6
École Centrale Paris 3 ème année, Option mathématiques appliquées Année 2006-2007 ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, deuxième partie, corrigé 23/10/2006 Durée 2h . Le problème de la route (Encore lui !) On considère une variante du problème du profil d’une route étudié en cours. - La route est tracée sur un sol dont l’altitude est définie par une fonction g(x),x [0,L]. - L’altitude, ou le profil, de la chaussée, est définie par la fonction u(x),x [0,L]. - L’objectif est définir un profil u(x) dont la pente n’est pas trop forte tout en minimisant le coût des remblais et des tranchées à effectuer que l’on suppose évalué par la fonction J 0 (u)= Z L 0 k 2 (u(x) - g(x)) 2 dx k est une constante positive. Pour limiter la pente on ajoute à la fonction J 0 (u) un terme de pénalisation, c’est à dire un coût lié à la pente de la route, J 1 (u)= c p Z L 0 ( |u 0 | α ) p dx et on définit la fonction coût total J (u)= J 0 (u)+ J 1 (u) c est une constante positive, α une pente de référence et p 1. Soit V le sous-ensemble des fonctions de L p ([0,L]) dont la dérivée au sens des distributions est une fonction de L p ([0,L]). D’après l’exercice 4 de la première partie V C ([0,L]) ce qui permet de définir l’espace V 0 = {v V/v(0) = v(L)=0} 1

ANALYSE FONCTIONNELLE - perso.ecp.frperso.ecp.fr/~laurent/AF/Documents/ContAF06_2c.pdf · ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, ... Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: ANALYSE FONCTIONNELLE - perso.ecp.frperso.ecp.fr/~laurent/AF/Documents/ContAF06_2c.pdf · ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, ... Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation

École Centrale Paris

3ème année, Option mathématiques appliquées

Année 2006-2007

ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, deuxième partie,corrigé

23/10/2006

Durée 2h .

Le problème de la route

(Encore lui !) On considère une variante du problème du profil d’une route étudié en cours.− La route est tracée sur un sol dont l’altitude est définie par une fonction g(x), x ∈ [0, L].− L’altitude, ou le profil, de la chaussée, est définie par la fonction u(x), x ∈ [0, L].− L’objectif est définir un profil u(x) dont la pente n’est pas trop forte tout en minimisant le coût desremblais et des tranchées à effectuer que l’on suppose évalué par la fonction

J0(u) =∫ L

0

k

2(u(x)− g(x))2 dx

où k est une constante positive. Pour limiter la pente on ajoute à la fonction J0(u) un terme depénalisation, c’est à dire un coût lié à la pente de la route,

J1(u) =c

p

∫ L

0(|u′|α

)p dx

et on définit la fonction coût totalJ(u) = J0(u) + J1(u)

où c est une constante positive, α une pente de référence et p ≥ 1.Soit V le sous-ensemble des fonctions de Lp([0, L]) dont la dérivée au sens des distributions est unefonction de Lp([0, L]). D’après l’exercice 4 de la première partie V ⊂ C([0, L]) ce qui permet dedéfinir l’espace

V0 = {v ∈ V / v(0) = v(L) = 0}

1

Page 2: ANALYSE FONCTIONNELLE - perso.ecp.frperso.ecp.fr/~laurent/AF/Documents/ContAF06_2c.pdf · ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, ... Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation

Analyse Fonctionnelle 2

Il faut alors résoudre le problème d’optimisation{u ∈ V0

∀v ∈ V0 J(u) ≤ J(v)(1)

Noter que, pour p grand, le terme de pénalisation est petit si |u′| ≤ α et grand si |u′| ≥ α.On a en imagerie un problème analogue, posé dans un carré, obtenu en remplaçant |u′| par ‖∇u‖2,mais cette fois avec p proche de 1. C’est mathématiquement une situation plus intéressante mais pluscompliquée qu’en dimension 1.Nous allons montrer l’existence de la solution de ce problème et la convergence des approximationscalculées par la méthode des éléments finis. La méthode utilisée s’étend sans problème à la dimension2.

Question 1

• On note ‖v‖p la norme dans Lp([0, L]). On munit V0 de la norme

‖v‖ = ‖v′‖p

où v′ est la dérivée au sens des distributions de v. Montrer que V0 muni de cette norme est un espacede Banach.Corr. :D’après l’exercice 4 de la première partie

v =∫ x

0v′ dµ

et v(L) = 0 si et seulement si∫ L0 v′ dµ = 0. Soit un une suite de Cauchy pour ‖v‖. Cela implique

que u′n est une suite de Cauchy dans Lp([0, L]) donc converge dans Lp([0, L]) vers une fonction v,telle que

∫ L0 v′ dµ = 0. Ce qui implique la convergence de u′n dans L1([0, L]) (car sur un borné

‖‖1 ≤ ‖‖p) ainsi que la convergence uniforme de un =∫ x0 u′n dµ vers une fonction continue u telle

que u(L) = 0. Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation faible passe à la limite et montreque u′ = v au sens des distributions. Donc un converge vers une fonction u ∈ V0.•Montrer qu’il existe une constante C telle que

‖v‖∞ ≤ C‖v‖

Corr. :C’est implicite dans la question précédente. Précisément cela découle de l’inégalité de Hölder

|v(x)| =∫ x

0|v′| dµ ≤ q

√∫ x

01 dµ p

√∫ x

0|v′|p dµ

On peut donc prendre C = q√L.

• Montrer que les fonctions continue affines par morceaux sur une partition de [0, L] sont dans V .

ECP 2006-2007 Option Mathématiques Appliquées

Page 3: ANALYSE FONCTIONNELLE - perso.ecp.frperso.ecp.fr/~laurent/AF/Documents/ContAF06_2c.pdf · ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, ... Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation

Analyse Fonctionnelle 3

Corr. :Elles vérifient

v =∫ x

0v′ dµ

où v′ est en escalier, donc dans Lp([0, L]).

Question 2

•Montrer que la fonction J(v) est bien définie et continue sur V0.Corr. :J1(v) est continue par définition (à un facteur près c’est ‖v‖p) et J0(v) est continue pour la conver-gence uniforme donc pour la convergence par rapport à ‖v‖ d’après la question précédente.•Montrer que J(u) est une fonction strictement convexe et coercive sur V0.Corr. :J0(v) est strictement convexe car quadratique définie positive et J1(v) est convexe comme intégraled’une fonction convexe, d’où la stricte convexité de J0(v) + J1(v).On a J(v) ≥ J1(v), or J1(v) est à un facteur près ‖v‖p, d’où la coercivité de J(v).

Question 3

• Soit V un espace normé. Soit J(v) est une fonction convexe continue sur V . Montrer que si un ∈ Vest une suite qui converge faiblement vers u ∈ V on a

J(u) ≤ lim infnJ(un)

Indic. : montrer qu’il existe une forme linéaire continue L(v) tel que

J(v) ≥ J(u) + L(v − u)

Corr. :L’indication n’est pas autre chose que le théorème de Hahn Banach appliqué à la fonction convexecontinue h → J(u+ h)− J(u), au sous espace V = {0}, et à a forme linéaire 0 : il existe donc uneforme linéaire L définie sur tout l’espace telle que

L(h) ≤ J(u+ h)− J(u)

La continuité de L résulte de ce que, majorée par une fonction continue, elle est bornée autour de 0.Si un converge faiblement vers u, L(un − u) tend vers 0 et on a donc

lim infn>N

J(un) ≥ J(u)

• Soit J(u) une fonction convexe et continue sur l’espaceLp([0, 1] qui est coercive (i.e. lim‖u‖p→∞ J(u) =+∞).Montrer que J(u) admet un minimum.Indic.˜ : Soit m = infv∈V0 J(v), considérer une suite un ∈ V0 telle que J(un)→ m.

ECP 2006-2007 Option Mathématiques Appliquées

Page 4: ANALYSE FONCTIONNELLE - perso.ecp.frperso.ecp.fr/~laurent/AF/Documents/ContAF06_2c.pdf · ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, ... Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation

Analyse Fonctionnelle 4

Corr. :De la coercivité on déduit que la suite un est bornée. Comme Lp([0, 1] est le dual de son dual Lq([0, 1]où 1

p + 1q = 1 et que les boules dans un espace dual sont compactes pour la convergence faible∗, qui

est donc ici la convergence faible, il en résulte que la suite un admet une sous-suite faiblement conver-gente, que nous appelons toujours un. Il existe donc u ∈ Lp([0, 1] telle que un converge faiblementvers u. Par construction J(un)→ m. Et d’après le résultat précédent

J(u) ≤ lim infnJ(un) = m

Comme par définition de m on a J(u) ≥ m, il vient J(u) = m.u est donc un minimum de J .

Question 4

Soitm = inf

v∈V0

J(v)

et un ∈ V0 une suite telle que J(un)→ m.•Montrer que u′n admet une sous-suite qui converge faiblement dans Lp([0, L]) vers une fonction u′

qui est la dérivée distribution d’une fonction u ∈ V0. On note encore u′n cette sous-suite.Corr. :Comme J(un) ≥ J1(un) la suite J1(un) = c

p

∫ L0 ( |u

′n|α )p dx est bornée et donc ‖u′n‖p est bornée. La

suite u′n admet donc une sous-suite faiblement convergente que notons encore u′n. La convergencefaible dans Lp([0, L] de u′n vers une fonction v implique la convergence ponctuelle de un vers u =∫ x0 v dµ car

un(x) =∫ x

0u′n dµ

et que les fonctions indicatrices sont dans Lq([0, L]. De la définition de la dérivée au sens des distri-butions il résulte que u′ = v au sens des distributions (car cette définition passe à la limite faible dufait que D([0, 1]) ⊂ Lp([0, L]).•Montrer que un converge ponctuellement vers u.Corr. :La convergence ponctuelle a été démontré à la question précédente. Comme ‖un‖ = ‖un‖p est bor-née et que nous avons vu que ‖un‖∞ ≤ C‖un‖ il en résulte que un est une suite de fonctions bornéesqui convergent ponctuellement vers u.•Montrer que

J1(u) ≤ limnJ1(un)

En déduire que J(u) = m, que u est la solution du problème (1) et que

limnJ1(un) = J1(u) (2)

Corr. :En appliquant le théorème de convergence dominée de Lebesgue (un converge vers u ponctuellement

ECP 2006-2007 Option Mathématiques Appliquées

Page 5: ANALYSE FONCTIONNELLE - perso.ecp.frperso.ecp.fr/~laurent/AF/Documents/ContAF06_2c.pdf · ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, ... Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation

Analyse Fonctionnelle 5

et est majorée par une constante, i.e. une fonction intégrable) on montre que J0(un) converge versJ0(u). D’autre part d’après le résultat de la question précédente, puisque un converge faiblement versu

J1(u) ≤ lim infnJ1(un)

Or, puisque J0(un)→ J0(u),

lim infn

(J1(un) + J0(un)) = (lim infnJ1(un)) + J0(u) ≥ J1(u) + J0(u)

et doncJ(u) ≤ lim inf

nJ(un) = m

Comme par définition de m on a J(u) ≥ m, il vient J(u) = m. La fonction u est donc l’uniqueminimum de la fonction strictement convexe J(v).Pour la dernière question, on vient de montrer que

J(un)→ J(u)

Par ailleurs on a montré que J0(un)→ J0(u). Donc J1(un) = J(un)− J0(un) converge vers J1(u).

Question 5

Rappelons (cf. Séance 6) que la boule unité de Lp([0, L]) est uniformément convexe et que celaimplique que si une suite un est telle que

‖un‖p → ‖u‖p, ‖un + u

2‖p → ‖u‖p,

alors‖un − u‖p → 0

• Soit Vn l’espace des fonctions continues affines par morceaux sur une partition de [0, L] en 2n

intervalles. Montrer qu’il existe un ∈ Vn unique tel que

∀v ∈ Vn, J(un) ≤ J(v)

Corr. :L’espace Vn est de dimension finie, la fonction J(v) est continue et coercive, elle admet donc unminimum qui est unique d’après la stricte convexité de J(v).Elle définit une suite décroissante (Vn ⊂ Vn+1) et minimisante car

⋃Vn est dense dans V0, ce qui

impliqueinf J(un) ≤ inf

u∈⋃Vn

J(v) = J(u)

• En pratique on calcule un. Nous avons déjà montré que la solution calculée un convergeait versu pour la norme infinie et que u′n converge faiblement vers u′ dans Lp([0, L]). Mais la convergencefaible “laisse passer” de fortes oscillations (sin(nx) tend faiblement vers 0).Montrer que u′n converge au sens fort (i.e. pour la norme de Lp([0, L])) vers u′ (Indic. : utiliser (2)).

ECP 2006-2007 Option Mathématiques Appliquées

Page 6: ANALYSE FONCTIONNELLE - perso.ecp.frperso.ecp.fr/~laurent/AF/Documents/ContAF06_2c.pdf · ANALYSE FONCTIONNELLE : Contrôle, ... Comme dans l’exercice 4 la définition de la dérivation

Analyse Fonctionnelle 6

Corr. :Nous avons vu que J(un)→ J(u) et que J1(un)→ J1(u). Par ailleurs, du fait que u est le minimumde J(v) et que J(v) est convexe

J(u) ≤ J(u+ un

2) ≤ J(u) + J(un)

2

Donc J(u+un2 ) → J(u). On peut donc remplacer un par u+un

2 dans la question précédente (leshypothèses étaient J(un)→ m) et montrer de la même manière que J1(u+un

2 )→ J1(u).Comme à un facteur près J1(v) est ‖v′‖p on en déduit que la suite u′n vérifie les hypothèses del’énoncé

‖u′n‖p → ‖u′‖p, ‖u′n + u′

2‖p → ‖u′‖p,

on en déduit que‖u′n − u′‖p → 0

et donc la convergence forte des dérivées des approximations. On peut ensuite en déduire la conver-gence uniforme de la suite un qui était demandée inutilement plus haut du fait de ‖v‖∞ ≤ C‖v‖.

ECP 2006-2007 Option Mathématiques Appliquées