5
BASKET : LE TIR Automatisme et variabilité* BORHANE ERRAIS. PROFESSEUR EPS A L'INSEP ALAIN WEISS. PROFESSEUR D'EPS AU LYCEE MARIE CURIE. SCEAUX a présente approche des problèmes posés par le perfectionnement du tir en basket-ball est plus liée à la réflexion de praticiens qu a celle de I physiologistes du sport. Cette ap- proche émane donc d'hommes du terrain qui portent un regard interrogateur sur leur pratique d'entraîneurs ( 1 ). En quoi cette pratique nous amène-t-elle à poser le problème de l'apprentissage du tir et de son perfectionnement en termes d'automatisme et de variabilité. Cette question nait d'un besoin de renouvelle- ment pédagogique face à l'inefficacité d'un certain type d'approche de la pédagogie du tir. approche mécaniciste visant l'acquisi- tion exclusive d'habitudes motrices en s'appuyant principalement sur la répéti- tion. Cette approche, dans la mesure elle valorise particulièrement le tir considéré comme l'arme décisive du basket-ball. entraîne un glissement dans l'appréhen- sion et la compréhension de cette compo- sante du jeu qui finit par devenir une fin au lieu de rester un moyen à la disposition du joueur, moyen de fournir une réponse adaptée à une situation particulière. Les anciens concours et le critérium du jeune basketteur, le parcours adresse- résistance et l'exercice des « 200 tirs » qui servaient de base de détection à la FFBB. sont tout à fait caractéristiques de ce type d'approche. Ces différents concours, critérium et exer- cices permettent le perfectionnement d'un éventail assez large de tirs (cf. tableau I). Cependant, ces gammes d'exercices, si elles favorisent la répétition de tirs plus ou moins variés, ne sollicitent nullement les capacités d'adaptation du tireur à une situation variable. Dans ce cas. la méthode pédagogique vise l'acquisition de savoir- faire mais elle néglige leur utilisation dans le contexte du jeu. Initiation et perfection- nement constituent les deux volets de cette méthode. Ces concours, critérium et exer- cices qui ne sont que les supports d'une méthode se trouvent, en fait, très souvent pervertis de leur but initial et deviennent pour certains entraîneurs, non seulement une panacée, mais aussi un moyen de sélection ou de détection. Les normes de sélections nationale, régio- nale et départementale se sont souvent fondées sur les performances réalisées lors de ces épreuves. Les minima à réaliser ont été longtemps définis comme suit : - espoir national cadet : 35 paniers réussis sur 50 ; - espoir régional cadet : 30 paniers réussis sur 50 ; - espoir départemental : 25 paniers réussis sur 50. Le constat, tout empirique qu'il soit, laisse apparaître la non fiabilité de telles épreu- ves de sélection. Ce changement d'expectative dans la conception de l'entraînement du tir naît aussi d'un second constat : jusqu'à nos Presse/Sports - L'Equipe 28 Revue EP.S n°161 Janvier-Février 1980. ©Editions EP&S. Tous droits de reproduction réservés

BASKET : LE TIR - Université Virtuelle en Sciences du Sportuv2s.cerimes.fr/media/revue-eps/media/articles/pdf/70161-28.pdf · valorise particulièremen le ti considérr t é

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: BASKET : LE TIR - Université Virtuelle en Sciences du Sportuv2s.cerimes.fr/media/revue-eps/media/articles/pdf/70161-28.pdf · valorise particulièremen le ti considérr t é

BASKET : LE TIR Automatisme et variabilité*

BORHANE ERRAIS. PROFESSEUR EPS A L'INSEP ALAIN WEISS. PROFESSEUR D'EPS AU LYCEE MARIE CURIE. SCEAUX

a présente approche des problèmes posés par le perfectionnement du tir en basket-ball est plus liée à la réflexion de praticiens qu a celle de

I physiologistes du sport. Cette ap­proche émane donc d'hommes du terrain qui portent un regard interrogateur sur leur pratique d'entraîneurs ( 1 ). En quoi cette pratique nous amène-t-elle à poser le problème de l'apprentissage du tir et de son perfectionnement en termes d'automatisme et de variabilité. Cette question nait d'un besoin de renouvelle­ment pédagogique face à l'inefficacité d'un certain type d'approche de la pédagogie du tir. approche mécaniciste visant l'acquisi­tion exclusive d'habitudes motrices en s'appuyant principalement sur la répéti­tion.

Cette approche, dans la mesure où elle valorise particulièrement le tir considéré comme l'arme décisive du basket-ball. entraîne un glissement dans l'appréhen­sion et la compréhension de cette compo­sante du jeu qui finit par devenir une fin au lieu de rester un moyen à la disposition du joueur, moyen de fournir une réponse adaptée à une situation particulière. Les anciens concours et le critérium du jeune basketteur, le parcours adresse-résistance et l'exercice des « 200 tirs » qui servaient de base de détection à la FFBB. sont tout à fait caractéristiques de ce type d'approche.

Ces différents concours, critérium et exer­cices permettent le perfectionnement d'un éventail assez large de tirs (cf. tableau I). Cependant, ces gammes d'exercices, si elles favorisent la répétition de tirs plus ou moins variés, ne sollicitent nullement les capacités d'adaptation du tireur à une situation variable. Dans ce cas. la méthode pédagogique vise l'acquisition de savoir-faire mais elle néglige leur utilisation dans le contexte du jeu. Initiation et perfection­nement constituent les deux volets de cette méthode. Ces concours, critérium et exer­cices qui ne sont que les supports d'une méthode se trouvent, en fait, très souvent pervertis de leur but initial et deviennent pour certains entraîneurs, non seulement une panacée, mais aussi un moyen de sélection ou de détection. Les normes de sélections nationale, régio­nale et départementale se sont souvent fondées sur les performances réalisées lors de ces épreuves. Les minima à réaliser ont été longtemps définis comme suit :

- espoir national cadet : 35 paniers réussis sur 50 ; - espoir régional cadet : 30 paniers réussis sur 50 ; - espoir départemental : 25 paniers réussis sur 50.

Le constat, tout empirique qu'il soit, laisse apparaître la non fiabilité de telles épreu­ves de sélection. Ce changement d'expectative dans la conception de l'entraînement du tir naît aussi d'un second constat : jusqu'à nos

Pre

sse/

Sp

orts

- L

'Equ

ipe

2 8 Revue EP.S n°161 Janvier-Février 1980. ©Editions EP&S. Tous droits de reproduction réservés

Page 2: BASKET : LE TIR - Université Virtuelle en Sciences du Sportuv2s.cerimes.fr/media/revue-eps/media/articles/pdf/70161-28.pdf · valorise particulièremen le ti considérr t é

jours, l'analyse du démarquage semble avoir négligé l'une des formes de celui-ci. Conçu exclusivement comme moyen de se libérer de son adversaire lors de la phase préparatoire au tir. le démarquage s'est trouvé amputé de l'une de ses composan­tes : l'action de démarquage lors de l'exé­cution du tir. Le démarquage peut, en effet, être envi­sagé durant l'exécution du tir et principa­lement lors de la phase finale de celui-ci, liée, en fait, à l'action du bras et de la main sur le ballon. Ce constat conduit donc à une révision radicale de la conception de l'entraîne­ment au tir. Ainsi, si dans un premier temps l'entraînement semble devoir être orienté vers le démarquage du tireur par : - le perfectionnement du jeu de jambes offensif et du travail sans ballon, - l'exploitation judicieuse des écrans et blocages. dans un second temps, l'entraînement fera intervenir très concrètement l'opposition adverse et visera presque exclusivement le développement de l'adaptabilité du tireur par un travail systématique de la variabi­lité. Ainsi, notre conception de l'entraînement au tir fait-elle intervenir la double notion d'adaptabilité-variabilité dans une relation unissant dialectiquement automatisme et variabilité.

Définition Mais, qu'est-ce que la variabilité ? Le Larousse en donne une définition très générale, susceptible d'être intégrée à notre propos : « Etat, nature, propriété de ce qui est variable : la variabilité humaine, disposition à varier, à changer : biol. ; aptitude à varier, à subir certaines varia­tions ». Si on adapte cette définition au contexte du tir en basket-ball, nous pourrions dire qu'il s'agit, ici. de la faculté de faire varier son tir dans le temps et dans l'espace. Cette variation pouvant intervenir indifférem­ment : - soit au niveau de la phase immédiate­ment préparatoire au tir ; - soit au niveau du tir lui-même et principalement au cours de la phase finale.

Stuctures de base du tir

La relation dialectique qui va unir auto­matisme et variabilité et sur laquelle se fonde notre méthode d'entraînement au tir. a pour principal support théorique cette hypothèse de Barbara Knapp : « L'expérience antérieure affecte sensible­ment ce que l'on perçoit et la façon dont on le perçoit, car les individus essaient conti­nuellement d'intégrer des informations inédites (variabilité) à une structure géné­rale (automatisme) ». « Cette structure gé­néralement fondée sur l'expérience anté­rieure est à la fois spatiale et tempo­relle » [1].

Ainsi, l'entraînement devra-t-il contribuer à la mise en place de cette structure générale de base en s'appuyant sur la répétition. La structure générale de base du tir en course, par exemple, n'est autre que la série rythmique de quatre appuis (deux temps forts, deux temps faibles) qui précède et succède à la réception du ballon et qui permet l'impulsion vers le panier. Pour le tir en suspension, la structure générale à acquérir se caractérise par le jeu de jambes préparatoire au tir ; mais, aussi, par l'impulsion équilibrée qui permettra la plus grande efficience lors de la phase finale du tir [2]. Cependant, l'acquisition de cette structure de base ne peut rester l'objectif final, voire ultime de l'entraîneur. Celui-ci, très rapi­dement, s'attachera à intégrer la compo­sante variabilité à son programme d'en­traînement. L'utilisation d'un adversaire fictif (obstacle adapté du type banc) ou d'un adversaire réel devra intervenir à ce stade du perfectionnement. Grâce aux situations fluctuantes créées par la pré­sence d'un adversaire fictif ou réel, l'en­traîneur mettra l'athlète en mesure d'inter­préter plus spécifiquement et plus précisé­ment les impressions sensorielles qu'il reçoit. Nous rejoignons, ici, Barbara Knapp lorsqu'elle précise : « L 'élève devra consacrer son temps à accroître sa com­préhension des exigences de la situation grâce à une interprétation plus spécifique et plus précise des impressions sensorielles qu'il reçoit » [ 1 ].

Le mémento CSP-FSGT précise, pour sa part que « l'aménagement particulier du terrain oblige l'enfant à : transformer ses manières habituelles d'agir et coordonner de façon nouvelle ses actions usuelles. En transformant ses réponses motrices pour répondre aux exigences du basket-ball. l'enfant se construit des structures d'ac­tions nouvelles. La confrontation de l'en­fant avec les exigences de l'activité basket-ball contribue à l'enrichissement de ses réponses motrices » [3]. A la suite de ces deux auteurs, nous suggérons, pour ce qui concerne l'entraî­nement au tir en basket-ball, de faire alterner : - un travail faisant intervenir des situa­tions-problèmes et, - un travail d'innovation et de découverte des variabilités tendant à l'élaboration d'une systématique de la variabilité du tir. La première forme de travail permet, évidemment, la découverte par le tireur de réponses spécifiques à une situation con­crète, voire singulière. La seconde, pour sa part, facilite la prise de conscience de l'éventail des réponses, c'est-à-dire de leur richesse, donc des potentialités de l'attaquant. Il est clair que cette seconde forme de travail devra tendre vers l'automatisation des modula­tions ou des « variabilisations » imaginées. Le principe consiste ici. à enrichir le patrimoine moteur du joueur pour qu'il puisse avoir des réponses adaptées à des situations changeantes.

Etude de la variabilité du tir

L'étude systématique qui suit s'appuie sur l'hypothèse de l'existence de deux zones relativement différenciées par le caractère de la variabilité (2) (cf. schéma 1 ) : - la zone I. la plus proche du panier, caractérisée par une variabilité de type individuel et liée presque exclusivement à la phase finale du tir (tir en course), espace réduit, oppositions nombreuses, variées et serrées ; - la zone II, la plus éloignée du panier, caractérisée par une variabilité plus collec­tive et liée à la phase préparatoire au tir (tir en suspension), espace moins restreint, opposition plus lâche, possibilité d'aide (blocs écrans). C'est en tenant compte de cette différen­ciation que nous proposerons une systé­matique de la variabilité. Cette systématique peut être entrevue au niveau de : - la variabilité par rapport à la réception du ballon ; - la variabilité des appuis ; - la variabilité lors de la phase de contrôle du ballon ; - la variabilité liée à l'action finale de la main.

TABLEAU I

2 9 Revue EP.S n°161 Janvier-Février 1980. ©Editions EP&S. Tous droits de reproduction réservés

Page 3: BASKET : LE TIR - Université Virtuelle en Sciences du Sportuv2s.cerimes.fr/media/revue-eps/media/articles/pdf/70161-28.pdf · valorise particulièremen le ti considérr t é

Variabilité par rapport à la réception du ballon Bien que les entraîneurs cherchent à reproduire, le plus souvent, les conditions du jeu. on assiste pourtant, dans de nombreuses séances d'entraînement, à des situations stéréotypées du perfectionne­ment des tirs (exemple : « un récupéra­teur ». sous le panier, renvoie le ballon à un joueur de champ qui tente des tirs). Pour rompre avec ce type d'entraînement, il est nécessaire de faire varier successive­ment les formes selon lesquelles le joueur est amené à recevoir et à agir sur le ballon. Dans cette situation, il est recommandé de varier les passes (par une variation des angles de réception), les dribbles, et les combinaisons entre les différents angles de passe, les différents dribbles et les diffé­rents arrêts.

Variabilité par rapport aux appuis Ici. la variabilité va porter principalement sur les différentes formes d'appuis, avec arrêts, soit alternatifs, soit simultanés, qui peuvent intervenir lors de la préparation du tir. On pourra faire varier ces divers arrêts et les actions qui leur succèdent à la fois dans le temps et dans l'espace.

Variabilité lors de la phase de contrôle du ballon Ici. nous avons tenté d'établir une systé­matique de la variabilité du tir en course par comparaison avec l'évolution de la variabilité dans le dribble. Nous montrons (cf. schéma 2) comment le dribble a évolué dans le temps par rapport à l'environnement immédiat du joueur (ici du joueur droitier). L'espace immédiat de celui-ci étant divisé en quatre cadrans, le positionnement du ballon par rapport au corps s'est, au cours de l'évolution histo­rique du dribble généralisé à partir de la zone 1 à l'ensemble des autres zones. En outre, lors de cette philogénèse du dribble, on a assisté à un éloignement volontaire du ballon de l'environnement

immédiat du dribbleur. celui-ci étant amené à contrôler le ballon le plus loin possible de son corps. Le dribble « sur les pieds » s'est transformé rapidement en un dribble « loin du corps » (3). Nous émet­tons, ici. l'hypothèse que cette philogénèse du dribble est reproduite quasi intégrale­ment par chaque joueur au cours de son évolution, du stade de débutant au stade de joueur confirmé (ontogenèse). N'assisterait-on pas, de nos jours, à une évolution semblable au niveau de la variabilité du tir en course ? L'attaquant chercherait, lors de l'armé et lors de la phase finale du tir en course, à utiliser tous les secteurs que lui offre son espace immédiat. Dans cette prospective, il aurait parfaitement perçu une dimension com­plémentaire (on la retrouve aussi dans l'évolution du dribble) : la dimension verticale.

Notre étude de la variabilité examine, ici. toutes les combinaisons possibles allant du point de départ de l'armé au point final du tir. L'appréciation de toutes ces combinai­sons peut être concrétisée par trois plans : - le plan sagittal du corps du tireur. - le plan frontal du corps du tireur ; - le plan horizontal passant à la hauteur de la poitrine du tireur. Les intersections de ces trois plans décou­pent l'espace immédiat du tireur en huit secteurs (cf. schéma 3). A partir de ce

découpage, on peut entrevoir quelques-unes des combinaisons théoriquement possibles (cf. tableau II).

Variabilité liée à l'action finale de la main Cette variabilité dépend principalement de la position de la main, par rapport au ballon, lors de la phase finale du tir. En fonction des diverses positions de la main, on retiendra des types de tirs différents : - tirs par-dessous (main en supination) ; - tirs par-dessous (main en pronation, ouverte vers le haut) ; - tirs enveloppés et « smaches » ; - tirs « crochets » ; - tirs liftés avec planche : - etc. Certains de ces tirs se trouvent déterminés par l'action de la défense qui impose un certain angle d'attaque de panier (c'est le cas. notamment, de la pénétration en dribble le long de la ligne de fond et du tir par-dessous, en abordant le panier, par-derrière).

Didactique de la variabilité Dans l'évolution du basket-ball. les entraî­neurs ont été conduits à faire travailler le tir selon deux modes :

TABLEAU II

Schéma 1

Schéma 2

Schéma 3

3 0 Revue EP.S n°161 Janvier-Février 1980. ©Editions EP&S. Tous droits de reproduction réservés

Page 4: BASKET : LE TIR - Université Virtuelle en Sciences du Sportuv2s.cerimes.fr/media/revue-eps/media/articles/pdf/70161-28.pdf · valorise particulièremen le ti considérr t é

- un mode répétitif visant à l'automatisa­tion d'un certain nombre de tirs ; - un mode adaptatif consistant à faire travailler les mêmes exercices de tir avec l'opposition d'un adversaire, essayant ainsi, dans un but louable, de reproduire les conditions d'un match. Mais, il apparaît que cette démarche n'évite pas le stéréotype car le joueur essaie de reproduire une situation (souvent l'unique situation) à laquelle il sait appor­ter une réponse. Quelles peuvent être les raisons de cet état de fait ? Il semble que le joueur soit confronté à deux problèmes : • technique : le patrimoine du joueur est restreint. Son éventail d'actions offensives ne lui permet pas d'avoir une réponse adaptée à chaque situation : • tactique : en raison de ses limites techniques, le joueur va se cantonner dans des situations habituelles, et n'essaie pas de s'adapter à des situations où il n'entre­voit pas directement la bonne réponse, il aura donc tendance à répondre de façon stéréotypée à des situations pourtant bien différentes. Ces constatations nous conduisent à faire travailler le tir selon deux principes : - l'automatisation qui vise la maîtrise de savoir-faire - efficience du tir compte-tenu des normes biomécaniques - par la répétition et doit intéresser une gamme de gestes la plus large possible ; - la variabilité qui résulte de la confronta­tion de ces savoir-faire, une fois automati­sés, à des situations variées.

Pour cela, l'inclusion de l'opposition dans les exercices de tir ne suffit pas. Elle est. certes, utile mais, en plus, il s'avère nécessaire de donner des consignes préci­ses au (x) défenseur (s). Il s'agira donc de varier sensiblement les situations afin que l'attaquant puisse varier ses réponses.

L'adaptation peut se faire d'une façon individuelle dans un rapport attaquant-défenseur (s), dans lequel le (s) dé­fenseur (s) a l'initiative de la modifica­tion de la situation ; mais, elle peut se faire aussi d'une façon collective dans la me­sure où l'entraîneur fait intervenir dans les situations choisies un ou des partenaires de l'attaquant. L'adaptabilité de ce dernier mettra en jeu : - ses possibilités techniques ; - l'action des opposants ; - l'action des partenaires.

De même que pour les exercices d'adap­tation individuelle, l'entraîneur donnera des consignes précises aux défenseurs, mais aussi aux partenaires du tireur. Il évitera ainsi que se reproduisent des situations semblables les unes aux autres (stéréotype collectif), situations sollicitant, certes, l'adaptation du joueur porteur du ballon, mais sûrement pas son adaptabi-lité. Il ne sera pas donné de consignes précises au porteur du ballon qui aura donc. seul, l'initiative de son action. L'action de l'entraîneur ne se produira qu'à l'issue de l'attaque réalisée afin que le joueur puisse avoir un vécu qui lui servira, alors, de référentiel à sa réflexion.

Nous nous proposons donc d'envisager, dans cette première partie, une batterie d'exercices sollicitant : - l'adaptabilité individuelle de l'attaquant tireur ; - l'adaptabilité collective du joueur tireur.

ADAPTABILITE INDIVIDUELLE DE L'ATTAQUANT TIREUR

Exemples du tir en course 1. Automatisation du tir en course avec ses variantes : a) Tir en course simple (à droite et à gauche) : - ballon poussé : - ballon posé par en dessous ; - tir crochet ; - revers. b) Tir en course : - décomposition des appuis sur un même axe. sur des axes différents ; - dernier appui à mi-distance avec arrêt puis tir par avancé du pied avant et décollement du pied de pivot. c) Tir en course : - après passe ; - après dribble : - après passe, arrêt, dribble. Ces variantes sont données à titre d'exem­ples et ne comportent pas de caractère exhaustif. 2. Travail de la variabilité dans le tir en course : a) Intervention d'un partenaire passeur. Celui-ci doit adresser des passes au tireur

31 Revue EP.S n°161 Janvier-Février 1980. ©Editions EP&S. Tous droits de reproduction réservés

Page 5: BASKET : LE TIR - Université Virtuelle en Sciences du Sportuv2s.cerimes.fr/media/revue-eps/media/articles/pdf/70161-28.pdf · valorise particulièremen le ti considérr t é

qui sont autant de messages pour ce dernier : - passe longue légèrement en avant ; - passe longue sur le tireur ; - passe en arrière du tireur ; - passe lobée ; - passe dans les pieds. b) Intervention d'un partenaire passeur-tireur éventuel. Le tireur accomplissant son action de tir en course doit être capable de la modifier pour adresser une passe à son partenaire si ce dernier a manifesté le désir de recevoir le ballon (mise en mouvement et bras tendu). c) Intervention d'un défenseur « 1 contre 1 » sans passeur. Celui-ci choisit une position de défense qui doit inciter l'attaquant à apporter une réponse particulière (décalage d'un côté). d) Intervention d'un défenseur et d'un passeur. - Le défenseur adopte également une attitude défensive qui sollicite une certaine réponse de la part du tireur. - Même situation, avec en plus un pas­seur-tireur potentiel ; la consigne est la même que pour la situation b. - « 2 contre 2 » : les défenseurs se concer­tent et adoptent une certaine attitude défensive. L'action de l'entraîneur, au cours de cette phase de variabilité est essentielle tant au niveau des consignes qu'au niveau de la correction.

ADAPTABILITE COLLECTIVE DU JOUEUR TIREUR Si la formation du joueur doit être la plus polyvalente possible afin qu'il puisse dis­poser d'un éventail de savoir-faire le plus large possible, les exigences tactiques imposées par la confrontation de deux équipes obligent l'entraîneur à spécialiser ses joueurs dans certains rôles : - joueur de champ : - joueur pivot ou joueur poste ; - meneur de jeu. Cette spécialisation cantonne les joueurs dans un certain nombre plus ou moins restreint de déplacements et leur impose

donc, en fonction du système de jeu choisi, un nombre d'actions limité. L'entraînement doit donc conduire le joueur à automatiser les actions qu'il aura à effectuer en fonction du rôle qui lui est imparti (automatisation) ; mais aussi, à adapter ses actions en fonction des com­portements variables des défenseurs et des partenaires (variabilité). A titre d'exemple, nous allons isoler les actions possibles d'un joueur (5) en fonction d'un certain système de jeu choisi et les variantes adaptées que ce joueur pourra avoir à réaliser (fig. 1).

1. Système de jeu adopté face à une zone « 2 - 1 - 2 ». Les différentes actions du joueur (5) peuvent être (cf. fig. 1 ) : - un tir après une passe du joueur (4), soit direct, soit après dribble de dégage­ment intérieur ou extérieur ; - une feinte de tir et une passe à un joueur : (1) ou (2) ou (4) qui s'est décalé : - un tir après une passe au joueur (4) ou (1) ou (2) qui lui renvoie le ballon. 2. L'entraînement des joueurs de champ devra comporter un travail d'automatisa­tion de l'action de tir en rapport avec la circulation tactique choisie (cf. fig. 2) : - tir direct : - tir après dribble ; - infiltration.

3. Ensuite, cette action de tir devra être répétée en fonction du comportement des partenaires. Le thème de l'exercice reste le tir du joueur de champ après circulation tactique. Il comporte, cependant, un ca­ractère adaptatif dans la mesure où l'atti­tude des partenaires de (5) va condition­ner son action finale. En effet, si (1) ou 2) ou (4) sollicite le ballon, celui-ci doit lui être adressé de nouveau.

4. L'entraîneur peut, par la suite, faire travailler cette action en incorporant des défenseurs animés à chaque phase d'at­taque d'intentions bien précises : monter sur (5). jouer l'interception sur (4). ne pas sortir de la zone, solliciter un départ en dribble de (3) . etc.

Il est conseillé d'effectuer cet exercice en n'incluant que deux défenseurs dans un premier temps afin que l'attaquant puisse prendre conscience, plus facilement, des réponses adaptées à cette situation de surnombrement. Enfin, l'entraîneur pourra faire réaliser cet exercice « 5 contre 5 », tout en donnant des consignes particulières aux défenseurs afin que soient grossies les situations appelant à certaines réponses, somme toute, assez précises.

B. Errais. A. Weiss

*Extraits d'un ouvrage en cours de préparation.

B I B L I O G R A P H I E

[I] KNAPP (B.). - Sport et motricité, l'acquisition de l'habileté motrice. - Vigot. Paris. 1971. - p. 192. [2] SHARMAN (B). - Sharman on Basket-ball Shooting. Printice ball. - 1965. [i] CAM (Y.) et coll. - Mémento CPS-FSGT Basket­ball. - Armand Colin Bourrelier. Paris. 1 975. - p. 6. BAYER (C). - L'enseignement des jeux sportifs collectifs. - Vigot. Paris. 1979. BOSC (G.I. - L'entraîneur de Basket-ball. - Vigot. Paris. 1978. MERAND (R). - Tir au panier, in EPS n° 79. mars 1966.

(1) Nous espérons que ce type d'approche fournira matière à expérimentation au physiologiste qui infirmera ou confirmera notre appréhension empi­rique de la réalité du basket-ball. (2) Le découpage ainsi tranché en zones de variabi­lité, nécessité par les besoins de l'analyse, ne correspond pas toujours à la réalité mouvante du jeu. Il est clair qu'en fonction de certains niveaux de jeu, les actions peuvent indifféremment être individuelles ou collectives, aussi bien dans une zone que dans l'autre. En fait, les zones peuvent s'interpréter, et ce en fonction des pressions plus ou moins grandes exercées par la défense. (3) Signalons, ici. que cette hypothèse se trouve quelque peu relativisée par les remarques faites à ce sujet par B. Grosgeorge lors du stage « Experts-basket-ball INSEP » (2 au 4 avril 1979). Celui-ci précise que l'observation au magnétoscope du joueur débutant montre que celui-ci a une très forte tendance à pousser le ballon en avant et loin de lui. au point de perdre tout contrôle. Ce n'est que dans une deuxième phase qu'il prend conscience de la nécessité de ramener le ballon dans son environne­ment immédiat.

Fig. 1 Fig. 2

3 2 Revue EP.S n°161 Janvier-Février 1980. ©Editions EP&S. Tous droits de reproduction réservés