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1 TD 2 : S’adapter aux contraintes du milieu : l’étagement dans les Andes et autres montagnes tropicales Bibliographie indicative Bart, F. et al. (dir). 2001. Espaces tropicaux n°16, "Les montagnes tropicales. Identités, mutations, développement", Pessac, DYMSET/CRET, 669p. Cortes, G., 2000. Partir pour rester. Survie et mutations de sociétés paysannes andines (Bolivie), Paris, IRD éditions, 413 p. Morlon, P. (dir), 1992. Comprendre l'agriculture paysanne dans les Andes centrales (Pérou-Bolivie), Paris, INRA, 522 p. Mots clés : Etagement, complémentarité, cloisonnement et/ou particularité des espaces, recomposition, terrasses, Andes, montagnes d'Afrique, migrations, minorité Questions exploratoires : 1. Localiser les différents lieux cités sur un atlas 2. Quels sont les caractéristiques générales, les fonctions, les avantages et les inconvénients d’une montagne tropicale pour les activités agricoles ? 3. Comment les populations s’y sont-elles adaptées ? 4. Dans quelles mesures peut on parler d’espaces enclavés, d’espaces en mutation, d’espaces intégrés dans le système monde ? Doc 1 : Etagement des végétations. LN, limites des neiges; LF, limite de la forêt. Inspiré de Troll, 1959; Blasco, 1971, Schmitthüsen, 1976.

Bibliographie indicative Bart, F. et al. (dir). 2001 ... · Hungry Planet, Peter Menzel . 5 Doc 6 : L'agriculture paysanne dans les Andes centrales. Source : Comprendre l’agriculture

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TD 2 : S’adapter aux contraintes du milieu : l’étagement dans les Andes et

autres montagnes tropicales

Bibliographie indicative

Bart, F. et al. (dir). 2001. Espaces tropicaux n°16, "Les montagnes tropicales. Identités, mutations, développement", Pessac, DYMSET/CRET, 669p. Cortes, G., 2000. Partir pour rester. Survie et mutations de sociétés paysannes andines (Bolivie), Paris, IRD éditions, 413 p. Morlon, P. (dir), 1992. Comprendre l'agriculture paysanne dans les Andes centrales (Pérou-Bolivie), Paris, INRA, 522 p.

Mots clés :

Etagement, complémentarité, cloisonnement et/ou particularité des espaces, recomposition, terrasses, Andes, montagnes d'Afrique, migrations, minorité

Questions exploratoires :

1. Localiser les différents lieux cités sur un atlas

2. Quels sont les caractéristiques générales, les fonctions, les avantages et les inconvénients d’une montagne tropicale pour les activités agricoles ?

3. Comment les populations s’y sont-elles adaptées ?

4. Dans quelles mesures peut on parler d’espaces enclavés, d’espaces en mutation, d’espaces intégrés dans le système monde ?

Doc 1 : Etagement des végétations.

LN, limites des neiges; LF, limite de la forêt. Inspiré de Troll, 1959; Blasco, 1971, Schmitthüsen, 1976.

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Doc 2 : Coupes à travers le Pérou central : tripartition, étagement de la

végétation.

Doc 3 : Profil schématique des étages bio-climatiques et agricoles à travers la Sierra equatorienne

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Doc4 : Les Andes centrales péruviennes PASQUIS, RICHARD, et USSELMANN, PIERRE. 1998. In Les montagnes tropicales : identités, mutations, développement - Colloque Bordeaux - Pessac. Edité par Bart, F., Morin, S., et al. Talence: Dymset - CRET Milieux, environnement et migrations dans les Andes centrales péruviennes, p. 249-257. Introduction Depuis presque vingt siècles, les Andes centrales représentent un noyau démographique et culturel important. En particulier, les berges du lac Titicaca, présentent des densités de populations parmi les plus élevées. C’est en grande partie grâce à ses caractéristiques biophysiques que ce maillon de la chaîne des Andes a vu se développer des centres anciens de cultures renommées et des foyers encore actuels de populations importantes. Bien que les ressources naturelles y soient réduites du fait de contraintes physiques majeures, l’important gradient altitudinal entre l’altiplano et le piémont orientale des Andes a été semble-t-il utilisé depuis longtemps pour les diverses possibilités qu’offre, pour les ressources naturelles et pour les cultures, un milieu intertropical aussi amplement étagé. Le choc colonial du XVI siècle provoque une perte de moitié de la population et une importante acculturation. Cette période marque le début d’un déphasage entre les dynamiques sociales et leur milieu naturel. Après une longue période de stagnation, la reprise de la croissance démographique du siècle dernier dans un contexte de perte progressive des valeurs socioculturelles et de modèle économique extraverti, aboutit à un déséquilibre patent entre la population et son milieu. La « civilisation paysanne » déstructurée ne peut plus se reproduire sur des lopins de terre exigus qui se réduisent parfois à quelques sillons. Le désordre social et la disparition des pratiques culturales élaborées au cours des siècles (autour de cultures traditionnelles de tubercules et de céréales) et adaptées au milieu ont entraîné la dégradation des terrasses (andenes), l’érosion des sols et l’augmentation de la fréquence et de l’amplitude des crues du lac. Abandonnant un territoire ancestral qui ne peut plus maintenir une population croissante et secouée par de fortes mutations socio-économiques, à partir des années 1950, Aymaras et Quechuas décident de coloniser les vallées andines orientales pour déboucher 40 ans après dans la haute cuvette amazonienne du Madre de Dios. I – Milieu et mise en valeur traditionnelle dans les Andes centrales A- Un altiplano aux limitations sérieuses (…) Les contraintes physiques sont nombreuses sur l’Altiplano, mais ce sont celles de la présence de l’eau et de la limite des gelées qui jouent pour les hautes surfaces à pentes faibles. Ailleurs la vigueur des pentes et l’existence de formations superficielles et de sols peuvent être déterminantes. Si l’on estime que 5 à 10 % de l’ensemble des Andes intertropicales sont cultivables, l’évaluation chute à 2% pour l’Altiplano. Tous ces milieux appartiennent à des géosystèmes froids dont la température moyenne annuelle est inférieure à 10° C. Le gel est quotidien à 4700 m, altitude qui marque la limite de la végétation (4400 m pour la limite des cultures). La radiation solaire y est partout élevée toute l’année et les températures diurnes restent modérées ce qui favorise la photosynthèse. Par contre les températures nocturnes sont

en général basses, du fait de l’intensité du rayonnement en atmosphère claire, d’où la fréquence de gelées et les importantes amplitudes thermiques diurnes. (…) B - L’exploitation rationnelle des étages écologiques Historiquement, cette région des Andes présente des densités de population qui contrastaient avec celles de la côte pacifique et des plaines forestières amazoniennes. Elle a été le siège des centres anciens de haute culture et conserve encore d’importants foyers de populations (100 hab./km² autour du lac Titicaca). Les civilisations et les sociétés de l’altiplano qui en sont issues se sont depuis longtemps développées dans cet environnement qui semble très hostile. Les hommes ont toujours essayé d’y minimiser les risques en évitant aussi bien la monoculture que les grandes parcelles. D’où l’étagement des cultures le long des versants. Ils se sont aussi toujours efforcés de compléter les produits obtenus en altitude en ayant recours à d’autres étages écologiques, ce qui se traduisait par la mise en valeur de terres souvent lointaines. (…) II – Choc colonial et politiques inadaptés : la rupture des « civilisations paysannes » A-L’ayllu, les reducciones et les haciendas : rupture progressive de l’équilibre avec le milieu Le choc colonial du XVI siècle (conquête espagnole de 1530) provoque une perte de moitié de la population et une importante acculturation. De l’ayllu traditionnel aux haciendas, en passant par les reducciones, c’est une longue tragédie de déplacements de populations (mitimaes), de déportations vers les mines, d’esclavage, de guerres et d’épidémies. Cette période marque une désorganisation extrême de la vie andine et sub-andine et le début d’un déphasage entre l’homme et son milieu. Après l’indépendance du début du XIX siècle, quelques siècles plus tard, l’effet conjoint des politiques agraires inadaptées et du recouvrement de fortes pressions démographiques, aggrave le déséquilibre entre dynamiques sociales et dynamiques naturelles. « Même si leur poids relatif dans les États décline, notamment au Pérou, jamais les Andes centrales n’ont été aussi peuplées que maintenant ». (DOLLFUS, 1992). La reprise de la croissance démographique dans un contexte de perte progressive des valeurs socioculturelles et d’un modèle économique extraverti, entraîne la déstructuration progressive de la « civilisation paysanne ». Au XX siècle, la production de matières premières agricoles destinées à l’étranger favorise le processus de concentration de la terre et donne naissance à de grandes haciendas d’élevage pour la laine dans la Sierra (PIEL J. in : BLONDEL et LOYAT, 1976). (…) B- Réformes agraires et colonisation des terres orientales. Dès la fin des années 1950, spontanément ou dans le cadre de programmes de colonisation officielle, des groupes indigènes (Aymaras et Quechuas) commencent à émigrer depuis l’Altiplano surpeuplés vers les Basses terres amazoniennes. Ils abandonnent progressivement un

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territoire ancestral qui ne peut plus sustenter une population croissante. (…) C – Une gestion minière des ressources naturelles Malgré l’engouement pour la conquête de nouvelles terres, les colons restent attachés à leur terroir d’origine et y retournent dès qu’ils peuvent rendre visite à leur famille et réaliser les travaux des champs des cultures d’altitudes (BOURLIAUD, 1979)/ Cette colonisation orientale se caractérise par un mouvement pendulaire d’allers et venus, à l’image de la logique du système ancestral de contrôle vertical décrit par MURRA (1975). Cependant même si ce nouveau système de production combine en partie les différents calendriers culturaux la complémentarité joue nettement en faveur de l’altiplano. Le plus souvent le colon part seul, en éclaireur, en laissant sa famille au pays. Il va tenter l’aventure vers ces terres chaudes et malsaines où les maladies sont nombreuses et où la tuberculose, contrôlée en altitude, se développe, favorisée par de mauvaises

conditions alimentaires et de travail. Au cours de cette période d’installation, le nouvel arrivant est aidé par ses voisins et se fait parfois engager par eux. Ces derniers sont souvent originaires du même village de l’altiplano et en tout cas de la même ethnie. Parfois ce sont eux qui lui ont fait miroiter l’intérêt de cette entreprise. Dans ces conditions d’infrasubsistance et de déracinnement social et culturel, alliées à une méconnaissance de l’écologie locale, le nouvel arrivant met en place une agriculture minière extrêmement agressive pour le milieu. (…) Le mouvement pendulaire entre l’altiplano et les vallées orientales que les colons de première génération maintiennent tant que leurs convictions culturelles et que le contexte économique le permettent est finalement affecté petit à petit par la réalisation d’actions collectives ponctuelles dans la vallée. L’organisation et la commercialisation par des coopératives est souvent un déclencheur (BOURLIAUD, 1979). (…)

Doc 5 : Famille d’Equateur, budget : 31,55$/semaine Hungry Planet, Peter Menzel

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Doc 6 : L'agriculture paysanne dans les Andes centrales. Source : Comprendre l’agriculture paysanne dans les Andes centrales. Morlon (dir). 1992. Page 174

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Doc 7 : Profil régional du secteur agroalimentaire. Communauté andine (Bolivie, Colombie, Équateur, Pérou)

Les pays de la Communauté andine sont renommés pour leurs vastes activités de production et d'exportation de produits de cultures commerciales, particulièrement le café, le cacao et la banane. Le sucre de canne est une culture importante dans l'ensemble de la Communauté. Le Pérou, l'Équateur et la Colombie ont aussi un solide secteur de l'aquaculture. L'importance relative du secteur agricole dans le PIB des pays membres de la Communauté andine est la suivante : 14 % en Bolivie en 2008 (premier rang), une baisse par rapport au résultat de 2005, qui était de 16 %; 9,4 % en Colombie, une diminution de 2,2 % par rapport à 2005; 6,9 % au Pérou, un repli par rapport au résultat de 2005, qui était de 8 %; et 6,6 % en Équateur, un recul par rapport à la proportion enregistrée en 2005, qui était de 7 %. Il n'est pas étonnant que le secteur agricole de la Bolivie soit aussi l'un de ceux qui embauchent la plus grande proportion de la main-d'œuvre nationale, soit près de 40 % en 2008. Le pourcentage des travailleurs du secteur de l'agriculture péruvien est aussi élevé, à 40 %. En Équateur et en Colombie, les pourcentages sont respectivement de 33 % et de 22,4 %. Colombie : La Colombie est dotée d'un secteur agricole diversifié. En effet, le climat et la topographie variés de la Colombie permettent à chacune de ses régions de se livrer à diverses cultures. Le café, le sucre, les bananes et le bœuf comptent parmi les principales exportations agricoles de la Colombie. Le pays est le deuxième producteur et exportateur mondial de café. Les fleurs coupées sont un important produit d'exportation agroalimentaire de la Colombie au Canada, tout comme les bananes. Le secteur de la transformation des aliments joue un rôle de premier plan dans l'économie nationale, générant 27 % de la production manufacturière totale. Les cultures continues occupent 1 % de la superficie totale des terres; les pâturages permanents, 38 %, et les terres arables, 2 %. Quelque 9 000 km2 de terres sont irriguées. Bien que l'apport du secteur agricole soit en baisse, la production agricole a augmenté de 7,2 % en 2007 et ne cesse de croître depuis au moins 2001.

Équateur : Le secteur agricole de l'Équateur est très important, tant sur le plan de l'emploi que sur celui des exportations. L'Équateur est doté de terres fertiles et bien irriguées de même que d'un climat doux favorable à la culture. L'Équateur exporte surtout des bananes, des fleurs coupées, du cacao, du riz, du café, du sucre, des crevettes et du poisson. Il est le premier exportateur mondial de bananes et de bananes plantains. Les terres arables occupent 6 % de la superficie totale du pays, les cultures continues, 5 %, et les pâturages permanents, 18 %. Quelque 8 650 km2 de terres sont irriguées. Pérou : Le secteur agricole péruvien est très prometteur. Le Pérou est doté d'un solide secteur de l'aquaculture et ses exportations de poisson et de farine de poisson sont importantes. Les principales productions agroalimentaires du Pérou sont le café, l'asperge, les fruits, le soja, le sucre et la farine de poisson. Les exportations d'asperges ont augmenté considérablement depuis 1997 et on leur attribue en bonne partie la croissance des exportations non traditionnelles. Le secteur subit les effets négatifs de problèmes de gestion et d'infrastructures, mais le gouvernement a reconnu l'existence des problèmes et a indiqué que les réformes dans ce domaine seraient jugées prioritaires. Les terres arables occupent 3 % de la superficie totale des terres et les pâturages, 21 %. Quelque 12 000 km2 de terres sont irriguées. Bolivie : Près de 39 % de la population de la Bolivie compte sur l'agriculture pour vivre, particulièrement de l'agriculture de subsistance. Cependant, le secteur demeure sous-développé et seul un faible pourcentage des terres est consacré à l'agriculture. Au cours des dernières années, le gouvernement a déployé des efforts pour augmenter la superficie des terres cultivées. Le soja et le sucre comptent parmi les principales exportations agricoles de la Bolivie. Les terres arables occupent 2 % de la superficie totale et les pâturages, 24 %. Quelque 1 320 km2 de terres sont irriguées.

Source : Agriculture et agroalimentaire Canada - Juillet 2009

Doc 8 : History of agriculture Hachette Multimédia

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Doc 9 : 2003/12 – Montagnes d’Afrique : espaces sous tension ? François BART – Café Géo Toulouse Entre marginalisation et intégration locale, continentale et mondiale, quelles tensions sociales et spatiales affectent les montagnes africaines ? Les tensions dont sont de plus en plus l’objet les montagnes d’Afrique tropicale sont multiples, et leur complexité résulte de la superposition de tensions propres à toutes les montagnes du monde (gravité, pente...) et de tensions plus spécifiques puisant leurs racines dans la pauvreté. Elles sont porteuses de multiples recompositions territoriales , par lesquelles le statut de la montagne évolue. De la montagne à la plaine en passant par le piémont, et en sens inverse, les mobilités se sont multipliées et diversifiées au gré du développement des transports et de l’évolution des avantages comparatifs entre le haut et le bas. Un haut ne peut plus être seulement refuge pour continuer à être attractif ; le bas a pu bénéficier d’entreprises de drainage, d’assainissement... Si la montagne a pu et peut encore nourrir la ville, celle-ci va aussi à sa rencontre comme en témoigne la croissance de Bafoussam au Cameroun, de Moshi au pied du Kilimandjaro. Les montagnes d’Afrique ont aujourd’hui leur lot de métropoles pluri-millionnaires (Addis Abeba à plus de 2000 m, Nairobi à 1700 m), de capitales en forte croissance (Kigali au Rwanda), comme si, de plus en plus, la montagne s’ouvrait et s’intégrait aux tensions de l’Afrique et du monde. Si la montagne est encore parfois frontière (les Virunga entre Rwanda, Ouganda et RDC ; le mont Elgon entre Ouganda et Kenya...), elle est de plus en plus enjeu de protection et de développement. Dans l’Afrique de cette aube du troisième millénaire, la montagne est en transition . On y trouve encore ces extraordinaires bastions de forte densité hésitant entre enfermement et ouverture, on y rencontre de plus en plus des montagnes intégrées dans des systèmes socio-spatiaux complexes, où se jouent aussi de petites facettes de l’économie monde, avec le tourisme et des spéculations agricoles (du café au thé, au maraîchage et aux fleurs), et où s’expriment de forts enjeux nationaux, humains et environnementaux. Introduction En observant la carte des Etats africains, on constate que deux pays seulement portent le nom de leur plus haute montagne : le Cameroun et le Kenya. Non seulement ces deux pays s’identifient pleinement à leur montagne, mais l’appropriation des hautes terres est également un enjeu pour eux : le Kenya, non content de s’approprier le mont dont il tire son nom, s’attribue aussi la paternité du mont Kilimandjaro appartenant pourtant à la Tanzanie. On a ici un bel exemple de montagne dérobée à son pays d’origine. Et qu’il s’agisse du mont Kenya, du mont Cameroun

ou du mont Kilimandjaro, ils sont atypiques et se donnent à voir : ce sont des montagnes volcaniques aux formes visibles, des éléments de relief manifestes... A ce titre, les luttes d’appropriation pour l’image du Kilimandjaro point culminant du continent avec 5 963 mètres d’altitude témoignent bien de l’importance symbolique que revêtent de telles montagnes. A ce propos, une anecdote : lors d’un séjour au Cameroun, j’observe des cartes postales et, à ma grande surprise, découvre que l’une d’elle présente l’image du Kilimandjaro, au dessous de laquelle on peut lire la légende suivante : « Charmes et splendeurs du Cameroun ». La montagne, en Afrique, est à ce point chargée en valeurs culturelles fortes et variées qu’il est impossible de faire une géographie des montagnes africaines sans tenir compte de cette dimension. Voici un critère supplémentaire qui complique un peut plus la définition de cet objet géographique ambigu ! Il ne s’agit bien évidemment pas d’évacuer la question de la définition de la montagne (ni d’adopter celle retenue en France) mais de contourner la difficulté en postulant que tout débat sur la montagne porte à la fois sur sa double dimension naturelle et culturelle. Partant de cette définition, la notion de « montagne » devient donc extrêmement subjective et il devient nécessaire de s’entendre sur les termes qu’on emploie. Parle-t-on de la montagne ? de sa montagne ? de notre vision de la montagne ? Finalement, en Afrique, la montagne se définit par l’éloignement par rapport à l’environnement proche et immédiat. La réalité physique de la montagne s’accompagne donc de tout un cortège de composantes socioculturelles. Deux montagnes se différencient par leurs pratiquent agricoles, leurs pratiques d’élevage... Dans le monde tropical, la montagne constitue un espace de salubrité, un espace où le froid fait irruption, un espace où on trouve un étage qualifié à tort de « tempéré » . C’est un domaine où s’accumulent les spécificités humaines et physiques, de telle sorte qu’il est difficile de déterminer clairement les limites dudit domaine. L’Afrique des montagnes se trouve à l’est et au sud du continent, de l’Érythrée à l’Afrique du sud, où les montagnes culminent souvent à plus de 1 500 mètres d’altitude. A l’opposé, au nord et à l’ouest, les massifs montagneux sont d’une présence plus discrète et ponctuelle : seuls quelques massifs pointent le bout de leur nez (Atlas, Hoggar, Fouta Djalon). Du fait de la continuité des montagnes dans l’Afrique de l’est et du sud, ces dernières jouent un rôle plus important dans cette zone du continent qu’au nord et à l’est.

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Quelle est la place de ces espaces montagnards peu connus dans le processus de développement du continent africain ? Elles remplissent quatre fonctions : Fonction identitaire L’image des massifs montagneux est véhiculée par la morphologie qu’ils présentent. Ces montagnes s’affichent ; elles sont porteuses de l’identité d’un pays. La montagne peut être sacralisée et bénéficier d’une forte charge religieuse, comme c’est le cas pour la montagne du pays massaï. Sa forme même impose le respect et la vénération : une forme conique très pure, une roche très blanche au sommet... Tout concourt à magnifier cette montagne. Au Cameroun, au sud du pays bamiléké, la montagne est sombre et fait peur. Tout ceci prédispose un certain nombre de montagnes à devenir des icônes. En fonction de leur capacité à fournir une image emblématique, elles sont instrumentalisées par leurs pays dans le cadre d’une mise en valeur touristique. Ainsi, l’image de la montagne est-elle récupérée par un processus d’identification nationale : le mont Kilimandjaro est sans doute l’exemple le plus significatif. La remarque vaut aussi pour les sources du Nil : elles ont longtemps intrigué de nombreux explorateurs qui se sont lancés à leur recherche et, aujourd’hui, plusieurs pays les revendiquent officiellement. Dans l’Afrique des grands lacs, le mont Nyiragongo qui doit sa célébrité aux expéditions du vulcanologue Haroun Tazieff présente une forme volcanique épurée. II fait partie de ces géosymboles, différents en fonction de nos modes de lecture et de notre culture. La force de ces géosymboles se mesure à la diffusion de leurs images, dans le cadre d’une exploitation touristique. C’est ainsi que les autorités de la Tanzanie ont baptisé le pays land of Zanzibar and Kilimandjaro. L’identité de jeunes nations peut se construire autour de telles images. Fonction écologique La montagne revêt une fonction d’amont : elle est proche du ciel et reçoit d’importantes pluies. C’est une réserve d’herbe et de pâturages, sur laquelle s’implantent les sociétés pastorales telles que les Peuls , mais aussi une réserve forestière caractérisée par la diversité de sa biomasse. Les enjeux de mise en valeur de ces réserves montagnardes sont à l’origine de tensions. Les mesures de protection de la nature visent à recréer un Eden. Or, les relations entre l’amont (la montagne) et l’aval (la plaine) créent des conflits entre les partisans de l’ "édénisation" de la montagne et ceux qui veulent valoriser les ressources de la montagne dans un processus de développement. Un massif du nord de la Tanzanie tient un rôle important : il s’agit du mont Ngorongoro, qui

présente une formidable concentration d’enjeux faunistiques. Nombreuses sont les montagnes à échapper à la protection. Fonction humaine et sociale Les bastions montagnards de l’est africain sont aussi des bastions démographiques : ce sont des terres de hautes densités. Seules quelques exceptions sont à noter et les explications sont à chercher du côté de l’histoire. L’arc camerounais est inégalement peuplé ; on attribue souvent cela à l’inégal destin de l’empire des Peuls. La montagne présente des gradients altitudinaux, pluviométriques et de densité. Ils se manifestent par la présence de sociétés agropastorales qui tirent profit de la présence d’eau, d’herbe et de terres. La montagne constitue également un refuge : à la différence des plaines et des littoraux, elles ne sont pas soumises aux razzias. Au Cameroun, les fortes densités en montagne s’expliquent par la protection qu’elles offraient face à l’islamisation pratiquée par les Peuls. L’accumulation de population et sa croissance crée une forte pression foncière. Elle se manifeste par de très nombreuses et petites exploitations. Ainsi, l’organisation spatiale est atomisée. Au Rwanda, les anciens entretiennent une relation charnelle avec une terre qu’ils considèrent nourricière. Fonction économique La présence du café arabica sur les hautes terres africaines est, sauf en Ethiopie, une marque de l’économie récente. D’autres cultures spécialisées s’y retrouvent : le thé les légumes, les fruits... en fin de compte, du vivrier marchand pour les grands marchés urbains. Aussi étrange que ça paraisse, la montagne devient un objet touristique en Afrique. Certes, ce n’est pas encore une activité fondamentale mais elle est déjà la cause de nombreux problèmes environnementaux (voir par exemple la quantité des déchets abandonnés par les touristes autour des refuges du mont Kilimandjaro). Avec le développement du tourisme en montagne, celle-ci s’insère dans une logique de standardisation des pratiques. Y a-t-il banalisation de la montagne pour autant ? Certes, le tourisme ravive la fonction refuge de la montagne africaine mais celle-ci présente toujours ces propres spécificités : beauté des paysages, intérêts pour les ressources naturelles. Les montagnes africaines constituent donc des espaces en mutation, elles se situent, selon le mot du géographe toulousain Bernard Charlery de la Masselière, « entre enfermement et ouverture sur le monde ». Existe-t-il donc un modèle de développement de la montagne ? Les marqueurs socioculturels sont nombreux et doivent être pris en compte. La montagne, comme tous les espaces géographiques, possède plusieurs registres de spécificité et d’intégration par rapport aux espaces environnants. Source : http://www.cafe-geo.net/article.php3?id_article=188