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APPRENDRE à LIRE

Apprendre à lire - Des sciences cognitives à la salle de classe

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Comment faisons-nous pour lire ? Nous avons écrit ce livre avec un objectif bien précis : que les connaissances scientifiques sur les neurosciences cognitives de la lecture soient diffusées et mises en pratique dans les écoles. Nous espérons également avec ce livre que les parents trouveront un plaisir plus grand encore à comprendre l'esprit de leurs enfants, à suivre leurs progrès en imaginant les étonnantes transformations qui se produisent dans leur cerveau et à prolonger le travail de l'école à la maison par des jeux pertinents. Un seul objectif doit nous guider : aider l'enfant à progresser pour qu'il devienne un lecteur autonome, qui lit autant pour apprendre que pour son plaisir

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Apprendre à lire

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Sous la direction de Stanislas DehaeneAvec Ghislaine Dehaene-Lambertz,

Édouard Gentaz, Caroline Huron et Liliane Sprenger-Charolles

Apprendre à lire

des sciences cognitives à lA sAlle de clAsse

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Sous la direction de Stanislas DehaeneAvec Ghislaine Dehaene-Lambertz,

Édouard Gentaz, Caroline Huron et Liliane Sprenger-Charolles

Apprendre à lire

des sciences cognitives à lA sAlle de clAsse

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© Odile JacOb, OctObre 201115, rue SOufflOt, 75005 PariS

www.odilejacob.frISBN : 978-2-7381-2680-1

Le Code de la propriété intellectuelle n’autorisant, aux termes de l’article L. 122-5, 2 et 3a, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non des-tinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite » (art.L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

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Note typographique :

Les lettres sont représentées en police Berthold Akzidenz Grotesk : la lettre c.Les sons sont représentés entre guillemets simples : ‘ch’Les mots sont représentés entre guillemets doubles : le mot « chat ».

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Comment faisons-nous pour lire ? Au cours des vingt dernières années, la recherche scien-tifique sur le cerveau et la lecture a progressé à grands pas. La psychologie expérimentale et l’imagerie cérébrale ont clarifié la manière dont le cerveau humain reconnaît l’écriture et se mo-difie au fil de cet apprentissage1. Nous disposons aujourd’hui d’une véritable science de la lecture. Toutefois, ces recherches restent méconnues du grand public et, surtout, des premiers concer-nés : les parents et les enseignants des enfants de l’école primaire, ces années cruciales où ces derniers entrent dans le monde de la lecture.

introduction

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Nous avons écrit ce livre avec un objectif bien précis : que les connaissances scientifiques sur les neurosciences cognitives de la lecture soient diffusées et mises en pratique dans les écoles. Ce que les chercheurs ont mis des décennies à comprendre, comment imaginer que chaque enseignant le redécouvre seul, par tâtonnements, sans tirer parti des études scien-tifiques existantes ? Les enseignants sont les premiers experts de la dynamique de la salle de classe, mais ils doivent aussi devenir experts de la dynamique cérébrale. Personne ne devrait connaître mieux qu’eux les lois de la pensée en développement, les principes de l’attention et de la mémoire. Nous espérons également que les parents trouveront un plaisir plus grand encore à comprendre l’esprit de leurs enfants, à suivre leurs progrès en imaginant les éton-nantes transformations qui se produisent dans leur cerveau, et à prolonger le travail de l’école à la maison par des jeux pertinents. Dans les pages qui suivent, nous tentons donc de présenter, sous une forme concise, claire et pédagogique, les plus importantes

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Introduction

découvertes sur le cerveau du jeune lecteur. Une première section dissèque le fonctionnement du cerveau quand il lit et quand il apprend à lire. Quels sont les circuits cérébraux qui évoluent au fil de l’apprentissage ? À quelles difficultés le cerveau de l’enfant doit-il faire face ? Qu’est-ce qui fait la différence entre un bon et un moins bon lecteur ? dans une seconde partie, nous met-tons en valeur quelques grands principes cogni-tifs qui devraient systématiquement guider les débuts de l’enseignement de la lecture : dans quel ordre introduire les idées nouvelles ? Comment choisir de bons exercices ? Comment maximiser l’engagement, l’attention et le plaisir de l’enfant ? Disons-le d’emblée : la connaissance du cerveau ne permet pas de prescrire une unique méthode de lecture. Au contraire, la science de la lecture est compatible avec une grande liber-té pédagogique, des styles très variés d’ensei-gnement et de nombreux exercices qui laissent le champ libre à l’imagination de l’enseignant et des enfants. Un seul objectif doit nous guider : aider l’enfant à progresser, le plus vite possible, dans la reconnaissance fluide des mots écrits.

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Plus la lecture sera automatisée, plus l’enfant pourra concentrer son attention sur la compré- hension de ce qu’il lit et devenir ainsi un lecteur autonome, qui lit autant pour apprendre que pour son propre plaisir.

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Qu’est-ce que l’écriture ?

L’écriture est une invention remarquable, car elle permet de fixer la parole sur un support permanent : « Les paroles s’envolent, mais les écrits restent. » L’écriture ressemble à un code secret qui crypte les sons, les syllabes ou les mots du langage. Comme tout code secret, son décryptage doit s’apprendre. Un bon lecteur est un décrypteur expert. Les différentes écritures du monde se distinguent par leur granularité – la taille des éléments du langage parlé qu’elles cryptent2. L’écriture chinoise dépeint des mots entiers.

comment le cerveAu

Apprend-il à lire ?

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D’autres écritures, comme le hiragana japonais, représentent les syllabes. La nôtre, enfin, est un alphabet : elle dénote les sons les plus élémen-taires du langage parlé, c’est-à-dire les phonèmes – par exemple, le son ‘p’ et le son ‘a’ de la syllabe ‘pa’. Dans un mot écrit en français, chaque lettre ou groupe de lettres, qu’on appelle graphème, correspond à un phonème du langage parlé. Le problème, c’est que, dans notre langue, cette correspondance entre graphèmes et pho-nèmes n’est pas toujours régulière – pensez par exemple aux mots « sept » et « septembre ». Si l’on devait réviser l’orthographe du fran-çais en faisant table rase du passé, comment procéderait-on ? Dans le meilleur des mondes possibles, chaque phonème correspondrait à une seule lettre de l’alphabet. Il suffirait alors de connaître la sonorité de chaque lettre pour savoir lire, et les enfants apprendraient à décrypter tous les mots en quelques mois. C’est pratiquement le cas en Italie et en Alle-magne, où les enfants savent lire 95 % des mots, même les plus rares, dès la fin de la première année d’école primaire.

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Figure 1. Les écritures du monde diffèrent dans leur granularité : la taille des éléments du langage parlé qu’elles dénotent va depuis le phonème (italien et français) jusqu’à la syllabe (écriture japonaise hiragana) ou au mot tout entier (écriture japonaise kanji).

italien français

japonais (hiragana) japonais (kanji)

ta ba co tabaco

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Malheureusement, l’écriture du français, ou a fortiori celle de l’anglais, s’écarte de cet idéal. D’abord, certains phonèmes du français sont représentés, non par une lettre unique, mais par une suite de lettres, par exemple on, ch, in. On les appelle techniquement des graphèmes complexes. De plus, un même gra-phème peut se prononcer de multiples façons – pen-sez aux mots « chorale » et « chocolat », « retient » et « patient ». Pour un enfant français, apprendre à lire consiste donc, non seulement à retenir les associa-tions entre les lettres et les sons – les correspondances graphèmes-phonèmes – , mais également à mémori-ser toute une série d’exceptions et de mots irréguliers. Une partie de l’irrégularité du français vient du fait que certaines suites de lettres correspondent également aux morphèmes, c’est-à-dire des éléments de sens tels que les racines des mots, les préfixes, les suffixes et les terminaisons grammaticales. Pensez par exemple au « re » de « redonner », ou aux diffé-rentes terminaisons de « jeter », « jeté », « jetais »… La combinaison de ces éléments fournit de précieuses indications au lecteur. Par exemple, « ils redichaient » permet de déduire que plusieurs personnes ont répété l’action de « dicher » (que nous venons d’inventer !).

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Figure 2. Les graphèmes sont les lettres ou les suites de lettres qui représentent un son. Les graphèmes du français ne sont pas simples : le même graphème peut représenter des sons différents (graphèmes ambigus), et certains graphèmes font appel à plusieurs lettres (graphèmes complexes).

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Le français ne note pas seulement la sonorité des mots, mais fournit également des indices sur leur racine, leur sens et leur forme grammaticale. En résumé, tous les bons lecteurs savent décrypter à la fois les sonorités et les morphèmes des mots. Et toutes les écritures du monde font appel, à des degrés divers, à ces deux voies de lecture : le passage de l’écrit au son (par le biais des correspon-dances entre les signes écrits et les sons), et le passage de l’écrit au sens (par le biais de la décomposition en morphèmes).

À retenir• Les phonèmes sont les plus petites unités de la parole.• Les graphèmes sont les lettres et les combinaisons de lettres qui représentent les phonèmes.• Les correspondances graphèmes-phonèmes permettent de lire les mots réguliers.• L’écriture du français comprend des irrégularités qui s’ex- pliquent en partie par la notation des morphèmes des mots (préfixes, racines et suffixes).• Apprendre à décrypter le français demande d’apprendre deux voies de lecture : le passage des lettres aux sons et le passage des lettres au sens.

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Figure 3. L’orthographe du français représente également les mor-phèmes : les préfixes, suffixes, racines et terminaisons grammati-cales des mots.

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Apprendre à lire

Comment fonctionne le cerveau avant la lecture ?

Lire n’est pas une activité naturelle pour l’enfant. L’écriture est une invention trop ré-cente dans l’histoire de l’humanité pour avoir pu influencer l’évolution de notre cerveau. Notre pa-trimoine génétique ne comprend pas d’instruc-tions pour lire ni de circuits dédiés à la lecture. Cependant, avec beaucoup d’efforts, nous pouvons recycler certaines prédispositions de notre cer-veau afin de devenir un lecteur expert. Darwin le remarquait déjà : l’acquisition de la lecture est une activité artificielle et difficile, alors que le langage parlé, lui, vient sponta-nément aux enfants. Bien avant d’apprendre à lire, l’enfant est déjà un expert du langage parlé3. L’imagerie cérébrale montre que, dès les premiers mois de vie, l’enfant qui écoute des phrases de sa langue maternelle active déjà les mêmes régions que chez l’adulte4. L’hé-misphère gauche, qui est l’hémisphère domi-nant pour le langage chez la plupart des adultes, abrite déjà, chez le bébé de quelques mois,

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Figure 4. Bien avant d’apprendre à lire, le cerveau du bébé est déjà fortement organisé : les aires du langage parlé fonction-nent dès les premiers mois de vie, tout comme les aires visuelles. Avec l’apprentissage de la lecture, une partie d’entre elles va se spé-cialiser pour la reconnaissance des graphèmes et des phonèmes.

Régions activées par le langage parlé

Aires visuelles

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des circuits neuronaux qui répondent à la voix, particulièrement à celle de la maman, et qui dis-tinguent des syllabes proches comme ‘ba’ et ‘da’. En quelques mois, ces régions vont progressive-ment se focaliser sur le traitement de la langue maternelle. Au cours de la première année de vie, le bébé passe ainsi du stade de linguiste universel à celui d’expert d’une langue particulière, celle de son environnement familial. À la naissance, le bébé est capable d’en-tendre les sons de toutes les langues du monde, mais il écoute surtout la mélodie des phrases. Vers six mois, il devient particulièrement sen-sible aux voyelles de sa langue maternelle. Quelques mois plus tard, ce sont les consonnes qui sont stabilisées (c’est à ce moment que les Japonais cessent d’entendre clairement la diffé-rence entre les sons ‘r’ et ‘l’). À cet âge, l’enfant commence également à assimiler les règles pho-nologiques qui gouvernent notre langue et qui permettent de combiner les phonèmes pour for-mer des mots. Même un enfant de 2 ans sait déjà que certaines séquences de phonèmes comme ‘jd’ ou ‘prch’ ne sont pas utilisées en français.

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Comment le cerveau apprend-il à lire ?

Avant d’avoir soufflé sa première bougie, le bébé dispose déjà d’un embryon de lexique mental : il repère déjà certains mots dans les phrases. Les règles grammaticales qui les relient émergent dès la fin de la deuxième année. L’enfant reconnaît alors la différence entre « la montre », où « montre » est un nom, et « je montre », où « montre » est un verbe. Il comprend également l’importance de l’ordre des mots (« mange pas », « pas manger »). Vers 3-4 ans, ses phrases devien-nent élaborées. Bien que son vocabulaire grandisse encore de plus d’une dizaine de mots par jour, on peut déjà le considérer comme un linguiste expert. Cette connaissance de la langue, cependant, n’est pas consciente. L’enfant sait, mais il ne sait pas qu’il sait ! Avant d’apprendre à lire, le cer-veau manipule déjà les phonèmes d’une manière inconsciente, implicite, et cependant sophistiquée. Lisez à haute voix les mots : « robe sale ». Incons-ciemment, vous les prononcez ‘ropsal’ : votre cer-veau transforme le phonème ‘b’ du mot « robe » en un ‘p’ qui anticipe sur le ‘s’ qui suit5. Nous appliquons tous de telles règles, mais personne n’en a conscience. La connaissance du langage

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est implicite et inconsciente parce qu’elle reste enfermée dans des circuits spécialisés. Lire, c’est briser cette spécialisation. Pour apprendre à lire, il faut prendre conscience des structures du langage oral : les mots, les syllabes, les phonèmes. La lecture les rend accessibles par une voie nouvelle, jamais anticipée dans l’évolu-tion : la vision.

À retenir• Le cerveau du bébé est déjà organisé pour traiter la parole.• Il possède une connaissance sophistiquée de la langue à plusieurs niveaux : l’organisation des phonèmes, des règles phonologiques, du lexique, des règles grammaticales…• Cependant cette connaissance n’est pas consciente.• Apprendre à lire consiste à prendre conscience des struc- tures du langage oral, afin de les mettre en rapport avec le code visuel des lettres.

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Une région du cerveau se spécialise pour les mots écrits

La vision des enfants est tout aussi sophis-tiquée que leur langage parlé. Même un enfant de 2 ans sait déjà nommer à haute voix les ob-jets. Il possède donc un système visuel organisé et connecté aux aires cérébrales du langage. Cependant, lire un mot ne ressemble pas vraiment à nommer un objet. Avant d’apprendre à lire, tous les mots écrits se ressemblent : des pattes de mouche sur une page blanche ! Il n’est pas facile de repérer les minuscules différences qui distin-guent un e d’un o ou d’un c. La forme particulière de l’écriture nécessite un traitement spécialisé. Pour apprendre à décrypter les mots écrits, une région particulière du cerveau doit se spécialiser pour ces objets visuels d’un type nouveau. Le principal changement qu’impose la lecture se situe dans l’hémisphère gauche, dans une région bien précise du cortex visuel qu’on ap-pelle l’aire de la forme visuelle des mots6

(figure 5). On pourrait aussi l’appeler la « boîte aux lettres du cerveau », car c’est elle

Comment le cerveau apprend-il à lire ?

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Apprendre à lire

qui concentre toutes nos connaissances vi-suelles sur les lettres et leurs combinaisons. Lorsqu’on présente des suites de lettres, la réponse de cette région du cerveau s’accroît en proportion directe du score de lecture : mieux on sait lire, plus elle répond7. Au cours de l’appren-tissage, sa réponse augmente progressivement, sans doute parce qu’un nombre croissant de neurones se spécialise pour les lettres, les suites de lettres et les morphèmes les plus fréquents8. Cependant, avant d’apprendre à lire, cette région ne reste pas inactive. Chez l’homme comme chez toutes les autres espèces de primates, elle fait déjà partie des aires visuelles du cerveau qui servent à reconnaître les visages, les objets et les formes géométriques (figure 6). Apprendre à lire consiste à recycler un morceau de ce cortex afin qu’une partie des neurones qui s’y trouvent réorientent leurs préférences vers la forme des lettres et de leurs combinaisons – c’est la théorie du recyclage neuronal. Dans l’aire de la forme visuelle des mots, l’apprentissage de la lecture fait augmenter les réponses aux mots écrits, mais également diminuer les réponses à tout ce

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Figure 5. Le cerveau d’une personne alphabétisée diffère de celui d’un illettré en plusieurs points : (1.) le cortex visuel est plus précis ; (2.) la région de la « boîte aux lettres » s’est spécialisée dans la recon-naissance des lettres et des mots écrits et les envoie vers les aires du langage parlé ; (3.) la région du planum temporale représente plus finement les phonèmes pertinents.

Régions activées par le langage parlé

3. Représentation des phonèmes :

planum temporale

2. Aire de la forme visuelle des mots :« boîte au lettres » du cerveau

1. Cortex visuel

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qui n’est pas de l’écriture, comme les visages : la lecture entre en compétition avec les connais-sances installées dans ce secteur du cortex9. Ce morceau de cortex, en effet, a beaucoup à apprendre (figure 7) : le fait qu’une même lettre peut avoir des formes différentes en majuscules et en minuscules, comme A et a, que des lettres différentes peuvent avoir des formes proches, comme e et c, que l’ordre des lettres compte, que certaines combinaisons de lettres sont fréquentes et d’autres rares… toutes ces connaissances sont codées dans cette région10. D’ailleurs, chez un adulte, si cette région est détériorée par une lésion ou un accident vasculaire, la lecture de-vient strictement impossible11.

À retenir• Apprendre à lire recycle une région précise du cerveau de l’enfant.• Cette région fait partie des aires visuelles qui servent initia- lement à reconnaître les objets et les visages.• Avec l’apprentissage, elle répond de plus en plus aux lettres et à leurs combinaisons.

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Figure 6. Le système visuel de tous les primates a vraisemblablement évolué pour reconnaître les formes élémentaires qui caractérisent le contour des objets. La lecture recycle cette compétence pour la recon-naissance des formes.

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Figure 7. Certaines lettres, comme e, c et r, doivent être distinguées alors qu’elles se ressemblent beaucoup, tandis que d’autres, comme e et E, bien qu’elles soient très différentes, doivent être regroupées dans la même catégorie. Apprendre les distinctions visuelles pertinentes est un aspect essentiel de l’acquisition de la lecture.

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Quelles sont les autres différences entre un lettré et un illettré ?

L’aire de la forme visuelle des mots n’est pas la seule région du cerveau qui se développe avec la lecture. Plusieurs laboratoires ont exami-né l’organisation des aires cérébrales de la vision et du langage chez des adultes illettrés, et l’ont comparée à celle de bons lecteurs. Cette ap-proche a démontré qu’apprendre à lire induit de très profondes modifications de l’anatomie et de l’activité cérébrale, tout au long de la chaîne qui relie la vision au langage parlé12. Un premier changement survient à un niveau très précoce, dans les aires visuelles qui reçoivent les entrées en provenance des dif-férents secteurs de la rétine. Lire demande d’extraire des informations visuelles de haute précision sur une ligne de texte. Chez le lecteur expert, ce raffinement de la précision visuelle se traduit par un surcroît d’activité dans les aires qui codent pour la zone horizontale de la rétine, celle où se situent les lettres. Ainsi, lire raffine la précision de la vision13.

Comment le cerveau apprend-il à lire ?

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Apprendre à lire

Mais lire, c’est aussi apprendre à recoder les sons du langage. Une région appelée planum temporale, située juste en arrière de l’aire auditive primaire, augmente fortement son activité chez les lettrés comparés aux illettrés14. Comme cette région ne répond qu’au langage parlé, on peut penser que le codage même des sons du langage se modifie avec l’apprentissage de l’alphabet. Effectivement, les illettrés codent moins bien les mots parlés, et surtout les pseudo-mots comme « paison ». Comme les jeunes enfants, ils les assimilent à des mots connus comme « maison »15. En conséquence, leur mémoire orale est moins bonne que celle des lecteurs : ils ne peuvent pas répéter une longue suite de syl-labes comme ‘pa ta ma di lo ke’. Surtout, leur capacité à manipuler les phonèmes est réduite : ils ne comprennent pas qu’il y a le même son ‘b’ dans ‘ba’ et dans ‘ab’, ne savent pas enlever le premier son d’un mot (quand « mari » devient « ari ») et sont sourds aux contrepèteries (« c’est une femme folle de la messe »…)16. Leur sys-tème de langage parlé code bien les phonèmes, mais d’une manière inaccessible à la conscience.

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Comment le cerveau apprend-il à lire?

Le développement d’un code fin, précis et conscient des phonèmes est l’un des résultats les plus marquants de l’acquisition de la lecture.

À retenir• Lire, c’est développer une connexion efficace entre la vision des lettres et le codage des sons du langage.• Cette connexion entraîne un raffinement considérable de la précision du système visuel.• Surtout, elle entraîne l’apparition d’un code phonologique précis et conscient du langage oral.

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Prendre conscience des phonèmes

La prise de conscience que le langage parlé est composé de sons élémentaires, les phonèmes, s’appelle la conscience phonémique. Elle fait partie des compétences fondamentales qui amè-nent l’enfant à la lecture. Au départ, l’enfant prélecteur prête attention aux mots tout entiers. Or apprendre à lire de-mande de changer l’attention de niveau. L’enfant doit apprendre à décomposer les mots parlés, d’abord en syllabes (« mystère » = ‘my’ + ‘stère’), elles-mêmes formées d’un bloc de consonnes initiales (‘st’) et d’une rime (la voyelle et tout ce qui suit, par exemple ‘ère’), chacun de ces morceaux pouvant lui-même se subdiviser en phonèmes élémentaires (‘s’, ‘t’, ‘è’, ‘r’). Pour l’enfant de maternelle, cette décom-position en phonèmes n’a rien d’évident. C’est l’apprentissage de la lecture dans une écriture alphabétique qui la fait émerger17. L’apparition de la conscience phonémique est l’une des étapes clé sur le chemin de la lecture. Or la recherche montre qu’on peut accélérer son acquisition en

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Figure 8. Prendre conscience que les mots du langage parlé sont composés de phonèmes n’est pas une évidence, car rien n’indique clairement leur présence dans la parole continue. La conscience pho-némique ne va pas de soi : c’est l’une des conséquences essentielles de l’apprentissage de la lecture.

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jouant à des jeux de langage dès le plus jeune âge18. Les comptines, les rimes, les devinettes (« qu’est-ce qui se mange et qui commence par ‘pou’ ? »), la recherche de mots qui se terminent par un certain son, etc. : tout ce qui fait mani-puler la sonorité des mots prépare à la lecture. Plus généralement, l’attention sélective est l’une des fonctions cérébrales les plus fonda-mentales nécessaires à la lecture. L’enseignant doit apprendre à l’enfant à orienter son attention vers le bon niveau d’organisation de la parole. Lorsque nous prêtons attention à un aspect du monde extérieur, par exemple la nuance de couleur d’une rose, les aires cérébrales qui codent pour cet aspect sont amplifiées, la conscience est augmentée et l’apprentissage accéléré19. De même, lorsque nous prêtons attention aux sons de parole, nous orientons le traitement céré- bral vers les aires cérébrales du langage oral qui servent à la lecture20. Entraîner l’attention vers les phonèmes prépare efficacement à la lecture.

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Figure 9. L’apprentissage des correspondances entre graphèmes et phonèmes est une étape indispensable au cours de la première année de lecture.

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À retenir• L’apprentissage de l’alphabet nécessite de focaliser l’atten- tion de l’enfant sur les phonèmes.• Les jeux de langage, qui font manipuler les syllabes, les rimes et les phonèmes, préparent efficacement l’enfant à la lecture.

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Le code visuel des lettres et des graphèmes

Le même problème d’attention sélective se pose au niveau visuel. Le jeune enfant présente une tendance spontanée à traiter chaque objet comme un tout21. Il ne voit pas nécessaire-ment que les mots sont constitués de lettres. Or déchiffrer l’écriture alphabétique demande d’orienter l’attention à l’intérieur des mots afin d’y repérer les briques élémentaires : les lettres. L’enfant doit comprendre que ces objets sont en tout petit nombre et que ce sont leurs com-binaisons, dans un ordre précis et de gauche à droite, qui définissent le mot. La création d’un code visuel efficace de l’écriture demande une transformation profonde de la région que nous avons appelée la « boîte aux lettres du cerveau ». Chez un bon lecteur, cette région code non seulement les lettres isolées, mais aussi les combinaisons de lettres qui cor-respondent à des graphèmes, à des syllabes et à des morphèmes. Former ce code neural n’est pas simple. Exposer l’enfant à des lettres ne suffit pas : ce qui transforme vraiment le circuit cortical

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de la lecture, c’est l’enseignement systématique des correspondances entre les lettres et les sons du langage22. L’expérimentation pédagogique dans les classes le confirme : les enfants à qui l’on enseigne explicitement quelles lettres cor-respondent à quels sons apprennent plus vite à lire et comprennent mieux l’écrit que d’autres enfants à qui on laisse découvrir le principe de l’alphabet23. Une expérience remarquable prouve l’im- portance de l’attention dans la lecture24. Lorsqu’une personne apprend un alphabet nouveau, l’ap-prentissage varie massivement selon qu’elle dis-tribue son attention de façon globale ou focale. Si on lui explique que les mots sont constitués de lettres qui représentent des fragments élémen-taires du langage parlé, elle apprend rapidement à lire, et l’imagerie cérébrale montre une activa-tion normale de l’aire de la forme visuelle des mots – autrement dit, elle devient très vite un décrypteur expert. Si, par contre, on lui présente les mêmes mots comme des formes globales, sans lui dire qu’ils sont composés de lettres, elle n’apprend guère, car sa mémoire est vite dépassée.

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Surtout, elle active une aire cérébrale inadéquate dans l’hémisphère droit. En adressant les infor-mations vers ce circuit inapproprié, la stratégie d’attention globale interdit tout apprentissage efficace. Abandonner la lecture globale et prê-ter attention aux composants élémentaires des mots, un par un, dans un ordre bien précis, est une étape essentielle de l’apprentissage.

À retenir• Pour apprendre à lire, l’enfant doit prêter attention à la pré- sence des lettres et des suites de lettres qui correspondent aux phonèmes (les graphèmes) au sein des mots écrits.• L’enseignement systématique des correspondances graphèmes-phonèmes accélère l’apprentissage.

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Le stade du miroir et le rôle des gestes

L’enseignement de la lecture se heurte également à des difficultés liées au recyclage neuronal. Chez l’enfant de maternelle, la région visuelle qui doit servir à la lecture n’est pas inac-tive. Elle ne répond pas encore bien aux lettres, mais elle reconnaît d’autres formes telles que les objets ou les visages. Or l’évolution nous a joué un tour : cette région ne peut pas s’empêcher de juger que des vues symétriques en miroir correspondent à un seul et même objet25. Dans le monde naturel dans lequel tous les primates ont évolué, il était avantageux de reconnaître un arbre, un tigre ou un visage sous n’importe quel angle. Cependant, cette propriété est devenue un désavantage pour l’apprentissage de la lecture : l’enfant doit distinguer les lettres p et q, b et d, alors que son système visuel les juge identiques. Tous les enfants, et pas seulement les dyslexiques, confondent transitoirement les lettres en miroir26. La « boîte aux lettres du cer-veau » doit désapprendre cette ressemblance entre les lettres en miroir27.

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Figure 10. L’enfant prélecteur a souvent du mal à distinguer les lettres en miroir, comme b et d, car son cerveau les traite comme des objets identiques.

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Apprendre à lire

L’apprentissage du geste d’écriture semble jouer ici un rôle crucial. Contrairement à la région « ventrale » du cerveau qui nous sert à reconnaître les objets, la voie « dorsale » qui relie la vision au cortex moteur et commande nos gestes distingue précocement l’orientation des objets28. Pensez à la saisie d’une casserole : elle sera bien diffé-rente selon que le manche est orienté à droite ou à gauche. Le geste peut donc lever l’ambiguïté de l’orientation des lettres. Effectivement, l’expé-rience montre que de simples exercices de tracé des lettres avec le doigt améliorent considérable-ment l’apprentissage de la lecture29. Le geste d’écriture a également d’autres vertus. Il oriente l’enfant dans l’espace, en lui faisant bien comprendre que la chaîne de lettres doit être lue de gauche à droite. La reconnais-sance du geste joue également un rôle essentiel dans le déchiffrement de l’écriture manuscrite. Nous reconnaissons les caractères manuscrits, en partie, en reconstituant le geste qui les a en-gendrés. Une aire cérébrale distincte, dans la région précentrale gauche, code simultanément pour l’écriture et la lecture30.

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Pour toutes ces raisons, apprendre à écrire « dope » nos capacités de lecture.

À retenir• La confusion des lettres en miroir, comme b et d, est une propriété normale du système visuel des jeunes enfants avant qu’ils n’apprennent à lire.• Son désapprentissage demande des efforts.• La pratique du geste d’écriture accélère l’apprentissage de la lecture.

Comment le cerveau apprend-il à lire?

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Apprendre à lire

Devenir un lecteur rapide

Dans la première année d’école primaire, la lecture demande à l’enfant un immense effort d’attention. Déchiffrer les mots implique de passer en revue chacune des lettres dans le bon ordre, de la gauche vers la droite, sans en oublier une seule, tout en se souvenant de leurs corres-pondances avec les phonèmes et en les assem-blant en mémoire pour former un mot. Chaque mot est une énigme, un puzzle que l’enfant ne reconstitue qu’au prix de grands efforts. Le travail des lecteurs débutants se voit directement dans leur temps de lecture d’un mot. Celui-ci est très long et augmente massivement avec le nombre de lettres que contient le mot31. À ce stade, l’activité cérébrale recrute un réseau de régions cérébrales très étendu, qui déborde du réseau normal de la lecture chez l’adulte. Certaines de ces régions sont associées aux mouvements des yeux, d’autres à des processus génériques de mémoire et à l’attention32. Le réseau du langage oral, notamment les régions liées à l’articulation, est également massivement

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Comment le cerveau apprend-il à lire?

recruté. Au fur et à mesure que la lecture s’au-tomatise, la mobilisation de ces régions décroît. L’automatisation de la lecture est donc un objectif essentiel de l’apprentissage. Elle seule permet de libérer les aires génériques du cortex afin de les utiliser pour d’autres activités. L’automatisation de la lecture est un pro-cessus très progressif, qui s’étend sur plusieurs années33. Elle s’accompagne d’un passage d’un mode sériel à un mode parallèle de lecture. Au fil des années, le temps de lecture s’accélère et dépend de moins en moins du nombre de lettres que comprend le mot34. Ami lecteur, vous qui êtes certainement un adulte expert, vous mettez le même temps pour lire un mot de trois lettres qu’un mot de huit lettres35. Un cinquième de se-conde vous suffit à reconnaître un mot écrit. Cette performance remarquable, vous la devez aux neu-rones de votre « boîte aux lettres cérébrale » : tous travaillent en même temps sur différentes parties de la chaîne de lettres. Cet aspect étonnant de la lecture a longtemps fait croire que le cerveau se servait de la « forme globale » du mot, mais c’est une illusion36. En réalité, chacun des traits, cha-

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Apprendre à lire

cune des lettres sont analysés, mais chez le lecteur expert, des millions de neurones y sont consa-crés, et cette analyse se produit simultanément en chaque endroit du mot. Avec l’automatisation, d’autres facteurs com-mencent à influencer la lecture37. Les mots les plus fréquents sont reconnus plus vite que les mots rares ou que les néologismes. L’influence de ces facteurs indique que l’enfant commence à dévelop-per la seconde voie de la lecture, celle qui permet de passer directement de la chaîne de lettres au sens du mot, sans l’intermédiaire de la prononcia-tion (orale ou mentale). Un lecteur expert décom-pose automatiquement les mots en morphèmes (« rechuter » = re + chute + infinitif ) – à tel point qu’il applique inconsciemment cette stratégie à des mots inappropriés comme « regarder », qui n’a rien à voir avec « garder de nouveau »38 ! Le cerveau du lecteur expert file droit au sens. Comment faciliter l’automatisation de la lecture ? Avant tout, par une pratique quoti-dienne : l’expertise des adolescents en compré-hension des textes écrits dépend massivement de la fréquence et de l’intensité des lectures de l’enfance39. L’apprentissage est optimal lorsque

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Figure 11. Chez le lecteur débutant, la lecture est lente et sérielle : chaque mot, chaque syllabe, voire chaque lettre doivent être fixés du regard, et l’œil revient parfois en arrière. Chez le lecteur expert s’ins-talle une véritable expertise du regard : l’œil progresse rapidement, saute certains petits mots et s’oriente directement vers le centre des mots importants.

Lecteur débutant

Lecteur expert

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Apprendre à lire

l’on teste les enfants régulièrement, en n’hésitant pas à répéter les tests même sur des points qui sont déjà connus – cela renforce la mémoire40. Par ailleurs, il ne faut pas se contenter d’ensei-gner le décodage, car celui-ci n’est que le point de départ de la lecture. La morphologie du fran-çais, c’est-à-dire les racines et les terminaisons des mots, et les stratégies de compréhension des textes doivent également faire l’objet de cours structurés. L’apprentissage de toutes les diffi-cultés du français écrit doit donc continuer bien au-delà de l’école primaire.

À retenir• La lecture demande initialement un effort considérable qui mobilise toutes les ressources mentales de l’enfant.• L’automatisation de la lecture est indispensable pour libérer l’attention et la mémoire de travail.• La manière dont le temps de lecture varie avec le nombre de lettres permet de mesurer l’automatisation des compétences de l’enfant.• Une fois automatisée, la lecture devient parallèle, indépendante du nombre de lettres.• L’extraction automatique des morphèmes joue un rôle essentiel dans l’accès au sens.

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Figure 12. Avec l’automatisation de la lecture, une seconde voie de lecture se met en place : la voie directe qui mène de l’écriture au sens, sans nécessairement passer par la prononciation.

voie phonologique voie lexicale

Nom féminin

1.Tige fine d’acier

ayant un trou à une

extrémité, utilisée

en couture.

2. Fine tige

métallique creuse

utilisée pour

les piqûres.

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Apprendre à lire

Et la dyslexie ?

Certains enfants éprouvent des difficultés considérables à apprendre à lire. Tous ces mau-vais lecteurs sont-ils dyslexiques ? Non. Avant de parler de dyslexie, il faut s’assurer que l’enfant ne souffre pas d’un déficit sensoriel. Les enfants ne se plaignent guère, et la surdité de l’enfant reste trop souvent non détectée, de même que les troubles de la vision. Les spécialistes ne parlent de dyslexie que lorsque ces troubles périphé-riques sont écartés, de même qu’un déficit d’intelligence globale ou un mauvais accès à une éducation de qualité. La dyslexie est cependant bien une maladie réelle. Elle touche tous les milieux, même les plus favorisés. Elle touche également tous les pays, même si son impact pratique est plus évident dans les langues alphabétiques irrégulières telles que l’anglais et, dans une moindre mesure, le français41. C’est une maladie dont les prédispositions géné-tiques sont très claires : les frères et sœurs d’un en-fant dyslexique ont jusqu’à 50 % de risque d’être également touchés. Quatre gènes de vulnérabilité

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Figure 13. Dans la dyslexie, on observe parfois de petits amas de neurones qui ont mal migré et qui se concentrent dans les aires du langage parlé. C’est souvent une anomalie subtile du code pho-nologique qui, par contrecoup, empêche la lecture de se développer normalement dans les aires visuelles du cerveau.

Régions sous-activées dans la dyslexie

Représentation déficiente

des phonèmes

Développement difficile de la « boîte aux lettres du cerveau »

Multiples petites anomalies de

migration neuronaleCouches du cortex

II II I IIV V VI

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Apprendre à lire

ont été découverts, et leurs effets biologiques com-mencent à être connus42. La plupart affectent la mise en place précoce des circuits du cortex. Dans la seconde moitié de la grossesse, les neurones doi-vent « migrer » : les cellules se déplacent sur des distances considérables depuis leur zone de divi-sion pour former les couches successives de ma-tière grise du cortex cérébral. C’est une période de grande fragilité. Chez certains dyslexiques au moins, on voit des paquets de neurones qui ne sont jamais parvenus à leur destination et qui for-ment des îlots d’anomalie qui perturbent le cortex environnant. La plupart sont trop petits pour être détectés par une IRM anatomique standard. Ce-pendant, en regroupant les données de quelques dizaines d’enfants ou d’adultes, on parvient à mettre en évidence des surépaisseurs ou des amin-cissements du cortex43. Les connexions cérébrales sont également perturbées44. La chaîne complète qui finit par entraîner une dyslexie n’est pas parfaitement comprise et varie certainement selon les enfants. Chez de nombreux dyslexiques, ce sont les difficultés pho-nologiques qui dominent, et ce dès le plus jeune

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âge45. Le traitement fin du langage parlé peut être sévèrement altéré, par exemple dans un test d’écoute dans le bruit46. Chez d’autres enfants, il existerait également des déficits d’orienta-tion de l’attention spatiale47. D’une manière ou d’une autre, ces difficultés perturbent considé-rablement l’acquisition de la conscience pho-nologique, c’est-à-dire la prise de conscience, essentielle à la lecture, que les mots peuvent se décomposer en sons élémentaires. L’imagerie cérébrale montre que le lobe temporal gauche, siège des représentations phonologiques, ne s’active pas à son niveau normal48. En consé-quence, la région visuelle qui sert de « boîte aux lettres du cerveau » ne s’organise pas comme elle le devrait, selon une hiérarchie de détecteurs de lettres et de groupes de lettres49. Il n’existe pas de traitement curatif pour les anomalies neuronales qui sont au cœur de la dyslexie. Par contre, la rééducation intensive agit presque toujours avec succès. Lorsqu’ils sont bien pris en charge, à l’école, en orthophonie ou dans un centre référent, pratiquement tous les enfants dyslexiques peuvent apprendre à lire – même

Comment le cerveau apprend-il à lire?

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Apprendre à lire

s’ils ne liront peut-être jamais aussi vite que les autres. La dyslexie se situe à l’extrémité d’un continuum de difficulté de lecture50, et ce sont souvent les mêmes obstacles qui font trébucher les lecteurs débutants et les enfants dyslexiques. Il faut simplement faire preuve d’encore plus de patience pour leur apprendre à orienter leur attention vers les lettres, les sons élémentaires du langage et leurs correspondances. Le cerveau de l’enfant présente des capaci-tés d’apprentissage et de récupération bien plus vastes que celui de l’adulte. C’est pourquoi un entraînement intensif et répété peut faire des merveilles. L’imagerie cérébrale montre que l’amélioration des performances de lecture s’ac-compagne de l’activation partielle des régions normales de la lecture, mais également d’autres régions équivalentes situées dans l’hémisphère droit51. Plus les enfants à risque sont repérés tôt, plus ils peuvent bénéficier d’une interven-tion précoce et d’une prise en compte de leurs particularités dans le système scolaire52, qui leur évitera l’écueil de la dévalorisation.

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À retenir• La dyslexie est une anomalie neurobiologique précoce, souvent d’origine génétique.• Les enfants dyslexiques présentent une désorganisation et une sous-activation des régions du lobe temporal gauche qui servent à la lecture.• Cependant, un apprentissage patient et intensif des cor- respondances graphèmes-phonèmes permet presque tou- jours de compenser une grande partie du déficit.• Il faut toujours exclure une surdité ou un déficit visuel avant de parler de dyslexie.

Comment le cerveau apprend-il à lire?

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Apprendre à lire

La lecture en milieu défavorisé

Bien que l’apprentissage de la lecture soit un enjeu crucial pour notre société, au moins 10 à 15 % des élèves de sixième connaissent toujours de grandes difficultés de maîtrise de la langue écrite53. Le suivi de cohortes d’élèves au fil des années montre que la plupart de ces élèves en difficulté l’étaient déjà au cours pri-maire54. La grande majorité est issue de fa-milles de classe moyenne ou défavorisée. Une étude récente comprenant 1 062 élèves parisiens a montré que, dès la fin du cours préparatoire, de nombreux enfants issus de milieux défavori-sés présentent un retard de lecture (24 % en mi-lieu défavorisé, contre 3 % en milieu favorisé55). Comment l’expliquer ? De nombreux facteurs entrent en jeu. Les enfants de familles défavori-sées possèdent un vocabulaire oral plus restreint. Surtout, ils présentent des compétences réduites dans le domaine de la phonologie, cette capacité de distinguer et de manipuler les sons du lan-gage parlé dont on connaît le rôle prépondérant dans l’apprentissage de la lecture. Sans doute les

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jeux de langage, depuis le plus jeune âge, ont-ils été moins fréquents. De plus, chez certains enfants de familles migrantes, le contact avec la langue française ne se fait que tardivement, lors de l’entrée à l’école. Le cumul de ces facteurs avec un profil génétique à risque de troubles de la lecture peut entraîner une difficulté de lecture qui aurait sans doute été compensée dans un milieu familial plus porteur. En effet, deux indices sont associés à une augmentation des scores de lecture chez les en-fants défavorisés : le niveau d’éducation de la maman, suivi du nombre de livres à la maison. Ces deux facteurs reflètent la familiarité et l’ai-sance de la famille avec l’écrit, et la sensibilisa-tion précoce de l’enfant à la lecture. Fort heu-reusement, ce sont des éléments sur lesquels l’école peut influer, en accentuant la familiarité de l’enfant avec le livre et les jeux de langage. N’oublions pas que, même dans les milieux défavorisés, la maîtrise du code phonologique reste le facteur essentiel pour prédire le succès d’une lecture efficace, le second facteur étant les capacités d’attention de l’enfant.

Comment le cerveau apprend-il à lire?

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Apprendre à lire

Dans de nombreux pays, à partir du moment où un enfant est scolarisé dès le plus jeune âge, son origine sociale n’a qu’une influence modeste sur sa réussite scolaire. Hélas, l’étude internationale PISA montre que ce n’est pas le cas en France, où les enfants de la première et même de la deu-xième génération d’immigrants conservent un sévère handicap56. C’est pourquoi l’école doit s’intéresser tout particulièrement aux enfants issus de milieux défavorisés et de l’immigration. Ces enfants devraient recevoir un enseignement spécifique du français oral. Jeux de langage, cor-respondances entre lettres et sons, etc. : toutes les solutions énoncées plus haut s’appliquent d’autant mieux à ce groupe d’enfants. L’attention des enfants peut être augmentée par la pra-tique des jeux vidéo ou de la musique, qui ont des effets bénéfiques considérables en lecture et dans bien d’autres domaines57. L’éducation parentale58 et le prêt de livres à la maison peu-vent également jouer un rôle essentiel.

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À retenir• Les retards de lecture sont fréquents en milieu défavorisé, à cause de réelles difficultés dans l’apprentissage du code phonologique.• Les enfants défavorisés doivent faire l’objet d’efforts particuliers afin d’augmenter leur maîtrise du langage oral, leur vocabulaire, leur attention et leur envie de lire.• Un retard de lecture trop important nécessite l’aide de spécialistes en orthophonie, sans oublier le dépistage de troubles visuels et auditifs.

Comment le cerveau apprend-il à lire?

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Comme on vient de le voir, il existe au-jourd’hui une véritable science de la lecture. Les grands circuits cérébraux sont identifiés, leur mode opératoire commence à être connu, et il existe même des modèles schématiques de l’architecture neuronale qui reproduisent en détail de nombreux aspects du compor-tement de lecture et de son apprentissage59. Une petite mécanique neuronale, admirable d’efficacité, se cache derrière chaque lecteur. Peut-on, pour autant, en déduire une mé-thode optimale d’enseignement de la lecture du français ? Nous ne le croyons pas. Diverses stra-tégies éducatives demeurent compatibles avec nos connaissances de la lecture et du cerveau.

les grAnds principes de l’enseignement

de lA lecture

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Apprendre à lire

Chaque enfant doit bien entendu apprendre les correspondances entre graphèmes et phonèmes, et comprendre le ‘b-a, ba’, c’est-à-dire la manière dont on compose des syllabes et des mots à par-tir de ces briques élémentaires. Cependant, cette idée peut également s’inculquer, dans le sens in-verse, en disséquant les mots en morphèmes, syl-labes, graphèmes et lettres, afin d’en reconstituer la prononciation et le sens. Ainsi, les approches analytiques (qui partent du mot pour le décom-poser en lettres) semblent tout aussi valables que les approches synthétiques (qui partent des lettres pour composer des syllabes et des mots) – à condition, bien entendu, que l’enfant prête bien attention aux graphèmes et aux phonèmes, et non pas à la globalité du mot. Notre objectif est donc modeste : non pas introduire « la » méthode scientifique de lecture, mais plutôt dresser une liste des principes éducatifs qui, lorsqu’ils sont systématiquement appliqués, facilitent la découverte de la lecture, comme l’ont montré des dizaines d’études expéri-mentales60. Ces idées n’ont rien de révolutionnaire, et bien des enseignants les jugeront naturelles.

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L’Observatoire national de la lecture les a maintes fois soulignées dans ses publications, étagées sur plus d’une décennie61. Cependant, l’expérience montre qu’elles ne vont pas tou-jours de soi pour les enseignants. Adultes, nous avons tellement automatisé la lecture que nous n’avons plus conscience des difficultés qu’elle présente aux jeunes enfants. Une liste de prin-cipes peut aider à ne pas nous égarer. Prenons conscience de chaque étape, planifions chaque exercice en gardant toujours à l’esprit l’impact qu’il aura sur le cerveau du jeune lecteur. Quelques dernières précisions. Notre liste de principes n’est sans doute pas exhaustive. Bien qu’ils soient numérotés, leur ordre importe peu : tous sont importants ! Nous les énonçons ici pour une langue bien particulière, le fran-çais, pour lequel un travail statistique consi-dérable a conduit à identifier chaque difficulté de lecture62. Ce travail de recherche préalable est indispensable pour qui souhaiterait adapter nos propositions à d’autres langues. Nous nous concentrons sur les toutes premières étapes de l’apprentissage, principalement au cours prépa-

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Apprendre à lire

ratoire, année au cours de laquelle le décodage joue un rôle fondamental – mais bien entendu, cela ne doit pas conduire à négliger la compré-hension des textes et le plaisir de la lecture, qui seuls motiveront l’enfant à poursuivre ses efforts au cours des années ultérieures. Enfin, l’ap-plication de nos principes laisse énormément de place à l’imagination des enseignants. Le choix des exemples, du matériel pédagogique, des métaphores, et même, en partie, de l’ordre des règles à enseigner, est laissé à l’apprécia-tion de l’enseignant. Bien que nous donnions quelques exemples, nous n’avons pas l’intention de recommander un manuel ou une méthode idéale, mais plutôt de proposer une grille selon laquelle les différentes stratégies d’enseigne-ment peuvent être comparées et améliorées.

1. Principe d’enseignement explicite du code alphabétique

L’alphabet du français fonctionne selon des règles simples : les lettres s’assemblent de gauche à droite, et leurs combinaisons transcrivent les

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sons du langage (ou phonèmes) selon des règles simples de correspondance graphème-phonème. Aucun de ces éléments ne va de soi pour l’enfant qui ne sait pas encore lire. La recherche montre clairement que l’on doit les enseigner explicite-ment, en procédant point par point :

a. Correspondance graphème-phonème

C’est l’idée la plus élémentaire, mais également celle qui pose le plus de difficultés : chaque lettre ou groupe de lettres correspond à un phonème. Pour les voyelles, c’est assez simple : le phonème s’entend, et il correspond directement à une lettre (a, e, i, o, u) ou à un groupe de lettres (ou, on, etc.). Pour les consonnes, tout se complique, car les phonèmes ne s’entendent pas vraiment. Seuls certains, comme ‘f ’ ou ‘ch’ peuvent se prononcer de manière isolée. Les autres se devinent plus qu’ils ne s’entendent, dans le geste particulier que fait la bouche pour prononcer par exemple ‘pa’, ‘pi’, ‘ap’, ‘ip’... L’émergence d’une représentation explicite des phonèmes, l’idée même qu’il y a le même son dans ‘ap’ et ‘pa’, est une vraie révolution mentale pour le cerveau de l’enfant. C’est l’apprentissage de

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Apprendre à lire

l’alphabet, l’existence de la lettre p, qui stabilise cet apprentissage. Ainsi, chacune des règles de correspondance graphème-phonème doit s’ap-prendre, une par une (la simple exposition à des mots écrits ne suffit pas à les deviner). Rappelons également que seule la maîtrise des règles de décodage permettra de lire des mots nouveaux.

b. Combinatoire des lettres ou des graphèmes

Sitôt les associations graphèmes-phonèmes apprises sur quelques voyelles et quelques consonnes, l’enfant doit comprendre que ces lettres peuvent se combiner pour former des syllabes. Il faut lui montrer que, lorsqu’on les arrange entre elles, leur prononciation ne change généralement pas mais forme des combinaisons nouvelles. On introduira donc chaque nouveau graphème dans de multiples combinaisons, en montrant comment une même consonne, com-binée à différentes voyelles, en modifie la pro-nonciation (‘la’, ‘lé’, ‘li’, ‘lo’, ‘lu’), et inversement (‘la’, ‘ra’, ‘ma’, etc.).

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Figure 14. Le décryptage du code alphabétique nécessite de com-prendre comment les lettres se combinent entre elles, dans un ordre bien précis, pour former des syllabes.

la / al ma / am ou / uo

lé / él pa / ap oi / io

li / il ra / ar ai / ia

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Apprendre à lire

c. Mobilité des lettres ou des graphèmes

Autre idée simple, mais profonde : le dépla-cement des lettres (ou des graphèmes) change la prononciation de la chaîne de caractères. L’en-fant doit comprendre que la lettre p est une unité mobile qui peut former ‘pa’, mais aussi ‘pi’, ‘po’, ou encore ‘ip’ par un simple changement d’ordre. Cette prise de conscience peut être facilitée par l’utilisation de lettres ou de graphèmes mobiles (aimantés, découpés, ou imprimés sur des cartons).

d. Correspondance spatio-temporelle

L’enfant doit encore découvrir qu’on lit le français de gauche à droite, c’est-à-dire que l’ordre spatial des lettres correspond sys-tématiquement à l’ordre temporel des pho-nèmes. Parcourir ainsi les lettres ne va pas de soi. L’enfant doit dompter son regard et son attention spatiale afin de les coordonner fi-nement avec le processus d’assemblage des phonèmes en syllabes. D’où l’importance de faire alterner les structures consonne-voyelle et voyelle-consonne, en montrant à l’enfant qu’elles se prononcent de façon différente

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Figure 15. La pratique régulière du geste d’écriture facilite l’appren-tissage de la lecture. Le code gestuel aide à briser la symétrie des lettres en miroir et renforce la mémoire des lettres.

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Apprendre à lire

(li ≠ il). Pour les enfants qui ont des difficultés d’attention ou de motricité, l’utilisation d’un pointeur ou d’une fenêtre coulissante, qui ne laisse voir qu’une partie du mot et que l’on dé-voile toujours de gauche à droite, pourra s’avérer très utile.

e. Discrimination en miroir

L’enfant prélecteur ne comprend pas néces-sairement que les lettres en miroir (b et d, p et q) sont distinctes : son système visuel les traite comme des objets identiques, mais vus sous des angles différents. Le pire est que leur prononcia-tion n’est pas très différente non plus, et qu’un lecteur débutant ne l’entend pas forcément bien. Il faut donc lui enseigner explicitement à « briser cette symétrie », en lui expliquant que ces lettres en miroir sont distinctes, qu’elles s’écrivent avec des gestes différents et se prononcent différem-ment. Combiner la prononciation et le tracé de la lettre s’avère une excellente méthode.

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2. Principe de progression rationnelle

Notre deuxième grand principe concerne l’ordre d’apprentissage des différents graphèmes, c’est-à-dire les lettres et les combinaisons de lettres qui correspondent aux phonèmes. L’ana-lyse de la langue française montre que certains graphèmes sont prioritaires, soit parce qu’ils sont très fréquents (beaucoup de mots font appel à eux), ou bien parce que leur correspondance avec un phonème est absolument régulière (ils sont toujours prononcés de la même ma-nière). Il est donc logique de les apprendre en premier. Soulignons qu’il ne s’agit pas forcé-ment de lettres isolées : le groupe de lettres ou, par exemple, est l’un des plus faciles du français. D’autres graphèmes, au contraire, sont plus rares, plus complexes, moins régu-liers. Pensons à la lettre c, par exemple, dont la prononciation est tantôt dure (dans « car »), tantôt douce (dans « cet »), tantôt modifiée par une autre lettre (dans « chat »). Ces difficultés ne doivent pas être abordées trop tôt, sous peine de semer la confusion dans l’esprit de l’enfant.

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Apprendre à lire

Ainsi, les graphèmes, c’est-à-dire les lettres ou groupes de lettres qui codent un phonème, doivent être introduits un par un, selon une progression rationnelle. Nous pro-posons une telle progression en appendice, accompagnée d’une liste de mots qui peuvent servir d’exemple à chaque étape de l’appren-tissage. Notre progression pédagogique n’est sûrement pas la seule, mais elle résulte d’un bon compromis entre plusieurs paramètres linguistiques qui influencent la difficulté de la lecture. Examinons-les ensemble :

a. Régularité des relations graphèmes-phonèmes

Il faut enseigner les correspondances graphèmes-phonèmes en fonction de leur régu- larité statistique : les correspondances les plus régulières doivent être apprises en premier. Par exemple, la lettre v se prononce presque toujours ‘v’, tandis que la lettre g se prononce tantôt ‘j’ et tantôt ‘g’ : la lettre v sera donc introduite avant la lettre g. Rappelons que l’enseignement explicite des correspondances graphèmes-pho-nèmes est celui qui facilite le plus l’apprentissage

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de la lecture pour tous les enfants. Les enfants qui maîtrisent précocement les correspondances régulières apprennent ensuite plus facile-ment les correspondances moins régulières, telles que les règles contextuelles qui régissent la prononciation de c et de g, et enfin les irrégu-larités du système.

b. Fréquence des graphèmes et des phonèmes

Un second facteur est la fréquence d’usage : les graphèmes les plus fréquents, ceux qui per-mettent de lire le plus grand nombre de mots, seront introduits en premier.

c. Facilité de prononciation des consonnes isolées

Pour faciliter la compréhension de la règle fondamentale de l’alphabet (chaque lettre ou suite de lettres correspond à un phonème), nous proposons d’introduire en premier les consonnes « continues » qui peuvent pratiquement se pro-noncer seules, en l’absence de voyelle. En fran-çais, il s’agit des consonnes liquides comme ‘l’ ou ‘r’, des nasales comme ‘m’ ou ‘n’, et des frica-tives comme ‘f ’, ‘v’, ‘j’, ‘ch’, ‘z’ et ‘s’. Ces consonnes

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Apprendre à lire

continues seront introduites avant les consonnes occlusives comme ‘p’, ‘t’, ‘k’, ‘b’, ‘d’, ou ‘g’. En effet, il est relativement facile d’expliquer à un enfant que f suivie de a se lit /fa/ : en articulant très lente-ment, on entend littéralement le son ‘fff ’ suivi du ‘a’. Il est plus difficile d’expliquer, de la même ma-nière, que p suivie de i se lit ‘pi’ (surtout pas ‘péi’ !).

d. Complexité de la structure syllabique

Il est difficile pour l’enfant de lire les syl-labes qui comportent des groupes de consonnes consécutives, comme les groupes str et ct du mot « strict ». C’est pourquoi, au cours de l’ap-prentissage de la lecture, on travaillera d’abord les structures consonne-voyelle (CV) et voyelle-consonne (VC), qui sont les plus simples. Les structures consonne-voyelle-consonne (CVC) viendront ensuite, et enfin celles qui compren-nent des blocs de consonnes (CCV, CCCV, etc.).

e. Inséparabilité des graphèmes complexes

Certains phonèmes s’écrivent à l’aide de graphèmes dits complexes, car ils sont composés de plusieurs lettres (par exemple, ou, an, au, eau,

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Figure 16. Les graphèmes complexes, composés de plusieurs lettres, gagnent à ne pas être séparés – l’enfant comprendra ainsi plus rapi-dement qu’ils correspondent à un seul son de parole.

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Apprendre à lire

folie gris blanc froid plomb rat faux haut monsieur automne loup outil clef bourg poing camp

ch, qu, etc.). Il en existe de très fréquents qui doivent être introduits relativement tôt dans la progression, en particulier ceux qui sont les seuls permettant de transcrire un phonème (ou, ch, an, on, un, etc.). Cependant, l’enfant doit comprendre que les graphèmes sont des unités purement conventionnelles qui se lisent comme un tout et qui échappent aux règles normales de l’assemblage. b + a fait ‘ba’, mais a + n fait ‘an’ et non pas ‘ane’. Pour faciliter la mémorisation de ce qui peut apparaître à l’enfant comme une contradiction, on évitera de présenter ces gra-phèmes sous la forme de deux lettres indépen-dantes. Au contraire, il peut être utile de les pré-senter sous la forme d’une seule entité inséparable (un même carton ou une même couleur dans un livre, ou encore un même espace dans un domino de lettres).

f. Lettres muettes

La présence de lettres muettes (par exemple le e de « fée ») est l’une des difficultés particulières et fréquentes du français, qu’il faut donc ensei-gner précocement. Il est tentant de les omettre

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Figure 17. Les lettres muettes sont une vraie difficulté du français. En les imprimant en grisé, on apprend à l’enfant qu’il peut les négliger lorsqu’il lit à haute voix.

folie gris blanc froid plomb rat faux haut monsieur automne loup outil clef bourg poing camp

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Apprendre à lire

purement et simplement, en écrivant par exemple « une fé » ou « peti », mais ce choix serait catas-trophique, car il conduirait à apprendre à l’enfant une orthographe fausse (voir principe 5b ci-après63). De plus, certaines lettres muettes – mais hélas pas toutes – donnent des indica-tions précieuses sur la morphologie des mots, que l’on peut et doit enseigner à l’enfant. Ain-si, le e de « amie » indique le féminin… mais hélas pas celui de « lycée ». De même le s de « amis » signale un pluriel, mais pas celui du mot « mais ». Ou encore, le d de « grand » indique comment former le féminin « grande », tandis que celui d’« épinard » n’est là que pour com-pliquer la dictée ! Pour mieux faire comprendre à l’enfant que ces lettres ne sont pas prononcées, on peut les imprimer dans une couleur ou une police particulière (par exemple en gris clair ou en lettres blanches avec de fins contours noirs).

g. Fréquence des mots

Ne soyons pas des extrémistes du ‘b-a, ba’ ou de la régularité orthographique ! Pour que l’enfant puisse lire rapidement de petits textes qui ont un

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sens, enseignons-lui sans tarder certains mots de haute fréquence, même s’ils ne sont pas réguliers. En effet, les mots irréguliers les plus fréquents sont des « mots outils » tels que les articles (les, des, aux…), les pronoms (nous, ils, mes, tes…), les auxiliaires (suis, es, est, as…), et d’autres termes utilisés pour indiquer des relations entre mots (à, vers, dans, sans, avec, quand, alors, après, avant, mais…). Ils comprennent souvent des gra-phèmes à prononciation exceptionnelle, comme es dans « mes », « tes », « ses », « les »… ou encore eu de « j’ai eu ». Ces mots outils, tout comme un petit nombre de mots du lexique qui sont irrégu-liers mais très fréquents (six, dix, sept, deuxième, automne, femme, compte, œuf, un fils…) peu-vent être appris par cœur au cours de la pre-mière année de lecture. Ils peuvent être présentés sur des cartes spéciales ou entrer dans un petit dictionnaire de mots à apprendre par cœur.

h. Rôle des morphèmes

L’accès au sens s’appuie beaucoup sur la dé-composition en morphèmes, les plus petites uni-tés de sens que contiennent les mots (par exemple

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Figure 18. Comprendre la morphologie des mots est un aspect impor-tant de la lecture du français. Les racines des mots, leurs préfixes et leurs suffixes forment un jeu de construction fascinant pour l’enfant, qui lui permet de comprendre et de construire des mots nouveaux.

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« orthophonistes » = ortho + phon + iste + s). Une fois appris le décodage graphème-phonème, un bon programme d’apprentissage de la lecture devrait enseigner explicitement les morphèmes du français et leur combinatoire, en prenant à nouveau en compte leur fréquence et leur degré de régularité statistique. On le fait souvent pour les terminaisons grammaticales des verbes et des noms, mais trop rarement pour les préfixes, les suffixes et les racines. L’étymologie du français est pourtant passionnante et instructive !

3. Principe d’apprentissage actif associant lecture et écriture

Troisième grand principe : associer les acti-vités de lecture et d’écriture. En effet, apprendre à composer des mots et à les écrire facilite l’apprentissage de la lecture à plusieurs niveaux. D’abord, il existe en français une difficulté particulière d’orthographe, liée à l’extrême irrégularité des correspondances phonèmes-graphèmes qui sont utilisées pour écrire. Dans le sens inverse, depuis les graphèmes vers les pho-

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Apprendre à lire

nèmes (lecture), l’orthographe du français est certes irrégulière, mais son apprentissage reste relativement simple : mis à part quelques mots très particuliers et fréquents (sept, dix, est…), il suffit souvent que l’enfant apprenne à prêter attention aux lettres muettes et à des groupes de lettres suffisamment grands (eau, -tion). Pour l’écriture, en revanche, notre langue est ex-trêmement opaque et comparable en complexi-té à l’anglais. Ainsi, un mot comme « auto » ne peut se lire que d’une seule façon alors qu’il pourrait s’écrire otau, eauto, otto… Si un enfant maîtrise le codage des mots, et le démontre en écrivant un mot sous dictée, cela signifie qu’il a compris la totalité des règles de l’écriture alpha-bétique, donc qu’il sait lire. De plus, comme nous l’avons déjà souligné, diverses recherches démontrent que la lecture s’améliore lorsque l’enfant pratique l’exploration active des lettres par le toucher et apprend le geste d’écriture (le tracé même de la lettre). En ajoutant un code moteur au répertoire mental des lettres, ces activités facilitent la mémoire des correspon-dances graphèmes-phonèmes et réduisent les res-

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semblances entre des lettres comme b et d qui, sinon, risqueraient d’être confondues. Pour toutes ces raisons, des activités d’écri-ture et de composition de mots, à la main ou à l’aide de lettres mobiles (que ce soit sous dic-tée orale ou à partir d’images), où l’enfant joue un rôle actif et créatif, devraient être pratiquées tous les jours, en association très étroite avec les activités de lecture. Il importe toutefois d’éviter que, via ces activités, l’enfant construise des mots mal orthographiés (par exemple, anfan), ce qui le conduirait à mémoriser implicitement une orthographe fausse (voir ci-dessous le principe 5, et plus particulièrement 5b). C’est pourquoi les exercices de composition et de dictée doivent initialement s’appuyer sur des mots réguliers (« table », « chou », etc. – surtout pas « femme » ou « automne » !). Il faudra également corriger les erreurs de régularisation phonologique (« auto » écrit « oto »). L’enseignant doit expliquer l’exis-tence d’une orthographe conventionnelle et la différence entre bonne et mauvaise erreur (selon que l’enfant a ou non utilisé correcte-

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Apprendre à lire

ment les règles de correspondances graphèmes-phonèmes). Des échanges dans la classe sur ces questions doivent aider l’enfant à comprendre les conventions de l’écriture du français.

4. Principe de transfert de l’explicite vers l’implicite

Quatrième principe : faciliter l’automati-sation rapide de la lecture, c’est-à-dire le pas-sage d’une lecture lente, consciente, avec effort, à une lecture fluide et rapide. Au début, l’enfant enregistre et applique les correspondances gra-phèmes-phonèmes sous forme de règles expli-cites. Il retient, dans sa mémoire consciente, que qu se prononce ‘k’, oi ‘wa’, et ainsi de suite, et il applique ces connaissances une par une lorsqu’il lit un mot tel que « quoi ». Par la suite, la ren-contre quotidienne de nombreux exemples rend le décodage de plus en plus routinier et fondé sur des connaissances implicites. Le transfert de la mémoire explicite vers la mémoire impli-cite joue un rôle essentiel, car il libère l’esprit de l’enfant. Lorsque la lecture devient fluide et

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Figure 19. L’automatisation est essentielle à la lecture fluide. Pour le lecteur débutant, le décodage explicite de chaque syllabe demande un effort considérable d’attention (que nous simulons ici en modifiant l'orthographe des mots). Chez le lecteur expert, lorsque la lecture devient rapide et implicite, les ressources mentales sont libérées pour réfléchir au sens du texte.

Marcel Proust, Sur la lecture

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Apprendre à lire

automatique, l’enfant cesse de se concentrer sur le décodage et peut mieux réfléchir au sens du texte. Avec l’automatisation, les règles et leurs contre-exemples s’intègrent dans un seul sys-tème de lecture rapide, efficace et non conscient. L’enseignement de la lecture doit donc prendre en compte deux étapes distinctes :1. Une phase d’enseignement explicite, essen-tiellement la première année, où l’enfant ap-prend les règles de décodage des mots écrits, comme expliqué plus haut.2. Une phase d’apprentissage implicite, qui s’étend sur plusieurs années, où l’enfant internalise et automatise ces règles. Cette phase débute rapidement, mais son efficacité dépend avant tout de la fréquence et de l’intensité des lectures64. Les parents et les enseignants doivent donc entourer l’enfant d’un environnement propice : petites lectures quotidiennes, visites en bibliothèques, exercices oraux ou écrits, comptes rendus de lectures, etc. La création systématique de mini-bibliothèques dans les classes serait une excellente chose, afin que même les plus jeunes enfants prennent l’habitude d’emprunter et de

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lire au moins un petit livre par semaine. Faire la lecture aux enfants tous les soirs est également une excellente tradition : elle instaure un climat familial dans lequel l’automatisation de la lec-ture se produit tout naturellement.

5. Principe de choix rationnel des exemples et des exercices

Cinquième principe : les exemples et les exercices qui sont proposés à l’enfant doi-vent être sélectionnés avec le plus grand soin, en fonction de critères rationnels, en harmo-nie avec le niveau de l’enfant. En effet, l’en-fant s’appuie sur l’ensemble des situations qu’il rencontre pour en inférer ce qu’il pense être la règle ou la réponse attendue de l’ensei-gnant. Il faut donc choisir très soigneusement les mots qui lui sont présentés afin de facili-ter sa compréhension des règles de lecture et d’éviter de l’induire en erreur.

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Apprendre à lire

Voici quelques règles simples :

a. Concordance avec l’enseignement

Au moins au cours des premières leçons, il faut éviter de proposer des mots qui font appel à des associations entre graphèmes et phonèmes qui n’ont pas encore été apprises. Comment l’enfant pourrait-il les lire ? Cela l’inciterait à deviner plutôt qu’à décoder. Au cours des pre-mières leçons, tous les mots doivent donc être soigneusement choisis afin de ne comporter que des combinaisons de graphèmes déjà appris. De même, toujours pour les premières leçons, on évitera de présenter des mots irréguliers, à l’exception des plus fréquents (voir le principe 2g).

b. Proscription des erreurs

C’est une règle très facile à retenir : ne jamais présenter de mots erronés ou mal orthographiés. L’enfant finirait par mémoriser ces erreurs. Dès que possible, les exemples choisis feront donc appel à de vrais mots du français ou, au début de l’apprentissage, à des syllabes fréquentes. On peut, à la rigueur, utiliser des « mots tor-

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dus » pour faire comprendre de subtiles diffé-rences entre un vrai mot et un mot inventé qui ne diffère que peu sur le plan sonore ou visuel (par exemple, « boule » ou « doule » pour faire comprendre la différence entre les lettres en mi-roir) –, mais, même dans ce cas, il est souvent possible de choisir de vrais mots (par exemple, « balle » ou « dalle »).

c. Distinction entre le nom et le son des lettres

La connaissance du nom conventionnel des lettres (‘a’, ‘bé’, ‘cé’, ‘dé’, ‘euh’, ‘èf ’…) est un signe de précocité de l’enfant, qui prédit l’apprentis-sage de la lecture. Toutefois, cette connaissance peut gêner l’enfant quand il commence à ap-prendre à lire : en effet p suivi de i se lit ‘pi’ et non ‘péi’. C’est pourquoi, au cours des premières séances d’enseignement consacrées à l’appren-tissage du code, il faut distinguer clairement le nom des lettres du son des lettres : le son que fait la lettre f dans un mot est ‘fff ’ et non ‘ef ’.

Les grands principes de l’enseignement de la lecture

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Apprendre à lire

d. Variété des exemples et des exercices

Les enfants en difficulté adoptent parfois des stratégies qui se substituent à la lecture au-thentique, telle que la mémorisation par cœur des pages des manuels. C’est pourquoi l’en-seignant doit éviter de s’appuyer sur quelques posters figés ou sur quelques pages d’exemples stéréotypés, dont l’enfant aura vite fait d’ap-prendre par cœur la disposition et le contenu. Chaque nouvelle leçon de lecture doit s’accom-pagner d’une variété de nouveaux exemples, présentés dans un ordre toujours différent.

6. Principe d’engagement actif, d’attention et de plaisir

Ce sixième principe, qui va bien au-delà du domaine de la lecture, concerne les facteurs qui déterminent la vitesse de l’apprentissage. Les recherches en neurosciences de l’appren-tissage ont dégagé quelques règles simples qui modulent la vitesse et la force de la rétention. Au moins trois facteurs jouent un rôle essentiel :

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• L’engagement actif de l’enfant : un organisme passif n’apprend que peu ou pas du tout. Pour apprendre rapidement, l’enfant doit être sollicité, engagé, actif. Les connaissances actuelles prédisent que l’apprentissage est le plus efficace lorsque l’enfant, sollicité par une question ou un exercice, essaie de générer de lui-même une réponse (à haute voix ou men-talement). S’il reçoit un retour immédiat sur la pertinence de sa réponse, il peut utiliser le signal d’erreur, issu de la comparaison entre sa réponse et la correction proposée par l’enseignant, pour se corriger et progresser. • L’attention : faire attention à un aspect du monde extérieur amplifie massivement l’ac-tivation cérébrale qu’il évoque. Lorsqu’elle est orientée vers le bon niveau de codage de ce qui doit être appris, l’attention accélère l’apprentis-sage. Apprendre, c’est aussi apprendre à faire attention. • Le plaisir : l’apprentissage est facilité lorsque l’enfant est récompensé de ses efforts. Aucun enfant n’est insensible aux récompenses matérielles ni aux bonnes notes. Cependant,

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Apprendre à lire

le regard des autres est une motivation plus importante encore. Le sentiment d’être appré-cié ou admiré, la conscience que l’enfant a de progresser, de réussir quelque chose qui lui parais-sait difficile, apportent leur propre récompense. En bref, l’enseignant doit proposer un contexte motivant qui fasse que l’enfant soit actif, trouve du plaisir à apprendre, se sente autorisé à faire des erreurs, mais soit rapide-ment corrigé et récompensé de ses efforts. Les activités doivent être ludiques et faire appel, par exemple, à des jeux de rimes, des comptines, des « mots tordus », etc. Elles doivent égale-ment stimuler la participation et la créativité de l’enfant. Tout doit être mis en œuvre afin de concentrer l’attention sur le bon niveau de représentation du langage parlé et écrit : sur le plan auditif, l’écoute attentive des phonèmes, des rimes et des syllabes ; et sur le plan visuel, non pas la forme globale du mot, mais les gra-phèmes et les morphèmes qui le composent, de gauche à droite. Enfin, donnons aux enfants la chance de se tromper. Ils doivent comprendre que l’er-

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reur n’a rien de grave, mais qu’elle fait par-tie intégrante du processus d’apprentissage. Cependant, détrompons-les rapidement en cas d’erreur – sans les stigmatiser. Les mauvaises notes systématiques, connotations péjoratives (« nul ») et autres interactions sociales humi-liantes pour l’enfant sont contre-productives aussi bien à court qu’à long terme. Rempla-çons-les par une adaptation systématique des exercices au niveau de l’enfant – c’est l’objet de notre septième et dernier principe.

7. Principe d’adaptation au niveau de l’enfant

L’approche rationnelle que nous propo-sons ne doit pas être suivie de façon mécanique. Nous ne pourrions pas imaginer pire ensei-gnement de la lecture qu’un cours magistral où l’enseignant parcourrait jour après jour les pages d’un manuel sans se préoccuper de savoir si les élèves suivent. Le bon enseignant est celui qui propose, jour après jour, des défis adaptés au ni-veau des enfants, et qui les entraîne en douceur au-delà de leurs connaissances actuelles. C’est

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Apprendre à lire

à ce prix que l’enfant reste acteur de son propre apprentissage, stimulé mais pas découragé, avec toujours le sentiment de progresser. La stratégie que nous préconisons repose donc sur l’adaptation permanente des exercices et de la progression pédagogique au niveau et aux besoins des enfants. Si tel enfant meurt d’envie de lire un mot compliqué, pourquoi ne pas lui expliquer dès maintenant plutôt que dans trois mois ? À condition de prendre le temps de lui donner, rationnellement, toutes les explications dont il a besoin, en suivant les principes énon-cés plus haut. À l’inverse, si les enfants n’ont pas compris comment la combinaison d’une consonne et d’une voyelle donne une syllabe, n’allons pas plus loin et concentrons-nous sur cette difficulté centrale, en variant les exemples. L’évaluation régulière des compétences est indispensable pour que l’enseignant puisse ajus-ter son enseignement. De petits tests suffisent à mesurer, semaine après semaine, les progrès des enfants, et à diagnostiquer les difficultés qu’ils rencontrent. La recherche en psychologie expérimentale démontre que l’enfant lui-même

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est le premier bénéficiaire de ces évaluations65 : il progresse en se rendant compte, par lui-même, de ce qu’il ne sait pas : c’est l’auto-évaluation, préalable indispensable à un apprentissage autonome, où l’enfant lui-même choisit d’ap-profondir les sujets qu’il ne maîtrise pas. On objectera, à juste titre, qu’il n’est pas facile de mettre en œuvre ces idées lorsque l’enseignant doit faire face à une classe nom-breuse et hétérogène. Le travail en petit groupe est certes idéal. Cependant, souvenons-nous que la classe entière peut bénéficier de tra-vaux collectifs destinés aux élèves moins avan-cés – la répétition est la clé de la routinisa-tion. Une autre solution passe par l’autonomie des enfants. Dans certaines écoles inspirées par Maria Montessori, certaines heures sont consacrées au choix par chaque enfant d’exer-cices individuels qu’il réalise ensuite seul, à son propre rythme. Le fait de se fixer soi-même, chaque semaine, des objectifs ambitieux, constitue déjà une excellente pédagogie. Enfin, toute école digne de ce nom devrait réserver des périodes spécifiques au soutien individuel des

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enfants en difficulté. Leur rattrapage maintient la cohésion de la classe et garantit donc la pos-sibilité même de maintenir une pédagogie de groupe, tout au long de l’année.

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Il manque encore à notre liste un principe essentiel, ou plutôt un anti-principe : toutes les règles pédagogiques que nous proposons ne sont que des hypothèses de travail, que l’ex-périmentation seule peut valider ou réfuter. Bien entendu, elles s’appuient sur de solides fondations : une compréhension croissante des mécanismes cérébraux de la lecture et des fac-teurs qui affectent son apprentissage, ainsi qu’un ensemble d’études expérimentales, principale-ment anglo-saxonnes, qui en ont testé l’effica-cité chez l’enfant. Toutefois, ces principes doi-vent encore être soumis à une mesure objective dans les classes françaises. Leur mise en œuvre

l’ÉducAtion FondÉe sur lA preuve

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Apprendre à lire

à grande échelle n’est peut-être pas aussi simple qu’il y paraît. L’expérimentation dans les classes est essentielle afin d’améliorer, petit à petit, l’en-seignement de la lecture pour tous les enfants.

L’importance de l’expérimentation

Le concept d’expérimentation est l’une des plus belles idées que les scientifiques peuvent apporter à l’éducation. L’enseignement doit cesser d’être soumis aux vents et aux marées des changements politiques. Trop souvent, dans le domaine éducatif, notre intuition nous trompe. Le seul souci de bien faire, de s’engager dans une démarche pédagogique, d’être enthousiaste et à l’écoute des enfants ne constitue pas un cri-tère suffisant d’efficacité. On peut se tromper en toute bonne foi et avec les meilleurs raisons du monde. Il faut donc recourir à l’expérimen-tation afin de vérifier, empiriquement, que le principe éducatif que l’on croit juste fonctionne effectivement en pratique. Seule la comparai-son rigoureuse de deux groupes d’enfants dont l’enseignement ne diffère que sur un seul point

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permet de certifier que ce facteur a un impact sur l’apprentissage. Chaque réforme, avant son introduction, devrait donc faire l’objet de discussions et d’ex-périmentations aussi rigoureuses que s’il s’agis-sait d’un nouveau médicament. Un concept inté-ressant est apparu voici une douzaine d’années : celui d’éducation fondée sur la preuve (evidence-based education66). Comme en médecine, il s’agit de vérifier l’effet des pratiques éducatives sur les scores de lecture, par la comparaison systé-matique de groupes d’enfants qui reçoivent des enseignements différents. Des tests standardi-sés, recueillis avant et après l’intervention par des psychologues qui ne sont pas informés du groupe auquel appartient l’enfant, permettent d’évaluer objectivement les progrès accomplis. Un suivi à plus long terme est également sou-haitable, car de nombreuses méthodes pédago-giques n’entraînent hélas qu’un bénéfice tempo-raire. Enfin, l’imagerie cérébrale est devenue un outil de choix afin d’examiner si l’intervention présente l’effet escompté sur les régions appro-priées du cerveau.

L’éducation fondée sur la preuve

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Nous n’aurions pas écrit ce livre si des di-zaines de recherches de ce type n’avaient conduit à des conclusions solides et qui valident bon nombre des principes que nous avons énon-cés67. Oui, l’enseignement de la phonologie et des correspondances graphème-phonème est le moyen le plus efficace d’apprendre à lire. Il conduit à des avancées plus rapides que d’autres stratégies éducatives qui n’attirent pas l’attention des enfants sur les lettres et les sons. L’analyse de mots en lettres est d’ailleurs tout aussi utile que l’assemblage des lettres en mots – le fameux ‘b-a, ba’ – et, chez les enfants plus âgés, il se pourrait que ses effets soient plus di-rects et plus durables68. L’expérimentation dé-montre également l’importance d’apprendre à tracer les lettres : la maîtrise du geste d’écriture démultiplie l’efficacité d’une intervention fon-dée sur l’entraînement phonologique69. La pra-tique de la lecture à voix haute, qui permet de corriger immédiatement les erreurs de l’enfant, ainsi que l’enrichissement du vocabulaire, jouent également un rôle important. En revanche, d’autres pratiques éducatives, telles que la lec-

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ture de livres à l’enfant, même si elles renforcent certainement l’envie de lire, n’ont pas un impact aussi fort sur la capacité de lire en elle-même70. Sur le plan cérébral, les neuropédiatres Bennett et Sally Shaywitz ont montré l’efficacité d’une intervention conçue par les chercheurs et fondée sur l’entraînement phonologique et l’at-tention portée aux correspondances graphèmes-phonèmes71. Après une année de rééducation, les scores de lecture d’enfants dyslexiques s’amélio-raient nettement. Sans rejoindre la normale, leur score dépassait celui d’enfants qui suivaient des séances classiques d’orthophonie et de soutien scolaire. Surtout, le réseau cérébral de la lecture montrait une activité en nette augmentation, notamment dans l’aire de la forme visuelle des mots, cette région qui reconnaît les chaînes de lettres, ainsi que dans les régions temporales et frontales de l’hémisphère gauche, associées à la représentation de leur sonorité. De nombreux autres groupes de recherche ont obtenu des résul- tats convergents : chez les enfants dyslexiques ou à risque de dyslexie, un entraînement inten-sif, focalisé sur la connaissance des phonèmes

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Apprendre à lire

et de leur correspondance avec les graphèmes, augmente simultanément le décodage des mots et l’activité cérébrale dans les régions associées à la lecture72. Quand une stratégie éducative s’avère effi-cace chez les dyslexiques, les enfants normaux peuvent-ils également en bénéficier? Tout le laisse à penser. Bien qu’il ne soit évidemment pas possible d’accorder à chaque enfant des séances d’orthophonie, de grands espoirs repo-sent aujourd’hui sur l’informatique. Des logi-ciels nouveaux, qui se présentent sous la forme de jeux d’action, entraînent l’enfant aux corres-pondances graphèmes-phonèmes73. La fascina-tion qu’ils exercent, leur capacité de s’adapter au niveau de l’enfant et de présenter des milliers d’exercices sans le lasser, en suscitant un plaisir et une attention soutenue, ne sont sans doute pas pour rien dans les résultats exceptionnelle-ment rapides qu’ils induisent. Parmi ceux-ci se distingue le Grapho-Game, conçu par Heikki Lyytinen et ses col-lègues finlandais de l’Université de Jyväskylä74. Il s’agit d’une série de petits jeux qui deman-

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Figure 20. Il a suffit à des enfants de grande maternelle de jouer pen-dant quelques heures au GraphoGame, un logiciel d’entraînement aux correspondances graphèmes-phonèmes, pour que se mette en place, dans la région occipito-temporale gauche, un début de réponse aux mots écrits (d’après McCandliss, 2010).

AVANT APRÈS

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dent de décider, très rapidement, quelles lettres ou quelles suites de lettres correspondent à un son. Chez les enfants à risque de dyslexie, des tests psychologiques rigoureux ont dé-montré son efficacité, nettement supérieure à l’orthophonie classique75. Chez les enfants de maternelle, moins de quatre heures de jeu, réparties sur quelques semaines, conduisent à l’émergence du réseau cérébral de la lecture76. Ainsi certains logiciels de jeux peuvent-ils pré-senter un intérêt considérable pour préparer l’enfant à la lecture – à condition, bien enten-du, que les parents interviennent pour limiter la durée du jeu, afin que l’ordinateur n’enva-hisse pas le temps de lecture de l’enfant.

Du laboratoire à l’école

Si ces études rendent optimistes, elles pré-sentent une limite : toutes sont menées sur de petits groupes d’enfants, souvent en laboratoire et sous la supervision directe des chercheurs. Sera-t-il aisé de les étendre à l’échelle de l’Édu-cation nationale française ?

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Pour répondre à cette question, au cours de l’année scolaire 2010-2011, nous avons tenté une expérimentation à laquelle ont parti-cipé près de 1 800 élèves de cours préparatoire, la plupart issus de milieux très défavorisés des réseaux d’éducation prioritaire77. Notre question était toute simple : quels progrès pouvions-nous induire, sans rien changer de fondamental au système scolaire actuel, en as-surant simplement une formation minimale des maîtres aux principes scientifiques de la lecture ? Nous fournissions à la moitié des enseignants, choisis au hasard, une formation accélérée aux concepts essentiels du décodage et de la compréhension de l’écrit. Ces ensei-gnants bénéficiaient également d’un accès à de nombreux documents pédagogiques, ainsi que du soutien de conseillers. En outre, leurs classes bénéficiaient d’une aide spéciale : quatre fois par semaine, les enfants travaillaient en sous-groupes de cinq sous la direction d’un adulte. Les autres classes servaient de groupe contrôle : les enseignants continuaient à y utiliser leurs méthodes habituelles d’enseignement.

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Les premiers résultats suggèrent que ces efforts, pourtant non négligeables, ne suffisent pas. Dans les zones d’éducation prioritaire où nous étions intervenus, à la fin du cours pré-paratoire, les enfants des classes expérimen-tales ne lisaient pas mieux que ceux des classes de contrôle. Leurs performances de lecture restaient nettement inférieures à celles des en-fants de milieu « normal » ou favorisé. Tout au plus observions-nous une légère réduction de l’hétérogénéité des performances. Dans le groupe expérimental, à la différence du groupe contrôle, pratiquement tous les enfants avaient progressé, même faiblement. À la suite de notre intervention, un peu moins d’enfants se retrouvaient donc en queue de peloton, parmi ceux dont la lecture n’avait pratiquement pas évolué. Toutefois, ces résultats restaient très inférieurs à nos attentes. Nous ne sommes certes pas les premiers à découvrir combien il est difficile de passer du laboratoire à la salle de classe, particulière-ment dans les milieux défavorisés. En 2009, une étude australienne concluait que les bénéfices

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d’un entraînement phonologique et linguis-tique en classe entière n’étaient plus détectables deux ans plus tard78. La variable clé qui semble déterminer le succès ou l’échec d’une interven-tion en grandeur réelle dans les classes semble être la formation des maîtres. « Pour que ceux-ci mettent en œuvre des stratégies efficaces, un en-traînement massif et formel, dès les toutes pre-mières étapes de la formation, est nécessaire », indique une revue américaine79. On sait com-bien ce point essentiel est aujourd’hui négligé dans notre pays. Quelques heures d’explications, au fil d’une conférence ou d’un livre, ne peuvent se substituer à la formation intense, collégiale et responsable que reçoivent, par exemple, les instituteurs finlandais. De ce point de vue, notre expérimenta-tion présentait d’évidentes limites. Nous n’in-tervenions que sur la première année du pri-maire, alors que tous les travaux scientifiques démontrent l’importance de la préparation à la lecture en maternelle. Au total, chaque en-seignant ne recevait qu’une vingtaine d’heures de formation réparties sur l’année. Nous ne

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Apprendre à lire

pouvions intervenir ni sur la formation initiale des maîtres ni même sur les manuels qu’ils em-ployaient – chaque enseignant avait déjà choisi le sien. Enfin, la place de la lecture dans la vie de l’enfant n’était pas fondamentalement mo-difiée. Nous n’avions ni le temps ni les moyens de mettre en place des bibliothèques de classe dans lesquelles les enfants seraient incités à puiser quasi quotidiennement. L’amélioration de l’enseignement de la lec-ture serait-elle donc une utopie trop complexe et trop coûteuse pour être mise en pratique ? Certainement pas. Pour une réussite à l’échelle de tout un pays, tournons-nous vers une expé-rimentation autrement plus ambitieuse : la mise en place, en Grande-Bretagne, de la Literacy Hour, littéralement « l’heure de lecture », en réalité un vaste programme de réforme de l’en-seignement de la lecture à l’école primaire. Sous l’impulsion d’une association à but non lucratif, le National Literacy Trust, et après interview d’une cinquantaine de chercheurs et d’édu-cateurs spécialisés, la Grande-Bretagne s’est dotée, au cours de l’année 1998-1999, d’une

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organisation radicalement nouvelle de l’ensei-gnement de la lecture. Le programme précisait le contenu détaillé de ce qui devait être enseigné, le niveau qui devait être atteint chaque année, et le temps minimum qui devait être consacré à la lecture. Le noyau dur de la réforme consistait en une heure quotidienne d’enseignement divi-sée en quatre temps : d’abord 10 à 15 minutes de lecture et d’écriture en classe entière ; puis 10 à 15 minutes d’exercices collectifs sur les mots (décodage, orthographe et vocabulaire) et sur les phrases (grammaire et ponctuation) ; 25 à 30 minutes d’activités en petits groupes ; et en-fin une discussion de classe afin de réfléchir aux objectifs de la leçon du jour, à ce qui a été appris et à ce qui reste à apprendre. Le programme, très structuré, s’étendait depuis la grande ma-ternelle jusqu’à la fin du cycle primaire, soit de 5 à 11 ans. D’emblée, les enfants étaient donc pris en main d’une façon cohérente, avec des objectifs clairs et une adhésion forte de tous les intervenants concernés, depuis les parents et les enseignants jusqu’aux conseillers pédagogiques et aux orthophonistes.

L’éducation fondée sur la preuve

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Apprendre à lire

Au départ, dans les années 1996 et 1997, seules 400 écoles de secteurs défavorisés parti-cipèrent à la Literacy Hour. Très vite, les résul-tats furent jugés si positifs que, deux ans plus tard, le programme était étendu à l’ensemble de la Grande-Bretagne. Cependant, cette brève période d’expérimentation a permis d’évaluer rétrospectivement l’impact à long terme sur les enfants. Un groupe de chercheurs de la London School of Economics80 a comparé les perfor-mances des enfants passés par ces 400 écoles pilotes avec celles d’autres enfants comparables à tout point de vue, mais qui étaient restés, pen-dant deux ans, exposés aux anciennes méthodes d’enseignement. À la fin du primaire, vers l’âge de 11 ans, l’effet de la réforme était net : un bond très significatif des scores de lecture, particulièrement chez les garçons, réduisant ainsi nettement le retard habituel de ces der-niers par rapport aux filles dans ce domaine. L’effet se généralisait même à d’autres matières comme les mathématiques. Le coût en était pourtant très faible : en l’absence de recrute-ments ou d’heures supplémentaires consacrées

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à la lecture, seul semblait jouer l’effet structurant d’une politique pédagogique claire, rigoureuse et motivante pour les enseignants. La Literacy Hour n’est certainement pas la panacée. Elle n’offre qu’un canevas dans lequel reste à inscrire, jour après jour, des activités péda-gogiques pertinentes. Cependant, son impulsion a contribué à relancer l’intérêt de toute une nation pour le combat contre l’illettrisme, une réflexion qui se poursuit aujourd’hui encore. Le site inter-net du National Literacy Trust81 donne de nom-breux détails sur le contenu de l’enseignement re-commandé aux enseignants anglais. Les grandes lignes des principes que nous proposons y figu-rent en bonne place, mais également de nombreux livres, jeux, matériels pédagogiques, conseils, échanges de bonnes pratiques, réflexions sur des publications scientifiques récentes, etc. Le site ne cesse d’évoluer et les idées y fusent. La discussion démocratique et l’échange permanent entre ensei- gnants semblent jouer un rôle essentiel dans la mobilisation de l’ensemble du corps pédago-gique vers cet objectif simple : faire en sorte que, chaque jour, chaque enfant progresse en lecture.

L’éducation fondée sur la preuve

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Apprendre à lire

Conclusion

Notre conclusion sera donc très simple : la science de la lecture est solide ; les principes pédagogiques qui en découlent sont aujourd’hui bien connus ; seule leur mise en application dans les classes demande encore un effort important. C’est tout un système pédagogique qu’il faut af-finer, non seulement au cours préparatoire, mais dès la grande section maternelle et jusqu’en fin de primaire. Tout l’environnement scolaire doit contribuer, jour après jour, à donner aux enfants l’envie de lire et les moyens d’y parvenir. L’exemple de la Grande-Bretagne ou celui de la Finlande montrent que des progrès consi-dérables peuvent être réalisés à un coût très faible, à condition de mobiliser l’ensemble du corps éducatif. Pourquoi ne pas imaginer une « heure de lecture » quotidienne à la française ? Mieux former les enseignants et leurs for-mateurs, leur donner accès à des ressources pédagogiques structurées et motivantes sont des objectifs essentiels. Leur expérience quo-tidienne est irremplaçable. Spontanément, ils

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discutent des progrès de leurs classes, évaluent les manuels et estiment à quel point les élèves bénéficient de tel ou tel exercice, métaphore, ou manière d’introduire une nouvelle difficulté. Le partage systématique de ce faisceau de connais-sances, par le biais d’un site internet de type Wikipédia, ferait considérablement progresser non seulement la qualité de l’enseignement, mais surtout la motivation de tous. Il reste également à inventer de nouveaux outils pédagogiques compatibles avec les prin-cipes que nous avons énoncés : cartons à découper, lettres magnétiques, jeux de mots, logiciels, etc. Les manuels doivent aussi être révisés et simpli-fiés afin de focaliser tous les efforts et l’attention de l’enfant sur le décodage et la compréhension des mots. Enfin, chaque classe devrait avoir sa bi-bliothèque, afin que pas une semaine ne s’écoule sans qu’un jeune enfant ne lise, au minimum, un petit livre attrayant et de son niveau. Des sciences cognitives à la salle de classe, il ne reste qu’un petit pas à franchir.

L’éducation fondée sur la preuve

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Proposition de progression pédagogique à travers les difficultés de lecture du français

Préparée par Liliane Sprenger-Charolles, avec Stanislas Dehaene,

Caroline Huron, Édouard Gentaz et Pascale Colé

Annexe

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Apprendre à Lire

Mot parlé qui peut servir d’illustration (entre parenthèses) et exemples de mots écrits

N° d’ordre

Correspondance graphème-phonèmeou règle d’écriture Contexte

Voyellesorales1:unelettre=unphonème

1 a (ami)

1 é (été)

1 i (image)

1 o (olive)

1 u (une)

Consonnesliquides(l,r)etconsonnesfricatives1(f,j)

2 l (lune) Mots inventés : la, lo, lé, lu, li

3 r (rire) Mots inventés : ra, ro, ré, ru, ri

4 f (fini) Mots inventés : fa, fo, fé, fu, fi

5 j (jeu) Mots inventés : ja, jo, jé, ju, ji

Structuressyllabiques1:

6 Combinaison Mots et mots inventés : li-il, ro-or, fi-if… Consonne-Voyelle (CV) et Voyelle-Consonne (VC)

Voyellesorales2:Deuxlettrespourunphonème,plusle‘e’prononcé‘eu’

7 ou (ouvrir) Mots inventés : lou, rou, vou, jou ; Mots : fou…

8 e prononcé ‘eu’ Le ‘e’ de ‘le’ et ‘je’ (le) Mots inventés re, fe… ; Mots : le, je … eu Le ‘eu’ de ‘deux’ et ‘neuf’ (Europe) Mots inventés : leu, reu ; Mots : jeu, feu …

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Annexe

Structuressyllabiques2

9 Combinaison Consonne- Mots inventés : rur, rul, jor, jol, jeul, Voyelle-Consonne (CVC) jeur, lal, laf… ; Mots: four, jour, leur

10 Combinaison Consonne- Mots inventés : fla, fra, flé, flu, fri, fli, freu… ; Consonne-Voyelle (CCV) Mots : flou, frou-frou…

Lettresmuettes1(findemot)

11 e muet Mots : fée, folie, joue, roue s muet Mots : jus, lilas, alors… t muet Mots : lit, rat, fort… x muet Mots : deux, doux, faux, mieux, pris… d muet Mots : fard, lourd, foulard…

Consonnesfricatives2

12 v (vélo) : vélo, va, vos, vu, vif, vous, volé, voleur…

13 ch (chat) : chat, chou, cheval, fiche, cheveux…

Consonnesocclusives1

14 p (papa) : papa, par, peu, peur, pour, pile, pu, poule…

15 t (table) : tard, tire, tour, tarte, toute…

16 b (bébé) : bébé, bal, boule, bouche, table…

17 d (dur) : dur, douche, jeudi, deux…

Casparticuliers1

18 Lettres en miroir ba-da, bi-di, bo-do, bu-du, bou-dou, (b/d, p/q) bé-dé, beu-deu

Consonnesnasales

19 m Graphème ‘m’ en début de mot (mal) : mal, ma, mur, moule, mouche…

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Apprendre à Lire

20 n Graphème ‘n’ en début de mot (narine) : narine, nu, nous, notre…

21 gn Graphème ‘gn’ en début de syllabe (ligne) : ligne, vigne, bagne, trépigne, trogne…

Consonnesfricatives3

22 z (zéro) : zéro, lézard, zone, azur, bazar, douze…

23 s prononcé ‘ss’ Graphème ‘s’ en début de mot (sol) : sol, sourd, sur, sale, seul… ss Graphème ‘ss’ entre deux voyelles (chasseur) : issue, chasseur, assis… s prononcé ‘z’ Graphème ‘z’ entre deux voyelles (rose) : rose, usé, osé, usé, Asie, fusée, assise…

Casparticuliers2

24 graphème ‘es’ les, des, tes, mes, ses et ces…

Consonnesocclusives2

25 c prononcé ‘k’ ‘c’ devant ‘a’, ‘o/ou’, (car) : car, cou, coucou, coupe, ‘u’ ou consonne couleur, clou, école… k prononcé ‘k’ (kilo): kilo, kepi, ski… qu prononcé ‘k’ (qui) : qui, que, chaque, équipe…

26 g prononcé ‘g’ ‘g’ devant ‘a’, ‘o/ou’, ‘u’ (gare) : gare, gouter, grise, grosse… gu prononcé ‘g’ ou consonne (bague) : bague, guitare…

Voyellesnasales1

27 un (un) : un, chacun, aucun, lundi…

28 an (angle): angle, tante, cantine, blanche… am prononcé ‘an’ Graphème ‘m’ devant ‘p’ et ‘b’ (ampoule) : ampoule… ant prononcé ‘an’ (en partant et tous les participes présent) en prononcé ‘an’ (endive) : envers, envie, pendre, vendre… em prononcé ‘an’ Graphème ‘m’ devant ‘p’ et ‘b’ (empereur) : empire, embrasser, temps, décembre… ent prononcé ‘an’ (souvent et adverbes en ‘ment’)

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29 on prononcé ‘on’ (ongle) : ongle, oncle, fondre… om prononcé ‘on’ Graphème ‘m’ devant ‘p’ et ‘b’ (ombre) : ombre, bombe…

30 in prononcé ‘in’ (index) : fin, brin… im prononcé ‘in’ Graphème ‘m’ devant ‘p’ et ‘b’ (imprime) : imprime, grimpe…

Semi-consonnes1

31 oi (oie) : oie, moi, toi, roi, boîte, soie, fois…

32 oin (loin) : loin, foin, moins, coin, joindre, pointe, soin…

33 u de ‘lui’ (lui) : lui, nuit, fuir, luire, nuire, bruit…

Voyellesorales3

34 y prononcé ‘i’ (lycée) : lycée, il y a, pyjama

Voyellesorales4:lesdifférents‘a’

35 à (à la…) : à, là-bas, déjà… â (âne) : âne, bâton…

Voyellesorales5:lesdifférents‘o’

36 au (auto) : auto, au, autre… eau (eau) : eau, peau, chapeau…

Voyellesorales6:œu,eu,-ent

37 œu (œuf) : œuf, bœuf, sœur, cœur, nœud… œ (œil) : œil, œillet (pas d’autres mots)

38 eu prononcé ‘u’ Singleton fréquent (verbe avoir) (j’ai eu)

39 -ent : terminaison muette Pluriel des verbes premier groupe

Annexe

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Apprendre à Lire

Voyellesorales7

40 è (élève) : élève, père, lièvre, frère, planète, première… ê (être) : tête, bête, bêtise, fête, fenêtre, guêpe…

ë (Noël) : Noël…

41 ell ‘e’ suivi par une double consonne (elle, nouvelle) : elle, nouvelle, belle, pelle, laquelle, quelle ess (tresse) : tresse, pressé, hôtesse… err (terre) : terre, verre, serre… ett (galette) : galette, chaussette… er ‘e’ suivi par 2 consonnes (merci) : perle, verte, berceau, cerceau, cherche… es (veste) : geste, leste, reste, festin… ec (rectangle) : correct, insecte, lecteur, directe…

42 ai (air) : air, aide, aile, faire, maire, paire, chaise, raison, vrai… ei (la tour Eiffel) : Eiffel, peine, pleine, neige, baleine…

43 er final ‘e’ en fin de mot suivi (chanter) : chanter, jouer, bouger, par ‘r’, ‘z’ et ‘t’ manger, plancher... ez final (nez) : nez, chez, assez… et final (jouet) : jouet, muet, paquet, objet, bouquet, cachet…

Lettremuette2:le‘h’

44 h muet ‘h’ muet en début de mot (heure) : heure, habit, horrible… ‘h’ après une autre consonne (th) (thé) : thé, théâtre… ‘h’ muet milieu de mot entre voyelles (brouhaha) : brouhaha…

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Consonnesfricatives4:legraphème‘ph’

45 ph prononcé ‘f’ (photo) : photo, pharmacie, dauphin, phare, orthographe…

Consonnesfricatives5:lesdifférentsgraphèmespourlesphonèmes‘s’et‘j’

46 c prononcé ‘ss’ ‘c’ devant e/é et i/y (ceci) : ceci, cela, cerise, cygne… ç prononcé ‘ss’ (ça) : ça, garçon, séquence… s prononcé ‘ss’ ‘s’ en début de syllabe (ourson) s prononcé ‘ss’ ‘s’ en fin de syllabe (veston) sc prononcé ‘ss’ (science) : science, scie, piscine… (environ 200 mots) sç prononcé ‘ss’ ‘c’ devant devant e/é et i/y (acquiesça) : singleton

47 g prononcé ‘j’ ‘g’ devant e/é et i/y: gel, girafe (gel, girafe): gel, girafe, genou, magique, bougie ge prononcé ‘j’ (geai): geai, pigeon...

Semi-consonnes2:leyod‘i’

48 i = yod (ciel) : ciel, miel, fiel, pied (triage) : triage

Casparticuliers3:legraphème‘x’

49 x prononcé ‘gz’ (examen) : exemple, exercice… x prononcé ‘ks’ (taxi) : taxe, axe, vexer, index…

Voyellesnasales2

50 ain prononcé ‘in’ (ainsi) : pain, bain, main, demain, train, soudain, copain… aim prononcé ‘in’ (faim) : faim, daim, essaim (pas d’autres mots) ein prononcé ‘in’ (frein) : plein, ceinture, peindre… yn prononcé ‘in’ (synthèse) : synthèse (environ 10 mots) ym prononcé ‘in’/ (symbole) : symbole, olympe, tympan, sympathique

Annexe

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Apprendre à Lire

51 um prononcé ‘un’ (parfum) : parfum, humble um prononcé ‘om’ (maximum) : minimum, album, calcium, rhum…

52 en prononcé ‘in’ Graphème ‘en’ après ‘i’ ou ‘é’ (chien, sien) : mien, lien, tien, rien, bien… ; (sauf si suivi par ‘nn’) (lycéen) : coréen, européen …

Consonnesfricatives6:unautregraphème‘t’seprononçant/s/

53 t prononcé ‘ss’ Graphème ‘t’ suivi par ’i’ (nation) : nation, opération, ration

Semi-consonnes3:‘y’et‘il(l)’pourleyod

55 y = yod (yoga) : yoga

56 ay Graphème ‘y’ entre 2 voyelles (payer) : payer, crayon, rayon… oy Graphème ‘y’ entre 2 voyelles (noyer) : noyer, loyer, broyer… ey Graphème ‘y’ entre 2 voyelles (asseyez) : asseyez… uy Graphème ‘y’ entre 2 voyelles (appuyé) : appuyé…

57 il (ail) : ail, portail, travail…

Casparticuliers5:lesconsonnesdoubles

58 bb dd

ff pp

rr tt

ss

59 cc prononcé ‘k’ Devant ‘a’, ‘o/ou’, ‘u’ ou consonne (accord) : accord, accordéon… cc prononcé ‘ks’ Devant e/é et i/y (accent) : accent, accident…

60 gg prononcé ‘g’ Devant ‘a’, ‘o/ou’, ‘u’ ou consonne (aggraver) : aggraver, agglomération… gg prononcé ‘gj’ Devant e/é et i/y (suggérer) : suggérer…

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61 mm (pomme) : pomme, somme… emm (emmener) : emmener… (femme et adverbes en ‘-emment’) : femme, fréquemment…

62 nn (bonnet) : abonné, bonne… enn (ennui) : ennui, enneigé… (tienne) : tienne, renne…

63 ll Graphème ‘ll’ apres voyelle sauf ‘i’ (nulle) : allée, quelle, malle… ill Graphème ‘ill’ précédé ville, mille… mais fille, bille (voir 64) par consonne

Semi-consonne4(yod):‘ll’

64 ill = yod Graphème ‘ill’ précédé par voyelle (abeille) : abeille, sommeil, rouille, taille, travail illi (milliard) : milliard, million… ill Graphème ‘ill’ précédé (fille) : fille, cheville, chenille, vanille, par consonne habille, lentille…

Voyellesorales8:voyellesoralesavecdiacritiques(saufé/è/ê/ëetà,â)

65 où (où) : singleton ô (hôpital) : hôpital, tôt, plutôt, pôle, rôtir… ï (héroïque) : héroïque, stoïque, archaïque, astéroïde… ïn (coïncide) : uniquement mots de cette famille

Consonnesocclusives3:legraphème‘th’

66 th prononcé ‘t’ (thé) : thé, panthère…

Semi-consonne5:/w/(pluslegraphème‘w’=/v/)

67 ou prononcé ‘w’ (alouette) : alouette, louer, marsouin, mouette, nouer… w (kiwi) : kiwi (environ 30 mots) w prononcé ‘v’ (wagon) : wagon (environ 10 mots)

Annexe

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Apprendre à Lire

Casparticuliers5:finalesen‘er’et‘et’,plus‘t’,‘l’,‘c’nonmuetenfinale

68 er final prononcé (mer) : mer, amer… et final prononcé (net) : net, gadget, set, cet… t, l, c final (brut) : brut, strict ; (bel) : bel, naturel, tel ; (bec) : bec, clic-clac, tic…

Lettresmuettes3(findemotsoudesyllabes)

69 b muet (plomb) : plomb, aplomb… c muet (tabac) : tabac, jonc… f muet (clef) : clef (ou clé), cerf… g muet (bourg) : bourg, point… l muet (outil) : outil, fusil… r muet (monsieur) : singleton

70 p muet (compte) : compte, comptable… m muet (automne) : automne…

Casparticuliers6:correspondancesgraphèmes-phonèmesraresdansdesmotsfréquents

71 on prononcé ‘eu’ (monsieur) : singleton ai prononcé ‘eu’ (nous faisons) : faisan et mots de la famille de faire ay prononcé ‘ey’ (paysan) : pays et mots de la même famille plus abbaye

72 cu prononcé ‘k’ (cueillir) : environ 60 mots en ‘cueil’ ck prononcé ‘k’ (ticket) : ticket, stock… (environ 50 mots) cqu prononcé ‘k’ (acquis) : acquis, grecque… (environ 20 mots) q prononcé ‘k’ (coq) : coq, cinq, piqûre (3 mots) ch prononcé ‘k’ (orchestre) : orchestre, technique, chrétien (environ 80 mots)…

73 x prononcé ‘ss’ (dix) : dix, six, soixante, coccyx, Bruxelles (pas d’autres mots) x prononcé ‘z’ (deuxième) : dixième, sixième, deuxième + dérivés (pas d’autres mots)

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c prononcé ‘g’ (seconde) : second et dérivés plus zing (pas d’autres mots)

74 sh prononcé ‘ch’ (short) : crash, shérif, shampoing… (20 mots) sch prononcé ‘ch’ (schéma) : schéma, quetsche, schtroumpf (une dizaine de mots)

75 b prononcé ‘p’ (absence) : absence, abcès… (environ 130 mots)

C.Graphèmesrareset/ouambigus(lesmotsutilisablespourcettepartiesontennombrelimité)

Consonnes

76 qu prononcé ‘kw’ (équilatéral) : équilatéral, équidistant (pas d’autres mots) (équateur) : équateur, square, adéquat (environ 20 mots) gu prononcé ‘gw’/ (aiguille) : aiguille, aiguillage… (jaguar) : jaguar, iguane… (8 mots) -ing (parking) : parking, building… (environ 35 mots) j prononcé ‘dj’ (jeep) : jeep, jazz, jean (environ 10 mots)

Voyelles

77 oo prononcé ‘o’ (alcool et Waterloo) : alcool et mots de la famille d’alcool oo (coopération et zoo) : coopération et mot avec préfixe ‘co-‘ plus zoo

78 oe prononcé ‘wa’ (moelle) : moellon et mots de la famille de moelle oê prononcé ‘wa’ (poêle) : singleton

79 ay (bayer) : bayer, cobaye, kayak, mayonnaise, papaye… (8 mots) ey (poney) : poney, jockey, Aveyron (moins de 5 mots)

Annexe

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Apprendre à Lire

80 a muet (août) : août, saoul, curaçao (pas d’autres mots) ï = yod (païen) : païen, taïga, aïeul, faïence, baïonnette (pas d’autres mots)

81 aon prononcé ‘an’ (faon) : faon, taon, paon (pas d’autres mots)

82 oo prononcé ‘ou’ (foot) : foot, igloo, boomerang (20 mots environ) u anglais (surf) : surf, club, drugstore, ketchup, nurse, pub, puzzle er anglais (hamburger) : hamburger, leader, rocker, scooter, speaker (20 mots) u prononcé ‘ou’ (pudding) : pudding, yucca, hamburger, hurrah (14 mots) ow prononcé ‘ou’ (clown) : clown et dérivés

Voyellesetconsonnes:prononciationexceptionnelleenfindemot

83 en final (dolmen) : dolmen, pollen, yen, aven, Ben (15 mots) im final (intérim) : intérim plus prénoms comme Jim, Joachim… an final (barman) : barman et autres composés avec ‘man’ plus jerrican am final (ramdam) : ramdam, imam, macadam, Myriam (10 mots) on final (badminton) : badminton (surtout noms propres)

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notes

1. Dehaene, 2007.2. Coulmas, 1989 ; Sprenger-Charolles, 2003 ; Ziegler et Goswami, 2005.3. Picq, Sagart, Dehaene et Lestienne, 2008.4. Dehaene-Lambertz, Dehaene et Hertz-Pannier, 2002 ; revue dans Dehaene-Lambertz, 2009.5. Hallé, Chéreau et Segui, 2000.6. Cohen et coll., 2000.7. Shaywitz et coll., 2002 ; Dehaene et coll., 2010.8. Dehaene, Cohen, Sigman et Vinckier, 2005.9. Dehaene et coll., 2010.10. Dehaene et coll., 2001 ; Dehaene et coll., 2004 ; Binder, Medler, Westbury, Liebenthal et Buchanan, 2006 ; Baker et coll., 2007.11. Déjerine, 1892 ; Cohen et Dehaene, 2004.12. Castro-Caldas, Petersson, Reis, Stone-Elander et Ingvar, 1998 ; Turkeltaub, Gareau, Flowers, Zeffiro et Eden, 2003 ; Carreiras et coll., 2009 ; Dehaene et coll., 2010.

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Apprendre à lire

13. Dehaene et coll., 2010.14. Dehaene et coll., 2010.15. Castro-Caldas et coll., 1998.16. Morais, Cary, Alegria et Bertelson, 1979 ; Morais et Kolinsky, 1994.17. Cheung, Chen, Lai, Wong et Hills, 2001.18. National Institute of Child Health and Human Develop- ment, 2000 ; Ehri, Nunes, Willows et coll., 2001 ; Shanahan et Lonigan, 2010.19. Posner et Dehaene, 1994 ; Fries, Womelsdorf, Oostenveld et Desimone, 2008.20. Yoncheva, Zevin, Maurer et McCandliss, 2010.21. Shipley et Shepperson, 1990 ; Spelke, Breinlinger, Macomber et Jacobson, 1992.22. Maurer et coll., 2006 ; Brem et coll., 2010.23. Byrne et Fielding-Barnsley ; Byrne, Fielding-Barnsley et Ashley ; Goigoux, 2000 ; National Institute of Child Health and Human Development, 2000 ; Shanahan et Lonigan, 2010.24. Yoncheva, Blau, Maurer et McCandliss, 2010.25. Bornstein, Gross, et Wolf, 1978 ; Logothetis, Pauls et Poggio, 1995.26. Cornell, 1985 ; Dehaene, 2007, chapitre 9.27. Dehaene et coll., 2010.28. Vinckier et coll., 2006.29. Gentaz, Colé, et Bara, 2003 ; Fredembach, de Boisferon et Gentaz, 2009.30. Longcamp, Tanskanen, et Hari, 2006 ; Roux et coll., 2009.31. Zoccolotti et coll., 2005.32. Cohen, Dehaene, Vinckier, Jobert, et Montavont, 2008 ; Brem et coll., 2010.

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Notes

33. Sprenger-Charolles, Siegel, Béchennec et Serniclaes, 2003 ; Froyen, Bonte, van Atteveldt et Blomert, 2009.34. Zoccolotti et coll., 2005.35. Weekes, 1997 ; New, Ferrand, Pallier et Brysbaert, 2006.36. Larson, 2004 ; Dehaene, 2007.37. Pour une synthèse en français, voir Sprenger-Charolles et Colé, 2006.38. Longtin, Segui et Hallé, 2003.39. Cunningham et Stanovich, 1997.40. Karpicke et Roediger, 2008.41. Paulesu et coll., 2001.42. Galaburda, LoTurco, Ramus, Fitch, et Rosen, 2006.43. Silani et coll., 2005.44. Niogi et McCandliss, 2006.45. Ramus et coll., 2003 ; Ramus, White, et Frith, 2006 ; pour une synthèse en français, voir Sprenger-Charolles et Colé, 2006.46. Ziegler, Pech-Georgel, George et Lorenzi, 2009.47. Facoetti et coll., 2009 ; Facoetti, Corradi, Ruffino, Gori et Zorzi, 2010 ; Vidyasagar et Pammer, 2010.48. Maisog, Einbinder, Flowers, Turkeltaub et Eden, 2008.49. Van der Mark et coll., 2009.50. Shaywitz, Escobar, Shaywitz, Fletcher et Makuch, 1992.51. Temple et coll., 2003 ; Eden et coll., 2004.52. Vellutino, Scanlon, Small, et Fanuele, 2006.53. Rapport du Haut Conseil de l’éducation sur l’école primaire, 2007, disponible sur http://www.hce.education.fr/54. Shaywitz et coll., 1992 ; Byrne et coll., 2000 ; Bara, Colé et Gentaz, 2008.55. Fluss et coll., 2008 ; Fluss et coll., 2009.

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Apprendre à lire

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Notes

gratuitement… en finlandais et pour tous les enfants de Finlande. Une version anglaise a été développée par Usha Goswami, de l’Université de Cambridge. Johannes Ziegler, chercheur au laboratoire de psychologie cognitive du CNRS à Marseille, a commencé à l’adapter en français. L’unité Inserm-CEA de neuroimagerie cognitive (www.unicog.org) se propose de développer un logiciel similaire au cours de l’année 2012.75. Saine et coll., 2011.76. Brem et coll., 2010.77. Cette expérimentation a bénéficié du soutien du ministère de l’Éducation nationale, du ministère de la Jeunesse et des Solidarités actives, et du Centre national de la recherche scientifique. Elle a mobilisé les inspecteurs d’académie des départements du Rhône, de la Loire et de l’Ain, les inspecteurs de l’Éducation nationale et les conseillers pédagogiques de circonscription des écoles concernées. Elle s’est appuyée sur l’expertise scientifique de nombreux chercheurs français, et notamment Édouard Gentaz (responsable du projet), Maryline Bosse, Liliane Sprenger-Charolles, Pascale Colé, Stanislas Dehaene, Caroline Huron, Maryse Bianco, Pascal Bressoux, Marc Gurguand et Bruno Suchaut. Nous avons également bénéficié des recommandations scientifiques de Boris New, Christophe Pallier et Ronald Peereman, du soutien constant de Laurent Cros et d’un important travail d’Éric Pétris pour l’édition d’une partie des nouveaux outils pédagogiques élaborés à cette occasion. La formation et l’accompagnement des enseignants durant l’année scolaire 2010-2011étaient assurés par Frédérique Mirgalet, conseil- lère pédagogique de l’inspection académique de l’Isère, et par une équipe de conseillers pédagogiques des inspections académiques du Rhône, de l’Ain et de la Loire. Que tous soient ici vivement remerciés.

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Bibliographie

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150

Apprendre à lire

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Bibliographie

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les Auteurs

Stanislas Dehaene, professeur au Collège de France, directeur de l’unité Inserm- CEA de neuro-imagerie cognitive, Centre NeuroSpin, Saclay.

Ghislaine Dehaene-Lambertz, directrice de recherches au CNRS, directrice de l’équipe Neuro-imagerie du développement au sein de l’unité Inserm- CEA de neuro-imagerie cognitive.

Édouard Gentaz, directeur de l’équipe Psychologie et neurocognition des systèmes perceptivomoteurs au sein du Laboratoire de psychologie et neurocognition (associé au CNRS), Grenoble- II ; responsable et coordinateur du projet d’expérimentation sur la lecture.

Caroline Huron, chargée de recherches à l’Inserm, responsable du proramme Dyspraxie au sein de l’unité Inserm-CEA de neuro-imagerie cognitive.

Liliane Sprenger-Charolles, directrice de recherches au CNRS, Laboratoire de psychologie de la perception, université Paris-Descartes.

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remerciements

Ce livre n’aurait pas vu le jour sans les constants encou-ragements de Jean-Michel Blanquer, Nelson Vallejo-Gomez, Bernard Gotlieb et Odile Jacob. Au fil de nos recherches, nous avons bénéficié de nombreuses discussions avec nos amis et collègues, notamment Laurent Cohen, Pascale Colé, Michel Fayol, Régine Kolinsky, Heikki Lyytinen, Bruce McCandliss, José Morais, Boris New, Christophe Pallier, Ronald Peereman, Pekka Räsänen et Johannes Ziegler. Enfin, la forme de ce livre doit beaucoup à Cerise Heurteur, Émilie Barian et Claudine Roth-Islert. Que toutes et tous soient ici vivement remerciés.

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TABLE

09-12 // INTRoduCTIoN

15-63 // CoMMENT LE CERVEAu APPRENd-IL À LIRE ?

15 Qu’Est-CE QuE L’éCRItuRE ? 22 CoMMEnt fonCtIonnE LE CERVEAu AVAnt LA LECtuRE ? 27 unE RéGIon Du CERVEAu sE sPéCIALIsE PouR LEs Mots éCRIts 33 QuELLEs sont LEs AutREs DIfféREnCEs EntRE un LEttRé Et un ILLEttRé ? 36 PREnDRE ConsCIEnCE DEs PhonèMEs 41 LE CoDE VIsuEL DEs LEttREs Et DEs GRAPhèMEs 44 LE stADE Du MIRoIR Et LE RôLE DEs GEstEs 48 DEVEnIR un LECtEuR RAPIDE 54 Et LA DysLExIE ? 60 LA LECtuRE En MILIEu DéfAVoRIsé

65-100 // LES gRANdS PRINCIPES dE L’ENSEIgNEMENT dE LA LECTuRE

68 PRInCIPE D’EnsEIGnEMEnt ExPLICItE Du CoDE ALPhABétIQuE 75 PRInCIPE DE PRoGREssIon RAtIonnELLE 85 PRInCIPE D’APPREntIssAGE ACtIf AssoCIAnt LECtuRE Et éCRItuRE 88 PRInCIPE DE tRAnsfERt DE L’ExPLICItE VERs L’IMPLICItE 91 PRInCIPE DE ChoIx RAtIonnEL DEs ExEMPLEs Et DEs ExERCICEs 94 PRInCIPE D’EnGAGEMEnt ACtIf, D’AttEntIon Et DE PLAIsIR 97 PRInCIPE D’ADAPtAtIon Au nIVEAu DE L’EnfAnt

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101-117 // L’éduCATIoN FoNdéE SuR LA PREuVE

102 L’IMPoRtAnCE DE L’ExPéRIMEntAtIon 108 Du LABoRAtoIRE à L’éCoLE 116 ConCLusIon

119-130 // ANNExE : PRoPoSITIoN dE PRogRESSIoN PédAgogIquE

133-138 // NoTES

139-151 // BIBLIogRAPhIE

153-153 // LES AuTEuRS

155-155 // REMERCIEMENTS

TABLE

09-12 // INTRoduCTIoN

15-63 // CoMMENT LE CERVEAu APPRENd-IL À LIRE ?

15 Qu’Est-CE QuE L’éCRItuRE ? 22 CoMMEnt fonCtIonnE LE CERVEAu AVAnt LA LECtuRE ? 27 unE RéGIon Du CERVEAu sE sPéCIALIsE PouR LEs Mots éCRIts 33 QuELLEs sont LEs AutREs DIfféREnCEs EntRE un LEttRé Et un ILLEttRé ? 36 PREnDRE ConsCIEnCE DEs PhonèMEs 41 LE CoDE VIsuEL DEs LEttREs Et DEs GRAPhèMEs 44 LE stADE Du MIRoIR Et LE RôLE DEs GEstEs 48 DEVEnIR un LECtEuR RAPIDE 54 Et LA DysLExIE ? 60 LA LECtuRE En MILIEu DéfAVoRIsé

65-100 // LES gRANdS PRINCIPES dE L’ENSEIgNEMENT dE LA LECTuRE

68 PRInCIPE D’EnsEIGnEMEnt ExPLICItE Du CoDE ALPhABétIQuE 75 PRInCIPE DE PRoGREssIon RAtIonnELLE 85 PRInCIPE D’APPREntIssAGE ACtIf AssoCIAnt LECtuRE Et éCRItuRE 88 PRInCIPE DE tRAnsfERt DE L’ExPLICItE VERs L’IMPLICItE 91 PRInCIPE DE ChoIx RAtIonnEL DEs ExEMPLEs Et DEs ExERCICEs 94 PRInCIPE D’EnGAGEMEnt ACtIf, D’AttEntIon Et DE PLAIsIR 97 PRInCIPE D’ADAPtAtIon Au nIVEAu DE L’EnfAnt

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N° d'impression : 0000000N° d'édition : 7381-2680-XDépôt légal : octobre 2011

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