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17 DOSSIER 1 er mai 2020 La fin du régime des quotas laitiers autorise, plus que par le passé, des croissances importantes et rapides des volumes de lait produits au sein des exploitations. Même si l’augmentation de la productivité individuelle n’est pas une fin en soi et qu’elle ne se traduit pas toujours par une amélioration des résultats économiques, celle-ci a été marquée en élevage laitier ces dernières années. Dans une situation de marché perturbé et face à l’évolution régulière des charges, elle a constitué une solution pour maintenir le revenu des exploitants. Dans ce contexte, où le nombre d’animaux à traire par personne est de plus en plus important, la prise en compte et l’amélioration des conditions de travail constitue un enjeu majeur. La traite, principale tâche d’astreinte, est au cœur des préoccupations. Cependant, compte tenu des évolutions sociétales, l’activité de traite pourrait être le point sensible de la filière laitière, via la complexité que représente à ce jour le renouvellement des travailleurs : il est donc important d’améliorer son attractivité globale. Grâce aux travaux d’études et à l’amélioration régulière des équipements, la traite conventionnelle constitue toujours un choix réaliste face au développement de la traite robotisée. Sébastien Guiocheau Coordination du dossier Sébastien Guiocheau (chambre d’agriculture de Bretagne) et Chantal Pape (Terra). Rédaction Sébastien Guiocheau, Pierrick Eouzan et les techniciens de la station de Trévarez (chambre d’agriculture de Bretagne), Jean-Louis Poulet (Idèle), Claire Cloarec, Pauline Lecorguillé et Aurélia le Page (MSA d’Armorique), David Pliquet (E-Mage-IN-3D) et Chantal Pape (Terra). Améliorer ses conditions de travail en salle de traite c’estpossible!

Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

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Page 1: Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

17DOSSIER 1er mai 2020

1er mai 2020

La fin du régime des quotas laitiers autorise, plus que par le passé, des croissances importantes et rapides des volumes de lait produits au sein des exploitations. Même si l’augmentation de la productivité individuelle n’est pas une fin en soi et qu’elle ne se traduit pas toujours par une amélioration des résultats économiques, celle-ci a été marquée en élevage laitier ces dernières années. Dans une situation de marché perturbé et face à l’évolution régulière des charges, elle a constitué une solution pour maintenir le revenu des exploitants. Dans ce contexte, où le nombre d’animaux à traire par personne est de plus en plus important, la prise en compte et l’amélioration des conditions de travail constitue un enjeu majeur. La traite, principale tâche d’astreinte, est au cœur des préoccupations. Cependant, compte tenu des évolutions sociétales, l’activité de traite pourrait être le point sensible de la filière laitière, via la complexité que représente à ce jour le renouvellement des travailleurs : il est donc important d’améliorer son attractivité globale. Grâce aux travaux d’études et à l’amélioration régulière des équipements, la traite conventionnelle constitue toujours un choix réaliste face au développement de la traite robotisée.

Sébastien Guiocheau

Coordination du dossierSébastien Guiocheau (chambre d’agriculture de Bretagne) et Chantal Pape (Terra).RédactionSébastien Guiocheau, Pierrick Eouzan et les techniciens de la station de Trévarez (chambre d’agriculture de Bretagne), Jean-Louis Poulet (Idèle), Claire Cloarec, Pauline Lecorguillé et Aurélia le Page (MSA d’Armorique), David Pliquet (E-Mage-IN-3D) et Chantal Pape (Terra).

Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

c’est possible !

Page 2: Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

PRÉVENTIONDUER, formations à la contention

des bovins, prévention des risques

psycho-sociaux…

Le service prévention de la MSA

accompagne les agriculteurs,

y compris quand se pose

la question du maintien dans l’emploi.

L’ergonomie est la discipline qui rassemble les connaissances sur le fonctionnement de l'homme en activité de travail, afi n de l'ap-pliquer à la conception des machines, des tâches, des outillages et des bâtiments.

PRIORITÉ AU PRÉVENTIF

Ceci se fera de préférence en préventif, par exemple en réfléchissant à la meilleure conception d’un équipement pour faciliter sa future utilisation, ou bien en correctif pour aménager un poste de travail suite à une

maladie professionnelle ou à un accident du travail.Il est reconnu que les conditions de travail, dans la totalité de leurs composantes, ont un impact sur la santé de l’intervenant, bien évidemment lorsqu’elles posent des soucis de sécurité, mais aussi par l’apparition de TMS (troubles musculo-squelettiques). Ces troubles sont sources d’inconfort, de dou-leurs, d’arrêts de travail voire même d’une incapacité à réaliser la tâche.

DES FACTEURSDE RISQUES MULTIPLES

Les facteurs de risques entraînant l’appari-tion de TMS sont nombreux et de plusieurs ordres. Dans les aspects bio-mécaniques, c’est le geste dans toutes ses composantes qui est considéré : sa fréquence, sa durée, son intensité et donc le niveau de sollicita-tion musculaire, la posture et la position dans laquelle est sollicité le corps et tout particu-lièrement l’articulation. Les effets combinés sont également étudiés (fréquents soulève-ments d’une charge lourde au-dessus des épaules, par exemple).

L’équation personnelle regroupe des élé-ments en lien avec la sensibilité individuelle liée à des pré-dispositions génétiques, au sexe, à sa constitution physique, à une patho-logie pré existante, à la latéralité.Les facteurs psychosociaux concernent le stress, la pression mentale, le défaut d’orga-nisation engendrant du stress, la complexité des procédures…. En effet, le stress a de mul-tiples effets sur l’organisme : en plus d’aug-menter le temps de récupération et la tension musculaire, il intervient sur la perception de la douleur et sur le système nerveux, en aug-mentant la sécrétion de diverses hormones provoquant des infl ammations des tendons, œdèmes et syndromes canalaires. Son inci-dence sur le risque d’apparition des TMS est importante.Les facteurs additionnels sont liés à l’environ-nement de travail, au bruit, à l’éclairage, aux vibrations, à la température. Des absences de rotation de postes ou la durée des cycles auront également un impact.

Sébastien Guiocheau

18 DOSSIER 1er mai 2020

1er mai 2020L’ERGONOMIE : tout un concept !L’ergonomie est l’étude scientifique des conditions de travail, et plus

particulièrement des interfaces hommes-machines. Mais l’ergonomie ne se préoccupe pas seulement de l’adaptation des outils de travail aux dimensions corporelles. Elle s’intéresse aussi à l’organisationdu travail ainsi qu’au contenu et à l’environnement du travail.

L’ergonomie est la discipline qui rassemble

18 DOSSIER

L’ERGONOMIEL’ergonomie est l’étude scientifique des conditions de travail, et plus

particulièrement des interfaces hommes-machines. Mais l’ergonomie ne se préoccupe pas seulement de l’adaptation des outils de travail aux dimensions corporelles. Elle s’intéresse aussi à l’organisationdu travail ainsi qu’au contenu et à l’environnement du travail.

Extrait "Le guide du poste de travail : dimensionnement et zones d’atteinte du poste de travail _ Wikipédia". Il faut privilégier au maximum le travail en zone verte, les zones orange étant acceptables, la zone rouge à éviter.

Lorsque l’on applique les grands principes de l’ergonomie à la traite et aux tâches associées, on pourra noter l’importance des travaux à mener sur :� la conception la plus aboutie possible des salles de traite, en réfl échissant à la hauteur des quais et leur adaptation à la taille des trayeurs, la pose des faisceaux en zone de confort, la hauteur des commandes et des consommables,� la réduction du poids des griffes et l’amélioration de leur préhension,� la conception la plus ergonomique possible des équipements associés pour limi-ter la fréquence des gestes et le port de charges (taxi-lait, dispositifs d’application des produits d’hygiène, transfert du lait écarté...),� la meilleure conception des locaux pour assurer des déplacements en sécurité et les plus effi caces possibles, tout en les limitant,� l’ambiance de traite par la réduction des bruits, la limitation des températures extrêmes, l’installation de dispositifs lumineux en lien avec la fi nesse de la tâche à réaliser,� les temps de récupération par la rotation des trayeurs,� l’organisation du travail par le bon enregistrement et le transfert des consignes aux autres intervenants et par la simplicité des procédures à mettre en place, ré-duisant ainsi le risque d’erreur.Mais il existe aussi de très nombreux autres facteurs sur lesquels il n’est pas aisé d’agir comme la reconnaissance personnelle au sein de la structure et à l’extérieur, le sens de la tâche et du métier, l’équilibre vie personnelle, vie professionnelle…

Les principes de l’ergonomie appliqués à la traite

Page 3: Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

PRÉVENTIONDUER, formations à la contention

des bovins, prévention des risques

psycho-sociaux…

Le service prévention de la MSA

accompagne les agriculteurs,

y compris quand se pose

la question du maintien dans l’emploi.

Comparativement aux autres filières agri-coles, la filière bovin lait connaît plus d’acci-dents du travail et de maladies profession-nelles. La Bretagne, terre d’élevage, est donc logiquement touchée : elle représente à elle seule 24 % des accidents du travail et mala-dies professionnelles sur les trois dernières années dans la filière bovin lait au niveau national.On constate plus spécifiquement un nombre important d’accidents survenant pendant la traite ou lors de la phase d’alimentation des bêtes. La répétitivité des gestes et des tâches favorise également l’apparition de troubles musculo-squelettiques (TMS), les membres supérieurs (épaules, poignets, coudes…) étant particulièrement impactés.Pourtant, la pénibilité associée à une tâche est subjective et dépend de plusieurs fac-teurs : l’équipement utilisé, l’organisation mise en place ou la méthode choisie. Pour exemple, la distribution du lait aux veaux peut être perçue comme une tâche difficile et contraignante pour certains (distribution manuelle, période de vêlage concentrée, distribution plusieurs fois par jour) et non pour d’autres (utilisation d’un taxi, période de vêlage lissée sur l’année, distribution une seule fois par jour, plusieurs opérateurs à réaliser cette tâche).

UNE APPROCHE GLOBALE

Afin de limiter au maximum la survenue d’un accident du travail ou l’apparition de TMS, une approche globale des risques professionnels est nécessaire.Au-delà du conseil technique pour l’achat de matériel, le service prévention des risques professionnels (PRP) de la MSA peut vous accompagner dans vos démarches de manière plus globale. Dans le cadre d’actions individualisées, il propose des diagnostics de prévention global de l’exploitation, des conseils lors de la conception/rénovation de nouveaux bâtiments, l'accompagnement d’un aménagement de poste…Dans le cadre d’actions collectives, il organise des formations DUERP (document unique d’évaluation des risques professionnels), ou contention/manipulation de bovins. Et anime des groupes "accompagnements vers le bien-être au travail" et "Et si on parlait du travail", pour aider les exploitants à identifier ce qui fonctionne ou ce qui pose problème sur leur exploitation, afin de prévenir les risques psy-cho-sociaux (stress, épuisement profession-nel, burn out...).

Claire Cloarec et Pauline Lecorguillé Conseillères prévention MSA d’Armorique

19DOSSIER 1er mai 2020

1er mai 2020

La MSA organise régulièrement des formations à la contention des bovins

Maintien dans l'emploiLe service des interventions sociales est également à votre écoute. En effet, la MSA d’Armorique dispose d’une équipe de travail-leurs sociaux spécialisés dans le maintien en emploi. Ils accompagnent les exploitants agri-coles confrontés à une situation de santé qui impacte leur travail. Ces professionnels vous accompagnent dans votre réflexion et la mise en œuvre de votre projet professionnel, que vous soyez en arrêt de travail ou en activité. Ils recherchent avec vous des solutions afin de vous permettre de continuer à travailler sur votre exploitation, ou d’envisager une recon-version professionnelle. En effet, la carac-téristique principale de ce soutien consiste à vous proposer un accompagnement per-sonnalisé, qui tient compte de votre situation (parcours de soin, contraintes, ressources...) et de vos souhaits. Les travailleurs sociaux sont soumis au respect du secret profession-nel. Avec votre accord, et afin de garantir la réponse la plus adaptée à votre situation, ceux-ci travaillent de façon coordonnée avec le médecin conseil, le médecin du travail et le conseiller en prévention des risques profes-sionnels. L’expertise de chacun de ces profes-sionnels est mise à profit afin de vous garantir une solution adaptée à vos besoins. Durant cette période de confinement, nos travailleurs sociaux restent mobilisés. Vous pouvez laisser un message via votre espace privé sur le site internet, en demandant à être recontacté par nos services, ou laisser vos coordonnées et un message sur le répondeur de notre plateforme téléphonique. / Aurélia Le Page, responsable du pôle vie professionnelle MSA d'Armorique

Pour toute information ou demande de conseil, contactez le service prévention de la MSA- d’Armorique : 02 98 85 79 31 ou par mail

[email protected] Portes de Bretagne : Leonard.odile@

portesdebretagne.msa.fr au 02 99 01 80 68 ou [email protected] au 02 97 46 52 36.

PRATIQUE

Accidents du travail, TMS… : la MSA vous accompagne

Page 4: Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

LAIT ÉCARTÉ, HALTE AU PORT DE CHARGES

Depuis quelques années maintenant, et afin d’éviter le remplissage de la cuve du taxi-lait en versant les bidons de lait manuellement, la station s’est équipée d’un dispositif de trans-fert. Ce système relativement simple, installé par le personnel, est composé d’une pompe réversible pour liquides alimentaires. Elle est installée en poste fixe à proximité de la fosse de traite et est actionnée par un interrupteur situé dans la fosse. Le trayeur peut pomper le contenu des bidons pour le diriger vers le taxi-lait en attente dans la laiterie. En action-nant une simple vanne, le lait impropre est dirigé vers l’égout. Le lavage est assuré en pompant une quantité de solution chlorée (dans un sens ou dans l’autre).

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1er mai 2020

Dans le cadre d’essais préalables à un éventuel remplacement de la salle de traite TPA 2x10 âgée de 25 ans, la station laitière de Trévarez conduit des tests d’équipements améliorant les conditions de travail à la traite et pour la réalisation des tâches associées.

Sébastien Guiocheau et les techniciens de la station de Trévarez

Trévarez dans le concret de la traite

DES GRIFFES PLUS LÉGÈRES

Les nouveaux modèles de griffes de traite permettent de réduire le poids moyen des griffes d’au moins 1 kg. Attention, le poids constitue un élément important, certes, mais d’autres aspects sont à prendre en compte : forme, équilibre et faci-lité de préhension du bol, adaptabilité au type de branchement (arrière ou par le côté), mode de pose recommandé, compatibilité avec les plateaux de lavage, longueur, diamètre et matériaux des manchons, matériaux des gobelets, durée de vie des manchons, réglage éventuel du niveau de vide…Les essais préalables permettent de définir les critères de choix prioritaires.

TAXI-LAIT : PARTENARIAT AVEC LA MSA

Pour répondre à une demande de la MSA, il est prévu une évaluation de trois modèles de taxi-lait dans l’ensemble des conditions d’utilisation (remplissage avec du lait entier, préparation de lait en poudre, déplacement sur sol plat ou en pente, distribution en seau ou bac collectif, lavage). Ceci se fera, grâce aux salariés, avec plusieurs morphologies d’utilisateurs. Ces évaluations, prévues en 2020, seront réa-lisées en continu sur la phase de travail par la technologie de Motion Capture. Les scénarios testés seront choisis suite à des enquêtes "retours d’expériences" réalisés auprès des éleveurs laitiers équipés ou non de taxi-lait.

Évaluer les automatismes d’hygiène sur faisceaux trayeurs bovins

La traite des vaches laitières et le respect des pratiques d’hygiène sont fondamentaux pour un éleveur laitier, mais l’application individuelle d’une hygiène post-traite peut devenir physiquement éprouvante et, à la longue, source de TMS. Le projet QualHygAuto, financé par la Région Pays de la Loire et conduit par Thomas Huneau, de la ferme expérimentale de Derval (chambre d'agriculture de Loire Atlantique) et Jean-Louis Poulet, responsable de projet R&D Traite de l’Institut de l’élevage, vise à tester trois disposi-tifs automatiques de post-traitement des trayons et de désinfection des manchons trayeurs, directement intégrés aux faisceaux trayeurs.L’efficacité de la désinfection manuelle des trayons post-traite est connue, mais des travaux de référence manquent lorsque le produit est directement injecté dans le manchon, avant son retrait. D’autre part, ce mode d’application, bien qu’il soit suivi de rinçage, interroge face au risque de présence de résidus dans le lait, dans certaines configurations d’utilisation. L’objectif est de vérifier la qualité d’application des produits et l’absence de résidus de produits pour les traites suivantes et dans le lait. Cela permettra d’apporter aux producteurs laitiers une expertise objective de ces équipements, dont la commercialisa-tion s’accentue ces derniers mois. / Jean-Louis Poulet, Idele

L’application automatique de post-traitement sur les trayons directement par le manchon, évite la réalisation de nombreux gestes. Le test de trois dispositifs déjà commercialisés permettra d’en évaluer la qualité d’application.

À Trévarez, les griffes actuelles pèsent 2,6 kg. Les nouveaux modèles testés font moins de 1,6 kg. Les marques proposent actuellement différents modèles (Delaval Evanza, GEA IQ Pro GQ, Boumatic Flo-Star Max, SAC Christensen Uniflow…).

Le pompage direct depuis la fosse de traite, même s’il demande un peu d’organisation, est beaucoup plus facile.

Le remplissage de la cuve du taxi lait dont le bord supérieur est situé à 1,10 m du sol, avec un pot pesant 25 kg est particulièrement contraignant et pas adapté pour des trayeurs de petit gabarit.

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1er mai 2020

L’exosquelette est un dispositif d’assis-tance physique, porté par-dessus les vêtements, qui doit permettre de soula-ger l’opérateur pendant une tâche. C’est un système de ce type que la ferme expérimentale de la Blanche Maison et la MSA ont évalué. Cette évaluation, prévue sur trois mois sur plusieurs trayeurs, avec recueil des sensations après utilisation, a été écourtée après un mois d’essai seulement. Les béné-fices de l’assistant sont modestes. Il permet certes une assistance lors de l’élévation des épaules pour des vaches aux planchers mammaires particulièrement hauts et pour accé-der aux commandes situées en hau-

teur. Cependant, dans un environnement de traite où l’opérateur est en mouvement, où il faut se déplacer avec agilité entre les contentions fixes, les plateaux de lavage, les cordelettes de décrochage, voire même

sortir de la fosse pour activer la circulation, le dispositif est perçu comme un frein par les salariés qui en sont équipés. Les réflexes nécessaires pour éviter une vache qui s’agite s’en trouvent également modifiés. Aussi, dans cet environnement de traite ou de transfert du lait aux veaux, le dispositif demande une concentration permanente qui est fatigante sur la durée. Enfin, le fait d’enlever le disposi-tif était vécu comme un soulagement, faisant également craindre le report des efforts sur d’autres parties du corps. Ce principe d’assis-tance ou le modèle testé ne paraissent donc pas pour l’instant adapté à l’environnement de traite, à la complexité et à la diversité des gestes à réaliser.

Sébastien Guiocheau

Pour en savoir plus, vous pouvez joindre la ferme expérimentale de la Blanche Maison au 02 33 56 12 04.

PRATIQUE

L’EXOSQUELETTE, une solution d’avenir ?Dans le cadre d’un essai relatif à la santé sécurité au travail des agriculteurs, la ferme expérimentale normande de la Blanche Maison a testé un exosquelette pour évaluer son intérêt pour soulager le travail à la traite. Retour d’expérience.

Le test de l’exosquelette à la traite sur la station expérimentale de la Blanche Maison a été écourté après un mois d’utilisation : le dispositif engendrait plus de contraintes que de bénéfices.

Page 6: Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

DOSSIER 1er mai 2020

1er mai 2020

Une salle de traite qui limite les contraintesÂgés de 50 ans, Gisèle et Bruno Kérébel ont profité du changement de leur salle de traite pour imaginer une installation qui leur facilite le quotidien, jusqu’à la retraite.

"Notre salle de traite avait 20 ans". Éleveurs à Pleyber-Christ (29), Gisèle et Bruno Kérébel avaient du mal à s’approvisionner en pièces d’usure. Et la traite durait en longueur, la production étant passée de 500 à 750 000 litres de lait.

AMÉLIORERLES CONDITIONS DE TRAVAIL

"Nous avons d’abord réfl échi à l’évo-lution de notre système avec Céline Favé, conseillère à la chambre d’agriculture", se souvient l’éleveur. Extensifi er la production, avec plus d’herbe dans la ration, obligeait à construire un boviduc. "Nous n’avons que 13 ha accessibles". Mais il était diffi cile d’envisager de fermer le silo de maïs. Le choix est alors fait de poursuivre dans le même système, en améliorant les conditions de tra-vail, à commencer par la traite.

Equipé d'une combinaison

connectée, l’opérateur

va réaliser normalement

son activité. Ses gestes

vont être enregistrés,

modélisés et qualifi és

sur la base de modèles

ergonomiques. L’édition

des rapports permettra

de repérer les actions les

plus traumatisantes pour

le corps.

Griffes légères et tuyaux en silicone limitent les contraintes sur bras et épaules.

Évaluer les conditions de travail par

Motion capture

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La chambre d’agriculture de Bretagne, Idele, la caisse centrale de MSA et Agrocampus Ouest s’intéressent aux solutions innovantes d’évaluation des conditions de travail en exploitation, et notamment à la traite. Ils se sont rapprochés d’E-Mage-IN 3D, bureau d’études finistérien spécialisé dans cette nouvelle approche.

Les industries du cinéma et du jeu vidéo ont, depuis les années 90, intégré la possibilité de présenter les mouvements d’un comédien, souvent un cascadeur, sous la forme de dépla-cements de points dans l’espace. Ces points mobiles, qui correspondent au déplacement des articulations, sont matérialisés par des capteurs qui transmettent leurs positions dans l’espace par communication bluetooth ou wifi .E-Mage-IN 3D, studio de développement de solutions numériques, a imaginé que l’on pouvait s’appuyer sur cette analyse bio-mécanique des mouvements pour la prévention des troubles musculo-squelettiques (TMS). Ainsi, en s’appuyant sur les abaques ou les tables de calculs défi nis par les ergonomes internationaux, il a créé le logiciel TMS Studio, qui édite des rapports de mesures à partir de l’analyse en temps réel des mouvements d’un travailleur, enregistrés par les capteurs. Cette solution permet de visualiser immédiatement les zones du corps qui sont sollicitées au-delà de leur limite.TMS Studio est devenu un concept global, qui intègre les capteurs de mouvements dans des combinaisons intégrales, confortables et très faciles à enfi ler, développées par Armor Lux. Utilisées à la station expérimentale de Trévarez, elles permettront de caractériser objective-ment les conditions de travail en conditions réelles d’élevage pour inciter les équipementiers, les concepteurs de bâtiments et les constructeurs à proposer et à appliquer les solutions les plus confortables et facilitatrices pour les trayeurs.

David Pliquet, E-Mage-IN-3D et Sébastien Guiocheau, chambre d'agriculture

Page 7: Améliorer ses conditions de travail en salle de traite

23DOSSIER 1er mai 2020

1er mai 2020

Une salle de traite qui limite les contraintes

Un robot ? "Il nous aurait fallu deux stalles, calcule Gisèle. Et notre bâtiment ne se prêtait pas à une circulation fl uide des animaux".Un roto ? "Nous avions trouvé une occasion. Mais il n’était pas éligible aux subventions du PCAEA", rajoute Bruno. Ce sera donc une salle de traite 2x9 postes, qui a pris la place de l’ancienne, "après quelques mois de travaux",l’éleveur se chargeant de la maçonnerie.

UN DIAGNOSTIC PAR LA MSA

"Nous avons 50 ans tous les deux. Il s’agit de tenir jusqu’à la retraite ! Et tant qu’à modifi er quelque chose, autant le faire bien". Pour les aider à choisir leur installation, Bruno et Gisèle font donc appel à un préven-teur de la MSA. Et ne le regrettent pas ! "On nous a conseillé une salle de traite de plain pied, ce à quoi nous n’avions pas forcément pensé". Et ils apprécient le changement ! "Plus besoin de monter et descendre sans cesse 3 ou 4 marches".Equipé de compteurs à lait, le nouvel équipement identifi e les animaux à leur entrée. Un écran tactile, dans la fosse de traite, donne accès aux données du troupeau, "ce qui évite d’avoir à retourner dans le bureau". Et un haut-parleur indique les vaches en défaut (mammites...). "Une pre-mière en France chez SAC", indique le concessionnaire.

Toujours pour limiter les déplacements, une porte de tri auto-matique permet de séparer facile-ment les vaches à isoler "Qu’une vache boîte ou ne semble pas en forme et on intervient sans hésiter", remarque Gisèle.

LIMITER LA PÉNIBILITÉ

L'installation a aussi été pensée afi n de limiter la pénibilité des tâches. Ainsi, pour réduire les contraintes sur les épaules, les griffes sont plus légères. "On a gagné 5 à 600 gr. Et on se rend compte de la différence",affi rment les éleveurs. Toujours pour gagner en poids, les tuyaux sont en silicone. "Et comme dans notre ancienne salle de traite, nous avons choisi le Quick Start, une option qui permet d’utiliser la griffe sans avoir à appuyer sur un bouton".

Pour éviter de porter des seaux, un taxi-lait a trouvé sa place au bout de la fosse de traite. "Et on a bien apprécié cet hiver", note Gisèle. Autre avantage, "le lait étant toujours dis-tribué à la bonne température, nous avons eu beaucoup moins de pro-blèmes sanitaires sur les veaux".

UN COLLIER POUR DÉTECTER LES CHALEURS

Dans les logettes, une machine aide désormais au nettoyage et au pail-lage. "Et une fois qu’on y a goûté, on a du mal à faire marche arrière", reconnaît Maël, leur fi ls, en études agricoles.Pour un suivi plus facile du troupeau, les vaches sont équipées d’un collier qui enregistre les données de rumi-nation, la température corporelle, l’activité… "C’est bien plus simple pour détecter les chaleurs ou les problèmes de santé", constatent les éleveursPour une meilleure hygiène de traite, ils ont également opté pour une désinfection des griffes entre chaque lot. Et déjà les leucocytes ont diminué.

SURVEILLERLE TROUPEAU

Mise en route le 8 novembre der-nier, la nouvelle installation donne toute satisfaction. "La traite est plus rapide, indique Bruno. Et peut, si besoin, être effectuée par une seule personne, lors des pointes de tra-vaux par exemple". Les deux trayeurs ayant à peu près la même taille, il n’a pas été prévu de plancher mobile.Déjà équipés de caméras, les éle-veurs ont profité des travaux pour compléter leur installation. "Sur l'écran tactile, on peut voir la laiterie et la porte de tri". Dans le bâtiment des génisses et celui des laitières, des caméras suivent la circulation des animaux et les vêlages. "On a sauvé pas mal de veaux, indique Gisèle. Et on n’a plus besoin de sortir de la maison le soir ou de se lever la nuit pour rien".Pour découvrir ces équipements, une porte ouverte avait été prévue. Confi nement oblige, elle est remise à plus tard…

Chantal Pape

"Il nous aurait fallu calcule Gisèle. Et

notre bâtiment ne se prêtait pas à une circulation fl uide des

"Nous avions trouvé une occasion. Mais il n’était pas éligible aux subventions

rajoute Bruno. Ce sera donc une salle de traite 2x9 postes, qui a pris la

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"Nous avons 50 ans tous les deux. Il s’agit de tenir jusqu’à la retraite !

Une salle de traite qui limite les contraintes

l’éleveur se chargeant de la

"Il nous aurait fallu Et

notre bâtiment ne se prêtait pas à une circulation fl uide des

"Nous avions trouvé une occasion. Mais il n’était pas éligible aux subventions

traite 2x9 postes, qui a pris la "après

À Pleyber-Christ (29)

La salle de traite SAC Christensen est équipée d’un écran tactile, permettant de consulter ou de noter les évènements du troupeau depuis la fosse de traite.

Une porte de tri dirige à la demande les vaches vers deux box.

Un taxi-lait permet d’alimenter les veaux sans effort.