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6 Guide d’exploitation pédagogique © Yves Nadon Apprendre à lire Une réflexion professionnelle et personnelle Le présent document se veut plus une réflexion partagée qu’une démarche à suivre : les livres de la collection GB + doivent s’insérer dans une vision, dans un regard beaucoup plus large et généreux que les seuls livres de la série. Apprendre à lire demande du temps et de la pratique, et cela exige avant tout un enseignant lettré qui sait intervenir dans l’acte de lire et non seulement exécuter les ordres d’un agent extérieur, si bien intentionné soit-il. Trop long- temps les manuels scolaires ont occulté le rôle si important et professionnel que doivent assu- mer les enseignants. Trop longtemps a-t-on semblé reléguer l’enseignant à un rôle d’exécu- tant et de simple technicien. Enseigner à lire demande de nous tous une connaissance de la littérature, du processus de l’acte de lire et une habileté à mettre en place un lieu de vie qui favorisera de hauts niveaux de lecture. Il faut le dire avec conviction : l’enseignant est celui qui fait la différence, et qui doit faire la différence. Aucune méthode ou livre ne peut enseigner et faire aimer la lecture. Cette activité humaine a besoin d’humains, et d’humains inspirants, riches et crédibles. En tant qu’enseignant, il est utile de se rappeler l’importance de notre propre vie littéraire. On ne peut y échapper. Nous disions aussi plus haut que cette collec- tion s’inscrit dans une vision. Elle ne devrait pas être utilisée seule et de façon mécanique. Ce serait trop facile de donner tout simplement ces livres à lire aux élèves, dans l’ordre, et de con- trôler leurs lectures. Pour que cette série porte vraiment ses fruits, il faudra que cet enseignant lettré orchestre une classe qui donne le maxi- mum à chacun des enfants, quel que soit le niveau culturel de ceux-ci. Le cadre général devra être flexible et placer les enfants dans une variété de situations de lec- ture et d’enseignement. La valeur de chaque aspect de cette vision dépend de l’organisation et de la qualité de l’enseignement qui s’y trou- vera. Un cadre idéal devra avoir : 1. des lectures à haute voix par l’enseignant ; 2. de la lecture partagée ; 3. de la lecture indépendante ; 4. une classe riche en livres ; 5. de la lecture guidée et du bon niveau. Des lectures à haute voix par l’enseignant L’enseignant lit à haute voix aux élèves de beaux livres riches, variés et intéressants. Il nourrit le lecteur avec ces textes, ses intona- tions, cette variété de genres et de styles. Nous savons par expérience que les enfants en reti- rent du plaisir, qu’ils se font montrer l’acte de lire, qu’ils entendent ainsi une lecture adulte fluide et riche, qu’ils développent un sens de l’histoire et des connaissances syntaxiques à propos de la langue écrite, qu’ils acquièrent des connaissances de structures de textes, que nous bonifions leurs connaissances linguistiques, que nous créons une communauté de lecteurs avec une culture commune, que nous facilitons l’accès aux idées complexes et que nous ren- dons publics des textes qui facilitent l’écriture et les autres activités. Comme l’écrivait Daniel Pennac, l’enseignant partage ici son bonheur de lire plutôt que de l’imposer.

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6 Guide d’exploitation pédagogique © Yves Nadon

Apprendre à l ire Une réflexion professionnel le et personnelle

Le présent document se veut plus une réflexionpartagée qu’une démarche à suivre : les livres dela collection GB+ doivent s’insérer dans unevision, dans un regard beaucoup plus large etgénéreux que les seuls livres de la série.

Apprendre à lire demande du temps et de lapratique, et cela exige avant tout un enseignantlettré qui sait intervenir dans l’acte de lire etnon seulement exécuter les ordres d’un agentextérieur, si bien intentionné soit-il. Trop long-temps les manuels scolaires ont occulté le rôlesi important et professionnel que doivent assu-mer les enseignants. Trop longtemps a-t-onsemblé reléguer l’enseignant à un rôle d’exécu-tant et de simple technicien. Enseigner à liredemande de nous tous une connaissance de lalittérature, du processus de l’acte de lire et unehabileté à mettre en place un lieu de vie quifavorisera de hauts niveaux de lecture. Il faut ledire avec conviction : l’enseignant est celui quifait la différence, et qui doit faire la différence.Aucune méthode ou livre ne peut enseigner etfaire aimer la lecture. Cette activité humaine abesoin d’humains, et d’humains inspirants,riches et crédibles. En tant qu’enseignant, il estutile de se rappeler l’importance de notrepropre vie littéraire. On ne peut y échapper.

Nous disions aussi plus haut que cette collec-tion s’inscrit dans une vision. Elle ne devraitpas être utilisée seule et de façon mécanique. Ceserait trop facile de donner tout simplement ceslivres à lire aux élèves, dans l’ordre, et de con-trôler leurs lectures. Pour que cette série portevraiment ses fruits, il faudra que cet enseignantlettré orchestre une classe qui donne le maxi-mum à chacun des enfants, quel que soit leniveau culturel de ceux-ci.

Le cadre général devra être flexible et placer lesenfants dans une variété de situations de lec-ture et d’enseignement. La valeur de chaqueaspect de cette vision dépend de l’organisationet de la qualité de l’enseignement qui s’y trou-vera.

Un cadre idéal devra avoir :1. des lectures à haute voix par l’enseignant ;2. de la lecture partagée ;3. de la lecture indépendante ;4. une classe riche en livres ;5. de la lecture guidée et du bon niveau.

Des lectures à haute voix par l’enseignantL’enseignant lit à haute voix aux élèves debeaux livres riches, variés et intéressants. Ilnourrit le lecteur avec ces textes, ses intona-tions, cette variété de genres et de styles. Noussavons par expérience que les enfants en reti-rent du plaisir, qu’ils se font montrer l’acte delire, qu’ils entendent ainsi une lecture adultefluide et riche, qu’ils développent un sens del’histoire et des connaissances syntaxiques àpropos de la langue écrite, qu’ils acquièrent desconnaissances de structures de textes, que nousbonifions leurs connaissances linguistiques,que nous créons une communauté de lecteursavec une culture commune, que nous facilitonsl’accès aux idées complexes et que nous ren-dons publics des textes qui facilitent l’écritureet les autres activités.

Comme l’écrivait Daniel Pennac, l’enseignantpartage ici son bonheur de lire plutôt que del’imposer.

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© Yves Nadon Guide d’exploitation pédagogique 7

De la lecture partagéeÀ l’aide d’un texte agrandi, que tous les enfantspeuvent voir, l’enseignant amène les enfants àfaire une lecture commune. Nous relisons desgrands livres, des réécritures, des textes journa-liers, des textes écrits collectivement.

Cette façon de faire :• montre explicitement des stratégies ; • construit un sens de l’histoire et l’habileté à

prédire ; • montre le processus de lecture sur des textes

longs ; • invite les enfants au plaisir de lire ; • permet l’aide collective à la lecture ;• permet aux enfants de tous les niveaux de

participer à la lecture ; • crée un corpus commun de livres et de

connaissances littéraires.

De la lecture indépendanteLes enfants lisent ici seuls, ou avec des parte-naires, des textes de leur choix ou de niveauxparticuliers.

Naturellement, cette lecture permet de mettreen place des stratégies vues en classe, de lire surune longue période de temps sans interruption,de bâtir la confiance en soi comme lecteur. Deplus, elle aide à la fluidité et permet l’entraideentre pairs.

Une classe riche en livresLes enfants doivent baigner dans des classesriches en livres où la littérature est présente.Nous estimons que la littérature est utilisée nonseulement pour la grande variété de textes etd’auteurs, ainsi que pour la richesse langagière,mais aussi pour la profondeur et les possibilitésd’enrichissement humain, pour les occasionsqu’elle nous offre de faire des liens, de voir leschoses sous différentes perspectives, de réexa-miner notre façon de voir et d’apprendre desautres. Pour apprendre à lire et à écrire, il fautcôtoyer de grands auteurs, des textes bienécrits, des plumes inspirantes.

La lecture guidée et GB+

La pratique actuelle de donner à tous lesenfants, sur une base journalière et régulière,les mêmes textes à lire aux mêmes rythmes estremise en cause par de nombreuses rechercheset pratiques de classe.

Pause métaphorique : pour bien apprendre àpédaler, nous devons avoir accès à un vélo.Nous devons aussi voir d’autres pédaler etavoir du plaisir à être avec papa ou maman àl’arrière de ce vélo. Nous devons par contreavoir un vélo à notre mesure, à notre hauteur :quel enfant apprendrait à bien pédaler unique-ment sur le vélo de ses parents ? Aucun. Nouslui donnons un vélo à sa mesure, que nouschangeons quand nous le jugeons nécessaire.Impossible d’uniformiser les vélos, impensabled’uniformiser la lecture.

Pour devenir un lecteur, l’enfant a besoind’expériences et de niveaux de lecture appro-priés. La collection GB+, comme d’autres livresde ce genre, permettra de choisir le tricycleapproprié, tout en intégrant les autres pointsmentionnés. Elle ne peut non plus être utiliséede façon uniforme et exclusive. Chaque enfantdemandera un regard particulier et un niveaubien à lui (qui sera le même que celui de cer-tains pairs). D’où nos mises en garde profes-sionnelles : l’enseignant et son regard critiquesont au cœur de cette collection. Le succès detout enseignement, d’ailleurs, repose sur lesenseignants et leur jugement professionnel.

Les livres de cette collection sont échelonnéssur différents niveaux selon des critères de dif-ficulté qui tiennent compte, entre autres, des

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8 Guide d’exploitation pédagogique © Yves Nadon

répétitions, de la complexité du langage, de lastructure du texte, du vocabulaire, des champsd’intérêt des élèves, de la grosseur des caractè-res, de la disposition graphique et des indicesfournis par les illustrations. Ces niveaux sontétudiés et, malgré toute la recherche derrièreeux, ils ne peuvent être pris à la lettre. La per-sonnalité des enfants, leurs difficultés en lec-ture, la capacité à relever des défis, les milieuxfamilial et culturel, la communauté de lecteursde la classe sont autant de facteurs qui peuventfaire mentir un niveau particulier. Commetoute chose concernant la lecture, l’enseignantest celui à qui reviennent les choix finaux. Per-sonne d’autre que lui ne connaît aussi bien les élè-ves et leurs particularités, personne ne connaîtmieux que lui les stratégies lacunaires ou boni-fiées des enfants, personne ne connaît commelui le bagage littéraire que porte chacun d’eux.

Dans une classe riche en littérature, où lesenfants lisent et se font lire une variété de textes,où l’enseignant apprend aux enfants ce qu’ilsont besoin de savoir selon ses observations et saconnaissance du processus et des finalités, cettecollection comble un besoin crucial : avoir deslivres de différents niveaux pour mieux aiderles enfants à aborder des textes de plus en pluscomplexes et à appliquer des stratégies effica-ces de lecture. Quel bonheur d’avoir sous lamain des livres échelonnés du plus simple auplus complexe, que les enfants peuvent lireavec plaisir, du début à la fin. De plus, diffé-rents genres sont représentés, et les enfantsaffectionnent particulièrement les documentaires,si difficiles à trouver pour des lecteurs quidébutent.

Nous devons avoir une gestion de classe quinous permette d’enseigner en petits groupes etindividuellement sans interruption. Nous vousferons quelques propositions, qui ne seront quecela : des propositions parmi de nombreusespossibilités.

Analyse de la lecturePour déterminer un niveau approprié et desstratégies à enseigner et à montrer, il est impor-tant d’écouter les enfants lire. Il n’existe aucunautre moyen aussi efficace. Aucun test ne peutdire avec autant de précision les stratégies uti-lisées par les enfants et celles qui font défaut.

Quand un enfant nous lit un texte, nous anno-tons sur une feuille ou dans un cahier ce qu’il litde cette façon : • Mot bien lu

• Mot sauté —• Mot remplacé mot• Répétition R• Autocorrection C• Tentatives tentative - tentative• Mot corrigé lors

d’une répétition RC• Mot ajouté mot• Demande d’aide A• Aide de l’enseignant P

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Exemple d’analyse à partir du texte Petit Chaton s’amuse (niveau Textes narratifs 8) :

Texte Élève Codification par l’enseignant

Petit Chaton s’amuse Petit Chaton s’amuse ✓ ✓ ✓

Petit Chaton aime s’amuser

dans la maison

quand il fait froid.

Il s’amuse près du gros fauteuil.

Regarde Petit Chaton !Regarde le gros fauteuil !

Petit Chaton aime se s’amuser

dans la maison

quand il faut fait frr quand il fait froid.

Il se s’amuse proche du gros fauteuil.

Regarde Petit Chaton !Regarde le gros fauteuil !

✓ ✓ ✓ se/Cs’amuser

✓ ✓ ✓

✓ ✓ ✓ frr/RCfroid

✓ se/C proche ✓ ✓ ✓s’amuse près

✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓ ✓

— Non, Petit Chaton.Éloigne-toi !Éloigne-toi !

— Non, Petit Chaton.Éloigne-toi !Éloigne-toi !

✓ ✓ ✓✓ ✓✓ ✓

Petit Chaton joue dans le panier.

Il joue avec les pelotes de laine.

— Miaou ! Miaou ! Miaou !Je suis tout emmêlé,

dit Petit Chaton.

Petit Chaton joue dans le panier.

Il joue dans les balles pelotes de laine.

— Miaou ! Miaou ! Miaou !Je suis tout mêlé,

dit Petit Chaton.

✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓

✓ ✓ dans ✓ balles/C ✓ ✓avec pelotes

✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓ mêlé

emmêlé✓ ✓ ✓

— Petit Chaton !Tu es un vilain petit chat.Ne va pas dans le panier.

— Petit Chaton !Tu es un vilain petit chat.Ne va pas dans le panier.

✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓

Petit Chaton grimpe dans les rideaux.

Il regarde en bas.— Miaou ! Je suis tout en haut,dit Petit Chaton.

Petit Chaton grimpedans les fenêtres.

Il regarde en bas.— Miaou ! Je suis tout en haut,dit Petit Chaton.

✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓ fenêtres

rideaux✓ ✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓

— Descends ici.Descends !Tu es un vilain petit chat.Tu vas aller dehors !

— Descends ici.Descends !Tu es un vilain petit chat.Tu vas aller dehors !

✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓

Petit Chaton regarde dehors.Gros Minet regarde Petit Chaton.— Miaou, dit Petit Chaton.Je vois Gros Minet.Je ne veux pas aller dehors.

Petit Chaton regarde dehors.Gros Minet regarde Petit Chaton.— Miaou, dit Petit Chaton.Je vois Gros Minet.Je ne veux pas aller dehors.

✓ ✓ ✓ ✓

✓ ✓ ✓ ✓ ✓

✓ ✓ ✓ ✓

✓ ✓ ✓ ✓

✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓

— Je vais rester dans la maison,dit Petit Chaton.

Je suis un gentil petit chat.

— Je vais rester dans la maison,dit Petit Chaton.

Je suis un grand Je suis un gentil petit chat.

✓ ✓ ✓ ✓ ✓ ✓✓ ✓ ✓

✓ ✓ ✓ grand/RC ✓ ✓

gentil

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10 Guide d’exploitation pédagogique © Yves Nadon

Ces analyses ont l’avantage d’être réalisablesen classe, sans autres artifices qu’un crayon etune feuille. C’est une façon pratique et sûre demesurer son enseignement, d’établir les straté-gies à enseigner et de montrer aux enfants lesprogrès réalisés.

Que recherchons-nous comme comportementde lecteur ? Nous recherchons un lecteur quiécoute sa lecture, c’est-à-dire qui sache quand ilfait des erreurs : quand le sens est brisé, quandla syntaxe est fautive, quand ce qu’il reconnaîtavec ses yeux ne correspond pas à ce qu’il vientde lire.

Une fois l’écoute réalisée, nous analysons celle-ci pour décider quelles stratégies nous devronsenseigner et prendre des décisions concernantle niveau de difficulté de lecture à donner. Unautre point à analyser sera la raison qui a justi-fié une correction. L’enfant s’est-il corrigé grâceà des indices visuels, sémantiques ou syntaxi-ques ? Ici, ce sera notre jugement professionnelqui fera des hypothèses sur les raisons qui ontmené à cette correction. Ce que nous espéronsobserver lors de ces écoutes est une variétéd’indices utilisés pour la correction et non ladépendance à un seul indice.

Stratégies à montrer durant la lecture partagée et à enseigner durant la lecture guidée (non exhaustif)

Pour la compréhension :

• S’arrêter pour réfléchir à ce que nous venonsde lire.

• Faire une carte sémantique.• Faire une carte du caractère d’un person-

nage.• Utiliser l’écriture pour approfondir un texte.

Pour mieux lire un mot inconnu :

• S’attarder aux premières lettres pour trou-ver un mot.

• Utiliser les illustrations.• Regarder tout le mot.• Rechercher une séquence connue.• Sauter le mot et y revenir.• Combiner les indices sémantiques, synta-

xiques et graphophonétiques.• S’écouter, croiser les indices et s’autocorriger.• Lire la première syllabe et recommencer la

phrase.• Lire la fin du mot et recommencer la phrase.• Rechercher une fin de mot ou une syllabe

étudiées en classe.• Trouver un plus petit mot dans le mot.

Connaissances sur la langue :

• Le texte va de gauche à droite, la relationentre les lettres et le son, les mots sont for-més de lettres, la grammaire de la langue, lesconventions de l’écrit.

• Devenir efficace en prenant ces notesdemande de la pratique et de la régularité,mais l’information recueillie et les pistes quien résultent valent l’effort. Ces analysesnous aident donc à prendre des décisionséclairées sur l’enseignement à faire avec songroupe ainsi qu’aux individus qui le for-ment. Nous regrouperons ensuite lesenfants pour travailler des stratégies pré-cises : nous ferons de la lecture guidée.

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© Yves Nadon Guide d’exploitation pédagogique 11

Lecture guidéeLa lecture guidée est une lecture où nous ren-controns un groupe d’élèves pour un mêmebut. L’enseignant guide les élèves dans l’utilisa-tion de certaines stratégies pour lire seuls lelivre proposé. Il faudra donc certains livres encopies multiples. L’enseignant donne le soutiennécessaire pendant que les enfants assument deplus en plus la responsabilité de la lecture. C’estce que certains appelleraient de l’enseignementexplicite en petits groupes.

Les buts poursuivis sont les suivants :• donner du soutien pendant qu’ils tentent

des stratégies de lecture : prévision, confir-mation, autocorrection, vérification ainsi quel’utilisation des indices visuels (grapho-phonétiques et illustrations) et non visuels(sémantiques et syntaxiques) ;

• faire lire différents genres et styles ;• cibler des titres pour l’enseignement et l’ap-

prentissage de connaissances et de stra-tégies ;

• accroître la fluidité ;• créer des situations qui permettent aux

enfants de devenir des lecteurs indépen-dants et confiants ;

• offrir du soutien aux enfants pendant qu’ilsdiscutent, lisent et réfléchissent à leur lec-ture ;

• donner des défis réalistes qui encouragentles enfants à prendre de plus en plus de res-ponsabilités pendant qu’ils lisent ;

• observer et écouter fréquemment pourmieux enseigner et donner des conseils pré-cis et éclairés ;

• planifier l’instruction selon les observationset les notes recueillies.

Pour que les enfants puissent lire seuls un livre,le texte proposé ne devra être ni trop difficile nitrop facile mais, pour l’enseignement guidé,nous choisirons un livre légèrement difficile :confrontés à aucune difficulté, les enfants netenteront pas la stratégie enseignée. Nous nechoisirons pas non plus un livre trop difficile :face à trop de difficultés, la plupart des lecteurs,adultes compris, « disjonctent » et ne font quede la graphophonétique puisque la difficultédu texte le rend imprévisible et sans sens.

Un peu à l’image de Boucles d’or et des troisours, les livres lus seuls sont ceux de Bébé ours,et les livres utilisés pour la lecture guidéeseront ceux de Maman ours. Pour la lecturepartagée, nous utiliserons les livres de Papaours.

Avant la leçon, il est important de déterminer cequ’on veut montrer à un groupe d’enfants et debien sélectionner le texte et le niveau appropriés.

Durant la leçon, nous formerons donc desgroupes homogènes et dynamiques de 3 à5 élèves qui travailleront avec l’enseignant de10 à 20 minutes. Homogènes parce que l’ensei-gnant y enseignera des stratégies dont tous lesenfants du groupe ont besoin, et dynamiquescar elles changeront en cours d’année. Unenfant progresse plus vite, trois autres ontbesoin d’une intervention différente : le groupese transforme. Les enfants seront dans desgroupes hétérogènes quand ils discuteront delivres, quand ils travailleront dans certainesactivités.

L’enseignant regroupe les enfants à une tableou par terre, dans le coin de lecture. Il est utilequ’il ait près de lui les outils nécessaires à l’en-seignement : des lettres magnétiques, de petitstableaux pour écrire à la craie ou au feutre, ducarton pour écrire des mots et les copies multi-ples du livre qui sera lu. Nous voulons qu’unefois installé le groupe bénéficie d’une séance detravail ininterrompue.

Les leçons étant prévisibles, les enfants saisi-ront assez tôt dans l’année à quoi ils doivents’attendre. L’enseignant les informe de ce qu’ilsvont apprendre, pourquoi il est utile de le faireou de le savoir et quand le faire. Ils pratique-ront ensuite la stratégie ou l’objet de la leçon enlisant le livre choisi. L’enseignant ne lira pastout le livre avec eux : ils devront le lire seuls. Sil’enseignant le lit avec eux, il ne saura jamais ceque les élèves ont réussi à faire par eux-mêmes.

Voici un exemple de lecture guidée avec le livreUne fête pour Bruno (niveau Textes narratifs 8).

À qui s’adresse cette leçon ?• À quatre enfants qui ont de la difficulté avec

des mots ne faisant pas partie de leur langueorale.

Enseignant : Aujourd’hui, nous allons lireensemble ce livre. C’est un livre drôle à propos

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d’une souris qui fête son anniversaire. Commevous, cette souris invite des amis à son anniver-saire. Nous allons répéter quelques mots quevous lirez dans cette histoire. Je vous passechacun un tableau où vous écrirez certains mots.

(L’enseignant écrit le mot anniversaire avec deslettres magnétiques.)

Vous n’entendez pas souvent ce mot, vous uti-lisez habituellement le mot fête. Lisez-le enmurmurant à mesure que mon doigt passe endessous. Remarquez comment on fait le son [è]dans ce mot : a et i font le son [è] comme dans lemot maison. Écrivez maintenant ce mot survotre tableau.

Bien. Effacez et tentez de l’écrire sans copier.Prenez le temps d’observer le mot, de l’épeler,d’en reconnaître certaines parties… Écrivez-le.

Élève 2 : Je suis capable.

Enseignant : Bravo. Peux-tu effacer et recom-mencer ?

Élève 3 : Je me trompe toujours pour le nombrede n.

Enseignant : Prends le temps de bien regarderavant d’écrire. Je pense que tu veux aller tropvite. Ce mot prend deux n.

Élève 1 : J’ai réussi.

Enseignant : Parfait. Je vais l’écrire sur un car-ton et vous me dites quelles lettres je doisécrire.

Tous : a – n – n – i – v – e – r – s – a – i – r – e.

(L’enseignant recommence la même procédure avec lemot intérieur ; les enfants utilisent habituellementdedans.)

Enseignant : On va maintenant voir ensemblequelque chose d’étrange. Qui peut me lire cemot ? (L’enseignant a écrit manger en lettresmagnétiques.)

Élève 3 : Man… ger. Manger !

Enseignant : Bravo. C’est bien. On le lit tous.

Tous : Manger.

Enseignant : On se rappelle ensemble la règle àpropos des voyelles accompagnées d’un g.

(L’enseignant, avec les lettres magnétiques, fait unrappel des syllabes ge, gi, go, gui, ga, gue avecquelques mots qui contiennent ces syllabes.)

Enseignant : Bon. Regardons maintenant cemot que j’écris avec mes lettres magnétiques.J’écris m – a – n – g – o – n – s . Lisons-le ensemble.

Tous : Man… gon.

Enseignant : Ce mot n’existe pas. Nous avonsici un problème. Je veux écrire mangeons. Voicicomment on fait. J’écris manger (l’enseignant faittout ceci en manipulant les lettres magnétiques),j’enlève seulement le r et j’ajoute ons. De cettefaçon, le g se prononce comme un j, commedevant un e, mais le e devient muet. Je recom-mence. Voilà. Qui peut venir écrire mangeonsmaintenant que j’ai mêlé les lettres magnétiques?

Élève 3 : Moi ! M – a – n – g – e – o – n – s.

Enseignant : Superbe. Qui d’autre ?

Élève 2 : Moi ! M – a – n – g – e – o – n – s.

Enseignant : Vous êtes prêts à lire ce livre seuls.Souvenez-vous de la dernière leçon à propos demangeons. Vous en aurez besoin.

Maintenant, retournez au début du livre. Lisez-le doucement dans votre tête en suivant bien lesmots avec votre doigt. Je vais vous écouter un àla fois. N’oubliez pas de le faire chaque fois quevous lisez.

Le reste du déroulement de la lecture guidéesera de bien observer les illustrations et l’ensei-gnant portera une attention particulière à bienfaire ressortir dans les discussions les mots plusdifficiles pour les enfants.

À cette analyse, nous ajouterons plus tard lerappel de l’histoire qu’a fait l’enfant et desnotes sur la discussion qui a suivi, ce qui nouséclairera sur sa compréhension. Inutile de fairececi chaque fois que l’enseignant rencontre unenfant. Après certaines lectures, il demandera àl’enfant de lui raconter ce qu’il a lu. Il poserades questions et demandera des éclaircisse-ments à partir de ce qu’il lui racontera. Aubesoin, l’enseignant demandera à l’enfant cequ’il pense de certains passages, son opinionlittéraire du livre, s’il y a des phrases qui l’ontfrappé ou ses interprétations. Comme pour lesanalyses en lecture, ce n’est pas le rappel d’uneseule histoire qui est importante, mais bien lastructure générale qui se dégage de plusieursrappels.

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Organisation de la classeQue fait le reste des enfants de la classe pen-dant ce temps ? Ils lisent de façon indépen-dante ou réalisent des activités de façon auto-nome. Tôt dans l’année, l’enseignant doit créerun milieu et des routines qui lui permettront detravailler en toute confiance avec un grouped’élèves sans craindre un relâchement du restedu groupe.

Les enfants qui ne font pas partie du groupeciblé peuvent :• Lire des livres regroupés dans des sélections

préparées pour eux et respectant leur niveaude lecture.

• Réaliser des activités autour de certainslivres.

• Lire de grands livres seuls ou avec des pairs.• Lire à deux certains livres.• Faire l’écoute d’un livre enregistré.• Travailler à une tâche, sur des transparents.• Lire les murs de la classe.• Faire des activités centrées sur les lettres :

frottis, impression, calligraphie, lettresmagnétiques, lire des abécédaires.

• Lire des livres écrits par la classe et lesélèves.

• Écrire et prendre des notes informatives.• Faire des « lectures théâtre » .• Lire des livres du coin de lecture ou ayant

une thématique ciblée.• Lire des chansons, des messages ou des

poèmes.• Réaliser un projet.

Le but de ces activités est de faciliter une prati-que de la lecture et de permettre à l’enseignantd’enseigner : se libérer de la gestion pour se cen-trer sur l’enseignement.

Utilisés de façon professionnelle et éclairée, leslivres proposés ici aideront les enfants à deve-nir des lecteurs avides et autonomes. Parce quela collection est composée de livres de difficultécroissante, et non d’une rigide marche à suivreet de textes identiques pour tous, elle permetune souplesse d’application et le respect de laresponsabilité professionnelle de l’enseignant.

Yves NadonSherbrooke, juin 2002