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nÉVOCATION In medio stat virtus L’Hebdo national de l’Économie n Du mardi 1 er au lundi 7 août 2017 n n°96 n Prix 30 DA n Étranger 1 euro nFINANCES TOUT SUR LE SECRET BANCAIRE Page 5 nAGRICULTURE QUEL AVENIR POUR LA PRODUCTION EN ALGÉRIE Page 9 Voyager dans le passé pour découvrir comment vivaient les hommes de la préhistoire est un rêve obsessionnel de l’homme contemporain, rappelant le rêve antérieur de voler d’Icare. L’olivier de Saint-Augustin est un lieu de pèlerinage et de visite pour les rares touristes étrangers de passage à Souk Ahras, généralement en provenance de la toute proche Tunisie. Il a bénéficié en 2005 d’une opération de réhabilitation, réalisée en collaboration avec la municipalité d’Ostie (Italie), ville portuaire de la Rome antique où est enterrée Sainte Monique, mère de Saint Augustin. PATROUILLE À L’EST REPORTAGE Page 3 Reda Malek : «L’Algérie a failli être supprimée de la carte...» Général manager de la compagnie Bomare, spécialisée dans la fabrication des produits électroniques, Ali Boumediene, le jeune capitaine d’entreprise aux «dents longues», livre dans cet entretien les secrets d’une réussite managériale qu’il voudrait d’abord algérienne avant de pénétrer le marché mondial... Entretien page 7 LE PREMIER MINISTRE : LA CAPITULATION ? ALI BOUMEDIENE AMBITIONNE DE CONQUÉRIR LE MARCHÉ INTERNATIONAL Page 6 cresus.dz Pages 10 et 11

AMBITIONNE DE CONQUÉRIR LE MARCHÉ INTERNATIONAL · 2017-08-01 · nÉVOCATION In medio stat virtus L’Hebdo national de l’ Économie n Du mardi 1 er au lundi 7 août 2017 n n°96

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Page 1: AMBITIONNE DE CONQUÉRIR LE MARCHÉ INTERNATIONAL · 2017-08-01 · nÉVOCATION In medio stat virtus L’Hebdo national de l’ Économie n Du mardi 1 er au lundi 7 août 2017 n n°96

nÉVOCATION

In medio stat virtusL’Hebdo national de l’Économie n Du mardi 1er au lundi 7 août 2017 n n°96 n Prix 30 DA n Étranger 1 euro

nFINANCESTOUT SUR LE SECRETBANCAIRE

Page 5

nAGRICULTUREQUEL AVENIR POUR LAPRODUCTION EN ALGÉRIE

Page 9

Voyager dans le passé pour découvrir comment vivaient les hommesde la préhistoire est un rêve obsessionnel de l’homme contemporain,rappelant le rêve antérieur de voler d’Icare. L’olivier de Saint-Augustin

est un lieu de pèlerinage et de visite pour les rares touristesétrangers de passage à Souk Ahras, généralement en provenance de la

toute proche Tunisie. Il a bénéficié en 2005 d’une opération deréhabilitation, réalisée en collaboration avec la municipalité d’Ostie(Italie), ville portuaire de la Rome antique où est enterrée Sainte

Monique, mère de Saint Augustin.

PATROUILLE À L’ESTREPORTAGE

Page 3

Reda Malek :«L’Algérie afailli être

supprimée dela carte...»

Général manager de lacompagnie Bomare,spécialisée dans la

fabrication des produitsélectroniques, Ali

Boumediene, le jeunecapitaine d’entreprise aux

«dents longues», livre danscet entretien les secrets

d’une réussite managérialequ’il voudrait d’abord

algérienne avant de pénétrerle marché mondial...

Entretien page 7

LE PREMIER MINISTRE : LA CAPITULATION ?

ALI BOUMEDIENE AMBITIONNE DE CONQUÉRIR LE MARCHÉ INTERNATIONAL

Page 6

cresus.dz

Pages 10 et 11

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CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017442

L’Hebdo national de l’Économie, édité par la SARL CELIGNE Éd. & Com.

DIrECtEur DE pubLICAtION SAMIR MEHALLA

Coordinateur de rédaction Hocine Adryen Service correction Mohamed Bennaï Administration 41, rue Mokhtar KRITELI, BLIDA rédactionEl fayet Club - Ouled Fayet

à proximité de l’Opéra d’Alger.Marketing : 0550 667 0180561 685 [email protected] : www.cresus.dzr. C. : 15B 0808682- 09/00 Compte bancaire :02900161220043968344 Impression : ALDP

Diffusion: ALDPpublicité : ANEP 01, rue pasteur, Alger tél. : 021 73 76 78/ 021 73 71 28 021 73 30 43 Fax. : 021 73 95 59

à l’oreille de CrésusLe monde de Haya!ouvre ses portes auxclients entreprisesOoredoo lance son offre“Haya! business”

Ooredoo élargit la gamme de ses solutionsdestinées aux professionnels et lance sanouvelle offre Haya! business proposant denombreux avantages à ses clients Entre-prises. Cette nouvelle offre exclusive dumonde Haya! de Ooredoo est la premièredu genre sur le marché national de la télé-phonie mobile. Elle s’adapte à toutes lesentreprises de différentes tailles et offreflexibilité, maîtrise et transparence auxclients professionnels de Ooredoo ainsi quedes volumes de connexion Voix et Dataincluant des appels illimités vers Ooredoo,de l’Internet gratuit (Batel) et des minutesde communication offertes vers toutes lesdestinations à l’international. L’offre Haya! business se décline en troisformules : Haya! business 1000 : Pour 1000DA par mois, le client bénéficie d’appels illi-mités vers Ooredoo de 08h à 18h, de 1,5 God’Internet, de 10 minutes de communica-tion offertes vers toutes les destinations àl’international ainsi que 1000 DA de crédit.Haya! business 2000 : Pour 2000 DA parmois, le client bénéficie d’appels illimitésvers Ooredoo 24h/24, de 4 Go d’Internet,de 15 minutes de communication offertesvers toutes les destinations à l’internatio-nal ainsi que 2000 DA de crédit. Haya! busi-ness 4000 : Pour 4000 DA par mois, leclient bénéficie d’appels illimités versOoredoo 24h/24, de 10 Go d’Internet, de20 minutes de communication vers toutesles destinations à l’international ainsi que4000 DA de crédit. Par ailleurs, les clientsde la nouvelle offre Haya! business ontdésormais la possibilité d’allier l’usage pro-fessionnel à l’usage personnel en bénéfi-ciant des recharges Maxy Haya! Avec cetteoffre permanente, Ooredoo entendrépondre de manière optimale aux attentesde ses clients entreprises et les accompa-gner dans l’accomplissement de leur succèset leur transformation digitale.Le Département des Relations Publiques etMédias Ooredoo.AfrAsia BankL’Algérie compterait 4500millionnaires en dollarsL’Algérie abriterait environ 4500 million-naires en dollars, selon les chiffres du nou-veau rapport 2017 de l’Africa WealthReport établi par la banque mauricienneAfrAsia Bank. Ce nombre de millionnaires

place l’Algérie à la 7e position en Afrique,juste derrière le Maroc (4600 million-naires), l’Égypte (18100) ou encorel’Afrique du Sud (2130 millionnaires). Surles 4500 millionnaires en Algérie, 180d’entre eux sont multimillionnaires, révèlele rapport. Ce dernier précise en outre que1900 millionnaires vivent dans la capitaleAlger, dont 90 multimillionnaires. Larichesse cumulée de tous les habitants d’Al-gérie est pour sa part estimée à 119 mil-liards de dollars. Cette somme place le paysà la 4e position en Afrique, devant le Maroc(109 milliards) mais derrière le Nigéria(270 milliards), l’Égypte (313 milliards) etl’Afrique du Sud (610 milliards). L’AfrAsiaBank indique par ailleurs que le nombre demillionnaires en Algérie a baissé de 18%entre les années 2006 et 2016. La crise éco-nomique due à l’effondrement des coursdes hydrocarbures semble également avoirlaissé des séquelles chez les millionnaires,puisque leur nombre a baissé de 5% entre2015 et 2016. La richesse par habitantalgérien est de son côté estimée à 3300 dol-lars en 2016, l’une des plus élevéesd’Afrique tout en restant néanmoins bienloin de celles du top 3. En Île Maurice parexemple, la richesse par habitant s’est éta-blie à 25 700 dollars, tandis qu’en Afriquedu Sud, elle est à 11 300 dollars par habi-tant.Prix jugés trop élevés desvéhicules assemblés enAlgérie

Le gouvernement ouvreune enquête Le ministère du Commerce a ouvert uneenquête sur les prix jugés trop élevés desvéhicules assemblés par les usines érigéesrécemment en Algérie. En effet, le départe-ment d’Ahmed Saci a dépêché une enquêterelative à la hausse non justifiée des véhi-cules assemblés en Algérie, dont les prixdépassent parfois celui des véhiculesimportés de la même marque. L’enquêtecible, ainsi, les différentes usines d’assem-blage et de montage automobiles crééesdans l’objectif de répondre à la demandenationale, tout en réduisant la facture d’im-portation.450 entreprises françaisesen 2016

40.000 salariés sontemployés directement L’Algérie constitue un «marché porteur»pour les centaines d’entreprises françaisesinstallées sur le territoire national. Les 450entreprises françaises de toutes tailles ysont installées emploient 40.000 salariésdirectement et 100.000 salariés indirecte-ment. Leur nombre augmented’année en année2684 Algériens détenus enFrance2684 Algériens ont été placés dans lescentres de retentions administratives enFrance au cours de l’année 2016, indique

un rapport annuel commun sur les centresde rétention administrative réalisé par cinqONG. Le rapport réalisé par Assfam, ForumRéfugiés, France terre d’asile, La Cimade,l’Ordre de Malte et Solidarité Mayotte.Selon le document, les Algériens sont lesplus nombreux à faire l’objet d’une réten-tion administrative et représentent 12,4%de l’ensemble des placements soit unehausse de 152 cas par rapport à 2015. Dansle classement par nationalité, le nombredes Algériens placés augmente d’un pointpar rapport à 2015 et deux points par rap-port à 2014.Téléphonie mobileDjezzy vous accompagnependant vos vacances etlance l'offre «Touriste »Pour bien passer l’été en Algérie, Djezzyannonce le lancement de son offre «Touris-te» conçue spécialement pour les visiteurset les immigrés qui se rendent au paysdurant la saison estivale.En effet, cette nou-velle offre met à la disposition des clientsde l’internet et des appels vers les opéra-teurs locaux au prix standard ainsi qu’unetarification avantageuse de 10 DA la minu-te vers l’international (France, Italie, Cana-da, USA, Espagne et Belgique). Le prix de

souscription à l’offre est de 2000 DA. Pource prix le client bénéficiera de 2000 DA decrédit valable en communications locales etSMS, de 150 minutes de communicationsvers l’international fixe et mobile (en Fran-ce, Italie, Canada, USA, Espagne et Bel-gique) et de 3 GO d’internet. Le tout valablependant 30 jours. L’offre Touriste estvalable jusqu’au 30 septembre prochain.Avec Djezzy, leader des Technologies decommunication numériques, l'abonné a laliberté de communiquer sur le meilleurréseau et de profiter paisiblement de sonséjour en Algérie.

M.Hendrik, DG Ooredoo

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43CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017

ALGÉRIEAPRÈS LA NOMINATION DE ABDELMADJID TEBBOUNE À LA TÊTE DU GOUVERNEMENTun vent de démocratie souffle sur l’Algérie et son économie

Depuis l’installation du nouveau gouvernement à sa tête Abdelmadjid Tebboune, undébut de démocratie semble souffler sur le pays pris en otage depuis des décennies.

Le vecteur déterminant dans cette révolution des espaces politiques, longtempsfermés par des clans au pouvoir financier, reste la perte de l’opulence financière.

4par K. bENAbDELI

Faut-il alors saluer cette oppor-tunité induite par la faiblessedrastique du coût du baril depétrole et du mètre-cube degaz ; les algériens restent per-plexes dans ce dilemme, mais acceptel’austérité qui est induite en échanged’une réelle démocratie où les truandspolitico-mafieux seront punis et les biensmal acquis restitués. Plusieurs indicateursissus d’informations largement commen-tées par la presse indépendante, souli-gnent que le pouvoir en place sembleavoir atteint ses limites et veut se racheterà l’approche des nouvelles élections prési-dentielles. Le discours officiel que présen-te le nouveau gouvernement ne peut éma-ner que de la présidence de la républiqueet avec son aval. Les mesures prises ou àprendre inquiète les nombreux bénéfi-ciaires du système ; dans ce volet il y a lieude citer la nomination d’un premierministre hors des circuits des partis fai-sant allégeance au pouvoir, les premièresdécisions annulant celles de l’ancien pre-mier ministre, le gel des attributions deterrains, la remise en cause du boulonna-ge de véhicules assimilé à l’industrieautomobile, la désignation et la mise à l’in-dex de quelques usurpateurs comme per-sona non grata, la prise de paroles dequelques magistrats de la cour descomptes dénonçant les pressions qu’ilssubissent dans des dossiers. Depuis la nomination du nouveau gou-vernement et la prise de quelques déci-sions accueillies favorablement par unepopulation qui pourtant n’a pas voté mas-sivement, ce sont des signes avant-cou-reurs d’une nouvelle ère politique qui esten train de naître en Algérie. Ces pre-mières décisions et déclarations sont-ellesdes indicateurs d’un bouleversement de lagestion du pays à travers une lutte impla-cable contre les cinq fléaux qui minentl’économie du pays, à savoir : la corrup-tion, le clientélisme, le favoritisme et lemanque de professionnalisme et l’impuni-té induite par une justice peu indépendan-te. Les Algériens intègres – et heureuse-ment qu’il en existe encore – commencentà se soulever au sein des institutions,pourvu qu’ils soient entendus mais passimplement écoutés et un vent de démo-cratie réel annihilera les pseudo-partis etlaissera émerger des forces démocra-tiques et indépendantes qui saurontmener l’Algérie vers un développementsocioéconomique certain. Par une simpleopération de transparence financière etpolitique confiée à des personnes indé-pendantes, neutres politiquement et hon-nêtes, les caisses de l’Etat pourront êtrerenflouées de dizaines de milliards de dol-lars et de milliers de milliards de dinarsqui permettront au pays de souffler et derelancer des investissements productifs.Cette commission aura également pourbut de dicter une nouvelle charge permet-tant aux investisseurs nationaux et étran-gers de créer une dynamique économiqueet sociétale.Le vent démocratique reste condition-né par le règlement de la crise multidi-mensionnelle qui ronge tous les aspectsde la société puisqu’elle est essentielle-ment d'ordre économique par manque deressources, sociale par manque de disci-

pline et de valeur du travail bien accompliet, surtout, politique et d’éthique dans lesens où des partis parasites dynamitentl’économie du pays. Cette crise rongestructurellement la société en créant descatégories inéquitables et la généralisa-tion d’une injustice où les riches sont deplus en plus riches et disposent de droitset les pauvres qui s’appauvrissent avecmoins de droits. La société algérienne faceà une gestion calamiteuse depuis desdécennies a perdu de ses valeurs moralesoù l'ordre, la hiérarchie et la primauté ducollectif sur l'individuel, la responsabilitéfamiliale, le goût du travail, le collectivis-me ont été annihilés.A ce propos, Condorcet notait : «Il nepeut y avoir ni vraie liberté ni justice dansune société, si l'égalité n'est pas réelle.» Nosdirigeants, depuis l’indépendance, ontstructuré à travers une très mauvaisepolitique une société façonnée pour profi-ter du système à l’égard des responsables.Cette société a perdu tous ses valeurs tantenvers le travail et la créativité de valeursajoutées au profit de la réclamation tou-jours de nouveaux besoins souvent rem-plis par le politique grâce à la rente pétro-lière considérée comme inépuisable etdont les pro-duits ont trèsmal été gérés.L'Algérie a,depuis sonindépendance,utilisé un sys-tème politiquedénué de toutprojet socioé-conomiquemais axé surune vision àcourt termesoutenue parla rente et l'im-punité. Cette gestion est à l’origine de l'ab-sence de la citoyenneté qui s’est traduitepar le pourrissement et la déliquescencede toutes les valeurs universelles commele travail et l’éducation. C’est surtout lefait que les politiciens, les responsables et

les quelques détenteurs de capitauxoutrepassent des droits et des règles et sepermettent de narguer le peuple et mêmeses élus et gouvernants à tous les niveaux.Le résultat de cette situation s’est traduitpar un énorme écart entre deux catégo-ries de citoyens ; ce qui s’est exprimé lorsdes dernières élections législatives.Les conséquences de cette dériveinduite par un enrichissement rapide audétriment des règles élémentaires et enl’absence de contrôle et souvent avec lacomplicité de responsables, s’est traduitepar des abus surtout de position dominan-te soutenus d’abus de biens financiers etsurtout d’abus de pouvoir. Ce dernier leura permis d’acquérir des droits et des capi-taux avec une complicité administrativeleur permettant de contourner la régle-mentation. Le gain facile à travers desmarchés juteux, le transfert de capitauxpar le biais du commerce et de sous-trai-tance et de surfacturation. Cette situationn’ayant pas permis à l’Algérie de sortir dusous-développement et a été à l’origine deplusieurs crises de valeur tant politique,sociale, économique et morale. Le vent démocratique qui, semble-t-il,commence à balayer les hautes sphèresdu pouvoirofficiel ouparallèle enAlgérie, nepeut aboutirque si lecontexte poli-tique, écono-mique, socialet culturelsoient totale-ment réforméet révisé à tra-vers une réellerévolution. Lamise en placed’un nouveau concept de la vie sociocultu-relle, économique et ensuite politiques’impose à travers la mise en place d’uneinstitution protégée pouvant garantird’abord la moralisation de la vie politique.Il s’ensuivra une nécessaire construction

d’une cohésion sociale axée sur une réellejustice sociale induite par des valeurs etdes normes applicables à tout le mondepar une justice indépendante et éloignéede la corruption et des pressions. La démocratie reste la seule issue pourlutter contre les fléaux ayant miné l’éco-nomie algérienne et elle doit passer obli-gatoirement par une réelle moralisationde la vie politique, un chantier lourd deconséquences vu les intérêts acquis parles partis au pouvoir depuis l’indépendan-ce. C’est un problème sociétal entretenupar les différents présidents pour durerau pouvoir ; dans un régime démocra-tique, la morale en politique relève d’uneintégrité des représentants élus du peupleauxquels celui-ci a délégué le soin d'exer-cer, en son nom, le pouvoir de régenter lavie publique ; ce qui n’est pas le cas enAlgérie. Les atteintes aux droits fonda-mentaux commises par certains élus etcertains détenteurs du pouvoir ayant faitla chronique de la presse, en sont des indi-cateurs. Le premier chantier pour faire décollerl’Algérie du sous-développement reposeen premier lieu sur la moralisation de lavie politique et sa synchronisation avecles valeurs universelles que sont la trans-parence et la souveraineté du peuple. Lepeuple a besoin d’exemples comme lamise en cause des hommes politiques et latraduction devant une justice indépen-dante de tous ceux qui ont profité de leurpouvoir pour s’enrichir et ils sont nom-breux. Un simple contrôle de déclarationde patrimoine des principaux respon-sables des pouvoirs publics et des éluscomparés à leur revenu réel permettraitde cibler les détournements. Ainsi, il seramis fin au clientélisme, au népotisme et aufavoritisme politiques comme les octroisde contrats, les nominations à des postesde responsabilité, la création de réseauxde profiteurs... Mais seule une indépen-dance de la justice et la séparation despouvoirs pourront sauver l’Algérie dudésastre. K. b.

Ces premières décisionssont-elles des indicateursd’un bouleversement de la

gestion du pays à travers unelutte implacable contre les

cinq fléaux qui minent l’éco-nomie du pays, à savoir : la

corruption, le clientélisme, lefavoritisme et le manque deprofessionnalisme et l’impu-nité induite par une justice

peu indépendante.

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CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 201744

ALGÉRIE MAFIA POLITICO-FINANCIÈREtebboune engage une énième

opération «mains propres»

La mafia politico financière s’est- elle introduite dans les circuits du pouvoir ? Unenouvelle caste d’hommes d’affaires qui n’a rien à envier aux capos italiens qui

régentent la moitié de l’économie italienne a fait son apparition. Comme d’ailleurselle n’a rien à envier aux premiers seigneurs de la guerre tel Hadj Bettou ou autres,

pris la main dans le sac au début des années 90.

4par Hocine Adryen

Et pendant ces années 1990, on avu apparaître le terme de«mafia politico-financière»pour désigner des personnesprofitant de la lutte antiterro-riste et de la terreur pour encourager forte-ment le marché informel, s’approprier ter-rains, biens et richesses avec la bénédictionde certains hauts dirigeants de l’époque. En2013, une étude du site américain d’infor-mation économique New World Wealth(NWW) parlait des barons de l’informelalgérien.On est encore loin du tout début de l’an-née 1990, lorsque feu Mohamed Boudiafengagea un bras-de-fer avec la mafia politi-co-financière symbolisée à l’époque parHadj Bettou, de son vrai nom BerhousMohamed, le baron du trafic des cigarettesen provenance des pays africains. Selon legénéral à la retraite Khaled Nezzar, HadjBettou était en possession d’armes de guer-re : «Nous avions eu l’information selon

laquelle Hadj Bettou détenait des armes àTamanrasset. J’ai mis à la disposition de laGendarmerie nationale un avion militairepour transporter deux escadrons à Taman-rasset. La gendarmerie m’a appelé pour medire qu’elle avait découvert des magasinspleins de marchandises. Mais après enquête,il s’est avéré que ces magasins appartenant àHadj Bettou avaient été loués aux commer-çants de la ville pour y entreposer leurs mar-chandises. Finalement, Hadj Bettou a étéjugé par un tribunal militaire et condamnépour la possession de deux kalachnikov».Ce dernier qui fût arrêté et jugé a passéquelques années derrière les barreaux.Hadj Bettou transportait des sacs desemoules pleins de billets de banque. Il necomptait pas les billets, il les pesait. Maisles vrais commanditaires, ses protecteurs,avaient échappé à la justice. Et aujourd’huides Hadj Bettou se ramassent à la pelle… Cedernier et ses coaccusés étaient poursuivispour les chefs d'inculpation de faux etusage de faux, de détournement et dilapi-dation de deniers publics, de contrebandeet de destruction de registres d'autoritépublique. Ce fameux Hadj Bettou sorti dunéant a su néanmoins capter l’intérêt desdécideurs qui ont, à travers lui, déclenché àl’époque la première opération «mainspropres» qui a fait ensuite pschitt du fait dela mort du président Boudiaf. La secondeopération «mains propres» qui a eu lieu aumilieu des années , a été menée par AhmedOuyahia, alors Chef du gouvernement deZeroual qui a fait emprisonner des milliersde cadres dont certains PDG de sociétéscomme celui de Sider, Messaoud Chetih. Ilsera condamné, le 23 octobre 1997, à dixans de prison. Quarante mois après, unnouveau procès l’innocentera, ainsi que sescollègues. L'affaire Sider a mis au jour lerôle occulte des mafias. Dès le premier pro-cès, les cadres avaient plaidé leur innocen-ce et évoqué le rôle occulte d'une «mafiapolitico-financière» qui aurait voulu sedébarrasser d'eux parce qu'ils avaient gênéses profits dans le cadre d'énormes impor-tations de ronds-à-béton. Son avocat, MeMiloud Brahimi ira jusqu’à dire : «Tout cequ'on a prétendu entreprendre contre la cor-ruption n'était qu'un leurre. Chaque fois,c'est une opération mains propres faite avecdes mains sales, à des fins strictement poli-

tiques. La dernière opération en date s'esttraduite par l'arrestation de plusieurs mil-liers de cadres des entreprises publiques, àcommencer par les plus gênants, dans lecadre des privatisations programmées. C'estainsi que les managers et les directeurs dedeux fleurons de l'économie algérienne,Sider et Cosider, se sont retrouvés sous lesverrous pour mauvaise gestion» dit-il.

tEbbOuNE DOIt tErMINEr LE bOuLOtAujourd’hui cet ancien trafiquant decigarettes qui s’est rangé fait office de pâlefigure aux cotés des «pontes» du systèmequi pompent des milliards de DA et se sontmême introduits dans les rouages de l’ad-ministration, faisant presque contre-poidsau gouvernement. Durant ces années, on avu apparaître dans la presse nationale leterme flou de «mafia politico- financière»pour dési-gner unensembleindétermi-né de sei-gneurs dela guerreprofitantde la lutteantiterro-riste et dela terreurpourencoura-ger forte-ment lemarché informel, s’accaparer terrains,biens et richesses. Aujourd’hui ces gensbien établis, – ils ont blanchi leur argent encréant des sociétés –, continuent néan-moins de peser sur l’économie nationale. Sidepuis le début des années 2010, la pressenationale parle plus volontiers des scan-dales de corruption à grande échelle, tou-jours sans conséquences judiciaires pour

leurs principaux bénéficiaires – seulsquelques malheureux «lampistes» sontlourdement condamnés – l’usage du termede «mafia politico-financière» a en revanchepresque disparu... Aujourd’hui, que peut-ondire de cette nouvelle faune de «trafi-quants» qui contournent les lois de la répu-blique et se font prêter de l’argent par lesbanques publiques : des barons de l’infor-mel ont fait jonction avec cette caste d’in-dustriels. Le président Bouteflika a eumême un jour cette réflexion pour dénon-cer l’intrusion de ce phénomène dans lessphères du pouvoir: «La négation des droits,les abus de force, la corruption et l’arbitrai-re ont provoqué un sentiment de rejet àl’égard de la chose publique et de révoltechez les plus faibles». Tout cela montre qu’ilexiste, pour le peuple, une grande attentede renouveau et de rupture avec un systè-me politique sclérosé et corrompu. Celamontre égalementque les Algériens,déçus et désenga-gés ne demandentqu’à se réveillerquand des initia-tives coup de poingde moralisation dela vie publique sontinitiées. Aussi, Teb-boune doit-il ter-miner le boulot enenvoyant à la casseles arrivistesmafieux devenusaffairistes et préoc-cupés beaucoup plus à bonifier leurs nou-veaux privilèges. Alors que la polémique necesse d'enfler et de prendre des propor-tions politiques, le Premier ministre, Abdel-madjid Tebboune, a répondu sèchement etfroidement à Ali Haddad et aux autreshommes d’affaires qui se plaignent de leurbrutale mise à l’écart. Tebboune a affirméclairement qu’il compte séparer le pouvoir

de l’argent du pouvoir politique : «La consé-cration du principe de la séparation entre lepouvoir politique et le pouvoir de l’argentfigure dans le plan d’action du gouverne-ment qui a été recommandé par le présidentde la République lors du conseil des ministreset validé par les deux chambres du parle-ment. À ce propos, rien ne pourra entamer lavolonté du gouvernement qui restera atta-ché à exécuter avec force les objectifs tracésdans son plan d’action, en exécution du pro-gramme du président de la République, seulsource de légitimité», dira Tebboune quirépondait aux accusations des proches deAli Haddad et des autres richissimes busi-nessmen avec lesquels il entretient en cemoment des relations très froides. Cettemobilisation sera encore plus forte à condi-tion de terminer le boulot notamment enenvoyant à la casse, dans le Parlement, lespartis, les ministères, les entreprises et lesorganes publics, les arrivistes mafieux pré-occupés plus à bonifier leurs privilèges etpasse-droit, d’entrepreneurs ripoux etvéreux que servir l’intérêt général. La tâcheest immense, complexe et dangereuse tantle réseau mafieux est omniprésent voireprotégé dans les rouages de l’Etat. Elle n’estcertainement pas sans risque. Le présidentMohamed Boudiaf a été probablementassassiné par la mafia politico-financièreaprès avoir lancé avec stupéfaction uneopération «mains propres» dans les hautssommets de l’Etat. C’est dire que la bête estprête à semer la terreur et la mort pourdéfendre ses privilèges et durer. Alors quefaire? Puis, il faut surtout répondre en touteurgence aux attentes des citoyens les plusdurement touchés par la crise économique.La puissance de frappe financière de cesacteurs mafieux est loin d’être confinée. Carla mafia politico-financière est un tigre enpapier qui ne prospère que sur la faiblessede l’Etat, la fracture sociale et les injusticesmultiples.

H. A.

Cette mobilisation seraencore plus forte à conditionde terminer le boulot notam-ment en envoyant à la casse,dans le Parlement, les partis,les ministères, les entreprises

et les organes publics, lesarrivistes mafieux préoccu-pés plus à bonifier leurs pri-vilèges et passe-droit, d’en-

trepreneurs ripoux et véreuxque servir l’intérêt général.

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CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017 45

ALGÉRIEIL EST DE PLUS EN PLUS ACCULÉ PAR L’EXIGENCE DE LA TRANSPARENCE INTERNATIONALEqu’est-ce que le secret bancaire ?

D’une façon générale, il s’agit de l’obligation, pour l’ensemble des membres des organesde direction et de surveillance des établissements financiers, ainsi que leurs employésexerçant une activité bancaire, de taire les informations de nature confidentielle qu’ils

détiennent sur leurs clients ou des tiers. Le professionnel ne respectant pas cetteobligation encourt des sanctions à caractères pénal, civil et disciplinaire.

4 synthèse Crésus

AvENIr Du SECrEt bANCAIrE ?Crise financière, lutte internationalecontre l'évasion fiscale, procédures judi-ciaires, scandales, amendes en milliards,fuites de données, les nouvelles régle-mentations, des accords fiscaux et desajustements aux règles internationales,et enfin la signature de l accord de coopé-ration pour l’échange automatique desrenseignements, marqueront probable-ment la fin du secret bancaire.DEpuIS quAND ExIStE-t-IL ?L’histoire du secret bancaire remonteau moins au XIXe siècle et s’inscrit dans lalongue tradition bancaire de discrétionentre contractants et de protection de lasphère privée. «A l’époque, cette relation

de confiance entre banquiers et clientsallait de soi. L’Etat n’avait pas à mettre sonnez dans leurs relations»1713 fut l’année du premier textesuisse qui fait référence au secret bancai-re mais l’inscription du secret bancairedans la loi ne s’est imposée qu’après laPremière Guerre mondiale, lorsque lespays voisins, notamment la France, sesont intéressés de près aux masses decapitaux qui s’étaient réfugiés dans lescoffres suisses. A la suite de la crise ban-caire de 1931, ils ont profité de la néces-sité de réorganiser le secteur pour sollici-ter une loi fédérale sur les banques.Adoptée en 1934, elle a consacré le secretbancaire. «La légende veut que cette ins-cription ait été décidée pour mettre lesfonds juifs à l’abri de l’Allemagne nazie. Enfait, la loi est antérieure, même si elle s’estrévélée ensuite effectivement utile pourprotéger les capitaux des victimes dunazisme».

quELS pAyS SONt CONCErNÉS ?La Suisse est le principal exemple,mais d’autres pays européens cultiventleur secret bancaire. C’est le cas de l’Au-triche, de Malte, des îles anglo-nor-mandes ou du Luxembourg qui l’a mêmeinscrit dans sa Constitution. Ailleurs dansle monde, Singapour ou Hong Kong fontfigure de places fortes, tout comme plu-sieurs petits États des Caraïbes (Îles Caï-mans, Îles Vierges britanniques, etc.).

quELS SONt LES GrANDS SCANDALES ?Dès son inscription dans la loi, lesecret bancaire a toujours suscité desscandales Déjà en 1946, lors des Accordsde Washington, dans l’histoire des déten-teurs allemands de comptes en Suisse,aussi en 1977 lors du scandale de Chias-so, où l’on a découvert qu’une filiale duCrédit Suisse recyclait activement desfonds de la mafia.En outre, entre 1995 et 1999, il a étésévèrement remis en question lors del’affaire des fonds en déshérence.L’affaire Falciani, l’informaticien qui adérobé en 2008 une liste de milliers decomptes bancaires fiscalement nondéclarés alors qu’il travaillait pour lafiliale suisse de HSBC. L’affaire de L'Officefédéral de la justice (OFJ) suisse a décidéde lever partiellement le secret bancairepour livrer des données sur les dirigeantsde la Fifa.Et, récemment, le procès Cahuzac à labanque britannique HSBC a été au cœurd’un vaste système d’évasion fiscale pilo-té par sa filiale suisse. HSBC s’expose tou-jours à plusieurs milliards d’eurosd’amende dans des dizaines de pays.En 2013, la banque d’affaires suisseUBS a dû régler 780 millions de dollarsaux États-Unis pour avoir permis à plu-sieurs milliers de clients américains dedéposer des fonds non déclarés au fisc, et1,1 milliard d’euros à la France pourblanchiment de fraude fiscale en 2014Autant d’éléments qui jouent contre lesecret bancaire et l’opacité financière quiest en net recul.

quELS ÉvÉNEMENtS ONt pOuSSÉLES GOuvErNEMENtS à y

MEttrE fIN ?La première brèche dans le secretbancaire suisse est ouverte à partir desannées 2000 par les États-Unis. Ces der-niers veulent lutter plus efficacementcontre l’évasion fiscale qui prive le gou-vernement de fonds qui devraient nor-malement être soumis à l’impôt. Cetobjectif est rendu encore plus pressantaprès la crise financière de 2008. LesÉtats-Unis ont mis en place en 2013 undispositif destiné à obtenir des paysétrangers des données sur les Américainsoù qu’ils soient dans le monde FATCA(Foreign Account Tax Compliance Act).Ce système a permis d’encaisser 4,7 mil-liards de dollars (amendes comprises).COMMENt vA S’OrGANISEr

LA trANSpArENCE INtErNAtIONALE ?Le G20 de Londres, en 2009, contraintdes piliers historiques du secret bancairecomme la Suisse et Singapour, en impo-sant l’échange d’informations fiscales.L’OCDE et les 31 pays qui ont signél’accord le 27 janvier 2016, rend cetéchange automatique, les administra-tions fiscales ne sont plus obligées d’en-quêter au cas par cas. C’est l’OCDE, orga-nisation qui rassemble les 34 pays lesplus développés du monde, qui se char-gera de veiller à la mise en place du dis-positif.COMMENt L’ALGÉrIE GèrE-t-

ELLE SES ExILÉS fISCAux ?Les dirigeants algériens apprécientl’immobilier parisien, les résidences àNeuilly, le 16e, le boulevard Haussmann,le parc Monceau et, bien sûr, la Côted’Azur.Selon les chiffres de la Banque d’Algé-

rie, 26% de la masse monétaire se trouveen dehors du système bancaire.La Direction générale des Douanesalgériennes a identifié 5 pays vers les-quels les Algériens y font transférer leurargent grâce à des fins de fuites fiscales.En effet, la Grande-Bretagne, la Suisse,l'Espagne, le Liban et les Emirats arabesunis accordent à nos importateurs desfacilitations bancaires et une exonérationpartielle d’impôts ce qui leur a permis detransférer illégalement des sommesastronomiques dans ces banques étran-gères qui ne sont pas regardantes surl’origine de ces fonds.Le gouvernement algérien a lancé en2015 l’action de Conformité FiscaleVolontaire (CFV), qui se prolonge jus-qu’au 31 décembre 2016, Le rythme desdépôts est faible et les banquiers l’admet-tent à demi-mot.Drainer au moins 10% de la massemonétaire qui circule dans la sphèreinformelle, un objectif qui paraît d’ores etdéjà hors de portée au rythme actuel desdépôts.LE SECrEt bANCAIrE, ESt-CE

vrAIMENt tErMINÉ ?Initié lors du G20 de Londres, 31 paysse sont engagés à passer à l’échange auto-matique de données bancaires. Si unFrançais ouvre un compte en Suisse, lefisc sera immédiatement prévenu etpourra contrôler sa gestion. Tous lesgrands centres financiers mondiaux yparticipent, La Suisse a annoncé endécembre qu’elle refusera l’échangeautomatique avec les pays non signa-taires, Un fraudeur n’aura donc qu’à fairetransiter ses fonds par un de ces pays(Chine, Russie, etc.) pour profiter dusecret suisse en toute quiétude.SECrEt bANCAIrE Et pArADISfISCAL, C’ESt LA MêME CHOSE ?Le secret bancaire est souvent assimi-lé aux paradis fiscaux. Or, il n’en estqu’une composante. Les paradis fiscauxsont la plaie de la finance internationale.L’argent de l’évasion fiscale, de la corrup-tion et des mafieux de tous bords y trou-ve des havres de paix. Pourtant, rien nenous oblige à supporter ces zones denon-droit.

synthèse Crésus

Le gouvernement algérien a lancé en2015 l’action de Conformité Fiscale Volon-

taire (CFV), qui se prolonge jusqu’au 31décembre 2016, Le rythme des dépôts est

faible et les banquiers l’admettent à demi-mot. Drainer au moins 10% de la masse

monétaire qui circule dans la sphèreinformelle, un objectif qui paraît d’ores etdéjà hors de portée au rythme actuel des

dépôts.

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CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 201746

ÉVOCATIONENTRETIEN RÉALISÉ PAR S.MEHALLA ET LA DIRECTRICE DE LA REVUE L’IvRESCq-DÉCEMBRE 2012- rédha Malek :

«l’Algérie a failli être supprimée dela carte géographique»

Le dernier responsable de la délégation algérienne conduite par feu KrimBelkacem, Réda Malek qui a signé les Accords d’Evian qui ont abouti à

l’indépendance de l’Algérie, a tiré sa révérence samedi dernier à l’âge de 86ans. Il a été inhumé dans le carré des Martyrs à El Alia aux côtés des géants

de la révolution algérienne.

Dans votre ouvrage Guerre delibération et révolutiondémocratique, écrits d’hier etd’aujourd’hui, vous abordez toute unepalette richissime allant de larévolution, la démocratie, l’Occident,l’islam, la culture… en passant par desprofils de Claude Bourdet, FrantzFanon, Jacques Berque, Charles deGaulle… Comment peut-on écrire untel condensé, témoignage, tanguantaisément d’un thème à un autre àtravers lesquels la vie du grandHomme que vous êtes foisonne ?rédha Malek : Il est vrai que je parle detout cela dans mon ouvrage. Cependant, il ya certaines choses qui avaient été déjàpubliées auparavant. Vous savez, pour par-ler et marquer un temps d’arrêt sur ladémocratie – puisque l’actualité du mondearabe sied – la nôtre ne date pas d’au-jourd’hui. Le 1er novembre 1954, on avaitdécidé de changer son mode de vie contrel’obscurantisme, l’oppression, l’avilisse-ment, les spoliations des biens… Enfin,pour l’Algérien qui a subi le colonialismealiénant trop longtemps, avec ce fort désird’en finir, c’est un acte démocratique uni-versel. La démocratie s’oppose à touteforme d’injustice ou de tyrannie exercéepar un pouvoir contre la volonté d’unpeuple. Cette injustice vis-à-vis des Algé-riens était telle qu’elle tendait à l’annihila-tion du peuple par un processus de déper-sonnalisation et d’atomisation implacable.Guy Mollet, président du Conseil françaisdisait que «la révolte menée par les « fella-

ghas» était anarchique, faite par des bandits,des brigands, des fanatiques d’un autre âge».Pourtant, à cette époque déjà, nous avionsélevé le débat en montrant que la Révolu-tion démocratique de tout un peuple unipostulait la liquidation radicale du colonia-lisme.

En ces temps de révolution desprintemps arabes, on voit toutes cesrévoltes ici et là, pensez-vous que ladémocratie puisse appeler à prendredes armes ?r. M. : Bien sûr ! Chez nous, la révolutionétait une révolution armée parce quedepuis des années nous appelions à la justi-ce, mais en vain ! Nous voulions arriver à cequ’on négociât avec nous. Nous étions

«dépossédés» de nos droits, de nos bienspour reprendre le terme du professeurJacques Berque, mais cela restait sansappel. Lors d’un voyage au Sud algérienavec Jean-Paul Sartre, Simone de Beauvoiravait noté la «condition infrahumaine»imposée aux habitants. Germaine Tillion,décrivait cela en parlant de «clochardisa-tion». Jacques Chevallier, maire d’Alger etsecrétaire d’État à la Défense, attirait l’at-tention sur la «marginalisation d’un peupleréduit à une masse d’ombre au fond d’untableau»… Mais, on n’avait jamais compris,ni agréé nos demandes… Donc, la seulesolution était de passer à l’action, non paspour vaincre l’armée française – nousn’avions pas cette prétention-là – maispour refuser ses abus. Nous disions : «puisque l’Algérie est un département fran-

çais, noussouhai-tons quenoussoyonstraitéscommedes Fran-çais». En1947, ilsavaientcréé uneassem-blée avecle statutde l’Algé-rie, composée de soixante délégués moitié-moitié, pour un million qu’ils étaient et dixmillions que nous étions, c’est ahurissant !Aujourd’hui, si nos jeunes veulent com-prendre le colonialisme, ils n’ont qu’àprendre le code de l’indigénat et le lire.Vous savez, à l’époque, le Gouverneur géné-ral pouvait vous enlever vos terres, pouvaitvous mater, car il y avait même le délit duregard. Si vous regardiez le militaire oul’administrateur, il pouvait prendre celacomme un défi et vous mettre en prison…

En fait, dans votre ouvrage, des nomstels que celui de Frantz Fanon ouautres ont décrit l’état psychologiquedu combattant algérien brimé, celuiqui revendiquait ses droits de vie lesplus élémentaires…Beaucoup de Français ont compris quenous ne faisions pas la Guerre contre eux,mais contre le colonialisme. À l’exemple deFrancis Jeanson, l’intellectuel engagé ouencore Frantz Fanon, cet intellectuelantillais. Effectivement, c’est sous l’impactde la révolution algérienne que ce dernieravait trouvé son ultime accomplissement. Ildisait qu’il y avait un changement psycholo-gique chez les Algériens qui se sentaientindépendants avant même l’indépendance,et cela par la lutte armée qu’ils menaient.Ces mutations psychologiques, Fanon lesconstatait : en 1956, lesAlgériens achetaient des radios, et écou-taient les informations. Avant cette date, ilsne s’intéressaient pas à la radio coloniale.Ils commençaient aussi à se soigner et àprendre goût aux soins puisqu’il y avait desmédecins dans l’ALN. Les femmes mon-taient au maquis, elles s’affirmaient, s’im-pliquaient… C’était une masse de paysansqui avaient pris les armes pour l’indépen-dance. Ils avaient subi des injustices ter-ribles sans compter ces zones interdites. Enfait, la révolution du 1er Novembre 1954avait pour dirigeants des militants profes-sionnels aux origines sociales modestes etcela a contribué à donner à la lutte pourl’indépendance un contenu socio-écono-mique affirmé. L’allégeance à la Nation, lalutte pour la libération nationale. Le régio-nalisme au profit de la Nation. L’individu nedépendait plus du cheikh du coin ou d’unequelconque confrérie. Il agissait selon lesordres de l’organisation du FLN, et c’étaitdans la clandestinité. Ce fut à partir de làque la Nation algérienne commença à êtreune Nation moderne. Dans la démocratie

moderne,c’est l’indi-vidu quiagit. Donc,de cettedétribalisa-tion devaitnaître l’Al-gériemoderne,favorisantl’émergen-ce de l’indi-vidu de labrumemédiévale.D’ailleurs, pour vous, la démocratieest faite pour une société mature quiréfléchit, qui prône la sagesse, lesavoir, l’élévation et non pas un idéalpour un petit peuple avec des idéesfarfelues…r.M. : Vous savez, lorsqu’on se lancedans une révolution de cette envergure

comme la nôtre (le monde entier fut étonnépar cette lutte de libération), vous pensezbien que c’est par une stratégie : la déclara-tion du 1er Novembre qui a donné à l’Algé-rie sa physionomie moderne et scellé savocation au progrès par une unité, estinébranlable.Ou encore la plateforme de la Soummampendant les contacts secrets en 56/57… Lalutte indépendantiste existe, on n’a qu’àrevisiter notre patrimoine historique deJugurtha à Abdelkader et d’Ibn Khaldoun àTahar Djaout…En 1954, le principe de la démocratiepour mener une révolution afonctionné uniquement avec ladéclaration du 1er Novembre.Comment peut-on expliquer que leFLN n’ait pas fonctionné dans ladémocratie ?r. M. : N’oubliez pas que l’Algérie a failliêtre supprimée de la carte géographique.Nous étions des infrahumains. Des êtresinférieurs (…).

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47CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017

ENTRETIENALI BOUMEDIENE GÉNÉRAL MANAGER DE LA COMPAGNIE BOMARE : «Mon challenge est de me faire une

place dans le marché international»4Entretien réalisé par S. Méhalla

Crésus : On dit souvent, qu’en Algérie,il y a un déficit de communication.Est-ce un manque de stratégie ? Ali boumediene: Pour moi, le souci enAlgérie est que les boîtes de Com cherchentun business facile. C’est trop standard.Alors que si on approche des spécialistes dela Com, c’est pour être orienté, accompa-gné, conseillé… En tant que chef d’entrepri-se, je ne saurais dire ce qui est efficace et cequ’il ne l’est pas. J’ai donc besoin du savoir-faire de la boîte de Com avec laquelle je suispartenaire. Je ne souhaite pas, à titred’exemple, dépenser quelques millions dedinars en une compagne. Je préfère unaccompagnement continu. On commu-nique, on attend le feedback du marché eton relance selon les palpitations du mar-ché. On relance à nouveau. Je ne suis paspour une communication massive sur unpetit laps de temps et arrêter brutalement.J’ai vécu ce cas de figure en 2016. Pour moi,j’étais mal accompagné. Mais cela, à mon humble avis, dépenddu type du contrat qu’on établit avecla boîte de Com Non ? Si je suis intéressé et je souhaite com-muniquer, etc., c’est à la boîte de Com deme faire des propositions. Si je prendscomme exemple un axe de mon domained’activité, l’export par exemple. Si un clientme commande, par exemple, 10 000 piècesde tel modèle. Par professionnalisme, maréponse est de dire tout de suite non. Je luiconseille de prendre 2000 afin de les écou-ler rapidement et faire une autre comman-de. Je fais cela tout simplement parce quej’ai une visibilité sur le marché. J’ai desinformations que le client n’a pas. Je neveux pas vendre à tout prix. Je conseille etj’ai une stratégie. L’année passée, pour bienillustrer mon propos, on est passé par unepériode où Samsung a arrêté un modèle, le« 40 pouces ». Samsung était en rupture destock. Bomare détenait un stock de ce pro-duit-là. A un moment donné, les commer-ciaux m’ont demandé de faire une offre enbaissant les prix de ce produit. À cemoment-là, j’ai augmenté le prix de ce pro-duit au moment où il y avait une certainestabilité et même mieux, certaines compa-gnies ont baissé leur prix sur ce produit. Jesuis allé contre les avis des commerciaux etcontre la stratégie des prix de certainesmarques. Au bout de deux mois, avec larupture des stocks, nous avons écoulé toutle produit avec le prix que j’ai défini. Toutcela pour vous dire que c’est la vision quidétermine la stratégie de communication,la stratégie commerciale. Je souhaite cegenre de partenariat avec les boîtes deCom.Monsieur Boumediene, si nouscommencions par une questionsimple : quelle est votre vision dans ledomaine de votre activité ?Je vais vous dresser un tableau en troistemps. Le passé, le présent et les perspec-tives. Dans les années 90, nous ne faisionsque l’import et la distribution. C’était entreles années 1992-1999. La dernière opéra-tion d’importation était en 1999. La déci-sion était prise de se lancer dans la produc-tion. Pendant la période 92-99, j’ai beau-coup travaillé avec les Européens (Fran-çais, Italiens, Espagnols…). Au courant del’année 97, nous étions invités par Sam-

sung, puisque nous importions les produitsde Samsung d’Angleterre. Des amis, à cetteépoque, avaient lancé déjà une usine demontage à Bordj, en 1996. J’étais l’un desacteurs de cette opération puisque j’ai par-ticipé aux négociations. Je vous disais doncqu’en 97, j’étais invité, pour la premièrefois, en Asie. A mon retour de ce voyage, j’aipris quelques décisions. D’abord arrêter leproduit blanc, car nous importions aussi leproduit blanc. Il n’y a pas de développe-ment dans le produit blanc. Si je vousdemande à quand remonte l’achat de votrefrigo, vous allez me répondre au minimum10 ans. Le produit blanc n’était donc pasintéressant pour moi. Par contre, on abesoin de changer son appareil électro-nique tous les ans pratiquement. Il y a undéveloppement rapide dans l’électronique.Dans la téléphonie, il y a des nouveautéschaque 3 ou 4 mois. Ailleurs, presquechaque mois. Le déclenchement suscité,après la visite de la Corée du sud, a été decréer une marque, car nous avons investibeaucoup d’argent dans la communicationau profit d’autres marques. La deuxièmedécision, comme je vous l’ai dit, a été destopper le produit blanc. Comment a été le commencement ? J’ai commencé par deux produits. Télé-vision et récepteur satellite. C’était à lacréation de Bomare en 2000 et la marqueStreamSystem. J’ai commencé à faire del’intégration, étape par étape. J’ai commen-cé par faire les insertions manuelles, carnous n’avions pas le savoir-faire. Aucuneboîte nationale n’avait le savoir-faire. Desentreprises nationales faisaient de l’assem-blage, le SKD. Elles faisaient le câblage, letest… et branchement des câbles. C’étaitentre 2001 et 2005. C’est en cette périodeque j’ai commencé à travailler avec lesCoréens avec lesquels j’ai sincèrementappris beaucoup de choses. Je peux direque s’il y a succès aujourd’hui, c’est grâceaux Coréens. Petit à petit, nous avons ins-tallé une ligne d’insertion automatique, quifait les cartes électroniques, la première enAlgérie à fabriquer les cartes mères ici enAlgérie. L’essentiel de notre investissementa été la formation. Nous avons consacréune année pour la formation des techni-ciens et des ingénieurs. On payait dessalaires pour des gens qui étaient en for-mation. Les Américains et les Coréensétaient les principaux formateurs. Quel est le chiffre de cetinvestissement ?Je ne sais pas le montant exact, maisc’étaient des chiffres importants. L’équi-pement, à lui seul, nous avait coûté plusde deux millions de dollars.

Le prix de la plus-value !Mon projet n’a pas de relation avec lapolitique. Ma vision a été d’aller ailleurset me frayer une place dans le marchéinternational. En 2007, j’ai réalisé deuxopérations d’export. Vers quel pays ?L’Espagne! Mais j’ai arrêté suite auxcontraintes commerciales et la bureau-cratie. Pourquoi ? Parce que les clientsque nous avons approchés travaillentavec un calendrier et un timing. Il leurfaut le produit en temps et en heure. Si leproduit est inséré dans le catalogue euro-péen à une date précise, et le client n’estpas livré à temps à cause des contraintesde domiciliation des factures, ou à causede l’inspection des douanes qui tarde àcontrôler le produit à l’export, la boîte estgrillée et même le client risque des péna-lités parce qu’il y a toute un travail decommunication derrière. En 2007, ladomiciliation des factures à la banqueprenait deux semaines. J’ai donc décidéde changer de stratégie en 2008 pourm’occuper de la partie sous-traitance. Lamême année, j’ai commencé à réfléchir àl’automobile. J’étais pratiquement le seul.J’ai d’ailleurs participé à des Salons desous-traitance, plusieurs années après. Comment se passe la sous-traitance,et c’est quoi le procédé ?Je reçois la matière première et leschéma de la pièce et je fais l’intégration.Il y a donc une acquisition d’emblée desavoir-faire et un marché potentiel. Mais,malheureusement, la contrainte restetoujours les délais de livraison. À partirde 2009, il y a une volonté politique d’en-courager l’exportation. Il y a un sérieuxtravail au niveau du gouvernement, c’estclair. Il y a un changement. Mon challen-ge, dès le départ, a été de me frayer uneplace dans le marché européen.Pourquoi choisir l’Europe alors quenous sommes la porte de l’Afrique ? Vous ne nous apprenez strictementrien avec les Africains. Les Africains veu-lent des prix moins chers, et avec des prixmoins chers vous n’apprenez rien dutout. L’Europe est exigeante en matièrede service et en matière de qualité. Enplus, sachant que le produit est fabriquéen Algérie, l’Africain a tendance à le sous-estimer. Exactement comme l’Algérien.Aussi, ce n’est pas facile de s’assurer uneplace en Europe dans l’électronique vueque nous sommes connus pour être dansle domaine énergétique, le pétrole, legaz… On est connus aussi dans l’importa-tion. L’importation est un problème.

C’est, on y revient, un travail decommunication qu’il faut faire !Exactement. Le gouvernement devraitaussi jouer le jeu et nous accompagner. Uneautre idée est de créer un club de fabricantsdans l’électronique. Nous consommonsl’équivalent de 1,5 million de télés. Alorsque l’Allemagne consomme 12 millionsd’unités par an. L’Espagne 3 millions. Cesont des pays où il n’y a pas de production.Mon objectif est de fabriquer 1.5 d’unitéspar an dans l’horizon 2020 avec un tauxd’intégration de 70%. Si chaque fabricantfait pareil, nous aurons un marché consé-quent et nous susciteront l’installationdans notre pays de sous-traitants. Avec 10millions de télés/an, les fabricants descomposants ne vont plus hésiter à s’instal-ler chez nous. Les fabricants de la hautetechnologie vont aussi s’installer ici.Aujourd’hui, tout est fabriqué en Chine, carla matière première, l’écosystème, se trou-ve en Chine. L’IPhone est fabriqué en Chine.Vous avez une idée sur le nombred’IPhones fabriqués par an ? 1 milliards depièces, fabriquées et vendues. Quelle est la part du marché deBomare ?On est troisième, quatrième ! Vous savezqu’on a eu beaucoup de difficultés avant.Nous avons préparé le terrain à ceux quisont arrivés après nous. Nous avons investidans la formation. Nous avons eu des ingé-nieurs qui ne connaissaient rien et ce n’estpas de leur faute. Ils n’ont jamais eu vent dece qui se passe dans le monde. J’ai choisi unpartenaire pour les marchés des cartesmères. Nous négocions une ligne d’inser-tion complète avec un montant de 1.5 mil-lions de dollars. Une ligne mise à disposi-tion d’une université en Algérie. Après unan de tronc commun, l’ingénieur commen-ce à se familiariser avec les machines, et ce,pour pouvoir développer. La technologiedu futur est de fabriquer une un smartpho-ne flexible. Allez développer une machinequi fabrique une carte flexible. Le contratavec l’université Saad Dahleb, Universal etnous, a été signé en octobre 2016. La ligneest d’ores et déjà à l’usine Bomare. Puisque tout ce fabrique en Chine, auVietnam, en Corée…, pourquoi ne pasdécentraliser ?Non ! En 2004, les Tunisiens m’ont invi-té à m’installer chez eux. J’ai eu des garan-ties d’aides et tout. Mais c’est mon pays quiest prioritaire. En tout cas, le changementest en train de s’opérer.L’idée du club que vous avez évoquéeen haut est pas mal !J’étais invité par M. Tibaoui au WTC auxÉtats-Unis. Il y avait plusieurs clusters dansplusieurs domaines. Un cluster en électro-nique serait une très bonne idée dans lamesure où nous pourrons faire des achatsgroupés. Le fournisseur auprès duquelnous allons tous acheter nos accessoires netardera pas à s’installer chez nous, car il y aun marché. Il faut profiter et créer un éco-système. On n’en est pas loin. La Turquie,dans les années 90 était presque un payspauvre. Aujourd’hui, elle exporte plus de120 milliard de dollars/an de produitsfabriqués en Turquie.Un dernier mot !On ne baissera pas les bras ! S.M.

M. Ali Boumediene

Ce jeune capitaine d’entreprise aux dents longues livre ici dans cet entretienles secrets d’une réussite managériale qu’il veut d’abord algérienne avant

de s’attaquer au marché mondial pour pouvoir se frayer une place au soleil.

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48 CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017

DÉCOLLAGEpar captain Kaabeche Aissa

LA PISTE SANS FIN QUI RÉVOLUTIONNE le concept d’aéroport

Un chercheur néerlandais auNetherlands AerospaceCentre des Pays-Bas, a déve-loppé un concept révolution-naire, une piste en cercle,dont il croit qu’elle pourrait se concrétiserdans le futur en raison de la congestion desaéroports à venir. Le chercheur aurait eul’idée d’une piste en rond en visionnant desvidéos d’atterrissage délicats sur Youtube,explique Libération qui a mis en avant ceprojet dans un article du 22 juillet… Lemanque de capacité dans les aéroportsserait la principale contrainte à la croissan-ce du transport aérien, relate également lesite présentant ce projet insolite. Les pro-jets actuels optimisent l’utilisation de lacapacité de l’aéroport disponible, mais àmoins d’une nouvelle approche structurellemise en place, les structures existantes nesont pas réalistes avec les prévisions d’aug-mentation de trafic, estime M. Hesselink.

The Endless Runway est un conceptd’aéroport radical et nouveau, qui appliqueune piste à 360 °, de 3 km de diamètre, etlégèrement inclinée (de 30 mètres sur lapartie extérieure) pour contrer la forcecentrifuge, ce qui contribuera à ralentirmécaniquement l’avion. Autre avantage, lespilotes auront toujours la possibilité d’at-terrir ou de décoller avec le vent de face.

«Le vent de travers ralentit la rentabilité desaéroports qui ont des pistes orientées dunord au sud et de l’ouest à l’est. Ils doiventparfois annuler des vols, ce qui leur coûtetrès cher», explique le chercheur. Selon lui,selon la force du vent, deux à quatre avionspourraient atterrir en même temps surcette piste du futur. Autre avantage, aucentre du cercle parfait que représente

cette piste, quinze chercheurs européensissus de cinq centres spatiaux (en France,aux Pays-Bas, en Allemagne, en Pologne eten Espagne) ont également imaginé dès2012 d’implanter tous les bâtiments-han-gars, terminaux… qui composent un aéro-port, accessibles par des passages souter-rains, ce qui permettrait de placer acteursaériens et passagers au cœur de cette plate-forme. Reste qu’avant de voir ce projetdevenir réalité, ces concepteurs devrontconvaincre les investisseurs, car son coûtest de 10 à 60 % plus élevé qu’un aéroportstandard. Et surtout, l’hypothèse d’une tellepiste circulaire sous-entend la reformula-tion des procédures de pilotage et les régle-mentations liées à la sécurité. Pas sisimple… Pourtant et preuve du sérieux duprojet, The Endless Dunaway a déjà bénéfi-cié d’une subvention de 400 000 euros de lapart de la Commission européenne. Maisreste depuis au point mort.La plus jeune femme pilote d’un 777est indienne

Elle sait allier à merveille sa féminité et ses missions pourAir India. Anny Divya, âgée de 30 ans, est la plus jeunefemme commandant de bord femme d’un Triple Sept.«Depuis toute petite, j’ai toujours voulu être pilote, bien queje n’aie pas eu beaucoup d’indications sur la façon de devenirun pilote», a-t-elle expliqué dans une interview à MirrorNow. Et grâce notamment à l’accompagnement permanentde ses parents, elle a réalisé son rêve tout en établissant cerecord symbolique, alors que les femmes représentent peuou prou seulement 10 % des pilotes dans le monde aujour-d’hui. «[Mes parents) m’ont toujours soutenue, mêmequand certaines personnes leur disaient de ne pas m’en-voyer à l’école de pilotage et que les frais étaient élevéspour eux. Mais ils ont géré», raconte Anny Divya. Elle amaintenu son cap jusqu’à la fin, puisqu’elle s’est accrochéeà son ambition de piloter le 777, même qu’on lui a proposéde piloter un Boeing 737.Ile Maurice : une collision évitée dejustesse entre un A380 et un A330

une catastrophe aérienne a été évitée de justesse le 14juillet dernier au large de l’île Maurice : un Airbus A380d’Emirates et un Airbus A330 d’Air Seychelles, tous deuxavec des passagers à bord, ont failli entrer en collision,comme le montre le suivi des deux vols publié par Flightra-dar24. Voici la transcription en français des échanges entreles deux avions, l’A380 du vol EK703 et l’A330 du volHM54, et le contrôleur aérien de l’aéroport Plaisance del’île Maurice, publiée par le site réunionnais Clicanoo : «Le

contrôleur de Plaisance autorise l’A330 à monter à 37 000pieds. L’A380 qui souhaite descendre est autorisé à rejoindrele niveau 380 (38 000 pieds) afin d’assurer la séparation aumoment du croisement. «Autorisé à descendre niveau 360»,répond l’équipage de l’A380 qui à l’évidence n’a pas com-pris l’instruction du contrôleur. Ce dernier ne relève pasl’erreur mais précise : «Emirates 703 vous serez autorisé àdescendre plus bas une fois le croisement effectué avec le Sey-chelles 054 qui monte au niveau 370.» L’équipage de l’A380indique qu’il n’a pas compris et demande au contrôleur derépéter. Les deux appareils se rapprochent l’un de l’autre.Le contrôleur signale à l’A330 seychellois que l’A380 des-cend au niveau 380 alors que ce dernier a collationné 360.Ce dernier confirme : «Passons niveau 360.» Le contrôleurs’affole : «vous étiez autorisé niveau 380». Dans le cockpit del’A330 d’Air Seychelles, on voit apparaître droit devantl’A380. «Nous tournons à droite immédiatement. Nous avonsle trafic en vue.» Seul le virage de l’A330 du vol HM54 àdroite in extremis a permis d’éviter la collision. Déjà, le 7juillet dernier, une catastrophe aérienne majeure a été éga-lement évitée de justesse à l’aéroport de San Francisco : àson atterrissage, un Airbus A320 d’Air Canada avec 135passagers et cinq membres d’équipages à bord, a été forcéd’effectuer au dernier moment un go-around pour éviterquatre autres avions sur le taxiway. L’A320 est passé 31 mau-dessus de deux premiers avions, 61 m au-dessus dutroisième, et 91 m au-dessus du quatrième.Airbus adopte les boites noireséjectables

Airbus a annoncé un accord avec Leonardo DRS et L3 Tech-nologies pour déployer des boîtes noires éjectables sur saflotte long-courrier, à commencer en 2019 par l’A350, et àplus long terme de nouveaux systèmes sur l’ensemble de sagamme. Localiser un avion après son crash n’est pas forcé-ment facile, comme l’ont prouvé les accidents en pleine merdes vols AF447 d’Air France et MH370 de Malaysia Airlines.Le 21 janvier 2017 lors du Salon du Bourget, l’avionneureuropéen a annoncé l’installation dès 2019 de deux nou-veaux appareils remplaçant les habituelles boîtes noires.L’ADFR (Automatic Deployable Flight Recorder, enregis-treur de vol au déploiement automatique) dans ses A350 etles A380, A330 et A321LR. L’avionneur précise que cet ADFR rassemblera en un seulappareil l’enregistreur des données de vol (FDR) et celuides voix du cockpit (CVR), et sera capable de conserver 25

heures d’enregistrement. Conçu pour flotter, il sera installédans la dérive verticale de l’appareil et équipé d’un ELT(Emergency Location Transmitter, balise d’urgence) per-mettant aux sauveteurs de localiser rapidement l’épave etles enregistreurs de vol. L’autre version de l’appareil(CVDR, Cockpit Voice and Data Recorder) sera similairedans sa conception, mais installée à demeure dans la baieavionique à l’avant des avions. Airbus souligne que ce prin-cipe offre une nouvelle possibilité pour les compagniesaériennes : le déploiement automatique «en cas de défor-mation structurelle significative ou de submersion dansl’eau».L’ADFR concernera plus particulièrement celles opérantdes vols long-courrier au-dessus de zones peu habitées oudes océans. Les monocouloirs de la famille A320 seront euxéquipés de deux CVDR, afin d’augmenter la redondance deces systèmes de sécurité ; les avions actuels n’ont qu’unCVR et un FDR. L’unité ADFR ainsi que son système d’éjection mécaniqueseront conçus et fabriqués par DRS Technologies CanadaLtd. (une société Leonardo DRS), et intégrés par L3 en par-tenariat avec l’ingénierie Cross-Program d’AirbusHistoire : Le 21 juillet 1911 dans leciel : L’aviatrice Moore se tue enaéroplane

21 juillet 1911. En ce vendredi 21 juillet 1911, la listedes victimes de l’aviation s’allonge d’un nouveau nom :E.-J. Wright, veuve Cornesson, plus connue sous le nomde Denise Moore, va trouver la mort dans un accidentd’aéroplane à l’aérodrome Farman de la ville d’Etampes.C’est ainsi la 68e personne à mourir suite à un drame del’air. Une journée funeste qui restera dans les annales del’aviation puisque c’est la première femme qui meurt enaéroplane au niveau mondial. Cette Française originaired’Alger s’étant crashée alors qu’elle pilotait un biplan.Peu expérimentée, elle volait seule que depuis peu, Deni-se Moore a mal négocié un virage, suite à quoi est arrivél’accident mortel. Pas encore détentrice du brevet depilote, elle était élève à l’école Farman. Si Denise Mooreest la première victime au féminin d’un accident d’aéro-plane, la première victime au masculin est le lieutenantaméricain Thomas Selfridge, qui alors qu’il était passa-ger est mort le 17 septembre 1908. Son pilote OrvilleWright ayant pour sa part la vie sauve.K.Aïssa

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AGRICUTUREquel avenir pour l’agriculture

moderne en Algérie ?

Cet objectif ne pourra être atteint que si un remembrement du foncierest fait pour mettre en place, à travers des coopératives, desexploitations fiables pouvant être gérées selon les normes.

4par K. benabdeli

Il y a lieu de reconnaître que malgréles subventions et les plans de réno-vation et de développement du sec-teur agricole, les résultats ne sontpas à la mesure des dépenses enga-gées. L’honnêteté nationaliste voudraitqu’on soit réaliste dans l’analyse pragma-tique et débarrassée de toute teinte poli-tique pour faire un bilan technico-écono-mique de ce secteur stratégique pour l’Al-gérie.LE CALCuL ESt SIMpLELes experts autoproclamés en agricultu-re et ils sont nombreux, affirment quel’agriculture algérienne doit continuer àêtre subventionnée sans oser aborder cevolet dans son aspect politique et tech-nique. La réalité est que ce secteur a étésubventionné depuis l’indépendance sanspour autant qu’un bilan réaliste soit fait ;mais sur quelque base en l’absence d’uncahier des charges assujetti aux résultats,ce qui n’a jamais été le cas. Certains affir-ment que le rendement des céréales estpassé d’une moyenne de 7 à 20 qx/ha et,exceptionnellement, à 40, ce qui est unleurre. La moyenne nationale du rende-ment des céréales ne dépasse pas les 11 à13 qx/ha. Le calcul est simple : il suffit dediviser la récolte par le nombre d’hectares,soit 40 millions de qx par 3 millions d’hec-tares ce qui confirme le chiffre catastro-phique, et il ne faut pas avoir peur de la réa-lité des chiffres. Ces résultats sont obtenusquand le Ciel le veut bien – prévoir la pluieau bon moment – et ce n’est pas la politiqueagricole qui est à l’origine de ces rende-ments exceptionnels.

COLLOquES Et fOruMSIl faut se rendre à l’évidence que ce n’estpas pour demain que la production agrico-le va remplacer le pétrole, sauf pour ceuxqui font dans la politique politicienne etprofite de cet écosystème nébuleux et bud-gétivore sans objectifs chiffrés. Ce n’est pasavec des forums, des colloques, des associa-tions, des chambres d’agriculture et deleurs subdivisions agricoles que le secteurde l’agriculture va connaître un dévelop-pement digne d’un pays comme l’Algériequi a dépensé plus de 1000 milliards dedinars en 20 ans soit près de 150 000 DApar hectare ; de quoi moderniser notre sur-face agricole utile (SAU), avec un bilannégatif. La politique du renouveau agricoleet rural n’est finalement qu’un slogan pourstabiliser une population rurale mais quihabite en ville ; l’exode rural est inquiétantcomme le confirme les statistiques : plus de80% de la population est dans les agglomé-rations et le paysage rural a été totalementdéserté. Les constructions rurales subven-tionnées n’ont pas permis le retour dumonde rural. Le renouveau n’a été que dansles sommes distribuées dans des pro-grammes dont l’impact reste très mitigé,pour ne pas dire un échec.uNE pOLItIquE NuAGEuSELa politique nuageuse du foncier agrico-le est une autre erreur fondamentale qui vaà contresens du développement de l’agri-culture puisqu’il (le foncier) permet unmorcellement qui va à l’encontre d’unepolitique de modernisation à travers desexploitations agricoles fiables et gérables.Un fort pourcentage de bénéficiaires deconcessions agricoles, ont vendu leurs

pseudo-exploitations. Le foncier ne peutêtre résolu que lorsque la dilapidation desterres agricoles, forestières et steppiquesest stoppée : plus de 450 000 ha urbaniséssur les meilleures plaines telliennes ; oùsont les associations et les experts ? Lecadastre du foncier agricole pour sauver etmettre en valeur toutes les terres à voca-tion agricole est la priorité fondamentaleau lieu de prétendre mettre en valeur 3 mil-lions d’ha dans le Sud. Un hectare mis envaleur dans le sud revient dix fois plus cherqu’un hectare dans le nord ou sur leshautes plaines. Confortée par ses rentespétrolières et gazières, les gestionnairessont devenus des dépensiers et ont voulutransformer le Sahara en Californie mais ilsont oublié que sans démocratie réelle et lamaîtrise technologique, ce sont des pro-grammes velléitaires et utopiques. LE MOtEur Du DÉvELOppEMENtCertains spécialistes avancent que le fel-lah doit s’occuper du terroir, drôle de stra-tégie puisque c’est l’élément moteur de toutdéveloppement agricole, à condition quetoutes les filières agricoles soient réelle-ment développées. Cet objectif ne pourraêtre atteint que si un remembrement dufoncier est fait pour mettre en place, à tra-vers des coopératives, des exploitationsfiables pouvant être gérées selon lesnormes. Le remembrement n’est pas laconcession ou la libéralisation du commer-ce des terres comme le veulent certainsrichards, mais une organisation modernedu foncier apte à pratiquer une agriculturedu 21e siècle.La part de l’agriculture dans le PIB fluc-tue entre 5 et 8% et n’emploie que 2 mil-lions de personnes, saisonniers inclus. Aquand ce taux atteindra les 60% pour pré-tendre remplacer le pétrole ? La catas-trophe est énorme puisqu’en 1962 le ratioSAU par habitant était de 0.75 ha et il n’estque de 0.25 ha en 2000 et il ne sera à cerythme que de 0.17 en 2020 et continuerade diminuer alors que les investissementsaugmentent dans le domaine agricole. Lacorrélation avec l’accroissement de lapopulation est une fausse justification. LA fOrMAtION NE rEprÉSENtE

quE 0.5%C’est l’absence de prévision et de pro-grammation en matière de mise en valeurdes terres qui est à l’origine de la faiblesseinquiétante de ce ratio. L’investissement

dans l’espace agricole est incohérentpuisque la formation ne représente que0.5%, la mise en valeur moins de 10%, lesmanagements fonciers 5% et l’intensifica-tion des cultures stratégiques seulement10%. Les opérations les plus importantesont été sous-estimées, auxquelles il fautajouter les actions les plus importantes quiont été négligées comme la restructurationdu foncier et le développement des filières.Des exploitations de très faibles superficiedont plus de 60% ont moins de 10 ha, alorsquelles mécanisation et modernisationpour de menues parcelles ? Un autre faitmarquant aggravant la situation du secteuragricole, l’âge de la population agricole où5% desexploi-tants ontmoins de30 ans,alors que40% sesituentdans unetranched’âgecompriseentre 40et 60 anset 20%desexploitants ont plus de 70 ans. Le dramec’est que 2/3 des chefs d’exploitation n’ontaucune instruction, 20% ont un niveau deformation primaire et seulement 2% ontune formation supérieure.LES pEuSDO-SpÉCIALIStESPlusieurs pseudo-spécialistes ouexperts autoproclamés parlent d’autosuffi-sance alimentaire sans en connaître réelle-ment le sens. La terminologie est importan-te quand on aborde un sujet aussi straté-gique, l’autosuffisance alimentaire désigneune situation où un pays parvient à subve-nir l’ensemble des besoins alimentaires desa population par une production exclusi-vement locale. C’est une situation quasiimpossible et tous ceux qui parlent d’auto-suffisance alimentaire se trompent car l’Al-gérie ne pourra jamais répondre à ceconcept. Il y a lieu de retenir le terme dedegrés d’autosuffisance. A ce concept estcorrélé directement le terme de la dépen-dance alimentaire. Dans ce volet, pour éva-luer la politique agricole d’un pays, le termede taux d’indépendance alimentaire estplus loisible et, en Algérie, il n’est que de

40% au plus quand le Bon Dieu veuille biennous combler, selon le cycle des végétaux,de pluie. Un autre indicateur plus pertinent,celui de l’insécurité alimentaire ; il désignel’incapacité d’une population à accéder auxaliments de base en quantité suffisantepour mener une vie saine et active. La sécu-rité alimentaire est définie par la FAOcomme une situation où tout le monde, àtout moment, a accès sur les plans phy-sique, social et économique à des alimentsnutritifs en quantité suffisante et sains quisatisfont à leurs besoins diététiques et cor-respondent à leurs préférences pour menerune vie active et en bonne santé. Ainsi, lapolitique agricole menée depuis ces vingtdernières années, en dépit des divers pro-grammes portant des intitulés politiques etnon techniques n’a-t-elle pu résoudre l’au-tosuffisance alimentaire, encore moins,assurer une sécurité alimentaire.AutOSuffISANCE ALIMENtAIrECertains experts prétendent qu’on nepeut exporter sans atteindre l’autosuffi-sance alimentaire, un dérapage grossieret inacceptable. Tous les pays développéset certains sous-développés assurentleur autosuffisance alimentaire et mêmeleur sécurité alimentaire en exportantdes produits alimentaires qu’ils maîtri-sent et arrivent à un excédent. L’Algériepeut exporter des produits agricolespour assurer sa sécurité alimentairepour peu que les leviers politique et tech-nique soient mis en place comme ladémocratie, le concept de bilan-sanctionet la réhabilitation du technique sur lepolitique avec toutes ses tares. L’Algériepeut avoir des excédents agricoles dansdiverses spécula-tions comme l’orge,le blé dur, lesdattes, les pri-meurs bio, les pro-téines animales, levin (mais c’est

«haram» !), lesplantes médici-nales, le miel… Lacote de dépendan-ce alimentaire enAlgérie exige unsursaut national enmatière d’abordd’aménagement duterritoire pour identifier, délimiter etévaluer les potentialités de chaque terri-toire. Cette phase est primordiale pourarrêter une stratégie d’exploitationdurable des espaces à travers leurs res-sources que sont le sol, l’eau, le paysageet l’Homme. rEMpLACEr LES rESSOurCES

pÉtrOLIèrESAvant un renouveau agricole et rural,un renouveau politique s’impose à tra-vers une restauration de la démocratie,des droits de l’Homme, de la justicesociale, de l’indépendance de la justice,de la liberté d’expression, la lutte contrela corruption et le favoritisme et le suivides investissements via une structureindépendante. Nos responsables et poli-ticiens sont-ils prêts à abandonner leursavantages pour opter vers un réel déve-loppement de l’agriculture qui reste leseul domaine pouvant remplacer les res-sources pétrolières ?K. b.

Ce n’est pas avecdes forums, des col-loques, des associa-tions, des chambresd’agriculture et deleurs subdivisions

agricoles que le sec-teur de agriculture

va connaître undéveloppement…

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CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017410

REPORTAGE

4par farid Ghili*

L’absence de Mohamed B.,le régional de l’étape,d’habitude ponctuelcomme un chronomètre,m’inquiète. Au momentoù le jour paresseux, commence à s’étireret le ciel s’éclaircit lentement, il se pointeenfin, accompagné de son héritier Azze-dine, visiblement pas emballé par cettelongue excursion. -Je me suis trompé de lieu de rendez-vous, explique-t-il, confus pour ce retard.La revue des troupes achevée, il 6h 45,lorsque le bus gagne l’autoroute, bordéede maisons sans charme, d’où s’échappentdes illuminations de vie, comme l’épa-nouissement d’un bonheur annoncé, quinous escortera durant ce voyage.Voyager ! C’est se projeter à desdizaines ou des centaines de kilomètresde son chez soi, loin de ses petits arrange-ments avec le quotidien. Se retrouverneuf, prêt à tout, pour visiter la vie à tra-vers des fragments des temps anciens etprésents. Pourtant, pour beaucoup demes compatriotes, l’Algérie demeureencore un mystère. Faire du tourisme enAlgérie, ressemble encore, à une aventurerisquée, voir périlleuse. Il est vrai que lesannées noires de solitude, ont forcémentimposé à une population effarouchée, unenature casanière. Aujourd’hui encore, endépit d’une situation proche de la norma-le sur le plan sécuritaire, les pays étran-gers ont toujours les faveurs des vacan-ciers algériens. En introduisant ce récit de voyage, à lapremière personne du singulier, le risqueest grand de paraître nombriliste, à sefaire mal au ventre. Mais comme on m’ademandé une livraison, avec un regarddécalé, l’emploi du pronom personnelprédicatif, reflète naturellement à traversle prisme de mes connaissances, le lienavec mes sentiments et mes propos enmiettes. L’idée de ce voyage initié par l’AASPPA,(Association algérienne de sauvegarde etde protection du patrimoine archéolo-gique algérien) avec l’aide de l’associationculturelle de Sedrata présidée par Dahma-ne Ouarmeli, de faire un voyage dans lepassé, en remontant jusqu’à la préhistoire,puis de faire un grand saut au 3e siècle, denotre ère en revisitant la Numidie et lafrontière Ouest de l’Afrique Proconsularis,qui correspond à l’Est du pays, plus préci-sément à la région de Souk Ahras (Tha-ghast) et Thamugadi (Timgad), est ronde-ment menée. Un statut sur mon mur Face-book a, à ma grande et agréable surprise,enregistré un nombre inattendu de postu-lants au voyage. J’aurai voulu qu’on soitune cohorte, ou au moins une centurie,hélas, les contraintes logistiques ontastreint le nombre d’excursionnistes,priorisant les adhérents et leurs amis,devenus de facto, membres de l’associa-tion, intronisés par ce voyage initiatique.L’autoroute qui fait couler plus d’encreque de goudron, plonge mes facultés dansun délicieux alanguissement, brutalementrompu par les tressautements du fameuxtronçon Bouira /Lakhdaria, continuelle-ment en travaux comme si c’était le chan-tier du siècle. Le réseau routier algérien

est, d’une manière générale, en bon état, àl’image du chemin de wilaya menant àDjemila, dont les lacets dessinant un ser-pentement, sur quelques kilomètress'agrippent, laborieusement, aux contre-forts du Djebel Ferdjioua. On est bien loindes routes effilochées du siècle passé.Nous voilà enfin, à Djemila/Cuicul,après quatre grosses heures de route.C’est la première étape d’une tournée quinous mènera à Thamugadi, reliant la grâceantiquisante de la première à la froideperfection de la seconde, symbolisantainsi le trait d’union des deux citésantiques les mieux conservées de l’Algé-rie. Entre-temps, on sillonnera :• Souk Ahras (Thaghaste),• Isedraten (Sedrata),• Regouba (ruines dolméniques)• Kef R’djem (Station rupestre préhisto-rique),• Khanguet el-Hadjar (Station rupestre etruines dolméniques)• Kef M'Saouar (Station rupestre préhisto-rique),• Khamissa, (Thubursicu Numidarum),• M'Daourouch (Madauros), patrie d'Apu-lée, • Hammam Meskhoutine, • Guelma(Calama),• Medghassen.DJEMILA/CuICuLSeule ombre au tableau, la températurelourde, écrasante d’un été, plus saharienqu’indien ; rapido-presto, on se jette sousles ombrages captieux, censés nous proté-ger des morsures d’un soleil tyrannique.Après, une courte pause prandium,coïncidant avec l’arrivée de Farouk Kh.,l’enfant de Annaba, bardé comme unexplorateur de l’inconnu, on engage latournée par la visite du musée et du sitede Djemila/Cuicul, consacré en 1982, parson inscription sur la liste du patrimoinemondial de l’UNESCO. Photo M. Bisker ;Cuicul.

La cité antique de CUICUL, a été, seloncertains spécialistes de l’antiquité, unedes plus belles villes du pourtour de Nos-tramare. Elle a été fondée par l’empereurNerva en 96 de notre ère, à l’emplacementd’un village berbère au toponyme ignoré.Particulièrement prospère aux IIIe et IVes., elle tomba dans l’oubli, après 553. Uneagglomération se développe maintenant àproximité de la cité antique.Depuis quelques années, un engoue-ment festivalesque absurde et irraisonnéqui, paradoxalement perdure, s’est déve-loppé en Algérie. Pastichant Baalbek auLiban, le ministère de la Culture, profitantallégrement d’une manne providentielle,organise des spectacles populaires(festi…vals, comme les qualifie NacéraBenseddik, une antiquisante chagrinéepar les dommages irrémédiables occa-sionnés aux vestiges antiques) au cœur duprestigieux site de Cuicul. Toujours est-il que, grâce à une mobili-sation des consciences patrimoniales, lesautorités ont fini par opérer un retraitstratégique face à cette protesta. Depuisquelques années le spectacle se dérouledans un décor «amovible», en dehors desruines certes, mais toujours à l’intérieurdu périmètre protégé, qui n’a pas encoreété fouillé. Lorsque je vois le fronsscaenaequi affiche des plaies avilissantes, mar-quant le passage des hordes nocturnes, jeme dis que le mal est déjà fait.La visite du musée et du site, sous unsoleil de plomb, menée au pas de course,est extrêmement enrichissante. Elle per-met à certains d’entre nous, à l’image deHadj Kaddour de Laghouat, de faire étala-ge de connaissances historiques quiimpressionnèrent l’assistance et notrevolubile guide. Un guide à qui j’adressetoute la reconnaissance du groupe pouravoir honorablement remplacé au piedlevé, notre ami Mohand, qui a déclaré for-fait, sans crier gare. Sacré Mohand.Je ne sais si c’est la chaleur torride qui

me force à plonger en immersion dansune remontée du passé de plusieurssiècles, mais tous ces ensembles et biend’autres, exhumés à partir de 1909 : leCardo ; le forum ; l’arc de triomphe élevéen 216 à la gloire de l’empereur Caracalla,célèbre par son fameux «édit» ; le templede Septime Sévère ;, son père originaire dela Lybie actuelle, qui, en se mariant à laSyrienne Domna Julia, donna trois autresempereurs moins connus, : Geta, Helioga-bale et Alexandre ; la maison de Castorius; le théâtre construit à flanc de coteaud’une capacité de 3000 places ; le marchédes frères Cosinius ; les grands thermes ;le baptistère chrétien ; la maison del’âne…, qui s’offrent à moi, comme l’imagi-nation s’offre à la vue, promènent mesrêves dans toutes ces évocations saisis-santes de la vie romaine. Hélas, cemoment de bonheur, à l’instar des illu-sions, se dissipe trop vite. «L’homme est un être en devenir, péré-grinal : il risque de s’éparpiller dans l’es-pace et de se disperser dans la durée».Il est temps de reprendre la route endirection de notre camp de base à SoukAhras, après un crochet au Khroub, pourrécupérer Nadia B., la sympathique pré-historienne au rire cristallin. El Khroubest une pieuvre qui étend de tous côtés,ses tentacules blancs ; Mohamed H.connaît bien la région. Retranché dansun mutisme depuis son embarquement àBouira, il sort de son silence, pour meconfier sa perplexité :• «avec toutes ces nouvelles construc-tions impersonnelles, je serai incapable deretrouver la route menant au mausoléeroyal de la Soumaa» Ce monument est souvent décritcomme celui de Massinissa, l’Aguellid quiunifia la Numidie, mais les avis des histo-riens restent partagés à ce sujet, car d’au-cuns le situeraient plutôt à Dougga (Tuni-sie). Par la suite, le bus traverse, dans l’in-

PATROUILLE À L’ESTLorsque j’arrive au check point de Sidi Merzoug, à 5h30 du matin, un

compagnon de route, Hadj Kaddour, qui vient tout droit de Laghouat, estdéjà présent, son paquetage de bourlingueur, négligemment jeté sur le

trottoir bitumé. Les autres membres du groupe arrivent toutdoucement, les uns après les autres.

photo Mohamed bisker : Djemila (Cuicul). un trou d'ombre à l'abri du soleil. SOuK AHrAS

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REPORTAGEdifférence générale des voyageurs haras-sés, une succession d’agglomérations,sans autre vie que de panneaux de misesen garde, avertissant les automobilistesde la présence de cassis, communémentappelés «doudane» (dos d’âne). Il faudraitsérieusement songer à présenter au livreGuinness, deux records qui seront allègre-ment homologués : ceux du nombre dedos d’âne et de rideaux métalliques, parhabitant.Nous sillonnons lentement la rue prin-cipale de Sedrata, qui me paraît, entrechien et loup, plutôt propre. On distingueenfin, deux silhouettes, qui font des signespressants, pour capter notre attention ; cesont nos deux accompagnateurs, Dahma-ne et Larbi qui seront notre bonne fortunedurant ce périple. Est-il utile de rappelerque Fortune, dans la mythologie romaine,était une divinité qui présidait aux aléasde la destinée humaine et qui distribuaitle bien et le mal, selon son capriceLorsqu’on arrive, enfin, à Souk Ahras,notre camp de base, la nuit, tel un rapacenocturne, a largement déployé son inquié-tante pénombre sur la terre. Souk Ahras où le «marché aux lions»,toponyme arabo-berbère, était une régionpeuplée à l’origine, de denses forêts et defauves, dont le Lion. A sa création, l’an-tique Thaghaste était un petit villagenumide, occupé par la tribu berbère desBarbya, dont est natif Saint Augustin(354/430), de père païen et de mère(sainte Monique) chrétienne. De SaintAugustin, l’Algérie ne possède que soncubitus conservé à la basilique éponymede Hippone, alors que sa sépulture est àPadoue en Italie. A cheval entre la sciencedu langage et l’histoire, un nom familier ànotre mémoire renferme parfois, le coded’accès qui révèle le secret d’énigmesséculaires.Plus tard, Souk Ahras, deviendra le fiefde la puissante tribu berbère (arabisée)des Hanencha. Je remarque que plusieurstoponymes font référence à cette tribu, cequi confirme qu’elle rayonnait sur unvaste territoire débordant la frontièreactuelle avec la Tunisie. J’ai lu quelquepart, que les vestiges de la cité romainesont enfouis sous la ville coloniale érigéesur la voie romaine, qui mène de Hyppo-Régus, le plus grand marché d’Afrique, àTheveste (Tebessa). Des inscriptionslatines découvertes en 1856 sur cetemplacement vont dans ce sens. Je suis frustré de ne pouvoir visiter,pour cause de travaux, la place centrale deSouk Ahras, dont on m’a tellement vantéle charme. En revanche, je me promets defaire la zyara au mrabet Sidi-Messaoud,père spirituel et gardien de Souk Ahras,qui a donné son nom à ce monticule. Al’origine mrabet ou son néologisme fran-çais marabout, désignait ceux qui, dans lesribât (couvents fortifiés), défendaient lesterritoires musulmans, avant de s’étendreaux saints détenteurs d’une baraka. Cessaints pouvaient être d’éminents hommesde sciences ou des boudalis encensés parla vox populi. Les sanctuaires étaient sou-vent de petits réduits, mais d’autres, sontde véritables ensembles comprenant, unoratoire, une mosquée, une médersa etune zaouïa. Mais les plus courants sont lesqoubbas, ces petites chambres cubiquesblanchies à la chaux, coiffées d’une coupo-le de couleur verte, bâties sur les monti-cules (surtout à l’Ouest du Pays). Beau-coup de mausolées, sont cependant desimples cénotaphes. Qu’importe. Lesnécessiteux, les malchanceux, ceux quisouffrent ou qui sont en manque d’affec-tion, ne manquent pas de les invoquerdans leurs prières votives.L’autre lieu incontournable de SoukAhras est l’olivier de Saint-Augustin. C’estun lieu de pèlerinage et de visite, pour lesrares touristes étrangers de passage àSouk Ahras, généralement en provenancede la toute proche Tunisie.

Il a bénéficié en 2005 d’une opérationde réhabilitation, réalisée en collaborationavec la municipalité d’Ostie (Italie), villeportuaire de la Rome antique où est enter-rée sainte Monique, mère de saint Augus-tin. Découvert en 1843 par une missionfrançaise, il a fait en 1953, à la veille descélébrations du 1600e anniversaire desaint Augustin, une expertise dendo-chro-nologique en Arizona (USA), qui estimaitson âge à plus de 2900 ans ! Etonnantn’est-ce pas? Cet olivier trois fois millé-naire ne serait donc pas une simple légen-de ! Notre fameux olivier aurait été letémoin de l’effondrement autour de laMéditerranée, de l’âge de bronze moder-ne. «LabunturAnni. Illa Viret» (Passent lesannées, lui il est vigoureux), rarement unedevise ne s’est aussi bien vérifiée. Maiscomme les scientifiques eux-mêmes sonten rupture sur cette datation, je prendsavec des pincettes, cette information.Mon ami Maamar Sefta, agronome de sonétat, émet, lui aussi, des doutes, considé-rant que la dendrochronologie ne peutêtre utilisée sur une souche d'olivier. Jelaisse volontiers, ce terrain de querelleaux experts.Mais nous ne sommes pas encore arri-vés au bout de notre voyage, car avant derejoindre notre lieu d’hébergement, ilfaut, urgemment, satisfaire une vingtained’estomacs dans les talons ; la faim deloup a manifestement avalé la fringaleintellectuelle. C’est rompu de fatigue mais le ventrerepu, qu’on se dirige enfin, vers nospénates, une maison de jeunes, située

dans un cadre calme et bucolique, à unedizaine de km de Souk Ahras, d’aprèsnotre ami Larbi. 10km qui paraissentinterminables, ce qui fait murmurer àBabi, pince sans rire fortuit mais négo-ciant accompli en artisanat, manifeste-ment dépêché de rejoindre Morphée :• «Apparemment le km de Souk Ahras,s’étire comme élastoc».Mais l'imprévu n'est aux ordres de qui-conque. C’est sans compter sur les inat-tendues difficultés de cohabitation. Rachid, le barde, se montre à cet égardparticulièrement sourcilleux, en revendi-quant une chambre «single», car il ne sup-porte pas d’avoir un compagnon de nui-tée, qu’il n’aurait pas choisi. Il fait sansdoute sienne la raison commandant d’em-mener avec soi un chien plutôt que sonvoisin. Je reconnais le côté ergoteur demon vieil ami. Heureusement que le tactde Nagete A.S, qui sait doser l’indulgenceavec l’exigence, et surtout la disponibilitédes chambres, accordent sans peine cettefausse note qui risque de briser l’harmo-nie du groupe. Mais, on aurait tort de se composer unemauvaise idée du collectif, à la suite decette péripétie. Bien au contraire, , Ghozle-ne, à la passion communicative ; Nafissa,aussi élégante dans ses manières que samise ; Linda, l’agitatrice d’idées ; Aïcha,l’appréciatrice discrète ; Rachid, un exci-tateur d’ambiance hors pair, qui suscite ausein de notre petite colonie, un intérêt à lapoésie et à la musique chaâbi ; Kamel, legaleriste d’art orientaliste, découvreur demerveilles iconographiques ; Mohamed,le chasseur d’images aussi hypersensibleaux résonnances affectives qu’à la lumino-sité et, tous les autres… Ils sont tousd’agréable compagnie. Cependant, jereconnais que je suis bluffé par Samia, ladoyenne ; elle marche et escalade les vauxet les monts, sans rechigner et elle ne sefait pas prier pour pousser la chansonnet-te ; l’harmonieux duo, pourtant impro-

bable qu’elle forme avec Rachid d’aborddans le bus puis dans le théâtre deM’daourouch et son petit récital, deHawzi improvisé, dans la maison dejeunes de Sedrata, accompagnée à la der-bouka, par Farouk, un connaisseur avertides belles et bonnes choses et, accessoire-ment, talentueux percussionniste, entémoignent formidablement. LES StAtION prEHIStOrIquES EtDOLMENItIquES KEf LEMSOuErC’est un ensemble de vestiges situésdans la commune de Zouabi, dont l’exis-tence remonte à 7 000 ans avant Jésus-Christ. Il s’agit de gravures rupestresgéantes découvertes par le chercheurfrançais R. Banelle. En raison de leurgigantisme et leur profondeur de trait ;ces gravures de l’ère préhistoriques, sontconsidérées comme parmi les plus bellesd’Afrique du NordPour arriver à Kef Rdjem, nous mar-chons en dehors des sentiers battus,grimpons et dévalons des escarpementshasardeux et fatigants, pendant plus d’uneheure. Pour escalader et descendre desparois rocheuses, glissantes, on n’hésitepas à solliciter le postérieur, en complé-ment des pieds et des mains sous leregard amusé et quelque peu moqueurdes gamins du coin, venus en tapinois.Cette station à la particularité d’abri-ter des chrismes, (un monogrammeconstantinien symbolisant secrètementl’appartenance chrétienne) dans desdécaissements difficilement accessibles,qui ont a suscité notre curiosité, sur leurprésence. Pour ma part, je pense que cetendroit a été un lieu de rencontressecrètes, des premiers chrétiens encorepersécutés par les Romains. C’est avec une fierté pas du tout dissi-mulée, que j’apprends que ce sont nosamis de l’association Sedrata qui ontdécouvert, une gravure représentant unbubale. Cette gravure est connue, dans larégion, sous le sobriquet de «hneche»(serpent), en raison des immenses cornesà stries du bubale, qui les font ressemblerà un reptile.«Un dolmen est une constructionmégalithique préhistorique constituéed'une ou plusieurs grosses dalles de cou-verture (tables) posées sur des pierresverticales qui lui servent de pieds (lesorthostates). Le tout était originellementrecouvert, maintenu et protégé par unamas de pierres et de terre nommé tumu-lus. Les dolmens sont généralement inter-prétés comme des monuments funérairesayant abrité des sépultures». Au sommetde cette colline, j’éprouve un enchante-ment à admirer ce magnifique panoramaqui se dessine au lointain, tout en en sefigurant les mystères, qui fascinaient lesraces d’hommes habitant cette contrée.

( A suivre)

photo Kamel Haddad: Kef r'jem. unbubale découvert par les membres del'association de Sedrata. rEGOubA :site dolménique.

*Cadre à la retraite

Photo : Linda Gh.

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CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017412

LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE ÉMERGENTEquel tournant pour l’Algérie ?

La question de la transition énergétique dans le contexte de la crise persistante desénergies fossiles sur les marchés mondiaux a fait l’objet d’une introspection fortintéressante de la part de Sidi Mohamed Baghdadli, expert géologue pétrolier.

4par Crésus

Le modèle du PIC (ou Plateau)pétrole de Hubbert que l’auteur aeu à présenter lors d’une précé-dente occasion, montre que laproduction du pétrole conven-tionnel est en déclin, et que la période d’unpétrole pas cher (et facile) se termine etque le shale oïl ou pétrole de schiste témoi-gnequ’un pétrole cherest en train de rem-placer un pétrole pas ou peu cher.La survenance du PIC a des consé-quences qui doivent être anticipées afin deretarder le déclin, à savoir :- améliorer la récupération des champsexistants;- rénovation et nouveau système de pro-duction),Hassi R’Mel (3eboosting), Berki-ne(négociations pour la reprise en partici-pation d’anciens gisements).Le concept pyramide des ressource-spermet la compréhension de la nature desressources. Ainsi, au top pyramide: il y a lesressources les plus faciles à découvrir et àproduire. Au cours du temps, les avancéestechnologiquesfont que plus de ressourcesde la pyramidesont disponibles mais condi-tionnées par leur applicabilité technolo-gique et leur viabilité économique.Le déclin de la qualité de la ressourceest attesté par la baisse de l’indicateur EROI(Energy Return On Investment, ou Taux deRetour Energétique qui et le rapport entrel’énergie produite et l’énergie investie. UnEROI minimum de 12 est nécessaire pourun Etat providence. Aussi, il fera savoir quela théorie de l’abondance du pétrole(scepti-cisme & suspicion)s’est substituée à celledu PIC et a ramené le prix du baril à 26 dol-lars US. Les shale compagnies n’ont foréque les sweets spots avec des portionshorizontales de plus en plus longues. Si cestechniques améliorent le taux de produc-tion initia elles provoquent un taux dedéclin élevé et un taux de récupération plusbas durant la vie du puits et une déplétionrapide.

LA NOtION DE trANSItION ÉNErGÉtIquELe conférencier a indiqué que le défi del’énergie est triple :- Sécurité énergétique : il faut assurer la fia-bilitéde la fourniture d’énergie pourrépondre à la demande actuelle et future ;- Equité énergétique : l’énergie doit êtreaccessible à un coût économique accep-table. - Environnement durable : le réchauf-fement climatique impose d’améliorer l'ef-ficacité énergétique et de développer lesénergies renouvelables et celles à faiblesémissions de gaz à effet de serre.Ces 3 défis ou Trilemme énergétique,énergie sûre, abordable et soucieuse del’environnement, apparemment inconci-liables, sont l’enjeu de la transition et sontvitaux pour le développement économiqueet social d’un pays. M. Baghdadli ferasavoir que la transition énergétique est néede la perception que les énergies fossilesconstituent une ressource limitée, quel quesoit le délai, et qu’elles influent négative-ment sur le climat de la planète. La transi-tion énergétique c’est aussi le passage d’unsystème de production et de consomma-tion d'énergie aujourd’hui axé sur des éner-gies non renouvelables (pétrole, gaz, char-bon), à un autre mix énergétique plus effi-cace et plus décarboné, la transformationd’une économie basée sur une énergie destock(en déplétion) à une économie baséesur des flux d’énergies renouvelables.

L’expert explique que ce type de «transi-tion» n’est pas comme par le passé un rem-placement d’une source d’énergie domi-nante par une autre (elle est plus structu-relle) ; elle n’est pas une évolution dans lesformes d’organisation et de fonctionne-ment des filières d’approvisionnement etde commercialisation et ne pourra pas êtreréussie sans modifications des usages del’énergie par les consommateurs. Il précise-ra qu’elle est à l’œuvre dans de nombreuxpays mais c’est en Allemagne qu’elle est laplus achevée et la plus ambitieuse.M. Baghdadli a indiqué qu’il n’y a pas demix idéal, il est propre à chaque pays maispourrait toutefois se conformer aux grandsobjectifs des sommets climatiques interna-tionaux. La composition du mix énergé-tique dépend de la disponibilité des res-sources exploitables sur le territoire, desbesoins énergétiques à couvrir et des choixpolitiques qui découlent du contexte histo-rique, économique, social, démographique,environnemental et géopolitique.

LA trANSItION ÉNErGÉtIquEDANS LE MONDEL’Allemagne a lancé depuis quinze ansune politique nationale de transition éner-gétique soutenue par un concept énergé-tique (Energiewende) à l’horizon 2050avec trois axes : l'amélioration de l'efficaci-té énergétique, le recours aux énergiesrenouvelables et l'adaptation des réseauxen termes de structure et de gestion. EnFrance, la production nucléaire rigide, tou-jours plus concentrée avec comme consé-quence une architecture du réseau nonadaptée pour recueillir l’arrivée massive durenouvelable : 40 à 45 % de nucléaire, envi-ron 30 % de pétrole, 15 % de gaz, autour de8 % d'énergies renouvelables (hydrauliqueet autres) et 4 % de charbon. L’Espagne(15%) voulait être le champion du renou-velable avant que le revirement des autori-tés sur les primes à la production ne ruineles petits producteurs suite à la libéralisa-tion des marchés de l’électricité en Europeet qui a laissé la régulation aux puissantsindustriels de l’électricité. Aux Etats-Unis,les découvertes de gaz de schiste permet-tent de sortir du charbon : plus de gaz (26%), beaucoup moins de nucléaire (10 %) etde charbon (22 %), 11% de renouvelableavec comme stratégie le « gas bridge ener-gy for a lowcarboneconomy ». D’où la ques-tion de savoir si un gaz bon marché n’est-ilpas un frein (ou un blocage) pour le Renou-velable ! Enfin, la Chine appuie son déve-loppement sur le charbon (68 % de son mixénergétique). Les énergies renouvelables

représentent 11 % mais en forte progres-sion. Le nucléaire ne constitue encore que 1% du total.LES trANSItIONS DANS L’HIStOIrELe conférencier distingue deux transi-tions qui se différencient par leur intensitéet leur déroulement dans le temps : transi-tions-ruptures et transitions-substitu-tions.Les transitions-ruptures sont caractéri-sées par :- des Ruptures majeures (changementsrelatifs aux technologies, aux marchés, auxindustries, aux valeurs et comportements ;- le passage de la société rurale à indus-trielle et urbaine.Il fera observer que l’humanité a connudeux grandes transitions-ruptures de laRévolution industrielle : celle du passagedes énergies biomasses aux énergies fos-siles et celle de l’invention et de la diffusionde l’énergie électrique.Les transitions-substitutions sont carac-térisées par un réajustement du systèmetechnico-social dominant par la substitu-tion de nouvelles énergies et technologiessur une courte durée. Il citera le cas du pas-sage du pétrole au gaz naturel en Algérie.La transition émergente se fera par deschangements dans le cadre institutionnel etéconomique actuel. L’implication des auto-rités publiques et de la société civile requi-se pour trouver les instruments les plusappropriés au vu des avantages et inconvé-nients (prix/performance inférieurs auxtechnologies établies). Elle se fera aussi parla montée en puissance des ENR et larecherche d’une maîtrise de la demande.quELLE trANSItION EN ALGÉrIE ?Notre transition à venir n’est pas uni-quement une substitution d’une énergie àune autre, dira le conférencier. C’est unevision à long terme (et des politiques decourt terme réactives) qui intègre lestrends, clés futures de l’énergie et les chal-lenges pour le pays (sortir de la dictaturedu court-termisme, démarche prospectivescénario…). Les trends clés futures sont :- l’utilisation de l’énergie augmente en rai-son d’une démographie galopante, urbani-sation rampante et augmentation duniveau de vie ; le développement des éner-gies renouvelables est un impératif de poli-tique énergétique et industrielle qui estdevenu une priorité nationale (sécurité,protection de l’environnement, choix defilières créatrices d’emploi…) ; - le passage d’une production centralisée à

une production décentralisée pour pro-mouvoir les territoires (l’intégration desénergies renouvelables dans le systèmeélectrique constitue un enjeu majeur) ;- Les interdépendances entre pays voisins,entre rive nord et sud de la Méditerranée(nombreuses infrastructures comme lesgazoducs, les interconnections électriques)et avec l’Afrique.CHALLENGESLe conférencier a mis en exergue unesérie de challenges à relever pour réussir latransition énergétique. Il s’agit de :- construire un autre modèle de déve-loppement durable pour sortir d’un systè-me bâti sur l’abondance des hydrocarbureset l’ignorance des conséquences indési-rables et négatives ;-construire un mix énergétique quiréponde progressivement aux enjeux de latransition énergétique de façon flexible etouverte aux technologies à venir (éviter cli-vages sur coûts, sécurité, environnement etimpacts négatifs sur la confiance citoyen-ne) ;- le recours à toutes les énergies sera néces-saire pour satisfaire la demande (mixer lesénergies mais non les opposer) ;- soustraire notre économie aux chocsextérieurs (prix des hydrocarbures,réchauffement climatique) ;- l’occupation déséquilibrée des territoiresinduit une pression insoutenable sur labande côtière pourtant la plus exposée auxrisques sismiques et climatiques, au mal-développement des villes au détriment durural…M. Baghdadli dira que la 3e Révolutionindustrielle (smartsgrids) est en marche. Etde se poser la question : Devrions nous enêtre acteurs ou en être à la marge ? En guise de réponse, il dira que réussirla transition énergétique est une nécessitéqui doit devenir une cause nationale. Pource faire, il dira que la clé de la réussite c’estl’intelligence des Algériens. Pour conclure, le conférencier lancerales grandes questions qui doivent être endébat, à savoir :- Comment aller vers l’efficacité énergé-tique et la sobriété ? - Quelle trajectoire pour atteindre le mixénergétique 2020 puis 2030 et 2040 ? - Quels choix en matière d'énergies renou-velables et de nouvelles technologies del'énergie et quelle stratégie de développe-ment industriel et territorial ? - Quels coûts et quel financement pour latransition énergétique ?

Synthèse Crésus

ALGÉRIE

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413CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017

CHRONIQUE D’UN BAS DE LAINEFCE-UGTA : ALLIANCE DOUTEUSE OU SIMPLE ÉPOUVANTAIL D’ÉTÉ ?

Par Rachid EZZIANE

Depuis la nomination deM. Tebboune au postede Premier ministre parle président de la répu-blique, un vent chargé

de particules et d’ions électriquessouffle çà et là ; pour les unsapportant sérénité et volonté demettre les bouchées doubles pourdonner un coup de pied dans lafourmilière des rentiers et autrestrayeurs de la vache des orphelins; pour d’autres, au contraire, ils ontvu dans cette nomination commeun désaveu de la part du pouvoir àleur position bien calée dans la vieéconomique du pays sans en avoirvraiment apporté une quelconqueplus-value, et ce, depuis presquedeux décennies.

A la première déclaration dutout nouveau Premier ministre quivoulait en découdre, une fois pourtoutes, avec la combine de l’argentet de la politique, une fébrile fièvres’empara de plusieurs hommesd’affaires jusqu’à aller chercherdes alliances contre-nature pourtuer dans l’œuf la courageuse etnon moins juste proposition deAbdelmadjid Tebboune. Mais il n’ya pas de peau plus dure que celledes rentiers. Tant elle cuit àfinances douces et privilèges tousazimuts qu’elle devient dure àmâcher et avaler. Et tant ils devien-nent durs à mâcher et avaler qu’ilscroient, par leur longévité, devenirindétrônables de leur piédestal.Mais comme la politique n’est pasune science exacte, mais des cal-culs de roulette russe, souvent, cequ’on croit stratégie maléfiquedevient la tombe des fossoyeurs.

Cette fois-ci, le pompier a accou-ru pour faire le pyromane. En écra-sant les principes du syndicalismesur le mur, le patron de l’UGTA pro-pose ses services pour le patrondes patrons pour un soit dit en pas-sant lèse majesté que ce dernierveut rectifier. Mais la vraie ques-tion reste posée. Quelle mouche apiqué le syndicaliste pour se four-voyer dans cette impasse ? Saufsi… Enfin, je veux dire que parfois,le cœur a ses raisons que ni lalogique, ni les mathématiques n’enont. Suivez mon regard…

De quoi s’agit-il ? Le 13 juillet2017, M. Tebboune, en visite detravail, refuse de rencontrer le pré-sident du FCE lors de l’inaugura-tion de l’Institut de la Sécuritésociale. Le président du FCE,mécontent, quitte les lieux. Lesecrétaire général de l’union géné-rale des travailleurs algériens(UGTA), qui avait accompagné leprésident du FCE, lui emboîte lepas en signe de solidarité. Jus-qu’ici tout semble, à vue d’œil,chose plus ou moins normalequ’on peut inscrire sur quelqueerreur protocolaire, comme il a étéle cas lors du forum des entrepre-neurs algériens avec leurs homo-logues africains en décembre2016.

Mais l’incident ne s’arrêta pas

là… Imbu de son long privilègeauprès du cercle présidentiel, etcroyant avoir toujours les coudéesfranches dans l’économie du pays,le président du forum des entre-preneurs convoque une réunionextraordinaire du FCE avec pasmoins de dix organisations patro-nales (qui y participent) avec, ceri-se sur le gâteau, la présence dusecrétaire général de l’UGTA. Et làest le nœud gordien. L’énigmemême de toute cette histoire. Com-ment un syndicaliste peut-il deve-nir l’avocat d’un patron. Il y acomme le loup et la brebis dans lamême tanière. Il y a comme l’eauet le feu dans un même seau. Il y acomme quelque chose d’atypiqueà l’Algérie…

D’après quelques langues qui sesont déliées, juste à la fin de cetteréunion, on avait déballé tout sur latable. Y compris la proposition dudépart du premier ministre.Comme pour contredire la fameu-se déclaration de M. Tebboune : «Iln’y aura plus mélange entre argentet politique », et en le déstabilisant,ils prouveront que c’est l’argent quifait les politiques, la politique etmême les relations internatio-nales, voire tout simplement lemonde. Pour ce faire, une premiè-re procédure a été suggérée : leboycott de la prochaine tripartite.Cette alliance FCE-UGTA aura-t-ellele dernier mot dans ce bras de ferplus chaud que l’été caniculaire. ?

D’autres analystes, pour calmerle jeu et les humeurs, ont apportéun peu d’eau dans le moulin de lasagesse, et voient dans cettealliance un message qu’envoientles patrons et l’UGTA à la veille dela rentrée sociale au nouveau gou-vernement car l’économie algé-rienne va mal et navigue à vuesans aucune perspective d’avenirimmédiat, disent-ils. Certes, l’éco-nomie algérienne navigue à vue,mais n’y avait-il pas d’autresmoyens et canaux pour le dire ? Nesont-ils pas eux-mêmes respon-sables, en quelque sorte, de cetéchec économique ? N’ont-ils paseu toutes les latitudes et les longi-tudes, durant deux décennies,pour y remédier ? Pourquoi mainte-nant ?...

Déjà avec la nomination de M.Tebboune au poste de Premierministre, il y a comme un nouveausouffle que veut insuffler le prési-dent à la gouvernance. Même lesservices diplomatiques et de ren-seignements français, à leur têteBernard Émié qui connaitt pour-tant bien l’Algérie pour avoir étédurant quelques années ambassa-deur de France en Algérie, ont étésurpris par cette désignation. Voirequelque peu désabusés pourn’avoir pas été assez intelligentspour voir la chose venir. Faut-ilcomprendre par là que d’ici la ren-trée sociale l’Algérie va s’orientervers une nouvelle approche socio-économique ? La France, par ceretard d’information, commence-t-

elle à perdre ses canaux habituelsen Algérie ? Ou est-ce juste uneconjoncture temporelle qui ne tar-dera pas à s’aligner comme toutesles précédentes tentatives ?

Ce qui est sûr, d’ici la fin de l’été─ qui n’en sera que très chaud ─nous aurons à débattre de beau-coup de choses, car mon intuitionde chroniqueur me chuchote desnon-dits… et même des vertes etdes acidulés. Croisons nos doigtspour que tout soit dans les normesde la bienséance et la priorité de lasécurité du pays et de l’Etat algé-rien, sur tout. Car n’oublions pasque le danger existe, et persiste àrôder autour de nos frontières, etque «l’œil» de cet ennemi ne dortjamais. Et il n’aura de cesse à nousépier, rechercher nos faiblessespour les instrumentaliser, jusqu’àce qu’il trouve la faille qui mène àses desseins morbides. Et leursdesseins morbides on en connaîun bout, et même qu’ont enconnaît des Libye et des Syrie…

Revenons à cette alliance FCE-UGA. Est-elle douteuse et, de cefait, elle devient dangereuse, ouest-ce juste un épouvantail d’étéqui s’amenuisera avec les mois-sons saisonnières ? Mon petitdoigt me dit que ce n’est là qu’unfeu de paille, sans incidence surles grandes orientations du paysdans les différents projets straté-giques, tels le logement, l’infra-structure routière et ferroviaire,l’hydraulique, l’éducation, l’envi-ronnement et, surtout, la politiquesociale envers les plus démunis. Lereste n’est que spéculations et rap-ports de forces entre rentiers enmal de « strapontins».

Déjà quelques chefs d’organisa-tions patronales quittent le bateaude la fronde pour celui de la récon-ciliation. Et c’est déjà un point degagner pour le nouveau Premierministre. A dire vrai, il n’a pasbesoin de leurs querelles, car ils’agit pour l’homme d’Etat de ser-vir, d’abord, son pays et de réaliserles orientations de son président.

Ne nous affolons pas. Ce nesont là que des choses qui arriventdans la vie et l’Histoire des Etats etnations. Voici la France avec sonnouveau président qui change decap à 380° sans jamais douter deson aura et sa place parmi lesnations du monde, et sans pourautant en faire toute une histoire.La majorité du peuple y adhèreavec enthousiasme.

Je conclue avec cette citation deMontesquieu, le philosophe quiavait en son temps défié les chro-niques par ses prises de positionsplus que nécessaires pour la cité etla politique : « Pour qu'on ne puissepas abuser du pouvoir, disait-il, ilfaut que, par la disposition deschoses, le pouvoir arrête le pouvoir.»

Vous m’avez compris…A bon entendeur, peu de

preuves suffisent. R.E.

A la première déclarationdu tout nouveau Premier

ministre qui voulait endécoudre, une fois pour

toutes, avec la combine del’argent et de la politique,

une fébrile fièvres’empara de plusieurs

hommes d’affaires jusqu’àaller chercher des

alliances contre-naturepour tuer dans l’œuf la

courageuse et non moinsjuste proposition de

Abdelmadjid Tebboune.Mais il n’y a pas de peau

plus dure que celle desrentiers. Tant elle cuit à

finances douces etprivilèges tous azimuts

qu’elle devient dure àmâcher et avaler. Et tant

ils deviennent durs àmâcher et avaler qu’ils

croient, par leurlongévité, devenir

indétrônables de leurpiédestal. Mais comme la

politique n’est pas unescience exacte, mais des

calculs de roulette russe,souvent, ce qu’on croit

stratégie maléfiquedevient la tombe des

fossoyeurs.

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CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017414

L ITTÉRATURE ALEPH DE PAULO COELHOL’engagementcomme sourced’apaisement

spirituel

L’auteur brésilien, Paulo Coelho, connu pour son penchantpour la sagesse et la spiritualité, surtout orientale, nous livredans cet ouvrage sa quête pour un meilleur « Moi » ou « Soi ».

4par rachid Ezziane

Ce roman autofiction, car toutela trame de l’histoire tourneautour de l’auteur, nous faitvoyager à travers les pays etles hommes ─ dans l’hommepar l’engagement… En 1982, l’auteur rencontre un ancienami, dénommé J.Le personnageest énigmatique,sage et philosophe.La discussionentre les deuxamis tourneautour des aléas dela vie contempo-raine avec tout cequ’elle décèlecomme obstacle àl’épanouissementet la sérénité. Alorspour remédier àcette crise existen-tielle, l’ami J. pro-pose à Coelho de

«s’engager» danstout ce qu’il entre-prend, sansoublier de faire unvoyage dans letemps. Au momentde se quitter, l’ami J. lui dit : «Sors duconfort et pars à la recherche de ton royau-me.»L’idée est vague et Coelho n’arrive pasà l’assimiler. Les deux amis se quittent etla vie reprend son cours. Dix ans après, en 1992, sous une pluiebattante, l’auteur se souvient de sa discus-sion avec l’ami J. Alors, presque en transe, Coelho cogitesur Dieu et sa relation avec la vie. Il nerevient à lui qu’après l’arrivée de safemme qui l’incite à rentrer chez eux. Chezlui, il divulgue à sa femme sa conversationavec son ami J., et ce qu’il lui a proposécomme remède à sa crise existentielle. Safemme l’encourage à entreprendre l’expé-rience que lui avait demandée son ami J. Quelques jours après, Coelho est invitéà participer à la foire du livre de Londres.Là-bas, il rencontre deux éditrices bul-gares qui l’invitent à venir visiter leurpays ; sans hésiter, il accepte, mais sonagent Monica s’interpose et lui fait savoirqu’il a un agenda bien rempli. Mais un ins-tant après, arrive un éditeur espagnol etl’invite lui aussi à aller en Espagne ; sansdemander l’avis de Monica, il accepte. Etpuis arrive un quatrième, un cinquième etun sixième éditeur, et tous les six l’invi-tent à visiter leur pays ; et il accepte sousl’œil sidéré de son agent Monica. Les sixéditeurs restent plus ou moins dubitatifs,mais l’auteur leur fait la promesse d’allerdans leur pays et demande à son agentd’organiser le voyage. Par cette promesse, il vient d’accom-plir le premier pas du conseil de son ami J.: l’engagement…

Car l’engagement mène, selon PauloCoelho, au changement qui, lui, pousse àse réinventer et agir, ces derniers peuventdevenir une expérience réussie, finale-ment c’est un rêve qui se réalise par ladécouverte pour s’éveiller. Car parfois,dit-il, nous avons besoin de retrouver unsens à notre vie, et de lui redonner unnouveau souffle. Cette apothéose s’appel-le l’Aleph. Avant d’entamerses voyages promis,l’auteur décide de tra-verser la Sibérie partrain. De Moscou àVladivostok. Soit plusde 9000 kilomètres et990 gares à desservir.Les fuseaux horairesqui, de GMT 0 heure,atteindront à Vladi-vostok GMT + 7heures. Un autre enga-gement pris par l’au-teur pour se ressour-cer à travers la décou-verte d’un nouveaumonde. Car le voyagepeut bien faire chan-ger notre vie…Mais au moment dudépart, à la gare deMoscou, une nouvellesituation se présente à l’improviste à l’au-teur. Une jeune femme l’attendait de piedferme et lui dit des choses prémonitoires.Croyant à une irréductible fan, l’écoute unmoment et la remercie. «Je remercie lajeune femme pour sa gentillesse et lui disque maintenant je suis occupé, mais si ellevoulait se rendre à la seule soirée d’auto-graphes que je donnerai à Moscou, j’auraisle plus grand plaisir à signer un de seslivres.» Mais la jeune fille lui répond : «Jene suis pas venue pour cela. Je sais que tuvas traverser la Russie en train et je parsavec toi. quand j’ai lu ton premier livre, j’aientendu une voix disant qu’une fois tu avaisallumé pour moi un feu sacré et qu’un jourje devrais te rétribuer. J’ai rêvé bien desnuits de ce feu et j’ai pensé aller jusqu’auBrésil te rencontrer. Je sais que tu as besoind’aide et je suis ici pour cela.»Et l’auteur poursuit : «Les gens qui sontavec moi rient. Je m’efforce d’être gentil,disant que nous nous verrons le lendemain.L’éditeur explique que quelqu’un m’attend,et je saisis ce prétexte pour prendre congé.‘’ J e m’appelle Hillal ’’, dit-elle avant de s’enaller.»Le lendemain, la jeune Hillal revient etinsiste pour être reçue par l’auteur. Dèsqu’il la reçoit, la jeune fille sort un violonet se met à jouer. «Hillal joue les yeux fer-més, comme si elle était en transe. Je regar-de l’archet qui se déplace d’un côté àl’autre, touchant légèrement les cordes duviolon et produisant les notes d’unemusique que je n’ai jamais entendue, quicommencent à me dire quelque choses quemoi et nous tous ici présents devons écou-ter… r. E.

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415CRÉSUS # 96 DU MARDI 1ER AU LUNDI 7 AOÛT 2017

ALGÉRIE TRIPARTITE L’étrange politique d’exclusion

des syndicats autonomes

Les gouvernements se suivent, mais leur attitude ne change pas à l’égard dessyndicats autonomes. Et celui que conduit, depuis le début du mois de juin dernier,Abdelmadjid Tebboune n’est visiblement pas prêt de changer ses rapports avec ces

organisations syndicales représentant une importante frange de travailleurs.

4par boualem rabah

Alors qu’on s’attendant, après sonappel au dialogue sur «les questionsd’importance nationale», à uneouverture symbolique sur les syndicatsautonomes, le Premier ministre a choisi lestatu quo. En effet, en réunissant, dimanchedernier au Palais du gouvernement, sespartenaires socioéconomiques, Abdelmad-jid Tebboune a reconduit le même schémaen vigueur depuis le début des années2000. En dépit de leur reconnaissance offi-cielle suite à des mois de lutte contre legouvernement Ouyahia qui a tenté en vainde sauvegarder l’hégémonie de l’UGTA, lesdifférents syndicats autonomes de la fonc-tion publique continuent d’être ignorés. Ilsn’ont pas été conviés à la réunion prépara-toire de la prochaine tripartite. Ils ne serontpas certainement invités au rendez-vous du23 septembre prochain. Mais cette fois-cides interrogations s’imposent. Commentconstruire un «consensus» sur les questionsd’intérêt national quand des représentantsde milliers de travailleurs sont éliminés detout débat ? Abdelmadjid Tebboune veut-ilréellement fédérer toutes les forces de lasociété pour faire face à la crise actuelle ?La réponse vient des syndicats autonomeseux-mêmes qui dénoncent cette attitude.

«Le chef de l’Exécutif a pourtant appelé au

dialogue et à laconcertation avectous les acteurs dela société civile. Ona cru à un change-ment dans sa poli-tique, mais le tempsnous a démontréque Tebboune n’apas rompu avec lapolitique de ses pré-décesseurs. Son dis-cours est destinébeaucoup plus à la consommation»,condamne Boualem Amoura, secrétairegénéral du Syndicat autonome des tra-vailleurs de l’éducation et de la formation(Satef) dans une déclaration à la presse enréaction à l’exclusion des syndicats auto-nomes de la réunion de dimanche dernier.Pour sa part, Idir Achour, du Conseil deslycées d’Algérie, «l’exclusion des syndicatsautonomes des travaux de la tripartite n’estpas une surprise». «Le Premier ministreadopte un discours contradictoire. Il a appe-lé au dialogue et à la concertation avec lesacteurs de la société civile. Aujourd’hui, il serétracte et décide d’exclure les syndicatsautonomes des travaux de la prochaine tri-partite. Une décision qui reflète le vrai visa-ge de ce gouvernement», déplore le chef defile du CLA.

uNE pOLItIquEà rEvOIrLe secrétairegénéral du SNAPSP,Lyes Merabet,quant à lui, relèvele caractère incom-préhensible de ladémarche de Teb-boune. «D’un côté, il

plaide pour unconsensus national

en terme de concertation et dialogue socialsans exclusion afin de faire face aux défis àvenir. De l’autre côté, il a exclu les syndicatsautonomes de la Tripartite. Entre le discourset la pratique, il y a un écart énorme», sou-tient-il. Les syndicats autonomes sontpourtant les plus représentatifs dans lesdifférents secteurs de la fonction publique,notamment l’éducation et la santé. L’UGTA,considérée comme le syndicat officiel, n’estprésente que dans ce qui reste encore dutissu industriel public. De quel droit négo-ciera-t-elle au nom des travailleurs qui ontchoisi d’autres syndicats ? Il est à rappelerque le secteur de l’éducation compte à luiseul 9 syndicats autonomes, dont certainssont très puissants à l’image du CNAPESTE,du SNAPEST et du CLA. A ceux-là il fautaussi ajouter les quatre syndicats de la

santé, celui l’administration publique ainsique le CNES (enseignement supérieur). Cesderniers mois, le SNAPAP a réussi à mettreen place une Confédération générale auto-nome des travailleurs algériens (CGATA)regroupant des syndicats autonomes deplusieurs secteurs, notamment écono-mique. L’exclusion de toutes ses organisa-tions constitue en tout cas une grave erreurpour les autorités qui cherchent toujours àmaintenir la paix sociale. Elles l’ont vérifié àl’occasion de la dernière guéguerre entre lePremier ministre et le président du FCE, AliHaddad. Le secrétaire général de l’UGTA,Abdelmadjid Sidi Saïd a préféré soutenir lepatron des patrons en menaçant même deremettre en cause le pacte de croissancesigné en 2014. Mais cet épisode n’a pasdonné à réfléchir aux responsables du gou-vernement qui refuse de comprendre quela «stabilité» et la «paix sociale» ne sont réa-lisables qu’en présence d’une une réellereprésentativité qui s’intéresse réellementaux préoccupations du citoyen. D’où lanécessité pour le gouvernement de revoirsa stratégie et d’associer tous les syndicatsautonomes à cette quête d’une solutionrapide à la crise économique actuelle. Ilspeuvent être de vraies forces de proposi-tion. Le Premier ministre changera-t-ild’avis à temps ?b.r

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