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CAS CLINIQUE Azoospermie et tétrasomie 48,XXYY : quelle prise en charge de l’infertilité ? 48,XXYY men with azoospermia: How to manage infertility? C. Roche a, * ,b , C. Sonigo a,b , N. Benmiloud-Tandjaoui a,b , J. Boujenah a,b , B. Benzacken a,b , C. Poncelet a,b , J.-N. Hugues a,b a Pôle femme et enfant, site Jean-Verdier, groupe hospitalier HUPSSD, AP–HP, avenue du 14-Juillet, 93143 Bondy, France b Université SMBH Leonard-de-Vinci, Paris-13, 93000 Bobigny, France Reçu le 25 novembre 2013 ; accepté le 31 janvier 2014 Disponible sur Internet le 13 juin 2014 Résumé La tétrasomie 48,XXYY est une aneuploïdie gonosomique rare. Souvent considérée comme un variant du syndrome de Klinefelter du fait de caractéristiques communes (azoospermie, grande taille, hypogonadisme hypergonadotrope), il s’agit d’une entité distincte avec un diagnostic le plus souvent pédiatrique du fait de trouble du développement neuropsychologique. Nous rapportons ici le cas d’un patient 48,XXYY diagnostiqué à l’âge adulte dans un contexte d’infertilité et discutons l’indication de réaliser une biopsie testiculaire chez ce patient. ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Abstract 48,XXYY syndrome is a rare form of sex chromosomal aneuploidy. Usually considered as a variant of Klinefelter syndrome because of shared features (azoospermia, tall stature, hypergonadotropic hypogonadism), it is a separate entity because diagnostic is currently made in prepubertal boy with neuro-psychological disorders. We here report the case of a 48,XXYY patient consulting for adult infertility and the indication to perform testicular sperm extraction is discussed. ß 2014 Elsevier Masson SASElsevier Masson SAS. All rights reserved. Mots clés : Syndrome 48,XXYY ; Syndrome de Klinefelter ; Azoospermie secrétoire ; Biopsie testiculaire Keywords: 48,XXYY syndrome; Klinefelter syndrome; Non obstructive azoospermia; Testicular sperm extraction 1. INTRODUCTION Le syndrome de Klinefelter (SK) est la première cause d’anomalie gonosomique humaine retrouvée chez 0,1 à 0,2 % des nouveaux-nés mâles [1]. La présence d’un chromosome X supplémentaire est à l’origine d’un défaut de la spermatogenèse souvent associé à un hypogonadisme et à des particularités cliniques comme une grande taille ou une dysmorphie faciale. La formule chromosomique la plus communément observée dans le SK est 47,XXY. Les formes homogènes des SK sont à l’origine d’une azoospermie. Les mosaïques des chromo- somes sexuels comprenant des lignées 47,XXY peuvent être responsables de formes frustes. Gynécologie Obstétrique & Fertilité 42 (2014) 528–532 * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Roche). http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2014.05.009 1297-9589/ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re ´serve ´s.

Azoospermie et tétrasomie 48,XXYY : quelle prise en charge de l’infertilité ?

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CAS CLINIQUE

Azoospermie et tétrasomie 48,XXYY : quelle priseen charge de l’infertilité ?

48,XXYY men with azoospermia: How to manageinfertility?C. Roche a,*,b, C. Sonigo a,b, N. Benmiloud-Tandjaoui a,b, J. Boujenah a,b,B. Benzacken a,b, C. Poncelet a,b, J.-N. Hugues a,b

a Pôle femme et enfant, site Jean-Verdier, groupe hospitalier HUPSSD, AP–HP, avenue du 14-Juillet, 93143 Bondy, Franceb Université SMBH Leonard-de-Vinci, Paris-13, 93000 Bobigny, France

Reçu le 25 novembre 2013 ; accepté le 31 janvier 2014Disponible sur Internet le 13 juin 2014

Résumé

La tétrasomie 48,XXYY est une aneuploïdie gonosomique rare. Souvent considérée comme un variant du syndrome deKlinefelter du fait de caractéristiques communes (azoospermie, grande taille, hypogonadisme hypergonadotrope), il s’agitd’une entité distincte avec un diagnostic le plus souvent pédiatrique du fait de trouble du développementneuropsychologique. Nous rapportons ici le cas d’un patient 48,XXYY diagnostiqué à l’âge adulte dans un contexted’infertilité et discutons l’indication de réaliser une biopsie testiculaire chez ce patient.� 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Abstract

48,XXYY syndrome is a rare form of sex chromosomal aneuploidy. Usually considered as a variant of Klinefelter syndromebecause of shared features (azoospermia, tall stature, hypergonadotropic hypogonadism), it is a separate entity becausediagnostic is currently made in prepubertal boy with neuro-psychological disorders. We here report the case of a 48,XXYYpatient consulting for adult infertility and the indication to perform testicular sperm extraction is discussed.� 2014 Elsevier Masson SASElsevier Masson SAS. All rights reserved.

Mots clés : Syndrome 48,XXYY ; Syndrome de Klinefelter ; Azoospermie secrétoire ; Biopsie testiculaire

Keywords: 48,XXYY syndrome; Klinefelter syndrome; Non obstructive azoospermia; Testicular sperm extraction

Gynécologie Obstétrique & Fertilité 42 (2014) 528–532

1. INTRODUCTION

Le syndrome de Klinefelter (SK) est la première caused’anomalie gonosomique humaine retrouvée chez 0,1 à 0,2 %des nouveaux-nés mâles [1]. La présence d’un chromosome X

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (C. Roche).

http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2014.05.009

1297-9589/� 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

supplémentaire est à l’origine d’un défaut de la spermatogenèsesouvent associé à un hypogonadisme et à des particularitéscliniques comme une grande taille ou une dysmorphie faciale.La formule chromosomique la plus communément observéedans le SK est 47,XXY. Les formes homogènes des SK sontà l’origine d’une azoospermie. Les mosaïques des chromo-somes sexuels comprenant des lignées 47,XXY peuvent êtreresponsables de formes frustes.

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D’autres anomalies chromosomiques plus rares sontdécrites dans la littérature [2] et considérées comme des« variants ». Tel est le cas de la tétrasomie 48,XXYY.

À propos d’un cas clinique, cet article vise à présenter lescaractéristiques de ce variant de SK, puis à discuter l’opportunitéd’une biopsie testiculaire. Notamment, quelles sont les chancesde collecter des spermatozoïdes et quel est le risque detransmission d’anomalies chromosomiques à la descendance ?

2. CAS CLINIQUE

Monsieur T âgé de 32 ans a consulté dans notre centre pour uneinfertilité primaire du couple de 5 ans. M. et Mme T. sont doublescousins germains : leurs pères sont frères et leurs mères sont sœurs.Le bilan féminin était parfaitement normal (bilan hormonal etéchographique).

À la consultation initiale, M. T. mesurait 1,97 m et pesait 87 kg. Ilavait été opéré dans l’enfance d’une cryptorchidie gauche. Ledéveloppement pubertaire aurait été normal. Cependant, à l’examenclinique on retrouvait un hypoandrisme avec une gynécomastie etune hypotrophie testiculaire bilatérale. Le patient présentait, parailleurs, une hypotonie avec les épaules tombantes et untremblement postural ainsi qu’une dysmorphie faciale modéréeavec une face allongée et un rétrécissement bitemporal.

Deux spermogrammes effectués en septembre 2010 et février2012 révélaient une azoospermie à volume et pH normaux.

Le bilan hormonal mettait en évidence une FSH augmentée(30,5 UI/L), une testostérone biodisponible à la limite inférieure de lanormale (1,8 ng/mL) et une inhibine B effondrée (< 10 pg/mL). Àl’échographie l’hypotrophie testiculaire bilatérale a été évaluée à3 mL avec une varicocèle bilatérale grade I/II sans autre anomalieassociée. La recherche de micro-délétion du chromosome Y étaitnégative. Le caryotype constitutionnel concluait à une formule

Fig. 1. Méïose normale.

chromosomique 48,XXYY homogène. Une évaluation neuropsy-chologique n’a pas pu être réalisée, du fait du refus du patient.

Après une consultation de conseil génétique et une réunion deconcertation pluridisciplinaire, il a été proposé au couple d’effectuerune biopsie testiculaire (BT). En cas de recueil positif, une étude ducontenu chromosomique des spermatozoïdes par FISH pouvait ainsiêtre effectuée afin d’étudier le degré d’aneuploïdie des spermato-zoïdes et de réaliser éventuellement une ICSI.

La BT bilatérale a mis en évidence un syndrome de Sertoli-Cells-Only avec une aplasie complète des cellules germinales, une sclérosedes tubes et une hyperplasie importante des cellules de Leydig.

Le couple a décidé de s’inscrire au CECOS pour bénéficier d’undon de sperme.

3. DISCUSSION

3.1. Syndrome de Klinefelter et tétrasomie48,XXYY

Le syndrome 48,XXYY représente une anomalie chro-mosomique à type d’aneuploïdie caractérisée par la présenced’un chromosome X et d’un chromosome Y supplémentaireschez un garçon. Il a été décrit pour la première fois en 1960.Il a une incidence annuelle de 1/18 000 à 1/50 000 naissancesmâles.

3.1.1. Formation d’un zygote 48,XXYYPlusieurs hypothèses de malségrégations méïotiques sont

possibles pour expliquer l’obtention d’un zygote 48,XXYY.D’après la représentation schématique de la méiose normale(Fig. 1), la formation d’un zygote 48,XXYY n’est possible que s’ily a eu deux anomalies au cours de la méiose masculine, ou si il ya eu une anomalie au cours de la méiose féminine et uneanomalie au cours de la deuxième division méiotique masculine

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expliquant la présence du double Y. Trois situations sont doncpossibles (Fig. 2) :� première hypothèse : une non disjonction se produit au

cours de la première division gamétique au cours de laspermatogenèse de telle sorte que le spermatocyte II est

Fig. 2. Hypothèses de malségrégations méïotiques permettant d’expliquerl’obtention d’un zygote 48,XXYY.

24,XY. Une deuxième non disjonction des chromatides cettefois intervient et le spermatozoïde aura 25,XYY chromo-somes. Lors de la fécondation d’un ovocyte 23,X le zygoteformé comportera 48,XXYY chromosomes ;� deuxième hypothèse : on peut également imaginer une non

disjonction au cours de l’ovogenèse en première division ouen deuxième division aboutissant à un ovocyte à 24,XXchromosomes. La non disjonction des chromatides Y aucours de la deuxième division méiotique masculine aboutit àun spermatozoïde à 24,YY chromosomes ;� troisième hypothèse : après une non disjonction au cours de

l’ovogenèse, un ovocyte à 22 chromosomes dépourvu dechromosome sexuel peut être fécondé par un spermato-zoïde, 26,XXYY qui a subi deux non disjonction méiotique aucours de la spermatogenèse.

3.1.2. Caractéristiques cliniquesLe syndrome 48,XXYY a longtemps été considéré comme

un variant du SK dit « classique » du fait de caractéristiquesphysiques et endocrinologiques communes (grande taille,micro-orchidie, hypogonadisme hypergonadotrope et inferti-lité). Pourtant, il est aujourd’hui décrit par de nombreuxauteurs comme une entité distincte du fait des anomalies dudéveloppement neuropsychologique, des particularités physi-ques, et des complications médicales spécifiques retrouvéeschez ces patients.

La plus grande série de patients 48,XXYY incluant 95 cas aété publiée en 2008 [2]. Dans cette cohorte, aucun diagnosticn’a été fait dans un contexte de bilan d’infertilité. Dans près de70 % des cas, le caryotype a été réalisé devant une anomalie dudéveloppement psychomoteur ou du comportement, et dansprès de 50 % des cas, le diagnostic était fait avant l’âge de 6 ans.Le diagnostic est donc généralement posé beaucoup plusprécocement que dans le cas du SK où le caryotype postnatalest réalisé avant l’âge de 10 ans dans seulement 3,6 % des cas.Ceci s’explique par l’existence en première ligne dans lesyndrome 48,XXYY de troubles de l’apprentissage et dulangage associés à un déficit intellectuel léger (QI moyen à 77). Ils’y ajoute des troubles du comportement (anxiété, agressivité,difficulté de communication) et des troubles psychiatriques(hyperactivité, dépression) qui justifient souvent une consulta-tion dans la petite enfance.

Au plan morphologique, le patient porteur d’une tétrasomie48,XXYY est souvent plus grand que le Klinefelter classique,avec une taille moyenne à l’âge adulte de 192,4 cm (versus179–188 cm pour le SK). Il existe une dysmorphie faciale à l’âgeadulte (visage allongé, asymétrie faciale, rétrécissementbitemporal, hypertélorisme, plis des épicanthus. . . ), associéeà d’autres éléments dysmorphiques (clinodactylie du 5e doigt,cubitus varus du coude, pieds plats. . . ).

Le patient 48,XXYY est plus exposé à des complicationsmédicales que le patient Klinefelter, avec un risque augmentéde malformations congénitales cardiaques et squelettiques(synostose radio ulnaire. . . ), des troubles neurologiques(épilepsie), des anomalies dentaires et ophtalmologiques, destroubles respiratoires (asthme, infections respiratoires), destremblements, et un risque d’obésité et de diabète de type 2.

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L’hypogonadisme attendu chez les hommes avec polysomieY est retrouvé de manière quasiment systématique. Il n’y a pasd’étude qui compare directement l’hypogonadisme dans le SKet le syndrome 48,XXYY, mais les caractéristiques cliniques etbiologiques, ainsi que les données de l’histologie testiculaire,montrent des résultats similaires à ceux connus dans le SK [3].

Il s’agit donc le plus souvent d’un diagnostic pédiatrique faitdevant des anomalies du développement neuropsychologique.La question de l’hypogonadisme et de la fertilité de ses patientspeut alors sembler secondaire. D’ailleurs, dans l’analyse de lacohorte de Tartaglia [2], ce problème n’est pas évoqué.Pourtant, grâce aux techniques actuelles de micro-injectionspermatique, et aux possibilités de diagnostic pré-implanta-toire, la question de la réalisation de la biopsie testiculaire chezces patients est légitime.

3.2. Doit-on proposer une biopsie testiculaire à unpatient porteur d’une tétrasomie 48,XXYY ?

La question de la biopsie testiculaire se pose particulière-ment chez ce patient car les connaissances actuelles nepermettent pas de connaître les chances de retrouver desspermatozoïdes lors d’une BT ni d’évaluer les risques detransmissions d’anomalies chromosomiques si celle-ci estpositive. En effet, du fait de la rareté de ce syndrome, il n’ya pas, à notre connaissance, d’étude ni de cas cliniquerapportant une paternité chez des patients présentant uncaryotype 48,XXYY. Pour tenter de répondre à ces questionset d’orienter au mieux notre prise en charge, nous noussommes inspirés des données de la littérature concernant lesSK « classiques » (caryotype 47,XXY).

Dans le cadre d’un SK classique, les chances de retrouverdes spermatozoïdes lors d’une BT sont d’environ 50 %. Alorsque certains facteurs prédictifs, comme l’inhibine B [4] ont puêtre proposés dans les azoospermies à caryotype et FSHnormaux, seul l’âge semble influencer les chances de retrouverdes spermatozoïdes lors de la BT chez les patients SK [1,5].Ceci est en accord avec le concept de dégradation progressivede la spermatogenèse chez les patients SK. Il devrait en être demême chez les patients présentant des variants du SK car lesmécanismes d’atteintes de la spermatogenèse sont identiques.

Avant l’ère de l’injection intra-cytoplasmique de spermato-zoïdes (ICSI) les patients azoospermes atteints d’un SK étaientconsidérés comme stériles. Depuis l’avènement de la BT et del’ICSI, certains patients atteints d’un SK peuvent avoir desenfants biologiques et la question du risque de transmissiond’anomalies chromosomiques a pris toute sa place.

Sur un plan strictement théorique, 50 % des gamètes issuesd’un patient atteint d’un SK classique devraient présenter uneaneuploïdie gonosomique. Chez un patient 48,XXYY, cedevrait être le cas de quasiment 80 % des gamètes. Cependant,des études par FISH réalisées chez des patients présentant unSK classique ont observé un pourcentage de spermatozoïdesaneuploïdes très largement inférieur à ce que ne le voudrait leschéma classique de ségrégation des gonosomes à partir d’unespermatogonie 47,XXY qui achèverait sa méiose. Plusieursthéories ont été avancées pour expliquer ce phénomène. Selon

certains auteurs, les spermatogonies 47,XXY pourraientfranchir les étapes de la méiose [6,7]. Cependant, commeles tubes séminifères sont colonisés par des spermatogonies47,XXY et 46,XY en proportion très variable selon les études,les spermatozoïdes euploïdies et aneuploïdes seraient issus deces 2 populations de spermatogonies [6,7]. Inversement, selond’autres auteurs, les spermatogonies 47,XXY ne seraient pascapables de franchir les étapes de la méiose. La présence d’unchromosome X supplémentaire empêcherait l’entrée enméiose et induirait l’apoptose de ces cellules. Dans cettesituation où seules les spermatogonies XY pourraient franchirla méiose. Le taux plus important d’aneuploïdie serait expliquépar un « environnement testiculaire défavorable » entraînant deserreurs de ségrégation. Cette dernière théorie, d’abordélaborée chez la souris [8], semblerait confirmée chez l’Hommecar une étude récente ne retrouve que des spermatocyteseuploïdies au stade pachytène [9]. Cette théorie permettraitégalement d’expliquer le taux plus important d’aneuploïdieconcernant les autosomes chez les patients présentant un SKclassique [10]. Elle est renforcée par le fait que ces tauxd’aneuploïdie semblent identiques à ceux retrouvés chez despatients présentant une azoospermie sécrétoire à caryotypenormal [10].

En ce qui concerne le risque génétique réel de transmissionaux enfants, les conclusions des études publiées divergent. Alorsqu’une étude portant sur l’analyse de diagnostic pré-implanta-toire (DPI) de 113 embryons issus de patient SK a observé un fortpourcentage (46 %) d’embryons anormaux [10], les résultatsissus de plusieurs case reports totalisant plus de 100 naissancesd’enfants issus d’ICSI de patients SK classique sont plutôtrassurants car les auteurs ne signalent que de rares anomalies [1].

Il est, bien entendu, difficile d’extrapoler ces données à notrecas. En effet, il semblerait que les spermatogonies 47,XXY nesoient pas capables de franchir la méiose. Mais en est-il de mêmepour les spermatogonies 48,XXYY présentant un nombre pairde chromosomes ? Inversement, cet « environnement testicu-laire défavorable » devrait, comme chez les SK classiques,entraîner des erreurs de ségrégations y compris pour lesautosomes. De ce fait, le patient ici décrit devrait présenter unrisque plus élevé de transmettre une anomalie chromosomique àsa descendance si la BT avait été positive. Cette anomalie auraitpu concerner aussi bien les gonosomes que les autosomes. C’estla raison pour laquelle, nous avions envisagé, en cas de biopsiepositive, de réaliser dans un premier temps une FISH surspermatozoïdes si, du moins, le nombre de spermatozoïdes lepermettait. Si une majorité des gamètes avait été euploïdes, nousaurions pu réaliser une ICSI classique en proposant éventuel-lement, avec l’accord du couple, un diagnostic prénatal. Aucontraire, si les gamètes avaient été toutes aneuploïdes, nousaurions expliqué les risques au couple et aucune AMP lourdeintra-conjuguale n’aurait été proposée. Enfin, en cas dedécouverte de gamètes à la fois euploïdies et aneuploïdes,éventualité la plus probable, nous aurions orienté le couple versune pris en charge dans le cadre d’un DPI.

Enfin, dans le cadre d’une prise en charge en AMP, se poseégalement le problème éthique lié au retard mental que peuventprésenter les patients 48,XXYY. Monsieur T. présentait un déficit

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peu sévère. Cependant, dans les cas où le déficit neuropsy-chologique est plus important, les aspects éthiques sont à prendreen considération dans la décision de proposer ou non une BT.

4. CONCLUSION

Il paraît évident que dans ces formes rares de variant du SK,l’indication de BT ainsi que d’un DPI doit être discutée en réunionpluridisciplinaire en présence de médecins de la reproduction, debiologistes et de généticiens afin d’apprécier au mieux le risquede transmission de la pathologie à la descendance et d’orienteréventuellement les couples vers le don de gamètes.

DÉCLARATION D’INTÉRÊTS

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

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