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THÈSE
Pour l'obtention du grade deDOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS
UFR des sciences fondamentales et appliquéesInstitut de chimie des milieux et matériaux de Poitiers - IC2MP
(Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006)
École doctorale : Sciences pour l'environnement - Gay Lussac (La Rochelle)Secteur de recherche : Chimie théorique, physique, analytique
Présentée par :Anna Zalineeva
Influence d'une modification par des éléments du groupe pde catalyseurs de palladium nanostructurés sur l'oxydation
électrocatalytique du glycérol
Directeur(s) de Thèse :Christophe Coutanceau, Stève Baranton
Soutenue le 28 août 2014 devant le jury
Jury :
Président François Jérôme Directeur de recherche CNRS, Université de Poitiers
Rapporteur Pascal Brault Directeur de recherche CNRS, Université d'Orléans
Rapporteur Marian Chatenet Professeur des Universités, INP de Grenoble
Membre Christophe Coutanceau Professeur des Universités, Université de Poitiers
Membre Stève Baranton Maître de conférences, Université de Poitiers
Membre Gregory Jerkiewicz Professor, Queen's University, Canada
Membre Claude Lamy Professeur honoraire, Université de Montpellier 2
Pour citer cette thèse :Anna Zalineeva. Influence d'une modification par des éléments du groupe p de catalyseurs de palladiumnanostructurés sur l'oxydation électrocatalytique du glycérol [En ligne]. Thèse Chimie théorique, physique,analytique. Poitiers : Université de Poitiers, 2014. Disponible sur Internet <http://theses.univ-poitiers.fr>
THESE
Pour l’obtention du Grade de
DOCTEUR DE L’UNIVERSITE DE POITIERS
(Faculté de Sciences Fondamentales et Appliquées) (Diplôme National – Arrêté du 7 août 2006)
Ecole Doctorale : Sciences pour l’Environnement Gay Lussac Secteur de Recherche : Chimie Théorique, Physique, Analytique
Présentée par :
Anna ZALINEEVA
Influence d’une modification par des éléments du groupe p de catalyseurs de palladium nanostructurés sur l’oxydation
électrocatalytique du glycérol
Directeur de Thèse : Christophe COUTANCEAU Codirecteur de Thèse : Stève BARANTON
Soutenu le 28 aout 2014 devant la Commission d’Examen
JURY
Pascal BRAULT, Directeur de Recherche CNRS Rapporteur GREMI, UMR CNRS-Université d’Orléans n° 7344
Marian CHATENET, Professeur Rapporteur LEPMI-Phelma, UMR CNRS-Grenoble INP n°5279
Gregory JERKIEWICZ, Professeur Examinateur Department of Chemistry, Queen's University
Claude LAMY, Professeur honoraire Examinateur IEM, UMR CNRS-Université Montpellier 2 n° 5635
François JERÔME, Directeur de Recherche CNRS Examinateur IC2MP, UMR CNRS-Université de Poitiers n°7285
Stève BARANTON, Maître de conférences Examinateur IC2MP, UMR CNRS-Université de Poitiers n°7285
Christophe COUTANCEAU, Professeur Examinateur IC2MP, UMR CNRS-Université de Poitiers n°7285
Remerciements En premier lieu, je souhaite remercier très sincèrement l’ensemble des membres
du jury, qui m’ont fait l’honneur d’évaluer ce travail : M. Pascal Brault (Directeur de
Recherche au CNRS, GREMI, Université d’Orléans) et M. Marian Chatenet (Professeur
des Universités, LEPMI, Université de Grenoble) en qualité de rapporteurs de la thèse,
M. Gregory Jerkiewicz (Professeur, Queen’s University, Kingston, Canada), M. Claude
Lamy (Professeur des Universités, IEMM, Université de Montpellier 2), M. François
Jérôme (Directeur de Recherche CNRS, IC2MP, Université de Poitiers), M. Stève
Baranton (Maître de Conférences, IC2MP, Université de Poitiers) et M. Christophe
Coutanceau (Professeur des Universités, IC2MP, Université de Poitiers).
C’est un très grand privilège pour moi d’avoir M. Claude Lamy, Professeur
honoraire à l’IEMM et fondateur du laboratoire d’électrocatalyse de l’université de
Poitiers, comme examinateur de mon travail de thèse.
En particulier, je suis très reconnaissante à M. Gregory Jerkiewicz pour la
collaboration fructueuse sur la partie de nanoparticules à forme et le long déplacement
qu’il a dû effectuer pour assister à la soutenance.
Ma sincère gratitude va à mes directeurs de thèse, M. Christophe Coutanceau et
M. Stève Baranton. C’est avec Stève et Christophe que je me suis lancée en
électrochimie. C’est aussi grâce à Stève et Christophe que j’ai appris nombre de
techniques de caractérisation électrochimique des matériaux dont j’ai rapidement eu
besoin. Merci pour votre patience et soutien.
Je ne saurais continuer sans remercier la Direction de la Région Poitou-
Charentes pour le financement de cette thèse. Je voudrais aussi remercier M. Boniface
Kokoh et Mme. Sabrina Biais de l’école doctorale Gay Lussac pour leur soutien au
cours de cette thèse.
Un grand merci à Monsieur Teko Napporn pour ses conseils, l’encouragement et
les discussions scientifiques.
Je tiens également à remercier M. Plamen Atanassov de m’avoir accepté pour un
stage de 9 mois au sein de son laboratoire à l’Université de Nouveau-Mexique. De cette
collaboration productive émane toute la partie D de ma thèse et une publication
significative! Merci à tous mes collègues russes et américains, Alexey, Kateryna,
Monica, Ulises.
Enfin, j’aimerais adresser un grand merci à tous mes collègues « thésards », en
particulier à Jiwei Ma et Patrick Urchaga et à tous les membres de mon ancienne
équipe «Électrocatalyse», ainsi que les techniciens et les verriers, Claude pour les
cellules électrochimiques artisanales, Stéphane pour les images MET de haute qualité
dans un court délai…
Résumé
Les stocks de glycérol à travers le monde augmentent : étant une matière
première secondaire, ce produit chimique doit être valorisé. La co-production d’énergie
électrique ou d’hydrogène et de produits chimiques à valeur ajoutée à partir du glycérol
peut être réalisée dans des réacteurs électrochimiques. L’oxydation de glycérol est une
réaction complexe qui peut conduire à un grand nombre de produits chimiques et
d’intermédiaires utiles pour l’industrie. Le développement de catalyseurs spécifiques
pour orienter les chemins réactionnels de l’électro-oxydation du glycérol vers les
produits désirés est donc un objectif très important.
Des nanoparticules non supportées de palladium à distribution de taille et de
forme contrôlées ont été synthétisées par une voie colloïdale et caractérisées par
microscopie électronique et des méthodes électrochimiques afin d’obtenir une
corrélation entre la structure de surface et la réponse électrochimique. Ces électrolyseurs
modèles ont été modifiés par dépôt d’adatomes de bismuth. Puis leur activité et leur
sélectivité vis-à-vis de l’électro-oxydation du glycérol ont été respectivement évaluées
par voltammétrie cyclique et spectroscopie infrarouge in situ. Des matériaux plus
proches d’applications industrielles à base de palladium et d’éléments du groupe p (Bi,
Sn) ont aussi été par la suite synthétisés et évalués vis-à-vis de l’électrooxydation du
glycérol.
Les résultats obtenus montrent clairement l’influence de la composition, de
l’orientation de surface et de la nature de catalyseur sur l’activité et la sélectivité dans la
réaction de l’électrooxydation du glycérol.
Mots clès: Electro-oxydation de glycérol, Palladium, Formes, Adatom.
Abstract: Modification of nanostructured palladium catalysts by p-elements and
their influence on electro-oxidation of glycerol.
The worldwide glycerol stocks are increasing; this chemical could be used as a
secondary primary raw material. Electric energy or hydrogen and added-value-chemical
cogeneration can be performed in electrochemical reactors. Glycerol oxidation is made
up of complex pathway reactions that can produce a large number of useful products
and valuable fine intermediates. The development of specific catalysts for electro
oxidation of glycerol to obtain desired products is a very important goal.
Unsupported palladium nanoparticles with controlled size and shape distribution
were synthesized by a colloidal method and characterized by electron microscopy and
electrochemical methods to obtain a correlation between the surface structure and the
electrochemical response. These model electrocatalysts have been modified by adatoms
of bismuth. And their activity and selectivity towards the electro-oxidation of glycerol
were respectively evaluated by cyclic voltammetry and in situ infrared spectroscopy.
Other materials for industrial applications based on palladium and p elements (Bi, Sn)
were also synthesized and evaluated towards the electro-oxidation of glycerol.
The results clearly show the influence of the composition, surface orientation and
the nature of the catalyst on activity and selectivity in the reaction of electro-oxidation
of glycerol.
Keywords: Eletcro-oxidation of glycerol, Palladium, Shape, Adatom.
1
Sommaire
Introduction ...................................................................................................................... 4
A. Partie bibliographique .................................................................................................. 7
I. Le glycérol ............................................................................................................ 7
1. Production .......................................................................................................... 7
2. Valorisation du glycérol ..................................................................................... 9
3. Produits d’oxydation du glycérol ..................................................................... 10
4. Conversion électrochimique du glycérol ......................................................... 12
II. Les catalyseurs .................................................................................................... 19
1. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs monométalliques ................ 20
a. Le platine .................................................................................................. 20
b. L’or ........................................................................................................... 22
c. Le palladium ............................................................................................. 23
2. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs bimétalliques ...................... 25
III. Conclusion et objectifs ..................................................................................... 27
B. Partie expérimentale................................................................................................... 29
I. Nettoyage de la verrerie ...................................................................................... 29
II. Méthodes de synthèses ....................................................................................... 30
1. Méthode colloïdale .......................................................................................... 30
a. Synthèse des nanosphères ......................................................................... 33
b. Synthèse des nanocubes ........................................................................... 33
c. Synthèse des nanooctaèdres ..................................................................... 34
2. Méthode du support sacrificiel......................................................................... 34
a. Synthèse des catalyseurs PdxBi1-x ............................................................. 35
b. Synthèse des catalyseurs PdxSn1-x ............................................................ 36
III. Méthodes de caractérisation électrochimiques ................................................ 36
1. Voltammétrie cyclique ..................................................................................... 36
a. Cellule électrochimique ............................................................................ 37
b. Préparation de l’électrode de travail en or ................................................ 38
c. Préparation de l’électrode de travail en carbone ...................................... 40
2
2. Chronoampérommétrie .................................................................................... 41
3. Spectroscopie infrarouge in situ....................................................................... 41
IV. Méthodes de caractérisation physicochimique ................................................ 43
1. Microscopie ..................................................................................................... 43
a. Microscopie électronique à transmission (MET) ..................................... 44
b. Microscopie électronique à balayage (MEB) ........................................... 45
2. Porosimétrie à l’azote ...................................................................................... 46
3. Spectroscopie photoélectronique de rayons X (XPS) ...................................... 46
4. Spectroscopie d’absorption atomique (SAA) .................................................. 47
C. Résultats : nanoparticules de palladium non supportées à distributions de tailles et de formes contrôlées ............................................................................................................ 48
I. Caractérisation par microscopie électronique à transmission des nanoparticules de palladium préparées par méthode colloïdale ......................................................... 48
1. Nanoparticules sans orientation préférentielle (nanosphères) ......................... 49
2. Nanoparticules d’orientation préférentielle (100) ............................................ 50
3. Nanoparticules d’orientation préférentielle (111) ............................................ 51
4. Conclusion ....................................................................................................... 53
II. Caractérisation électrochimique en milieu acide ................................................ 53
1. Comparaison du comportement électrochimique du palladium massif et du palladium nanostructuré .......................................................................................... 54
2. Séparation des processus dans la zone hydrogène en milieu acide ................. 57
3. Détermination de la charge d’adsorption/désorption d’hydrogène en sous potentiel ................................................................................................................... 62
4. Effet de la limite supérieure de potentiel sur la stabilité du palladium en milieu acide ........................................................................................................................ 65
5 Conclusion ....................................................................................................... 69
III. Voltammétrie cyclique en milieu alcalin ......................................................... 71
1. Etude en milieu support des nanoparticules de palladium ............................... 71
2. Modification de surface par le bismuth ........................................................... 73
IV. Electrooxydation du glycérol en milieu alcalin ............................................... 79
1. Electrooxydation du glycérol sur les nanoparticules de palladium pur ............. 79
3
2. Electrooxydation du glycérol sur les nanoparticules de palladium modifiée par adsorption spontanée de bismuth ............................................................................ 82
V. Etude infrarouge in situ ...................................................................................... 88
1. Nanoparticules de palladium pur ..................................................................... 88
2. Nanoparticules de palladium modifiées par le bismuth ................................... 96
VI. Conclusion ..................................................................................................... 103
D. Résultats : nanoparticules auto-supportées à base de palladium modifié par des éléments du groupe p .................................................................................................... 107
I. Catalyseurs auto-supportés PdxBi1-x ................................................................. 107
1. Caractérisation physicochimique ................................................................... 107
2. Caractérisation électrochimique .................................................................... 111
3. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs PdxBi1-x auto-supportés .... 113
4. Etude infrarouge in situ de l’oxydation du glycérol sur les catalyseurs PdxBi1-x autosupportés ......................................................................................................... 118
5. Conclusion sur l’activité/sélectivité de PdxBi1-x ............................................ 122
II. Catalyseurs auto-supportés PdxSn1-x ................................................................. 125
1. Caractérisation physicochimique ................................................................... 126
2. Caractérisation électrochimique des catalyseurs PdxSn1-x ............................. 130
3. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs auto-supportés PdxSn1-x .... 131
4. Etude infrarouge in situ de l’oxydation du glycérol sur le catalyseur PdSn autosupporté .......................................................................................................... 133
5. Conclusion sur l’activité/sélectivité de PdSn vis-à-vis de l’oxydation du glycérol .................................................................................................................. 135
III. Evaluation de l’activité des catalyseurs PdxBi1-x et PdxSn1-x vis-à-vis de l’oxydation autres alcools ......................................................................................... 137
E. Conclusion générale et perspectives ........................................................................ 144
Références .................................................................................................................... 151
Bibliographie personnelle ............................................................................................. 159
4
Introduction
Chaque année la demande énergétique de la société augmente de façon
impressionnante, alors que les ressources fossiles sont limitées. L’épuisement des
réserves pétrolières, mais également les problèmes environnementaux engendrés par
l’exploitation du carbone fossile (émission de gaz à effet de serre) ont suscité un intérêt
croissant pour les matières premières renouvelables issues de la biomasse.
Dans le domaine de l’énergie, la biomasse représente l’ensemble des matières
organiques d’origine végétale, animale ou fongique pouvant devenir une source
d’énergie par combustion ou méthanisation. La valorisation de la biomasse est un sujet
d’actualité de par son intérêt économique. En effet, les composés issus de la biomasse
ont souvent une faible valeur ajoutée et leur conversion par les méthodes chimiques
permet d’obtenir des produits à haute valeur ajoutée. Dans ce contexte, l’équipe
« Catalyse et milieux non-conventionnels » de l’Institut de Chimie des Milieux et
Matériaux de Poitiers (IC2MP, UMR CNRS-Université de Poitiers 7285) est très
fortement impliquée dans le développement de la chimie verte ou durable. Elle
développe d’ailleurs des recherches dans les thématiques suivantes: dépollution,
énergie, valorisation de la biomasse pour la chimie fine ou de spécialité. Pour cela, elle
entend développer des éco-procédés innovants s’appuyant sur la catalyse hétérogène et
l’activation non thermique des réactions chimiques. La conversion électrocatalytique de
la biomasse, notamment de polyols, au sein de réacteurs électrochimiques fait bien
évidemment partie des priorités de recherche.
Le glycérol et bien d’autres molécules encore, peuvent être extraits de la
biomasse. Le glycérol est une molécule produite aujourd’hui en grandes quantités de
différentes façons: productions de biocarburants (bioéthanol et biogazole1,2) et d’acides
gras. Le bioéthanol est principalement produit et consommé au Brésil et en Amérique
du Nord alors que l’Europe est un leader mondial dans la production de biogazole. Les
biocarburants sont actuellement plus chers que les combustibles traditionnels. La
production européenne de biogazole s’élève actuellement à plus de 9 millions de tonnes
5
par an, la quantité annuelle actuelle de glycérine provenant de la production de
biogazole s’élève à environ 2,4 millions de tonnes et continuera à augmenter
proportionnellement dans le monde entier. En effet, pour 9 kg de biogazole produits,
environ 1 kg de glycérol brut est formé comme sous-produit3. L'augmentation de la
production de biogazole en Europe conduira à une augmentation des stocks de glycérol
brut. Une utilisation du glycérol brut ou sa conversion pour obtenir des produits
spécifiques pourrait conduire à la réduction du coût de production du biogazole et à
l’augmentation de sa rentabilité sans nécessité de soutien financier par les états ou la
commission européenne. Dans ce cas, le glycérol apparaîtrait comme une matière
première secondaire plutôt que comme un déchet de l’industrie des agro-carburants. En
particulier, il a été démontré que tous les produits d’oxydation du glycérol, sans rupture
de la liaison carbone-carbone, étaient des produits chimiques valorisables,4,5 quelle que
soit la positon de la fonction alcool oxydée.
La conversion du glycérol en composés oxygénés à haute valeur ajoutée peut
être effectuée dans des réacteurs électrochimiques (électrolyseurs ou piles à
combustible). Ces procédés de synthèse montrent de nombreux avantages, parmi
lesquels: les réactions sont effectuées dans des milieux aqueux à basse température et à
pression atmosphérique, l’activité et la sélectivité de la réaction peuvent être contrôlées
par le potentiel d’électrode, la valeur du pH de l’électrolyte, la concentration du
glycérol, ainsi que par la formulation des catalyseurs1,6-9.
La majorité des électrocatalyseurs anodiques développés pour l’oxydation de
molécules organiques est à base du platine10,11. Le platine est en effet reconnu pour être
le matériau le plus actif et le plus stable en milieu acide pour ce type de réaction. En
même temps, il est aussi connu que les cinétiques des réactions anodiques et
cathodiques sont plus élevées en milieux alcalins qu’en milieux acides12,13. De plus, la
stabilité des métaux non-nobles ou moins nobles que le platine est accrue en milieu
alcalin. C’est pourquoi, dans les piles à combustible alcalines, des matériaux
catalytiques alternatifs au platine peuvent être utilisés dans les deux électrodes, la
cathode14,15 et l’anode16,17. Des catalyseurs nanostructurés à base de palladium pur ou
6
d’alliages de palladium avec des métaux de transition ou des éléments du groupe p ont
en effet déjà montré de fortes activités et des stabilités accrues en milieu alcalin, et
peuvent être considérés comme des substituts possibles du platine, intéressants d’un
point de vue économique pour l’oxydation des alcools18-21.
Les travaux de thèse décrits dans ce manuscrit visent à présenter une recherche
pertinente et de nouveaux résultats concernant des matériaux catalytiques pour la
valorisation de déchets issus de la biomasse, en l’occurrence le glycérol.
Le procédé dans lequel s’inscrivent les développements issus de cette thèse
s’oriente vers les réacteurs électrochimiques. Le matériau catalytique de base sera le
palladium, qui possède en milieu alcalin des caractéristiques catalytiques intéressantes
pour les réactions envisagées et qui de plus présente une disponibilité sur la planète plus
importante que celle du platine et un coût trois à quatre fois inférieurs. Les réactions
d’oxydation électrocatalytiques d’alcools étant des réactions de surface, il est dans un
premier temps très important de caractériser ces surfaces de palladium et de déterminer
leur activité et leur sélectivité. Ainsi, le comportement électrochimique du palladium
nanostructuré sera étudié dans un premier temps sur des nanoparticules modèles de
palladium, à distributions de taille et de formes contrôlées, puis, dans un second temps,
des matériaux catalytiques réels, c’est-à-dire dont la production peut aisément être
industrialisée en termes de changement d’échelle de production, feront eux aussi l’objet
d’une étude détaillée. Ces matériaux à structure hiérarchiquement contrôlée à base de
palladium seront étudiés pour l’électrooxydation de différents alcools d’intérêt
énergétique (méthanol, éthanol, isopropanol et glycérol), avec une attention toute
particulière pour le glycérol. Pour chaque type de catalyseurs, les effets sur l’activité et
la sélectivité vis-à-vis de la réaction d’électrooxydation du glycérol de la modification
de la surface de palladium par ajout d’atomes d’un élément du groupe p seront examinés
par des méthodes électrochimiques et des méthodes de spectroscopie infrarouge in situ.
7
A. Partie bibliographique
I. Le glycérol
1. Production
Le glycérol (propane-1,2,3-triol) ou glycérine est un composé organique naturel
de formule semi-développée: CH2OH-CHOH-CH2OH. Il est intéressant de par son
caractère renouvelable et son abondance. Le glycérol est un produit non toxique, non
dangereux, non volatile, biodégradable et recyclable.
Le glycérol peut être obtenu par synthèse à partir du propylène et par
fermentation à partir des sucres. Industriellement, le glycérol est produit à partir des
huiles végétales lors de la formation d’acide gras, de savon ou de biogazole (100 kg de
glycérol sont produits pour 1 tonne de savon22 ou de biogazole23) selon le schéma
réactionnel présenté sur la Figure 1.
En principe, toutes les huiles peuvent être utilisées, ainsi que les graisses
animales3,24, cependant, certaines huiles sont privilégiées. Ainsi, en France, les
producteurs utilisent le plus souvent de l'huile de colza, tandis qu'aux États-Unis, les
fabricants préfèrent le soja et dans une moindre mesure le canola. Les États-Unis sont
par ailleurs les plus grands producteurs de soja devant le Brésil. Le glycérol produit
industriellement possède généralement une pureté de l’ordre de 75-90%; l’eau et des
sels résiduels (provenant des catalyseurs) sont les principaux contaminants du
glycérol25,26. Pour des études de l’oxydation électrocatalytique du glycérol, la pureté de
ce dernier était ≥99% (GC).
Dans le cas de l’industrie des biogazoles, le glycérol est le résidu non valorisé
des réactions de transestérification utilisées dans les procédés de production des esters
méthyliques d’huile végétales (EMHV) ajouté à raison de 5% au gazole.
8
Figure 1. Production industrielle conduisant au glycérol comme sous-produit.
Les objectifs en termes d’utilisation de biogazole sont très ambitieux: en 2003,
l’Union Européenne a adopté la directive 2003/30/EC pour la promotion de l’utilisation
de biocarburants pour les transports1. Cette directive "biocarburants" pressait les états
membres d’établir des objectifs précis pour imposer une proportion minimum de
biocarburants sur le marché. Cet objectif a été placé à 2 % en 2005 et à 5,75 % en 2010.
Puis, en 2007, la commission européenne a proposé un paquet “integrated energy and
climate change” supporté par le parlement européen, qui a été finalement adopté par les
chefs d’états de l’Union européenne au cours du conseil européen du 8-9 mars 2007, où
il a été visé un minimum de 10% de biocarburants dans les essences et gazoles à
l’horizon 20202. Les mêmes objectifs ont été édictés aux USA par le DOE.
De nos jours, le marché global des biocarburants consiste approximativement en
85% de bioéthanol et 15% de biogazole. Le bioéthanol est principalement produit et
consommé au Brésil et en Amérique du nord. D’un autre côté, l’Europe est le leader
1 http://ec.europa.eu/energy/res/legislation/doc/biofuels/en_final.pdf 2 http://www.europabio.org/positions/Biofuels_EuropaBio%20position_Final.pdf
9
mondial dans la production du biogazole et ce carburant représente environ 3/4 du
marché européen des biocarburants. Cependant, les biocarburants sont toujours plus
chers que les carburants traditionnels, et en conséquence les états membres de l’union
européenne ont eu la permission d’appliquer une exemption totale ou partielle de taxe
sur les biocarburants. De plus, en rappelant que pour 9 kg de biogazole produit environ
1 kg de glycérol brut est formé, l’augmentation de la production de biogazole en Europe
conduira à l’augmentation des stocks de glycérine. Par conséquent, l’utilisation effective
ou la conversion du glycérol en produits pour la chimie fine et/ou de spécialité pourrait
conduire à une réduction des coûts de production du biogazole.
2. Valorisation du glycérol
La valorisation du glycérol est généralement effectuée par des réactions de la
chimie organique. Ces réactions sont effectuées soit par catalyse hétérogène27,28 ou
homogène, soit à l'aide de biocatalyseur4. Des produits intéressants ont ainsi été obtenus
à partir du glycérol: des monoglycérides, des polyglycérols, des esters de polyglycérols
(utilisés comme émulsifiants dans l’industrie agroalimentaire mais également comme
agents tensioactifs non ioniques en cosmétiques), des éthers éthyliques du glycérol
(additifs de la coupe gazole), d’autres éthers (provenant de la réaction de télomérisation
avec le butadiène), le carbonate de glycérol (intermédiaire dans la formation de
polyéthers aliphatiques, solvants «verts»), le propane-1,3-diol, le glycéraldéhyde,
l’acide glycérique, l’acroléine, des aminoacides (surfactants cationiques), le glycidol
(intermédiaire de synthèse), des esters carbamiques soufrés ou non (à effet antifongique)
utilisables pour les espèces végétales cultivées pour la production de biocarburants, de
nouveaux analogues nucléosidiques à activité antivirale, etc. Cependant, l’utilisation du
glycérol en chimie organique est relativement difficile à cause de la présence de trois
groupes hydroxyles dont les pKa sont similaires (14,32 et 14,68)29,30 conduisant à la
formation parasite de différents produits. De plus, la viscosité importante du glycérol
pose des problèmes de transfert de matière, et enfin, le fort caractère hydrophile de la
molécule de glycérol rend difficile son interaction avec la plupart des composés
organiques.
10
D’un autre côté, les produits d’oxydation du glycérol sans rupture de la liaison
C-C sont des intermédiaires utiles pour la chimie fine ou des produits à valeur ajoutée,
mais malheureusement ils n’ont pas encore vraiment eu d’applications industrielles à
grande échelle en raison du coût et de la dangerosité des processus de production
actuels4,31-35. Les réactions d'oxydation du glycérol sont principalement réalisées en
présence d’oxydants puissants en quantité stœchiométrique (permanganate de
potassium, acide nitrique ou encore acide chromique). Ces voies de synthèse ont aussi le
défaut de ne pas être sélectives et entraînent la formation de nombreux sous-produits
indésirables31,36 provenant de la rupture des liaisons carbone-carbone. Des procédés
enzymatiques ou microbiens ont aussi été utilisés et ont aidé à améliorer la sélectivité de
la réaction d’oxydation du glycérol, notamment vers le dihydroxyacétone, mais le
procédé reste couteux du fait de la très lente cinétique de réaction et de la difficulté à
séparer les produits de réaction du milieu de culture.
3. Produits d’oxydation du glycérol
Le glycérol possède une grande réactivité chimique grâce à la présence des trois
groupements hydroxyles: chacun des atomes de carbone portant une fonction alcool est
potentiellement activé et peut subir des réactions d’oxydation. Les chemins réactionnels
les plus importants pour la conversion du glycérol par oxydation sont présentés sur le
Figure 2. Ce schéma réactionnel montre deux voies principales de réaction. La première
consiste en l’oxydation d’un atome de carbone portant un groupement «alcool primaire»
(voie de gauche), alors que la seconde consiste en l’oxydation du carbone portant un
groupement «alcool secondaire» (voie droite).
En pratique, toutes les espèces oxygénées obtenues par oxydation sélective du
glycérol sont commercialement utilisables37. Par exemple, le 1,3-dihydroxyacétone
(DHA) est un des produits chimiques importants de l’oxydation du glycérol d’un point
de vue économique car il est utilisé dans de nombreuses industries, en particulier en
cosmétique comme agent bronzant38 et sert aussi de syntone élémentaire versatile pour
la synthèse organique et pour de nombreux composés de chimie fine39,40 qui trouveront
une utilisation dans l’industrie pharmaceutique et l’industrie des polymères. Le DHA
11
peut être obtenu par la conversion microbienne du glycérol41 mais le procédé
d’extraction de DHA est complexe et couteux ce qui limite son développement à
l’échelle industrielle31,36. L’acide glycérique, l’acide tartronique et l’acide mésoxalique
sont principalement convertis en polymères ou émulsifiants biodégradables4. Mais ces
produits pourraient également servir comme agents complexant les métaux lourds pour
le contrôle de la pollution de l’eau31, ainsi que pour la synthèse de composés
biocompatibles utilisés dans l’industrie des détergents ou comme additifs alimentaires.
En fait, comme l’indique le Tableau 1 dans lequel les prix des divers composés sont
indiqués par unité de masse, les produits d’oxydation du glycérol possèdent tous une
valeur plus élevée que celle de glycérol, parfois dans un rapport 500 (dans le cas de
l’hydroxypyruvate).
Les couts relatifs des différents produits formés par oxydation du glycérol en
milieu alcalin sont présentés dans le Tableau 1.
Produit Fournisseur Prix, (€ g-1),
données 2014
Glycérol (≥99%) Sigma Aldrich 0,32
Glycéraldéhyde (≥90%) Sigma Aldrich 86,50
Dihydroxyacétone VWR 0,57
Acide glycérique (≥99%) Sigma Aldrich 82,50
Hydroxypyruvate Sigma Aldrich 152,00
Acide tartronique (≥97%) Sigma Aldrich 7,04
Acide mesoxalique* - -
Acide glycolique (≥99%) Sigma Aldrich 1,03
Acide glyoxylique Sigma Aldrich 0,14
Acide oxalique (≥99%) Sigma Aldrich 0,46
Tableau 1 Produits d’oxydation du glycérol en milieu alcalin et leurs couts relatifs.
* A noter que le coût de mésoxalate n’est pas renseigné par les fournisseurs commerciaux et dépend de la quantité commandée.
12
Figure 2 Produits principaux de l’oxydation du glycérol4.
4. Conversion électrochimique du glycérol
La conversion électrochimique du glycérol peut être réalisée en milieu acide ou
en milieu alcalin. Le choix du milieu sera principalement orienté par le coût de matériau
nécessaire pour le fonctionnement du système.
Les piles à combustible et les électrolyseurs avec une membrane conductrice de
protons fonctionnent généralement avec des électrodes à base de métaux nobles (le
platine, le palladium, le ruthénium, les oxydes d'iridium, etc.). Le platine, en effet, reste
encore un catalyseur irremplaçable en milieu acide et sert de référence en milieu
alcalin42,43 pour certaines réactions électrochimiques comme, par exemple, la réduction
de l’eau et l’oxydation des alcools. En milieu acide, ce métal est le seul capable d’initier
les premières étapes d’oxydation, notamment celle de l’adsorption dissociative des
13
alcools procédant de la rupture des liaisons C-H8,9,44. De plus, peu de métaux sont
stables en milieux acide; même le palladium qui fait partie de la famille du platine et est
souvent considéré comme un métal noble, ne possède pas une stabilité suffisante en
milieu acide et subit des phonèmes de corrosion et de dissolution pour des potentiels
d’électrodes relativement faibles.
En milieu alcalin, en revanche, des métaux moins nobles que le platine, et aussi
moins onéreux et plus disponibles, peuvent être utilisés comme matériaux catalytiques
pour activer non seulement les réactions d’oxydation d’alcools à l’anode des réacteurs
électrochimiques, mais aussi les réactions de réduction de l’oxygène et de l’eau à la
cathode des réacteurs électrochimiques. Un autre avantage du milieu alcalin sur le
milieu acide se situe au niveau des produits de réaction. En effet en milieu acide la
rupture de la liaison carbone-carbone est plus aisée et favorise la formation des
composés à un ou deux atomes de carbone (acide formique, acide oxalique, acide
glycolique) qui possèdent une valeur ajoutée plus faible que les produits d’oxydation à
trois atomes de carbone formés préférentiellement en milieu alcalin. En milieu alcalin la
dissociation du glycérol lors de son adsorption (la rupture de la liaison C-C) est limitée
et le glycéraldéhyde et/ou le dihydroxyacétone deviennent les intermédiaires/produits de
réaction majoritaires9.
Les réacteurs électrochimiques peuvent se présenter sous deux configurations
différentes: la configuration «pile à combustible» et la configuration «électrolyseur». La
Figure 3 présente les schémas de principe de ces deux configurations de réacteurs
électrochimiques dans le cas de l’oxydation complète du glycérol en carbonate en
milieu alcalin. La configuration «pile à combustible» permet d’obtenir simultanément
des produits chimiques à haute valeur ajoutée (dans le cas de l’oxydation contrôlée et
ménagée du glycérol à l’anode) et de l’énergie électrique par la réaction d’oxydation
directe du glycérol à l’anode couplée à la réaction de réduction de l’oxygène à la
cathode. Dans le cas de la configuration «électrolyseur», des produits chimiques à
haute valeur ajoutée sont obtenus en même temps que des molécules d’hydrogène par
oxydation directe du glycérol à l’anode et la réduction de l’eau à la cathode.
14
Figure 3 Principe de fonctionnement: d’une pile à combustible à glycérol en milieu alcalin et d’un
électrolyseur.
De nos jours, la production massive d’hydrogène est principalement réalisée à
partir de composés fossiles par reformage d’hydrocarbures. Bien que ce procédé soit
actuellement le moins onéreux, il ne peut pas être considéré comme un procédé de la
chimie durable et de plus, l’hydrogène produit contient une quantité significative de
monoxyde de carbone (CO) qui n’autorise pas son utilisation directe au sein des piles à
combustible à basse température. Pour ce faire, il est nécessaire de purifier l’hydrogène
par l’intermédiaire de réactions de types « water gas shift », oxydation préférentielle,
etc., énergivores qui compliquent le procédé et augmentent le coût de production de
l’hydrogène. L’électrolyse de l’eau est un autre moyen de produire de l’hydrogène
propre. Dans ce cas, il est intéressant de comparer d’un point de vue thermodynamique
la production électrochimique d’hydrogène par électrolyse de l’eau et par l’électrolyse
du glycérol. Les valeurs thermodynamiques pour l’électrolyse de l’eau et du glycérol
sont présentées ci-dessous.
H2O → 1/2 O2 + 2 H+ + 2 e− (1)
ΔΗ0r = 286 kJ.mol-1 ΔG0
r = 237 kJ.mol-1
CH2OH–CHOH–CH2OH + 3 H2O → 3 CO2 + 14 H+ + 14 e− (2)
15
ΔΗ0r = 3ΔΗ0
f (CO2)gaz - 3ΔΗ0f (H2O)liq - ΔΗ0
f (Glycérol)liq = 3(-393,5) + 3285,8 +
665,9 = 342,8 kJ.mol-1 , ΔG0r = 3 (-394,4) + 3237,2 + 475,5 = 3,9 kJ.mol-1
Les valeurs d’enthalpie de réaction montrent la nécessité d’un apport d’énergie
extérieure, fournie par un courant électrique. La tension théorique minimale standard U0
pour activer la réaction peut être calculée à partir de ΔG0r : U0 = ΔG0
r/nF, avec n le
nombre d’électrons impliqués dans la réaction et F la constante de Faraday. Ainsi dans
le cas de l’électrolyse de l’eau, une tension minimale de 1,23 V (n=2)5 doit être
appliquée dans les conditions standards contre 0,003 V (n=14) dans le cas du glycérol.
Toutefois, il faut ajouter à ces valeurs théoriques, une surtension nécessaire pour obtenir
une cinétique suffisante. Les données thermodynamiques montrent, donc, que
l’utilisation d’alcools, et notamment du glycérol45 à l’anode d’un électrolyseur
pourrait être énergétiquement plus intéressante que l’oxydation de l’eau pour la
production d'hydrogène. L’énergie stockée dans l’hydrogène peut ensuite être récupéré
grâce à une pile à combustible H2/O246.
Les piles à combustible ont un grand potentiel en tant que source d’alimentation
pour les appareils électroniques portables. Bien que l’hydrogène soit un combustible qui
permet d’atteindre un rendement électrique supérieur, sa production et sa purification
restent encore problématiques46-48. En effet, bien que l’hydrogène soit l’élément
chimique le plus abondant dans l’univers, il n’existe pas (ou de manière anecdotique)
sous la forme de molécules de dihydrogène sur la planète; il est en effet quasiment
exclusivement combiné soit avec du carbone (les hydrocarbures) soit avec de l’oxygène
(l’eau). L’utilisation de combustibles liquides, tels que des alcools et des polyols peut
alors être avantageuse49,50. Les nouvelles technologies de piles à combustible alcalines
(AFC) sont en cours de développement. Cependant, il est plus intéressant d’un point de
vue énergétique d’utiliser l’hydrogène fournit par une cellule d’électrolyse dans laquelle
un alcool est oxydé à l’anode plutôt que d’utiliser directement l’alcool comme
combustible dans la pile (Figure 4).
.
16
Figure 4 Comparaison des caractéristiques électriques E(j) représentatives d’une loi cinétique de
Butter–Volmer pour l’oxydation de l’hydrogène, du glycérol, de l’eau, la réduction de l’oxygène et de des
protons pour une densité de courant de 1 A.cm-2.
Maintenant, la question peut être : quel est le meilleur alcool pour ce type de
procédé? Le méthanol présente généralement une assez bonne réactivité pour son
oxydation totale en CO2, produisant 6 moles d’électrons par mole de méthanol. Mais
c’est un composé toxique qui de plus possède une forte affinité avec l’eau, ce qui peut
conduire à des risques pour la santé et l’environnement. De plus, le méthanol est
principalement produit à partir de l’oxydation partielle du gaz naturel dans des procédés
industriels. L’éthanol est moins toxique et plus attrayant parce qu’il peut être produit à
partir de la fermentation du sucre issu des céréales ou de la betterave. Mais, en raison de
la difficulté de la rupture de la liaison C-C à basse température, les principaux produits
de réaction de l’oxydation de l’éthanol sont l’acétaldéhyde et l’acide acétique (en milieu
acide) ou l’acétate (en milieu alcalin)51, ce qui conduit à un rendement faible en
configuration pile à combustible (entre 17 et 33 % de l’énergie théorique) et à la
production des composés à faible valeur ajoutée en configuration «électrolyseur».
Accessoirement, l’acétaldéhyde est suspecté d’être toxique et cancérigène (fiche de
toxicité n°120 de l’INRS).
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
- 0,2 - 0,4 - 0,6 - 0,8 - 1,0
j / A cm-2
E vs ERH/V
0,4 0,8 1,2 1,6 2,0
O2 H2O
1,23
H2 H+
UFC(O2/H2) = 0,65 V
H+ H2
H2O O2
UEC =1,8 - 2,0V
UFC(O2/H2)/ Ualcool EC
Ualcool EC= 0,8V
17
L’utilisation des polyols comme combustible peut être une alternative
intéressante. Une relativement bonne réactivité de l’éthylène glycol et du glycérol (6
mW.cm-2 et 10 mW.cm-2 respectivement) a été démontrée en milieu alcalin par
Matsuoka52 dans une SAMFC équipée d’une électrode à base de PtRu. Demarconnay53
a obtenu une performance proche de 30 mW.cm-2 avec de l'éthylène glycol 2,0 M à
température ambiante dans une SAMFC (Solid Alkaline Membrane Fuel Cell) munie d’
une anode Pt0,45Pd0,45Bi0,1/C contre 22 mW.cm-2 avec une anode Pt0,9Bi0,1/C dans les
même conditions expérimentales. Ilie a obtenu jusqu’à 25 mW.cm-2 dans une pile à
combustible avec un catalyseur Pt/C pour la cathode et une électrode à base de
Pt0,9Bi0,1/C comme anode17. La possibilité de cogénération de l’énergie et des produits
chimiques par l’oxydation électrochimique du glycérol a été mentionnée en 2010 par
Simoes50. Plus tard, Zhang a étudié l’oxydation électrocatalytique du glycérol pour la
cogénération d’électricité et de produits chimiques à haute valeur ajoutée sur un
catalyseur classique de Pt/C à l’anode d’une pile à combustible à membrane conductrice
d’anions (AEMFC)54. De plus, les polyols tels que l’éthylène glycol et le glycérol sont
moins toxiques que le méthanol et présentent une densité d’énergie théorique
relativement élevée (respectivement, 5,2 et 5,0 kWh.kg-1 pour l’éthylène glycol et le
glycérol, contre 6,1 et 8,0 kWh.kg-1 pour le méthanol et l’éyhanol, respectivement49).
Dans les polyols, chaque atome de carbone porte un groupement alcool et en
conséquence leur oxydation partielle en oxalate et mesoxalate (selon les réactions 3 et
4), sans rupture de la liaison C-C et production de CO2, implique 8 et 10 électrons
échangés pour l’éthylène glycol et le glycérol, contre 10 et 14 électrons, respectivement,
pour l’oxydation complète en carbonate (réactions 5 et 6).
CH2OH–CH2OH + 10 OH−→ COO−–COO− + 8 H2O + 8e− (3)
CH2OH–CHOH–CH2OH + 12 OH−→ COO−–CO–COO− +10 H2O + 10 e− (4)
CH2OH–CH2OH + 14 OH−→ 2 CO32- + 10 H2O + 10 e− (5)
CH2OH–CHOH–CH2OH + 20 OH−→ 3 CO32- + 14 H2O + 14 e− (6)
Cependant, l’éthylène glycol est un produit issu de l’industrie pétrochimique et
provient principalement de l’oxydation partielle de l’éthylène, tandis que le glycérol,
18
comme il a été dit précédemment, est un sous-produit encore peu valorisé de l’industrie
des agro-carburants. Il peut à ce titre être considéré comme une matière première
secondaire issue de la biomasse.
Dans une pile à combustible (PEMFC = proton exchange membrane fuel cell) ou
un électrolyseur (PEMEC = proton exchange membrane electrolysis cell) acide à alcool
directe, les protons traversent la membrane conductrice protonique de l’anode où les
alcools sont oxydés vers la cathode, pour participer à la réaction de réduction de
l’oxygène (mode PEMFC) ou être réduits en hydrogène moléculaire (mode PEMEC).
Au contraire, dans les piles à combustible (SAMFCs) et les électrolyseurs (SAMECs) à
membrane alcaline solide, ce sont les ions hydroxyles qui traversent la membrane
conductrice d’anions de la cathode où les réactions de réduction de l’oxygène ou de
l’eau se produisent selon les équations 7 ou 8, vers l’anode où le glycérol est oxydé
selon, par exemple, les équations 9 et 10 conduisant à la production de glycéraldéhyde
et de glycérate.
Réactions de réduction:
1/2 O2 + H2O + 2 e− → 2 OH− (7)
2 H2O + 2 e− → 2 OH− + H2 (8)
Réactions d’oxydation:
CH2OH–CHOH–CH2OH + 2 OH−→ CH2OH–CHOH–CHO + 2 H2O + 2 e− (9)
CH2OH–CHOH–CH2OH + 5 OH− → CH2OH–CHOH–COO- + 4 H2O + 4 e− (10)
Ainsi, les réactions complètes dans le cas d’une SAMFCs produisant, par exemple, du
glycéraldéhyde, du glycérate et du carbonate sont les suivantes:
CH2OH–CHOH–CH2OH + 1/2 O2 → CH2OH–CHOH–CHO + H2O (11)
CH2OH–CHOH–CH2OH + O2 + OH− → CH2OH–CHOH–COO- + 2 H2O (12)
CH2OH–CHOH–CH2OH + 7/2 O2 + 6 OH− → 3 CO32- + 7 H2O (13)
Et, les réactions correspondantes pour les SAMECs sont:
19
CH2OH–CHOH–CH2OH → CH2OH–CHOH–CHO + H2 (14)
CH2OH–CHOH–CH2OH + OH−→ CH2OH–CHOH–COO- + 2 H2 (15)
CH2OH–CHOH–CH2OH + 6 OH−→ 3 CO32- + 7 H2 (16)
L’oxydation des polyols à l’anode d’une pile à combustible ou d’un
électrolyseur peut donc être réalisée relativement facilement, permettant la production
d’électricité pour l’alimentation directe d’appareils électroniques de faible puissance ou
d’hydrogène propre pour alimenter une pile de plus forte puissance ou pour la chimie.
Cependant, pour rendre de tels systèmes intéressants pour d’éventuelles applications, les
performances globales électriques des réacteurs électrochimiques doivent être
améliorées. Cela permettrait non seulement de concevoir des générateurs électriques
avec une puissance plus élevée, mais également d’augmenter le rendement en produits
à haute valeur ajoutée (dont l’hydrogène). Il est nécessaire pour cela d’augmenter les
vitesses de réaction (activité) et d’orienter les chemins réactionnels vers les produits
désirés (sélectivité), c’est le rôle de l’électrocatalyse. Pour cela, le développement
d’électrocatalyseurs spécifiques aux réactions envisagées et aux milieux considérés doit
être effectué.
II. Les catalyseurs
La nature, la structure et la composition des catalyseurs mono- et multi-
métalliques ont des effets importants sur le chemin réactionnel d’électrooxydation du
glycérol, et par conséquent sur leur activité (production d’énergie ou de dihydrogène) et
sélectivité (en ce qui concerne les produits de réaction d’oxydation)50. En effet,
l’électrooxydation du glycérol peut se produire par l’intermédiaire de deux chemins
réactionnels selon que les fonctions « alcool » primaires ou la fonction « alcool »
secondaire soient préférentiellement attaquées lors de la première étape du processus, et
conduire à plusieurs types à produits selon les schémas réactionnels suivants:
20
Figure 5 Les schémas réactionnels de l’électrooxydation du glycérol.
Le platine est le matériau de référence pour l’électrooxydation des alcools en
milieu acide, comme en milieu basique. En milieu acide, ce métal est considéré comme
le seul à pouvoir initier les premières étapes de l’adsorption des alcools, à savoir la
rupture de la liaison C-H44. En milieu alcalin, d’autres métaux ont été proposés comme
candidats pour l’oxydation électrocatalytique des alcools en général, et du glycérol en
particulier: le palladium et l’or55. Le palladium, qui est moins noble que le platine,
gagne en stabilité en milieu alcalin. L’or est inactif en milieu acide pour l’oxydation des
alcools56,57 mais il le devient en milieu alcalin en raison de sa capacité à adsorber des
espèces hydroxyles à sa surface à des potentiels relativement bas (0,4 V vs. ERH)56.
1. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs monométalliques
a. Le platine
Les effets du potentiel d’électrode et du pH du milieu réactionnel sur l’oxydation
électrocatalytique du glycérol sur des électrodes de platine ont été étudiés dans les
années 1990 par Roquet et al.9. Ces auteurs ont analysé les produits de réaction par
chromatographie liquide pendant des expériences de chronoampérométrie à potentiels
contrôlés. Ils trouvèrent en particulier que la sélectivité vers la production de
glycéraldéhyde dépendait fortement du potentiel d’électrode et du pH de l’électrolyte.
Rupture de la iaison C-C :
produits en C2 et C1
-2 e-
-2 e- -4 e-
-2 e-
-2 e-
-4 e-
-4 e-
glyceraldéhyde
glycérol
dihydroxyacétone
glycérate tartronate
mésoxalate
hydroxypyruvate
21
En milieu acide, l’oxydation dissociative du glycérol conduisait aux acides
formique, oxalique et glycolique lorsque le potentiel était fixé dans la zone de formation
des oxydes de surface sur le platine. En revanche, lorsque le potentiel d’électrode était
fixé avant le début de la formation des oxydes de surface sur le platine, la sélectivité
vers la formation de glycéraldéhyde devenait très élevée.
En milieu alcalin, très peu de produits de dissociation, provenant de la rupture de
la liaison C-C, ont été détectés, et ce indépendamment de la valeur du potentiel
appliquée à l’électrode. En revanche, la vitesse de conversion du glycérol était
sensiblement augmentée en comparaison avec le milieu acide.
De récentes études de l’oxydation du glycérol par spectroscopie infrarouge
réalisées par Fernandes Gomes et Tremiliosi-Filho sur du platine polycrystallin
indiquait que la sélectivité de la réaction ne semblait pas dépendre de la valeur du pH du
milieu; les produits principaux de réaction étant les acides tartronique (tartronate en
milieu alcalin), glycolique (glycolate), glyoxylique (glyoxylate), formique (formate) et
le dioxyde de carbone (carbonate)58. Au contraire, sur la base de mesure par HPLC et
nano balance électrochimique à crystal de quartz, Kwon et al. ont trouvé une
dépendance du mécanisme avec le pH: du glycérate produit à partir de glycéraldéhyde
adsorbé est le produit principal en milieu alcalin, tandis que lorsque le pH est diminué,
le glycéraldéhyde devenait le produit principal de réaction59.
Enfin, l’effet de la structure cristalline des surfaces de platine sur l’électro
oxydation du glycérol a été étudié par Avramov-Ivic et al8. Ces auteurs n’ont pas
observé de différences notables d’activité entre les monocristaux Pt(111), Pt(110) et
Pt(100), bien que la surface Pt(111) semblait être la plus active. Ils ont en revanche
montré que la cinétique de réaction était globalement plus élevée en milieu alcalin qu’en
milieu acide et que l’adsorption et l’oxydation de glycérol avec rupture de la liaison C-C
étaient limitées.
22
b. L’or
L'or est un matériau inactif en milieu acide pour l’électrooxydation des
alcools56,57 mais il devient actif en milieu alcalin en raison de sa capacité d’adsorber à
sa surface des espèces hydroxyle (OH) à relativement bas potentiels (environ 0,4 V vs.
ERH)56. Il a été d’ailleurs récemment montré que l’or possédait une activité
électrocatalytique élevée pour l’oxydation du glycérol en milieu alcalin59,60.
En 1984, Kahyaoglu et al. ont en effet observé que l’or était en effet actif pour la
réaction d’oxydation du glycérol seulement en milieu alcalin6. Cette propriété a été
récemment confirmée par Kwon et al.59. Pour de faibles concentrations en glycérol, le
mécanisme suivant a été proposé pour l’oxydation du glycérol en milieu alcalin:
M + Gly M-Glyads (17)
M + OH- M-OH + e- (18)
M-Glyads + M-OH produits (19)
M-Glyads + OH- produits + e- (20)
où M représenté un site métallique d’adsorption et Gly est une molécule de glycérol.
Pour expliquer la différence de comportement catalytique entre le platine et l’or,
les auteurs ont proposé que la réaction d’adsorption des ions hydroxyles fût l’étape
limitante sur l’or, tandis que sur la platine l’étape limitante était la réaction d’adsorption
du glycérol. Mais, quelques années plus tard, Adzic et Avramov-Ivic61 ont étudié
l’électrooxydation de l’éthylène glycol en milieu alcalin sur des monocristaux Au(111),
Au(110) et Au(100) et ont montré que l’adsorption des ions hydroxyles avec un
transfert partial d’électron pouvait être l’étape limitante pour l’adsorption d’alcool sur
des surfaces d’or. La réaction suivante de transfert partiel d’électron a été proposée:
Au + OH- Au λ+- OHλ- + e- (21)
Cette réaction est sensible à la structure du catalyseur et l’adsorption d’espèces
hydroxyles se produit à plus faibles potentiels sur une surface Au(110) que sur les
23
surfaces Au(100) et Au(111). Les auteurs ont vérifié que le déplacement du potentiel de
début d’oxydation du glycérol suivait la même tendance que celui de l’adsorption des
ions hydroxyles sur les surfaces respectives. Avramov-Ivic´ et al.7 ont plus tard
confirmé l’adsorption d’ions hydroxyles avec un transfert partiel de charge comme étant
l’étape limitante sur une surface Au(100). De plus, les auteurs ont proposé que le
glycérol ne s’adsorbait pas sur une surface d’or avant la formation d’espèces Au-OHads
et que la première étape de la réaction d’oxydation du glycérol impliquait une
interaction entre l’atome d’hydrogène porté par le carbone secondaire de la molécule de
glycérol et une espèce Au-OHads.
Simoes et al. ont par ailleurs récemment montré, sur la base d’une étude par
spectroscopie infrarouge in situ de l’oxydation du glycérol, la formation de
dihydroxyacétone et d’hydroxypyruvate sur des nanoparticules d’or qui implique
l’oxydation de la fonction alcool secondaire en cétone50. La formation de ces composés
a été ensuite confirmée par analyse en chromatographie liquide après des expériences
de chronoampérométrie à potentiels contrôlés.
Kwon et al. ont obtenu de l’acide glycérique comme produit primaire à bas
potentiels; ce produit de réaction peut ensuite être oxydé à plus hauts potentiels (> 0,8
V) pour donner des acides glycolique et formique59. Zhang et al., quand à eux, ont
analysé les produits de réaction à la sortie anodique d’une pile alcaline à membrane
alimentée en glycérol et équipée d’une anode Au/C; ils ont trouvé que l’or favorisait la
production de produits fortement oxydés, tels que les acides tartronique, mésoxalique et
oxalique60. Dans leurs expériences, ils ont appliqué différentes tensions de cellule
pendant 2 heures avec recirculation de la solution anodique, ce qui pouvait permettre la
suroxydation d’espèces de type dihydroxyacétone et hydroxypyruvate en acide
tartronique et mésoxalique.
c. Le palladium
Le palladium possède une activité catalytique très élevée pour plusieurs
processus électrochimiques, tels que la réaction de dégagement d’hydrogène, la réaction
24
d’oxydation de l’hydrogène en milieu acide62, la réduction de l’oxygène63 dans les
milieux acides et alcalins, et l’oxydation de composés organiques simples5,19,63-73.
Les catalyseurs à base de palladium sont plus stables en milieu alcalin qu’en
milieu acide. La réaction d’électrooxydation est dépendante de l’adsorption des
groupements hydroxyle sur la surface. Ce fait est déterminant pour justifier l’écart
d’activité entre le palladium et le platine. La désorption de l’hydrogène de la surface du
palladium se produit à des potentiels plus élevés que sur le platine. A cause de cela, la
surface métallique n’est pas accessible pour l’adsorption des ions hydroxyles. Ceci
engendre un écart de potentiel entre la formation des espèces surfaciques PdOHads et
PtOHads ce qui conduit à une différence considérable pour le potentiel de début
d’oxydation du glycérol entre le palladium et le platine.
Les avantages d’un catalyseur de palladium par rapport à celui de platine est son
coût, deux à trois fois moins élevé (le coût de palladium est environ de 20 000 € / kg)13,
ainsi que son abondance sur la terre (Pd est au moins 50 fois plus abondant que Pt)70.
Le comportement du palladium vis à vis de la réaction d’oxydation du glycérol
a été étudié par Yildiz et Kadirgan1. Ils ont observés deux pics d’oxydation au cours de
la variation positive de potentiel. La première vague d’oxydation apparaissait juste après
la désorption de l’hydrogène de la surface du palladium. A partir de résultats infrarouge
in situ, ils ont attribué une bande d’absorption à 1600 cm-1 à la formation de glycérate.
Mais, dans le cas du glycérol, la symétrie de la molécule peut conduire à l’oxydation
des deux groupements alcools primaires avec formation de glycérate et de tartronate;
leur distinction par infrarouge est loin d’être triviale. Plus récemment les performances
de catalyseurs Pd/MWCNT (Multi Walled Carbon Nanotubes) ont été évaluées au sein
d’une pile à combustion directe de glycérol9,19. L’analyse par RMN du 13C des produits
de réaction après 12 h d’opération à température ambiante à intensité contrôlée de 102
mA a conduit à la détection de glycérate, tartronate, glycolate, oxalate, formate et
carbonate. La recirculation de la solution anodique à l’anode de la pile et le potentiel
élevé de l’étude est certainement responsable de la large variété de produits formés et ne
permet pas de proposer un mécanisme.
25
Cependant, il est apparu que le palladium pouvait casser la liaison C-C et que le
carbone portant la fonction alcool secondaire ne s’était pas oxydé dans ces conditions.
Simoes a observé par spectroscopie infrarouge in situ les mêmes bandes d’absorption
sur le palladium que sur le platine et a donc conclut que le même mécanisme était en
jeu sur ces deux catalyseurs50. Dans les deux cas, une bande d’absorption à 1335 cm-1
attribuée à la formation de dihydroxyacétone (DHA) a été observée à bas potentiels.
Ceci indiquait, donc, que le carbone portant la fonction alcool secondaire pouvait être
oxydé. Pourtant, il n’observa pas de formation d’hydroxypyruvate, ni par infrarouge in
situ, ni par analyse HPLC. Il a été proposé que le DHA produit à la surface des
électrodes subissait une réaction d’isomérisation rapide vers le glycéraldéhyde qui
pouvait être ensuite oxydé vers le glycérate et le tartronate.
2. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs bimétalliques
Les catalyseurs bimétalliques à base de métaux nobles ont été extensivement
étudiés au cours de ces dernières années74-79. Il a été montré que des alliages du platine
avec des atomes de métaux moins nobles permettaient d’augmenter sensiblement
l’activité et la sélectivité du catalyseur vis-à-vis des réactions d’électrooxydation des
alcools51,80. Le comportement électrocatalytique d’un alliage Pd0,5Pt0,5/C a été évalué et
comparé à ceux de catalyseurs monométaliques Pt/C et Pd/C. Les caractérisations par
méthodes électrochimiques pour la surface et de diffraction de rayon X ont indiqué que
la structure cristalline des nanoparticules Pd0,5Pt0,5 correspondait à celle des
nanoparticules de Pt et que cet alliage a été formé par substitution des atomes de platine
par des atomes de palladium. Le catalyseur bimétallique a affiché une activité plus
élevée que les catalyseurs monométalliques, pour l’oxydation du glycérol5. Un tel effet
synergique du palladium allié au platine a déjà été observé pour l’électrooxydation de
l’éthylène glycol en milieu alcalin en cellule électrochimique classique à trois
électrodes, ainsi que dans des piles à combustible53,81.
L’électrooxydation du glycérol a aussi été étudiée sur des alliages PdxAu1-x de
compositions atomiques différentes50. Le mécanisme de la réaction, ainsi que la
sélectivité du matériau ont été comparés à ceux obtenus sur l’or et le palladium purs. Le
26
potentiel de début d’oxydation du glycérol sur PdxAu1- x /C est d’environ 0,5 V pour x >
0,5, le même que pour Au/C et Pd/C et environ 0,45 V pour x ≤ 0,5. L’activité des
alliages PdxAu1-x est plus élevée et plus proche de celle du platine pur. Les activités les
plus élevée ont été obtenues pour des rapports atomiques Pd /Au 1:1 et 3:7; Toutefois,
Simoes et al. ont montré que les surfaces de ces catalyseurs étaient riches en palladium,
correspondant à 76 et 61 at% de palladium à la surface, respectivement82, au lieu des 50
% et 30 % donnés par analyse ICP-OES. L’amélioration de l’activité s’explique par le
mécanisme bifonctionnel83, ainsi que par l’effet de ligand84. Les spectres infrarouge des
intermédiaires de réaction sur les catalyseurs PdxAu1- x /C ont fait apparaître la même
bande d’absorption, à 1335 cm-1, que sur le catalyseur Pd/C, attribuée à la formation du
dihydroxyacétone aux bas potentiels et la formation d’espèces issues de l’oxydation des
groupes alcool primaire du glycérol à des potentiels plus élevés. L’apparition d’une
bande d’absorption infrarouge à 1350 cm-1 attribuée à l’hydroxypyruvate n’avait quant à
elle pas été détectée. En outre, une bande d’absorption à 1900 cm-1, attribuée à des
espèces de CO adsorbé sur le palladium85 (qui est une preuve de la capacité du
catalyseur de casser la liaison C-C ), n’était présente que pour des rapports atomiques de
palladium: or supérieurs à 3:7. La présence de l’or sur la surface de catalyseur
permettait la diminution de l’empoisonnement par le monoxyde de carbone adsorbé et
l’amélioration de l’activité du catalyseur.
Récemment, Simoes a montré que la modification du palladium par le nickel
conduisait aussi à une augmentation de l’activité pour l’électrooxydation du glycérol,
laquelle s’approchait de celle du platine50. Les mesures par spectroscopie infrarouge in
situ ont démontré des changements importants du comportement de Pd/C après
l’addition des atomes de nickel. Il a ainsi été montré que le palladium favorisait
l’oxydation du groupement alcool primaire (ce qui conduisait à des composés tels que
carboxylates et tartronates)50.
Simoes a obtenu des courbes de polarisation en milieu 0,1 M glycérol + 1 M
NaOH sur des catalyseurs PdxBi1-x/C montrant une activité électrocatalytique pour
l’oxydation du glycérol beaucoup plus élevée que celle du palladium seul et équivalente
27
à celle d’un catalyseur Pt/C, avec un déplacement du début de la vague d’oxydation de
0,6 V vs. RHE à 0,4 V vs. RHE. En revanche, la modification du platine par Bi
déplaçait le début d’oxydation de 0,2 V vers les bas potentiels (de 0,4 V vs ERH à 0,2 V
vs. ERH). Ces résultats remarquables d’augmentation de l’activité catalytique du platine
et du palladium vis-à-vis de l’oxydation de petites molécules organiques induite par leur
modification par des atomes des éléments du groupe p71,86-89, notamment, du
bismuth53,90-92 a fait l’objet d’un intérêt croissant au cours des dernières décennies.
L’étude du comportement électrochimique de surfaces du platine et du palladium
modifiées par la présence d’atomes de bismuth a permis d’accroitre la compréhension
de la nature de ces modifications et de la structure des matériaux93,94. Un métal étranger
non noble permet aussi de limiter l’adsorption du CO sur la surface d’un métal noble,
c'est-à-dire l’empoisonnement du catalyseur83,95.
Il a été observé que la présence de bismuth a une influence sur le mode
d’adsorption du glycérol (le début d’oxydation est décalé vers les bas potentiels) et que
pour les potentiels plus élevés, l’oxydation du bismuth peut apporter des espèces
hydroxyles pour compléter la réaction d’oxydation, assurant un pH élevé à la surface86.
III. Conclusion et objectifs
En milieu alcalin un catalyseur Pt/C est le plus actif vis-à-vis de l’oxydation du
glycérol, présentant une surtension d’oxydation inférieure d’environ 0,2 V à celle
obtenue avec les catalyseurs Pd/C et Au/C. Les inconvénients principaux de l’utilisation
des catalyseurs à base de platine sont le coût de ce métal noble (actuellement plus de 40
000 €/kg) et les ressources mondiales limitées qui représente un frein pour le
développement durable. En raison du fait que le platine est un métal couteux et rare, le
palladium a été considéré comme l’élément de base des catalyseurs développés et
étudiés au cours de cette thèse de doctorat.
L’étude bibliographique a montré qu’il y avait des désaccords concernant les
mécanismes d’oxydation du glycérol sur le palladium: certains auteurs ont montré que
28
seules les fonctions alcool primaire étaient oxydées sur le palladium tandis que d’autres
ont montré la formation de dihydroxyacétone. Les réactions d’électrooxydation
d’alcools ont lieu à la surface des électrodes, et ces réactions d’oxydation d’alcools en
général, et du glycérol en particulier, sont sensibles à la structure des catalyseurs. Il
apparaissait donc important de vérifier dans un premier temps l’activité et la sélectivité
de nanoparticules de palladium présentant des structures de surfaces différentes vis-à-
vis de la réaction d’oxydation du palladium afin de tenter d’établir une corrélation
structure/comportement électrocatalytique.
Toujours en partant de l’étude bibliographique, il est apparu que la modification
des surfaces de palladium par le bismuth induisait de forte variation de l’activité et de la
sélectivité du catalyseur vis-à-vis de la réaction d’électrooxydation du glycérol. La
modification de la surface des nanoparticules de palladium à distributions de taille et de
forme contrôlées par dépôt spontané et contrôlé de bismuth a été réalisée dans un
second temps et les effets sur l’activité et la sélectivité ont été évalués.
Enfin, des matériaux catalytiques réels, c’est-à-dire dont la production peut
aisément être industrialisée, à base de palladium modifié par des éléments du groupe p
(bismuth et étain) ont aussi été étudiés.
Une attention particulière a été donnée aux caractérisations physicochimiques de
tous les matériaux synthétisés. Cela a permis d’atteindre une bonne compréhension des
structures qui composent les surfaces catalytiques et de leur influence sur l’activité et la
sélectivité des catalyseurs.
29
B. Partie expérimentale
I. Nettoyage de la verrerie
Pour réaliser une expérience électrochimique, il est d’une extrême importance
que tout le matériel en contact avec les électrodes et l’électrolyte soit très propre. La
présence de molécules organiques adsorbées sur la verrerie est indésirable: ces
molécules peuvent se solubiliser dans l’électrolyte et réagir avec le catalyseur au cours
d’une expérience. Dans ce cas, soit la molécule reste irréversiblement adsorbée sur la
surface catalytique dans la zone de potentiel considérée, bloquant des sites actifs, soit
elle va réagir avec le catalyseur. S’il y a un transfert de charge, des pics de courant
apparaîtront lors de l’enregistrement des courbes de polarisation. Le nettoyage du
matériel de laboratoire est donc d’une importance extrême et ne doit pas être négligé
avant toute expérience d’électrochimie.
Généralement la verrerie est nettoyée à l’aide de solutions fortement oxydantes.
La procédure consiste à immerger la verrerie dans une solution acidifiée de
permanganate de potassium (Sigma-Aldrich) pendant 24 h. Après avoir sorti la verrerie
de la solution de permanganate, celle-ci est rincée avec une solution composée en
volume d’un quart de peroxyde d’hydrogène à 33% vol. (VWR), d’un quart d’acide
sulfurique à 95% vol. (VWR) et d’un demi d’eau ultra pure. L’acide persulfurique
formé ainsi est un composé très dangereux, toutes les manipulations doivent s’effectuer
avec les précautions spéciales. Finalement, le matériel est abondamment rincé à l’eau
ultra pure.
Toute la verrerie utilisée lors de la synthèse des catalyseurs est nettoyée
préalablement à l’acétone, à l’éthanol et à l’eau ultra pure pour éliminer les traces de
tensioactif. Ensuite, cette verrerie est immergée dans une solution d’eau régale,
composée de deux volumes d’acide chlorhydrique 37% vol. (VWR) et d’un volume
d’acide nitrique 68% vol. (VWR). Cette solution permet de solubiliser tous les résidus
métalliques qui peuvent rester en contact avec la verrerie après la synthèse des
30
catalyseurs. La présence non contrôlée de particules métalliques dans les réacteurs au
départ d’une synthèse peut modifier le mécanisme de croissance des nanoparticules.
Cette étape de nettoyage s’avère déterminante pour assurer la répétabilité des synthèses.
II. Méthodes de synthèses
Lors de ces travaux, deux grands procédés de synthèses ont été utilisées : une
méthode colloïdale et une méthode à support sacrificiel. La première est tout à fait
adaptée pour obtenir des nanoparticules métalliques à distribution de taille et de forme
contrôlées présentant différentes orientations cristallographiques de surface bien
définies. La seconde, développée à l’Université du Nouveau Mexique à Albuquerque,
dans le laboratoire de Professeur Plamen Atanassov, est tout à fait adaptée à l’obtention
à grande échelle de matériaux mono- ou bimétalliques à base de palladium présentant
une structure hiérarchiquement contrôlée.
1. Méthode colloïdale
La méthode colloïdale est basée sur les principes de germination-croissance96-99.
La synthèse par cette méthode100,101 est effectuée en milieu aqueux et met en jeu un
tensioactif polymère. Ces agents de stabilisation permettent d’éviter l’agglomération de
nanoparticules en induisant une force répulsive entre elles et sont utilisés depuis
longtemps pour des synthèses de nanoparticules anisotropes de différents matériaux102.
La chaîne carbonée du polyvinylpyrrolydone (PVP, représenté sur la Figure 6),
interagit avec les surfaces métalliques par création de liaisons entre l’oxygène du
groupement carbonyle et les atomes de métal et leur fournit une couche protectrice,
menant à une répulsion stérique. Le PVP aura pour rôle de contrôler la taille et la
distribution de taille des nanoparticules.
31
Figure 6 Formule développée du polyvinylpyrrolidone.
Le mécanisme de la formation d’une morphologie donnée semble soumis au
mode d’interaction des surfaces métalliques avec un agent de surface. Cet agent
s’adsorbe généralement sélectivement sur un plan cristallographique et le stabilise
thermodynamiquement. Les ions bromures issus du bromure de potassium (KBr) ajouté
au mélange réactionnel jouent ce rôle en favorisant la formation de particules cubiques
exhibant préférentiellement des domaines de surface d’orientation (100), alors que
l’ajout d’acide citrique conduit à la formation des particules octaédriques exhibant
préférentiellement des domaines de surfaces d’orientation (111)100,101. En même temps
l’acide citrique est un réducteur passif, de ce fait pour accélérer la formation et la
croissance de germes, une quantité donnée d’éthanol a été ajouté dans la solution pour
la synthèse des octaèdres. Il a été montré précédemment que la taille des particules peut
être contrôlée en choisissant la quantité optimale d’éthanol comme accélérateur de
réaction103,104.
Le principe de la synthèse consiste en la réduction d’un sel de palladium de
degrés d’oxydation +II dont les ligands ont préalablement été échangés par le
tensioactif. Ainsi, un sel de K2PdCl4 au contact d’une solution de PVP va entrainer la
formation d’une micelle qui sera ensuite réduite par ajout d’un agent réducteur. Une fois
les colloïdes formés, le tensioactif va s’adsorber sur la surface des particules pour
diminuer la vitesse de croissance des particules et éviter leur agglomération. Le schéma
de synthèse de nanoparticules à forme est présenté sur la Figure 7.
32
Figure 7 Schéma de synthèse des nanoparticules à forme.
Pour éliminer les molécules de surfactant de la surface des nanoparticules, la
solution a été dispersée dans 250 mL de l’eau (18,2 MΩ, MilliQ, Millipore) et les
nanoparticules ont été reprécipitées par l’addition de pastilles NaOH (Bioxtra, ≥ 99%,
Sigma-Aldrich). L’illustration du processus de nettoyage est présentée sur la Figure 8.
Figure 8 Récupération du catalyseur propre.
Les molécules de PVP sont dissoutes dans la phase aqueuse et la solution est
enlevée avec une pipette en verre. Ensuite le précipité des nanoparticules est de nouveau
3
Tensio-actif :
Polyvynilpyrrolidone
(PVP)
Agent de surface:
KBr, acide citrique
K2PdCl4
Sel précurseur
Agent réducteur:
Acide L-ascorbique (cubes,
spheres)
Acide citrique acid (octahedrons)
+
33
dispersé dans de l’eau ultrapure. L'étape de lavage est répétée plusieurs fois. Le filtrat
de nanoparticules est finalement dispersé dans 30 mL de l’eau. La propreté de la surface
est vérifiée par le profil du voltammogramme cyclique enregistré en milieu acide, lequel
permet la meilleure expression des pics redox impliquant les domaines de surface (100)
et (111).
a. Synthèse des nanosphères
Pour obtenir les nanocristaux sphériques de Pd, le sel K2PdCl4 (99,99 %, Alfa
Aesar) a été dissout dans l'eau ultrapure (18,2 M, MilliQ, Millipore). Ensuite, une
solution de PVP (polyvynilpyrrolidone, Mw ~ 55 000, Sigma-Aldrich) a été ajoutée,
comme agent tensioactif. Les sels métalliques sont réduits par ajout d’acide ascorbique
(reagent grade, Sigma-Aldrich). Le mélange est chauffé à 80 °C pendant 3h et refroidi à
température ambiante. Les quantités et rapports molaires des réactifs sont présentés dans
le Tableau 2.
PVP K2PdCl4 Acide ascorbique H2O
Volume, mL - - - 11
mmol.L-1 87 17,4 31 -
n/nPd 5 1 1,8 -
Tableau 2 Synthèse des nanosphères de palladium.
b. Synthèse des nanocubes
Les nanoparticules cubiques de Pd ont été obtenues à partir d’un précurseur
K2PdCl4 (99,99 %, Alfa Aesar), qui a été dissout dans l'eau ultrapure (18,2 M, MilliQ,
Millipore), stabilisé par le PVP (polyvynilpyrrolidone, Mw ~ 55 000, Sigma-Aldrich) et
réduit par l’acide ascorbique (reagent grade, Sigma-Aldrich). Un agent de surface le
KBr (99,95%, Aldrich) a été ajouté pour favoriser la formation préférentielle des
domaines de surfaces d’orientation (100). La solution est chauffée à 80 °C pendant 3h et
refroidie jusqu’à température ambiante. Les quantités et rapports molaires des réactifs
sont présentés dans le Tableau 3.
34
PVP K2PdCl4 Acide ascorbique KBr H2O
Volume, mL - - - - 11
Mmol.L-1 87 17,4 31 230 -
n/nPd 5 1 1,8 13 -
Tableau 3 Synthèse des nanocubes de palladium.
c. Synthèse des nanooctaèdres
Les octaèdres de Pd ont été aussi synthétisés par la méthode colloïdale. Le sel
K2PdCl4 (99,99 %, Alfa Aesar) a été dissout dans un mélange d’eau ultrapure (18,2
M, MilliQ, Millipore) et d’éthanol. Ensuite, le PVP (polyvynilpyrrolidone, Mw ~ 55
000, Sigma-Aldrich) a été ajouté. L’acide citrique (reagent grade, Sigma-Aldrich) a
joué à la fois le rôle d’agent de surface pour favoriser la formation de domaines de
surfaces d’orientation (111) et d’agent réducteur. Le mélange a été chauffé à 80 °C
pendant 3h puis refroidi à température ambiante. Les quantités et rapports molaires des
réactifs pour la synthèse des octaèdres sont présentés dans le Tableau 4.
PVP K2PdCl4 Acide citrique H2O + EtOH
Volume, mL - - - 11
Mmol.L-1 86 17,6 85 -
n/nPd 4,9 1 4,8 -
Tableau 4 Synthèse des nanooctaèdres de palladium.
2. Méthode du support sacrificiel
Des catalyseurs bimétalliques PdxBi1-x et PdxSn1-x de dif férents rapports
atomiques ont été préparés par la méthode du support sacrificiel (SSM), développée à
l’Université de Nouveau Mexique105-111.
35
Figure 9 Schéma de synthèse des nanoparticules par la méthode du support sacrificiel.
La synthèse inclut la pyrolyse à haute température des sels métalliques sous
atmosphère réductrice. La méthode est basée sur l’utilisation de supports de silice ou
d’alumine qui vont servir de template pour obtenir la structure en négatif pour le
catalyseur métallique après dissolution du template. La méthode permet de synthétiser
des matériaux plurimétalliques autosupportés poreux, composés de chapelets de
particules de taille nanométrique, possédant une grande surface spécifique. Le schéma
de synthèse est présenté sur la Figure 9.
a. Synthèse des catalyseurs PdxBi1-x
Une quantité connue de silice Cab-O-Sil® EH-5 (surface spécifique 400 m-2g-1)
a été dispersée dans de l'eau ultrapure par ultrason. Les quantités appropriées de
précurseurs métalliques Pd(NO3)2.xH2O (teneur en métal = 40% en masse) et Bi(NO3)3
(teneur en métal = 42,98% en masse) ont alors été ajoutées à la suspension de silice, de
telle façon à obtenir une charge totale de métaux sur la silice de 13% en masse. Les
mélanges silice/précurseurs métalliques sont séchés pendant une nuit à l’étuve. Les
matériaux composites sont ensuite réduits sous atmosphère d'hydrogène (7% de H2 dans
l’argon) à 300 °C pendant 2 h. La silice est éliminée par lavage avec une solution de
KOH 7 M, puis les poudres sont abondamment rincées à l'eau MilliQ jusqu'à atteindre
36
un pH neutre et séchées à 85°C. Les rapports atomiques Pd/Bi choisis sont 6:1, 4:1 et
2:1 et les catalyseurs ont été désignés Pd6Bi, Pd4Bi et Pd2Bi.
b. Synthèse des catalyseurs PdxSn1-x
La même procédure a été utilisée pour synthétiser les échantillons du système
PdxSn1-x. Les précurseurs métalliques dans ce cas ont été K2PdCl4 (teneur en métal =
32,5% en masse) et SnCl4.5H2O (teneur en métal = 33,9% en masse). Pour des raisons
inhérentes à la synthèse (lavage de l’étain) qui posaient des problèmes de
reproductibilité de synthèse, de forts taux d’étain ont dû être choisis. Les rapports
atomiques entre le palladium et l’étain ont été choisis comme étant 1:1, 1:2 et 1:3. Les
catalyseurs ont été désignés comme PdSn, PdSn2, PdSn3.
La silice Cab-O-Sil® EH-5 (surface spécifique 400 m-2g-1) a été dispersée dans
l'eau ultrapure par ultrason. Les précurseurs métalliques ont alors été ajoutées à la
suspension de silice, de telle façon à obtenir une charge totale de métaux sur de la silice
de 13% en poids. Les mélanges silice/précurseurs métalliques sont séchés pendant une
nuit à l’étuve. Les matériaux composites sont ensuite réduits sous atmosphère
d'hydrogène (7% de H2 dans l’argon) à 300 °C pendant 2 h. La silice est éliminée par
lavage avec une solution de KOH 7 M, puis les poudres sont abondamment rincées à
l'eau MilliQ jusqu'à atteindre un pH neutre et séchées à 85°C.
III. Méthodes de caractérisation électrochimiques
1. Voltammétrie cyclique
Cette méthode permet d’étudier les caractéristiques fondamentales des réactions
électrochimiques par la mesure des variations de courant en fonction du potentiel
appliqué à l’électrode où les réactions se produisent (l’électrode de travail). La variation
linéaire cyclique du potentiel de l’électrode de travail (par rapport à la référence) ainsi
que le transfert d’électrons entre la contre électrode et l’électrode de travail sont assurés
par un potentiostat. Le signal électrochimique ainsi obtenu est un voltammogramme.
37
a. Cellule électrochimique
La cellule, ainsi que tous les éléments utiles sont en verre Pyrex. Le montage
nécessaire pour l’expérience (Figure 10) inclut:
Une électrode de travail, composée d’un collecteur en or sur lequel sont
déposés les catalyseurs.
Une électrode réversible à hydrogène (ERH) pour le milieu acide ou une
électrode d'oxyde de mercure (EOM) pour le milieu alcalin sont utilisées comme
référence reliée à la cellule électrochimique via un pont de Luggin et permettant
le contrôle du potentiel de l’électrode de travail.
Une contre électrode dont le rôle est de permettre la circulation des
électrons produits ou consommés à l’électrode de travail, permettant de fermer le
circuit.
Un dégazeur composé d’un capillaire plongeant au fond de la cellule et
un bulleur de sortie permettant le passage de l’azote au sein de l’électrolyte pour
retirer l’oxygène dissout ou en atmosphère de cellule pour éviter la dissolution
de l’oxygène.
Figure 10 (a) Cellule électrochimique à trois électrodes, (b) électrode de travail en or et (c) potentiostat
analogique interfacé avec un ordinateur.
a
b
c
38
Le potentiostat utilisé lors des expériences de voltammétrie cyclique classique
est un potentiostat analogique EG&G PAR Model 362 (Princeton Applied Research)
interfacé avec un ordinateur et une carte d’acquisition permettant de récupérer le signal
en format numérique. Les expériences électrochimiques menées aux Etats Unis étaient
effectuées en utilisant un potentiostat et une électrode à disque tournant de marque Pine
Instrument Company. La vitesse de rotation a été fixée à 1300 révolutions par minute
(rpm). Tous les potentiels donnés dans ce manuscrit sont référencés par rapport une
électrode réversible à hydrogène (ERH) utilisant le même électrolyte support que la
solution étudiée.
Une partie des expériences électrochimiques sur les nanoparticules à forme a été
effectuée en milieu acide sulfurique à 0,5 mol.L-1 préparé par dilution d’acide sulfurique
96 % (Suprapur, Merck) dans de l’eau ultrapure MilliQ dont la résistivité est de 18
M.cm (Millipore). Une autre partie des expériences sur les nanoparticules à forme a
été faite en milieu hydroxyde de sodium à 0,1 mol.L-1 préparé par dissolution de
pastilles de NaOH (Bioxtra, ≥ 99%, Sigma-Aldrich). Les expériences électrochimiques
sur les nanoparticules bimétalliques préparées par la méthode sacrificielle ont été
réalisées en milieu hydroxyde de potassium à 1,0 mol.L-1 préparé par dissolution de
pastilles de KOH (ACS, EMD Chemicals, Fisher Scientific). Le milieu électrolytique
est préalablement désaéré par bullage d’azote (Qualité U, Air Liquide).
b. Préparation de l’électrode de travail en or
Dans les études concernant les nanoparticules à distributions de tailles et de
formes contrôlées, l’électrode de travail est un collecteur d’or (Figure 10b). L’embout
d’or est fabriqué à partir d’un fil d’or (99,995 %, Alfa Aesar) dont une extrémité est
fondue à l’aide d’une flamme à hydrogène afin de former une petite boule. La boule est
alors emboutie jusqu’à obtention d’une surface quasi plane. L’embout est ensuite poli
sur une feutrine avec de l’alumine A3 de façon à retirer les pollutions grossières
insérées durant la fabrication et à diminuer au maximum la rugosité de la surface. Avant
le dépôt de l’encre catalytique, l’embout est soigneusement traité dans une flamme
propane/air puis trempé dans de l’acide nitrique 68 % (Normapur, VWR) et dans de
39
l’eau MilliQ afin de retirer les éventuels polluants organiques. Cette opération est
répétée trois fois. Afin de vérifier la propreté du collecteur d’or mais aussi du milieu de
travail, un voltammogramme du collecteur est tracé avant le dépôt du catalyseur. Ce
voltammogramme est très dépendant de la propreté du système. La Figure 11 représente
les voltammogrammes types de surface d’or propre dans un milieu de travail propre.
Dans un premier temps, un faible courant de double couche est enregistré entre 0,05 et
1,3 V en milieu acide et entre 0,05 et 1,2 V en milieu alcalin, puis une région composée
d’un massif de pics correspondant à la formation des oxydes de surfaces apparait.
Ensuite, pendant la variation négative de potentiel, un unique pic de réduction des
oxydes de surface, fin et symétrique, est observé entre 1,1 et 1,2 V vs ERH.
Figure 11 Voltammogrammes du collecteur d’or utilisé comme support des nanoparticules de Pd à
distribution de tailles et de formes contrôlées de Pd. (a) Milieu H2SO4 à 0,5 mol.L-1 et (b) NaOH à 0,1
mol.L-1 à v = 0,05 V.s-1.
a
b
40
La comparaison des deux voltammogrammes, en milieu acide et en milieu
basique, est très intéressante. Aucun courant autre que le courant capacitif de double
couche n’est observable en milieu acide de 0,05 V à environ 1,3 V vs ERH, potentiel
auquel débute l’oxydation de la surface d’or, tandis qu’en milieu alcalin, un courant
apparait à partir d’environ 0,45 V, qui est du à l’adsorption d’espèces hydroxyles à la
surface de l’or.
Une fois, l’électrode « substrat d’or » préparée, la quantité nécessaire d’encre
catalytique est alors déposée à la surface du collecteur à l’aide d’une microseringue de
façon à obtenir la même masse de catalyseur sur l’électrode (14 µg, déterminé par
microbalance à quartz), puis séchée à l’air. Une fois le dépôt séché, l’électrode est
transférée dans la cellule électrochimique. L’étude de nanoparticules à distributions de
formes et de tailles contrôlées impose une fenêtre de potentiel de travail stricte afin
d’éviter les reconstructions de la surface potentiellement entrainées par l’insertion
d’hydrogène ou d’oxygène dans le réseau cristallin du palladium. Ainsi, la zone d’étude
sera généralement définie entre une limite inférieure en potentiel fixée à 0,1 V vs ERH,
afin d’éviter l’insertion d’hydrogène au sein des mailles cristalline et la formation de
dihydrogène moléculaire à la surface, et une limite supérieure de potentiel fixée à 0,6 V
vs ERH située dans la zone de courant capacitif avant la formation des oxydes de
surface en milieux acide et alcalin.
Cependant, une étude particulière en milieu acide consistant à déterminer le
comportement des nanoparticules de Pd vis-à-vis des réactions d’adsorption/désorption,
d’insertion/désorption d’hydrogène atomique et de dégagement d’hydrogène
moléculaire a nécessité de faire varier la limite inférieure de potentiel jusqu’à 0,05 V vs.
ERH, tandis qu’une autre étude visant à étudier le comportement de ces mêmes
particules vis-à-vis de la formation d’oxydes de surface a nécessité d’augmenter la
limite supérieure de potentiel jusqu’à 1,6 V vs. ERH.
c. Préparation de l’électrode de travail en carbone
Pour les études concernant les nanoparticules bimétalliques préparées par la
méthode sacrificielle, un disque de carbone vitreux a été utilisé comme substrat. Les
41
catalyseurs bimétalliques ont été récupérés sous forme d’une poudre après la procédure
de synthèse décrite dans le paragraphe 2 de ce chapitre. Pour réaliser les expériences
voltammétriques et avant de déposer le catalyseur sur l’embout de carbone vitreux une
encre catalytique a été préparée pour chaque échantillon. Pour cela, 5 mg de poudre
catalytique finement broyée ont été dispersés dans un mélange comprenant 925 µL
d’une solution isopropanol/eau dans un rapport volumique 4:1 et de 75 µl de Nafion
(0,5% en masse dans des alcools aliphatiques, DuPont). Les encres sont alors
homogénéisées par traitement aux ultrasons. Ensuite, 10 µl du mélange ont été déposés
sur l’électrode en carbone de surface géométrique 0,2472 cm2, la charge de catalyseur
est de 0,2 mg.cm-2.
2. Chronoampérommétrie
Cette méthode permet évaluer la variation du courant au cours du temps à
potentiel constant. Les mesures de chronoampérométrie sont effectuées dans une cellule
électrochimique à trois électrodes identique à celle décrite dans le paragraphe 1 de ce
chapitre. Pour le contrôle des mesures un potentiostat et une électrode à disque tournant
de marque Pine Instrument Company ont été utilisés. La vitesse de rotation a été fixée à
1300 rpm.
3. Spectroscopie infrarouge in situ
La spectroscopie infrarouge in situ à transformée de Fourier est une méthode très
utile en électrocatalyse. Cette technique permet d’étudier les intermédiaires de réaction
adsorbés sur la surface des catalyseurs et les molécules formées à l’interface
électrode/électrolyte à partir de leur interaction avec le rayonnement et de déterminer
les mécanismes des réactions électrochimiques. La réponse en courant du système est
enregistrée lors d’une expérience de voltammétrie classique en même temps que les
spectres infrarouge après réflexion du rayonnement incident sur l’électrode de travail.
Les expériences à l’IC2MP ont été réalisées avec un spectromètre Bruker
(modèle IFS 66v FTIR). Un détecteur du type HgCdTe (Infrared Associates) refroidi à
42
l’azote liquide a été utilisé. Pour les mesures d’infrarouge, une cellule électrochimique
spécialement conçue et adaptée au spectromètre a été utilisée (Figure 12).
L’électrode de travail utilisée est un disque de carbone vitreux de 8 mm de
diamètre, poli avant chaque expérience avec une poudre d’alumine (diamètre 0,3 mm).
Un volume de 32 µL d’encre catalytique est déposé sur l’électrode. L’électrode de
travail est plaquée contre une fenêtre en fluorure de calcium (CaF2) transparente au
rayonnement infrarouge dans le domaine d’énergie étudié. Avant les expériences,
l’électrolyte est dégazé avec de l’azote afin d’éliminer toutes traces de gaz
atmosphériques (oxygène et dioxyde de carbone) dans la solution.
Figure 12 Schéma d’une cellule électrochimique pour l’étude par spectroscopie Infrarouge in situ.
La technique employée au cours de ces travaux est le SPAIRS (Single Potential
Alteration Infrared Reflectance Spectroscopy), couramment utilisée au laboratoire. Elle
a été précédemment décrite en détail112. Cette méthode consiste à appliquer une
Electrode de référence
Electrode de travail Dégazeur
Contre électrode
Electrolyte
Fenêtre CaF2
Rayon réfléchi Rayon incident
43
variation lente de potentiel (1 mV.s-1) à l’électrode de travail en enregistrant
simultanément les réflectivités tous les 50 mV ou 100 mV par accumulation d’un grand
nombre de spectres (entre 256 et 512).
Les expériences au laboratoire de l’UNM ont été réalisées avec un spectromètre
IRRAS - Nicolet 6700 équipé d’un détecteur MCT pour mieux comprendre le
mécanisme de l’électrooxydation du glycérol sur les catalyseurs PdxBi1-x et PdxSn1-x
auto supportés. La méthode expérimentale est décrite précédemment dans la
littérature113-115 .
L’image de l’appareillage infrarouge in situ utilisé à l’UNM est présentée sur la Figure
13.
Figure 13 Chambre avec une cellule à trois électrodes pour l’étude par spectroscopie infrarouge in situ.
IV. Méthodes de caractérisation physicochimique
1. Microscopie
La microscopie électronique est actuellement une méthode indispensable pour
caractériser les nanoparticules. Les microscopes électroniques ont une très grande
résolution avec des grossissements allant jusqu’à 5 millions de fois. Cette méthode a été
44
utilisée dans ce travail pour obtenir les informations sur la morphologie, la forme et la
taille des nanoparticules préparées.
a. Microscopie électronique à transmission (MET)
Sur le principe, la microscopie électronique fonctionne comme la microscopie
optique classique qui met en jeu les interactions entre la matière et la lumière (photons).
Cependant, les tailles observées sont beaucoup plus faibles que la longueur d’onde de la
lumière. Afin de les observer, il est donc nécessaire d’utiliser des électrons comme
source de lumière.
La colonne qui compose le microscope (Figure 14) est constituée par le canon à
électrons, un accélérateur, des lentilles magnétiques qui forment l’ensemble du
condenseur de flux et une lentille objective permettant de focaliser le rayonnement
incident sur l’échantillon. Le faisceau (le faisceau d’électrons est accéléré par une anode
à 200 keV par rapport à la cathode) qui traverse l’échantillon passe ensuite par des
lentilles intermédiaires, par une lentille de projection avant d’arriver à la chambre
d’observation composée d’un écran fluorescent et d’une caméra numérique permettant
l’acquisition et l’enregistrement des images. La capacité à déterminer la position des
atomes de surface dans une nanoparticule se fait grâce à la microscopie électronique de
transmission à haute résolution (METHR). Les microscopes électroniques à
transmission utilisés dans ce travail sont un JEOL JEM 2100 et un JEOL 2010F, dont la
résolution est de 0,19 nm.
L’échantillon est préparé par dépôt d’une goutte d’eau contenant les
nanoparticules à observer à la surface d’une grille de cuivre carbonée. La grille est
ensuite séchée à température ambiante avant d’être introduite dans la chambre
d’observation. La colonne est maintenue sous vide lors des expériences. L’analyse
quantitative des images a été réalisée avec le logiciel libre Image J. 300 particules ont
été considérées à chaque fois, pour obtenir une distribution statistique acceptable des
tailles.
45
Figure 14 Microscope électronique à transmission.
b. Microscopie électronique à balayage (MEB)
Le microscope électronique à balayage Hitachi S-5200 (résolution 2 nm à 1 kV;
résolution 0,5 nm à 30 kV) couplé à un spectromètre de rayons X (EDX) a été utilisé
pour étudier la morphologie et la composition atomique des surfaces des échantillons de
PbBi et PdSn autosupportés préparés à l’UNM.
La microscopie électronique à balayage utilise aussi des électrons comme source
de lumière mais le mode de fonctionnement est légèrement différent car les électrons ne
sont pas transmis par l’échantillon. La surface de l’échantillon et soumise à un
bombardement d’électrons. Certains rayonnements (électrons rétrodiffusés, électrons
secondaires, rayonnements X) sont émis suite aux collisions multiples entre les
électrons qui balayent la surface et les atomes du matériau testé. Ces rayonnements sont
analysés par différents détecteurs pour construire une image de la surface et pour
observer la présence des éléments dans la zone analysée. L’émission des électrons
rétrodiffusés (électrons du faisceau incident déviés par des interactions élastiques) est
sensible au numéro atomique des éléments chimiques présent dans l’échantillon. Les
électrons secondaires sont les électrons des atomes qui ont été éjectés par le faisceau
46
incident. Ces électrons à faible énergie sont représentatifs de la topographie de
l’échantillon. Les atomes qui ont perdu ces électrons secondaires vont retrouver leur
stabilité par des transitions électroniques qui provoquent l’émission de rayonnements
électromagnétiques et de rayonnements X. Ces rayonnements sont caractéristiques des
atomes d’origine et ils donnent des informations sur la composition chimique de
l’échantillon.
2. Porosimétrie à l’azote
Un porosimètre Micromeritics ASAP 2020 avec un analyseur Gemini BET
fonctionnant selon la méthode BET proposée par Brunauer, Emmett, Teller116 a été
utilisé pour déterminer la surface spécifique et la distribution de taille des pores des
matériaux poreaux synthétisés. La méthode est basée sur l’adsorption physique des
molécules de gaz (N2 dans ce travail) sur une surface solide. La théorie BET permet de
prévoir le nombre de molécules nécessaires à la formation d’une monocouche sans que
celle-ci soit effectivement remplie, ce qui est le cas dans la réalité où des multicouches
commencent à se former avant que la monocouche ne soit complète.
3. Spectroscopie photoélectronique de rayons X (XPS)
La technique XPS est souvent utilisée pour caractériser l’état d’oxydation de la
surface de matériaux et les interactions électroniques entre les éléments composants des
matériaux.
Cette technique est essentielle en vue de la caractérisation des surfaces. Elle
consiste à irradier par des photons x monoénergétiques un échantillon dont les atomes
sont alors ionisés et d’étudier la distribution en énergie cinétique des électrons émis. Ce
phénomène de photoémission permet de remonter aux propriétés du matériau et à
l’environnement chimique des différents atomes considérés.
Les analyses ont été réalisées par le Groupe de Recherche de l’Université du
Nouveau-Mexique, aux Etats-Unis. Les spectres ont été enregistrés en utilisant un
spectrometre XPS Kratos Ultra DLD équipé d’une source de radiation
monochromatique Al Kα opérant à 225 W. Les analyses sont réalisées sur les
47
échantillons sous forme de poudre couvrant une surface de quelques millimètres. Dans
les conditions expérimentales utilisées, la profondeur d’analyse est 1 nm, indiquant que
les résultats obtenus concernent plutôt la surface des nanoparticules.
4. Spectroscopie d’absorption atomique (SAA)
La spectrométrie est fondée sur l’étude (qualitative et quantitative) des spectres
fournis par l’interaction de la matière avec divers rayonnements. La spectroscopie
d’absorption atomique (SAA) est basée sur le principe que les atomes libres peuvent
absorber la lumière d’une certaine longueur d’ondes. L’absorption de chaque élément
est spécifique, aucun autre élément n’absorbe sa longueur d’onde. La détermination
spectroscopique d’espèces atomiques peut seulement être réalisée à partir d’un
échantillon à l’état gazeux, dans lequel les atomes individuels sont nettement séparés les
uns des autres. La source de mesures pour l’absorption atomique la plus courante est la
lampe à cathode creuse. Elle consiste en une anode de tungstène et une cathode
cylindrique sise dans un tube en verre contenant un gaz inerte, comme l’argon. La
cathode est composée de l’élément à analyser. Il faut donc de la chaleur pour faire
passer l’échantillon à l’état gazeux. La chaleur est générée par une flamme ou un four
de graphite. La SAA de flamme analyse seulement les solutions, tandis que la SAA de
four de graphite analyse les solutions, les boues liquides et les échantillons à l’état
solide. Un atomiseur de flamme consiste en un nébuliseur qui convertit l’échantillon en
un aérosol, qui est alimenté dans le brûleur. L’atomisation se produit dans la flamme qui
est habituellement alimentée par de l’acétylène et du protoxyde d’azote. Un atomiseur
électrothermique fournit une grande sensibilité parce qu’il atomise l’échantillon
rapidement. L’atomisation se produit dans un four de graphite cylindrique, ouvert aux
deux extrémités et qui contient un trou au centre pour la présentation des échantillons.
Deux courants de gaz inertes sont utilisés. Le courant externe empêche l’air de rentrer
dans le foyer et le courant interne garantit que les vapeurs générées dans la matrice de
l’échantillon sont rapidement éloignées du four. Le gaz le plus communément utilisé est
l’argon. Les atomes excités par la source absorbent son énergie. La disparition du signal
est répercutée via des systèmes optiques puis détectée et amplifiée. On mesure une
absorbance.
48
C. Résultats: nanoparticules de palladium non supportées à distributions de tailles et de formes contrôlées
I. Caractérisation par microscopie électronique à transmission des
nanoparticules de palladium préparées par méthode colloïdale
Avant de commencer l’étude du comportement électrochimique des catalyseurs,
il est nécessaire de bien connaître leur structure. La taille, la forme et l’orientation
préférentielle des domaines de surface des échantillons ont été caractérisées par
microscopie électronique à transmission (MET). Cette méthode permet d’accéder
rapidement aux caractéristiques morphologiques des échantillons mais aussi
d’appréhender l’orientation superficielle des nanoparticules.
Les images présentées ont toutes été obtenues en mode champ clair, c’est-à-dire
que les particules observées forment des projections dont le contraste est plus élevé que
le fond continu gris causé par le film carboné de la grille. Le contraste de l’image
dépend de la nature des éléments traversés par le faisceau mais aussi de l’épaisseur de
l’échantillon. Ainsi, les nanoparticules apparaitront en niveau de gris sur un fond
continu selon leur épaisseur.
En raison de la faible quantité observée au sein des échantillons, la
caractérisation des matériaux s’appuie sur l’hypothèse que les synthèses conduisent à
une homogénéité de taille et de forme des nanoparticules. De manière générale, plus la
quantité d’échantillon déposée sur la grille sera importante et plus l’observation sera
difficile.
En termes de formes, les échantillons produits présentent des morphologies très
différentes ce qui permet alors d’avoir des structures superficielles variables d’un
échantillon à l’autre.
49
1. Nanoparticules sans orientation préférentielle (nanosphères)
La Figure 15 représente une image MET obtenue pour l’échantillon préparé par la voie
colloïdale précédemment décrite dans le paragraphe 1 de la partie « Méthodes de
synthèses ».
Figure 15 (a,b) Images MET à divers grossissement des nanoparticules sphériques de Pd obtenues par la
méthode colloïdale, (c) distribution de taille associée.
Sur ce cliché, les projections observées sont majoritairement de forme
circulaire ; cette méthode de synthèse conduit à la formation de nanoparticules de
palladium de forme quasi sphérique. L’histogramme de distribution de tailles des
nanocristaux montre qu’une grande majorité d’entre eux se situe dans l’intervalle de
0 1 2 3 4 5 6 7 80,0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
0,6
Fré
qu
en
ce
Taille (nm)
a b
b c
50
tailles de 3 à 5 nm, avec une taille moyenne de 4 nm déterminée à partir de l’expression
gaussienne de la distribution.
Enfin, les particules observées ne semblent pas présenter de faces ou d’angles
bien définis ce qui indique que la surface de ces objets ne doit pas être composée de
grands domaines orientés mais qu’il s’agit plutôt d’une surface fortement hétérogène
avec la présence de domaines de cohérence de très petite taille séparés par des défauts
cristallins.
2. Nanoparticules d’orientation préférentielle (100)
La Figure 16 montre des images MET caractéristiques de l’échantillon obtenu en
suivant le protocole de synthèse par méthode colloïdale décrit précédemment. Les
projections carrées sont représentatives de la formation de nanoparticules de forme
cubique dont l’orientation cristalline de surface correspond à des domaines (100). La
reproductibilité de la synthèse a été vérifiée sur plusieurs échantillons et s’est avérée
très satisfaisante.
Cette synthèse conduit à une très bonne sélectivité de formes cubiques ; en effet,
aucun octaèdre ni aucune sphère n’ont été observés dans le produit de synthèse.
L’image haute résolution ne permet pas d’obtenir la résolution atomique à cause de la
présence résiduelle d’agent de surface adsorbé sur les nanoparticules.
La taille des particules, déterminée comme étant l’arête du cube se situe
majoritairement entre 9 et 11 nm, avec une taille moyenne de 10 nm (Figure 16).
51
Figure 16 (a,b) Images MET à divers grossissement des nanoparticules cubiques de Pd obtenues par la
méthode colloïdale et (c) distribution de taille associée.
3. Nanoparticules d’orientation préférentielle (111)
Les particules d’orientation préférentielle (111) sont supposées présenter des
formes octaédriques et tétraédriques avec différents niveaux de troncature. Les images
MET de moyenne et haute résolution représentées sur la Figure 17 proviennent d’un
échantillon de particule de palladium obtenu par la méthode colloïdale décrite
précédemment. D’un point de vue thermodynamique, un octaèdre est une forme la plus
stable car son énergie de surface est minimisée par une exposition maximale de
domaines (111).
4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 150,0
0,1
0,2
0,3
0,4
Fré
qu
en
ce
Taille (nm)
a b
c
52
La majorité des projections observables est de forme rhomboédrique avec des
angles et des bords bien définis ce qui indique la formation de particules facettées. Ces
images montrent aussi la présence de très petites particules de formes non définies ce
qui laisse penser qu’il s’agit de nucléi. Ceci peut s’expliquer par une mauvaise
séparation des étapes de nucléation et croissance au cours de la synthèse.
La proportion réelle de nanooctaèdres dans le brut de synthèse n’a pas été
étudiée au cours de ces travaux mais la forme majoritaire (hors petites nanoparticules)
est l’octaèdre et ceci avec une bonne sélectivité.
Figure 17 (a,b) Images MET à divers grossissement des nanoparticules octaédriques de Pd obtenues par
la méthode colloïdale et (c) distribution de taille associée.
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 140,0
0,1
0,2
0,3
0,4
Fré
qu
en
ce
Taille (nm)
a b
c
53
La taille des projections se situe entre 6 et 8 nm, mesurée selon l’axe principal
de l’octaèdre, avec une taille moyenne de 7,6 nm.
4. Conclusion
La microscopie électronique permet dans un premier temps d’étudier la
morphologie générale des catalyseurs préparés, en termes de taille, de forme et
d’homogénéité des produits de synthèse. Lors de ces observations, la taille des
nanocristaux a été approximée car, pour des particules de formes contrôlées, la
définition de la taille reste délicate ; contrairement au cas de particules « sphériques »
ou le diamètre est une bonne estimation de la taille, dans le cas de nos particules à
formes présentant des angles définis, différentes caractéristiques géométriques peuvent
être représentatives de la "taille": arêtes, diagonales, etc.
La forte agglomération des nanocristaux après nettoyage est aussi un facteur
limitant pour une détermination précise de la distribution en taille mais aussi en forme,
en raison du fait que les particules ne sont pas dispersées sur un substrat de grande
surface spécifique. Seules des tendances à partir des clichés de microscopie sur les bruts
de synthèse ont été extraites.
Des méthodes de caractérisations électrochimiques doivent être mises en place
de manière à obtenir les caractéristiques réelles des surfaces des échantillons étudiés.
Contrairement au MET, l’électrochimie permet d’avoir accès à la structure superficielle
moyenne des échantillons étudiés. Lors de ces études, seules les surfaces qui sont
électrochimiquement actives seront caractérisées ce qui va alors permettre de relier le
comportement catalytique avec la structure de surface des échantillons.
II. Caractérisation électrochimique en milieu acide
La voltammétrie cyclique à variation linéaire de potentiel reste à ce jour la
méthode la plus simple et la plus rapide pour avoir accès aux caractéristiques de surface
des catalyseurs étudiés.
54
Avant de décrire les voltammogrammes correspondant aux objets de palladium
provenant des méthodes de synthèse présentées précédemment, il est nécessaire de
rappeler les caractéristiques du signal électrochimique enregistré en milieux acide et
alcalin sur des électrodes de palladium et surtout l’influence des paramètres structuraux
sur ce signal117. La surface active des catalyseurs a été déterminée par des méthodes
électrochimiques. La structure et la valeur de la surface active sont des caractéristiques
importantes car les réactions électrochimiques se produisent à la surface des catalyseurs.
La connaissance de la structure surfacique permet une meilleure compréhension de la
réaction d’électrooxydation du glycérol.
1. Comparaison du comportement électrochimique du palladium massif et du
palladium nanostructuré
Les voltammogrammes d’une électrode polycristalline massive de palladium
avec différentes limites inférieures de potentiel, obtenu en milieu acide (H2SO4 0,5
mol.L-1),118 sont représentés sur la Figure 18.
Figure 18 Voltammogrammes d’une surface polycristalline de Pd en milieu support H2SO4 à 0,5 mol.L-1,
v = 0,05 V.s-1 118.
c
d
a a b
55
Le voltammogramme représenté sur la Figure 18 est typique de ce que l’on peut
enregistrer sur une électrode polycristalline massique de palladium. Lors de la variation
positive de potentiel, le courant enregistré dans la gamme de potentiel de 0,15 à 0,45 V
est attribué aux réactions de désorption de l’hydrogène adsorbé à la surface du
palladium et de désinsertion de l’hydrogène absorbé dans le volume de l’électrode de
palladium (zone a), puis, le faible courant constant enregistré entre 0,45 et 0,75 V
correspond au courant capacitif de double couche. L’oxydation de la surface du
palladium est observée pour des potentiels supérieurs à 0,8 V (zone b). Lors de la
variation négative de potentiel, un pic de courant attribué à la réduction des oxydes de
surface (zone c) est observé avec un maximum de pic situé vers 0,7 V. Enfin, les
courants négatifs enregistrés à partir de 0,45 V correspondent aux réactions
d’adsorption/insertion d’hydrogène atomique et au dégagement d’hydrogène
moléculaire sur le palladium (zone d). La Figure 18 montre qu’il n’y a pas de séparation
de pics correspondants aux phénomènes d’adsorption/désorption,
d’absorption/désinsertion et de dégagement d’hydrogène sur l’électrode massive de
palladium. Il est donc impossible de déterminer la surface active du catalyseur par
l’intégration des pics de cette zone.
Les voltammogrammes enregistrés en milieu acide sur les échantillons de
nanoparticules de palladium à distributions de tailles et de formes contrôlées (Figure 19)
montrent des pics dans la région d’adsorption/désorption d’hydrogène et dans la zone de
formation et de réduction des oxydes de surface qui sont liés aux différents
arrangements de surface et à différents états d’oxydation de la surface. Dans le cas des
nanocubes de palladium, le pic d’oxydation à 0,9 V est attribué à la formation des
oxydes sur les domaines de surface (100), tandis que sur les nanooctaèdres, le pic
d’oxydation à 1,1 V est attribué au même processus impliquant les domaines de surface
(111)119,120.
56
Figure 19 Voltammogrammes enregistrés entre 0,10 et 1,45 V vs. ERH sur (a) nanosphères de Pd, (b)
nanocubes de Pd et (c) nanooctaèdres de Pd en milieu H2SO4 0,5 M saturé en N2 (T = 20 °C, 5 mV s-1).
a
b
c
(100) (100) (111)
(100)
(100)
(100) (111) (111)
57
Les pics réversibles à 0,26 V/0,27 V correspondent donc à l’adsorption en sous
potentiel d’hydrogène atomique (pic négatif lors de la variation négative de potentiel) et
à sa désorption (pic positif lors de la variation positive de potentiel) impliquant les
domaine de surface d’orientation (100)121 puisque ces pics sont plus réversibles et plus
intenses dans le cas des nanocubes qui sont supposés présenter préférentiellement des
faces (100), tandis que les pics réversibles à 0,17 V/0,20 V sont attribués à
l’adsorption/désorption de l’hydrogène atomique sur les faces de symétrie (111)
puisqu’ils sont seulement présents dans le cas des nanooctèdres qui sont supposés
exhiber préférentiellement des domaines de surface d’orientation (111).
2. Séparation des processus dans la zone hydrogène en milieu acide
Les différences dans les voltammogrammes obtenus avec une électrode de
palladium polycristalline massive et avec des électrodes à base de nanoparticules de
palladium, ainsi que les différences dans les voltaammogrammes enregistrés sur les
différents échantillons de nanopartciules de palladium ont imposé une étude plus
détaillées du mode d’interaction de ce type de structures avec l’hydrogène. Ainsi, des
voltammogrammes ont été enregistrés sur des nanosphères, des nanocubes et des
nanooctaèdres de palladium à faible vitesse de variation de potentiel (1 mV s-1) entre
0,05 V - 0,4 V (Figure 20 a,b,c). Tous les voltammogrammes montrent plusieurs pics
redox bien définis. Les pics redox entre 0,3 et 0,12 V sont attribués à l’électro-
désorption (courants positifs) et l’électro-adsorption (courants négatifs) de l’hydrogène
atomique déposé en sous potentiel à la surface des nanoparticules. Les pics redox entre
0,12 et 0,0 V sont attribués à l’électroabsorption (Habs pour les courants négatifs) et
l’électro-désorption de l’hydrogène absorbé dans les mailles du palladium (Hdes pour les
courants positifs), le palladium étant bien sûr connu pour sa capacité à absorber
l’hydrogène122. La vague de réduction aux plus faibles potentiels est attribuée à la
réaction de dégagement d’hydrogène se produisant à la surface du palladium. Le même
genre de comportement a déjà été observé avec des particules de Pd ultrafines déposée
par évaporation sous vide du palladium sur une électrode de carbone vitreux123 ou avec
une couche ultrafine de Pd déposée sur des substrats d’or Au (111) et Au (100), bien
que les différentes contributions n’aient pas été séparées aussi bien que dans le présent
58
travail. Dans le cas d’électrodes polycristallines massiques de Pd, aucune séparation des
caractéristiques électrochimiques correspondant à l’adsorption/désorption, à
l’insertion/désorption et au dégagement de l’hydrogène n’a été observée. De plus, il a
été montré que sur ce type d’électrodes massives, la réaction de dégagement
d’hydrogène se produisait tandis que le processus d’absorption d’hydrogène continuait à
se produire, ce qui n’est pas le cas avec les nanoparticules de palladium. Le
comportement unique observé dans ce dernier cas est caractéristique de la taille
nanométrique des particules plutôt que de leur structure de surface puisqu’il se produit
avec les nanocubes, les nanooctaédres et les nanosphères.
La réaction d’adsorption/désorption de l’hydrogène atomique déposé en sous
potentiel peut s’écrire de la manière suivante:
Pd + H+ + e- = Pd-Hads (22)
Dans le cas du platine, Conway et Jerkiewicz ont établi que sur toute la gamme
de potentiel où l’adsorption en sous potentiel de l’hydrogène se produisait, il était
thermodynamiquement et formellement impossible qu’une quelconque désorption
d’hydrogène conduise à du dihydrogène gazeux ou dissout dans la solution124. Ce fait
peut être transposé au cas du palladium, ainsi, selon la Figure 20, seule l’adsorption en
sous potentiel d’hydrogène se produit lors de la variation négative de potentiel entre 0,3
et 0,12 V jusqu’à saturation de la surface. Ce fait devrait permettre, après calibration de
la quantité d’électricité impliquée dans l’adsorption d’une monocouche d’hydrogène sur
une surface lisse de Pd, d’accéder à une estimation réaliste de la surface électroactive
des catalyseurs de palladium de la même manière que celle utilisée pour les catalyseurs
à base de platine.
Dans la gamme des potentiels inférieurs à 0,12 V, le pic de courants négatifs
correspond à l’insertion d’hydrogène atomique au sein des nanoparticules de Pd.
L’insertion d’hydrogène se produit en suivant un mécanisme indirect d’absorption dans
lequel l’hydrogène préalablement adsorbé à la surface selon la réaction de Volmer
exprimée par l’équation précédente agit comme un précurseur pour l’insertion dans la
structure métallique selon:
59
Pd-Hads Pd-Habs (23)
Cette réaction d’absorption/désorption conduit en effet à des pics redox
réversibles. Le courant de dégagement d’hydrogène, qui débute à 0,025 V sur les
nanosphères et les nanooctaèdres et à partir de 0,0 V sur les nanocubes, se superpose
légèrement au pied du pic d’absorption à bas potentiels. En revanche, le pic de
désorption de l’hydrogène inséré dans les mailles cristallines des nanoparticules de
palladium n’est pas affecté lorsque la limite de potentiel inférieure est diminuée. Ceci
confirme que l’hydrogène ne continue pas à s’insérer dans la zone de dégagement
d’hydrogène contrairement à ce qui a été observé avec une électrode massive
polycristalline de Pd où la quantité d’hydrogène absorbée augmente lorsque cette limite
est diminuée125.
Dans le cas des nanoparticules de palladium, les nanoparticules restent saturées
d’hydrogène absorbé et les charges impliquées dans les pics d’absorption/désorption
sont limitées par la taille des nanoparticules. Il apparaît aussi que la symétrie des
domaines de surface joue un rôle dans les processus d’insertion d’hydrogène, le pic
d’absorption étant déplacé d’environ 0,025 V vers les bas potentiels dans le cas des
nanocubes. Il est connu que l’équilibre entre les phases d’hydrogène adsorbé et
d’hydrogène dissout dans les sous-couches atomiques de palladium conduise à la
formation d’hydrure de palladium. Selon Czerwińiski et al. 126, la saturation de la phase
se produit avant la saturation de la phase au cours de la variation négative de
potentiel sur une couche mince de palladium déposée électrochimiquement sur un fil
d’or.
60
Figure 20 Profil de zone hydrogène obtenu en milieu support H2SO4 0,5 mol.L-1 pour (a) nanosphères,
(b) nanocubes et (c) nanooctaèdres de palladium (T = 20 °C, v = 1mVs-1).
a
b
c
61
Pd nanosphères Pd nanocubes Pd nanooctaèdres
Q (HUPDdes) / µC 270 310 380
nH désorbé 1,69E+15 1,93E+15 2,37E+15
Q (Habs) / µC 440 2000 1147
nH absorbé 2,75E+15 1,25E+16 7,16E+15
Nombre total moyen
d’atomes par particule 2100 92597 5949
Nombre moyen
d’atomes de surface
par particule
800 9410 1784
Rapport H/Pd 0,62 0,66 0,9
Tableau 5 Charges impliquées dans la désorption d’hydrogène adsorbé en sous tension et dans la
désorption de l’hydrogène inséré au sein des nanoparticules de Pd, nombres moyens totaux et de surface
d’atomes de Pd et rapport H/Pd dans les hydrures formés à partir des différents échantillons de
nanoparticules de Pd.
Le Tableau 5 donne les charges impliquées pour la désorption de l’hydrogène
adsorbé sous-tension et pour la désorption de l’hydrogène inséré dans la structure
métallique, et le rapport atomique H/Pd pour la formation d’hydrure pour chacun des
échantillons de nanoparticules. Le nombre total d’atomes et le nombre d’atomes de
surface ont été déterminés à partir de données de la littérature pour les nanosphères127,
et ont été calculés à partir du paramètre de maille du Pd et des considérations
géométriques relatives à l’orientation (100) des surfaces dans les nanocubes et de
l’orientation (111) des surfaces dans les nanooctaèdres. Un logiciel libre (Blender)
permettant la construction de cubes et d’octaèdres à partir d’empilement de sphères
représentant les atomes de palladium a été utilisé pour le comptage des nombres totaux
d’atomes et du nombre d’atomes de surface. Les valeurs maximales du rapport H/Pd
sont de 0,62 pour les nanosphères, de 0,66 pour les nanocubes et de 0,9 pour les
nanooctaèdres. Puisque les trois types de nanoparticules ont différentes formes,
différentes tailles et contiennent différents nombres d’atomes, le rapport Habs/Pd
62
semble dépendre à la fois de la taille des particules et de la géométrie de surface. Dans
le cas des nanoparticules sphériques de palladium, une valeur du rapport H/Pd de
l’ordre de 0,6 est en accord avec les valeurs obtenues à partir de mesure d’EXAFS et de
diffraction de rayons X sur des électrodes nanostructurées de Pd de taille moyenne
équivalente (4 nm) et en accord avec la formation d’une phase . Kiraly et al.129 ont
quant à eux obtenu sous phase gaz à 298,15 K une valeur de 0,57 pour le rapport H/Pd
avec des nanoparticules de Pd de 5 nm dispersé sur un support de carbone (Pd/C), et
jusqu’à 0,96 pour du palladium déposé sur un support graphimets.
Enfin, après saturation des nanoparticules par insertion d’hydrogène, la réaction
de recombinaison électrochimique de l’hydrogène adsorbé en hydrogène moléculaire
conduit à un courant négatif de réduction qui augmente exponentiellement en dessous
de 0,0 V. Cette réaction est supposée se produire selon soit un mécanisme de Heyrovsky
soit un mécanise de Tafel:
Pd-Hads + H+ + e- H2 + Pd (24)
2 Pd-Hads H2 + 2 Pd (25)
La réaction de dégagement d’hydrogène débute à plus faible surtension sur les
nanocubes que sur les nanooctaèdres et les nanosphères. La saturation des
nanoparticules en hydrogène jusqu’à la phase est un préalable pour que la réaction de
dégagement de l’hydrogène de produise. La séparation des processus d’insertion de
l’hydrogène atomique et de dégagement de dihydrogène ouvre la possibilité d’étudier la
différence de nature thermodynamique entre l’hydrogène atomique adsorbé en sous-
potentiel et l’hydrogène atomique adsorbé en sur-potentiel, comme cela a été réalisé
pour le platine et le rhodium124, et plus avant de déterminer le mécanisme de réaction.
3. Détermination de la charge d’adsorption/désorption d’hydrogène en sous potentiel
Des voltammogrammes ont été enregistrés dans la région d’adsorption/désorption
de l’hydrogène atomique déposé en sous-potentiel avec différentes limites inférieures de
potentiel de 0,3 V à 0,1 V, avec un pas de 0,05 V. Comme il a été précédemment
63
expliqué, il a été considéré ici que seule la réaction d’adsorption d’hydrogène en sous
potentiel se produisait lors de la variation négative de potentiel sur la gamme
considérée. Les charges associées à l’adsorption et à la désorption de l’hydrogène
déposé en sous potentiel ont été déterminées en intégrant les courants négatifs et positifs
sur différentes gamme de potentiels. La Figure 21 a, b, c montre l’évolution de la charge
d’adsorption et de désorption d’hydrogène en fonction de la limite inférieure de
potentiel pour les nanosphères, les nanocubes et les nanooctaèdres de palladium.
Pour tous les échantillons, les quantités d’électricité déterminées pour les
processus d’adsorption et de désorption sont très proches, au moins jusqu’à une limite
inférieure de potentiel de 0,15 V. Pour des limites de potentiel inférieures, la charge
attribuée à l’adsorption est plus élevée que celle attribuée à la désorption, atteignant
+10-15 % à 0,1 V. La différence peut se situer dans l’écart type d’expérimentation, ou
alors la valeur systématiquement plus élevée pour l’adsorption peut être due à la
méthode classique de soustraction du courant capacitif. Elle pourrait aussi être due à une
réelle différence entre la quantité d’hydrogène adsorbée et la quantité d’hydrogène
désorbée. Comme la limite inférieure de potentiel est diminuée, un équilibre entre
l’hydrogène adsorbé et l’hydrogène dissout dans les sous-couches atomiques du métal
peut se produire, conduisant à la formation d’un hydrure.
64
Figure 21 Charges associées à l’adsorption en sous potentiel (Qads) et à la désorption de l’hydrogène sur
les nanoparticules de Pd et voltammogrammes associés pour la détermination des charges enregistrés à 5
mV s-1 en milieu support H2SO4 0,5 mol.L-1 pour (a) nanosphères, (b) nanocubes et (c) nanooctaèdres.
c
a
b
65
4. Effet de la limite supérieure de potentiel sur la stabilité du palladium en milieu acide
Les charges anodiques et cathodiques impliquées pour la formation et la réduction
des oxydes de surface sur les nanoparticules de Pd ont quant à elles été examinées en
fonction de la valeur de la limite supérieure de potentiel. Les quantités d’atomes
d’oxygène adsorbés à la surface des électrodes à base de nanoparticules de Pd ont été
déterminées par intégration des courants anodiques positifs (oxydation de la surface de
palladium) et des courants cathodiques négatifs (réduction des oxydes de surface)
enregistrés après avoir imposé différentes limites supérieures de potentiel entre 0,8V et
1,6 V, avec un pas de 0,05 V. L’évolution de ces charges en fonction de la limite
supérieure de potentiel est donnée sur la Figure 22 pour chacun des échantillons de
nanoparticules de palladium, en même temps que les voltammogrammes enregistrés
avec différentes limites supérieures de potentiel.
Trois gammes de limites supérieures de potentiel semblent exister pour le
processus de formation/réduction des oxydes de surface sur les nanoparticules de
palladium. Une première région, allant de 0,8 V à 1,0 V pour les nanoparticules
sphériques et cubiques et à 1,1 V pour les particules octaédriques, correspond à des
valeurs anodiques et cathodiques de charges identiques et donc à la superposition quasi
parfaite des courbes de charges d’oxydation et de réduction. Un second régime
correspond à une région de potentiels entre 1,0 V et 1,3 V pour les nanosphères, entre
1,0 V et 1,35 V pour les nanocubes et entre 1,1 V et 1,4 V pour les nanooctaèdres, où la
charge impliquée dans le processus d’oxydation de la surface de Pd est plus élevée que
celle impliquée dans le processus de réduction. Enfin, dans une troisième gamme de
potentiels correspondant aux limites de potentiels les plus élevées, la différence entre les
charges anodiques et cathodiques atteignent leur maximum. L’écart entre les valeurs de
charges anodiques et cathodiques pour des limites de potentiel supérieures à 1,0/1,1 V
traduit un processus de corrosion de la surface métallique conduisant à la dissolution
d’atomes métalliques de surface. Il est d’ailleurs connu que le palladium n’est pas très
stable en milieu acide et que sa corrosion débute à des potentiels relativement bas130. Il
apparaît de plus ici que la vitesse de dissolution du métal dépend de la microstructure de
66
surface, les nanooctaèdres présentant préférentiellement des domaines de surface de
symétrie (111) semblent plus stables en milieu acide que les cubes présentant
préférentiellement des domaines de surface de symétrie (100) et les sphères présentant
un faible facettage. Il a d’ailleurs été montré par des études de vieillissement en milieu
non désoxygéné de suspensions de nanocubes et de nanobarres de palladium présentant
préférentiellement des faces (100) que les particules évoluaient vers des formes
présentant des faces (111) dont l’énergie de surface est plus faible (et donc présentant
une meilleure stabilité)131.
La position du pic de réduction des oxydes de surface (Ered) a aussi été déterminée
en fonction de la limite supérieure de potentiel du voltammogramme (Esup). La Figure
23 montre l’évolution de cette position pour les différents échantillons de nanoparticules
de Pd. Pour chacun des échantillons, trois régions de potentiels peuvent à nouveau être
séparées en raison du changement de pente dEred/dEsup ; les pentes ont les mêmes
valeurs pour chacun des échantillons de Pd sur chacune des régions correspondant aux
faibles, intermédiaires et hauts potentiels. Il est intéressant de noter que les nanosphères
et les nanooctaèdres montrent un comportement similaire sur toute la gamme de
potentiel étudiée, tandis que les nanocubes se distinguent par la valeur supérieure de
potentiel à laquelle la première rupture de pente apparaît. En revanche, la seconde
rupture de pente se produit sur tous les échantillons à la même valeur de potentiel
d’environ 1,3 V.
Le mécanisme d’oxydation de la surface de palladium est plutôt complexe.
Plusieurs auteurs ont confirmé la formation de PdOH et PdO lors des premières étapes
de l’oxydation de la surface de Pd en milieu acide118,132,133 selon les réactions suivantes:
Pd + H2O = PdOH + H+ + e- (26)
et
Pd + H2O = PdO + 2 H+ + 2 e- (27)
ou
2 PdOH = PdO + Pd + H2O (28)
67
Figure 22 Charges associées à l’oxydation de surface de Pd (Qox) et à la réduction des oxydes de surface
de Pd (Qred) et voltammogrammes associés pour la détermination des charges enregistrés à 5 mV s-1 en
milieu support H2SO4 0,5 mol.L-1 pour (a) nanosphères, (b) nanocubes et (c) nanooctaèdres.
a
c
b
68
En se référant à ces réactions, il est proposé que le premier régime observé dans la
gamme allant de 0,8 V à 1,0-1,1 V corresponde à la formation électrochimique et à la
réduction d’une monocouche d’espèces PdOH de surface. Le second régime jusqu’à
1,3-1,4 V correspond à la formation d’une monocouche de PdO. Enfin, le régime à plus
hauts potentiels pourrait être attribué à l’électrooxydation de la monocouche de PdO en
PdO2 selon:
PdO + H2O = PdO2 + 2 H+ + 2 e- (29)
Il est à noter que la transition en milieu acide de la monocouche de PdO vers la
monocouche de PdO2 sur des nanoparticules de Pd se produit à des potentiels inférieurs
à 1,3 V indépendamment de leur distribution de formes, ce qui est un potentiel inférieur
à celui proposé pour la formation d’une monocouche complète de PdO sur une électrode
massive de Pd en milieu alcalin, i.e. 1,45 V vs ERH118,134. Plusieurs raisons peuvent
expliquer cette différence; outre le pH du milieu de mesure, la proximité des domaines
de surfaces, des coins et des arêtes conduisent à un comportement différent de celui des
électrodes de Pd massives, et un effet de taille peut rendre les particules plus promptes à
l’oxydation de surface.
Dans cette étude réalisée en milieu acide sur les nanoparticules de Pd à
distributions de tailles et de formes contrôlées, les charges impliquées dans le processus
d’adsorption/désorption en sous potentiel d’hydrogène ont été déterminées avant celles
impliquées dans le processus d’oxydation/réduction de surface pour éviter toutes
interférences avec d’éventuelles reconstructions de surface. Ainsi, les charges
déterminées dans la région hydrogène peuvent être comparées à celles déterminées dans
la région oxyde. Il est alors intéressant de noter que la charge de désorption
d’hydrogène entre 0,1 V et 0,4 V correspond à la moitié de celles déterminée dans le pic
de réduction des oxydes de surface avec une limite supérieure de 1,27 V pour les
nanosphères, de 1,32 V pour les nanocubes et de 1,34V pour les nanooctaèdres, c’est-à-
dire à une limite supérieure proche des valeur déterminées pour la seconde rupture de
pente dans le graphe Ered vs. Esup de la Figure 23. Un tel rapport est celui attendu entre
une monocouche d’hydrogène adsorbé sur la surface de palladium et une monocouche
de PdO. La charge correspondant aux oxydes (formation ou réduction) ne peut pas être
69
considérée pour déterminer la surface active car le type d’oxydes formés dépend de la
limite supérieure de potentiel. De plus, en raison des risques de reconstruction de
surface et de dissolution d’atomes de palladium lorsque le potentiel d’électrode est
amené dans la zone de formation des oxydes de surface sur le palladium, il peut
apparaître plus judicieux d’évaluer l’aire de surface active de nanoparticules de
palladium par la détermination de la charge impliquée dans la désorption d’une
monocouche d’hydrogène dans la région d’adsorption en sous potentiel avec une limite
inférieure de potentiel de 0,1 V.
Figure 23 Position du pic de reduction des oxydes de surface en fonction de la limite supérieure de
potential lors de l’enregistrement des voltammogrammes à 5 mV s-1 en milieu H2SO4 0,5 M désaéré.
nanosphères, nanocubes, nanooctaèdres.
5 Conclusion
La séparation sur les voltammogrammes des signaux électrochimiques associées
aux trois processus impliquant l’hydrogène (adsorption/désorption de l’hydrogène
atomique déposé en sous potentiel, absorption/désorption de l’hydrogène atomique au
sein des nanoparticules de palladium et dégagement d’hydrogène moléculaire) crée les
0.6
0.65
0.7
0.75
0.8
0.85
0.8 1 1.2 1.4 1.6 1.8
Ere
dvs.
ER
H (
V)
Esup vs. ERH (V)
70
conditions favorables à la détermination des fonctions d’états thermodynamiques pour
le dépôt en sous potentiel et en sur potentiel d’hydrogène sur les nanosurfaces124.
En ce qui concerne la caractérisation des matériaux sur lesquels la réaction
d’électrooxydation du glycérol sera étudiée, cette séparation permet d’accéder à la
détermination de la surface active des matériaux de palladium nanostructurés en
mesurant la charge impliquée sous le pic de désorption de l’hydrogène déposé en sous
potentiel, entre 0,12 et 0,3 V. Après correction du courant capacitif de double couche,
les valeurs de charges obtenues pour une même électrode ont été comparée à celles sous
le pics de réduction des oxydes de surface déterminées pour des valeurs limites
supérieures de potentiels de 1,27 V pour les nanosphères, de 1,32 V pour les nanocubes
et de 1,34V pour les nanooctaèdres, et pour une valeur de 1,45 V proposé dans la
littérature pour être la valeur pour la formation d’une première monocouche complète
sur une surface du palladium118. Le Tableau 6 répertorie un ensemble de valeurs et les
surfaces actives correspondantes pour une série d’électrodes, en considérant, en
première approximation, une charge de 210 µC cm-2 pour la désorption d’une
monocouche d’hydrogène d’une surface polycristalline lisse de palladium et de 424 µC
cm-2 pour la réduction d’une monouche de PdO118. A cette approximation s’ajoute celle
de considérer que les paramètres de maille du palladium et du platine sont du même
ordre.
Les résultats obtenus sont très proches les uns des autres, et montrent la même
tendance. Il y a tout de même un meilleur accord entre les valeurs de QH des, exp et celles
de QOdes, exp ce qui tend à valider la possibilité d’obtenir d’une façon simple une
estimation de la surface active des nanocatalyseurs de palladium en utilisant la même
méthode que celle préalablement mise en place pour les surface de platine.
71
QHdes
(µC) SA / Hdes
(cm2) QOdes, exp
(µC) SA / Odes, exp
(cm2)
QOdes, exp 1,45 V (µC)
SA / Odes,litt (cm2)
Nanosphères
Nanocubes
Nanooctaèdres
295
208
258
1,4
1
1,2
514
335
568
1,2
0,8
1,3
667
411
676
1,6
1
1,6
Tableau 6 Détermination des charges expérimentales de désorption de l’hydrogène déposé en sous
potentiel (QHdes) de réduction des oxydes de surface (QOdes,exp
) formés lors d’un cycle à des limites
supérieures de potentiels de 1,27 V, 1,32 V et 1,34 V pour respectivement les nanosphères, les nanocubes
et les nanooctaèdres de palladium et à une limite supérieure de potentiel de 1,45 provenant de la
littérature, et valeur associées de la surface active.
III. Voltammétrie cyclique en milieu alcalin
1. Etude en milieu support des nanoparticules de palladium
La forme du voltammogramme ainsi que la position des pics de courant dépend
non seulement du matériau étudié et de sa structure superficielle, mais aussi de
l’électrolyte support dans lequel les mesures ont été effectuées. La Figure 24 montre les
voltammogrammes enregistrés sur les différents échantillons de nanoparticules de
palladium en milieu NaOH 0,1 M.
En milieu alcalin, les pics d’adsorption/désorption de l’hydrogène atomique
déposé en sous potentiels apparaissent moins bien définis et moins réversibles qu’en
milieu acide. Les zones hydrogène des nanosphères et des nanooctaèdres sont de formes
très similaires, tandis que dans le cas des nanocubes un pic centré à environ 0,55 V peut
être attribué à la désorption de l’hydrogène déposé en sous potentiel à la surface des
domaines (100). Le potentiel de début d’oxydation de la surface du palladium est plus
faible qu’en milieu acide, se situant vers 0,6 V indépendamment de la forme
(l’orientation principale des domaines de surface) des nanoparticules.
72
Figure 24 Voltammogrammes enregistrés entre 0,10 et 1,45 V vs. ERH sur (a) nanosphères de Pd, (b)
nanocubes de Pd et (c) nanooctaèdres de Pd en milieu NaOH 0,1 M saturé en N2 (T = 20 °C, 5 mV s-1).
Dans la région de potentiels correspondant à la formation des oxydes de surface
sur les particules de palladium, un pic d’oxydation peut être observé à environ 0,9 V
dans le cas des nanocubes et, bien que moins intense, à environ 1,15 V dans le cas des
c
a
b
73
nanooctaèdres, qui correspondent aux processus d’oxydation impliquant respectivement
les domaines de surface d’orientations (100) et (111). Aucun de ces pics n’est visible
dans le cas des nanosphères.
2. Modification de surface par le bismuth
Il est connu que la modification du palladium par des métaux oxophiles du groupe
p peut conduire à de grands changements de son comportement électrocatalytique, en
termes d’activité et de sélectivité111, notamment lorsque le bismuth est utilisé71. Dans
notre laboratoire, Mario Simoes a synthétisé des nanoparticules de Pd1-xBix/C par une
méthode de microémulsion inverse et a montré que ces catalyseurs possédaient une
activité catalytique vis-à-vis de la réaction d’oxydation du glycérol équivalente à celle
d’un catalyseur Pt/C préparé de la même manière. L’équipe d’électrocatalyse de Claude
Lamy s’est de plus beaucoup intéressée dans les années 1980 à l’action de la
modification de surface de platine par différents taux de recouvrement d’adatomes
déposés en sous potentiel, dont des adatomes de bismuth, vis-à-vis de l’oxydation
d’alcools, et a constaté une très forte amélioration de l’activité dans certaines
conditions135,136.
Ainsi, l’étude de l’effet de la modification de nanoparticules de palladium à
distribution de tailles et de formes contrôlées par des adatomes de bismuth a été
entreprise avec l’espoir de déterminer de manière plus précise le rôle de ce métal dans le
mécanisme d’oxydation du glycérol.
La surface des catalyseurs non-supportés a été modifiée en plongeant pendant
différentes périodes de temps (15 secondes, 1 minute, 5 minutes, 10 minutes et 30
minutes) l’électrode d’or sur laquelle les particules de Pd ont été déposées selon la
méthode décrite dans la partie expérimentale, dans une solution d’acide sulfurique 0,5
M saturé en BiCl3. Le dépôt se produit spontanément sans qu’aucun potentiel contrôlé
ne soit appliqué à l’électrode. Les voltammogrammes de la Figure 25 enregistrés sur les
nanosphères, les nanocubes et les nanooctèdres de Pd montrent sans équivoque que
l’adsorption spontanée du bismuth se produit: les charges impliquées dans la région
d’adsorption en sous potentiel d’hydrogène et de sa désorption diminuent avec le temps
74
de contact de l’électrode avec la solution de bismuth et un pic d’oxydation à 0,9 V
(attribué à la réaction d’oxydation du Bi augmente avec le temps de contact). Ceci
indique que le recouvrement de la surface des particules de Pd par le bismuth augmente
avec le temps de contact. Il n’apparaît ici aucune preuve d’une adsorption préférentielle
du bismuth sur une structure de surface particulière puisque la totalité de la zone
hydrogène semble affectée de la même manière par le dépôt des adatomes.
Un second aspect ressortant de ces voltammogrammes est le fait que
l’adsorption spontanée de bismuth est moins bien contrôlée dans le cas des
nanoparticules octaédriques que dans le cas de nanoparticules sphériques et cubiques.
Encore une fois, l’explication peut provenir de la plus faible énergie de surface des
domaines (111) par rapport aux domaines (100) et aux défauts (coins, arêtes, etc.) qui
miment les domaines de surface (110)131, ce qui peut rendre l’adsorption du bismuth
plus aléatoire. Pourtant, dans le cas de nanoparticule à formes contrôlées de platine,
l’adsorption du bismuth est utilisée pour déterminer la proportion de face (111). Une
autre explication peut provenir de la plus forte hétérogénéité de forme de l’échantillon
d’octaèdres en raison de la présence de tétraèdres et de fortes troncatures. En revanche,
les nanocubes de palladium, qui présentent une distribution de forme très étroite si l’on
se réfère aux caractérisations par microscopie électronique à transmission, permettent
quant à eux un meilleur contrôle du dépôt spontané de bismuth et ont donc été utilisés
pour faire une étude plus poussée du processus d’adsorption spontanée.
La Figure 26a présente la modification de la zone hydrogène enregistrée en
fonction du temps de contact de l’électrode de nanocubes de palladium avec la solution
acide saturée en BiCl3. La charge impliquée pour le processus de désorption
d’hydrogène de la surface du palladium a été déterminée par intégration des courants de
désorption entre 0,1 V et 0,62 V après une correction du courant capacitif dont la valeur
a été estimée à un potentiel d’environ 0,62 V (dans la gamme de potentiel entre la
région hydrogène et la région de formation des hydroxydes/oxydes de surface).
L’évolution de la valeur de cette charge en fonction du temps de contact est représentée
sur la Figure 26b.
75
Figure 25 Voltammogrammes de (a) nanosphères, (b) nanocubes et (c) nanooctaèdres de palladium
modifiés par adsorption spontanée de Bi par immersion de l’électrode dans la solution saturée de BiCl3
dans H2SO4 0,5 mol.L-1, pour différentes durées (NaOH 0,1 mol.L-1, T = 20 ° C, v = 20 mV.s-1).
A partir de ces valeurs de charges impliquées dans la désorption de l’hydrogène,
le taux de recouvrement par le bismuth (Bi) peut être déduit:
b
a
c
76
(30)
où H est le recouvrement de la surface de palladium par l’hydrogène adsorbé,
QH0 et QHt
représentent respectivement les charges déterminées pour la désorption de
l’hydrogène du palladium pur et pour la désorption de l’hydrogène après contact
pendant un temps t avec la solution de BiCl3.
Figure 26 (a) Voltammogrammes de la zone hydrogène enregistrés sur un échantillon de nanocubes de
Pd après différentes périodes de contact avec la solution de BiCl3 (NaOH 0,1 mol.L-1 à v = 20 mV.s-1).
(b) Charge déterminée pour le processus de désorption de l’hydrogène de la surface du palladium après
différents temps de contact de l’électrode avec la solution de BiCl3.
Comme il a déjà été dit, la charge impliquée dans la désorption de l’hydrogène
adsorbé diminue progressivement à mesure que le taux de recouvrement en bismuth
augmente. Comme le montre le graphe de la Figure 27, la valeur de (θH)-1 décroît
linéairement avec le temps de contact t, ce qui suggère un ordre 2 de réaction par
rapport aux sites libres de la surface de Pd avec une constante cinétique k = 1,17 10−2 s−1
qui peut être décrite par la loi de vitesse : .
a b
77
Figure 27 Graphe représentant la droite (θH)−1 en foncion du temps de contact et de l’électrode de
nanocubes de palladium avec la solution acide de BiCl3.
La Figure 28 montre les régions hydrogène enregistrées sur les nanosphères et les
nanoocatèdres de palladium pur et après modification par immersion dans la solution
saturée de BiCl3, et l’évolution de la charge de désorption de l’hydrogène associée. Bien
que le contrôle du dépôt spontané de Bi soit plus difficile, la même tendance que celle
observée sur les nanocubes semble se dessiner. La diminution de la charge de
désorption de l’hydrogène avec le temps de contact suit le même profil quelle que soit la
forme des nanoparticules, ce qui suggère que la cinétique de modification par le bismuth
soit la même.
78
Figure 28 (a,c) Voltammogrammes enregistrés sur des échantillons de nanosphère (a) et de
nanooctaèdres (c) de palladium en fonction du temps d’immersion de l’életrode dans la solution de BiCl3
(NaOH 0,1 mol.L-1, v = 20 mV.s-1). (b,d) Charge déterminée pour le processus de désorption de
l’hydrogène de la surface des nanosphères (b) et nanooctaèdres (d) de palladium après différents temps de
contact de l’électrode avec la solution de BiCl3.
Il est aussi important, pour des raisons de compréhension du rôle du bismuth dans
les réactions d’oxydation d’alcools et la proposition de mécanismes réactionnels, de
connaitre le degré d’oxydation des adatomes sur les nanoparticules de palladium.
Cependant, cette détermination pose d’énormes problèmes en raison de la très faible
quantité de bismuth déposée par adsorption spontanée. Dans le cas de monocristaux de
platine, Clavilier et al.137 ont proposé que le bismuth s’adsorbait spontanément sous
forme métallique (valence 0) et qu’une espèce de type Biads2+ stabilisée par l’adsorption
d’ions hydroxyles OH- se formait à plus haut potentiels. Cette proposition permettrait
d’expliquer le pic d’oxydation observé à haut potentiel (vers 0,95 V pour les
nanosphères et nanocubes et vers 1,0 V pour les nanooctaèdres) sur les
a b
c d
79
voltammogrammes de la Figure 25. Hamm et al.138 ont étudié le dépôt en sous potentiel
de bismuth à la surface de monocristaux de Pt (111); les mesures d’XPS qu’ils ont
réalisées leur ont fait conclure que la valence du bismuth de chaque côté du pic
d’adsorption en sous potentiel était de zéro, et que la charge observée entre 0,2 et 0,5 V
était probablement due à la coadsorption d’ion hydroxyles OH- plutôt qu’à un processus
redox de surface. Des travaux menés par Gewirth et al.139,140 sur des surface d’or ont
conclus que des espèces Bi–OH et Bi–O se formait dans la région de potentiel
catalytiquement active à partir d’environ 0,6 V sur l’or en milieu alcalin, potentiel
auquel ce métal devient capable d’adsorber les espèces hydroxyles56,141 et que des ions
hydroxyles OH− étaient coadsorbés avec le bismuth dans la région de dépôt en sous
potentiel. Enfin, très récemment, sur la base de mesures XPS, Cai et al. ont proposé que
les atomes de bismuth déposés spontanément sur la surface de nanoparticules de
palladium possédait préférentiellement le degré d’oxydation +III 87. Il apparaît donc que
l’état d’oxydation dans lequel se trouve le bismuth n’est pas encore défini avec
précision et que le débat est encore largement ouvert. Cependant, indépendamment de la
valence du bismuth déposé spontanément ou en sous potentiel, une propriété liée à la
présence de bismuth semble faire l’unanimité dans la communauté, à savoir qu’elle
favoriserait l’adsorption d’espèces OH soit à sa surface137, soit sur les atomes de métaux
nobles adjacents142.
IV. Electrooxydation du glycérol en milieu alcalin
1. Electrooxydation du glycérol sur les nanoparticules de palladium pur
L’activité des catalyseurs de palladium pur a été déterminée dans un premier
temps en milieu glycérol à 0,1 mol.L-1 + NaOH à 0,1 mol.L-1. La Figure 29 compare les
courbes de polarisation enregistrées sur les différents échantillons de nanopatricules de
palladium. Les nanocubes sont plus actifs que, dans l’ordre, les nanooctaèdres et les
nanosphères sur la gamme de potentiel supérieure à 0,55 V, puisque des courants
d’oxydation plus élevés sont enregistrés. Les voltammogrammes d’oxydation du
glycérol sur nanosphères et nanocubes montrent le même aspect: un épaulement entre
80
0,55 et 0,85 V et un pic principal d’oxydation à potentiels plus élevés. Dans le cas des
nanooctaèdres, seul le pic principal d’oxydation est visible, lequel atteint son maximum
à plus bas potentiel que pour les autres échantillons de nanoparticules de Pd.
Figure 29 Voltammogrammes enregistrés sur les différents échantillons de nanoparticules de palladium
en milieu glycérol 0,1 mol.L-1 + NaOH 0,1 M (T = 20 °C, 5 mV s-1).
L’épaulement est plus prononcé pour les nanocubes qui sont sensés exhiber une
forte densité de domaines étendus de surface d’orientation (100). Il est par conséquent
proposé ici que le processus d’oxydation se produisant dans la gamme de potentiels
entre 0,55 et 0,85 V soit principalement lié aux interactions entre les domaines de
surface (100) et des espèces adsorbées provenant du glycérol. Il est à ce stade difficile
d’expliquer la meilleure activité des nanooctaèdres par rapport aux nanosphères en
invoquant la présence de nanodomaines de surface d’orientation (111). Ce pourrait être
le cas, mais, comme l’ont montré les images de microscopie électroniques, les
nanooctaèdres présentent de fortes troncatures qui pourraient former des domaines
(100), bien que ceux-ci n’aient pas été détectés par voltammétrie cyclique en milieu
support ; cependant leurs faibles tailles pourraient expliquer l’absence du pic à environ
0,9 V dans la zone de formation des oxydes en surface du palladium en milieu support
seul. Pourtant, il a déjà été montré que la présence de domaines étendus de surface (100)
0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4 sphères
cubes
octaèdres
I (m
A)
E vs ERH (V)
81
ou (111) était un préalable à l’oxydation du monoxyde de carbone préadsorbé à bas
potentiels, dans la région dite du prépic d’oxydation143.
L’effet de la concentration de glycérol a été étudié sur les nanocubes de
palladium, lesquels possèdent l’activité la plus élevées et l’épaulement sur la courbe de
polarisation à bas potentiels le plus marqué. La Figure 30 montre les courbes de
polarisation enregistrées pour des concentrations de glycérol de 10-1 mol.L-1, 10-2 mol.L-
1 et 10-3 mol.L-1.
A faibles concentrations de glycérol, 10−2 M et 10−3 mol.L-1, trois contributions au
processus global d’oxydation peuvent être observées. A plus forte concentration, 10−1
mol.L-1, seul l’épaulement à bas potentiels et le pic principal d’oxydation sont visibles.
Le pic principal d’oxydation est d’ailleurs rejeté vers des potentiels plus élevés à mesure
que la concentration en glycérol augmente, ce qui pourrait être dû à un plus fort
empoisonnement de surface par des espèces issues de l’adsorption du glycérol. En effet,
pour les plus faibles concentrations en glycérol, un pic de courant apparaît dans la
gamme de potentiel de 0,3 à 0,5 V qui correspond au premier pic de désorption
d’hydrogène sur le voltammogramme des nanocubes de palladium enregistré en milieu
alcalin dans la Figure 30: le recouvrement de la surface de palladium par des espèces
provenant du glycérol est plus faible.
De plus, il peut être remarqué que le pic correspondant à la désorption de
l’hydrogène à partir des domaines de surface (100) n’apparaît pas (à environ 0,5 V),
même à très faible concentration, ce qui semble indiquer une adsorption préférentielle
du glycérol sur les domaines de surface (100). La théorie du mécanisme bifonctionnel144
stipule que la désorption d’espèces organiques « poisons » implique l’activation de
molécules d’eau et la réaction entre espèces adsorbées suivant un mécanisme de type
Langmuir-Hinshelwood. Puisqu’il semble que les domaines de surface (100) soient
complètement bloqués à bas potentiels par des espèces adsorbées provenant glycérol, il
peut être proposé d’expliquer l’amélioration de l’activité dans le cas des nanocubes par
rapport aux nanooctaèdres et nanosphères en termes d’adsorption préférentielle du
glycérol sur les surfaces (100) et de formation d’espèces OH adsorbées sur les défauts
82
des particules de palladium (coins, arêtes, marches, qui miment le comportement des
surfaces (110)), permettant au mécanisme bifonctionnel de se produire.
Figure 30 Voltammogrammes enregistrés sur l’échantillon de nanocubes de palladium en milieu NaOH
0,1 M et en présence de glycérol à (▬) 0,1 mol.L-1, (▬) 0,01 mol.L-1 et (▬) 0,001 mol.L-1 (T = 20 °C, 5
mV s-1).
2. Electrooxydation du glycérol sur les nanoparticules de palladium modifiée par
adsorption spontanée de bismuth
L’activité catalytique vis à vis de l’électrooxydation du glycérol à 0,1 mol. L-1 a
tout d’abord été évaluée sur les échantillons de nanoparticules de palladium après les
avoir immergées 30 minutes dans la solution d’acide sulfurique saturée en BiCl3. Dans
ce cas, un fort taux de recouvrement en bismuth est obtenu, proche de 90 %, et ce
traitement conduit à l’activité électrocatalytique la plus élevée à bas potentiels (voir plus
avant)121. La Figure 31 compare les courbes de polarisation enregistrées sur les
différents échantillons de nanoparticules de palladium modifiées par le bismuth. De
nouveau, les nanocubes modifiés présentent l’activité catalytique la plus élevée. En
revanche, les nanoocatèdres et les nanosphères modifiées présentent une activité
équivalente de 0,55 V à 0,85 V, alors que les nanooctaèdres non modifiés possédaient
une activité plus élevée que les nanosphères. Ce résultat semble suggérer que le bismuth
pourrait s’adsorber préférentiellement sur les faces (111) et les bloquer. Il est d’ailleurs
0,2 0,4 0,6 0,8 1,00,00
0,05
0,10
0,15
0,20
0,25
0,30
0,35
I (m
A c
m-2)
E vs ERH (V)
83
intéressant de noter ici que l’adsorption spontanée de bismuth est la méthode utilisée
pour estimer la proportion de face (111) présente sur des nanoparticules de platine à
formes contrôlées145,146.
Figure 31 Voltammogrammes enregistrés en milieu glycérol 0,1 mol.L-1 + NaOH 0,1 M sur les différents
échantillons de nanoparticules de palladium modifiées par immersion 30 minutes dans une solution acide
saturée en BiCl3 (T = 20 °C, 5 mV s-1).
Afin d’avoir une meilleure idée de l’effet de la modification des nanoparticules de
palladium par le bismuth, les Figure 32 a, b, c comparent les courbes d’oxydation du
glycérol enregistrées sur chacun des échantillons de nanoparticules de palladium non-
modifiées et modifiées.
Dans le cas des nanosphères (Figure 32 a), aucune amélioration de l’activité
massique du catalyseur n’est observée entre 0,55 V et 0,8 V, bien que la surface de
palladium accessible soit plus faible après modification par le bismuth. Il semble alors
que l’activité intrinsèque surfacique du palladium soit améliorée par la présence de
bismuth. A plus hauts potentiels, supérieurs à 0,8 V, l’augmentation des courants
d’oxydation peut soit être imputée à une meilleure activité du catalyseur vis-à-vis de la
réaction d’électrooxydation du glycérol, soit au processus d’oxydation observé en
milieu électrolyte support seul (Figure 24). Cependant, les expériences présentées plus
0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4
sphères+Bi
cubes+Bi
octaèdres+Bi
I
(mA
)
E vs ERH (V)
84
tard dans ce manuscrit tendent à privilégier la première hypothèse: l’augmentation des
courants d’oxydation à hauts potentiels est due à l’amélioration de l’activité du
catalyseur.
Pourtant, des catalyseurs PdxBi11-x/C préparés au laboratoire par une méthode de
microémulsion “water in oil” avaient permis d’atteindre des activités catalytiques vis à
vis de l’électrooxydation du glycérol très élevées71 en comparaison à celles observées
ici. L’addition de 10 % atomique de bismuth au palladium permettait d’atteindre la
même activité que celle obtenue avec un catalyseur Pt/C, ce qui était un résultat
remarquable. Le potentiel de début d’oxydation était déplacé de 150 mV vers les
potentiels plus faibles, d’environ 0,55 V à environ 0,40 V. L’augmentation du rapport
atomique en bismuth ne changeait pas l’activité, ce qui confirmait que le bismuth
déposé sur le support carboné n’avait aucun rôle catalytique. L’apparent désaccord entre
les résultats présentés dans ce mémoire de thèse sur des nanosphères non-supportées de
palladium modifiées par adsorption spontanée de bismuth et ceux obtenus par Mario
Simoes sur des nanosphères de Pd9Bi1 supportées sur un carbone de haute surface
spécifique (Vulcan XC 72 à 250 m2.g-1) préparées par microémulsion « water in oil »
doit certainement être dû à la nature/structure des dépôts de bismuth et à leurs
interactions avec la surface de palladium, puisque les deux types de nanoparticules de
Pd sont sphériques et de taille moyenne similaire, de l’ordre de 4,0 nm. En particulier,
les caractérisations physicochimiques du catalyseurs Pd9Bi1/C préparé par
microémulsion « water in oil » ont suggéré une décoration des nanoparticules de Pd par
des clusters de Bi2O3 et/ou Bi(OH)3 plutôt qu’une modification de la surface de
palladium par des adatomes de Bi.
85
Figure 32 Voltammogrammes enregistrés en milieu glycérol à 0,1 mol.L-1 + NaOH à 0,1 M sur les
différents échantillons de nanoparticules de palladium non-modifiées et modifiées par immersion 30
minutes dans une solution acide saturée en BiCl3 (T = 20 °C, 5 mV s-1).
Dans le cas des nanocubes de palladium (Figure 32 b), l’amélioration de l’activité
catalytique vis-à-vis de la réaction d’électrooxydation du glycérol induite par la
0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4
sphères
sphères+Bi
I (m
A)
E vs ERH (V)
0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4
cubes
cubes+Bi
I (m
A)
E vs ERH (V)
0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4
octaèdres
octaèdres+Bi
I (m
A)
E vs ERH (V)
a
b
c
86
modification par le bismuth est évidente; en effet, dès 0,6 V les courants d’oxydation
enregistrés sont plus élevés que ceux obtenus sur les nanocubes de palladium pur. Ce
fait met clairement en lumière l’activité plus élevée des domaines de surface (100) vis-
à-vis des processus d’adsorption et d’oxydation du glycérol, et un effet synergétique
plus important entre de telles structures de surface et le bismuth adsorbé que celui
observé sur les nanosphères présentant de faibles orientations préférentielles de surface.
Les nanocubes modifiés présentant de nouveau une meilleure activité vis-à-vis de la
réaction d’oxydation du glycérol, une étude de l’effet du taux de recouvrement en
bismuth de ces nanoparticules à été réalisée à faible concentration de glycérol (0,001
mol. L-1).
La Figure 33 donne les courbes d’oxydation du glycérol enregistrées sur les
nanocubes de palladium présentant différents taux de recouvrement en bismuth. Pour
des taux de recouvrement θBi allant de 0 à 0,49, les courbes de polarisation sont
caractérisées par un prépics entre 0,65 V et 0,80 V suivi d’un pic intense d’oxydation
centré vers 0,85 V. Le plus faible taux de recouvrement θBi = 0,24 a engendré un prépic
d’oxydation du glycérol localisé à 0,72 V plus intense que pour les taux de
recouvrement plus élevés allant jusqu’à θBi = 0,74. Ensuite, pour des taux de
recouvrement supérieurs ou égaux à θBi = 0,74, un second régime est observé : le pic
principal d’oxydation est déplacé vers des potentiels plus faibles et devient moins
intense, tandis que l’intensité du prépic augmente. Enfin, pour le taux de recouvrement
maximal, θBi = 0,88, l’intensité et le potentiel de début du prépic se superposent avec
ceux observé pour le plus faible taux de recouvrement.
87
Figure 33 Voltammogrammes enregistrés sur l’échantillon de nanocubes de palladium présentant
différents taux de recouvrement en bismuth en milieu NaOH à 0,1 M et en présence de glycérol à 0,001
mol.L-1 (T = 20 °C, 5 mV s-1).
Il est difficile d’expliquer rationnellement ce comportement uniquement en termes
de mécanisme bifonctionnel. Pour certains auteurs, il faut aussi tenir compte du fait que
la présence d’adatomes peut conduire à des changements dans les quantités et les
compositions des espèces fortement chimisorbées à la surface du métal catalytique, ce
qui peut avoir des répercussions sur le cours du mécanisme d’électrooxydation147,148.
Dans le cas des nanocubes de palladium avec un faible taux de recouvrement en
bismuth, les espèces adsorbées peuvent être désorbées après oxydation grâce à l’apport
des espèces oxygénées sur le bismuth137 ou sur les sites de palladium adjacents aux
adatomes de bismuth142. Pour un taux de recouvrement plus élevé en bismuth,
l’adsorption d’espèces particulières nécessitant des sites multiples de palladium peut
être limitée en raison de la dilution des sites d’adsorption par les adatomes de Bi149, et
des espèces fortement adsorbées peuvent seulement réagir à plus ou moins hauts
potentiels selon des changements induits à la surface du palladium (dilution de sites
d’adsorption, densité d’espèces oxygénées de surface, densité d’états électroniques,
etc.). Ces derniers ont bien évidemment une influence importante sur les mécanismes
d’adsorption et sur la nature des intermédiaires de réaction adsorbés à la surface du
catalyseur.
0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0
0,00
0,04
0,08
0,12
0,16
0,20
0,24
0,00
0,24
0,49
0,74
0,88
I (m
A)
E vs ERH (V)
1-H
88
Enfin, dans le cas des nanooctaèdres (Figure 32 c), la modification par le bismuth
conduit plutôt à une dégradation des performances du catalyseur à haut potentiel, ce qui
semble confirmer sa forte interaction avec les domaines de surface (111).
V. Etude infrarouge in situ
1. Nanoparticules de palladium pur
La sélectivité des différents échantillons de nanoparticules de palladium a été
étudiée par spectroscopie infrarouge de réflexion lors de la variation linéaire de
potentiel à faible vitesse (1 mV s-1) entre 0,1 V et 1,0 V vs ERH. Les Figure 34 a, b, c
montrent respectivement les spectres enregistrés en fonction du potentiel d’électrode
lors de l’électrooxidation du glycérol à 0,1 mol.L -1 en milieu NaOH à 0 ,1 mol.L-1. Pour
une plus grande clarté, les spectres infrarouge ont été découpés en trois gammes de
nombres d’onde.
89
Figure 34 Spectres infrarouge enregistrés sur (a) les nanosphères, (b) les nanoocubes et (c) les nanooctaèdres de palladium au cours de l’oxydation du
glycérol à 0,1 Mol. L-1 en milieu NaOH à 0,1 Mol.L-1 à T = 20 °C, v = 1 mV.s-1.
0,1 V
1,0 V
0,1 V
1,0 V
0,1 V
1,0 V
a b
c
90
En rappelant le schéma réactionnel suivant pour l’électrooxydation du glycérol:
et en s’appuyant sur les spectres répertoriés dans « The Aldrich Library of Infrared
Spectra »150 et sur des données de la littérature49,151-155, et en se basant sur de
précédentes études menées au laboratoire dans lesquelles les attributions des bandes
d’absorption infrarouge ont été confirmées par analyses HPLC des produits de réaction
accumulés au cours d’expériences de chronoamperométrie réalisées aux potentiels où
apparaissaient ces bandes infrarouge caractéristiques156, l’analyse de la région
« empreintes » des spectres infrarouge a pu être effectuée. Le tableau 7 répertorie les
bandes d’absorption repérées sur les spectres infrarouge avec leur position en nombre
d’onde et leur attribution aux fonctions chimiques présentes dans les éventuels produits
de réaction.
Rupture de la iaison C-C :
produits en C2 et C1
-2 e-
-2 e- -4 e-
-2 e-
-2 e-
-4 e-
-4 e-
glyceraldéhyde
glycérol
dihydroxyacétone
glycérate tartronate
mésoxalate
hydroxypyruvate
91
Nombre d’onde (cm-1) Fonctions moléculaire
1070
1120
1225
1310
1335
1350
1385
1410
1575
1900
2343
C-O élongation (aldéhyde ou alcool)150,156
C-O élongation (aldéhyde ou alcool)150,156
C-O élongation (aldéhyde ou alcool)150,156
C-O élongation (glycéraldéhyde ou glycérate)150,156
1,3-Dihydroxy-2-propanone (dihydroxyacétone)150,156
Hydroxypyruvate150,156
COO- élongation 150,156,157
CO32- 150,157
COO- élongation 151,152,154,156,157
CO ponté85
CO249,153-155
Tableau 7 Attribution des bandes d’absorption infrarouge enregistrées au cours de l’électrooxydation du
glycérol à 0,1 mol.L-1 dans NaOH à 1,0 Mol. L-1 sur des catalyseurs à base de palladium.
La méthodologie utilisée pour l’interprétation des spectres est présentée, à titre
d’exemple, dans le cas des nanosphères de palladium en se basant sur le grossissement
de la gamme 1000-1750 cm-1 présenté sur la Figure 35.
92
Figure 35 Spectres infrarouge enregistrés sur les nanosphères de Pd sur la gamme de nombre d’onde de
1000 à 1750 cm-1 au cours de l’oxydation du glycérol à 0,1 Mol. L-1 en milieu NaOH à 0,1 Mol.L-1 à v =
1 mV.s-1.
Les spectres infrarouge enregistrés au cours de ces travaux résultent de
l’addition de 128 interferogrammes et sont normalisés de la façon suivante:
(31)
où RE est la réflectivité enregistrée au potentiel d’électrode E au cours de la variation
positive et REref est la réflectivité enregistrée au potentiel le plus négatif avant de
démarrer la variation de potentiel (0,1 V vs ERH) où il n’y pas encore de produit de
1000 1250 1500 1750
No re d’o de ( -1)
0,1 V
0,2 V
0,3 V
0,4 V
0,5 V
0,6 V
0,7 V
0,8 V
0,9 V
1,0 V
A B D E G H
F
E vs ERH (V)
93
réaction. Dans cette configuration, une bande négative d’absorption correspond à la
formation d’une espèce à la surface de l’électrode et une bande positive d’absorption
correspond à la consommation d’une espèce à la surface de l’électrode.
La bande d’absorption A à environ 1070 cm-1 peut être attribuée à la vibration
d’élongation de la liaison C-O dans une fonction alcool ou aldéhyde. Puisque cette
bande apparaît très tôt, dès 0,45 V, qu’elle est positive, qu’elle est présente sur toute la
gamme de potentiel où le catalyseur est actif et qu’elle augmente lorsque le potentiel
d’électrode augmente, elle peut raisonnablement être attribuée à la consommation de
fonctions alcool. La bande d’absorption B est localisée à 1120 cm-1 et peut être aussi
associée à la vibration d’élongation de la liaison C-O dans une fonction alcool ou
aldéhyde, mais ici, il s’agit d’une bande négative correspondant à une production ; il est
donc raisonnable de l’associer à la formation de glycéraldéhyde. Puisque cette bande
d’absorption apparait dans une gamme de potentiel inférieure à celle ou un courant
d’oxydation est détecté, il est probable que cette espèce reste adsorbée à l’électrode. Sur
la gamme de potentiels de 0,5 à 0,6 V, correspondant au début de la vague d’oxydation
du glycérol sur le palladium, les bandes E et H apparaissent. Ces bandes d’absorption
localisées à environ 1380 cm-1 et environ 1575 cm-1 correspondent à la formation de
fonction carboxylates; le carboxylate associé à la première bande d’absorption est
produit significativement entre 0,5 et 0,8 V, tandis que celui associé à la seconde bande
apparaît un peu plus tôt en potentiel et est détecté jusqu’à 1,0 V. A plus hauts potentiels,
à partir de 0,6 V, la bande d’absorption à 1310 cm-1 apparaît. Cette bande d’absorption
peut être attribuée la vibration d’élongation de la liaison C-O dans une fonction
aldéhyde ou glycérate. Au potentiel d’apparition de cette bande d’absorption, il est plus
que probable qu’elle soit associée à la formation de glycérate ; de plus comme cette
bande apparaît tardivement par rapport à celles observées à 1380 cm-1 et 1575 cm-1, le
composé correspondant à cette bande pourrait être un précurseur de l’hydroxypyruvate.
En effet, à partir de 0,8 V, tandis que la bande F disparaît, les bandes E et G, attribuée
respectivement à la formation d’hydroxypyruvate et de carbonate, apparaissent. La
formation de carbonate à haut potentiel est corroborée par l’apparition à partir d’environ
0,85 V d’une bande d’absorption à 2343 cm-1 (Figure 34a) correspondant à la formation
94
de CO2. Ce CO2 est formé en raison de l’appauvrissement en ions hydroxyles dans le
film mince d’électrolyte coincé entre l’électrode et la fenêtre de CaF2 contre laquelle
cette dernière est pressée. Des ions hydroxyles sont en effet consommés lors de réaction
d’oxydation en milieu alcalin conduisant à des carboxylates (R-COO- et des carbonates
CO32-). Il est donc proposé le mécanisme suivant pour la réaction d’oxydation du
glycérol sur les nanosphères non-supportées de palladium:
Figure 36 Le mécanisme de la réaction d’oxydation du glycérol sur les nanosphères non-supportées de
palladium
Les spectres enregistrés sur les autres échantillons de nanoparticules de
palladium (nanocubes et nanooctaèdres) montrent les mêmes bandes d’absorption que
ceux enregistrés sur les nanosphères. La forme des particules n’influe pas sur la nature
des intermédiaires et/ou produits de réaction de l’oxydation du glycérol. En revanche,
les rapports des intensités relatives des pics d’absorption indiquent que les chemins
réactionnels et les distributions de produit pourraient être différents pour chaque type de
nanoparticules. Cette hypothèse devra être confirmée par des analyses des produits de
réaction après des expériences de chronoampérométrie à des potentiels particuliers
déterminés préalablement grâce à l’analyse infrarouge in situ. Malheureusement, cette
étude n’a pas pu être effectuée au cours de ces travaux de thèse par manque de temps,
mais elle est prévue dans le futur.
Cette étude infrarouge in situ a aussi confirmée que les nanocubes de palladium
présentaient l’activité la plus élevée vis-à-vis de la réaction d’oxydation du glycérol à
bas potentiel, puisque les premier signes de disparition de l’alcool et de formation de
95
produits d’oxydation (aldéhyde et carboxylate) apparaissent à plus bas potentiels (0,4 V
pour les nanocubes contre 0,5-0,55 V pour les nanosphères et nanooctaèdres), comme le
montre le Tableau 8.
Enfin, un fait marquant est apparu au cours de cette étude: la formation
d’hydoxypyruvate sur les nanoparticules de palladium. En effet, des travaux antérieurs
réalisés au laboratoire concernant la sélectivité de la réaction d’oxydation du glycérol
sur des nanocatalyseurs à base de palladium, de platine et d’or dispersés sur un support
de carbone n’avaient fait apparaître la bande d’absorption infrarouge à 1350 cm-1,
correspondant à l’hydroxypyruvate, que sur l’or et à haut potentiel. Un retour sur ce
comportement catalytique particulier sera effectué à la lumière des résultats qui seront
présentés dans la section suivante traitant des catalyseurs autosupportés à base de
palladium.
Potentiel d’électrode en V / ERH 0,1 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1,0
nanosphères
COads glycéraldéhydeads Glycerateads glycerate - tartronate
Hydroxypyruvate CO3
2-, CO2
Nanocubes
COads glycéraldéhydeads Glycerateads Glycérate - tartronate
hydroxypyruvate CO3
2-, CO2
Nanooctaèdres
COads
glycéraldéhydeads Glycerateads Glycérate - tartronate hydroxypyruvate CO2 CO3
2-, CO2
Tableau 8 Proposition de formation d’intermédiaires et de produits de réaction en fonction du potentiel
d’électrode sur les différents échantillons de nanoparticules de palladium.
96
2. Nanoparticules de palladium modifiées par le bismuth
Lorsque les spectres infrarouge enregistrés au cours de la réaction
d’électrooxydation du glycérol sur les échantillons de nanoparticules de palladium
modifiées par adsorption spontanée de bismuth ont été traités, les changements de
l’intensité de la bande d’absorption à 2043 cm-1 relative à la formation du CO2 sont
apparus très importants. La Figure 37 montre les spectres infrarouges sur la gamme de
nombres d’onde dans laquelle la bande d’absorption correspondant à la formation de
CO2 apparaît. La modification du palladium par le bismuth a donc un effet important sur
la capacité du catalyseur à couper la liaison carbone-carbone et sur son aptitude à
favoriser ou non la formation de produits de dégradation. Une augmentation du taux de
recouvrement des particules par le bismuth, semble conduire à une diminution de la
production de CO2. Pour des temps de contact relativement faibles, entre 0 et 1 minute,
tous les échantillons de nanoparticules montrent une diminution de la production avec le
taux de recouvrement. Un tel comportement était attendu, Simoes et al. ayant déjà
montré que la modification de nanoparticules de palladium par des cluster de bismuth
conduisait à limiter l’adsorption dissociative du glycérol avec rupture de la liaison C-C
et formation de COads puis de CO2 (ou CO32-)71. En revanche, la brusque augmentation
de la production de CO2 pour un temps de contact de 5 minutes dans le cas des
nanocubes et des nanosphères, et dans une moindre mesure pour les nanooctaèdres à 10
minutes de contact, n’était pas attendue. De toute évidence, les surfaces (100) et (111)
se comportent différemment vis à vis de l’adsorption dissociative du glycérol. Enfin, la
diminution de l’intensité relative du pic d’absorption à 2343 cm-1 pour des temps de
contact très élevés (10 minutes) dans le cas des nanocubes et des nanosphères suggère
soit une diminution de l’activité globale du catalyseur due au recouvrement très élevé de
la surface de palladium par le bismuth, soit à un changement de mécanisme minimisant
la capacité du catalyseur à rompre la liaison C-C. Dans le cas des octaèdres,
l’augmentation relative du pic d’absorption lié à la formation de CO2 continue pour le
matériau modifié par un temps de contact de 10 minutes avec la solution de bismuth.
97
Figure 37 Spectres infrarouge sur la gamme de nombre d’onde de 2250 à 2500 cm-1 enregistrés pour les
différents échantillons de nanoparticules de Pd modifiées ou non par adsorption spontanée de bismuth
pendant différents temps au cours de l’oxydation du glycérol 0,1 Mol. L-1 en milieu NaOH 0,1 M à v = 1
mV.s-1.
0,1 V
1,0 V
0,1 V
1,0 V
0,1 V
1,0 V
No re d’o de ( -1)
Bi : 0 s Bi : 15 s Bi : 1 min Bi : 5 min Bi : 10 min
Sphères
Cubes
Octaèdres
98
Une explication à un tel comportement pourrait être la suivante:
Le glycérol s’adsorbe préférentiellement sur les domaines étendus; or la
modification des nanocubes de palladium n’a pas montré d’adsorption préférentielle du
bismuth sur les domaines de surface (100), tandis qu’il a été pressenti dans le cas des
octaédres que le bismuth pouvait s’adsorber plus fortement (préférentiellement) sur les
domaines de surface (111). Dans le cas des nanocubes et nanosphères, l’adsorption du
bismuth se ferait sur les défauts (coins, arêtes, marches, petits domaines (111), etc.) et
celle du glycérol sur les domaines de surface (100) ; plus ces domaines sont étendus,
plus l’adsorption dissociative est favorisée, ce qui explique la plus forte sélectivité des
nanocubes vers le CO2 (expliquant aussi au passage la plus forte activité et sélectivité
vers le CO2 des nanocubes comparés au nanosphères). En effet, l’adsorption
dissociative du glycérol avec rupture de la liaison C-C nécessite probablement
l’existence de sites composés de plusieurs atomes de palladium adjacents dont la
probabilité est plus élevée si les domaines étendus sont plus grands. Lorsque le taux de
recouvrement en bismuth augmente, ce dernier s’adsorbe sur les domaines (100) et
«dilue » les atomes de palladium de surface limitant l’adsorption dissociative. Le
changement de comportement observé pour un taux de recouvrement intermédiaire
(modification par immersion pendant 5 minutes des nanoparticules de palladium dans la
solution saturée de BiCl3) peut provenir d’un réarrangement de surface des adatomes de
bismuth adsorbés pour former des îlots de bismuth et laisser des sites de surface de
palladium pluri-atomiques libres où l’adsorption dissociative du glycérol avec rupture
de la liaison C-C peut se produire. Pour des taux de recouvrement très élevés de
bismuth, la densité de ces sites pluri-atomiques d’adsorption dissociative avec rupture
de la liaison C-C diminue, et avec leur diminution, celle de la production de CO2 aussi.
L’effet de la modification des surfaces de palladium par adsorption spontanée de
bismuth sur le comportement catalytique est présenté sur la Figure 38. Dans tous les cas
la modification par immersion pendent des temps courts (faibles taux de recouvrement)
semble conduire à une diminution de l’activité à bas potentiels, les bandes d’absorption
devenant visible à des potentiels plus élevés de 50 à 100 mV par comparaison avec les
nanoparticules non modifiées. Il est nécessaire d’atteindre des taux de recouvrement
99
relativement élevés pour voir l’activité à bas potentiels s’améliorer, au moins pour les
nanosphères et les nanocubes. Dans le cas des nanooctaèdres, la modification par le
bismuth ne semble pas améliorer l’activité, en conformité avec ce qui avait été observé
lors de l’étude électrochimique par voltammétrie à variation linéaire de potentiel. Il
apparaît de nouveau une amélioration nette de l’activité pour les taux de recouvrement
intermédiaires de bismuth correspondant à des temps de contact avec la solution acide
saturée en sel de bismuth de 5 minutes. Pour des taux de recouvrement supérieurs,
correspondant à des temps d’immersion dans la solution acide saturée en sel de bismuth
de 10 minutes, l’activité semble décroître à nouveau.
En ce qui concerne la sélectivité, la présence de bismuth conduit dans tous les
cas à rendre la bande d’absorption infrarouge centrée à environ 1380 cm-1 et
correspondant à la formation de carboxylate moins symétrique que celle observée sur
les nanoparticules de palladium pures. Des bandes d’absorption infrarouge centrées sur
de nombres d’onde de valeurs inférieures se forment dès les bas potentiels. De
nouveaux produits sont donc formés à l’électrode en présence de bismuth. Bien que ce
phénomène se produise pour les trois échantillons de nanoparticules modifiées par
adsorption spontanée de bismuth, la séparation des bandes d’absorption dans la gamme
de nombre d’onde entre 1300 cm-1 et 1400 cm-1 est, encore une fois, plus évidente dans
le cas des nanocubes modifiés par immersion 5 minutes dans la solution acide saturée
de BiCl3. La Figure 39 présente un agrandissement des spectres enregistrés sur les
nanocubes modifiés pendant 5 minutes. En plus des mêmes bandes d’adsorption que
celles observées sur les nanoparticules de palladium non modifiées, les spectres font
apparaître une bande supplémentaire (bande J) localisée à environ 1335 cm-1 qui est
caractéristique de l’espèces chimique dihydroxyacétone (1,3-Dihydroxy-2-propanone).
La formation de dihydroxyacétone en présence de bismuth peut s’expliquer soit en
considérant un changement de mécanisme d’adsorption du glycérol, soit en considérant
le même mécanisme d’adsorption du glycérol à la surface du palladium suivi d’un
équilibre entre les formes glycéraldéhyde et dihydroxyacétone.
100
Figure 38 Spectres infrarouge sur la gamme de nombre d’onde de 1000 à 1750 cm-1 enregistrés pour les
différents échantillons de nanoparticules de Pd modifiées ou non par adsorption spontanée de bismuth
pendant différents temps au cours de l’oxydation du glycérol 0,1 Mol. L-1 en milieu NaOH 0,1 M à v = 1
mV.s-1.
0,1 V
1,0 V
Sphères
Cubes
Octaèdres
0,1 V
1,0 V
0,1 V
1,0 V
No re d’o de ( -1)
Bi : 0 s Bi : 1 min Bi : 5 min Bi : 10 min
101
Dans le premier cas, l’adsorption en présence de bismuth se produirait par une
réaction de déhydrogénation du carbone portant la fonction alcool secondaire, puis la
réaction d’oxydation avec transfert de deux électrons conduirait directement à la
dihydroxyacétone, tandis qu’en absence de bismuth l’adsorption d’un atome de carbone
présentant une fonction alcool primaire conduirait au glycéraldéhyde. Ce changement
de mécanisme pourrait être induit par la dilution des atomes de palladium par le
bismuth qui limite le nombre de sites pluriatomiques de palladium nécessaire à
l’adsorption avec rupture des liaisons C-H et O-H du glycérol.
Figure 39 Spectres infrarouge enregistrés pour les nanocubes de Pd modifiés par immersion de 5 minutes
dans une solution acide saturée en BiCl3 sur la gamme de nombre d’onde de 1000 à 1750 cm-1 au cours
de l’oxydation du glycérol 0,1 Mol. L-1 en milieu NaOH 0,1 Mol.L-1 à v = 1 mV.s-1.
0.35 V
A B D E
0.65 V
1,0 V
HG
FJ
1000 1250 1500 1750
No re d’o de ( -1)
102
La possibilité d’une réaction d’isomérisation dont l’équilibre peut être déplacé
soit vers le glyéraldéhyde soit vers le dihydroxyacétone a déjà été proposé pour
expliquer les différences de mécanisme d’oxydation du glycérol selon la composition de
catalyseurs à base de platine et de palladium supportés sur carbone modifiés par des
clusters d’oxydes/hydroxydes de bismuth préparés par la méthode de microémulsion
« water in oil »71. Le chemin réactionnel suivant avait alors été proposé:
Potentiel d’électrode en V / ERH
Cependant, contrairement à l’étude réalisée par Simoes et al. sur les catalyseurs
supportés71, où la formation de dihydroxyacétone était détectée par infrarouge et HPLC
avant celle de glycéraldéhyde (ce qui a été à l’origine de la proposition de
l’établissement d’un équilibre entre les isomères glycéraldéhyde et dihydroxyacétone),
la dihydroxyacétone et le glycéraldéhyde semblent dans le cas présent être tous les deux
formés dès le début de la réaction d’oxydation du glycérol, comme le suggère la
présence de la bande d’absorption à environ 1110 cm-1 et la forte dissymétrie du massif
de bandes d’absorption entre 1300 cm-1 et 1400 cm-1. Il se pourrait alors que les deux
chemins réactionnels, celui impliquant l’adsorption d’un carbone portant une fonction
alcool primaire (chemin réactionnel A) et celui impliquant l’adsorption du carbone
portant la fonction secondaire (chemin réactionnel B) puissent se produire sur ce type de
catalyseurs modifiés non supportés.
OH
OH
OH
OH
OH
O OH
OH
O
O-
OH
O
O
O-
O-
O
O-
O-
+oxalate
O
OH
OH
dihydroxyacétone
glycéraldéhyde glycérate tartronate Formiate
2 e-
2 e-
2 e-4 e- 2 à 4 e-
carbonate
103
Dans ce cas, la formation d’hydroxypyruvate, démontrée par la présence du pic
E à partir de 0,7 V (Figure 39), peut être expliquée soit par l’oxydation du carbone
secondaire après formation préalable du glycérate (mécanisme proposé dans le cas des
nanoparticules de palladium non modifiées), soit par l’oxydation du carbone primaire en
carboxylate après la formation préalable du dihydroxyacétone, ou encore par l’existence
simultanée de ces deux mécanismes.
Quel que soit le mécanisme impliqué dans le processus d’oxydation du glycérol
sur les surfaces des nanoparticules de palladium non supportées, la présence de bismuth
conduit à des changement dans les chemin réactionnels. Il est aussi important de noter
que l’amélioration de l’activité dès 0,35 V sur les nanocubes modifiés par immersion 5
minutes dans une solution acide saturée en BiCl3 et de la sélectivité vers la
dihydroxyacétone, indique clairement que la rôle du bismuth ne s’arrête pas à
l’amélioration du mécanisme bifonctionnel par apport d’espèces hydroxyles activées à
plus bas potentiel (mécanisme de type Langmuir-Hinselwood), mais qu’il implique
aussi des effets sur le mode d’adsorption des espèces provenant du glycérol.
VI. Conclusion
Des échantillons de nanoparticules de palladium constitués respectivement de
sphères de 4 nm de diamètres, de cubes de 11 nm de côté et d’octaèdres de 8 nm de
hauteur ont été synthétisés. Les caractérisations par microscopie électronique à
O H
O H
O H
O H
O H
O O H
O H
O
O -
O H
O
O
O - O -
O
O H
O
O -
O O -
O - + C
2 (?)
O
O H
O H O
O
O
O - O -
dihydroxyacétone hydroxypyruvate mesoxalate
glycéraldéhyde glycérate tartronate
Formiate
Voie réactionnelle A
Voie réactionnelle B
2 e -
2 e -
2 e - 4 e -
4 e - 4 e -
2 e - 2 e - 2 à 4 e -
carbonate
104
transmission ont confirmé que les distributions de tailles et de formes étaient étroites et
bien contrôlées. Les caractérisations électrochimiques ont confirmés la présence de
domaines de surface (100) sur les nanocubes, (111) sur les nanooctaèdres et l’absence
de domaines étendus sur les nanosphères.
Une première étude en milieu acide sulfurique à 0,5 mol.L-1 a permis d’obtenir
des voltammogrammes présentant une séparation nette des contributions de divers
processus dans la zone hydrogène : dépôt d’hydrogène en sous potentiel à la surface du
palladium, insertion d’hydrogène dans le palladium, désorption de l’hydrogène inséré et
désorption de l’hydrogène adsorbé, ainsi que la séparation du processus de dégagement
d’hydrogène moléculaire. Ce comportement particulier est expliqué en termes de taille
des nanoparticules de palladium. La séparation des contributions associées à ces trois
processus sur les volatmmogrammes permet la détermination de la surface active réelle
des nanoparticules de palladium en mesurant la charge impliquée dans les processus
d’adsorption de l’hydrogène déposé en sous potentiel et de sa désorption. La charge
totale associée à l’insertion d’hydrogène et à sa désorption est en accord avec la
formation d’une phase hydrure nanoscopique. De plus, la séparation des trois
processus impliquant l’hydrogène dans les volatmmogrammes crée les conditions
favorables pour permettre la détermination de l’état des foncions thermodynamiques
pour le dépôt d’hydrogène en soustenstion et en surtension124.
L’étude de l’électrooxydation du glycérol en milieu alcalin à permis de montrer
dans le cas des catalyseurs non modifiés par adsorption spontanée de bismuth que les
nanocubes sont plus actifs que, dans l’ordre, les nanooctaèdres et les nanosphères pour
la gamme de potentiels supérieurs à 0,55 V. Il semble que la présence de domaines
étendus soit un préalable à l’amélioration de l’activité catalytique à bas potentiels. Tous
les échantillons de nanoparticules de palladium non modifiées ont montré une
sélectivité équivalente, vers le glycéraldéhyde et le glycérate à bas potentiels, et vers
l’hydroxypyruvate, des dicarboxylates et des produits de dégradation (carbonate,
dioxyde de carbone et certainement C2). La modification par adsorption spontanée de
bismuth à été réalisée pour obtenir différents taux de recouvrement. L’ordre général
105
d’activité pour les catalyseurs modifiés par le bismuth est: nanocubes > nanosphères >
nanooctaèdres. Bien que le taux de recouvrement ait été augmenté jusqu’à près de 90 %,
les valeurs des courants d’oxydation du glycérol obtenues restaient dans la même
gamme, ce qui montre que l’activité surfacique du palladium est fortement accrue,
tandis que l’activité massique du catalyseur décroît pour les faibles taux de
recouvrement et augmente pour les plus élevés. Un optimum de temps de contact des
particules de palladium avec une solution acide saturée en BiCl3 de cinq minutes a été
observé pour lequel l’activité vis-à-vis de l’oxydation du glycérol, la production de CO2
et de carbonate et la formation d’hydroxypyruvate sont les plus élevées. Ce temps de
contact correspond à un taux de recouvrement en bismuth d’environ 75 %.
L’amélioration de l’activité par la modification par le bismuth est flagrante dans le cas
des nanocubes de palladium, tandis que dans le cas des nanooctaèdres, l’activité décroit.
Ceci est expliqué par le fait que le bismuth s’adsorbe préférentiellement sur les
domaines de surface (111).
Enfin, la modification des nanocubes et nanosphères de palladium par la
présence de bismuth à leur surface conduit à un changement de mécanisme avec la
formation d’hydroxyacétone dès les bas potentiels. Ensuite, à plus haut potentiels, les
mêmes espèces que dans le cas des particules non modifiées semblent être formées
(avec en plus toujours l’hydroxyacétone): hydroxypyruvate, carbonate, dioxyde de
carbone et carboxylate, etc. Il est à noter ici que les productions notables de CO2 (et de
carbonate) et d’hydroxypyruvate étaient tout à fait inattendues à la lumière des résultats
précédents obtenus sur des catalyseurs à base de palladium supportés sur carbone
(modifié par des clusters d’oxydes/hydroxydes de bismuth ou non). Il avait en effet été
montré que ces catalyseurs dispersés avaient une faible propension à casser la liaison C-
C, et encore moins en présence de bismuth, et qu’ils favorisaient plutôt la voie
réactionnelle A par l’intermédiaire de la formation de glycéraldéhyde. Ces apparents
désaccords seront traités et discutés ultérieurement dans ce manuscrit à la lumière de
résultats obtenus sur des catalyseurs à base de palladium autosupportés.
106
En effet, les objets étudiés dans cette partie C, bien qu’apparemment stables sur
la zone de potentiels d’intérêt et sur la durée des expériences pour la réaction
d’oxydation du glycérol avec formation de produits à valeur ajoutée sans rupture de la
liaison C-C (d’environ 0,35 V à environ 0,8 V) ne sont pas adaptés pour être
directement utilisés au sein de cellule d’électrolyse en raison de la difficulté à les
synthétiser et parce qu’ils sont non supportés. Or, comme il est déjà pressenti, et comme
il sera confirmé ultérieurement dans ce manuscrit, le comportement catalytique de
catalyseurs dépend de la structure de l’électrode, et notamment du fait qu’ils soient
supportés ou non sur un substrat carboné poreux. Ces catalyseurs doivent donc être
considérés comme des objets modèles permettant d’étudier et d’essayer de comprendre
les phénomènes électrocatalytiques se produisant à leur surface en diminuant la
complexité du système, non pas comme des catalyseurs pouvant avoir une réelle
application.
En revanche, il est aussi important de voir comment peuvent se comporter des
catalyseurs dits « plus réels », dont la fabrication peut subir un effet d’échelle pour une
utilisation industrielle. Pour cette raison, des catalyseurs à base de palladium et modifiés
par des éléments du groupe p (bismuth et étain) autosupportés (non supportés sur un
substrat carboné) ont été synthétisés par la méthode dite du support sacrificiel et leur
comportement électrocatalytique vis-à-vis de l’oxydation du glycérol a été évalué. Les
résultats sont présentés et discutés dans la partie D de ce manuscrit. Ces travaux ont été
réalisés lors d’une mission de neuf mois à l’Université du Nouveau- Mexique au sein du
Laboratoire du Professeur Plamen Atanassov (Department of Chemical and Nuclear
Engineering and Center for Emerging Energy Technologies, University of New Mexico,
Albuquerque, NM, USA).
107
D. Résultats : nanoparticules auto-supportées à base de palladium modifié par des éléments du groupe p
I. Catalyseurs auto-supportés PdxBi1-x
1. Caractérisation physicochimique
Une série de catalyseurs PdxBi1-x avec différents rapports atomiques a été
préparée par la méthode du support sacrificiel (SSM = sacrificial support method),
décrite dans la partie « Méthodes de synthèses ». Les rapports atomiques entre le
palladium et le bismuth ont été choisis comme étant 6:1, 4:1 et 2:1. Les catalyseurs ont
été désignés de la façon suivante: Pd6Bi, Pd4Bi et Pd2Bi.
Les catalyseurs ont été caractérisés par microscopie électronique à balayage
(MEB) et microscopie électronique à transmission (MET), EDS, spectroscopie de
photoélectrons X (XPS) et adsorption d’azote (méthode BET). Les caractérisations
MEB et MET ont fourni des informations sur la morphologie des échantillons et la taille
des nanoparticules, tandis que les caractérisations EDS et XPS ont été utilisés pour
déterminer la composition des échantillons et la comparer avec la composition prévue.
La spectroscopie de photoélectrons X a également été utilisée pour déterminer les états
d’oxydation et les interactions éventuelles entre les différents éléments du matériau.
La méthode du support sacrificiel conduit à des matériaux bimétalliques PdxBi1-x
auto-supportés ayant une structure spongieuse, comme le montre l’image MEB de la
Figure 40a dans le cas d’un catalyseur Pd4Bi. A un plus fort grossissement (Figure 40b),
le matériau montre une morphologie nanostructurée formée de murs délimitant des
espaces vides. Les catalyseurs présentent une structure 3D bien développée et de très
grandes surfaces développées, entre 75 et 100 m2.g-1, déterminée par la méthode BET-
N2. Les images MET sur les Figure 40c et d montrent la présence de chapelets de
108
nanoparticules agglomérées, ayant une taille de l’ordre de 5 nm, délimitant des pores de
30 à 100 nm.
Figure 40 Images de MEB (a, b) et de MET (c, d) obtenues sur un échantillon de Pd4Bi.
Les spectres XPS de niveaux de cœur du Pd 3d et du Bi 4f sont présentés sur la
Figure 41 pour les trois matériaux PdxBi1-x. Les différents catalyseurs conduisent à des
spectres présentant des enveloppes de formes différentes. Les spectres des niveaux de
cœur 3d 5/2 du palladium ont été mieux modélisés avec quatre pics symétriques centrés
à environ 335, 336, 337 et 338 eV, attribués respectivement aux espèces Pd, Pd(OH)x,
PdO et PdO2. Il en a été de même pour les spectres de niveau de cœur 4f 7/2 du bismuth
qui ont été modélisés par quatre pics centrés à environ 157, 158, 159 et 160 eV,
attribués respectivement aux espèces Bi, Bi(OH)3, BiOOH, and Bi2O3. Cette analyse des
spectres XPS est basée sur les données disponibles dans le «Handbook of X-ray
Photoelectron Spectroscopy»158, sur les études précédentes de Casella et Contursi93 et
sur l’hypothèse que des états d’oxydation plus élevés conduisent à des pics
correspondants à des énergies de liaison plus élevées. Le Tableau 9 résume les
principaux résultats de la caractérisation par XPS.
109
Figure 41 Spectres XPS de l’orbitale 3d du palladium et de l’orbitale 4f du bismuth sur les catalyseurs
(a, b) Pd6Bi; (c, d) Pd4Bi; (e, f) Pd2Bi.
Les données de microanalyses EDS sur différentes zones des catalyseurs sont
quant à elles présentées dans le Tableau 10 et les compositions déterminées par ces
analyses sont comparées à celles déterminées par l’analyse XPS. Les analyses EDS
indiquent une composition homogène pour chaque catalyseur et un enrichissement en
palladium des catalyseurs par rapport aux valeurs nominales des rapports Pd/Bi,
d’autant plus important que le rapport atomique de bismuth désiré est élevé.
Considérant que cette analyse est représentative de la composition en volume des
110
catalyseurs et au regard du procédé de synthèse des catalyseurs, il peut être déduit que
soit la totalité du sel de bismuth n’est pas incorporée dans le catalyseur lors de l’étape
de réduction, soit l’étape d’hydrolyse du support sacrificiel ou encore l’étape de lavage
conduisent à la dissolution du bismuth. En revanche, les analyses XPS indiquent un
enrichissement de la surface en Bi, bien que les résultats soient relativement proches des
rapports atomiques nominaux. Ceci semble indiquer que le bismuth est
préférentiellement déposé à la surface des nanoparticules de palladium, comme il avait
été observé par Simoes et al.71 dans le cas de catalyseurs PdxBi1-x/C préparés par la
méthode de microémulsion «water in oil».
Pd6Bi Pd4Bi Pd2Bi
(eV) (% at.) (eV) (% at.) (eV) (% at.)
Pd0 335,2 30,7 335,2 35 335,3 25
Pd(OH)x 336,0 25,4 335,9 24 336,0 23,5
PdO 336,9 26,9 336,9 29,5 337,1 36,5
PdO2 337,8 17 338,1 11,5 338,0 15
(eV) (% at.) (eV) (% at.) (eV) (% at.)
Bi0 157,4 18,6 157,4 23 157,4 10
Bi(OH)3 158,4 43,9 158,3 40 158,5 53,5
BiOOH 158,8 23,3 158,8 24,5 159,0 26
Bi2O3 159,8 14,2 160,0 12,5 159,8 10,5
Tableau 9 Données de la caractérisation par XPS des catalyseurs PdxBi.
(% at.) 86/14 (6:1) 80/20 (4:1) 66/33 (2:1)
EDS microanalyse, % at. 87,1/12,9 84,5/15,5 72,4/27,6
87,2/12,8 85/15 70,9/29,1
86,8/13,2 71,5/28,5
EDS, % at. 87/13 84,5/15,5 71,5/28,5
XPS, % at. 75/25 73,5/26,5 61/39
Tableau 10 Rapports atomiques pour les catalyseurs PdxBi1-x déterminés par les mesures EDS et XPS.
111
2. Caractérisation électrochimique
Les voltammogrammes cycliques des échantillons de PdxBi1-x enregistrés en
milieu électrolyte support NaOH 0,1 mol.L-1 sont présentés sur la Figure 42. En ce qui
concerne l’échantillon de palladium pur, le voltammogramme est typique d’un
palladium polycristallin, présentant entre 0,3 V et - 0,1 V lors de la variation négative
de potentiel les régions d’adsorption/désorption d’hydrogène en sous potentiel et la
région d’insertion/désorption de l’hydrogène, puis lors de la variation positive du
potentiel un pic de désorption de l’hydrogène à 0,7 V, suivie par la région de formation
des oxydes de surface de Pd entre 0,7 V et 1,4 V et, après le changement de direction de
la variation linéaire du potentiel, par le pic de réduction des oxydes de surface du
palladium centré à environ 0,6 V. Dans les conditions expérimentales présentes, la
surface électrochimiquement active (ECSA) du catalyseur auto-supporté de palladium a
été calculée en utilisant la méthode décrite par Grdèn et al.118, et a été estimée à environ
20 m2g Pd-1. Cette valeur est quatre à cinq fois plus faible que celle déterminée par BET,
ce qui indique la présence d’une microporosité non accessible aux espèces hydratées.
Cependant la valeur de cette surface active est du même ordre que celle déterminées par
Simoes et al.82 sur des nanoparticules de Pd de 4 nm supportées sur un substrat de
carbone Vulcan XC72 présentant une surface spécifique d’environ 250 m2.g-1. Ce
résultat est d’ailleurs remarquable si on considère que dans le cas présent les
nanoparticules de palladium ne sont pas dispersées sur un support de grande surface
spécifique mais sont agglomérées et autosupportées.
La présence de bismuth affecte clairement la forme des voltamogrammes. A bas
potentiels, les processus d’adsorption et d’insertion de l’hydrogène sur le palladium
apparaissent déjà très limités sur le catalyseur Pd6Bi. La disparition des caractéristiques
correspondant aux processus d’adsorption et d’insertion d’hydrogène sur les catalyseurs
PdxBi1-x, précédemment observé par d’autres auteurs86, indique que la surface du
palladium est recouverte par des atomes de bismuth.
Le processus d’oxydation est aussi modifié à potentiels plus élevés. Un pic de
courants positifs élevés, attribué à un processus d’oxydation de surface, apparaît et
112
atteint son maximum vers 0,9 – 0,95 V. D’après le diagramme potentiel-pH du
bismuth159, la phase d’oxyde de bismuth Bi2O3 existe en milieu aqueux sous sa forme
hydratée Bi(OH)3, laquelle n’est pas soluble dans les solutions alcalines; cette espèce
hydratée peut être formée à partir de 0,48 V selon la réaction suivante:
Bi + 3 OH- = Bi(OH)3 + 3 e- (32)
Figure 42 Voltammogrammes de catalyseurs auto-supportés (a) Pd et Pd6Bi, et (b) Pd6Bi, Pd4Bi et Pd6Bi,
enregistrés en milieu électrolyte 0,1 M de KOH saturé en N2 (v = 0.020 V.s-1; T = 25 °C).
Lors de la variation négative de potentiel, un pic intense de réduction apparaît
entre 0,55 V et 0,6 V pour les catalyseurs Pd6Bi et Pd4Bi, avec une intensité supérieure
à celle observée sur le catalyseur de palladium pure. Ce pic de réduction est attribué à la
a
b
113
réduction des oxydes de surface, incluant les oxydes de bismuth93 formés au cours de la
variation positive de potentiel. Ceci suggère que le processus redox du bismuth dans les
matériaux catalytiques Pd6Bi et Pd4Bi est lié au processus rédox du palladium,
démontrant une interaction électronique entre les deux métaux. Cette interaction forte
peut être intéressante d’un point de vue catalytique, mais elle empêche la possibilité de
déterminer la surface active du catalyseur. Il peut tout de même être raisonnablement
proposé que la valeur de la surface active soit inférieure à celle du catalyseur auto-
supporté à base de palladium pur. Pour des rapports atomiques de bismuth plus élevés,
plusieurs pics d’oxydation/réduction sont apparus; ces pics correspondent à différents
processus rédox impliquant des espèces du bismuth. La réduction d’oxydes de surface
du bismuth en forte interaction avec le palladium intervient aux plus hauts potentiels,
tandis que le bismuth oxydé en moindre interaction ou n’interagissant pas avec le
palladium se réduit à plus bas potentiels. Un tel comportement peut être expliqué en
considérant que les catalyseurs sont en fait composés de nanoparticules de palladium
d’environ 5 nm en taille décorées par de petits clusters de bismuth dont la taille
augmente avec le rapport atomique en bismuth. Ainsi, l’interface Pd/Bi diminue, ce qui
explique la diminution de l’intensité du pic principal de réduction à hauts potentiels, et
la quantité de bismuth interagissant peu ou pas avec le palladium augmente, ce qui
explique l’apparition d’un pic de réduction centré vers 0,25 V dans le cas du matériau
Pd2Bi.
3. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs PdxBi1-x auto-supportés
Les mesures de l’activité électrocatalytique des catalyseurs PdxBi autosupportés
vis-à-vis de la réaction d’oxydation du glycérol ont été réalisées dans une solution de
KOH 1 mol.L-1 et de glycérol 0,1 mol.L-1 à plusieurs vitesses de variation de potentiel
(0,005 V.s-1, 0,02 V.s-1 et 0,1 V.s-1). Les voltamogrammes sont présentés dans la
gamme de potentiels de 0,0V à 1,4V vs ERH sur la Figure 43.
Un pic d’oxydation apparaît au cours de la variation positive de potentiel, à
partir de 0,6 V pour le palladium pur et pour le catalyseur le plus riche en bismuth, et à
partir de 0,5 V pour les matériaux Pd6Bi et Pd4Bi. Dans ces deux derniers cas, l’effet
114
bénéfique du bismuth pour l’électrooxydation du glycérol est mis en évidence par le
déplacement de début d’oxydation de 100 mV vers les potentiels plus faibles et par
l’augmentation des densités de courant de pic d’oxydation dans la gamme de potentiels
allant de 0,5 à 1,2 V vs ERH. De plus, la présence de bismuth conduit à un déplacement
de la chute de courant d’oxydation vers les hauts potentiels, en raison de la cinétique de
formation des oxydes de surface plus lente sur PdxBi1-x que sur Pd pur; la désactivation
de la surface due à la présence d’oxydes, bloquant l’adsorption du glycérol à la surface
du matériau catalytique (le palladium) et ainsi le rendant non actif pour la réaction
d’oxydation du glycérol, est retardée par la présence du bismuth. Tout ceci démontre
clairement une augmentation de la vitesse de réaction d’oxydation du glycérol en
présence de bismuth.
Les formes des voltammogrammes enregistrés à différentes valeurs de variation
linéaire de potentiel sont très similaires, à l’exception du moment où se produit la chute
de courant à hauts potentiels. Cette dernière est déplacée vers des potentiels plus élevés
lorsque la vitesse de variation de potentiel augmente, ce qui confirme que le processus
d’oxydation de la surface de palladium est retardé en présence de bismuth. Aucune
dépendance claire de la forme ou de la densité de courant de pic avec la vitesse de
variation de potentiel n’a été mise en évidence. Ceci indique que la limitation de la
cinétique d’oxydation du glycérol par la diffusion des espèces de la solution vers les
sites catalytiques est faible, et que le confinement des réactifs dans les pores du
catalyseur pourrait avoir une influence importante sur la cinétique de réaction.
Le comportement du catalyseur riche en bismuth, Pd2Bi, avec l’augmentation de
la vitesse de variation de potentiel est différent de celui des autres catalyseurs. Il est
probable que dans ce cas, en raison du très fort taux de recouvrement du palladium par
le bismuth, la cinétique de réaction soit limitée par l’adsorption des réactifs. Au final,
l’activité des catalyseurs vis-à-vis de l’oxydation du glycérol déterminée par
voltammétrie cyclique suit l’ordre: Pd4Bi ≥ Pd6Bi > Pd2Bi > Pd. Un rapport atomique
optimum correspondant au Pd4Bi se profile pour l’oxydation du glycérol.
115
Figure 43 Courbes de polarisation d’electro-oxydation de glycérol enregistrées en milieu KOH 1 mol.L-1
et glycérol 0,1 mol.L-1 sur des catalyseurs PdxBi à différentes vitesses de variation de potentiel. (a, b)
0,005 V.s-1, (c, d) 0,02 V.s-1 et (e, f) 0,1 V.s-1, T = 25 °C.
Pour compléter l’étude électrochimique sur l’activité des catalyseurs PdxBi1-x
autosupportés, des expériences de chronoampérométrie en présence de glycérol 0,1
mol.L-1 ont été effectuées pendant 5000 secondes à deux potentiels (0,6 et 0,7 V vs
ERH). La Figure 44 montre les courbes de densités de courant en fonction du temps. À
0,6 V vs ERH, le courant enregistré pour les catalyseurs Pd et Pd2Bi chute rapidement
a b
c d
e f
116
vers zéro, alors que sur les catalyseurs Pd6Bi et Pd4Bi le courant diminue d’abord
rapidement puis se stabilise respectivement à 10 et 20 A g-1Pd. À 0,7 V vs ERH, Pd4Bi
reste encore le catalyseur le plus actif. Pour ce matériau, après avoir atteint une densité
massique de courant initiale de plusieurs centaines d’ampères par gramme de palladium,
une chute très rapide se produit vers une valeur d’environ 70 A.gPd-1 en quelques
secondes. Cette décroissance rapide du courant est certainement due à une décharge
capacitive. Ensuite, une lente décroissance de la valeur du courant se produit jusqu’à
une stabilisation à environ 60 A.gPd-1, valeur tout à fait cohérente avec celle que l’on
peut interpoler des voltamogrammes à variation linéaire de potentiel. Un tel
comportement peut être attribué à la formation d’espèces adsorbées provenant du
glycérol à la surface de catalyseur conduisant à une diminution de surface active par
empoisonnement et une diminution de l’activité de catalyseur jusqu’à ce que l’équilibre
entre l’adsorption des espèces de glycérol et la désorption des produits de réaction soit
réalisé. Ces résultats mettent en évidence non seulement l’activité plus élevée, mais
aussi la stabilité ou tolérance accrue du matériau Pd4Bi.
Figure 44 Chronoampérométrie enregistrée au cours de l’électrooxydation du glycérol sur les catalyseurs
PdxBi1-x à 0,6 V vs ERH (a) et à 0,7 V vs ERH (b) 1 M KOH + 0,1 M glycérol, T = 25 °C.
L’effet bénéfique de la modification du palladium par le bismuth pour
l’oxydation d’alcools, et particulièrement du glycérol, est certes connu. Mais dans
l’exemple présent, l’optimum de rapport atomique entre le palladium et le bismuth est
de 4 pour 1. Or, dans le cas de catalyseurs supportés sur un substrat de carbone poreux
PdxBi1-x/C, l’augmentation du taux de bismuth au-delà de 10 % atomique ne conduisait
a b
0 10000
20
40
60
80
100
120
140
0 1000
0
20
40
60
80
100
117
pas à améliorer l’activité catalytique pour l’électro-oxydation du glycérol. Sur la base de
caractérisations par MET, EDX, DRX, et par électrochimie, il avait été montré que les
clusters de bismuth déposés sur le support carboné étaient inactifs vis à vis la réaction
d’oxydation du glycérol. La caractérisation électrochimique des catalyseurs
autosupportés PdxBi1-x en milieu support (Figure 42) a montré que les intensités du pic
de réduction des oxydes de surface à environ 0,55 V et les charges associées devenaient
plus faibles à au fur et à mesure de l’augmentation de la quantité de bismuth : la surface
de palladium libre et celle en forte interaction avec le bismuth, impliquées dans le
processus conduisant à la formation de ce pic de réduction, sont donc moins étendues.
En parallèle, la surface correspondant au bismuth interagissant faiblement ou pas du
tout avec le palladium augmente, comme le montre l’apparition du pic de réduction à
environ 0,2 V versus ERH. Cette observation peut être confrontée aux données d’XPS
et d’EDS présentées dans le Tableau 10, qui montrent un enrichissement de la surface
lorsque la quantité de bismuth augmente Lorsque la quantité de bismuth est augmentée,
des ilots ou clusters de bismuth se forment à la surface du palladium, ce qui conduit à
diminuer l’aire de surface de palladium accessible pour l’adsorption du glycérol ainsi
que le périmètre d’interface entre le bismuth et le palladium où les interactions fortes
entre ces deux métaux se produisent. L’ordre d’activité (Pd4Bi > Pd6Bi > Pd2Bi > Pd)
est donc due à la concentration de surface en Bi. Comme il a été expliqué dans la
section précédente, l’activité dépend d’un équilibre entre divers processus: (i) entre un
effet inhibiteur dû au blocage des sites actifs et un effet catalytique dû à l’amélioration
de l’adsorption d’espèces de types OHads sur des sites de palladium adjacents au
bismuth, (ii) entre la quantité et la composition des espèces fortement adsorbées et le
chemin de réaction, (iii) entre les différences dans la nature des espèces adsorbées
impliquées par la dilutions des sites de palladium par les atomes de bismuth en surface
et les énergies d’adsorption, etc. Il peut être noté que toutes ces raisons peuvent aussi
être invoquées pour expliquer la meilleure tolérance du catalyseur autosupporté Pd4Bi à
l’empoisonnement.
118
4. Etude infrarouge in situ de l’oxydation du glycérol sur les catalyseurs PdxBi1-x
autosupportés
Les spectres infrarouge enregistrés in situ au cours de la réaction d’oxydation du
glycérol en milieu alcalin sur le catalyseur Pd4Bi, qui s’est montré le plus actif, sont
présentés sur la Figure 45. En raison de la technique utilisée ici, l’ATR-IRRAS, la partie
des spectres entre 1400 cm-1 et 2000 cm-1 a été retirée parce que la présence d’eau
conduit à des bandes d’absorption infrarouge sur cette gamme de nombre d’ondes qui se
superposent aux bandes d’absorption d’autres espèces provenant de
l’adsorption/oxydation du glycérol (tels que des fonctions carbonyles)49,155 ce qui rend
l’interprétation impossible. De plus, dans le cas présent, une bande d’absorption
positive correspond à la formation et une bande d’absorption négative représente la
disparition d’un produit/intermédiaire ou d’une fonction. Dans la région dite des
empreintes infrarouge des fonctions, de 1000 cm-1 à 1400 cm−1, plusieurs bandes
d’absorption peuvent être observées. Dans des travaux postérieurs, l’attribution des
bandes infrarouge a été confirmée par des analyses HPLC après des expériences de
chronoampérométrie. La méthode utilisée ici pour l’interprétation des spectres est la
même que celle utilisée pour les catalyseurs non supportés dans la section C.
119
Figure 45 Spectres infrarouge enregistrés lors de l’oxydation du glycérol 0,1 mol.L-1 en milieu KOH 1
mol.L-1 sur un catalyseur autosupporté Pd4B (v = 1 mV.s-1, T = 25 °C).
La première bande d’absorption positive à environ 1070 cm−1 correspond à la
vibration d’élongation de la liaison carbonyle C=O d’une fonction aldéhyde123,124 et est
observable sur la totalité de la gamme de potentiel étudiée, lors de la variation positive
et négative de potentiel. Au cours de la variation positive de potentiel, la bande
d’absorption à 1070 cm-1 est accompagnée entre 0,6 et 0,9 V par deux autres bandes
d’absorption localisées à 1100 cm−1 et 1335 cm−1, attribuées respectivement à la
vibration d’élongation de la liaison C-O de fonctions alcool et au dihydroxyacétone
(DHA)150. Pour des potentiels plus élevés, entre 0,9 V et 1,2 V, une bande d’absorption
bien définie à environ 1350 cm-1, attribuée à la formation d’hydroxypyruvate71,150,
apparait et perdure au cours des variations positive et négative de potentiel. Dans le sens
120
positif de variation de potentiel, cette bande apparait d’ailleurs à plus bas potentiels sous
la forme d’un épaulement de la bande attribuée à la dihydroxyacétone. La formation de
dihydroxypyruvate se produit simultanément à celle de CO2 comme le montre la
présence de la bande d’absorption localisée à 2341 cm−1 42,155,160. Enfin, dans la gamme
de potentiels entre 0,9 V et 0,6 V au cours de la variation négative de potentiel,
l’intensité de la bande d’absorption à 1335 cm−1 attribuée à la formation de
dihydroxyacétone devient plus faible, tandis qu’une nouvelle bande d’absorption à
environ 1305 cm−1 correspondant à la fonction de fonctions carboxylates accompagne
celle liée à la production d’hydroxypyruvate. En revanche, aucune bande d’absorption
n’a été détectée dans la gamme de nombres d’onde entre 1800 cm−1 et 2100 cm−1 qui
aurait pu correspondre à la formation du CO ponté ou linéairement lié à la surface d’un
métal noble56,161.
A titre de comparaison, les spectres infrarouge d’oxydation du glycérol
enregistrés dans les mêmes conditions que précédemment sur des catalyseurs
autosupportés de palladium pur et riche en bismuth (Pd2Bi) sont présentés sur la Figure
46.
Il est intéressant de noter que dans le cas du catalyseur de palladium pur, seules
les bandes d’absorption à 1306 cm-1 et 1380 cm−1 sont présentes, lesquelles sont
attribuées aux fonctions carboxylates, tandis que dans le cas du catalyseur Pd2Bi ces
mêmes bandes d’absorption sont accompagnés par celle attribuée à l’hydroxypyruvate
à 1350 cm−1, mais avec des intensités relatives différentes de celles observées sur le
matériau Pd4Bi. La bande d’absorption à 1335 cm−1 correspondant à la formation de
dihydroxyacétone est aussi visible sur les spectres, bien que de plus faible intensité que
dans le cas du catalyseur Pd4Bi. En revanche, aucune bande d’absorption n’a été
détectée vers 2343 cm−1 avec ces deux catalyseurs, ce qui semble indiquer qu’il n’y a
pas de production de CO2.
121
Figure 46 Spectres infrarouge enregistrés lors de l’oxydation du glycérol 0,1 mol.L-1 en milieu KOH 1
mol.L-1 sur les catalyseurs autosupportés (a) Pd pure et (b) Pd2Bi (v = 1 mV.s-1, T = 25 °C).
122
5. Conclusion sur l’activité/sélectivité de PdxBi1-x
Il a été montré auparavant que la modification du palladium par le bismuth
améliorait l’activité du catalyseur; mais des implications sur la sélectivité de la réaction
d’oxydation du glycérol, c’est-à-dire sur le mécanisme de réaction, sont aussi induites
par de telles modifications. Par exemple, en se focalisant sur le catalyseur le plus actif
(Pd4Bi), un comportement unique de ce type de matériaux autosupportés peut être mis
en évidence.
La première observation importante concerne la forte sélectivité vers les produits
faiblement oxydés (dihydroxyacétone et glycéraldéhyde) à bas potentiels entre 0,6 V vs
et 0,8 V, comme le montrent l’existence des bandes d’absorption à 1070 cm-1 et 1335
cm−1 sur cette gamme de potentiels. Ce fait démontre clairement que l’amélioration de
l’activité vis-à-vis de la réaction d’oxydation du glycérol par le bismuth n’implique pas
le mécanisme bifonctionnel sur cette gamme de potentiel. En effet, la formation d’une
fonction aldéhyde ou d’une fonction cétone ne nécessite pas l’addition d’un atome
d’oxygène supplémentaire procuré par l’activation d’un ion hydroxyle. L’augmentation
de l’activité sur cette gamme de potentiel est donc due à l’augmentation de la vitesse de
turn-over des espèces adsorbées sur la surface catalytique. Cette augmentation de
vitesse de turn-over peut être induite par le mode d’adsorption particulier du glycérol
sur une surface dont les sites actifs sont dilués par la présence du bismuth. Dès que le
potentiel d’électrode est amené vers des valeurs supérieures, la formation
d’hydroxypyruvate se produit, comme le montre l’épaulement à environ 1350 cm−1 qui
apparait dès 0,8 V. La formation de ce produit implique l’addition d’un atome
d’oxygène et donc par conséquent le mécanisme bifonctionnel. Il est ici important de
rappeler que la formation d’hydroxypyruvate n’a jamais été observée lors de travaux
précédents sur des catalyseurs de type PdxBi1-x/C, contrairement à ce qui a été obtenu
sur des catalyseurs Au/C, tandis que le dihydroxyacétone et le glycéraldéhyde avaient
eux été détectés.
Tous ces matériaux catalytiques sont composés des mêmes éléments et ont des
compositions très similaires. Le désaccord apparent entre les résultats doit donc être
123
cherché dans leurs différences de structure et de morphologie. Notamment, les
morphologies et structures particulières des catalyseurs autosupportés PdxBi1-x et non
supportés Pd/Bi pourraient être à l’origine de ce comportement électrocatalytique: dans
chaque cas, les pores délimités par des particules métalliques (entre les particules
agglomérées dans le cas des nanoparticules non-supportées et entre les chapelets de
particules dans le cas des catalyseurs autosupportés) peuvent fonctionner comme des
nanoréacteurs permettant ce type de sélectivité.
A potentiels plus élevés, la production de CO2, démontrée par l’apparition du pic
intense à 2343 cm−1, débute juste après celle d’hydroxypyruvate alors que la bande
d’absorption attribuée au DHA tend à disparaître. La rupture de la liaison C−C s’est
donc nécessairement produite et il est donc fortement probable qu’en plus de la
formation de CO2, des composés en C1 et C2 soient aussi formés bien qu’ils n’aient pas
pu être détectés. En effet, la bande d’absorption à 1240 cm−1 attribuée au glycolate et à
1330 cm−1 attribuée à l’oxalate ne sont pas présentes sur les spectres de la Figure 45; la
bande d’absorption à environ 1400 cm−1 attribuée au carbonate et celle à environ 1577
cm−1 attribuée au glycolate ne peuvent pas être observée dans les conditions
expérimentales de l’étude par la méthode ATR-IRRAS en raison de la présence de la
bande d’absorption relative à l’eau interfaciale qui empêche la détermination précise de
la position voire de l’existence d’autres bandes d’absorption sur cette gamme de
nombres d’onde. A nouveau, des travaux antérieurs concernant les catalyseurs supportés
PdxBiy/C n’avaient montré aucune production de CO2, ce qui avait été expliqué en
termes de dilution des atomes de palladium de surface par le bismuth conduisant à
modifier le mode d’adsorption du glycérol et à éviter la rupture de la liaison C-C. Dans
le cas présent, l’aptitude du catalyseur à rompre la liaison C-C peut être expliquée en
invoquant la structure de nanoréacteur confiné dans lequel l’hydroxypyuvate joue le
rôle de l’espèce intermédiaire suivant la réaction:
CH2OH-CO-COO- + 2 OH- CH2OH-COO- + CO2 + H2O + 2 e- (33)
et/ou,
CH2OH-CO-COO- + 7 OH- COO--COO- + CO2 + 5 H2O + 6 e- (34)
124
et/ou,
CH2OH-CO-COO- + 7 OH- 3 CO2 + 5 H2O + 8 e- (35)
La lente diffusion des produits primaires de réaction des pores du catalyseur vers
la solution conduit à augmenter leur temps de résidence au sein de la couche
catalytique, de telle sorte que l’électrooxydation de l’hydroxypyruvate en CO2 puisse se
produire. Ce mécanisme permet aussi d’expliquer l’absence d’une bande d’absorption
due au CO bien que du CO2 soit formé, en considérant que cette étape n’implique pas la
formation de CO fortement adsorbé ce qui rend son oxydation et désorption plus facile
et rapide, et de fait sa détection plus difficile, comme il a déjà été proposé dans le cas de
l’électro-oxydation de l’éthanol impliquant l’acétaldéhyde comme intermédiaire de
réaction sur des catalyseurs PtSn42,162. La formation de CO2 peut être expliquée par la
diminution du pH local; la déplétion des ions hydroxyles dans les nanopores du
catalyseur est une conséquence de leur consommation dans les différentes étapes
électrochimiques.
Dans le cas du catalyseur de palladium pur, seule la formation de fonctions
carboxylate a été détectée sur les spectres infrarouge in situ; les bandes d’absorption à
environ 1335 cm-1 et 1350 cm−1 attribuées respectivement au DHA et à
l’hydroxypyruvate n’ont pas été détectées. Sur ce catalyseur, l’oxydation du glycérol se
produit selon le mécanisme bifonctionnel impliquant la formation d’espèces hydroxyles
à la surface du palladium et leur réaction avec les espèces provenant de l’adsorption du
glycérol pour conduire directement à la production de carboxylate. L’absence de CO2
aux potentiels les plus élevés vient du fait que dès que la surface de palladium est plus
fortement oxydée, elle devient inactive comme le montre la chute de courant dès 0,85 V
dans les voltammogammes de la Figure 43. Le délai dans la formation des oxydes de
surface, c’est-à-dire dans la formaion d’espèces oxygénées activées permettant la
réalisation d’un mécanisme de type Langmuir-Hinshelwood, peut expliquer la
différence de comportement des catalyseurs de Pd pure et Pd4Bi à bas potentiels. Le
bismuth peut jouer le rôle de pompe à oxygène protégeant la surface du palladium de
l’oxydation, de la même façon que ce qui a été proposé pour expliquer l’augmentation
125
d’activité de catalyseurs bimétalliques à base de platine et d’un métal moins noble vis-à-
vis de la réaction de réduction de l’oxygène163.
Maintenant, le même mécanisme se produit pour Pd2Bi et Pd4Bi pour les bas
potentiels et les potentiels intermédiaires: la bande d’absorption à 1350 cm−1 attribuée à
la formation d’hydroxypyruvate est observée. Ce fait confirme le rôle important du
bismuth non seulement pour l’amélioration de l’activité, mais aussi pour la sélectivité
de la réaction. Cependant, la formation de carboxylates est aussi mise en évidence par
les bandes d’absorption à environ 1306 cm-1 et 1380 cm−1 tandis que la production de
CO2 n’est pas détectée à plus hauts potentiels. Ce dernier fait est de nouveau à relier à la
chute d’activité catalytique à haut potentiels; mais ici, la raison de cette chute d’activité
peut être différente de celle invoquée pour le palladium pur, et peut être due au taux de
recouvrement élevé du palladium par le bismuth, diluant les atomes de surface du
palladium et limitant le mode d’adsorption permettant la rupture de la liaison C-C et la
formation de CO2.
II. Catalyseurs auto-supportés PdxSn1-x
Parmi les éléments du groupe p, l’étain est connu pour être un co-catalyseur très
performant pour la réaction d’oxydation des alcools. Notamment, en ce qui concerne la
réaction d’oxydation de l’éthanol en milieu acide, plusieurs métaux ont été étudiés
comme co-catalyseurs associés au platine pour améliorer la cinétique de réaction, parmi
lesquels le ruthénium164,165, le rhénium49, le plomb166 et l’étain49,167,168. Ce dernier est
apparu le plus prometteur51. Récemment cette propriété intéressante de l’étain a été
confirmée pour l’oxydation du méthanol169, de l’éthanol170 et de l’éthylène glycol171 en
milieu alcalin en l’associant au palladium. L’effet de la modification du palladium par
l’étain sur l’électrooxydation du glycérol se devait donc d’être étudié.
Pour cela, une autre série de catalyseurs «réels» a été préparée en utilisant la
méthode de synthèse dite du support sacrificiel. Les catalyseurs PdxSn1-x de différents
rapports atomiques ont été préparés. Les rapports atomiques suivants entre le palladium
126
et l’étain ont été choisis: 1/1, 1/2 et 1/3. L’étape d’hydrolyse du support par la solution
de KOH 7 M conduit aussi à dissoudre de l’étain; pour cette raison, les synthèses de
catalyseurs à faibles rapports atomiques d’étain se sont montrées difficiles à réaliser et
peu reproductibles. Il a donc fallut augmenter le taux atomique initial d’étain à 1 pour 1
par rapport au palladium pour obtenir des composés PdSn de manière reproductible. Les
rapports Pd/Sn 1 pour 1, 1 pour 2 et 1 pour 3 correspondent de plus à des composés
définis. Enfin, cet état de fait permettait de vérifier s’il était possible, afin de rendre le
mode de synthèse encore moins couteux et donc plus intéressant pour l’industrie, de
diminuer très fortement le taux de métal noble au sein du catalyseur tout en augmentant
ou au moins en conservant son activité. Les catalyseurs seront nommés PdSn, PdSn2,
PdSn3. Les catalyseurs ont été caractérisés par la microscopie électronique à balayage
(MEB), par XPS et par adsorption d’azote (méthode BET) avant d’être évalués
électrochimiquement.
1. Caractérisation physicochimique
Les catalyseurs auto-supportés PdxSn1-x présentent une morphologie spongieuse
semblable à celle obtenue pour les catalyseurs PdxBi, qui est imposée par la méthode de
synthèse. Les images MEB de la Figure 47 montrent la présence de nanoparticules
agglomérées avec une taille d’environ 20 nm délimitant des pores de plusieurs dizaines
de nm. La structure formée dite « hiérarchiquement contrôlée » conduit à la formation
de pores qui pourront agir comme des nanoréacteurs pour l’oxydation du glycérol.
Figure 47 Images MEB à différents grossissements pour un échantillon PdxSn1-x.
a b
127
Les spectres XPS de cœur du Pd 3d et du Sn 3d sont présentés sur la Figure 48
pour les trois matériaux PdxSn1-x. Le Tableau 11 résume les principaux résultats de
l’analyse XPS. L’analyse des résultats s’appuie sur les données disponibles dans le
Handbook of X-ray Photoelectron Spectroscopy158, ainsi que sur les études
précédentes172. Le spectre des niveaux d’énergie de l’orbitale 3d 5/2 du palladium
montre trois pics symétriques centrés à des valeurs d’énergie de liaison d’environ 335,
336, et 337 eV, attribués respectivement aux espèces Pd, Pd(OH)2, et PdO. Le signal
enregistré pour l’orbitale 3d 5/2 de l’étain peut aussi être déconvenue en trois pics
centrés à des valeurs d’énergie de liaison d’environ 485, 486 et 487 eV, qui ont été
attribués respectivement aux espèces Sn, Sn(OH)x et SnOx.
PdSn PdSn2 PdSn3
(eV) (% at.) (eV) (% at.) (eV) (% at.)
Pd0 335,3 41,0 335,2 54,4 335,5 48,1
Pd(OH)x 336,0 50,6 336,0 38,2 336,0 45,8
PdO 337,4 8,5 337,3 7,4 337,3 6,1
(eV) (% at.) (eV) (% at.) (eV) (% at.)
Sn0 485,1 23,1 485,1 23,3 485,0 23,0
Sn(OH)x 486,6 56,8 486,6 36,7 486,5 51,2
SnOx 487,3 20,1 488,3 40,0 487,4 25,8
Tableau 11 Donnes de la caractérisation par XPS des catalyseurs PdxSn1-x.
128
Figure 48 Spectres XPS de l’orbitale 3d du palladium et de l’orbitale 3d de l’étain sur les catalyseurs (a,
b) PdSn; (c, d) PdSn2; (e, f) PdSn3.
Le Tableau 12 compare les résultats d’analyse en termes de rapports atomiques
obtenus par XPS et absorption atomique. La première méthode est plutôt une analyse de
surface tandis que la seconde est une analyse de volume. Au regard des résultats par
absorption atomique, les rapports atomiques entre le palladium et l’étain indiquent très
clairement un enrichissement des matériaux en palladium en comparaison avec les
rapports nominaux (attendus). Soit l’étain n’est pas intégré au sein du matériau lors de
l’étape de réduction thermique après imprégnation de la silice, soit l’étain est lavé du
matériau lors de l’étape de traitement par KOH pour dissoudre le support de silice. Quoi
129
qu’il en soit, cette forte perte de charge d’étain au cours de la synthèse peut expliquer la
difficulté à synthétiser des matériaux de manière reproductible lorsque le taux nominal
d’étain désiré était inférieur à 50 % atomique. Les analyse XPS indiquent quant à elles
un rapport atomique de surface, ou dans le premier nm de profondeur des particules,
correspondant à un enrichissement en étain. Les rapports atomiques de surface sont
d’ailleurs proches des valeurs nominales recherchées pour le volume, bien que les
valeurs de ces rapports aient tendance à s’éloigner des valeurs nominales avec
l’augmentation de la quantité d’étain, ce qui à nouveau peut être expliqué en terme de
défaut d’incorporation d’étain aux matériaux lors de la synthèse.
L’enrichissement de la surface en étain par rapport au volume donne aussi une
indication quant à la structure du matériau. Lorsque l’on regarde les rapports de
composition entre étain métallique et oxydes/hydroxydes d’étain, ceux-ci sont toujours
de l’ordre de 20 % Sn0 et 80 % SnOxHy, quel que soit le rapport atomique Pd/Sn. Ceci
semble suggérer que l’étain de degré d’oxydation 0 puisse être en interaction directe et
forte avec le palladium (et peut être intégré au cœur des particules), tandis que l’étain
oxydé pourrait former des clusters à la surface des particules de palladium. Ce même
genre de structure à été proposée pour des catalyseurs PdxB1-x et PdxNi1-x, par Simoes et
al.156, et par Beyhan et al.173 pour des systèmes PtSn.
(% at.) PdSn PdSn2 PdSn3
Nominal
Absorption atomique, % at.
50/50
65,7/34,3
33/66
60,8/39,2
25/75
56,3/43,7
XPS, % at. 48/51,7 35/64,7 30,9/69
Tableau 12 Rapports atomiques pour les catalyseurs PdxBi1-x déterminés par les mesures EDS et XPS.
Enfin, la surface spécifique des matériaux PdSn a été mesurée par la méthode
BET. Les matériaux synthétisés possèdent de grandes surfaces spécifiques. Les valeurs
obtenues sont comprises entre 25 et 100 m2.g-1 (Tableau 13) et augment avec le rapport
atomique Sn/Pd, ce qui peut être encore une fois dû au « lavage » de l’étain.
130
Surface spécifique (m2.g-1),
calculée par différentes modèles de calcule PdSn PdSn2 PdSn3
BET 24,77 30,06 76,77
BJH (adsorption) 27,60 38,08 93,87
BJH (desorption) 28,13 38,28 95,79
DH (adsorption) 27,82 38,69 95,30
DH (desorption) 28,37 38,90 96,76
Tableau 13 Valeurs de la surface spécifique pour les matériaux PdxSn1-x.
2. Caractérisation électrochimique des catalyseurs PdxSn1-x
Les voltammogrammes cycliques stables (enregistrés après plusieurs cycles) en
milieu électrolyte support des échantillons du système PdxSn1-x sont présentés sur la
Figure 49. La présence d’étain modifie la forme des voltamogrammes. Les zones
d’adsorption/absorption d’hydrogène et de formation des oxydes de palladium
diminuent très fortement avec l’augmentation du taux d’étain, ce qui tend à montrer que
la surface de palladium est recouverte par des espèces provenant de ce second métal. La
limitation des processus d’adsorption et d’absorption de l’hydrogène par le palladium
avait aussi été observée lors de la modification du palladium par le bismuth. En
revanche, dans le domaine de réduction des oxydes, le pic entre 0,6 et 0,7 V observable
pour tous les catalyseurs ne fait que diminuer avec l’augmentation de teneur en étain
dans les catalyseurs. Ce pic semble donc seulement être dû à la réduction des oxydes
formés à la surface du palladium. De plus, contrairement à ce qui a été observé dans le
cas de la modification du palladium par le bismuth, le pic de réduction des oxydes de
surface est déplacé vers des potentiels plus positifs en présence d’étain ; les interactions
entre le palladium et l’étain sont donc différentes de celles entre le palladium et le
bismuth. Cette différence dans les interactions pourrait se traduire par des
comportements catalytiques eux aussi différents.
131
Figure 49 Voltamogrammes cycliques des échantillons de PdxSn1-x enregistrés en milieu électrolytique
KOH 1,0 mol.L-1 déaéré à v = 0,020 V.s-1 et T = 25 °C.
3. Electrooxydation du glycérol sur les catalyseurs auto-supportés PdxSn1-x
La Figure 50 présente les voltammogrammes enregistrés en milieu KOH 1,0
mol.L-1 + glycérol 0,1 mol.L-1. Le catalyseur PdSn présente une activité très élevée en
comparaison de celle enregistrée sur le catalyseur à base de palladium pur, ce qui
démontre l’effet bénéfique de l’addition d’étain au palladium. Ce dernier catalyseur
permet de plus de déplacer le début du potentiel d’oxydation de 0,6 V dans le cas du Pd
pur à 0,45 V pour le catalyseur PdSn, soit un gain de 150 mV. Lorsque la teneur
atomique en étain au sein du catalyseur est augmentée, l’activité décroît fortement pour
devenir inférieure à celle du palladium pur dans le cas du catalyseur PdSn3. Cette
décroissance d’activité avec l’augmentation du taux d’étain peut certainement
s’expliquer en termes de surface active de palladium disponible pour adsorber le
glycérol et permettre son oxydation.
132
Figure 50 Voltammogrammes d’électrooxydation du glycérol à 0,1 mol.L-1 dans KOH 1,0 mol.L-1
enregistrés sur les catalyseurs PdxSn1-x à 0,020 V s-1 et T = 25 °C.
Les études de chronoampérométrie réalisées avec les catalyseurs PdxSn1-x en
présence de glycérol à 0,6 V vs. ERH (Figure 51) ont montrés que tous les catalyseurs
contenant de l’étain conduisaient à des densités de courant initiales supérieures à celles
observées sur le palladium pur. Cependant, la densité de courant d’oxydation
enregistrée sur le catalyseur PdSn3 décroît très rapidement vers celle obtenue sur le
catalyseur de palladium pur, et le catalyseur PdSn montre une meilleure stabilité à long
terme. La baisse rapide d’activité initiale enregistrée sur tous les catalyseurs peut être
attribuée à l’accumulation des intermédiaires de réaction fortement adsorbés sur les sites
actifs de surface. Par la suite, le courant diminue lentement et atteint un état stable.
L’effet promotionnel de Sn dans des catalyseurs de PdxSn1-x pour l’électro-
oxydation de glycérol peut être expliqué par le mécanisme bifonctionnel, dans lequel le
Sn et/ou SnOx ont des interactions fortes avec le groupement hydroxyle (OHads)172,
tandis que le Pd possède d’excellentes propriétés pour l’adsorption et la dissociation de
l’alcool. Un tel effet synergique est généralement observé dans le cas de catalyseurs
bimétalliques. Cependant, l’augmentation de la teneur en Sn conduit à la diminution des
atomes actifs de Pd sur la surface, et par conséquent diminue le rendement global de la
133
dissociation de glycérol adsorbé. Bien que cette étude ait montré qu’un rapport
atomique Pd/Sn 50/50 (% atomique) conduisait à une excellente activité, aucune
conclusion ne peut être proposée quant au rapport optimal, la méthode de synthèse
n’ayant pas permis de diminuer le taux d’étain. Une étude de l’effet de composition en
utilisant une méthode mieux appropriée à la fabrication de catalyseurs PdxSn1-x pourrait
à l’avenir s’avérer intéressante.
Figure 51 Courbes de chronoampérométrie enregistré lors l’électrooxydation à 0,6 V vs ERH de glycérol
0,1 mol.L-1 en milieu KOH 1,0 mol.L-1 sur les catalyseurs PdxSn1-x, T = 25 °C.
4. Etude infrarouge in situ de l’oxydation du glycérol sur le catalyseur PdSn
autosupporté
La sélectivité de l’échantillon le plus actif de nanoparticules de palladium-étain
(PdSn) vis-à-vis de la réaction d’oxydation du glycérol a été étudiée par spectroscopie
infrarouge de réflexion (méthode ATR-IRRAS). Dans ce cas, une bande d’absorption
positive correspond à la formation d’une espèce et une bande d’absorption négative à la
consommation d’une espèce. La Figure 52 montre les spectres enregistrés en fonction
du potentiel d’électrode à faible vitesse de la variation linéaire de potentiel (1 mV s-1)
entre 0,0 V et 0,9 V vs ERH lors de l’électrooxidation du glycérol 0,1 mol.L-1 en milieu
KOH 1,0 mol.L-1.
134
Les bandes d’absorption qui apparaissent dès les bas potentiels, localisées à
environ 1040 cm-1, 1110 cm-1 et 1225 cm-1 (de très faible intensité pour cette dernière et
donc dans l’encadré bleu pour plus de visibilité sur la Figure 52), sont toutes négatives
et correspondent donc à la consommation d’espèces. Ces bandes peuvent être attribuées
à la vibration d’élongation d’une fonction aldéhyde ou d’une fonction alcool, c'est-à-
dire de glycérol. Les bandes à 1110 cm-1 et 1220 cm-1 apparaissent un peu plus
tardivement que celle à 1040 cm-1. Les bandes d’absorption à 1304 cm-1, 1330 cm-1 et
1380 cm-1 apparaissent aussi très tôt sur ce catalyseur. La première est associée à la
formation soit de glycéraldéhyde, soit de glycérate, la deuxième est attribuée à la
formation de dihydroxyacétone et la troisième à la formation de carboxylate.
La bande d’absorption à environ 1040 cm-1 est présente sur toute la gamme de
potentiel où le catalyseur est actif et la valeur absolue de son intensité augmente lorsque
le potentiel d’électrode augmente, elle peut raisonnablement être attribuée à la
consommation de fonctions alcool. Les bandes d’absorption négatives apparaissant plus
tardivement à 1110 cm-1 et 1220 cm-1 et de plus faibles intensités peuvent être attribuées
à la consommation d’une espèce aldéhyde préalablement formées et adsorbées à la
surface de l’électrode. D’ailleurs, la forme cétone, le dihydroxyacétone est formé dans
la même gamme de potentiel. Ces espèces représentent alors les intermédiaires pour
former très rapidement des carboxylates, comme l’attestent la présence très tôt des
bandes d’absorption respectivement à 1304 cm-1 et 1380 cm-1.
Dans la gamme de nombre d’onde allant de 1700 cm-1 à 2100 cm-1, où la
signature infrarouge des espèces CO adsorbées à la surface d’une électrode de métal
noble doit se montrer, aucune bande d’absorption n’est détectée. Il semble que le
catalyseur PdSn ne permette pas d’activer la réaction d’adsorption dissociative du
glycérol avec rupture de la liaison C-C. Ce fait confirme le mode d’adsorption
conduisant à la formation d’un aldéhyde ou d’une cétone à la surface de l’électrode,
comme il a déjà été observé sur des catalyseurs Pt et PtSn utilisés pour l’oxydation de
l’éthanol en milieu acide42,49. Il est à noter qu’une bande d’absorption est observable
vers 2345 cm-1, qui pourrait faire penser à la formation de CO2 sur l’électrode, et ce dès
135
0,0 V puisque cette bande est visible sur toute la gamme de potentiel avec une intensité
invariante. Cette bande, double, présente une bande caractéristique du CO2 en phase
gaz, provenant probablement d’un affaiblissement de la purge sur le chemin optique du
faisceau infrarouge.
Figure 52 Spectres infrarouge d’absorbance (a) sur la gamme entre 1000 cm-1 et 1400 cm-1 et (b) entre
1700 cm-1 et 2500 cm-1, enregistrés au cours de la réaction d’oxydation de glycérol 1,0 mol.L-1 en milieu
KOH 1 mol.L-1 sur le catalyseur PdSn à v = 1 mV.s-1 et T = 25 °C.
5. Conclusion sur l’activité/sélectivité de PdSn vis-à-vis de l’oxydation du glycérol
Le catalyseur PdSn présente une très forte activité initiale vis à vis de la réaction
d’oxydation du glycérol, équivalente ou même un peu supérieure à celle du catalyseur
Pd4Bi. Cependant, les mesures de chronoampérométrie à 0,6 V indiquent qu’une
stabilisation du courant après deux heures d’expériences à environ 20 A.gPd-1 se produit
pour les deux catalyseurs. En revanche, en ce qui concerne la sélectivité, des différences
apparaissent.
Dans le cas du catalyseur PdSn, la présence à très bas potentiels des bandes
d’absorption à environ 1310 cm-1 et 1380 cm-1attribuées aux fonctions carboxylate, dès
la formation des aldéhydes et cétones, indique que sur ce type de catalyseur le
1000 1100 1200 1300 1400
No re d’o de ( -1)
1800 2000 2200 2400
No re d’o de ( -1)
0,0 V
0,9 V
a b
136
mécanisme bifonctionnel avec activation d’espèces hydroxyles par l’étain est le
mécanisme privilégié. L’absence de la bande d’absorption à environ 1350 cm-1,
attribuée à la formation d’hydroxypyruvate tandis que la bande attribuée à la
dihydroxyacétone à environ 1335 cm-1 est présente, nécessite d’être discutée. En effet,
si la dihydroxyacétone est formée, il semble que nécessairement la première étape
conduisant à une oxydation plus poussée de la molécule vers des composés comportant
des fonctions carboxylate passe par la formation d’hydroxypyruvate selon les réactions
suivantes:
CH2OH-CHOH-CH2OH + 2 OH- (CH2OH-CO-CH2OH)ads + 2 H2O + 2 e- (36)
(CH2OH-CO-CH2OH)ads + 5 OH- (CH2OH-CO-COO-)ads + 4 H2O + 4 e- (37)
(CH2OH-CO-COO-)ads + 5 OH- COO--CO-COO- + 4 H2O + 4 e- (38)
La non détection de l’hydroxyyruvate peut être attribuée à une réaction
d’isomérisation rapide de la dyhydroxyacétone vers le glycéraldhédyde. Cette réaction a
déjà été invoquée plusieurs fois pour expliquer des différences dans le mécanisme
d’oxydation du glycérol selon la nature ou de la composition atomique du catalyseur. Le
glycéraldéhyde peut alors être lui-même oxydée très rapidement, notamment en
présence d’étain qui est un métal connu pour son oxophilie, pour conduire au glycérate
suivant les réactions:
CH2OH-CHOH-CH2OH + 2 OH- (CH2OH-CO-CH2OH)ads + 2 H2O + 2 e- (39)
(CH2OH-CO-CH2OH)ads (CH2OH-CHOH-CHO)ads (40)
CH2OH-CHOH-CHO)ads + 3OH- CH2OH-CHOH-COO- + 2H2O + 2 e- (41)
réactions éventuellement suivies par,
CH2OH-CHOH-COO- + 5 OH- -OOC-CHOH-COO-+ 4 H2O +4 e- (42)
et/ou,
CH2OH-CHOH-COO- + 7 OH- -OOC-CO-COO-+ 6 H2O +6 e- (43)
137
La seconde possibilité envisageable consiste à considérer que le mécanisme de
réaction implique la formation d’hydroxypyruvate à partir du dihydroxyacétone, puis
que l’hydroxypyruvate soit très rapidement oxydé en mesoxalate, ce qui expliquerait sa
non détection par spectroscopie infrarouge in situ. Ici, il est fait l’hypothèse que la
réaction limitante est la transformation du dihydroxyacétone en hydroxypyruvate. Ce
mécanisme ne nous convainc pas pour la raison suivante. Tous les travaux effectués au
laboratoire concernant l’étude des mécanismes d’oxydation du glycérol, que ce soit
antérieurement par Mario Simoes156 sur des catalyseurs à base de platine, de palladium
et d’or supportés sur noir de carbone, modifiés ou non par du bismuth, ou dans le
présent travail sur les nanoparticules de palladium à distributions de formes et de tailles
contrôlées ou sur les catalyseurs auto-supportés à base de palladium, montrent qu’à
chaque fois que l’hydroxypyruvate est formé, il y a de manière concomitante production
de carbonates, CO2 et autres composés en C1 et C2. Or, dans le cas du catalyseur
autosupporté PdSn, aucun indice de la formation de tels composés et donc de la rupture
de la liaison carbone-carbone n’a pu être détecté. Il apparaît donc plus probable que le
premier mécanisme proposé, à savoir celui impliquant la réaction d’isomérisation du
dihydroxyacétone en glycéraldéhyde, se produise préférentiellement. Il est d’ailleurs
connu dans le cas de la réaction d’oxydation de l’éthanol, que la formation
d’acétaldéhyde est fortement limitée par la modification du métal noble par l’étain,
tandis que celle de l’acide acétique est augmentée51. Il est très probable que le même cas
de figure se présente ici: à l’instar de l’acétaldéhyde, le glycéraldéhyde formé par la
réaction d’isomérisation du dihydroxyacétone est certainement très réactif en présence
d’étain et donc rapidement transformé en glycérate, puis éventuellement en d’autres
produits d’oxydation plus élevée.
III. Evaluation de l’activité des catalyseurs PdxBi1-x et PdxSn1-x vis-à-vis
de l’oxydation autres alcools
L’activité des catalyseurs auto-supportés a été évaluée sur quatre autres alcools
(le méthanol, l’éthanol, l’éthylène glycol et l’isopropanol) qui peuvent présenter un
138
intérêt pour leur utilisation soit en configuration pile à combustible soit en configuration
cellule d’électrolyse.
Le méthanol est le plus simple des alcools et est souvent considéré comme le
plus réactif, et de ce fait de nombreuses études pour son utilisation au sein d’une pile à
combustion direct de méthanol ont été réalisées155,174-182. L’éthanol est intéressant parce
qu’il peut être produit par la fermentation des sucres ou à partir de composés non
alimentaires tels que la cellulose et l’hémicellulose. De plus, la réaction
d’électrooxydation de l’éthanol a aussi été beaucoup étudiée au laboratoire pour une
application en configuration pile à combustion direct d’éthanol51 ou en configuration
cellule d’électrolyse à conversion directe d’éthanol183. L’éthylène glycol est le plus
simple des polyols, et comme pour le glycérol tous ses atomes de carbone portent une
fonction alcool et peuvent donc être considérés comme activés pour une réaction
électrocatalytique impliquant une étape d’adsorption et des étapes d’oxydation. Il a
aussi fait l’objet d’étude au laboratoire en configuration pile à combustible53,81. Enfin,
l’étude de la réactivité de l’isopropanol, qui ne comporte qu’une fonction alcool
secondaire, peut être intéressante dans le cadre d’une application pour les piles à
combustible directe rechargeables184. Il s’est donc avéré intéressant de comparer la
réactivité de ces alcools sur les catalyseurs auto-supportés à base de palladium.
La Figure 53 montre les courbes de polarisation enregistrées sur les différents
catalyseurs PdxBi1-x en présence des différents alcools d’une concentration de 0,1 mol.L-
1. L’activité des catalyseurs varie beaucoup selon l’alcool considéré. En ce qui concerne
le méthanol, l’addition de bismuth jusqu’à un rapport atomique de 1 Bi pour 4 Pd ne
change pas le début de vague d’oxydation, mais en revanche diminue les densités de
courant maximales atteintes. Il semble que le taux de recouvrement en bismuth
augmentant, la surface disponible de palladium pour l’adsorption du méthanol diminue
et de même l’activité. En revanche pour le catalyseur fortement chargé en bismuth,
même si les densités de courant maximales atteintes ont encore diminué, il y a
clairement une amélioration de l’activité à bas potentiels, entre 0,5 et 0,7 V, qui peut
peut-être s’expliquer par une diminution de l’empoisonnement de la surface par le
139
monoxyde de carbone due au forts taux de recouvrement en bismuth. Il est en effet
connu que le méthanol s’adsorbe dissociativement sur les métaux nobles à bas potentiel
pour former des espèces de type COads très fortement adsorbées et poison.
En ce qui concerne l’éthanol, l’addition du bismuth n’a pas d’effet, ou très peu,
sur le début de la vague d’oxydation située aux alentours de 0,4 V. En revanche, pour le
catalyseur le plus riche en bismuth, les densités de courant atteintes sont de nouveau très
inférieures à celles observées pour les autres catalyseurs. Cette baisse d’activité est
peut-être induite cette fois par le blocage du processus d’adsorption de l’éthanol en
raison d’un encombrement stérique dû à la présence de cluster de bismuth à la surface
du palladium.
Dans le cas de l’isopropanol, il apparaît que l’addition du bismuth conduit à
déplacer le début de vague d’oxydation vers des potentiels plus élevés. Dans ce cas, il
semble que la présence de bismuth à la surface du catalyseur de palladium conduit à
gêner l’adsorption de l’isopropanol. Il est généralement admis que l’adsorption d’un
monoalcool sur un métal noble se produit par le carbone portant la fonction alcool. Le
comportement observé ici avec l’isopropanol conforte l’idée d’une limitation de la
réaction d’oxydation induite par un encombrement stérique dû au recouvrement de plus
important de la surface de palladium par des clusters de bismuth.
En revanche, comme pour le glycérol, le catalyseur Pd4Bi présente la meilleure
activité pour l’oxydation de l’éthylène glycol en termes de densités de courant atteintes,
bien que le potentiel de début de vague d’oxydation ne soit pas modifié. Il est
intéressant de noter que le comportement des catalyseurs PdxBi1-x est très proche pour
les deux polyols, tandis qu’il diffère beaucoup en ce qui concerne les monoalcools.
La Figure 54 compare la réactivité des différents alcools sur le même catalyseur
Pd4Bi. L’ordre de réactivité en termes de densités de courant obtenues à 0,8 V, par
exemple, est glycérol ≥ éthylène glycol > éthanol > isopropanol > méthanol.
140
Figure 53 Courbes d’électrooxydation du méthanol (a), de l’éthanol (b), de l’isopropanol (c) et de
l’éthylène glycol (d) 0,1 mol.L-1 dans KOH 1,0 mol.L-1 enregistrés sur les catalyseurs PdxBi1-x à 0,020 V
s-1 et T = 25 °C.
Figure 54 Voltammogrammes d’électrooxydation du méthanol, de l’éthanol, de l’isopropanol, de
l’éthylène glycol et du glycérol 0,1 mol.L-1 dans KOH 1,0 mol.L-1 enregistrés sur les catalyseurs Pd4Bi à
0,020 V s-1 et T = 25 °C.
a b
c d
141
Le même travail a été effectué sur les catalyseurs PdxSn1-x. La Figure 55
présente les courbes de polarisation enregistrées sur les différents catalyseurs PdxSn1-x
en présence des différents alcools à 0,1 mol.L-1. L’activité de catalyseurs varie
beaucoup selon l’alcool considéré. Dans ce cas, le catalyseur PdSn conduit à chaque
fois à la meilleure activité. Il est très probable que la chute d’activité lorsque le taux
d’étain augmente soit associée à la diminution de la surface de palladium accessible.
Figure 55 Voltammogrammes d’électrooxydation du méthanol (a), de l’éthanol (b), de l’isopropanol (c)
et de l’éthylène glycol (d) à 0,1 mol.L-1 dans KOH à 1,0 mol.L-1 enregistrés sur les catalyseurs PdSnx à
0,020 V s-1 et T = 25 °C.
Les résultats obtenus sur le meilleur des catalyseurs de palladium auto-supportés
modifié par l’étain, PdSn, sont présentés sur la Figure 56. Il apparait que le catalyseur
présente la plus faible activité pour la réaction d’oxydation du méthanol. Un tel
comportement a déjà été observé en comparant les activités de catalyseurs à base de
platine modifiés soit par du ruthénium, soit par de l’étain pour les réactions
d’électrooxydation du méthanol et de l’éthanol. Les catalyseurs contenant de l’étain se
sont montrés plus actifs pour l’oxydation de l’éthanol que pour l’oxydation du
a b
c d
142
méthanol30. Le comportement, que l’on retrouve ici, peut paraître paradoxal lorsque l’on
sait que les catalyseurs contenant de l’étain sont aussi les plus actifs pour la réaction
d’oxydation du monoxyde de carbone adsorbé185; or, cette espèce est l’intermédiaire
principal de réaction d’oxydation du méthanol, tandis que pour l’éthanol elle représente
un intermédiaire secondaire, des espèces adsorbées de type acétyle étant impliqué dans
le mécanisme d’oxydation de l’éthanol186. L’éthylène glycol et le glycérol présente
quant à eux la même réactivité à bas potentiel (même début de vague d’oxydation), bien
que l’éthylène glycol semble plus réactif pour des potentiel supérieurs à 0,7 V, peut être
dû à une réaction d’adsorption moins limitée par l’encombrement stérique de la
molécule. Pourtant, l’isopropanol, molécule en C3 comme le glycérol, a la réactivité la
plus élevée.
Figure 56 Voltammogrammes d’électrooxydation du méthanol, de l’éthanol, de l’isopropanol, de
l’éthylène glycol et du glycérol 0,1 mol.L-1 dans KOH 1,0 mol.L-1 enregistrés sur le catalyseur PdSn à
0,020 V s-1 et T = 25 °C.
Ce comportement catalytique est assez difficile à interpréter, surtout au regard
des expériences infrarouge in situ réalisées lors de l’électrooxydation du glycérol sur le
catalyseur PdSn où la formation de dihydroxyacétone a été démontrée dès les bas
potentiels. Cette formation implique que la fonction alcool secondaire du glycérol soit
activée, tout comme dans le cas de l’isopropanol. Pourtant, le début de la vague
d’oxydation est déplacé de 200 mV vers les potentiels négatifs pour l’isopropanol. Tout
143
se passe comme si dans le cas du glycérol le dihydroxyacétone restait adsorbé à la
surface de l’électrode et bloquait les sites, tandis que dans le cas de l’isopropanol,
l’acétone (qui est probablement le produit formé à partir de l’isopropanol) serait désorbé
rapidement, libérant les sites actifs pour permettre la réaction de se reproduire.
Il ressort donc de ce travail qu’une étude plus complète des processus
d’adsorption et de réaction sur les monoalcools est nécessaire pour comprendre le mode
de fonctionnement du catalyseur PdSn. Au final, l’ordre de réactivité pour l’oxydation
des alcools sur le catalyseur PdSn est: isopropanol > éthanol > éthylène glycol ≥ glyérol
> méthanol.
144
E. Conclusion générale et perspectives
L’objet de cette thèse consistait à essayer d’élucider le rôle de la modification de
métaux nobles catalytiques (en particulier le palladium) par des éléments du groupe p de
la classification périodique, en particulier le bismuth, sur la réaction d’électro-oxydation
du glycérol, en termes d’activité et de sélectivité.
Les motivations provenaient d’un certain nombre de constats fait dans la
littérature et au sein du laboratoire.
(i) Tous les produits d’oxydation du glycérol, sans rupture de la liaison
carbone-carbone, sont des produits chimiques valorisables, quel que soit la
positon de la fonction alcool oxydée.
(ii) La conversion électrochimique du glycérol en produits chimiques oxygénés
à valeur ajoutée ou d’intérêt pour l’industrie peut être réalisée de manière
avantageuse dans des réacteurs électrochimiques: en milieux aqueux, à
basses température et pression. De plus, l’activation non-thermique des
réactions permet un meilleur contrôle de la sélectivité. La maîtrise du
potentiel d’électrode, du pH de l’électrolyte, de la concentration en glycérol,
du débit de réactif, du temps de séjour sur l’électrode et de la formulation
des catalyseurs sont autant de paramètres permettant d’effectuer un réglage
fin pour contrôler l’activité et la sélectivité vers un produit donné.
(iii) En milieu alcalin un catalyseur Pt/C est le plus actif vis-à-vis de l’oxydation
du glycérol, présentant une surtension d’oxydation inférieure d’environ 0,2
V à celle obtenue avec les catalyseurs Pd/C et Au/C. Les inconvénients
principaux de l’utilisation des catalyseurs à base du platine sont le coût de ce
métal noble (actuellement plus de 40000 €/kg) et les ressources mondiales
limitées qui représente un frein pour le développement durable. En raison du
fait que le platine est un métal couteux et rare, le palladium a été considéré
comme l’élément de base des catalyseurs développés et étudiés au cours de
cette thèse de doctorat.
145
(iv) des désaccords concernant les mécanismes d’oxydation du glycérol sur le
palladium existent. Certains auteurs ont montré que seules les fonctions
alcool primaire étaient oxydées sur le palladium tandis que d’autres ont
montré la formation de dihydroxyacétone, impliquant l’oxydation de l’alcool
secondaire.
(v) la modification de surfaces de palladium par le bismuth induit de fortes
variations de l’activité et de la sélectivité du catalyseur vis-à-vis de la
réaction d’électrooxydation du glycérol. Cependant, le rôle de ce co-
catalyseur n’est pas encore pleinement élucidé.
Parce que les réactions d’électrooxydation des alcools ont lieu à la surface des
électrodes, et que ces réactions d’oxydation d’alcools en général, et du glycérol en
particulier, sont sensibles à la structure des catalyseurs, l’activité et la sélectivité de
nanoparticules de palladium présentant des structures de surfaces différentes vis-à-vis
de la réaction d’oxydation du palladium a été traitée dans un premier temps afin de
tenter d’établir une corrélation structure/comportement électrocatalytique. Pour cela, des
méthodes de synthèse colloïdales ont été utilisées et adaptées afin d’obtenir différents
types de nanoparticules avec des distributions de tailles et de formes contrôlées: des
échantillons de nanoparticules de palladium constitués respectivement de sphères de 4
nm de diamètres, de cubes de 11 nm de côté et d’octaèdres de 8 nm de hauteur ont été
synthétisés. Les caractérisations par microscopie électronique à transmission ont
confirmé que les distributions de tailles et de formes étaient étroites et bien contrôlées.
Les caractérisations électrochimiques ont confirmés la présence de domaines de surface
(100) sur les nanocubes, (111) sur les nanooctaèdres et l’absence de domaines étendus
sur les nanosphères. En revanche, si les synthèses de nanosphères et nanocubes
conduisait à des distributions de formes très étroites, il est apparu que la synthèse de
nanooctaèdres était plus délicate: les octaèdres et tétraèdres présentaient de fortes
troncatures et de petites particules de formes sphériques cohabitaient avec ces objets.
Une des première perspective consistera à améliorer la méthode de synthèse des
nanooctaèdres afin d’obtenir une distribution d’octaèdres/tétraèdres plus étroite et une
meilleure proportion de faces (111).
146
La caractérisation électrochimique de ces matériaux en milieu acide à conduit à
la séparation sur les voltammogrammes des contributions associées aux trois processus
impliquant l’hydrogène (adsorption/désorption de l’hydrogène atomique déposé en
sous-tension, absorption/désorption de l’hydrogène atomique au sein des nanoparticules
de palladium et dégagement d’hydrogène moléculaire) et a crée les conditions
favorables à la détermination des fonctions d’états thermodynamiques pour le dépôt en
sous-tension et en sur-tension d’hydrogène sur les nanosurfaces. De plus, cette
séparation permet d’accéder à la détermination de la surface active des matériaux de
palladium nanostructurés en mesurant la charge impliquée sous le pic de désorption de
l’hydrogène déposé en sous-tension, entre 0,12 et 0,3 V, ce qui a été confirmé en
comparant avec la charge impliquée sous le pic des réduction des oxydes de surface de
palladium. Ici, il serait intéressant en perspective d’étudier la zone hydrogène sur des
catalyseurs de palladium présentant des tailles différentes afin de vérifier un éventuelle
effet de cette dernière sur les propriétés d’absorption d’hydrogène atomique et de
dégagement d’hydrogène moléculaire, et aussi d’étudier les fonctions d’états
thermodynamiques liées à l’adsorption/désorption d’hydrogène déposé en sous-tension
et en sur-tension.
La modification de la surface des nanoparticules de palladium à distributions de
taille et de forme contrôlées par dépôt spontané et contrôlé de bismuth a été réalisée
dans un second temps et les effets sur l’activité et la sélectivité ont été évalués en milieu
alcalin. Dans le cas des catalyseurs non modifiés, les nanocubes sont plus actifs que les
nanooctaèdres et les nanosphères sur la gamme de potentiels supérieurs à 0,55 V. La
présence de domaines étendus est un préalable à l’amélioration de l’activité catalytique
à bas potentiels. Tous les échantillons de nanoparticules de palladium non modifié ont
montré une sélectivité équivalente, vers le glycéraldéhyde et le glycérate à bas
potentiels, et vers l’hydroxypyruvate, des dicarboxylates et des produits de dégradation
(carbonate, dioxyde de carbone et certainement des produits en C2). L’ordre général
d’activité pour les catalyseurs modifiés par le bismuth est: nanocubes > nanosphères >
nanooctaèdres. Un optimum de temps de contact (taux de recouvrement en bismuth) des
particules de palladium avec une solution acide saturée en BiCl3 de cinq minutes a été
147
observé pour lequel l’activité vis-à-vis de l’oxydation du glycérol, la production de CO2
et de carbonate et la formation d’hydrxypyruvate sont les plus élevées. Ce temps de
contact correspond à un taux de recouvrement en bismuth d’environ 75 %.
L’amélioration de l’activité par la modification par le bismuth est flagrante dans le cas
des nanocubes de palladium, tandis que dans le cas des nanooctaèdres, l’activité décroit.
Ceci est expliqué par le fait que le bismuth s’adsorbe préférentiellement sur les
domaines de surface (111). En termes de sélectivité, la modification des nanocubes et
nanosphères de palladium par le bismuth conduit à un changement de mécanisme avec
formation dès les bas potentiels d’hydroxyacétone. Ensuite, à plus haut potentiels, les
mêmes espèces que pour les particules non modifiées semblent être formées:
hydroxypyruvate, carbonate, dioxyde de carbone et carboxylate, etc. Il est à noter ici
que les productions notables de CO2 (et de carbonate) et d’hydroxypyruvate étaient tout
à fait inattendues à la lumière des résultats précédents obtenus sur des catalyseurs à base
de palladium supportés sur carbone (modifié par des clusters d’oxydes/hydroxydes de
bismuth ou non).
Enfin, des matériaux catalytiques réels, c’est-à-dire dont la production peut
aisément être industrialisée, à base de palladium modifié par des éléments du groupe p
(bismuth et étain) ont aussi été étudiés. En plus d’une amélioration de l’activité, des
implications sur la sélectivité de la réaction d’oxydation des alcools, c’est-à-dire sur le
mécanisme de réaction, sont aussi induites par de telles modifications. Par exemple, en
se focalisant sur le catalyseur le plus actif (Pd4Bi), un comportement unique de ce type
de matériaux autosupportés peut être mis en évidence. La première observation
importante concerne la forte sélectivité vers les produits faiblement oxydés
(dihydroxyacétone et glycéraldéhyde) à bas potentiels entre 0,6 V vs et 0,8 V, qui
n’implique pas le mécanisme bifonctionnel sur cette gamme de potentiel mais
l’augmentation de la vitesse de turn-over des espèces adsorbées sur la surface
catalytique. A des valeurs supérieures de potentiel, la formation d’hydroxypyruvate se
produit, ce qui implique un mécanisme bifonctionnel. Il est ici important de rappeler
que la formation d’hydroxypyruvate n’a jamais été observé lors de travaux antérieurs
sur des catalyseurs de type PdxBi1-x/C, contrairement à ce qui a été obtenu sur des
148
catalyseurs Au/C, tandis que le dihydroxyacétone et le glycéraldéhyde avaient eux été
détectés. A potentiels plus élevés, la production of CO2 débute juste après celle
d’hydroxypyruvate, impliquant la rupture de la liaison C-C. A nouveau, des travaux
antérieurs concernant les catalyseurs supportés PdxBiy/C n’avaient montré aucune
production de CO2, ce qui avait été expliqué en termes de dilution des atomes de
palladium de surface par le bismuth conduisant à modifier le mode d’adsorption du
glycérol et à éviter la rupture de la liaison C-C. Tous ces matériaux catalytiques sont
composés des mêmes éléments et ont des compositions très similaires. Les
morphologies et structures particulières des catalyseurs autosupportés PdxBi1-x et non
supportés Pd/Bi pourraient être à l’origine de ce comportement électrocatalytique: dans
chaque cas, les pores délimités par des particules métalliques (entre les particules
agglomérées dans le cas des nanoparticules non-supportées et entre les chapelets de
particules dans le cas des catalyseurs autosupportés) peuvent fonctionner comme des
nanoréacteurs permettant ce type de sélectivité.
Un catalyseur autosupporté PdSn à aussi présenté une très forte activité vis à vis
de la réaction d’oxydation du glycérol, équivalente à celle du catalyseur Pd4Bi. En
revanche, en ce qui concerne la sélectivité, des différences apparaissent. Dans le cas du
catalyseur PdSn, la formation de carboxylates en même temps que celle des aldéhydes
et cétones indique que le mécanisme bifonctionnel avec activation d’espèces hydroxyles
par l’étain est le mécanisme privilégié. L’absence de formation d’hydroxypyruvate à
conduit à proposer un mécanisme d’oxydation du glycérol impliquant une réaction
d’isomérisation rapide du dihydroxyacétone vers le glycéraldéhyde, lequel réagit très
rapidement à l’électrode.
Toutes les études de sélectivité ont été réalisées par des méthodes de
spectroscopie infrarouge in situ, qui même si elles sont fiables mériteraient d’être
confirmées par des analyses HPLC des produits de réaction accumulés au cours
d’expériences de chronoamperométrie réalisées aux potentiels où apparaissaient ces
bandes infrarouge caractéristiques. Cette action est bien évidemment une perspective à
court terme.
149
L’activité des catalyseurs auto-supportés a aussi été évaluée sur quatre autres
alcools (le méthanol, l’éthanol, l’éthylène glycol et l’isopropanol) qui peuvent présenter
un intérêt pour leur utilisation soit en configuration pile à combustible soit en
configuration cellule d’électrolyse. Dans le cas des catalyseurs Pd4Bi, le résultat le plus
marquant est que ce catalyseur présente une meilleure activité vis-à-vis de l’oxydation
des polyols (éthylène glycol et glycérol) que vis-à-vis de celle des monoalcools. L’ordre
de réactivité en termes de densités de courant, obtenues à 0,8 V par exemple, est
glycérol ≥ éthylène glycol > éthanol > isopropanol > méthanol. En ce qui concerne le
catalyseur PdSn, l’ordre de réactivité pour l’oxydation des alcools est: isopropanol >
éthanol > éthylène glycol ≥ glycérol > méthanol. Ce résultat est tout à fait étrange:
comment expliquer que dans le cas du glycérol le dihydroxyacétone reste adsorbé à la
surface de l’électrode et bloque les sites, tandis que dans le cas de l’isopropanol,
l’acétone (qui est probablement le produit formé à partir de l’isopropanol) est désorbé
rapidement, libérant les sites actifs pour permettre la réaction de se reproduire. Dans les
deux cas, c’est le carbone portant la fonction alcool secondaire qui est activé ! Ici aussi,
une étude plus poussée serait intéressante pour comprendre les mécanismes de réaction.
L’élucidation du processus d’oxydation de l’isopropanol pourrait permettre d’apporter
des éléments de réponse concernant celui, probablement plus complexe, de l’oxydation
du glycérol impliquant l’activation du carbone secondaire.
Enfin, les perspectives à plus long termes de cette étude sont de pouvoir
comprendre les divers modes d’activation du glycérol induit par la modification du
palladium par un élément du groupe p afin de pouvoir produire de manière sélective et
quantitative préférentiellement des fonctions aldéhydes ou cétone. Ces produits ont en
effet un fort potentiel pour l’industrie des cosmétiques, pour des applications
tensioactifs et autobronzants biosourcés. De plus, même si leur structure n’est pas tout à
fait identique, les saccharides ne pouvant pas être considérés seulement comme des
polyols en raison de leur fonction anomérique, la connaissance des processus
d’électrooxydation du glycérol peut aussi être utile pour accéder à l’électrochimie des
sucres. En effet, l’électrooxydation contrôlée du glucose (qui est également une matière
première obtenue à partir de la biomasse) dans un réacteur électrochimique peut
150
conduire à la formation des gluconates, glucuronates et glucarates utilisés comme
détergents, ainsi que pour des applications biologiques187. Enfin, l’étude de la réactivité
des ces composés, polyols et saccharides, en milieux non-conventionnels permettant de
contrôler la quantité d’eau dans le mélange réactionnel, est une autre perspective de ce
travail.
151
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2- Self-supported Pd-Bi Catalysts for the Electrooxidation of Glycerol in Alkaline
Media
A. Zalineeva, M. Padilla, U. Martinez, A. Serov, K. Artyushkova, S. Baranton, C.
Coutanceau, P. B. Atanassov, J. Am. Chem. Soc. 136 (2014) 3937–3945.
3- Modification of Palladium surfaces by bismuth adatoms or clusters: effect on
electrochemical activity and selectivity towards polyol electrooxidation
C. Coutanceau, A. Zalineeva, S. Baranton, M. Simoes, Int. J. Hyd. Energy 39 (2014)
15877–15886
4- Electrochemical Behavior of Unsupported Shaped Palladium Nanoparticles
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5- When cubic nanoparticles get spherical: An Identical Location Transmission Electron
Microscopy case study with Pd in alkaline media
A. Zadick, L. Dubau, A. Zalineeva, C. Coutanceau, M. Chatenet, Electrochem. Comm.
48 (2014) 1–4
Communications orales internationales
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small organic molecules
Anna Zalineeva, Stève Baranton, Christophe Coutanceau
63rd ISE Annual Meeting, 2012, Prague (Républic tchèque).
160
2- Modification of Palladium by Bi adatoms: effect on electrochemical activity and
selectivity towards polyol electrooxidation
C. Coutanceau, S. baranton, A. Zalineeva, M. Simoes,
International Conference on Electrochemical Materials and Technologies for Clean
Sustainable Energy, 2013, Guangzhou, China.
3- Electrochemical behavior of un-supported preferentially-shaped palladium
nanoparticles
Anna Zalineeva, Stève Baranton, Christophe Coutanceau
64th ISE Annual Meeting, 2013, Santiago de Queretaro, Mexico.
4- Pd-Bi Catalysts for Electrooxidation of Alcohols
Anna Zalineeva, Ulises Martinez, Alexey Serov, Stève Baranton, Christophe
Coutanceau, Plamen Atanassov
224th ECS Meeting, 2013, San Francisco, California.
5- Effect of platinum group metals modification by p-group atoms on the
electrochemical conversion of glycerol in alkaline medium
Christophe Coutanceau, Stève Baranton, Anna Zalineeva, Mario Simoes
7th Bishop’s Lodge Workshop on Material for Energy Conversion: Alkaline Membrane
Fuel Cells, 2013, Santa Fe, New Mexico.
6- Development of catalysts for the electrochemical conversion of biomass and
hydrogen production
Christophe Coutanceau, Stève Baranton, Mario simoes, Anna Zalineeva,
IDHEA, Nantes, France, 2014