de Jérusalem : le principe de l’unité : e’had le principe de l’amour : ahava ? ■

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H U m o U r

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L a p a g e d ’ A v i d a n■ A v i d a n K o g e l■ Au fait, vous êtes au courant pour le

2e jour de Kippour en houts laaretz ? ■ Décréter un jour de jeûne après 2 jours de régime enrichi et hyperprotéiné. Gueda-lya devait être nutritionniste. ■ Fallait-il réciter l’Amida avec “Machiv Harouach” dans l’arche de Noé ? ■ Un juif optimiste, c’est un juif qui espère que le monde se désagrège encore davan-tage pour que s’annonce enfin la période messianique. ■ Je ne m’impose aucune contrainte. Par contre, ma névrose m’en impose pleins ! ■ J’ai partagé la vidéo du spectacle de fin d’année de mon fils à toute la famille. Il n’y a pas de raison que je sois le seul à en souffrir. ■ Conclusion de la canicule : si tu ne viens pas en Israël, Israël viendra à toi. ■ J’ai toujours rêvé de monter à la Torah et dire (sérieusement !) : “Rabbotay nevarekh” ! ■ Je procrastine à fond la date de ma mort.

■ Je ne porte pas mes gosses chabbat, je les considère comme une ceinture chabba-tique, c’est différent. ■ Je pense avoir battu le record du monde du compte du Omer. J’en suis au 1345e jour du Omer. Avec bénédiction. ■ Ma femme s’assure que notre maison est toujours nickel quand quelqu’un y vient. Même quand c’est la femme de ménage. ■ Corrélation ou causalité ? Plus je bois de vin le vendredi soir, moins ma fille se réveille pendant la nuit ! ■ Ca y est, je sais faire du vélo d’apparte-ment sans les petites roues ! ■ Oh ! Chouette ! Il reste du chocolat dans le placard ![Déballe]Zut... C’est du chocolat casher lePessah... ■ On ne dit pas une musique d’ascenseur, mais une playlist de Schindler. ■ En fait, c’est pas si mal la semaine sans viande avant le 9 Av.Ça nous permet de mettre des sous de côté pour les vacances. ■ Où peut-on trouver des steaks végéta-riens glatt pour la semaine du 9 Av ?

■ J’achèterai un thermomix le jour où il nous fera la recette du Gefilte fish avec l’accent yiddish. ■ Après avoir brillamment réussi mat’sup* et mat’spé*, ma fille rentre en Cours Poly-technique**.*maternelle**CP ■ Je suis déçu. Malgré mes demandes fréquentes, le sorbet saveur “Gefilte Fish” n’existe toujours pas chez Berthillon. ■ L’antisémitisme naît de la misère, du chômage et du trajet Paris - Tel Aviv avec El-Al. ■ Le saviez-vous ? Pour un ashkénaze, quelle que soit l’heure, c’est toujours le bon moment pour prendre du hareng. ■ Avant, je croyais que quand on mettait sur la liste de colo “une gourde d’eau” c’était pour boire. En fait, c’est pour arroser le train au moment du départ. ■ Pourquoi traduit-on en anglais “jeûne” par “fast” alors que c’est si long ?

NAISSANCES

■ Le 22 mars est né Isaac Elie, frère de Eytan Simon, fils de Sharone et Ben-jamin Sebban, petit-fils de Karine et Alain Sebban, arrière-petit-fils de notre amie Jeannette Laufer.Nous souhaitons un grand mazaltov à toute la famille.

DéCèS

■ Maurice Markowicz, père de Lau-rence Markowicz Micenmacher.

Nos très sincères condoléances à la famille.

Nous invitons les personnes n’ayant pas d’e-mail et qui souhaitent être prévenues des événements commu- nautaires par téléphone, de se mani- fester auprès du secrétariat au 01 45 04 66 73. « Ce journal contient des textes sacrés, merci de ne pas le jeter. Il doit être mis à la Gueniza ».

C a r n e t m o n t é V i D é o

199, avenue Pierre Brossolette 94170 Le Perreux-sur-Marne - Tél. : 01 41 93 00 47

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