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1 (Original de l’article paru dans Autour du rêve, Forum transdisciplinaire N°1, Editions L'Atelier du rêve, 1995. Ce texte a été revu et corrigé en oct 96) *************************************************************************************** ANIMISME ET ESPACE-TEMPS par François FAVRE Il s'agit d'un texte résumant une série de conférences. Pour en faciliter la compréhension auprès de lecteurs peu familiarisés avec la physique, l'épistémologie ou la parapsychologie, j'ai questionné François Favre sur certains points. Le texte initial a ensuite été modifié par lui et certains de ses commentaires, entre crochets et en italiques, ajoutés. La lecture de cet article est très ardue et nécessitera du lecteur une démarche à la fois créatrice et empathique, aux antipodes d'une lecture linéaire. F. Lesourd I. INTRODUCTION II. LES PROBLEMES SOULEVES PAR LA PHYSIQUE MODERNE III. LES PROBLEMES SOULEVES PAR LA PARAPSYCHOLOGIE IV. LES PSEUDO-SOLUTIONS V. QUELQUES NOTIONS DE PHILO ET DE PSYCHO VI. LES SOLUTIONS PROPOSEES VII. LA DESTINEE ET LE DETERMINISME I. INTRODUCTION Une remarque préalable s'impose : on ne peut pas dissocier le temps de l'espace, aussi bien en physique qu'en psychologie, puisque l'existant suppose de l'espace (des choses) et du temps (du changement). Pour essayer de rendre clair un exposé difficile et trop bref, je propose de le symboliser par un circuit cybernétique (schéma 1) que j'expliciterai au fur et à mesure. Chaque quadrant correspond à un champ d'études scientifiques : I : LA REALITE OBJECTIVE. C'est le domaine de l'observation physique et biologique ; II : LA REALITE SUBJECTIVE. C'est le domaine où fonctionne la raison, où l'esprit agence. C'est ce qu'explore la psychologie expérimentale et à partir de quoi travaille presque exclusivement la philosophie occidentale ; III : L'IMAGINAIRE SUBJECTIF. C'est le domaine des représentations, des images, du désir. C'est le champ privilégié de la psychanalyse et de la psychosociologie de l'imaginaire au sens large (Bachelard, Carroll, Lévi-Strauss, Borges, etc.) ;

Animisme Et Espace Temps

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  • 1 (Original de larticle paru dans Autour du rve, Forum transdisciplinaire N1, Editions L'Atelier du rve, 1995.Ce texte a t revu et corrig en oct 96)

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    ANIMISME ET ESPACE-TEMPSpar Franois FAVRE

    Il s'agit d'un texte rsumant une srie de confrences. Pour en faciliter la comprhensionauprs de lecteurs peu familiariss avec la physique, l'pistmologie ou la parapsychologie,j'ai questionn Franois Favre sur certains points. Le texte initial a ensuite t modifi par luiet certains de ses commentaires, entre crochets et en italiques, ajouts. La lecture de cetarticle est trs ardue et ncessitera du lecteur une dmarche la fois cratrice et empathique,aux antipodes d'une lecture linaire.

    F. Lesourd

    I. INTRODUCTION

    II. LES PROBLEMES SOULEVES PAR LA PHYSIQUE MODERNE

    III. LES PROBLEMES SOULEVES PAR LA PARAPSYCHOLOGIE

    IV. LES PSEUDO-SOLUTIONS

    V. QUELQUES NOTIONS DE PHILO ET DE PSYCHO

    VI. LES SOLUTIONS PROPOSEES

    VII. LA DESTINEE ET LE DETERMINISME

    I. INTRODUCTION

    Une remarque pralable s'impose : on ne peut pas dissocier le temps de l'espace, aussi bien en physiquequ'en psychologie, puisque l'existant suppose de l'espace (des choses) et du temps (du changement).

    Pour essayer de rendre clair un expos difficile et trop bref, je propose de le symboliser par un circuitcyberntique (schma 1) que j'expliciterai au fur et mesure. Chaque quadrant correspond un champ d'tudesscientifiques : I : LA REALITE OBJECTIVE. C'est le domaine de l'observation physique et biologique ; II : LA REALITE SUBJECTIVE. C'est le domaine o fonctionne la raison, o l'esprit agence. C'est ce qu'explore lapsychologie exprimentale et partir de quoi travaille presque exclusivement la philosophie occidentale ; III : L'IMAGINAIRE SUBJECTIF. C'est le domaine des reprsentations, des images, du dsir. C'est le champ privilgide la psychanalyse et de la psychosociologie de l'imaginaire au sens large (Bachelard, Carroll, Lvi-Strauss,Borges, etc.) ;

  • 2 IV : L'IMAGINAIRE OBJECTIF. Ce terme, qui peut choquer de prime abord, dsigne le domaine de lapsychosociologie dynamique (conduites objectives), de la pragmatique linguistique (actes d'nonciation), del'thique ou de l'art (actualisations de valeurs).

    [Grosso modo, les champs I et II contiennent des variations d'tats qu'on cherche dcrire et prdire. Leschamps III et IV contiennent des variations de tendances qu'on cherche comprendre et expliquer.]

    Ces quatre champs sont isols dans l'enseignement et la recherche. Je vous propose d'tudier leurs

    corrlations par des approches transdisciplinaires1. Mais pour bien me faire comprendre, je dois au pralable diredeux mots d'une logique de la signification que j'utiliserai (qui est un cocktail maison de Lao-tseu, Hegel etLupasco).

    *

    Dans la logique habituelle, dite du tiers exclu, quand une affirmation est vraie, son contraire est faux (iln'y a pas de tierce solution : si un nombre est pair, il ne peut tre impair). La runion d'une classe -par exempleles nombres pairs- et d'un de ses contraires possibles ou "ngat" -les impairs- constitue un univers de discours -ici, les nombres entiers naturels-. Ainsi, dans ce cadre et seulement dans ce cadre, la ngation d'un nombre pairest un nombre impair ; classe et ngat sont dits alors complmentaires. Considrons maintenant un espace

  • 3constitu seulement d'un vase et d'une table. Selon cette logique, la ngation du vase (not V, V' ou encore Vqu'on nonce non-V, anti-V ou V ngatif) est alors l'quivalent de la table ; le non-tre est un vide dfini par cequi l'entoure, "c'est l'infini moins l'tre " disait Hegel. Si l'tre est ce qui est objectif, on dira que le vase subjectif(V') est l'quivalent de la table objective (T) -ce qui parat assez trange, mais le paratra moins dans la suite del'expos. Envisageons maintenant des faits temporels : le ngat d'une action (cause dterminant un effetultrieur) peut tre un dsir (moyen dtermin par une fin ultrieure) ; le ngat d'une perception (effet) peut treun concept (fin).

    La logique est cense tudier les rgles auxquelles la pense doit obir pour tre en accord avec elle-mme. La logique moderne de rfrence, algbrise, obit au tiers exclu et opre dductivement. On peuthonntement s'interroger sur sa pertinence gnrale puisque la pense est galement inductive, qu'une vritpeut tre contradictoire ou contingente, et que ses applications se limitent des domaines trs restreints ou trslmentaires, comme l'informatique : son formalisme s'avre en effet inadquat au langage ordinaire, l'exprience vcue et mme l'ensemble des mathmatiques (par exemple la topologie).

    D'o la ncessit d'envisager une logique du tiers inclus, moins puissante mais certainement beaucoupplus gnrale. La logique complmentaire que je propose entend oprer dialectiquement sur des significations.Ainsi le signifiant linguistique "vase" (V), perception phontique, a pour signifi V', pour concept (subjectif),tous les emplois (objectifs) de ce mot dans la langue, autrement dit le contexte linguistique qui l'entoure (lescauses virtuelles "T"). De mme, l'objet "vase" a pour signifi non linguistique tous ses emplois matriels dansnotre univers objectif. Il faut donc distinguer dans le signifi ce qui est statique et subjectif (le concept V') de cequi est dynamique et objectif (le contexte pratique Ti).

    Dans cette perspective, la signification est le lien complmentariste, structur, affectivement assimil quiunit signifiant et signifi. Elle n'est donc pas un lien anonyme entre une forme et un usage ; elle est quelquechose de vivant dont un individu fait paradoxalement cohabiter l'tre (une information) et le non-tre (uneintention). Le principe mtaphysique de cette complmentarit n'est donc plus le Logos (la Rvlation, la Loi)mais le "Pathos" (l'affectivit personnelle) ; autrement dit, aucune parole, aucun raisonnement classique, aucunfait objectif ou subjectif ne peut y avoir un caractre absolu, transcendant.

    Lorsque les relations de signification cessent, il n'y a plus que des objets "en soi" et des ides "en soi". LeMoi tant supprim, on fait alors de la science classique ; et de mme que les objets macroscopiques peuventtre ramens une combinaison de particules lmentaires, de mme on peut considrer avec les structuralistesque les ides rsultent d'une combinaison de smes (ou archtypes).

    [Nous appliquons tous le `principe du tiers exclu la ralit en rduisant l'alatoire, le continu, lemobile de l'inerte, de l'objectal. Pour raisonner en effet, il est obligatoire de spatialiser, de digitaliser, dequantifier ... mme soi-mme. Le vcu cependant est irrductible au rationnel parce qu'il relve de lasignification. Un symbole par exemple, qu'il soit ou non conventionnel, peut tre ici en tant qu'objet sonore ouvisuel ; mais il est certainement aussi ailleurs en tant que reprsentant d'un signifi. Autrement dit, leraisonnement complmentariste n'est pas dissociable d'une morale ou d'une esthtique : plutt que de logique, ilfaudrait parler d'une "pathique".]

    D'autre part, puisque l'affectivit (le plaisir ou la souffrance, dont Lupasco disait que, dans notreexprience gnrale, c'tait la seule chose qui ne pouvait se dfinir "en fonction de"), puisque l'affectivit doncest le principe ontologique de toute signification, il importe pour la suite de cet expos transdisciplinaire d'endonner ds prsent une formulation physicaliste. On peut dire que l'affectivit est un effort chaotique, del'nergie pure, du "travail en soi", l'nergie physique classique tant alors du travail en cours actuel de ralisation(qu'on opposera au travail potentiel de l'imagination).

    Enfin, il importe de souligner l'existence d'une hirarchie des significations : un tat affectif peut setraduire par une impulsion ou une sensation, des sensations par une perception d'objet, tel objet type constituerun indice, l'indice servir de signe conventionnel pour communiquer, ce signe devenir purement logique (abstrait)pour faciliter le raisonnement. Mais, chaque niveau, des contradictions peuvent surgir qui crent un conflitmotionnel. Ainsi, dans ma logique complmentariste, les notions d'objet ou d'ide "en soi" ne sont pluspertinentes ; il n'y a que des signifis et des signifiants, en relation statique et/ou dynamique.

    *Contrairement aux apparences, un lecteur peu familiaris avec la logique habituelle ou les sciences

    exactes est mieux arm que le scientifique ordinaire pour suivre cet expos spculatif sur le fonctionnement dessignifications puisque, prcisment, son mode de pense est intuitif, global et analogique, i.e. affectif.

    [Mon ambition, thorique, est de montrer d'une part que les modles actuels de physique, a priori valables pourle seul quadrant I, s'appliquent en fait galement aux trois autres, et d'autre part, complmentairement, que lesphnomnes dits paranormaux (ou "psi") cassent totalement la reprsentation occidentale classique d'un monderationalisable et prdictible. Ce modle, d'origine empirique, dbouche sur une ontologie centre surl'affectivit et le Moi. Il vise expliciter le lien entre ralit et rve, i.e. en dfinitive la nature de la destine.]

  • 4II. LES PROBLEMES SOULEVES PAR LA PHYSIQUE MODERNE

    Au dbut du XXe sicle, la physique a compltement boulevers notre conception du monde2 : laphysique quantique d'une part, qui remettait en cause la distinction objet/sujet, et la relativit restreinte (propreaux mouvements uniformes) de l'autre, incompatible avec la prcdente, qui rendait espace et tempsindissociables, masse et nergie quivalentes ; la relativit gnrale ensuite (propre aux acclrations uniformes),qui affirmait la stricte quivalence de la gravit (l'attraction) et de l'acclration, ce qui entrane une courburelocale oblige de l'espace-temps ; l'expansion de l'univers enfin, dont la topologie gnrale reste toujoursproblmatique.

    A. L'ANTIMATIERE

    En 1929, Dirac baucha une thorie conciliant les deux premiers modles : la physique quantiquerelativiste.

    Constatant qu'on pouvait, dans les quations de la relativit restreinte, affecter du signe moins la masse(et donc l'nergie), il mit l'hypothse qu'il devait exister de l'antimatire. Il supposa que la ralit antimatrielletait entirement remplie de particules ordinaires bien qu'on ne puisse les observer. Cependant, bien qu'on nepuisse les observer, on pouvait agir sur elles. En percutant trs violemment de la matire (avec un rayongamma), on peut en effet dloger une particule ordinaire de l'antimatire, cette "ralit subjective" (quadrant IIdu schma). On voit alors (quadrant I) non seulement cette particule, mais aussi l'image matrielle (appeleantiparticule) du trou ainsi cr.

    [Explicitons la validit de l'emploi en physique de ce terme de "ralit subjective" dont nous avions dit enintroduction qu'il concernait surtout la psychologie exprimentale et la philosophie occidentale. Ce quiappartient cette ralit prsente toutes les caractristiques de la ralit objective sauf une : on ne peutl'observer. Or, si ce n'est pas observable, ce n'est pas objectif ; et si ce n'est pas objectif, c'est subjectif (logiquesdu tiers exclu).]

    Selon Dirac, l'antimatire est de la ralit subjective (inobservable), alors que les antiparticules,puisqu'observes, sont de la ralit objective.

    [On me reproche d'utiliser, avec l'ocan d'antimatire de Dirac, une mtaphore dpasse. Je ne partage pas dutout cet avis puisque je me reprsente cet ocan comme le meilleur univers conceptuel pour comprendre lasignification des antiparticules. Ensuite, le "vide quantique", mtaphore actuellement de mode, n'en est quel'extension. Enfin cette image d'ocan a une forte dnotation mythique, la fois spatiale et temporelle : ocande chaleur du big bang, mer de Fermi pour les sous-particules (les "partons"), soupe primitive en biologie,visions ocaniques, sentiment ocanique, etc., etc.Pour conserver l'invariance des lois, les physiciens courent toujours aprs plus de symtrie formelle, cet ersatzde complmentarit. Ils s'attaquent maintenant l'unification de la cosmologie (relativit gnrale) et de laphysique des particules, une thorie du Tout : ils n'y parviendront pas tant qu'ils n'auront pas de modlesmantique de leur propre manire de penser. ]

    Si l'on admet de plus qu'une particule (dont le comportement individuel est toujours imprvisible) est untout "organique" (dou d'intentionnalit, de conscience, comme nous essaierons de le justifier plus loin), alors -comme tout organisme - une particule a une valeur symbolique et affective en soi (et pas seulement contingente,selon l'observateur). Une particule tant un signifiant dans ma logique complmentariste, son antiparticule estson "antisignifiant". Or, quand une particule rencontre son antiparticule, il y a annihilation, explosion, retour une indiffrenciation primitive - qui est, dans ma perspective animiste, une manifestation de l'affectivit. Quandun signifiant rencontre son antisignifiant, il y a conflit, motion, affect.

    Ainsi, tant que le cheval n'tait pas domestiqu, signifiant et antisignifiant ne se rencontraient pas. Toutedomestication commence bien par un conflit (et peut se terminer en signification, aspect dont je traiteraiultrieurement). Toujours l'chelle macroscopique mais cette fois symboliquement, c'est un conflit similaireque produit une vritable uvre d'art, subversive par dfinition, dans le cerveau de celui qui tente de l'assimileret qui constate que ses plus profondes certitudes s'croulent ce contact. Pensez par exemple Lautramont,Cline ou Picasso.

    [Autrement dit, l'antiparticule serait la ngation anarchiste d'une micro-ide reue. L'uvre cratrice (antiparticule) est la ngation anarchiste en puissance ( retour possible l'indiffrenciation nergtique) d'uneide reue ( particule). Le signe indique ici une connaturalit, une quivalence structurelle de signification(et pas seulement une relation analogique, une mtaphore ou mme une homologie). Ainsi, en revisitant partir de la microphysique les catgories d'objet et de sujet, on repre des fonctionnementsidentiques, mais hirarchiquement diffrents, en microphysique, en linguistique et en psychosociologie de l'art.]

  • 5La thorie de Dirac fut vrifie : on a dcouvert et observ toutes les antiparticules des particulesordinaires. De plus, toujours d'aprs Dirac, les particules remontent le temps dans la "ralit subjective",affirmation qui parut parfaitement fantaisiste l'poque (alors qu'elle n'tait que logique : cf. l'introduction). Ilfaut savoir par ailleurs que les calculs sont extrmement ardus en physique quantique relativiste. Or, en 1949,Feynman propose un modle de calcul trs simple et qui implique que les particules remontent parfois le temps(d'o des trajets en zigzag : schma 2.a).

  • 6Une dcouverte ultrieure, la non-conservation de la symtrie PC relativement au thorme d'invarianceCPT, a permis de nuancer cette thorie. En effet, les physiciens considraient auparavant que, pour lamicrophysique, il n'y avait vraisemblablement pas - en thorie - d'irrversibilit du temps. On sait maintenantque, comme en macrophysique (entropie/nguentropie), le temps positif, objectif (du pass vers le futur,"causal") et le temps ngatif, subjectif (du futur vers le pass, "final") ne sont pas symtriques.

    [Le formalisme de la mcanique quantique implique que les lois restent les mmes quand on inverse la fois lesdirections de l'espace (P), celle du temps (T) et les conjugaisons de charge (C). Dans le diagramme deFeynman, on voit que l'apparition d'une particule quivaut la disparition de son antiparticule. Le thormeCPT revient poser que la raction observe X Y + Z peut s'crire X + Y' Z ou encore Y' + Z' X'. De faon gnrale, l'usage d'une logique complmentariste (le recours un principe de symtrie) a permis auxphysiciens d'aboutir une thorie quanto-relativiste satisfaisante. Mais ils n'en sont pas encore au stadetopologique et personnaliste de la signification, dont la modlisation implique un prsent absolu. Dans un telcadre, l'antimatire n'est pas observable puisqu'elle va du prsent vers le pass ; mais un trou d'antimatire l'estpuisque son image pleine (ou "antiparticule") va alors du futur vers le prsent.(... ) Les physiciens contemporains ont abandonn l'ide de Dirac d'une ralit subjective pleine dont les trousse manifesteraient par des antiparticules. J'ai repris cette ide dans mon modle en faisant de la subjectivit ledomaine plein des intentions, monde dont la forme spatio-temporelle choisie (par le "Soi") dtermine la naturedes intentions, l'inverse du monde extrieur o c'est la matire ("Autrui") qui dtermine l'espace-temps. Parprincipe, j'utilise des modles physiques les interprtations, mme caduques ou minoritaires, qui me paraissentde bonnes approximations de la mtaphysique empirique que je dveloppe dans cet article.(...) La ralit subjective, c'est selon moi un savoir fond sur la conscience de son ignorance. Plus une tte estvide, plus elle se croit pleine.]

    *

    On remarquera que la nguentropie (accroissement local d'ordre) se manifeste trs visiblement dans lacomplexification de l'univers et que toutes les thories correspondantes ne permettent que de la rtrodiction(cosmologie classique, darwinisme, histoire et psychologie gntique). [Il ne peut en tre autrement : ces sciences ne peuvent pas faire de prdictions puisque la nguentropie renvoie un principe d'ordre (de convergence) exprimant une fonction cratrice dont les rsultats ne peuvent, dans ledtail, tre prvisibles pour autrui. On ne peut que constater localement de la complexification. Toutes lessciences historiques donc dgagent du sens (en rtrodisant), mais s'avrent incapables de prdire le moindrefait objectif. La situation est exactement inverse pour les sciences physiques ne traitant que de systmes clos,inertes en puissance, dj morts.]

    Dans le monde objectif (quadrants IV et I), la dtermination va du pass vers le futur (c'est la causalit) ;seules des informations sont transmises (objectivement, nous cherchons informer le monde et en treinform) ; ces informations n'ont pas de sens en tant que telles ; enfin le bilan global observ (quadrant I) esttoujours un accroissement de dsordre (entropie). Dans le monde subjectif au contraire, les buts que l'on sedonne (l'avenir : quadrant II) engendrent des moyens adquats (les souvenirs : quadrant III) ; seules desintentions sont donc transmises et c'est le Moi imaginaire qui les convertit librement en multiples symbolesimags (les dsirs) et/ou moteurs (les actions). Une action est en soi nguentropique (quadrant IV) et vaengendrer localement de l'ordre (quadrant I).

    [D'o la grappe de notions : finalit, intentionnalit, subjectivit, quoi on est fond d'associer celle denguentropie si on gnralise par induction son exprience personnelle de crativit tous les corps quiconstituent l'univers. Autrement dit, la finalit est ici conue, empiriquement et a priori, comme intrieure,intrinsque, immanente et non comme extrinsque, transcendantale, dmiurgique.On voit ainsi que finalit physique (antimatire remontant le temps) finalit mentale (intentionnalit, valeurs,dsir, subjectivit).]

    Notons galement qu'un temps invers associ des informations est un temps absurde (pensez un filmqu'on projette l'envers). Si l'on pouvait par exemple voir de l'antimatire mouvante se rapprocher de nous,notre jugement smantique, notre interprtation de ce mouvement seraient totalement errons puisquel'antimatire, remontant le temps, s'loignerait de nous.

    Voici, pour dmonstration, un passage de Lewis Carroll : Alice sciait avec ardeur le gteau. "C'estexasprant, finit-elle par dire. J'en ai dj dcoup plusieurs tranches, mais elles se recollent aussitt ! - C'est quevous ne savez pas vous y prendre avec les gteaux du miroir, constata la Licorne. Faites-le donc circuler d'abordet dcoupez-le ensuite". Cela semblait absurde; mais Alice, obissante, fit circuler le plat. Le gteau alors, de lui-mme, se divisa en trois morceaux. Et tandis qu'elle regagnait sa place avec le plat vide, le Lion lui dit: "Aprsent, dcoupez-le" 3.

  • 7[On sait que Carroll tait mathmaticien et logicien. Cette anecdote dmontre par l'absurde qu'un temps inversne peut tre associ qu' une transmission d'intentions. Le temps physique invers est donc ncessairement final,au sens psychologique et philosophique.Rsum : voir schma 3.]

    B. COMPLEXITE ET INERTIE

    Venons-en maintenant la complexit (i.e. au bilan nguentropique). On sait qu'un organisme vivant estcompos d'organes, les organes de cellules, les cellules de molcules, les molcules d'atomes et les atomes departicules.

    L'aspect intressant d'une structure, en physique lmentaire, est qu'elle pse ngativement : deux atomesisols d'oxygne par exemple psent plus lourd que la molcule correspondante. On peut considrer, dans laperspective animiste qui est la ntre, que ce dfaut de masse est l'expression quantitative de sa qualit destructure : ce dfaut de masse, c'est la fois son savoir et sa "ferme intention".

    Explicitons cet aphorisme. En physique et en chimie, l'nergie de liaison est, au signe prs, gale audgagement de chaleur (qu'il s'agisse d'agitation locale ou de rayonnement photonique) produite par la raction :un systme lmentaire se cre ou se complexifie en vacuant son entropie interne. Le gain d'ordre interne sepaie d'un dsordre externe.

    L'animisme, au niveau des particules, peut se prvaloir de l'incertitude quantique. Mais la question pourl'instant n'est pas tant de savoir dans quelle mesure les ractions physico-chimiques sont dues une conjoncture

  • 8fortuite, une finalit extrinsque ou une finalit intrinsque que d'interprter la complexification en termescomplmentaristes. Les liaisons propres d'une structure relle constituent sa signification : la fois intentionarrte pour elle-mme (subjectivement) et forme stable pour autrui (objectivement). Le dfaut de masse est lafois trace et prmisse d'un travail improbable.

    Si maintenant l'on compare les nergies de liaison des systmes stables selon leur niveau de complexit,on constate qu'elles sont d'autant plus faibles qu'on monte dans la hirarchie. Pour une biomolcule, le dfaut demasse peut tre d'un trillionime ; pour une molcule, d'un milliardime ; pour un atome, d'un cent millionime ;pour un noyau, d'un centime ; pour un nuclon, le rapport est presque gal l'unit. En termes d'volution, celasignifie que les systmes les plus simples et les plus stables peuvent servir de "briques" pour la construction d'unmtasystme, condition qu'un dynamisme crateur focalise l'nergie ambiante et excite (dstabilise) cessystmes. Autrement dit, plus l'on monte dans la hirarchie, moins les systmes sont stables ; diffrentes forcesde liaison, en effet, entrent en concurrence. En s'cartant de l'quilibre, les systmes deviennent de plus en plusimprobables. Et ils ne maintiennent leur "mtastabilit" (causalement et/ou finalement), ventuellement secomplexifient, que grce un flux permanent d'entropie, source d'nergie mais galement facteur possible dedestruction : c'est ce qu'on appelle les structures dissipatives. Si l'on considre le systme le plus volu,l'homme, il est bien vident que l'quilibre mental ou corporel se situe mi-chemin entre immobilisme etactivisme.

    A l'autre extrme de l'arbre volutif, on a donc les noyaux atomiques, les nuclons, les quarks, toutes lesparticules lmentaires massives (les "fermions") qui constituent notre chelle la base mme de la ralitobjective et qu'on caractrise par leur masse au repos. L'aspect fondamental de la ralit matrielle, c'est soninertie.

    [D'un point de vue physique, il faut d'abord bien distinguer la masse objective ou "positive" (d'inertie, aurepos) du poids (qui dpend des masses environnantes, de l'attraction gravitationnelle) ; le poids est une massesoumise une acclration constante (m = P : g); ainsi une boule de fer est plus facile soulever sur la Luneque sur la Terre (c'est le poids), mais ncessite le mme effort, le mme travail, pour la faire rouler (c'est lamasse). Le dfaut de masse est une proprit en soi de toute structure ; et il est d'autant plus grand, pour descomposs de mme formule brute, que la structure est complexe. Autrement dit, une structure chappe d'autantplus au monde environnant ( la gravitation) qu'elle est complexe.Ceci prcis, on peut considrer qu'une structure rsulte d'une perte de masse objective, autrement dit d'un gainde masse subjective, d'un accroissement d'nergie interne. Or l'nergie subjective est prcisment ce qui permetla transmission d'intentions. Le dfaut de masse mesure donc le degr de libert d'une structure. Ceci justifiequ'on dcrive une structure relle en termes psychiques : c'est un Moi (rel) capable de s'autodterminer, dedterminer peu peu un ensemble archtypique cohrent, i.e. un Soi intrieur. Assimiler de l'information, c'estla convertir en intentions ; le Moi rel (cf. schma 1) a ainsi la capacit d'inverser la polarit de l'nergie, detransmuer la matire en antimatire, i.e. d'incurver l'espace-temps. L'inertie, dans mon modle, signifiel'quilibre passif entre le Moi rel et Autrui, le monde extrieur gravifique (m = P : g) tandis que le dfaut demasse reprsente l'quilibre actif avec le monde intrieur, le Soi librateur (m' = P' : g'). Ainsi le Moi rel, vitesse nulle absolue, peut-il tre considr comme un "travail arrt", de l'affectivit fixe (/E/ = /m/c2) ensignifications, i.e. la fois objectivement et subjectivement.Pour situer intuitivement toutes ces notions dans le modle gnral ici prsent, tout en anticipant sur lesexplications qui suivront, le lecteur peut se reprsenter le cercle du schma 1 comme la trajectoire d'un pendulecirculaire, dans le sens des aiguilles d'une montre, tel qu'on peut en voir, muni d'une cabine, dans des ftesforaines : arrive en haut, la cabine s'immobilise un instant (v = 0), puis redescend, atteint en bas une vitessemaximale et remonte. Un tour complet peut reprsenter une "transition virtuelle" en physique des particules, unstimulus-rponse, un projet accompli, un nycthmre, un cycle de saisons, une vie et mme l'histoire del'univers. Dans ce dernier cas, les Moi rel et imaginaire d'un individu particulier symbolisent, par inversion,les ples de l'univers.]

    Les tres vivants sont les structures les plus complexes connues et se caractrisent l'vidence par leurfinalisme intrinsque (contrle global, homostasie). Un outil possde une finalit extrinsque potentielle ; mais,si complexe serait-il, il n'aurait toujours qu'une logique (des usages techniques) et jamais une morale (desdevoirs qu'il s'imposerait), comparable en tout cas celle d'un humain. Le cblage d'un ordinateur prcde sonfonctionnement ; la fonction de la pense, au contraire, est de cbler le chaos.

    La distinction cependant entre finalits intrinsque et extrinsque est de moins en moins nette mesurequ'on descend l'chelle du vivant. Un organisme suprieur peut tre malade, un organisme infrieur n'est quevivant (et bien portant) ou mort. L'organisme le plus infrieur, le virus, peut tre mme vivant et mort, enalternance (certains peuvent en effet rester latents des millions d'annes). On m'accordera sans autre procs queles structures en de du virus, qu'elles soient ou non fabriques par l'homme, sont simultanment mortes etvivantes. Un exemple nous en est fourni par l'cole thermodynamique de Prigogine avec ses structures"dissipatives", persistant loin de l'quilibre, cohrentes, imprvisibles, o le tout dtermine les parties et dont lamodlisation implique un temps ("le devenir") irrductible l'espace.

    [En rsum : on a fait tout d'abord une distinction, cruciale, entre ralits objective et subjective. On a ensuitemontr que l'inversion du temps articule significativement ces ralits, la direction futur/pass tant par nature

  • 9intentionnelle et la direction pass/futur informative. On a enfin introduit les notions de complexit, dehirarchie organique, de finalit intrinsque et associ intimement la notion d'inertie celle de ralit. Quand on cherche comprendre en profondeur certains modles physiques, on est ainsi conduit graduellement aborder des notions, comme le sujet ou l'intentionnalit, qui semblaient ne relever que des sciences humaineset que les physiciens utilisent nanmoins, mais sans vouloir les expliciter. On voit donc dj que mon modletransdisciplinaire est une hermneutique pistmologique, qui cherche relier sous forme de significations desnotions scientifiques a priori htrognes. On verra, quand nous aborderons l'imaginaire et le psi, que cemodle est aussi une heuristique, qui trouve d'abord et cherche ensuite.Rsum : schma 4.]

    C. LES TACHYONS4

    Dans les annes 60, divers physiciens, dont Feinberg, supposent l'existence de tachyons, particules plusrapides que la lumire (et symtriques des "bradyons": lent en grec), toujours en mouvement et dont la masse estimaginaire (racine de -1). [Il n'existe pas de nombres i qui, levs une puissance paire, donnent un rsultat ngatif (+ 32 ou - 32 = + 9).L'appellation courante de nombres "rels", rationnels (comme 2) ou irrationnels (comme ), et de nombres"imaginaires" i, est parfaitement justifie si l'on considre la fois - en bon psychanalyste - la manire dont ilsont t invents, la culture de l'poque et l'usage qu'en a fait la physique. Le nombre rationnel symbolise

  • 10

    naturellement des objets rels inertes, les nombres irrationnels des concepts (imprvisibles, inobservables) et lesnombres imaginaires - ou "impossibles" comme les appelait Cardan, leur inventeur - des tendances. Onpourrait galement tablir la valeur symbolique de toutes les oprations mathmatiques. Une mtaphysiquecohrente ne saurait en effet ignorer les succs de ce langage dans la description de l'univers. Cette approche"archtypique" est videmment rejete par tous les formalistes. Dans mon modle, et indpendamment de toute arithmtique, les couples rel/imaginaire, espace/temps ouobjectif/subjectif sont constitus de notions incompatibles entre elles et pourtant susceptibles d'entrer enrelation significative. Or les mathmaticiens ont conu des nombres complexes qui associent rels etimaginaires, et qu'on ne peut visualiser, "comprendre" que topologiquement et dynamiquement ; partir d'eux,l'algbre s'est considrablement simplifie et a spectaculairement progress.Mon modle, circulaire et orient, se donne entre autres pour but d'attribuer aux oprations mathmatiques etaux quations physiques ou biologiques des valeurs de signification prcises. C'est une forme d'sotrisme, laseule d'ailleurs, que je revendique. Contrairement une critique qui m'a plusieurs fois t faite, je ne pars pasde modles mathmatiques ou physiques pour dlirer, j'entends -trs rationnellement- aboutir ces modles, ensuivant le fil d'Ariane d'une mtaphysique empirique (centre sur l'individu) qui permette de clore des bouclesde signification. C'est un pari de trs longue haleine dont je ne prtends tre que l'initiateur. En tant que thoriede la signification, le modle cyberntique du schma 1 (que j'ai baptis "circuit psi") est applicable n'importequoi.(...) Au fond si j'attache tant d'importance aux mathmatiques, c'est que ce langage, universel et premier, s'estconstruit (bien avant que l'homme le formalise) sur le chaos primitif cosmique. Le fondement des mathmatiquesreste mystrieux parce que qu'il est l'affectivit elle-mme.]

    Contrairement l'antimatire (au sens toujours de Dirac), les physiciens ne sont jamais parvenus mettreindirectement les tachyons en vidence. Ceux-ci pouvant se dplacer plus vite que la lumire, certainsobservateurs pourraient l aussi constater une inversion de causalit (schma 5).

    [La relation de cause effet demande toujours du temps puisque la vitesse de la lumire est finie. Or, avec destachyons, on pourrait observer un effet avant sa cause et croire ainsi, tort, que c'est cet effet qui a produitcette cause.

  • 11

    (...) Si l'on n'a pu "objectiver" les tachyons (comme on avait pu objectiver les trous d'antimatire avec lesantiparticules), il n'empche que la thorie actuelle des champs quantiques implique l'existence de particulesd'interaction tachyoniques (cf. schma 2), dites virtuelles, dont tous les physiciens se servent dsormais dansleurs descriptions quantitatives.]

    Enfin, si les tachyons existent, leurs antiparticules doivent aussi exister, qui renvoient une antimatire ,subjective et remontant le temps (quadrant III).

    [En thorie, un photon peut donner deux bradyons ou deux tachyons de charge oppose ; et inversement.

  • 12

    Selon la relativit quantique, un observateur (ici/maintenant) ne peut voir que des vnements bradyoniquespasss ; mais il pourrait voir des vnements tachyoniques passs ou futurs. D'autre part, la modlisation

  • 13

    formelle actuelle tablit une stricte quivalence entre particules et antiparticules. Les physiciens vacuent ainsilocalement l'ide prodigieuse de Dirac d'une matire inobservable par nature et confient la cosmologie le soind'expliquer pourquoi on observe globalement plus de particules que d'antiparticules (c'est pourquoi le termeactuel d'antimatire ne dsigne plus, tort, que l'ensemble des antiparticules); les physiciens escamotent deplus cette vidence premire, "vcue", selon laquelle le temps et l'espace sont orients (schma 6.b). Onconstate ainsi que la civilisation occidentale, comme les sourds-muets , privilgie en pratique l'ordre spatial (leslois), et qu'elle compense cela par une divinisation du temps (le Logos); alors que l'Orient, comme les aveuglesde naissance, privilgie l'ordre temporel (les rites) tout en divinisant l'immanence (le polythisme).Mon modle, comme nous le verrons au fur et mesure, est fond sur le vcu personnel : il tient compte del'orientation spatio-temporelle et rend compte du fait qu'on observe plus de particules que d'antiparticules. Sonoriginalit tient, entre autres, une interprtation tachyonique de l'action et au caractre globalementunidimensionnel de l'espace-temps, en boucle ferme (cf. schmas 1 et 6.c).]

    Notons que la logique classique du tiers exclu est, pour un corps macroscopique bradyonique, valabledans l'espace (si tel objet est l, il ne peut pas tre ailleurs dans l'espace) et, pour un corps macroscopiquetachyonique, valable dans le temps (si telle tendance est l, elle ne peut tre ailleurs dans le temps). [Un corps bradyonique (qu'il soit objectif ou subjectif) ne peut occuper deux endroits diffrents un instantdonn, mais il peut varier d'emplacement spatial d'un instant l'autre. Un corps tachyonique ne peut occuperdeux moments diffrents en un lieu donn, mais il peut varier d'emplacement temporel d'un lieu l'autre.Autrement dit, un corps rel, parce que sa vitesse peut tre nulle ( et c'est l'inertie qui dfinit ce corps en tantque rel), peut occuper plusieurs moments successifs au mme endroit ; tandis qu'un corps imaginaire (toujoursen mouvement), parce que sa vitesse peut tre infinie (et c'est l'anti-inertie, ou "masse d'impulsion", qui dfinitce corps en tant qu'imaginaire), peut occuper plusieurs endroits contigus au mme moment.]

    En dfinitive, selon moi, les paradoxes auxquels la logique du tiers exclu se heurte dans ses applicationstiennent essentiellement l'incapacit des logiciens effectuer la distinction prcdente, la volont trsoccidentale de rduire l'imaginaire une simple pathologie du rel. La logique de l'imaginaire n'est pas absurde,mais simplement l'inverse spatio-temporel de la logique du rel. Pour raisonner et agir adquatement sur lemonde, il faut ncessairement matriser dialectiquement ces deux logiques. Et c'est dans cette matrise quersident la fois le Vrai, le Bien et le Beau.

    [Rsum : schma 7.]

  • 14

    D. PRINCIPE ANTHROPIQUE ET UNIVERS PARALLELES

    L'tude de "l'univers" (plus prcisment : de la ralit objective) a montr que sa complexificationprogressive ne pouvait s'expliquer par la simple addition causalit + hasard. De trs nombreuses "concidences"ponctuent l'histoire de l'univers observ, sans le plus petit dbut d'explication rationnelle. Certains physiciens ontdonc soutenu, dans les annes 70, un principe dit "anthropique" qui est en fait une simple resuce du finalismeextrinsque, i.e. transcendantal. C'est Dieu, et l'homme son image, qui sont ontologiquement premiers et quiimposent prsentement l'univers, par agencement de son origine (par rtroaction sur son plus lointain pass),des conditions initiales improbables compatibles avec l'existence prsente de l'homme5. C'est le clbreHawking, entre autres, qui a dfendu cette thse.

    D'autres physiciens, matrialistes mais convenant que le hasard ne peut monter ses propres capteurs, ontcontourn le problme : "Il est vrai que nous existons dans un monde compatible avec notre existence, mais ilexisterait une infinit d'univers parallles strictement dtermins (dtermination mcanique stipule par laphysique quantique) comme l'est le ntre".

    Cette hypothse visait initialement expliquer une nigme de la physique quantique : la rduction de lafonction d'onde (appele aussi "fonction psi"). Tant qu'une particule n'est pas observe, elle s'tale dans l'espace-temps (pour la pense de l'observateur), avec des probabilits plus ou moins grandes selon le moment etl'endroit ; elle semble soluble (c'est prcisment son aspect d'onde). Autrement dit, une particule observe,"rduite" (trace) se comporte comme une onde tant qu'elle n'est pas observe (prmisse) ; certains physiciens ontdonc propos le terme plus adquat de "quanton". Le problme de la rduction de la fonction d'onde estgalement tudi dans le paradoxe d'Einstein-Podolsky-Rosen (EPR), dont nous allons maintenant parler.

    E. LE PARADOXE EPR

    Einstein, tenant du dualisme (la ralit objective spare du reste), contestait la gnralit de la physiquequantique, dfendue par N. Bohr, tenant du complmentarisme (objet/sujet, rel/imaginaire, causal/final, etc.).

    Einstein proposa vers 1930 une exprience, le paradoxe EPR, qu'on ne put mener bien que cinquanteans plus tard. Si, par un certain dispositif exprimental, on gnre deux quantons corrls (complmentaires lamanire d'un pile et face), la physique quantique affirme que ces quantons sont indiffrencis ( la fois pile etface) tant qu'on ne les observe pas. Et ds qu'on observe l'tat de l'un, on connat automatiquement l'tat del'autre quelle que soit la distance.

    [On lit sur l'appareil de mesure un certain rsultat macroscopique, en tiers exclu : pile ou face. Si c'est pile, lathorie quantique affirme que l'autre quanton est maintenant virtuellement face, alors qu'ils taient tous deuxindtermins avant la lecture. Cette dtermination apparemment instantane est-elle possible ? ]

    Pour Einstein, cette corrlation de deux particules apparat comme l'quivalent d'une tlpathie, unetransmission instantane, incompatible avec la causalit et donc irrecevable. [La causalit (une mission prcdela rception correspondante) suppose en effet un temps non nul de transmission de l'information entre deuxquantons, impos par la vitesse limite de la lumire et quel que soit l'observateur, selon la relativit restreinte.]Or l'exprience lui donna tort.

    [En rsum, les tachyons ont introduit l'ventualit qu'en sus de la ralit, la physique traite de l'imaginaire. Ds qu'on parle d'histoire, d'volution, il y a des relations instantanes, des concidences significatives. Ceproblme est ici constat et non rsolu. Ceci nous amne la parapsychologie, qui est au sens large l'tude desconcidences.Particule et onde, discontinu et continu, objet et sujet, rel et imaginaire, causal et final, information etintention, local et global, tous ces couples significatifs, ces "concidences", voquent chacun leur manire lefondement mtaphysique de la complmentarit.]

    III. PROBLEMES SOULEVES PAR LA PARAPSYCHOLOGIE6

    Vous avez tous entendu parler de la tlpathie et de la prmonition, reproduits par de bons mdiums enlaboratoire, c'est--dire conformment un dsir manifest et vrifis par une observation indpendante. Lehasard n'a rien faire dans ces vnements, bien qu'ils ne soient pas au sens objectiviste reproductibles - comme

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    n'importe quel vnement historique d'ailleurs. Ils relvent de la crativit, c'est--dire d'un finalismeintrinsque.

    Moins connues sont les psychocinses ou "PK", agencements directs de la ralit objective par la pense.En fait, on en trouve partout puisqu'une simple action volontaire relve de cette dfinition (une fin ultrieuredtermine des moyens prsents, que le "Moi imaginaire" - cf. schma 1 - actualise). On notera d'autre part qu'uneaction volontaire met en branle globalement et simultanment toute une partie du cerveau : une explicationcausale (transmission nerveuse locale, de proche en proche) ne saurait en rendre compte. Et, de toute faon, d'ovient l'impulsion initiale ?!? Gasparin qu'on critiquait parce qu'il ne fournissait pas d'explication physique sestables tournantes rpliquait : "Expliquez-moi comment je dplace volontairement ma main et je vous expliqueraicomment les tables se dplacent distance". Je soulignerai enfin l'aspect purement intentionnel de latransmission PK en rappelant l'effet placebo, dtermin par une croyance (faite de concepts et de dsirs, et quiexplique l'efficacit des mdecines parallles : homopathie, acupuncture, phytothrapie, etc.), ainsi que lesdermographies par suggestion, trs rpandues en France au XIXe sicle et qui intrigurent tant les mdecins del'poque. [Ainsi la somatisation - qu'elle soit physiologique, pathologique ou thrapeutique - est une modalitrelativement ordinaire de PK.]

    1. Mais il y a aussi des PK trs extraordinaires et donc rares. En science, on peut toujours mettre envidence des phnomnes rares en changeant d'chelle : c'est ce qu'a russi trs brillamment la physiquequantique, et aussi l'histoire ou la sociologie. Les dmographes nous disent que les socits ajustent toujours leurfcondit leur mortalit. Banal processus d'homostasie, me direz-vous. Mais aucun dmographe n'expliquel'accroissement spontan des naissances de garons aprs les guerres, phnomne toujours vrifi aussi loin queremontent les statistiques (depuis la Guerre de Scession)7. Aucun biologiste non plus, d'ailleurs, n'expliquel'homostasie.

    2. [On a bien sr cherch, et trouv, des explications biologiques : primiparit, ge de la mre, cart

    d'ge entre parents, facteurs gntiques, pidmies, etc. Mais ces facteurs se contredisent : voir les deux articlesde synthse cits en rfrence.

    3. La situation est exactement la mme pour l'orientation animale : facteurs physiques et rcepteursidoines s'empilent sans qu'on en voie la fin.]

    Plus tonnantes encore peuvent apparatre des expriences de rtro-PK (modification explicite du passobjectif), russies par des parapsychologues franais et amricains8 (schma 8) et qui s'apparentent laproblmatique EPR (rtroaction sur une cible alatoire), comme nous le verrons plus loin.

  • 16

    IV. LES PSEUDO-SOLUTIONS

    A. LA NEGATION ("La pire forme de crdulit", disait Jean Guitton)

    1. Les phnomnes paranormaux ne sont pas reproductibles, donc ils n'existent pas. Pur scientisme, quiidentifie science et reproductibilit, c'est--dire technique. Or toutes les sciences historiques (cosmique, biotique,humaine, sociale ou individuelle) tudient du non reproductible, i.e. du non prdictible. Ren Thom, le plusgrand pistmologue franais actuel, a propos la thorie topologique des "catastrophes" (des discontinuits) quine permet aucune prdiction et dont l'efficacit est purement descriptive9.

    [L'Establishment scientifique franais et sa basse-cour nient massivement le paranormal. Cartsianisme oblige! Mais renoncer l'impossible, au miracle, c'est se suicider la fois intellectuellement, moralement etartistiquement. Que ces dbiles continuent donc croire que les uvres de Shakespeare sont moins improbablesque les vnements psi...]

    2. Concernant l'antimatire et l'inversion temporelle, la plupart des physiciens considre qu'il s'agit l desimples commodits formelles, sans aucune correspondance "physique". L'argument peut leur tre retourn.Remarquer que lorsque Copernic a propos son modle hliocentrique, ses adversaires dclaraient que c'taitune reprsentation commode pour le calcul, mais fausse en ralit. Cette distinction n'a aucun senspistmologique : un systme intellectuel quelconque n'est pas fait pour tre compris mais pour fairecomprendre. Il est parfaitement justifi d'avoir une vision gocentrique dans la vie quotidienne. Non seulementparce que c'est la plus simple, mais surtout parce que c'est la plus utile : si l'on ne pensait pas de cette manire,on mourrait trs rapidement d'accident. [Pourquoi ? Lorsque le modle hliocentrique a structur la culture occidentale, les tres "antipodiques"angoissaient beaucoup le grand public. Car, si malgr notre corps (i.e. notre exprience homostatiqueacquise), nous niions absolument (en actes, et pas seulement en paroles) ces absolus vitaux que sont ladistinction haut/bas et la platitude de la Terre, l'accident mortel ne tarderait pas. C'est d'ailleurs prcisment cequi arrive dans certaines "crises de folie". L encore, on le voit, le critre de vrit, de raison est personnel,affectif.]

    Actuellement par contre, si l'on veut rendre simplement et seulement compte de l'ensemble desmouvements clestes que nous percevons avec nos instruments modernes, ce n'est plus l'hliocentrisme qui estvalable, mais l'expansion de l'univers. Tout est donc question d'chelle et de domaine d'efficacit.

    [Autrement dit, un modle de la ralit (quadrant II) n'est jamais "plus vrai" qu'un autre et possde, quel qu'ilsoit (mme farfelu), un certain pouvoir de libration, de "lvitation" par rapport la ralit objective. Si lesavoir (l'agencement conceptuel) est bien de l'ordre du rel (quadrant II), la vrit est de l'ordre de l'imaginaire(quadrant III) : c'est une valeur, un absolu qu'on vise et qu'on cherche matrialiser (quadrant IV puis I).Survivre, par exemple, consiste modifier localement et efficacement la ralit objective, ce qui suppose quel'on sache et veuille en tenir compte globalement.]

    3. De mme, les tachyons seraient de simples jeux d'criture ; car la logique (la causalit, le non paradoxal, ladduction, le "si... alors") doit l'emporter sur l'absurde, le non-sens (le "alors... si" carrollien et les paradoxesqu'il implique)10.

    4. Idem pour le principe anthropique et les univers parallles. Le pass n'est pas modifiable, donc la finalitest une illusion. J'attire votre attention sur le fait que ce refus a son exact quivalent dans les thoriesbiogntiques : toutes les universits du monde enseignent la vulgate darwinienne (mutation au hasard +slection naturelle) qui n'a pas la moindre preuve prdictive son actif et dont le schma thorique gratuit estexactement le mme que la thorie cosmologique traditionnelle (hasard + causalit). L'cole franaise debiologie, c'est son honneur, est pratiquement la seule au monde protester contre cet abus depuis plus de centans (Cunot, Ruyer, Grass, etc.)11. Le lamarckisme nanmoins, mais trs lentement, refait surface : certainesobservations rcentes (couronnes par le Nobel de Temin et de Baltimore) montrent en effet que l'acquis finitpar s'inscrire dans les gnes. Qui d'ailleurs, hormis les darwinistes et les moutons, pouvait en douter ?

    B. RECONNAISSANCE DES FAITS12 MAIS INTERPRETATIONS FAUSSES

  • 17

    Nous choisirons le cas du paradoxe EPR.

    1. La "tlpathie" entre photons est interprte comme une "action instantane de proche en proche" (sic) parl'cole rationaliste et matrialiste (Vigier, en France). Mais on rintroduit les fameuses variables caches localesqui, comme l'a bien dmontr B. d'Espagnat13, sont interdites depuis l'exprience EPR. De plus, selon larelativit restreinte, la simultanit n'a pas de caractre absolu et dpend de l'observateur.

  • 18

    [En science, quand on ne trouve pas de solution dterministe un problme, on introduit des paramtres, desvariables hypothtiques, "caches" - ceci pour retrouver un dterminisme. Les variables caches sont toujours"locales". Or l'exprience EPR a montr que la transmission mdiate n'est plus un modle valable; latransmission apparemment instantane qu'elle rvle justifie un modle global. On ne peut donc maintenantintroduire de variables caches qu' condition qu'elles soient globales.]

    2. Plus courageuse est l'interprtation de Costa de Beauregard qui, partant de considrations gnralessur la nature -objective (a priori) ou subjective- des probabilits, oppose avec raison la conscience perceptive la volont active et considre que seule l'intervention d'une subjectivit peut expliquer la rduction de la fonctiond'onde, non dcrite par la thorie quantique. (Mais, selon lui, lorsqu'il n'y a pas d'tres humains, c'est undmiurge - pas moins - qui opre.) Il admet alors, dans la modlisation incluant la relativit restreinte, l'inversiontemporelle et le zigzag la Feynman, en supposant que c'est la conscience de l'observateur qui rtroagit, aumoment de la mesure, sur la source (schma 9). Il prtend ainsi faire le lien avec les phnomnes paranormaux[Costa, 1980, 1988] Il a raison en ce sens qu'effectivement toutes les ESP (perceptions extrasensorielles, mieuxappeles percipiences) peuvent tre ramenes la prmonition ; et tous les PK (ou agences), au rtro-PK. Maisil escamote en parapsychologie tout ce qui ne colle pas avec son modle, lequel stipule l'existence d'un blocspatio-temporel (o le temps est assimil une dimension spatiale), la libert et l'indtermination temporelletant de simples illusions de l'observateur.

    Est-il justifi de dfinir le temps comme une quatrime dimension spatiale ? Costa nglige d'abord le fait capital, indpendant des effets relativistes, que dans ce modle la nature du tempsest de dimension imaginaire (racine de -1) et reste strictement antagoniste pour l'observateur des dimensionsrelles de l'espace. On peut bien sr nier le devenir ; mais c'est alors sa propre existence qu'on nie ; Si la libert est une illusion, que peut valoir le discours de Costa ? Le sens suppose la libert ; Il existe des cas de prmonitions prventives d'accident et qui russissent [Favre, 1982]. Le futur n'est donc pascrit ; Enfin, l'existence de macro-PK sur cible dtermine (d'effets PK macroscopiques, par exemple : dplacementsd'objets distance), PK spontans de loin les plus frquents parmi ceux - extraordinaires - qu'tudient lesparapsychologues, chappe totalement son modle, qui ne concerne que les micro-vnements inobservs(ncessairement alatoires selon le modle quantique).

    C. CONCLUSION

    Les solutions proposes consistent donc soit nier les faits, soit proposer des interprtations voulantsauvegarder la causalit ou rduire le temps une dimension spatiale - ce que dment formellement le psi.[Toutes nient la libert, le sens et donc - paradoxe combien pertinent - le sujet qui nonce ces contrevrits.Autrement dit, c'est le Logos que nous dnonons ici.]

    V. QUELQUES NOTIONS DE PHILO ET DE PSYCHO

    Avant de prsenter des solutions aux problmes que nous avons exposs, quelques notions de based'ordre mtaphysique, pistmologique et psychologique sont prciser, notions qui sont non seulementignores des exprimentalistes et des thoriciens de sciences exactes, mais aussi escamotes par lespistmologues :

    [Autrement dit, divers prjugs - trs rpandus - interdisent toute solution globale ces diffrents problmes. Ilfaut donc pralablement les balayer.]

    A. Le monisme n'est pas plus dfendable que le dualisme : la matire et l'esprit sont les deux plescomplmentaires de la nature. Un moi corporel (celui qui est peru rellement : le "Moi rel" du schmacyberntique 1) dissoci d'un moi spirituel (celui dont on se reprsente les aspirations : le "Moi imaginaire") n'apas la moindre pertinence mtaphysique. Cette vidence remonte la nuit des temps : dans l'animisme primitif,dans toute la philosophie chinoise (yin/yang, Lao-tseu16) et ds les origines de la civilisation occidentalemoderne, avec Montaigne. Niels Bohr, en physique quantique, n'a fait que redcouvrir cette notion.

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    On peut distinguer dans le fonctionnement du Moi un rgime objectif et un rgime subjectif : de mmeque nous percevons les actions (Moi rel) par leurs effets (par des objets mouvants), de mme nousreprsentons-nous les ides (Moi imaginaire) par leurs moyens (par des dsirs, i.e. des pulsions images).

    Si on se limite au seul rgime subjectif, on peut dire que tout sujet modle le pass selon le futur qu'ilimagine. [Sujet et finalit s'impliquent donc mutuellement, comme nous allons le voir au paragraphe suivant.]Nous allons analyser en dtail ces notions gnrales.

    B. De mme qu'un physicien, pour raisonner sur la ralit objective (quadrant I), explore les relations entre lesnotions d'objectivit, de causalit, de contrainte dterministe et de divergence, de faon strictement symtrique,quand on veut tudier l'imaginaire subjectif (quadrant III), c'est--dire les pulsions, on dcouvre descorrlations videntes entre les notions de subjectivit, de finalit, de libert et de convergence. Il ne sauraitdonc y avoir de science de l'imaginaire subjectif sans une axiomatisation de ces notions. [Autrement dit, tous lesmodles ralistes ("causalistes", i.e. imitant les modles physiques classiques) de l'imaginaire subjectif que nousdispensent les neurosciences et tant de "sciences humaines" sont des absurdits.]

    L'Occidental contemporain, scientiste, raisonne comme les physiciens : "on meurt parce qu'on vit".L'Oriental raisonne comme les mystiques : "il faut mourir pour vivre". Contrairement aux apparences, c'est,touchant l'imaginaire subjectif, la position orientale qui est scientifique. C'est en effet la mort, la certitude d'uneclture, qui peut donner du sens la vie ; l'immortalit, grand rve technocratique, ne peut en donner, pardfinition, puisqu'on pourrait alors faire n'importe quoi. La rincarnation, c'est l'obligation morale parexcellence.[Dans les termes vitalistes de ma logique de la signification, dans ma "pathique", l'immortalit estphysiquement impossible parce qu'elle est moralement interdite.]

    C. La ralit subjective (quadrant II) est le domaine de la simplification, de l'induction, de laconceptualisation, de la thorisation qui, modlisant la ralit objectivement observe, permet aprs coup lesreprsentations imaginaires (quadrant III). Le concept de cheval, par exemple, (signifi "raliste") serareprsent par une image gnrique (signifiant "imaginiste") qui renvoie tous les chevaux et aucun enparticulier.

    [La finalit des technosciences, qui portent sur la ralit (logiques classiques, mathmatiques algorithmiques,physique, chimie, biologie), est la prdiction, la reproductibilit. Les modles miment donc une ralitprdcoupe : les axiomes (concepts-cls) symbolisent les causes et la dduction symbolise le dterminismecausal, qu'il soit mcanique (rversibilit) ou entropique (divergence, probabilits). Ces axiomes sont induits(quadrant II) ; et c'est l'imagination, contrainte par les rgles du systme, qui en tire des dductions (quadrantIII). Un ensemble dynamique de concepts peut tre symbolis et servir alors de moyen de communication(signaux ; signes linguistiques ; formes mathmatiques et logiques). Le passage du statut de "concept" (signifirel) celui de "dsir" (signifiant imaginaire) peut tre symbolis par une bote noire, "anti-lumineuse", le Soi.La dynamique subjective intresse enfin les systmes mtaphysiques, qu'ils soient matrialistes ou spiritualistes,individuels ou collectifs ; les concepts/dsirs du Soi peuvent tre alors appels archtypes : ils constituent eneffet peu ou prou une structure autonome (d'o cette appellation de Soi). Quel que soit son niveau de gnralit, on remarquera qu'un archtype est un pari sur la nature du mondeobjectif : croyance "passive" dans les sciences dures ("Qu'est-ce que la ralit ?") et/ou croyance "active" dansl'exprimentation, les techniques, les rituels, en morale, en politique ou en art ("Comment changer cetteralit ?"). (...) A propos du Soi, ce point aveugle, Michel Serres faisait trs justement remarquer qu' "il n'y a de mythe purque le savoir pur de tout mythe. Les mythes sont pleins de savoir ; et le savoir, de rves et d'illusions". Dit entermes cyberntiques : "La science n'est pas l'exorcisme de l'imaginaire : elle utilise l'imaginaire en mmetemps qu'elle l'excite" (Etienne Klein).]

    D. Seul le prsent est rel. C'est une vidence immdiate. L'imaginaire est donc constitu la fois du pass etdu futur ; c'est le domaine du virtuel, de la valeur morale ou esthtique. Et c'est avec ces valeurs imaginaires quele crateur percute la ralit objective (toujours collective, socialement ou physiquement).

    Trs gnralement, ce que le Moi appelle ralit, c'est le dfilement temporel oblig de l'actuel ; et ce qu'ilappelle imaginaire, c'est le dfilement spatial voulu du virtuel.

    [Distinguons le pass pur (imaginaire) de ce qui appartient la fois au prsent et au pass, c'est--dire lestraces. Notre corps qui est aussi trace du pass existe dans le prsent. Les traces sont donc ambivalentes, ellesont un double statut, pass et prsent ; ce sont des signifiants "ralistes" (ils reprsentent quelque chose d'autre,pass et rel). Il en va de mme pour les prmisses du futur : notre corps est vivant en tant que prmisse.Pour la pense orientale, le pass est strictement imaginaire. On est alors, par exemple, fond croire que ladivinit a cr la terre rcemment avec des fossiles illusoires. Pour la pense occidentale, au contraire, pass etfutur sont considrs comme rels de droit mme en l'absence de traces ou de prmisses. Ce principe vaut encosmologie ou en palontologie parce que nous sommes impuissants modifier des traces (donc des prmisses) cette chelle ; il n'en va pas de mme l'chelle de notre corps. Et, comme nous le verrons plus loin, contrlersa destine consiste prcisment modifier autour de soi de faon pertinente et trs long terme destraces/prmisses.]

    E. Dans l'imaginaire subjectif, ce niveau o se dploie le "dsir en soi", o naissent les tendances, noustrouvons des structures dont la dsignation varie selon la discipline et le niveau hirarchique considr :

  • 20

    pulsions, schmes, instincts (analogues temporels des objets spatiaux, c'est--dire tendances organises ettoujours en mouvement), ensembles d'antimatire tachyonique (qui, par dfinition, se dplacent toujours quelleque soit la position d'un observateur rel), complexes inconscients, moi secondaires, etc.

    Trs gnralement, l'nergie qui y circule est finale par dfinition, aussi bien au sens physique (le futurdtermine le pass) que psychique (le but dtermine le moyen) ou philosophique (transmission d'intentions).L'aspect "ngatif" de cette nergie, dj formul par Dirac, a t clairement soulign par le psychanalyste LucienIsral : "Si on tait combl, il n'y aurait plus de dsirs. Nous sommes vivants parce que nous n'avons pas tout.L'incompltude est notre moteur vital".

    [Cette nergie subjective, que Lacan qualifiait justement de "mythe fluidique", a t tudie et dcrite par Freud(sous le nom de libido) et par Jung (sous celui d'nergie psychique) partir d'un matriel pathologique et selondes optiques monistes (matrialiste chez le premier et spiritualiste chez le second) qui les rendent incompatiblesavec le modle complmentariste, "physiologique" et immanentiste, que je propose ici.]

    Dans la ralit objective, l'nergie est un travail en cours (actuel) de ralisation ; dans l'imaginairesubjectif, l'nergie est un travail en cours (virtuel) de fantasmatisation.

    Le dsir, comme chacun sait, c'est du plaisir imagin. Et c'est aussi la reprsentation d'un en-soi (d'uninconscient) constitu de tendances, virtuelles (par dfinition) et subjectives. [Le mot dsir dsigne en franais laprise de conscience d'une tendance : c'est, au sens le plus large, l'image libre que l'on se fait de soi. Lestendances sont l'imaginaire ce que les tats sont la ralit : on peut donc distinguer des tendancessubjectives (pulsions mentales) et objectives (impulsions physiques). Le dsir se reprsente des pulsions commela perception se reprsente des objets.

  • 21

    Comme le dit trs bien la psychanalyste Michle Montrelay, l'imagination fabrique partir de lamatire brute de nos pulsions de la matire pense, de la reprsentation, c'est--dire de la vie symbolique. Surles diffrences entre le vocabulaire ici utilis et celui de Freud , que F .Lesourd s'est efforc de rsumer, voir letableau 1.]

  • 22

    Le sens exige la libert (cf. critique de Costa en IV.B.2) ; les pulsions doivent donc natre par principe exnihilo (d'un manque originel absolu, du cosmos en tant que trou noir : c'est la proprit fondamentale par quoi jedfinirai le Moi imaginaire). D'autre part, l'inconscient ne se limite pas empiriquement la subjectivit ; il estaussi tout ce que je n'agis ou ne perois pas dans le monde objectif, un "hors-soi" pourrait-on dire, une boteanti-noire, solaire, "aveuglante" ; inversement, un rve - mme ordinaire (non "lucide") - est toujours unereprsentation consciente de mes tendances (le Moi imaginaire met en scne les acteurs de thtre que sont sescomplexes inconscients).

    [Subjectivement, le Soi est un vide ressenti par le Moi rel comme de l'ignorance (d'o la raison) et par le Moiimaginaire comme de la peur (d'o l'esprance). "Dans les choses de l'esprit, disait Jacques Maritain, c'est lavirginit qui est fconde."]

    Quand les physiciens tudient empiriquement la ralit objective, ils mettent d'abord de ct leurs dsirs ;et c'est pourquoi ils trouvent des modles pertinents. De mme, un modle pertinent de l'imaginaire subjectif doitfaire abstraction de la ralit objective, la "forclore". Le dsir (conscient) choisit les prmisses qui lui plaisent etfabrique son propre big bang. En tant que tel, l'imaginaire subjectif est sans contrainte aucune, totalement libre -non en tant qu'tat bien sr mais en tant que tendance. Et cette libert est le fondement du sens : dansl'imaginaire, mme si cela dbouche sur de l'angoisse, on va toujours dans le sens choisi par soi-mme. LeManque, strictement personnel, est source subjective d'angoisse (d'o les pulsions) et source objective d'agitation(d'o les impulsions).

    [La science de l'imaginaire subjectif, c'est l'heuristique et non une quelconque hermneutique. Nous naissonstous esclaves de l'idologie de notre milieu ; il s'agit de mourir libre.]

    Ce n'est pas ici le lieu de polmiquer en dveloppant toutes les raisons qui me font rejeter le modlefreudien. J'insisterai seulement sur un point, sans l'argumenter pleinement, qui me parat scientifiquement etmoralement crucial. La psychanalyse, comme l'astrologie ou les mdecines parallles, croit utiliser unetechnique alors qu'elle pratique un rituel [En gnral, une technique reproduit un vnement dans la mesure outilisateurs et bnficiaires n'interviennent pas dans son droulement ; un rituel au contraire ne produitl'vnement escompt (improbable a priori) que si utilisateurs et bnficiaires interviennent dans sondroulement. L'vnement rituel, objectivement improbable, symbolique d'un processus cratif, n'est pastoujours escompt : ainsi de l'effet d'exprimentateur en psycho exprimentale ou de l'effet nocebo en mdecine.La discipline qui fait de ces dviances psychophysiques (ou "effets psi") son champ mme est laparapsychologie.] ; tant donc que cette illusion scientiste ne sera pas dissipe, ces disciplines ne seront pas dessciences. Mais un rituel peut tre efficace et l'on trouve de fait d'excellents praticiens. Toute psychothrapie est la fois un art et une morale. Je ne reproche donc pas du tout aux psychanalystes leurs rsultats alatoires. Jereproche Freud d'aspirer, en thorie, la reproductibilit, au statut "raliste" de technoscience, autrement dit la ngation de l'imaginaire (cratif) individuel.

    [Je ne reproche pas la psychanalyse d'tre une idologie (nous en avons tous besoin dans notre jeunesse ou enpriode de crise) ; je lui reproche de le nier et d'tre donc une religion qui veut se faire passer pour une science.L'illusions scientiste, bien sr, n'est pas l'apanage des psychanalystes. Mais elle n'est pas de mme nature dansles sciences dures, qui constituent la rfrence mme de l'activit scientifique : l'illusion vient alors d'uneconfusion (frquente) entre efficacit mthodologique et matrialisme philosophique. La science peut certes"puiser" la ralit objective ; mais elle nous tuera du mme coup.]

    F. En tant que telle, une cause, comme une action, n'est jamais observable (quadrant IV). On dit qu'un paralysn'agit pas. C'est faux : il agit, mais a ne donne aucun effet externe. D'autre part, une action est toujours enmouvement, par dfinition ; elle est polydirectionnelle, elle peut se situer en mme temps deux endroitsdiffrents (par exemple un travail avec mes deux mains) ; elle est donc irreprsentable en tant qu'objet par unobservateur rel. On est l encore, par dfinition, dans le domaine tachyonique.

    [Dans la ralit, le tiers exclu ne s'applique qu' des tats macroscopiques, tels les objets qu'on observe ; dansl'imaginaire, qu' des macro-tendances. Cf. II.C.]

    Qui a jamais vu une cause, sinon celui qui l'a dsire ? Une cause s'prouve. Et c'est la raison pourlaquelle les physiciens n'observent pas d'effets tachyoniques indirects dans la ralit objective : les cherchantdans des expriences dnues de toute finalit intrinsque (strictement entropiques), ils ne les y trouverontjamais. L'image relle d'une cause ne peut tre par nature qu'improbable. [L'ide n'est pas de moi, mais duphysicien russe Terletsky, dans un article princeps de 1960. ]

    Dernire remarque, une action symbolise dynamiquement un concept, un signifi rel : c'est un butobjectiv, autrement dit -puisqu'inobservable directement- un signifi imaginaire.

    G. Tous les problmes de morale et de crativit sont des problmes de passage de l'imaginaire dans le rel."Je dois donc je peux", disait Kant. Ce qui donc est impossible (dans la ralit objective) doit pouvoir tretransgress ; en fait, la moindre action intentionnelle russie modifie irrversiblement le rel et de manire

  • 23

    imprvisible pour un observateur strictement objectif. La catgorie de l'impossible intresse non seulement lamorale (anarchisme, contestation sociale), mais aussi la cration scientifique ou artistique et, bien sr, lesphnomnes paranormaux (qui contestent les lois physiques, "causales", quelles qu'elles soient).

    Qu'elle soit personnelle (morale, esthtique, logique), sociologique, biologique ou physique, toute loi nieun dsir, toute loi est une instance de mort. Mais inversement : tout dsir (qu'il soit personnel, social ou biotique,qu'il mane d'une particule ou du cosmos) nie une loi, tout dsir est un miracle en puissance. L'imagination fraieson propre espace-temps. [Plus prcisment : l'imagination (mme rationnelle) sans le rel, c'est la folie ; mais l'efficacit sans le rve,c'est la mort. La vie consiste marier l'une l'autre. (...) Noter, en passant, que le langage courant parle de sens esthtique ou moral, d'intuition, de clairvoyance : ils'agit bien l d'un sixime sens, du sens imaginaire ou plutt de tous les sens a priori fantaisistes et superflusque ne cessent d'inventer, d'utiliser et de proposer les originaux. Seconde remarque, elle gnrale : tout trevivant, tout ensemble organis (qu'il s'agisse d'un atome ou d'une socit) peut tre considr comme unproducteur interne d'antimatire dont le coeur, le Vide central, constitue ses croyances fondamentales, le Soiarchtypique, qui s'affirmera en actes (symboliques ou physiques) destructeurs partiels d'Autrui. Chacun samanire, le terroriste, le prophte, le savant, l'artiste, en fait tout tre humain non rduit l'tat de zombiepercute (matriellement ou spirituellement) la masse sociale, l'idologie dominante avec son intentionnalitpropre. Et, inversement, une socit coercitive agit de mme sur les individus qui la composent. Rappelons-nous qu'un systme subjectif quelconque, qu'il soit intellectuel ou pragmatique, n'est pas fait pour tre comprismais pour faire comprendre.]

    H. A la suite des physiciens, tout le monde considre qu'il y a trois dimensions d'espace (3D-E) et une dimen-sion de temps (1D-T). Or, dans la vie relle, un instant donn, nous voyons obligatoirement un plan, au pour-tour flou, avec des surfaces, des lignes et/ou des points, i.e. un espace deux dimensions centr sur un ici : l'ici/vertical (, i.e. haut-bas) ; l'ici/horizontal (, i.e. droite-gauche).

    La prsence, ici, d'un observateur rel suppose une perspective (la profondeur) externe ce plan spatial etqui s'avre bien temporelle, puisque modifiable : l'espace actuel implique une ralit des mouvements (duchangement). Cette profondeur, centrale et nette, est une libre conception synthtique de mon pass ("Derrire")et/ou de mon futur ("Devant") ; c'est une dimension spatiale subjective, la conscience en quelque sorte de ceplan, qui permet la fois son objectivation (en 2D) et l'illusion ventuelle de volume (3D).

    [Cette modlisation est videment trs sommaire a priori. Je me limite d'abord une vision "monoculaire".Ensuite, dans la ralit, nous percevons en fait chaque instant une surface sphrique. La gomtrie planeeuclidienne rsulte de l'abstraction d'un observateur temporel particulier. Une gomtrie du vcu personnelimplique au contraire des conversions permanentes et complexes entre espace et temps : faire dix kilomtres pied ou en avion comme passager, ce n'est pas du tout la mme chose.]

    Le mme raisonnement peut s'appliquer la vie imaginaire : nous imaginons d'un lieu choisi (d'un destin)une histoire anecdotique, au noyau flou, avec des tendances causales (le dcor) et finales (les personnages),c'est--dire un temps deux dimensions centr sur un maintenant : le maintenant/pass () ou "Derrire" ; le maintenant/futur () ou "Devant".

    La localisation, maintenant, d'un observateur imaginaire suppose une perspective (l'actualisation) externe ce plan temporel et qui s'avre spatialement contraignante : le temps local, "en profondeur", exige une illusionde persistance (des images). Cette actualisation, globale et prcise, est une suite d'actions diffrencies soumisesaux contingences spatiales ambiantes (verticales et/ou horizontales) ; c'est une dimension temporelle objective,la volition de ce plan, qui permet la fois sa reprsentation (en 2D) et la ralisation ventuelle de dsirs (en 3D).

    Dans le cadre de ma logique de la signification, il est justifi de conclure de ces deux raisonnementssymtriques que, touchant le vcu, on peut et l'on doit distinguer (localement et momentanment) deuxdimensions spatiales associes complmentairement deux dimensions temporelles.

    Il est possible alors d'envisager une hirarchie dimensionnelle. En associant les points de vue du Moirel et du Moi imaginaire, le Moi total fabriquerait - partir de son substrat affectif- une dimensionsupplmentaire, spatio-temporellement indiffrencie, "tactile", et se constituerait ainsi globalement en tantqu'unit. A l'inverse, on peut supposer l'existence d'tres infrieurs dont les reprsentations soient dedimensionnalit (paire) infrieure.

    [Aucun tre humain, mme gomtre, ne parvient se reprsenter un volume spatial quadridimensionnel, bienqu'on puisse sans difficult tracer en perspective un "hypervolume" sur un tableau trois dimensions.La physique relativiste conoit l'univers comme un bloc spatial quadridimensionnel, dj crit, que nous avonsl'illusion de parcourir temporellement (schma 6.a) : le Moi y est totalement escamot. Mon modle est centrsur le vcu individuel, sur l'absolu du Moi. Et je prtends qu'un individu "complet" peut arriver se reprsenterun hypervolume fait de 2D spatiales et de 2D temporelles, et qui n'est autre -comme nous le verronsultrieurement- que sa destine propre. Le modle complmentariste et transdisciplinaire que je prsente estune tentative en ce sens.

  • 24

    Formellement, mon modle a globalement une dimension (la boucle ferme du schma 1, le "circuit psi") etlocalement quatre, dont on peut donner l'quivalence en physique relativiste (tableau 2).

    On peut alors estimer que le point de vue affectif du Moi total consiste tordre le circuit psi "en huit" jusqu' ceque le Moi total sente tactilement les Moi rel et imaginaire se superposer, puis se fondre (cf. schmas 1 et 6.c).(...) Effectivement, la verticalit se rapporte la gravitation. Il est possible que l'horizontalit s'appareille l'lectrodynamique, le pass l'interaction faible (la radioactivit) et le futur la chromodynamique ( lacohsion du noyau) ; mais je n'ai pas rflchi cette question ! ]

    *

    En rsum, on peut dire que la ralit (l'espace personnel actualis, qu'il soit physique ou mental) a uneproprit fondamentale : c'est son inertie, i.e. de l'nergie fixe, localise, symbole la fois d'une contrainte (parles objets perus, par la sensation du corps propre) et d'une libration (par les concepts, par la rflexionpersonnelle). L'imaginaire (le temps localis, personnel) se caractrise au contraire par son impulsion ex nihilo,que nous symbolisons pniblement en dsirs ou sans effort en actes.

    [Pour imaginer, il faut se donner des contraintes. Pas pour agir. Un acte n'est contraignant qu'en cas d'effetsviss.(...) Du point de vue d'un observateur rel, la masse au repos d'un tachyon est forcment imaginaire puisque letachyon est toujours en mouvement (mo = i.). A vitesse infinie (), l'nergie du tachyon est nulle et sonimpulsion, relle, gale .c. Lorsqu'un systme tachyonique absorbe de l'nergie ngative (subjective), il setrouve acclr : c'est le cas pour un dsir. Lorsqu'il absorbe de l'nergie positive, il se trouve frein : c'est lecas pour un acte.Question : "Pourquoi les concepts ne pourraient-ils pas nous contraindre et les objets nous cder?". Ils lepeuvent , mais seulement de faon imaginaire : cf. la circularit du modle caractrise par un espace orient,du dehors vers le dedans pour le Rel et inversement pour l'Imaginaire. ]

    On agit la fois pour rsister au milieu et pour cder ses propres aspirations. Et l'on cre quandl'intelligence de notre conduite l'emporte sur celle du milieu : on efface alors le pass en changeantl'environnement. Le dterminisme en histoire ne peut donc tre que rtroactif et intentionnel.

    Dans la ralit objective, le temps s'coule malgr nous : nous percevons cause du temps. Dansl'imaginaire subjectif, l'espace se droule cause de nous : nous imaginons librement de l'espace. Mais, ensignifiant, nous crons du temps (puisque nous contraignons de l'espace objectif) et, en comprenant, nousinventons de l'espace (puisque nous anantissons du temps).

    [De faon moins absconse, on peut opposer la loi (rationnelle), symbolisation raliste d'un changement spatial, la rgle (thique), symbolisation imaginiste d'une persistance temporelle.Le plus important retenir de ce chapitre, c'est que seul le prsent est rel. C'est, en ontologie, un abus de droitque de dire que le pass et le futur sont rels. Je critique le droit mtaphysique occidental, de mme qu'unanarchiste critique le droit de l'Etat. Comment, par exemple, pourrais-je croire qu'on accepte mon existencetout en refusant celle des phnomnes paranormaux, puisque le Moi est une signification et qu'une significationest une concidence psi?

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    Rsum : schma 10.]

    VI. LES SOLUTIONS PROPOSES

    A. L'INTERPRETATION ANIMISTE EN PHYSIQUE QUANTIQUE

    [Dfinissons d'abord l'animisme. Tout systme ouvert, qu'il soit ou non class dans le rgne vivant, estimprvisible ; l'animisme consiste le supposer alors dou de libre arbitre, il attribue un Soi Autrui. Unsystme, c'est des parties qui visent une fin commune. Une approche systmique complte, prenant en compte le

  • 26

    temps en tant que tel (c'est--dire non pas spatialis, mais la fois causal et final), implique l'animisme. Toutsystmisme est un cas particulier de la conception mtaphysique animiste.]

    L'un des livres les plus brillants sur la physique quantique et ses interprtations philosophiques reste A larecherche du rel de d'Espagnat. Cet auteur juge l'interprtation animiste (chaque quanton est un tout organis etdonc dou de libre arbitre) plus plausible a priori, concernant la rduction de la fonction d'onde en l'absenced'observateurs humains, que l'hypothse dmiurgique. Mais il y objecte en dfinitive la non-localitmicrophysique : dans une exprience de fentes de Young avec interfrences (cf. schma 11), le quanton ne peutavoir conscience de passer par l'un ou l'autre trou puisque prcisment on observe ultrieurement desinterfrences (donc qu'il est pass par les deux trous la fois). L'exprience prouvant ainsi qu'une fonctiond'onde n'est pas rduite tant qu'on ne l'observe pas, il ne peut exister durant cette priode de particule consciented'elle-mme. Autrement dit, la non-localit est incompatible avec une conscience de soi.

    [Je ferai d'abord remarquer que le terme de conscience est quivoque. En psychologie, ce terme estrattach l'observation de veille ; mais il existe certainement une conscience de rver ou de rvasser comme ilpeut exister une conscience de jouer. Plutt donc que de conscient et d'inconscient, il vaudrait mieux parler cepropos de consciences incompatibles. Utilis ici en physique, ce terme dsignerait plutt de la pense (et mmeun esprit) en interaction avec la matire. L'objection de d'Espagnat ne tient alors pas.]

    Assujettir la conscience l'existence simultane d'un objet qui en serait le "garant" me semble releverd'un objectivisme contestable. Comme chacun sait, la fonction d'onde exprime une probabilit de prsence ; ellese rfre donc un monde la fois subjectif et potentiel, c'est--dire l'imagination. Or, quand je rve ou jervasse, le fait est que je m'affranchis totalement de la ralit ambiante (y compris celle de mon corps), quel'univers mental o je baigne est certes soumis une irrversibilit spatiale (je dois construire un rcit avec undbut et une fin) mais que le temps y est rversible et que le tiers exclu raliste ne s'y applique pas, que j'en aiconscience et que je suis donc capable d'y produire des phnomnes psi (c'est la magie onirique), en particulierd'tre "objectivement" (de mon point de vue onirique) non-local. Tandis qu'veill la ralit objective (meheurtant elle), j'ai de fait conscience de l'actualisation locale de mon corps et d'un entropie globale inluctable.Autrement dit, l'onde n'est rduite ("ne se rveille") qu'au moment de l'impact ; mais il faut en plus quel'Observateur humain (qui a conu cette onde) lise la trace (soit donc lui aussi rveill) pour conclure unerduction.

  • 27

    [On sait par ailleurs que dans le modle quantique, la fonction d'onde occupe la totalit de l'univers. Orc'est prcisement ce qui caractrise un processus imaginaire : le moi y est alors global, il est un monde. Si lanon-localit exclut prsentement une conscience veille (puisque ce moi n'a pas alors de "corps" actualis), elleexige une conscience universelle onirique ; et occuper un monde en imagination, c'est toujours se reprsentersymboliquement un monde qui pourrait (a pu et/ou pourra) exister. De son point de vue cosmique, cetteconscience globale ne peut par dfinition communiquer (transmettre extrieurement des informations) avecpersonne de rel : elle transmet seulement des intentions internes, fait communier entre eux les parties qui lacomposent. Mais, parmi celles-ci, peuvent se trouver des reprsentations de son moi rel (pass ou futur) oud'autres moi du mme type, ce qui peut engendrer des interfrences avec la ralit (que les parapsychologuesqualifient de psi). Cette communion interne et ces interfrences sont une manire de dfinir l'animisme a .]_________1. D'Espagnat qui j'ai soumis cette interprtation de l'animisme n'y a pas trouv d'objection (lettre du 16.2.89), d'autant qu'ilinsiste plusieurs reprises sur le fait que la non-localit n'autorise certainement pas la transmission d'informations (pp. 42-43, 86).

    On en dduira que la ralit objective n'est pas un absolu, un "en-soi", mais un "pour-soi" : elle se rfrencessairement un moi particulier.

    [Pour d'Espagnat, la conscience exige un support matriel. Mais quand je rve, je n'ai pas de mon propre pointde vue de corps rel (mme si ce corps continue exister pour un observateur objectif qui, veill, regarde cecorps). De plus, l'exprimentation quantique prouve que si un corps n'est pas observ ou observable, il n'est paslocalis. Et c'est prcisment parce que je n'ai plus, de mon propre point de vue, de corps rel que je peuxconsciemment imaginer tre deux endroits la fois et que je peux donc ultrieurement, parfois, en apporterune preuve relle (par exemple, avec la confirmation d'une clairvoyance ou d'un effet PK). Ajoutons enfin qu'engnral (ectoplasmie et exprimentations LaBerge exclues) un rve ne peut tre directement observ par untiers : seul donc le rveur peut en parler et aprs coup. (...) Le problme des fentes de Young est doublement compliqu : a) le quanton ne peut parler de son "rve psi"(sa duplication, sa dilution), b) un organisme macroscopique a une probabilit de localisation qui confine lacertitude (d'o, vraisemblablement, l'impossibilit, mme pour un mdium exceptionnel, de se diluer et derapparatre ailleurs).En somme, je considre la rduction de la fonction d'onde comme l'expression mme de la volont, qui rduitl'infini des possibles la certitude du fini par passage de la puissance l'acte. L'aspect non local microphysiquedoit donc se retrouver chez l'homme dans le fonctionnement moteur ordinaire de son cerveau.]

    Ainsi s'interprtent mon avis la discontinuit corpusculaire et la continuit ondulatoire : lacomplmentarit est un absolu "personnaliste".

    [Les parties d'un systme sont par dfinition incompatibles entre elles (en logique du tiers exclu) :onde/particule, objet/sujet, rel/imaginaire, etc. Un tout (en logique du tiers inclus) est donc forcment libre etdou de raison, c'est--dire vivant. On peut dcomposer les parties d'un tre vivant ; mais, ce faisant, on le tue.(...) Continu et discontinu (global et local) dpendent de l'observateur : pour un observateur rel regardant unobjet rel, cet objet est discontinu, tandis que toutes les tendances seront simultanment pour lui continues, nonlimites, non localises. Pour un observateur imaginaire, toujours en dplacement, les pulsions peuvent treimmobiles par rapport lui (d'o la figuration onirique, l'obsession, etc.), alors que les tats (rels) luiparatront continus.Quand on rve (i.e. quand on est un observateur tachyonique), la vie de veille prend un statut d'inconscient. Etinversement. C'est l un aspect de ce qu'on peut appeler la relativit psychophysique. Il n'y a d'absolu que lecomplmentaire : continu et discontinu ne peuvent exister l'un sans l'autre et dpendent en plus de l'observateur,selon qu'il est bradyonique ou tachyonique (rel ou imaginaire). On se dprend ainsi du point de vuetranscendantal qui est le point de vue de toute thorie occidentale; ce qui reste alors d'absolu, c'est moi. Il n'y apas de monde sans un Moi. Il n'y a d'absolu que le relatif, mais un relatif centr sur un Moi.Selon le dualisme ou le matrialisme, la ralit objective est un en-soi. Selon moi, non. Plus concrtement, lessciences dcoupent dans l'univers des domaines initialement tanches (symboliss par les quatre quadrants duschma 1) ; ce dcoupage leur est ncessaire pour tre oprationnelles ; mais, ontologiquement ouexistentiellement, on ne peut pas sparer. Une fois que je suis mort, la Ralit n'existe plus. Si on essaie deraisonner avec les quatre quadrants, le seul point commun, c'est moi.Le lecteur nanmoins ne doit pas se laisser garer par cette formulation : le personnalisme impliqu par lemodle complmentariste que j'expose ici ne saurait se rduire au solipsisme des modles idalistes.]

    Les physiciens s'illusionnent quand ils croient une ralit en soi alors qu'il n'y a de ralit que pour soi,pour quelqu'un de particulier (qu'il s'agisse d'un individu ou d'un groupe) : moi, la particule, moi et la particule,etc. Raisonner strictement, c'est ne raisonner que par rapport une (ou des) personne(s), qu'il s'agissed'organismes vivants, "inertes" (les atomes, par exemple) ou symboliques (l'glise, l'tat, la Socit, etc.).

  • 28

    [Les mathmaticiens, les physiciens et les biologistes -ces nouveaux riches de la technocratie- dtestent qu'onparle de leur imaginaire ou de leur inconscient professionnel comme s'ils taient les seuls n'en point avoir.Croire l'animisme (cette conviction enfantine et anti-imprialiste, ce "sentiment aristocratique de l'galitavec tout ce qui vit" comme disait Pasternak) dpasse donc totalement leurs forces, et mon modle ne peut leurapparatre au mieux que diabolique.En rsum, contrairement la conception occidentale dominante, il n'y a pas d'observateur anonyme,impersonnel. Ds qu'on traite de significations ou d'affects (qui sont par dfinition les constituants du mondedans son entier), on doit en traiter en fonction d'un Moi situ spatio-temporellement, la fois actif et passif, etnon en fonction d'un absolu, par exemple le Soi transcendantal des monothismes (Dieu) ou le strictement Autre(la ralit objective); il n'y a que des observateurs particuliers, personnaliss. Par ailleurs, il y a deux typesd'observateurs : les imaginaires (tachyoniques) et les rels (bradyoniques). Enfin, il y a un problmehirarchique d'observateurs relatif aux niveaux d'organisation (particule, atome, molcule, cellule, organe,individu, socit, espce, plante, galaxie, etc.).Rsum : schma 12.]

    B. LE PROBLEME DE LA TELEPATHIE

    Pour qu'il y ait tlpathie, il faut une sorte de complmentarit significative, de consensus affectif. Lemdium se met la place de l'autre.

    L'existence d'antimatire tachyonique (de tachyons subjectifs) est bien dmontre exprimentalement parl'intuition prmonitoire, reprsentation instantane d'un futur qui pourrait se produire. La notion de Moiimaginaire (tachyonique), "l'image de soi", que vous voyez reprsent sur le schma 1 implique qu'il peut setrouver en mme temps deux endroits diffrents (pour un observateur objectif contre-factuel). D'ol'impression de tlpathie, de clairvoyance ou de PK instantan.

    [Je peux galement citer le fait que Mozart, qui en remerciait Dieu, se reprsentait finalement ses crationsmusicales, mme tendues, comme des objets spatiaux ("tableaux ou statues") et qu'il n'avait plus alors qu' lesdcrire.(...) On me rtorque souvent que je ne prends pour exemples que des cas extraordinaires et donc douteux. Oui,tout le problme est l : la preuve de l'imaginaire, sa rgle, ce sont les exceptions. Et je ne peux rien pour ceux,majoritaires, qui prfrent la tlvision au cinma, le rock au jazz, la BD la peinture, la SF la posie ou lapornographie l'rotisme.

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    (...) Elitiste ? Ah oui... mais pas litaire. Ressembler quiconque constitue pour moi un sr garant de lchet etde laideur. Il faut tre litiste pour crer, comme F.Brown l'est en SF ou E.Baudoin en BD. La transcendanceprne par les litaires - qu'elle soit matrialiste ou spiritualiste - n'est que la quintessence du fascisme. Jedfends la vie, je suis animiste et, ce titre, anarchiste : faire partie de toutes les majorits est un signe videntde dcomposition avance.La transdisciplinarit, pour tre cratrice, doit travailler aux marges de la science, au coeur de l'art et contrenotre civilisation du spectacle. Un modle donc qui courrait aprs le succs (technique, social ou conomique)-ce Dieu unaniment respect des morts et des objets, paradigme de l'Occident moderne- serait coup sr uneescroquerie. La transdisciplinarit ne permet que d'acqurir un Moi complet : qui cela intresse ?(...) Les effets PK (par dfinition improbables) -qu'ils soient crbraux, somatiques ou extracorporels-prsentent tous les caractres d'effets tachyoniques indirects dont Terletsky avait formul la thorie ds 1962.C'tait un Russe, marxiste donc et suspect de lyssenkisme (ce lamarckisme proltarien). Les coles de physiqueet de parapsychologie amricaines, dominante "librale", l'ont emport travers le monde ... et n'ont rienrapport sauf de l'argent.]

    La transmission de base dans la subjectivit est purement intentionnelle. Les buts qu'on se donne sont eneffet toujours smantiques : on cherche donner un sens (occasionnel, durable ou permanent) sa vie. Et lareprsentation de ce sens (le dsir) est convertie en actes qui permettent de le signifier concrtement. Une preuveexprimentale de cette transmission intentionnelle est fournie par la parapsychologie : ce sont les cas avrs decomprhension d'une langue trangre par un mdium. Cette comprhension ne s'avre d'ailleurs pastlpathique, mais autoprmonitoire : le mdium se souvient de l'explication future qu'on pourra ou pourrait luidonner.

    En fait, on peut dmontrer que toutes les ESP (clairvoyance, tlpathie et rtrocognition) sont rductibles la seule autoprmonition15. "Se voir soi-mme, c'est tre voyant" ont dit pareillement, vingt-trois sicles dedistance, Lao-tseu et Rimbaud. Toutes les voyances en effet consistent se voir soi-mme (en inhrence, encomprhension, en intention ; donc dans le temps) au travers d'un autre (i.e. d'une forme spatiale). En dfinitive,le mdium voit l'avenir parce qu'il modifie le pass ; mais c'est toujours et seulement vis--vis de son tempspropre, personnel qu'il opre.

    [L'hypothse de la clairvoyance ou de la tlpathie en tant que transmi