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numéro 112 Bimestriel – 2,5 Mars - avril 2011 L e Petit F ormat La lettre d’information des adhérents du Centre de la chanso n Association subventionnée par la Drac Ile-de-France, le ministère de la Jeunesse et des Sports, la Mairie de Paris, l’ Adami et la Sacem Actualité du Centre de la chanson Vive la reprise 2011 Dernière ligne droite ! Lundi 18 avril à partir de 14h (entrée libre) : auditions publiques des artistes sélectionnés. Finale le mardi 19 avril à 20h suivie du concert de Gaëlle Vignaux à La Scène du Canal, 116 quai de Jemmapes - Paris 10 e . Rés. 01 48 03 11 09. Sélections sur CD 3 titres : une chanson extraite du répertoire des origines à 2000, un chanson inédite de création, une chanson du répertoire enregistré (adaptions ou créations) de Graeme Allwright. Réception des dossiers (CD et fiche d’inscription), dimanche 20 mars minuit (boite à lettres du Centre de la chanson ou cachet de la poste faisant foi). Plaquette disponible au Centre de la chanson et sur www.centredelachanson.com. RAComptoir ! Nouveau nom pour le retour des scènes ouvertes. Nouveau lieu : Babel café, 109 bd de Ménilmontant (11 e ). Prochaines dates : les mercredis 9 mars, 13 avril, 11 mai et 8 juin Deux chansons par inscrit (pas de thème). Clavier, sono. Entrée libre (20h). Inscriptions uniquement auprès de Gilles Roucaute. 06 76 96 85 86 - [email protected] Www.centredelachanson.com Notre nouveau site Internet rafraîchi est en ligne. Consultez toutes les chroniques de disques et les interviews d’artistes parus dans Le Petit Format. Suivez également toute notre actualité sur Facebook . Des mots pour démos Atelier hebdomadaire d’écriture de chanson (niveau avancé) animé par Chantal Grimm. Les vendredis 4, 11, 18, 25 mars et 1 er avril de 19h30 à 22h au Centre de la chanson, 24 rue Geoffroy l’Asnier - 4 e . Inscription : Tél. 01 43 22 30 84 - [email protected] Les Vies liées de Bernard Lavilliers Michel Kemper dédicacera son ouvrage Les Vies liées de Lavilliers (Flammarion) le samedi 19 mars de 17h à 19h au Centre de la chanson 24, rue Geoffroy L’Asnier. Entrée libre. Cotisations annuelles Pour bénéficier des services offerts aux adhérents : Le Petit Format , e-mailing, studio, Journées des sociétés civiles, interviews, chroniques CD, conseil… c’est le moment de renouveler votre cotisation pour l’année 2011 : 25 (individuel) - 50 (association) - La Totale 180 (tous services inclus : se renseigner). Graeme Allwright , c’est un pseudonyme ? C’est mon vrai nom. Wright dans l’ancien anglais, ça signifiait métier . All wright , c’était un peu l’homme à tout faire du village. Et Graeme, c’est écossais. C’est un nom païen. « Homme à tout faire », ça te correspond bien. Tu as fait plusieurs métiers avant de chanter. Des métiers très physiques. Oui. J’ai travaillé beaucoup dans les fermes, pendant la guerre. J’ai travaillé comme mousse sur un bateau. J’ai été comédien à la comédie Saint- Etienne avec Jean Dasté. Je connaissais bien le travail du bois alors, je construisais les décors puis petit à petit je jouais des rôles au fur et à mesure que mon français s’améliorait. Puis j’ai été ouvrier agricole en Bourgogne, je faisais des ruches, je faisais mon pain… J’ai été maçon, plâtrier, j’ai enseigné à Dieulefit… Tu avais déjà 40 ans quand tu as enregistré ton premier disque. Comment es-tu arrivé à la chanson ? Mon père savait lire et écrire la musique. Ma mère avait une très belle voix. Avec mon frère, on chantait tous les quatre, dans les hôpitaux, les églises… J’ai baigné dans une ambiance de chansons. Pendant la guerre, il y avait beaucoup d’américains dans mon pays. Il s’étaient installés à côté de Wellington. Ils balançaient les émissions de radio qui venaient d’Amérique. J’ai découvert ainsi Sinatra, Bing Grosby… et le jazz. Donc je connaissais la musique. Et beaucoup plus tard, j’ai acheté une guitare à Saint-Etienne. Je chantais d’abord en anglais, les chansons du folklore américain puis, quand j‘étais en Bourgogne, j’ai essayé de chanter en français les chansons de Brassens, de Caussimon. Je ne comprenais pas tout. Nous sommes montés à Paris et c’est que tout a commencé. Il y avait beaucoup de boites à l’époque. J’ai passé une audition à la Contrescarpe. Colette Magny m’a présenté à Mouloudji qui produisait des artistes. J’ai fait une dizaine de chansons qui ont été enregistrées. C’est le premier disque : Le trimardeur, qui n’a pas très bien marché. Mais ça m’a fait connaître dans le métier. Un directeur artistique de Philips est venu me voir un soir, il était avec Gainsbourg… Je faisais la première partie de Barbara. J’ai signé avec Philips comme ça. C’est venu assez facilement… et très vite. Je me souviens d’un animateur à Europe 1, Agenda du Centre Vive la reprise ! à La Scène du Canal RAComptoir au Babel café Spectacles Gaëlle Vignaux à La Manufacture (75) Les Dièses à La Scène du Canal (75) Alcide au Sentier des Halles (75) Michel Boutet au Forum Léo Ferré (94) From & Ziel à St-Saulve (59) Hervé Lapalud en tournée Festivals Chantons sous les pins (40) Les Chants de mars à Lyon (69) Printival à Pézenas (34) Tremplins Chanson à Angers (49) Poémélodies (47) Les disques 13 chroniques de disques (dont 4 sur notre site) Graeme Allwright « Je suis resté à l’écart du show-buziness. Le contact avec le public, c’est plus important pour moi. » Photo : Lauren Pasche

Bimestriel – 2,5 Gaëlle Vignaux à La Manufacture (75) Les ... · Graeme Allwright , c’est un pseudonyme ? C’est mon vrai nom. Wright dans l’ancien anglais, ça signifiait

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  • numéro 112Bimestriel – 2,5 €Mars - avril 2011

    Le Petit FormatL a l e t t r e d ’ i n f o r m a t i o n d e s a d h é r e n t s d u C e n t r e d e l a c h a n s o n

    Association subventionnée par la Drac Ile-de-France, le ministère de la Jeunesse et des Sports, la Mairie de Paris, l’Adami et la Sacem

    Actualitédu Centre de la chanson

    Vive la reprise 2011

    Dernière ligne droite !Lundi 18 avril à partir de 14h (entrée libre) :auditions publiques des artistes sélectionnés.Finale le mardi 19 avril à 20h suivie du concert deGaëlle Vignaux à La Scène du Canal, 116 quai deJemmapes - Paris 10e. Rés. 01 48 03 11 09.Sélections sur CD 3 titres : une chanson extraite durépertoire des origines à 2000, un chanson inédite decréation, une chanson du répertoire enregistré(adaptions ou créations) de Graeme Allwright.Réception des dossiers (CD et fiche d’inscription),dimanche 20 mars minuit (boite à lettres du Centrede la chanson ou cachet de la poste faisant foi).Plaquette disponible au Centre de la chanson et surwww.centredelachanson.com.

    RAComptoir !

    Nouveau nom pour le retour des scènes ouvertes.Nouveau lieu : Babel café, 109 bd de Ménilmontant(11e). Prochaines dates : les mercredis 9 mars, 13avril, 11 mai et 8 juin Deux chansons par inscrit(pas de thème). Clavier, sono. Entrée libre (20h).Inscriptions uniquement auprès de Gilles Roucaute.06 76 96 85 86 - [email protected]

    Www.centredelachanson.com

    Notre nouveau site Internet rafraîchi est en ligne.Consultez toutes les chroniques de disques et lesinterviews d’artistes parus dans Le Petit Format. Suivezégalement toute notre actualité sur Facebook .

    Des mots pour démos

    Atelier hebdomadaire d’écriture de chanson(niveau avancé) animé par Chantal Grimm. Lesvendredis 4, 11, 18, 25 mars et 1er avril de 19h30 à22h au Centre de la chanson, 24 rue Geoffroyl’Asnier - 4e. Inscription : Tél. 01 43 22 30 84 [email protected]

    Les Vies liées de Bernard Lavilliers

    Michel Kemper dédicacera son ouvrage Les Viesliées de Lavilliers (Flammarion) le samedi 19 marsde 17h à 19h au Centre de la chanson 24, rueGeoffroy L’Asnier. Entrée libre.

    Cotisations annuelles

    Pour bénéficier des services offerts aux adhérents :Le Petit Format , e-mailing, studio, Journées dessociétés civiles, interviews, chroniques CD,conseil… c’est le moment de renouveler votrecotisation pour l’année 2011 : 25 € (individuel) -50 € (association) - La Totale 180 € (tous servicesinclus : se renseigner).

    Vu de France, on estime que Félix Leclerc est le

    Graeme Allwright , c’est un pseudonyme ?

    C’est mon vrai nom. Wright dans l’ancien anglais,ça signifiait métier . All wright , c’était un peul’homme à tout faire du village. Et Graeme, c’estécossais. C’est un nom païen.

    « Homme à tout faire », ça te correspond bien.Tu as fait plusieurs métiers avant de chanter.Des métiers très physiques.

    Oui. J’ai travaillé beaucoup dans les fermes,pendant la guerre. J’ai travaillé comme mousse surun bateau. J’ai été comédien à la comédie Saint-Etienne avec Jean Dasté. Je connaissais bien letravail du bois alors, je construisais les décors puispetit à petit je jouais des rôles au fur et à mesureque mon français s’améliorait. Puis j’ai été ouvrieragricole en Bourgogne, je faisais des ruches, jefaisais mon pain… J’ai été maçon, plâtrier, j’aienseigné à Dieulefit…

    Tu avais déjà 40 ans quand tu as enregistré tonpremier disque. Comment es-tu arrivé à lachanson ?

    Mon père savait lire et écrire la musique. Ma mèreavait une très belle voix. Avec mon frère, onchantait tous les quatre, dans les hôpitaux, leséglises… J’ai baigné dans une ambiance de

    chansons. Pendant la guerre, il y avait beaucoupd’américains dans mon pays. Il s’étaient installés àcôté de Wellington. Ils balançaient les émissions deradio qui venaient d’Amérique. J’ai découvert ainsiSinatra, Bing Grosby… et le jazz. Donc jeconnaissais la musique. Et beaucoup plus tard, j’aiacheté une guitare à Saint-Etienne. Je chantaisd’abord en anglais, les chansons du folkloreaméricain puis, quand j‘étais en Bourgogne, j’aiessayé de chanter en français les chansons deBrassens, de Caussimon. Je ne comprenais pastout. Nous sommes montés à Paris et c’est là quetout a commencé. Il y avait beaucoup de boites àl’époque. J’ai passé une audition à la Contrescarpe.Colette Magny m’a présenté à Mouloudji quiproduisait des artistes. J’ai fait une dizaine dechansons qui ont été enregistrées.

    C’est le premier disque : Le trimardeur, qui n’apas très bien marché.

    Mais ça m’a fait connaître dans le métier. Undirecteur artistique de Philips est venu me voir unsoir, il était avec Gainsbourg… Je faisais lapremière partie de Barbara. J’ai signé avec Philipscomme ça. C’est venu assez facilement… et trèsvite. Je me souviens d’un animateur à Europe 1,

    Agenda du CentreVive la reprise ! à La Scène du Canal

    RAComptoir au Babel café

    SpectaclesGaëlle Vignaux à La Manufacture (75)Les Dièses à La Scène du Canal (75)Alcide au Sentier des Halles (75)Michel Boutet au Forum Léo Ferré (94)From & Ziel à St-Saulve (59)Hervé Lapalud en tournée

    FestivalsChantons sous les pins (40)Les Chants de mars à Lyon (69)Printival à Pézenas (34)

    TremplinsChanson à Angers (49)Poémélodies (47)

    Les disques

    13 chroniques de disques (dont 4 sur notre site)

    GraemeAllwright

    « Je suis restéà l’écart dushow-buziness.Le contactavec le public,c’est plusimportant pour moi. »

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  • Michel Lancelot. Un soir il a passé mon disque enentier ! Tu te rends compte !

    C’était une autre époque.

    Oui. Maintenant quand on te passe une chansonsans la couper, il faut s’estimer heureux. C’était unebelle promotion. Je me suis retrouvé dans dessalles pleines avec un public qui connaissait meschansons par cœur.

    Comment tu as géré ce succès ?

    J’étais un peu dépassé par les événements. Jen’avais pas l’ambition de devenir vedette. Alors jesuis parti voyager .

    Sur le fameux disque de 1966 où figurentEmmène-moi et Il faut que je m‘en aille, on tevoit sur la pochette avec une autoharp .

    Oui, c’est un bel instrument, mais on passait untemps fou à l’accorder. Les tiges étaient enfoncéesdans le bois. Après 3 chansons, c’était désaccordé.

    Tu as vendu beaucoup de disques (plusieursfois disque d’or), tu as rempli plusieurs fois degrandes salles comme l’Olympia ou Bobino.Pourtant tu es complètement absent desmédia… C’est un choix ?

    Au début, je passais un peu à la télé avec GuyBéart, mais je n’aimais pas tellement l’ambiance. Jesuis resté à l’écart du show-business. Le contactavec le public, c’est plus important pour moi. Et jefaisais un disque et je partais aussitôt. J’aibeaucoup voyagé.

    Grace à tes chansons, beaucoup de gens de magénération ont découvert l’univers de LéonardCohen, Bob Dylan… Quels ont été tes rapportsavec ces chanteurs ? Est-ce qu’ils ont suivi tontravail ?

    J’ai peu adapté Bob Dylan. Mais Léonard Cohen,oui. Ce mélange de sensualité et de mysticisme meconvenait. Quand il était à Paris, il venait me voir. Ilaimait bien ce que je faisais. De toute façon, il fallaitlui demander l’autorisation avant de chanter seschansons.

    Adapter une chanson en français est un travailparticulier. C’est difficile. Il faut traduire sanstrahir.

    Le fait que j’ai commencé très tard à chanter, çam’a plutôt aidé. J’avais une certaine expérience dela vie, et j’ai appris le français dans tous les milieux:des ouvriers, des paysans avec qui je travaillais. Jeconnaissais le français parlé.

    L’adaptation de Suzanne est une réussiteabsolue. C’est une chanson très mystérieusequ’il a écrite suite à sa rencontre avec cettefemme. Il paraît que c’est une femme étrange.Elle vivrait actuellement dans une camionnette.

    Il a eu une vie un peu mouvementée avec sesfemmes… Suzanne, c’est une chanson éternelle.

    Tu as aussi consacré un disque en 1985 àGeorges Brassens en anglais. Tu l’as rencontré ?

    Une fois dans un ascenseur ! Pour aller sur unplateau de télé. Pour ce disque, Philips cherchaitquelqu‘un qui puisse chanter Brassens en anglais.Ils ont trouvé un universitaire écossais qui a fait untravail remarquable de traduction. On a fait ledisque avec Joël Favreau qui a fait de très beauxarrangements et Pierre Nicolas. Mais quand cetécossais a vu qu’il touchait presque rien par laSacem comme adaptateur, il a bloqué le disque.J’avais été voir le PDG de Philips pour trouver unesolution. C’était compliqué. Du coup, ils n’ont pasfait de promotion. Je voudrais bien voir ce disquecar je ne l’ai pas.

    Adapter des textes français en anglais, c’estune entreprise périlleuse… Chez Brassens, il ya des jeux de mot, des références culturelles.

    Oui. Ce n’est pas simple. Il faut trouver deséquivalences. Il y a deux très belle réussites : Lescopains d’abord qui deviennent Buddies first of all,c’est le même nombre de syllabes. Et Lespassantes. Je crois qu’on se sert de ce disque danscertaines écoles pour apprendre l’anglais. *

    Le thème de la guerre apparaît souvent dans teschansons des années 60 : Johnny, Jusqu’à laceinture, Deux jeunes frères… Depuis quelquestemps, tu commences tes récitals par uneversion personnelle de La Marseillaise ! Uneversion pacifiste du chant de guerre le pluscélèbre. C’est une autre façon de refuser laguerre.

    Un jour, je vois à la télé une institutrice faireapprendre à ses élèves les paroles de LaMarseillaise que je trouve belliqueuses et sangui-naires. J’étais complètement possédé. C’estinvraisemblable. Au pays des droits de l’homme, onenseigne un chant de guerre à l’école. Alors, j’aivoulu transformer ce chant de guerre en chant depaix. À tous les concerts je distribue les textes. Lesenfants aiment beaucoup chanter ma version. Onl’a chantée dans des églises, avec des chorales,des orchestres… C’est mon dernier combat.

    Il faut envoyer le texte à l’Elysée !

    Je l’ai fait. On m’a répondu que La Marseillaise estconnue dans le monde entier comme un chant quisymbolise « la libération des peuples ». C’est vraique la musique est connue dans le monde entier.Mais pas les paroles, sauf pour les français. Obligerles petits enfants à chanter ce chant… Pourchanger les paroles, il faudrait changer la consti-tution. Ça va peut-être venir avec la nouvellegénération.

    Tu parles de « combat ». Tu crois qu’on peutchanger les choses, les mentalités… avec unechanson ?

    Non. Quand on voit ce qui se passe en ce moment.On ne peut pas changer le monde mais… on peutchanger les paroles de La Marseillaise ! Tu sais,quand je vois le nombre de gens qui viennent mevoir après les concerts en me disant « Vous avezbercé mon enfance ». Moi, je ne voulais pas porterun message. Quand je vois l’impact que peut avoirune chanson… Je pense qu’on devrait plus écouterles chanteurs que les politiques. Apprendre unechanson comme ça aux enfants, c’est important, çareste.

    45 ans de chansons. Tu n’envisages pas deprendre une retraite ?

    (rires) Tant que j’ai la santé et que je peux apporterdu bonheur aux gens, je continue. Je les voisdebout à la fin des concerts, et ils sont heureux.Comme mon premier public, celui des années 60,a fait écouter ces chansons à leurs enfants, et eux-mêmes à leurs propres enfants… J’ai un publicfamilial. Et les salles sont toujours pleines avec desgrands et des enfants. J’ai une chance inouïe.

    En 2016, pour tes 50 ans de chansons, si onloue une grande salle pour fêter ça, tu espartant ?

    J’aurai quel âge ? (il réfléchit… il rit)… Si je suisencore là… pourquoi pas ?

    Propos recueillis par Ivan-Claude Perey* Graeme Allwright sings Brassens sortira en CD àl’occasion des 30 ans de la disparition de Brassens.

    Graeme Allwright est l’invité thématique de Vive lareprise, les 18 et 19 avril 2011 à La Scène du Canal.

    Rencontres avec…

    Yves Borowice

    Yves, c’est plutôt rare un historien qui s’inté-resse à la chanson. Comment ça t’est venu ?

    Ceci relève du « misérable petit tas de secrets »qui, selon Malraux, constitue un homme ! Dans majeunesse, les artistes s’appelaient Brassens, Ferré,Barbara, Bécaud ou Nougaro, puis – àl’adolescence – Le Forestier, Lavilliers, Annegarn…Pour quelques francs, on pouvait aller écouterMagny, Béranger ou Bertin à la MJC du coin, puisse gaver à la télé de Dalida, Delpech, Dassin oumême Tino ! J’ai compris très tôt, en fréquentantdes réfugiés chiliens, que la chanson est porteusede multiples significations. Bien plus tard, j’ai décidéde l’étudier comme source de connaissance dupassé – je dis bien source et non simple « reflet del’époque ». Et, jusqu’à présent, la chanson ne m’estpas « devenue infidèle », comme le craignaitMouloudji dans sa Grange-aux-Belles…

    Christian Marcadet et toi animez un séminaire àla Sorbonne. Quel est le principe ?

    Ce séminaire est un lieu de réflexion interdisci-plinaire – le seul en France – qui fédère desspécialistes ou des chercheurs qui ont, à unmoment donné, travaillé sur la chanson. S’yexpriment des historiens, sociologues, linguistes,musicologues, etc. Mais aussi des gens « demétier » (Gilbert Laffaille, Pierre Philippe, MarcelAmont...). Nous tentons de combler partiellementun vide scandaleux : un étudiant féru de cinéma oude danse trouvera des départements universitairesdédiés à ces arts. Sur la chanson : rien ! Aupassage, merci au Petit Format d’annoncer sesconférences.

    Et ce livre Les Femmes de la chanson paru chezTextuel, tu peux nous en parler ?

    Il s’agit d’un « beau livre » écrit par une phalangede connaisseurs pointus que j’ai dirigée : 200portraits, du Second Empire à nos jours. Un outil desavoir rigoureux, mais aussi un hommage au« deuxième sexe », dont l’apport à la chanson estsouvent minoré. On y trouvera de nombreusesfemmes que la mémoire collective avait enseveliesdans l’oubli. Le spectre chronologique etprofessionnel (avec des auteures, des composi-trices, des médiatrices…) étant très vaste, lasélection a été difficile. Mais nous avons tenu àprésenter l’éventail le plus large possible, sans partipris. Parmi les premiers lecteurs, quelques espritschagrins s’en sont émus : quoi, Catherine Ribeirocôtoyant Rika Zaraï, Anne Sylvestre en compagnied’Annie Cordy ! Un sectarisme qui marche d’ailleursdans les deux sens. Michèle Bernard ? Pas assezconnue ! Dorothée ? Trop commerciale ! Mais laréception du livre est globalement très élogieuse.

    Propos recueillis par Didier Desmas

  • Cyril Romoli

    Cyril, tu es comédien à la base. La chanson,c’est venu comment ?

    J’avais envie d’être chanteur avant d’être comédienje crois, mais la chanson a fait quelques détoursavant de me rattraper et de se mélangerdéfinitivement au théâtre. Après quelques groupes(de rock !) à l’adolescence, j’ai découvert lacomédie musicale à l’américaine et le théâtremusical pendant ma formation de comédien, puisj’ai commencé à accompagner des spectacles aupiano, pour finir par en faire les musiques puis àcomposer des chansons pour les autres. Un jour j’aiété amené à accompagner Néry, et la chanson àressurgi, j’ai compris qu’on pouvait en faireautrement, la « théâtraliser ». Et l’envie est venuede raconter mes histoires.

    Le théâtre, ça aide dans un parcours dechanteur ?

    Ca aide oui, parce qu’il s’agit toujours de porter untexte, son sens, sa poésie, de raconter deshistoires. Mais cela peut gêner aussi, quand lesgens de chansons vous voient comme un« comédien qui chante » et pas comme unmusicien auteur et chanteur à part entière.

    Ton nouveau CD vient de sortir et toujours fidèleà tes auteurs. Parles-nous de ces collaborations.

    J’ai rencontré Eric Chantelauze sur « La guinguettea rouvert ses volets » une aventure musicale etamicale. J’ai aimé l’homme, ses textes son goût du« son qui fait sens ». J’ai commencé par faire ses« poubelles» les textes jamais mis en musique parles autres, et j’y ai trouvé des merveilles. Alorsdepuis je pille régulièrement ses tiroirs. Jem’approprie vraiment ses histoires et quand j’écrismoi même des textes, nos écritures se fondentassez bien. Et sur cet album il y a aussi deuxnouveaux venus Olivier Breitman, avec qui jetravaillais sur « Le Roi Lion » et Camille d’Avril unejeune ACI rencontrée il y a peu.

    Tu parles d’humour rose et d’amours noires. Tune serais pas un peu séducteur des fois ?

    C’était le titre du premier album. Et si les femmessont toujours un sujet majeur des chansons, et quej’aborde et joue avec le narcissisme et l’ego, il s’agitplus de raconter l’intime (ou le scabreux) que dejouer les séducteurs.

    Quel est ton point de vue sur la chansond’aujourd’hui ?

    Enthousiaste et angoissé. Angoissé de voir quel’espace d’expression est toujours restreint. Maisenthousiaste de découvrir ou retrouver réguliè-rement des gens (connus ou inconnus) dont j’aimele travail tant scéniquement qu’en terme d’écriture.Un sentiment aussi, ou illusion peut-être, que deplus en plus de gens, reprennent goût aux textes.www.myspace.com/romolicyril

    Propos recueillis par Didier Desmas

    Tomislav

    Tomislav, tu es « homme orchestre », c’est biença ? On peut nous en savoir un peu plus ?

    C'est la manière dont on peut me décrire sur scène.Cela dit, ni mes chansons ni mes prestations necomportent le côté burlesque qu'une telleexpression peut suggérer. Je me présente guitareaux mains, harmonica aux lèvres, grosse caisse etcharley aux pieds. J'ai aussi un « sampler » qui mepermet d'enregistrer des motifs musicaux en directet de les jouer en boucle, ou d'envoyer des sonspré-enregistrés. L'idée est de varier les couleurs etles atmosphères.

    Comment es-tu venu à la chanson ?

    Né en France, je suis originaire de Croatie, un paysdont le peuple a toujours chanté son histoire. Aussiloin que je m'en souvienne, on a toujours joué etchanté dans ma famille. C'est assez naturellementque j'en suis venu à empoigner la guitare de monpère vers treize ans. Dès le départ, j'ai voulu écriremes propres chansons, en français.

    Le départ, l’exil sont des thèmes qu’on trouvedans tes chansons. La nostalgie du pays ?

    Peut-être. Le fait d'avoir grandi au milieu de deuxcultures, sûrement. Je suis un fils de l'immigration.J'imagine que mon goût pour les histoires de gensqui partent vient de là.

    Parles-nous de tes influences en matière dechanson ?

    Je me sens influencé par toute chanson qui metouche, quel que soit le style. J'accorde la mêmeimportance à la musique qu'aux mots. Du coup,j'aime autant Brel ou les Beatles qu'un riff assassind'AC/DC ou le « groove » imparable d'un Prince.J'aurais tort de me priver. Toutefois, j'ai passé etpasse encore beaucoup de temps à écouter desbardes américains comme Dylan, Springsteen ouNeil Young, et des vieux bluesmen au son rugueux,Skip James ou Son House. Le folklore croate faitégalement partie de ce qui m'a construit. EnFrance, j'aime les groupes comme les Innocents,qui ont su allier leurs influences musicales anglo-saxonnes à l'exigence du texte écrit en français.Dernièrement, j'ai vu sur scène Domb, Karpatt ouVolo et je les ai trouvés géniaux. Je pourrais aussite parler d'écrivains américains de l'immigrationcomme l'italo-américain John Fante, mais là, tu nem'arrêteras plus...

    J’ai entendu dire que tu préparais un CD. Je metrompe ?

    Exact. Tu connais la chanson : un disque, c'est unchantier. J'ai enregistré presque tous les morceaux.Viendra ensuite l'étape cruciale du mixage. Je doiscomposer avec le rythme intense des concertsalors ça prend du temps. Mais je ne manquerai pasde te tenir au courant !

    www.tomislav.fr

    Propos recueillis par Didier Desmas

    Jean-Pierre Réginal

    Je viens de réécouter Fragile accalmie. Il y a unmot qui tourne dans ma tête, c’est « orfèvre ».Me permets-tu de te l’appliquer ?

    Merci, à travers le mot « orfèvre », de bien vouloirredorer ma carrière... Ou bien, si cette question faitallusion aux revenus financiers liés à la chanson, jene peux pas vraiment affirmer que j'accumule lespièces d'or ! Par contre, le bonheur de pratiquermon activité d'auteur compositeur interprète enartisan reste intacte et c'est du garanti fait main, jele jure... Je travaille beaucoup sur la musique desmots et pas seulement sur celle des notes. C'estcette sensation de cohérence musicale totale quime fait mettre le point presque final à meschansons... Et je dis « presque » car une chansonest pour moi vraiment parachevée lorsque le publicme le fait savoir.

    Comment le « chanteur de fond » que tu esentretient-il son souffle ?

    En travaillant le plus possible dans l'exercice dubonheur d'écrire, puis de chanter. Je n'ose paspenser à une mise en retraite, qui pour moi seraitlié à un problème physique. Plusieurs fois par an jepromène la chanson en Allemagne et auDanemark. Des milliers de kilomètres en voiture,d'un port à l'autre, avec obligation d'énergie... Et jem'offre aussi le luxe du souffle en respirant l'airsalin de la Bretagne, où un piano m'attend (avecquelques huîtres !)

    Exister sans les médias... Dis-moi que c’estpossible...

    On ne parle pas de « chanter », à travers cettequestion, car on peut toujours exister en chantantsous la douche... Il s'agit de savoir si l'on peutexister en tant que chanteur professionnel sansl'aide des médias et là, ma réponse est définiti-vement non. Sans médias pour faire connaître tonexistence on ne remplit jamais une salle despectacle avec des gens nouveaux et on reste lastar de ses copains et de sa famille. Là, je te sensun peu contrarié, mais j'aimerais que tu sois quandmême présent à mon prochain spectacle !

    Parle-nous de l’Allemagne et du Danemark...

    Plus de 20 années à exporter ma langue maternellede centres culturels en établissements d'ensei-gnement, où j'essaye de donner de la France uneimage autre que celle de la gastronomie, desparfum ou de la haute couture... Notre chansontraditionnelle est très prisée pour son charme deséduction musicale. C'est peut-être encore là quepersiste la « douce France »...

    En enseignant, qu’est-ce qu’on apprend ?

    On apprend tout... l'enseignement est un reflet denous. C'est une forme de jeunesse qui dure. Unlangage entre les générations et la confirmation, s'ille fallait, que notre langue est vraiment belle et quenous aurions pu sans complexe coiffer les anglaisau poteau pour devenir la langue internationale eten tout cas, celle du cœur.www.jpreginal.com

    Propos recueillis par Jacques Perciot

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  • France Léa

    Vous donnez l’impression d’aimer tellement lachanson et le théâtre que vous n’avez jamaistranché, choisi vraiment l’un ou l’autre...

    Parce que je n’exprime pas tout à fait la mêmechose dans l’un et l’autre. Pour moi ils sontcomplémentaires. Je suis énormément pudique,mes textes un peu drôles me permettent d’avoir unpeu de recul par rapport à des choses qui metiennent à cœur. J’ai besoin de cette dimensiond’humour et puis aussi du chant « tout bête ».J’essaie de faire l’unité avec moi-même en chantantet en parlant.

    Sur scène, vous dégagez une très belleénergie... Vous faites du bien ! Je supposequ’on a dû vous le dire souvent...

    Oui ! C’est ma récompense. Des gens me disentqu’ils se sont un peu forcés à venir, qu’ils avaientun peu la flemme, ou qu’ils n’allaient pas très bien.Et ils repartent réconciliés avec la vie. C’est marécompense, vraiment.

    La chanson, que peut-elle faire pour le monde ?

    La poétesse Marie-Noëlle dit que chanter est unebelle façon de pleurer... Je trouve ça magnifique !Effectivement, à partir du moment où notre peineest chantée, elle a moyen de s’envoler et de partirau ciel. Parce que la voix chantée s’élève, la voixparlée beaucoup moins. La peine chantée estimmédiatement quasiment consolée. De plus, elleest partagée, parce qu’on chante souvent avecd’autres. Ce que je ressens, c’est que je peux dansle même temps exprimer ma peine et m’ensoulager. C’est fort !

    Pour m’inspirer du titre et du sujet de votrenouveau spectacle : vous sentez-vous biendans le rôle de France Léa ?

    Toute ma vie, j’ai eu l’impression de n’être pas toutà fait moi-même, que chacune de mes paroles metrahissait. C’est pour ça que j’aime beaucoup laparole poétique. Elle est polysémique, on peut direbeaucoup en peu de mots. Dans le spectacle, jecite une parole magnifique de Francis Thomson :« Qui cueille une fleur dérange une étoile ». Enquelques mots, tout est dit de notre relation aucosmos. J’ai toujours eu l’impression que les motsme trahissaient, trahissaient un être en moi qui nepeut pas se dire avec des mots. L’impression qu’unsilence, un silence habité, un silence présent,transcrivait mieux tout ce que je pourrais dire. Et cequi est le plus proche du silence, c’est le chant et laparole poétique. Le discours s’adresse au mental,qui est déjà tellement sollicité. Le chant et la parolepoétique s’adressent au cœur, à l’âme. C’est pourça qu’on va au spectacle vivant, pour être touchéde ce côté-là. Notre cerveau est en passe d’éclater,notre cœur et notre âme refont leur nourriture dansla chanson, dans le poème.

    Une petite sagesse pour la route ?

    Elle est de Novalis : « Le paradis est dispersé surtoute la terre c’est pourquoi on ne le reconnaît plus,il faut réunir ses traits épars ».

    Propos recueillis par Jacques Perciot

    Nicolas Bacchus

    Il appartiendra, certes, au public de juger, maistu me disais trouver ton dernier album "trèsécoutable". Je voudrais que tu développes cetteappréciation...

    C'est surtout une boutade pour dire à la fois qu'ons'est impliqué, appliqué, pour le son et les textes,qu'on est fiers du résultat, mais sans faire trop lefanfaron. Un genre de fausse modestie qui se voit.Cela dit je suis vraiment fier du travail accompli,c'est important aussi vis-à-vis des gens qui m'ontfait confiance (auteurs, éditeurs, musiciens), et jene pense pas m'être ruiné pour rien ! Je pense queça s'entend et que je n'ai pas à rougir de l'évolutiond'un album à l'autre : ce n'est pas encore "l'albumde trop" ! Et les musiciens de talent que j'ai réunis(Giovanni Mirabassi qu'on ne présente plus, BrahimHaiouani piqué à Toulis pour l'occasion, JulienJoubert de Kwak, Marc Limballe des Rois de laSuède, et quelques découvertes) n'y sont pas pourrien. Comme Sylvain Mercier, l'ingénieur du son,qui est aussi celui de Benjamin Biolay depuis LaSuperbe.

    Osciller toujours entre niaque et tendresse,c’est grisant ?

    En tout cas c'est mon mode de fonctionnement,dans la vie comme à l'écrit, et c'est ce que j'aimechez ceux que j'écoute et lis. Ça me paraît faire unêtre humain plus complet qu'univoque.

    Tu as quelques invités, sur cet album. Peux-tufaire les présentations ?

    Le disque permet de faire proprement ce qu'on faitparfois un peu rapidement lors de rencontres tropbrèves sur scène, et de présenter sa famillemusicale. D'où la présence d'Anne Sylvestre ou dePatrick Font et Sarclo, un genre de caution des"anciens" dont je suis très honoré, mais aussi deThomas Pitiot ou Agnès Bihl. Quant à LucasRocher, je produis aussi son 1er album, commej'avais produit les 2 de Manu Galure, il a donc toutesa place et là… c'est moi l'ancien !

    Bacchanales productions, ça consiste en quoi ?

    Après Kiui Prod (Sarclo, Manu Galure, FrédéricFromet, Thibaut Derien), co-créé et co-dirigépendant 5 ans avec Julien Ackermann, c'est manouvelle structure de production, sous forme asso-ciative, avec vocation à devenir un outil collectif etcoopératif, voire à terme une coopérative.

    La scène, est-ce toujours pour toi uneimpatience ?

    Toujours, mais c'est un autre travail que le disque.J'y suis beaucoup moins riche et rigoureuxmusicalement (solo ou duo acoustique, accompa-gnement sauvage à la guitare) mais j'accorde uneimportance réelle au spectacle, à faire plus que deschansons, un "disque debout". La bonne école deFont et Val, Les Malpolis ou Juliette, peut-être.Envie ni de m'emmerder, ni d'emmerder les gens…

    Propos recueillis par Jacques Perciot

    Disques

    Pauline Paris Le grand jeu. 14 titres. Parisienne,comme son nom l’indique, elle est née il y a 26 ans.Sa première chanson date de l’an 2 000. Depuis,elle peaufine son art de la rue où s’entendent desrefrains amusés, sur un air jazzy ou manouche.L’album « Le grand jeu » a été enregistré en 2009,fruit de son expérience sur scène. La capitale,Pauline l’arpente dans ses textes, y inscrivant despersonnages atypiques aux prénoms de nouveauxgavroches du macadam ou d’origine plusexotiques. De Paname à l’Odéon, tout peut devenirchansons. « Une rue, un regard, un rire, un gestefrisson, c’est toi qui m’enivres », ces chansonsdessinent une sorte de carte du tendre, façoncorrida, en des dialogues lutins. Le meilleur de sonécriture pointe dans un étonnant « hymne à labelote » aux accents acoustiques. Bien joué, ceParis canaille. www.paulineparis.com

    Robert-Frédéric Migliorini

    Laurent Gatz La qualité des éléments. Jetlagmusic(sortie le 14 mars). La bio officielle mentionne desdébuts en 2007 en solo, au piano puis le début decollaboration avec des musiciens de jazz notam-ment. L’album affiche son ambition dans les thèmesévoqués et les couleurs musicales confiées à « TheBand » sous la conduite de Frédéric Gaillardet.Avec une évocation suggestive (d’Amalia à Billie),en hommage à deux grandes dames du blues et dufado. La chanson titre « La qualité des éléments »confirme l’entrée du développement durable dans lerépertoire. De son côté, « L’homme numérique »s’intéresse au monde virtuel qui nous gouverne.Laurent Gatz aime la diversité et décrire le monde.Chaque chanson explore un univers différent.L’émotion est au rendez-vous avec « la veuvecoquelicot » et « Trou de mémoire ».www.laurentgatz.com

    Robert-Frédéric Migliorini

    Lucas Rocher Beau moqueur. 14 titres.Bacchanales productions / Mosaïc Distribution.Un premier album. 20 ans. Lucas Rocher écrit,compose, chante, joue de la guitare, accompagned’autres chanteurs mais surtout raconte, selon sacarte de visite. En tout cas Lucas Rocher cultive

  • une réelle énergie dès le premier titre « Je mevoyais déjà », avec ses plans galère de rigueur etles jeux de mots ou rimes en forme de clin d’oeil. Illivre sans façons les rêves brisés du « pirate », ennaufragé de l’urbain contemporain. Se projetant,non sans humour, Lucas s’imagine trentenaire.Entre cauchemar et fantaisie. « J’aurais préféréprendre la porte le premier » lance encore l’amou-reux transis. Nicolas Bacchus est à la directionartistique et Sylvain Mercier à la réalisation.www.lucas-rocher.com

    Robert-Frédéric Migliorini

    Alcide, La balade en corbillard. 13 titres. VocationRecords. D’un pas pressé, sur la pochette, ClémentGuerrucci (Alcide), cravaté, élégant, mène ladanse. Il n’épargne personne en ses chroniques,préoccupé de l’existentiel plus que de l’accessoireet la célébrité. « Dans mon entreprise, c’est commedeux doigts dans une prise » lance-t-il,accompagné par des cuivres swinguant. Dans sonmonde où les chansons sont biodégradables, ilévoque les fins dernières et les accros à la nicotine.Changement de registre avec « Celui qui a fait lafemme » et « Depuis le Moyen-Âge ». Alcide n’apas décidément la langue dans sa poche,interpellant au passage Dieu, ou ses représentants,sur l’état du monde. Pour établir avec Lui undialogue fécond. « Je cherche mon trône dans unautre royaume » assure cet anti-héros. « Rendez-vous là-haut » clôt l’exercice, message à de chersdisparus. Les musiques sont d’Alex Finkin quiassure la réalisation de l’album.www.alcide.net

    Robert-Frédéric Migliorini

    Pascal Mary. Vivons d’un rien. 12 titres.Autoproduit. Enfance en Normandie, études delettres, théâtre à Paris et chansons. Une voixtranquille qui peaufinent des mots de tendresse etd’apaisement. Pour que le chemin soit moins dur etles sentiments plus forts. Le bonheur au quotidien,sans trop de bémols, est l’horizon de cet artiste quisait chanter les peut-être et dire les mercis. Toutsimplement. « Pour ces bras qui se donnent, quandla joie m’abandonne, merci. Pour la vie qui s’éveille,quand j’oublie l’essentiel, merci. », la ballade defacture classique déroule son histoire sur un air depiano. L’observateur se fait chroniqueur et plusmordant ou satirique pour décrire quelques traversde notre époque et dénoncer les conventions. Touten nuances, pour l’essentiel, cet album sauradéjouer les humeurs chagrines et nous faire aimerces petits riens qui comptent. La direction musicaleest l’œuvre de Patrick Laviosa.www.pascal-mary.com

    Robert-Frédéric Migliorini

    Nicolas Bacchus, La verVe et la Joie. 16 titres.Bacchanales productions / Mosaïc Distribution.Il y avait six ans, depuis À table, que Bacchus nenous avait pas régalé d’un nouvel opus. Régalé estle juste terme car ce disque-là est réjouissant au-delà des mots. Il suffit d’écouter ce plagiat duMétèque revu et corrigé par Patrick Font, chantépar Font, par Val (pcc. Bacchus), Agnès Bihl etSarcloret : hilarant et, qui plus est, intelligent ; ceduo au-delà du sensible avec Anne Sylvestre, cesautres avec Lucas Rocher, Yoann Ortega etThomas Pitiot, pour de suite estimer ce sens dupartage qu’anime notre toulousain. Ajoutons pourfaire bon poids une chanson de Dimey, une deThomas Pitiot, deux de Manu Gallure et une autrede Vissotski adaptée en français par Le Forestier…Reste que la tonalité de ces plages-là n’est pasfranchement au beau fixe. Les propos grondentdans le micro, contexte politique oblige : « Les gensde mon pays ont peur… » Et les sentiments sonttout autant perturbés, difficiles. Car Bacchus nousparle aussi beaucoup d’amour. Notamment par cedélicieux Filet mignon, recette qui pourrait nousmettre en appétit : « Tu m’as demandé / Amour, det’apprendre / À Cuisiner un filet / Mignon. ».www.nicolas-bacchus.com

    Michel Kemper

    Cyril Romoli. À l’heure où les lionnesapparaissent. 13 titres. Autoproduit. Difficile sansdoute, après avoir été fauve si longtemps dans lacomédie musicale Le Roi lion, de ne plus rugir…surtout à l’heure où les lionnes vont boire. Romoli ale cœur gros, « si gros qu’il suffirait pour deux. » Etce disque est une succession de portraits, parfoispar défaut, par absence, de femmes, « fesses dejolies femmes noires » de Barbès, « fesses caramé-lisées » des jolies vahinés, celle qui laisse le lit endésordre, celle qui est vendeuse chez Tati, celledont les seins s’agitent sous son pull où « Tu t’esconstruit une cabane / Là où j’adore poser mesmains. » Toute une faune féminine à flore de mots.Romoli est tellement étonnant, « performant » enscène, de la classe à l’évidence d’un RomainDidier, côté chien fou (« lion fou » faudrait-il direpour être bien raccord) en plus, qu’un disque nesaurait fidèlement traduire la gamme d’émotionsqu’il adoube à celle de ses notes. Reste que cetopus est une belle pièce dans ce trousseau demots qu’il doit pour l’essentiel à Éric Chantelauze etpose sur de délicates mélodies qui peuvent noushanter. Comme diraient les lionnes intéressées :« Ça va, savane. » www.myspace.com/romolicyril

    Michel Kemper

    Travis Bürki. (éponyme) 12 titres. Anticraft.Il a rangé au placard cette voyelle qui lui fitlongtemps office de blaze, énigmatique Ü signantl’audacieux commerce de ses deux premiersalbums, pour recouvrer, depuis le précédent CD de2007, son patronyme. Pas de titre d’album cettefois-ci, et un art qui s’éloigne plus encore del’incongruité des débuts, de cette douce folie quifaisait alors sa force, son indispensabilité presque,sa lisibilité. On doit sentir la déception dans monpropos. Un peu. Bürki se fond désormais dans untout venant, de qualité certes, mais déjà entendu.Un truc oscillant entre une chanson d’auteur et lavariété. Là, en cet album présenté comme « l’undes sommets de son parcours », Travis Bürki frotteentre eux le souvenir des seventeen à ce qu’ilperçoit du contemporain de la chanson, rock etfunk, avec quelques ingrédients tirés du folk et de lacountry. Un disque bien sûr séduisant, coloré,acidulé, joyeux, énergique, perfusé d’électro-pop etde rythmiques efficaces mais distant de cepositionnement si particulier au Ü de jadis. Ledéplacement de son centre de gravité banalise sonexercice. www.mysce.com/travisburki

    Michel Kemper

    Presque Oui. Ma bande originale. 14 titres.Sostenuto / Absilone / L’Autre distribution.Thibaud Defever se la joue et fait cinéma à sa juste(dé)mesure : « J’me fais des films avec les gens quipassent. » Il y a ainsi beaucoup de mouvement, detravelling, en cette « bande originale » : tracteur etmoto, voitures, autobus, train qui fait Tchou tchou…Et, à l’opposé, des situations immobiles : Nina dorttout le temps, le prisonnier tourne en rond, lecommissaire est à l’arrêt du cœur et le bœuf-carottes en cuisine… C’est l’histoire d’un garçonqu’accompagne la musique dans ses moindres faitset gestes : « Héroïque ou machinale / C’est mabande originale. » Grand angle ou petites scènes,passé, présent et futur, c’est vie réelle ou rêvée.C’est surtout le prétexte à de belles constructions,chanson de toute beauté, osmose et réussitemusicale aussi, sans équivalent chez Presque Oui.Car Presque Oui a changé. Sans être à nouveauduo, Defever s’est déniché un complice de hautvol : Sylvain Berthe, à la fois violoncelliste, flûtisteet percussionniste, un virtuose vraiment. L’un estplutôt sage, l’autre presque fou : ils sont assortis et,de cette collaboration, de cette conjugaison, naît cedisque au presque parfait. myspace/presqueoui

    Michel Kemper

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