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Appui au Développement Intégral et à la Solidarité sur les Collines BP 2695 Bujumbura Burundi Tél.: (+257) 22 25 75 20 /// 22 25 93 38 E-mail: [email protected] - www.adisco.org RECUEIL DES HISTOIRES DE SUCCES DES ENTREPRENEURS AGRICOLES ET NON AGRICOLES ACCOMPAGNES PAR LE PROJEUNES EMPLOI ENTRE JUIN 2015 ET MAI 2018

Appui au Développement Intégral et à la Solidarité sur les Collines … · 2019. 10. 29. · Appui au Développement Intégral et à la Solidarité sur les Collines BP 2695 Bujumbura

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Appui au Développement Intégral et à la Solidarité sur les Collines

BP 2695 Bujumbura BurundiTél.: (+257) 22 25 75 20 /// 22 25 93 38

E-mail: [email protected] - www.adisco.org

RECUEIL DES HISTOIRES DE SUCCES DES ENTREPRENEURS AGRICOLES ET NON AGRICOLES

ACCOMPAGNES PAR LE PROJEUNES EMPLOI ENTRE JUIN 2015 ET MAI

2018

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À l’origine, le projet est lancé par le père de Joël, le vénérable Emmanuel Nzikorera. Mais faute de temps, il abandonne. Son fils est venu reprendre le flambeau. Mais avant de s’intéresser à la pisciculture, Joël est un jeune paysan comme tant d’autres sur la colline Karama, zone Nyamabuye, commune Kabarore de la province Kayanza.

« En 2016, j’ai eu la chance de participer dans une formation de psychologie humaine dispensée par ADISCO. Ils nous ont appelés à nous regrouper dans des IGG (Imirwi yo Gushigikirana no Gufatana mu

nda), une sorte de tontine », raconte Joël Biribwahobiri.

Mais les IGG ne sont pas de simples tontines. « À part le principe de base d’une tontine qui est l’entraide financière à tour de rôle, l’IGG doit véhiculer un projet », confie Joël.

Et le projet que Joël choisit est d’élever des poissons, des tilapias, dans une piscine creusée dans la vallée, avec l’aide de ses cinq compères de l’IGG « Tworore ifi ». Juste à côté de celle que son père avait creusée.

1. Comment une tontine est parvenue à pêcher du poisson en montagne?

Les habitants vivant sur le littoral du lac Tanganyika devraient-ils être les seuls à consommer du poisson frais ? Non. Même les montagnards en sont friands. Joël et sa tontine ont alors relevé le défi.

À l’origine, le projet est lancé par le père de Joël, le vénérable Emmanuel Nzikorera. Mais faute de temps, il abandonne. Son fils est venu reprendre le flambeau. Mais avant de s’intéresser à la pisciculture, Joël est un jeune paysan comme tant d’autres sur la colline Karama, zone Nyamabuye, commune Kabarore de la province Kayanza.

« En 2016, j’ai eu la chance de participer dans une formation de psychologie humaine dispensée par ADISCO. Ils nous ont appelés à nous regrouper dans des IGG (Imigwi yo Gushigikirana no Gufatana mu nda), une sorte de tontine », raconte Joël Biribwahobiri.

Mais les IGG ne sont pas de simples tontines. « À part le principe de base d’une tontine qui est l’entraide financière à tour de rôle, l’IGG doit véhiculer un projet », confie Joël.

Et le projet que Joël choisit est d’élever des poissons,

des tilapias, dans une piscine creusée dans la vallée, avec l’aide de ses cinq compères de l’IGG « Tworore ifi ». Juste à côté de celle que son père avait creusée.

Travailler main dans la mainVirginie Sibomana, une des membres de l’IGG, fait part de sa joie : « Je remercie du fond du cœur ADISCO qui nous a enseigné comment travailler ensemble et mettre en place un projet dont les revenus viennent compenser les lacunes de l’agriculture ».

À Joël de renchérir : « Effectivement, si on n’avait pas travaillé ensemble, le projet n’aurait pas pu voir le jour. À 6, on a pu réunir 80 000 fbu pour démarrer notre activité. »

Mais les débuts ont été difficiles, deux membres sont partis, mais rapidement le groupe trouve d’autres personnes pour combler le vide. Le lac de rétention de 6 m sur 20 m a été creusé par les membres de l’IGG eux-mêmes.

Joël ne cache pas sa satisfaction :« Le premier essai n’a rien donné, mais maintenant à voir comment les poissons grandissent, il n’y a aucun doute qu’on aura une bonne récolte. Et ce n’est que le début ».

Challenge réussi

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2. A la rescousse des champs et des animaux d’élevageDans les pays développés, on appelle le 911 ou 112 pour les urgences. À Nyanzatubiri dans la commune Busiga, on appelle l’équipe de Domitien MIBURO pour tout problème survenu dans les champs ou les animaux d’élevage.

Ils sont 10 à être regroupés au sein de l’IGG « Tugarukire uburimyi n’ubworozi ». La moitié d’entre eux est constituée de vétérinaires de niveau A.

« Nous avions eu l’idée de nous regrouper dans une IGG (Imirwi yo Gushigikirana no Gufatana mu nda)

il y a de ça 2 ans après avoir vu comment dans les autres communes ce système aidait ses membres.», raconte Domitien Miburo, président de la tontine.

Le projet qu’ils veulent mettre en place se révèle essentiel.

« Au-delà de nos services constitués de soins, on a eu l’idée d’ouvrir une pharmacie vétérinaire afin que les gens viennent acheter les médicaments

directement chez nous» , confie encore Domitien.

Coup de pouceMais sans coaching, le projet se révéla plus que compliqué. Et d’approcher ADISCO alors. « La première chose qu’ADISCO nous a conseillée, c’est d’aller nous faire enregistrer à la commune. On vient tout juste d’obtenir notre agrément », révèle le président de la tontine.

ADISCO leur inculque aussi les principes de l’IGG. Pour démarrer le projet, chaque membre contribue à hauteur de 12 500 fbu. Mais la somme reste dérisoire. Ils se conviennent que chacun donne 2000 fbu à chaque réunion pour avoir la somme

nécessaire pour acheter les premiers médicaments.

« Maintenant, nous avons des pompes, des médicaments pour les ruminants, des seringues, etc, et 65 600 fbu sur notre compte », s’enorgueillit Philotée Gateretse, une jeune maman membre de l’association.

Leur pharmacie n’ira pas se cacher dans les collines. Pour ceux qui passeront par la RN1, ils ne manqueront pas de la voir au bord de la route, au niveau de Nyanzatubiri, à la grande fierté de membres de l’IGG « Tugarukire uburumyi n’ubworozi ».

3. Koreshibiboko, une seconde vie aux pneus en fin de parcours

Le recyclage n’est pas seulement l’apanage de grosses industries à la technologie sophistiquée. Il peut passer par l’ingéniosité de jeunes qui veulent gagner leur vie en proposant un outil essentiel à la sécurité des cyclistes, un frein.

En construisant un pneu pour une remorque lambda, il y a fort à parier que Michelin n’aurait jamais pensé que son produit finira sur une bicyclette. Et pourtant c’est le cas, grâce à Koreshibiboko.

Et qu’est-ce donc Koreshibiboko ? « Quand on dit ibiboko, certains pensent d’abord aux

hippopotames. Non, chez nous, ibiboko veut dire les freins fabriqués à partir des pneus usés. Koreshibibiko c’est donc Utilisons les pneus », explique dans un sourire Félix Ndarigendere, président de la coopérative Koreshibiboko.

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L’union fait la force

L’union fait la force

À Mparamirundi, commune Busiga dans la province Ngozi, ils sont connus. Leur lieu de travail se trouve même tout près du chef-lieu de la zone. Eux, ce sont les 17 jeunes, hommes et femmes fabricant de pneus, qui se sont réunis dans la coopérative Koreshibiboko.

« Avant, chacun travaillait dans son coin. En 2014, j’ai pu entrer en contact avec ADISCO, et par là, tout a pris son petit chemin. En 2016, on

eut droit à une formation psycho-humaine grâce à cette même organisation, qui nous a permis de comprendre qu’il est mieux de travailler en groupe. En août 2017, nous avions une coopérative forte de 17 personnes, subdivisée en 5 unités de travail», confie le jeune président Félix, fabricant de freins en pneus depuis une quinzaine d’années.

4. Gédéon Nduwimana : « La prune ou rien!»

Du haut de ses 34 ans, Gédéon regarde le passé avec un pincement au cœur et l’avenir avec un sourire radieux. Grâce aux prunes, il sait qu’il ne manquera de rien...

Les Burundais ne consomment pas de fruits. Un mensonge éhonté. Gédéon est là pour le contredire. Ce paysan de la colline Maruri, commune Kayanza, zone Kabuye, à la frontière de la province Ngozi, a 300 pruniers qu’il entretient amoureusement.

« En 2014 j’ai entendu dire que les pruniers rapportaient. Je m’y suis mis mais ça n’a rien donné. Puis ADISCO est venu et on a couru vers lui pour qu’il nous montre comment s’y prendre. C’était vers 2016...» , raconte le jeune père de famille. Le nous, c’est Gédéon et son voisin Richard. Ce dernier, un jeune qui terminait à l’époque l’école secondaire, avait lancé un projet de pruniers et à un certain moment, il avait même atteint 1000 plants de pruniers. « En voyant comment ses affaires marchaient, je ne

pouvais que lui emboîter le pas », fait savoir Gédéon.

La prune est ma meilleure amie

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Venu de loin

« Avant que j’apprenne avec ADISCO à ouvrir les yeux et voir loin, je gagnais tant bien que mal 20 000 fbu par mois. Peu pour nourrir une famille », évoque le planteur de pruniers.Maintenant, le chef du foyer peut facilement se faire 100 000 fbu, grâce essentiellement à ses prunes. Il a pu tripler pendant ce temps la taille de son exploitation, planter des tomates à côté des pruniers.En le voyant traverser le champ de pruniers en s’adressant à chaque arbuste comme à un être vivant, on ressent très bien la reconnaissance qu’il porte à ces fruitiers qui l’ont sorti de la misère.

Projections

Le plus grand défi pour l’agriculteur, c’est l’eau pour arroser ses plants. « Voyez, nos champs se trouvent sur les versants des montagnes. Acheminer l’eau jusqu’ici est un travail de titan », explique Gédéon.Mais si le travail n’est pas facile pour le moment, il l’était encore plus avant son projet de pruniers, « Mais ça ira beaucoup mieux dans quelques années quand j’aurais acheté une machine pour arroser mes plants », confie Gédéon avec un grand sourire.

5. Soap Company, la propreté fait-maison

Au chef-lieu de la commune Bugenyuzi trône une petite boutique au bord de la route. À l’intérieur de la petite pièce, des bidons estampillés BusSoap et au contenu verdâtre se serrent sur l’unique étagère. C’est le savon liquide made in Bugenyuzi, par Soap Company.

En 2014, cinq jeunes garçons de la commune Bugenyuzi et une jeune fille de la commune Gihogazi se réunissent au centre de Karusi pour penser à une affaire qui pourrait leur faire gagner de l’argent. Les idées se bousculent, mais aucune ne semble les satisfaire. C’était avant qu’ADISCO ne s’en mêle.

« ADISCO est venu donner une formation d’éveil entrepreneurial à certains d’entre nous. Ils nous ont enseigné comment les jeunes sans emploi peuvent se débrouiller eux-mêmes. Ils nous ont même fait visiter d’autres endroits comme chez Clovis à Bujumbura qui fabriquait ce savon liquide.

Nous l’avons acheté chez lui, et revendu ici.

Nous avons remarqué que les gens l’appréciaient. Nous avons alors pensé à le produire nous - mêmes », confie Augustin, un des membres de la jeune entreprise.

Au début, ce n’était pas évident. Après avoir réuni un capital de 580 000 fbu, ils ont dû bénéficier d’une

formation technique, d’un appui financier, un appui marketing pour pouvoir bien démarrer. « Parfois la qualité n’y était pas, et on devait tout reprendre. Mais on a persévéré », confie le jeune homme de 25 ans.

Une entreprise sur la bonne voie

« Si c’était une initiative individuelle, nul doute qu’on aurait lâché l’affaire. Mais grâce à ADISCO qui nous a appris à travailler main dans la main, on a encaissé les revers, jusqu’à parvenir au résultat que vous voyez », se rengorge le jeune homme.

Effectivement, le résultat est plus que satisfaisant. Si les clients ne se bousculent pas, ils viennent à une bonne fréquence. Ce qui fait le bonheur de Espérance Habonimana, la jeune fille que la jeune entreprise a engagée pour tenir la boutique : « Le savon se

vend tellement bien que je pense à leur demander ce qu’il faut pour faire partie de leur association ».

Une idée qui ne pourrait pas déplaire au reste du groupe, étant donné que chacun, en parallèle à sa contribution dans Soap Company, mène d’autres activités. « On ne peut vivre d’un seul métier », déclarera Augustin, avant d’ajouter : « Mais je pense que j’y consacrerai tout mon temps le jour où on dépassera le marché de Gitega pour couvrir Bujumbura. »

La propreté fait_maison Soap Campany»

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Chaque année, Cyprien devait aller cultiver les champs d’autrui en Tanzanie pour gagner sa vie, avec sur ses épaules le fardeau d’une dette remboursable avec un intérêt de 100% contractée chez un usurier. Une situation qu’il a reléguée au passé depuis quelque temps.

6. Cyprien GAHUNGU : « Les fruits m’ont sauvé la vie»

En kirundi, Cyprien était ce qu’on appelle

« umucangero », un individu qui cultive la terre d’autrui contre une rémunération. Une pratique qui parfois s’apparente à d’exploitation pure et simple.

« Souvent, sur le chemin de retour, je me faisais détrousser par des bandits de grand chemin. Je perdais tout ce que j’avais gagné. Je devais retourner en exil parce que rentrer sans l’argent de l’usurier était impensable », confie le jeune chef de foyer.

Mais c’était avant qu’il accède aux connaissances dispensées par ADISCO. « En 2015, je végétais chez mes parents, repensant sans grande envie à retourner travailler en Tanzanie, et puis j’ai appris qu’il y avait une institution qui voulait aider les

jeunes qui s’intéressaient à l’agriculture. J’ai saisi ma chance car rien ne pouvait être pire que le calvaire en Tanzanie », raconte le jeune homme de 24 ans.

Cyprien GAHUNGU : Maracuja mon amour

Succès fulgurant

« En me regardant, vous ne penserez pas qu’il y a à peu près trois ans, je n’avais presque rien », fait Cyprien, dans un geste de la main qui embrasse l’exploitation de maracujas, oignons et prunes qu’il a dans son arrière-cour.

Effectivement, en l’espace de deux ans, la vie de Cyprien a changé de fond en comble. Il a acheté deux terrains, dont un qui compte 300 plants de

pruniers. Tandis que dans le temps il gagnait une somme dérisoire de 50 000 fbu sur une période allant de 8 à 12 mois, actuellement il parvient à se faire entre 500 000 et 800 000 fbu. « Je vous le répète, j’étais dans une misère noire avant de commencer mon projet de fruits », assène-t-il.

L’usure, une épine dans le pied des paysans

Depuis mai 2018, Cyprien a été élu vice-président de l’association « Turwanyiriba », qui s’est donnée comme mission de combattre l’usure sous toutes ses formes. « Ayant été moi-même sujet à cette usure, je sais combien elle t’appauvrit », explique le jeune paysan.

Il a fini par s’en sortir et rêve que tous les paysans de sa commune, Gihogazi, en finissent avec cette pratique. En attendant, lui a d’autres rêves plein la tête. « J’aspire à créer une petite industrie pour la transformation de mes fruits », confie-t-il avec un sourire lumineux.

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7. Sicaire, le mécanicien qui voulait devenir grossiste

L’histoire est belle. De mécanicien lambda gagnant 30 000 francs bu par mois, Sicaire est parvenu en deux ans, à tripler ses revenus. Comment ?

Avant de croiser ADISCO, Sicaire se prenait rarement à rêver. Mais aujourd’hui, il se voit acheter une moto dans un futur proche, agrandir sa boutique de pièces de rechange. Comment cela s’est-il fait en si peu de temps ?

« Avant j’étais un mécanicien ordinaire ici au centre de Gihogazi. Je me faisais ni moins ni plus 30 000 fbu par mois », se remémore le jeune homme.

Puis en 2016, il apprend qu’ADISCO organise des formations et doit passer un test. «J’étais anxieux, mais grâce à Dieu je l’ai passé », se félicite-t-il.

Eurêka, je vois !

« Après la formation en éveil entrepreneurial, c’était comme si on venait de m’ouvrir les yeux. L’argent était tout le temps autour de moi, ce n’est que moi qui ne voulais pas le ramasser », confie-t-il.

Avec un capital de 150 000 fbu qu’il parvient à réunir grâce à du carburant qu’il vend au marché noir, il ouvre sa boutique de pièces de rechange

dans laquelle il se relaie avec son épouse.

« En même temps, avec les formations dispensées par ADISCO, j’aiguise mes connaissances. Maintenant je peux monter et démonter une moto entière, ce qui fait d’ailleurs de moi le meilleur mécanicien ici », se rengorge le jeune papa de deux enfants.

Un avenir en grand

« D’ici cinq ans, si je n’ai pas 20 millions sur mon compte, c’est que j’aurais travaillé pour rien », assure Sicaire. Pourtant, il n’y a pas deux ans, il ne possédait même pas de compte en banque.

En attendant, il connaît les avantages du travail en groupe. Il l’a déjà expérimenté dans les tontines mises en place grâce à ADISCO, appelées couramment IGG ( Imirwi yo Gushirigikirana no Gufatana mu nda). Aujord’hui, il pense à réunir les individus du centre de Gihogazi qui survivent grâce à des petits métiers (mécaniciens, coiffeurs pour hommes comme pour femmes, soudeurs, réparateurs de téléphones,…) dans ce qu’ils appellent Jua kali, un concept importé du Kenya.

Ce concept permet aux individus œuvrant dans différents secteurs de travailler dans une sorte de complémentarité et de s’entraider financièrement, un peu sur le modèle des tontines.

« Dans notre jua kali de Gihogazi, nous sommes parvenus à réunir des fonds qui vont nous permettre d’amener l’électricité jusqu’à notre lieu de travail », informe le jeune homme.

En attendant de finaliser les règlements de cette structure, Sicaire continue à amasser les connaissances. Il vient récemment d’obtenir son brevet de soudeur, grâce encore une fois à ADISCO.

mécanicien des vélos et les motos

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8. Turwanye iriba : annonce Innocent Ndihokubwayo « Turwanyiriba », la guerre à l’usure En commune Gihogazi, les usuriers font la loi, ou plutôt faisaient la loi. La coopérative « Turwanyiriba » a déclaré la guerre à cette pratique qui appauvrit plus qu’elle n’enrichit.

Iriba. Non, ce n’est pas un puits comme certains seraient tentés de le penser, mais ça y ressemble. Iriba vient du swahili « liba », qui signifie usure. Et l’usure à Karusi est un fléau : un taux d’intérêt fixé à 100%. Inhumain quand il s’applique sur un paysan aux revenus moyens. Mais les usuriers n’en ont que faire. Tant qu’ils font signer au pauvre paysan le double de la valeur de ce qu’ils viennent de lui accorder, le monde peut bien s’écrouler, tout ce qui les intéresse, c’est le bénéfice.

Mais c’étaient avant que la coopérative «Turwanyiriba » prenne à bras le corps ce fléau.

« Notre coopérative regroupe des agriculteurs, qui cultivent les oignons, gingembre, et maracuja qui contractaient l’usure », annonce Innocent Ndihokubwayo, président de la jeune structure.

« Chez l’usurier, tu contractes une dette de 100 000 francs bu, mais il te fait signer 200 000 fbu. Pour les agriculteurs, on peut demander des semences à un usurier et en retour tu lui accordes la moitié

de ta récolte. Ce qu’on ne pouvait plus supporter », confie le jeune instituteur, d’un ton ferme.

Abanywanyi ba koperative Turwanyiriba

Des débuts difficiles« Quand nous avons eu l’idée de créer la coopérative, ça n’a pas été facile car parmi ceux qui plantaient les oignons, il y en a qui pratiquaient l’usure. Ils ont senti que leurs intérêts étaient menacés et ont voulu nous mettre les bâtons dans les roues », se rappelle Innocent. Mais lui et ceux qui avaient adhéré à la philosophie de l’association tiennent bon, avec raison car la coopérative protège ses membres.

« Quand un membre de la coopérative a besoin d’argent, nous lui en donnons. On stocke aussi

leur production car à chaque récolte les prix ont tendance à chuter. Nous leur fournissons de l’argent pour attendre que les prix se stabilisent. Et tout cet argent vient de leur contribution », explique le jeune président de la coopérative.

Maintenant, Innocent a de quoi se sentir fier. Sur les 57 membres de la coopérative, 100 % contractaient l’usure avant d’intégrer la coopérative. « Mais maintenant, plus aucun », se félicite le jeune homme de 28 ans.

9. Darlène Ndorimana, entrepreneure écolo et fière de l’être

Parler écologie au Burundi revient à parler mandarin. Pourtant, elle est au cœur de plusieurs politiques dans le reste du monde. Qu’obtient-on quand on marie écologie et business ? RC Retraining bien sûr, la jeune entreprise de Darlène Ndorimana.

S’il y a 10 jeunes filles qui forcent l’admiration à Bujumbura, voire dans tout le pays, Darlène en fait partie. Intelligente, posée, déterminée, elle est le prototype de l’entrepreneure qui veut avancer. Et son parcours atypique ne le contredit pas. Son diplôme de droit en poche, elle intègre un bon cabinet d’avocats à Bujumbura, mais son cœur n’y

est pas. « Depuis l’université, je savais que je devais travailler dans l’environnement mais je ne voyais pas comment m’y prendre », confie la jeune fille.

Dans sa tête, la jeune fille pense à l’assainissement général de la ville de Bujumbura en combattant sa bête noire, les emballages et bouteilles en plastique. « L’aversion que je voue aux plastiques est d’abord

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une affaire personnelle. Un jour je me rappelle, j’ai voulu faire la cuisson et j’ai pris un sachet noir pour allumer la braise. Quand j’ai aspiré la fumée, j’ai eu des allergies qui se sont transformées en des sinusites aiguës », raconte la jeune fille.

Mais l’assainissement suffit-il ? Que faire de ces déchets ? La jeune femme pense alors à les recycler en accessoires de décoration pour sandales ou porte-clés, en meubles, etc.

Simple, mais déterminée

RC RetrainingSi l’idée est belle, la mettre en pratique est autre chose. C’est là qu’ADISCO entre en jeu. « Ils m’ont accompagnée dans le développement du prototype, la connexion avec les partenaires cordonniers et tisseuses, la mise à disposition d’un atelier de production et d’un point de vente, l’accès au financement banque et cofinancement d’ADISCO », révèle la jeune fille, reconnaissante.

Pourtant, son entourage ne comprend pas comment une jeune avocate douée se passionne dans « le recyclage des sachets ». « C’est juste qu’ils ne comprennent pas. Mais moi j’ai persévéré car c’est devenu au fil du temps mon emploi à temps plein! », explique l’entrepreneure.

Depuis janvier 2018, la jeune entreprise fondée par Darlène compte 10 employés elle y comprise:

8 tisseuses qui habitent à Busiga, le cordonnier et un vendeur. Le succès de la petite entreprise est indéniable. En 2017, le chiffre d’affaires annuel s’élève à quelques 12 millions de francs burundais. En parallèle, Darlène ramasse des prix ici et là. En 2018, elle a gagné le prix de la francophonie sur les emplois verts. Elle a aussi été choisie comme une des trois entrepreneurs pour représenter le Burundi dans une foire en Allemagne et elle a été aussi la seule burundaise à représenter le Burundi pour le European Development Day en Belgique au mois de mai.

10. Karababa, le piment que vous allez tous adorer

Emmanuel et Salomon, deux jeunes hommes qui se perfectionnent dans l’agroalimentaire vous présentent Karababa, un piment liquide fabriqué et transformé à Bujumbura. Akabanga, l’autre piment liquide importé du Rwanda, a du souci à se faire. Avec Karababa, il s’est trouvé un sérieux concurrent.

Un jour, une sentinelle approche un élève du secondaire. Non, ce n’est pas le début d’une blague mais les prémices d’une belle success story.

Donc Emmanuel Nahimana, sentinelle,

papa de trois enfants, approche Salomon, 23 ans, élève en agroalimentaire au Centre de formation professionnelle de Kigobe pour un projet : transformer le piment.

«Fabriquer du piment

« Auparavant, j’avais reçu une formation de psychologie humaine et d’éveil entrepreneurial grâce à ADISCO. Cela m’a poussé à penser à un business que je pourrais lancer. L’idée d’un piment s’est présentée à moi vu le succès du piment Akabanga, importé du Rwanda », confie Emmanuel.

Mais dans la formation psycho-humaine, l’entrepreneur en verve a appris qu’il est

mieux de travailler en groupe. Il se cherche un associé, qu’il trouve en la personne de Salomon.

« Nous avons réuni un capital de 50 000 fbu chacun qu’on a mis en commun pour démarrer notre affaire », raconte le jeune élève.

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Voici le meilleur piment liquide du Burundi

«Fabriquer du piment n’est pas aussi aisé qu’on pourrait le penser. Nous avons fait face à plusieurs échecs successifs. Notre produit se gâtait du jour au lendemain. On a enregistré des pertes immenses », se rappelle Emmanuel.Le duo, découragé, approche un technicien de l’ADISCO. Ce dernier leur prodigue des conseils et les encourage à persévérer. Les deux jeunes hommes se remettent à l’œuvre. « Et on a fini par réussir », se félicite Emmanuel.

Des débuts difficiles

Le bout du tunnel

Les deux entrepreneurs possèdent maintenant leur propre marque qu’il distribue dans plusieurs alimentations de Bujumbura. « Nous vendons notre flacon de 60 ml 2500 fbu par pièce mais c’est 2200 quand on achète en gros », informe Salomon.

Avec leur capital de 100 000 fbu, ils n’auraient jamais pensé qu’un jour ils pourraient brasser un chiffre d’affaires de 500 000 fbu par mois. « Bientôt, on s’essayera à la fabrication du lait de soja, de vins, de ketchups. On ne peut pas s’arrêter en si bon chemin », confie Emmanuel.

11. Coopérative Comme chez Soi « CCS », la coopérative qui veut former nos nounous

« Comme chez soi » « Comme chez soi » est une coopérative sociale atypique. Composée de psychologues, elle s’est donnée comme mission de former nos nounous.

À la base, il y a Zénon Kwizera, jeune psychologue de 33 ans. «En 2015, j’ai eu droit à une formation de psychologie humaine dispensée par ADISCO, afin de nous pousser à élaborer de petits projets. Mais je n’ai pas été satisfait car je voulais développer quelque chose en rapport avec mon domaine d’expertise, la psychologie», confie le jeune homme.

D’approcher alors un expert d’ADISCO qui lui recommande de former d’abord une tontine. Ce qu’il fait avec d’anciens condisciples : 11 psychologues et une jeune fille fraîchement diplômée en économie. L’idée première est alors de lancer une crèche. Mais le coût est élevé. De penser alors à créer une sorte de coopérative sociale qui pourrait donner des cours à des nounous.

« On s’est rendu compte qu’à Bujumbura, plusieurs parents laissent leurs enfants dans les mains des bonnes et partent travailler. Mais rien ne garantit que ces dernières sachent prendre soin des enfants. Pourquoi ne pas alors former les

futures nourrices à comprendre et prendre soin de l’enfant ? », Se disent les jeunes membres de la coopérative. Ainsi est né « Comme chez soi Burundi».

Heureuse de recevoir les certificats

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Il n’y a pas de sot métier

« Nous avons fait appel aux élèves qui terminaient l’école fondamentale, les humanités générales, et même les licenciés qui étaient chômeurs. Nous avons diffusé l’information sur les réseaux sociaux, et les médias locaux. Nous avons pu avoir 12 personnes à former en nursing. Nous les avons formés pendant un mois, sur le développement de l’enfant, et nous leur avons donné des certificats », confie Zénon.

La suite ? « Nous les plaçons dans des familles aisées,

des crèches. Quand ils trouvent du travail de leur côté, nous faisons un suivi : l’employeur a sa fiche, et nous, nous avons la nôtre afin d’évaluer notre poulain», explique le jeune président de la coopérative.

Euphémie Ndayirorere, une des jeunes a avoir bénéficié de la formation de CCS, confie : « Malgré ma licence, je ne rechigne pas à travailler comme nounou. Il n’y a pas de sot métier, tant qu’il te nourrit ».

Des débuts promoteurs

« Comme chez soi » n’est pas une idée inédite. À Kinshasa en RDC, la structure existe, et d’ailleurs les psychologues avaient pu bénéficier d’une formation avec un des initiateurs de ce concept. Des connaissances qui vont s’avérer utiles pour le lancement de leur propre structure.

En 2017, les jeunes psychologues bénéficient d’un financement de la fondation Baudouin qui leur permet d’acquérir des locaux. En janvier, ils sont enregistrés à l’Agence de promotion de l’investissement au Burundi (API). Le travail proprement dit vient de commencer.

12. Benjamin Nkurunziza, d’électronicien à imprimeur

Après avoir terminé ses études secondaires à l’ETS Kamenge, Benjamin n’aurait jamais cru travailler dans le monde des mots. Pourtant, le voilà maintenant qui, à défaut de les écrire, les imprime dans la plus grande imprimerie privée du Burundi.

Un phare dans la nuit

« En 2016, j’ai eu la chance de participer dans une formation de psychologie humaine organisée par ADISCO. Mais après, je n’ai pas su quoi faire avec. Je suis donc retourné végéter dans ma vie de tous les jours », confie le jeune homme de 28 ans.

« Mais au mois de mai 2017, je reçois un coup de f i l d’ADISCO qui m’invite dans un forum des métiers au Palais des Arts.

On nous a demandé de choisir chacun une société que nous préférions car il y avait beaucoup de sociétés qui exposaient sur leurs œuvres et moi j’ai choisi Hope Design. Quelques jours après, on m’informait qu’on avait obtenu un stage pour moi», se rappelle Benjamin.

M a l h e u r e u s e m e n t , le jeune homme fait face à quelques soucis financiers, il ne pourra

rejoindre son stage qu’en novembre 2017.

Intégration

« Même si je ne les ai pas appliquées directement, les leçons qu’on m’a apprises dans la formation psycho-humaine m’ont aidé à m’intégrer dans ce nouveau milieu. Les machinistes m’ont accueilli à bras ouverts », assure le jeune homme.

Tellement bien intégré que son chef direct, le conducteur de machine offest, Liévin glissera

quelques mots sur son poulain : « Il apprend vite. Je lui confie même des responsabilités.»

Le jeune homme rêve d’être embauché dans la société Hope Design, confiant qu’il est tombé amoureux de ce métier. « Et d’ici cinq ans, j’aurais ma propre imprimerie, pourquoi pas ? », fait-il, pince-sans-rire.

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13. De bricoleurs à électroniciens qualifiés

Dans l’après-midi du 1er juin, ils sont 16 jeunes hommes à s’affairer autour de divers appareils électroniques dans la salle de formation de GLICE. Fébrile, chacun tient à finir son travail avant la remise des certificats. Graûls Ntibandetse fait des derniers tests sur son amplificateur fabriqué à la main. La musique, forte, remplit la salle. L’ambiance est à la joie.

Ézéchiel, Régimus, Graûls, Jean Claude, etc., tous étaient de simples bricoleurs dans leur commune, avant de participer dans cet atelier. Mais maintenant, ce sont de vrais « techniciens ».

« Avant je ne vendais que de l’énergie photovoltaïque dans ma commune.

Maintenant je sais réparer les panneaux solaires. Je n’aurais plus besoin d’aller chercher un charlatan qui me facturera l’impossible», confie Régimus.

Graûls, qui est parvenu à construire un amplificateur, voit un marché florissant s’ouvrir devant lui :

« Fabriquer un amplificateur ne me coûte que 15 000 fbu avec tout le matériel à acheter, mais je sais que je pourrais facilement

le revendre à 30 000 fbu, même plus ».

Quant à Avelin Kubwimana, représentant des jeunes ayant pris part à cette formation, il exhortera ses condisciples à honorer leurs futurs métiers qui vont de la réparation d’appareils électroniques à la maintenance des équipements solaires et biomédicaux.

Ce n’est pas à l’école qu’on apprend seulement.

La joie de la réussite se partage

Cette joie, elle est méritée. Ces quatre mois n’ont pas été de tout repos. Au début, personne parmi les apprentis ne savait ce que ça allait donner à la fin. Les professeurs n’étaient pas aussi sereins, mais lors de ce dernier jour, on les surprend à sourire devant le pas franchi par leurs poulains.

« Quand je vous regarde, je vois des jeunes

hommes de bonne volonté », déclarera avant la remise des certificats Carine Nzoyihera, de Glice, la structure qui a dispensé la formation et qui s’est donnée comme objectif de réduire la fracture informatique. Chantal Ntima, chef du Projeunes à ADISCO, abondera dans le même sens : « Je suis fière de vous. Partez et développez le Burundi!».

Chantal Ntima, chef du Projeunes emploi à

ADISCO, abondera dans le même sens : « Je suis fière de vous. Partez

et développez le Burundi!».

Durant quatre mois, 16 jeunes venus de différentes régions du Burundi ont bénéficié d’une formation dans plusieurs domaines de l’électronique à Bujumbura. Des cours dispensés par Glice avec l’appui d’ADISCO.

« Quand je vous regarde, je vois des jeunes hommes de

bonne volonté », déclarera avant la remise des certificats Carine

Nzoyihera, de Glice.

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