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EDITORIAL Chers Collègues, Chers Parents d’élèves, Chers Partenaires, L’année scolaire 2007/2008 a été celle des inno- vations. Nous avons inauguré les journées complètes de formation du mercredi sur les films programmés : prévisionnement du film le matin et intervention sur le film l’après-midi, avec en parallèle les ciné-goûters gratuits pour les enfants des enseignants inscrits aux formations. Cette nouvelle formule a rencontré un grand succès et nous la reconduirons l’année pro- chaine. Nous avons également organisé un concert autour du film Latcho Drom, et ce fut un réel plaisir pour tous les enseignants présents d’y participer en appre- nant avec Thierry Vaillot et sa jeune élève violoniste la chanson Ederlezi (cf Le Temps des Gitans) que beaucoup de collégiens ont ensuite appris en cours de musique avant la projection du film. Notre association ayant acquis du matériel léger de tournage, Claire Tupin, notre salariée, est allée dans trois collèges pour amener son aide technique aux collégiens et aux enseignants pour réaliser des films qui ont été présentés en mai 2008 à Courts d’écoles, le festival organisé par l’Inspection acadé- mique d’Indre et Loire et les cinémas Studio de Tours, en partenariat avec Collège au Cinéma 37. Nous avons proposé aux collégiens deux ciné- débats exceptionnels sur Osama, film afghan fort et nécessaire sur la condition des femmes sous le régime taliban, avec la participation de Zohal et de Naheed accompagnée de sa mère, toutes trois réfugiées en France après avoir fui l’Afghanistan. Notre premier concours Bons Becs de Rimouski a suscité six candidatures parmi les collégiens et vous trouverez le nom du lauréat et du professeur qui l’accompagnera au festival québécois sur le Ciné- Zoom élèves en page 32… Enfin, lors de nos « Rencontres Collège au ciné- ma » le 14 juin 2008, nous avons découvert le jeune réalisateur tourangeau Gilles Guillaume promis à un bel avenir après sa participation au film Bled Number One en tant qu’assistant ! Dominique Roy, Présidente de l’association Collège au Cinéma 37 A propos des films … PREMIER TRIMESTRE 2007/2008 L’Île de Black Mor Formation avec Hervé Joubert-Laurencin Pages 2 et 3 Le Tombeau des lucioles Formation avec Xavier Kawa-Topor Pages 4 à 7 DEUXIEME TRIMESTRE 2007/2008 Bashu, le petit étranger Formation avec Alain Brunet Pages 8 à 11 Latcho Drom Formation exceptionnelle avec Thierry Vaillot et Héloïse Lefebvre Pages 12 et 13 TROISIEME TRIMESTRE 2007/2008 Kes Pistes pédagogiques en anglais de Veronica Guilgault-O’Neill et Dominique Roy Pages 14 à 16 Osama Formation avec Marie-Anne Lieb Pages 17 à 27 PROGRAMMATION 2008/2009 Page 27 Réalisations de films en 2007/2008 dans les quatre collèges d’Indre-et-Loire Page 28 Édition : Association Collège au Cinéma 37 3 rue Camille Flammarion 37000 TOURS Tél. : 02 47 46 06 14/Fax : 02 47 26 02 06 [email protected] http://collegeaucinema37.free.fr Directrice de la publication : Dominique Roy Conception et réalisation : Claire Tupin n°12 – JUIN 2008 Bulletin de l’association Bulletin de l’association Bulletin de l’association Bulletin de l’association Collège au Cinéma 37 Collège au Cinéma 37 Collège au Cinéma 37 Collège au Cinéma 37 SUPPLÉMENT ENSEIGNANTS

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EDITORIAL

Chers Collègues, Chers Parents d’élèves, Chers Partenaires,

L’année scolaire 2007/2008 a été celle des inno-

vations. Nous avons inauguré les journées complètes de

formation du mercredi sur les films programmés : prévisionnement du film le matin et intervention sur le film l’après-midi, avec en parallèle les ciné-goûters gratuits pour les enfants des enseignants inscrits aux formations. Cette nouvelle formule a rencontré un grand succès et nous la reconduirons l’année pro-chaine.

Nous avons également organisé un concert autour du film Latcho Drom, et ce fut un réel plaisir pour tous les enseignants présents d’y participer en appre-nant avec Thierry Vaillot et sa jeune élève violoniste la chanson Ederlezi (cf Le Temps des Gitans) que beaucoup de collégiens ont ensuite appris en cours de musique avant la projection du film.

Notre association ayant acquis du matériel léger de tournage, Claire Tupin, notre salariée, est allée dans trois collèges pour amener son aide technique aux collégiens et aux enseignants pour réaliser des films qui ont été présentés en mai 2008 à Courts d’écoles, le festival organisé par l’Inspection acadé-mique d’Indre et Loire et les cinémas Studio de Tours, en partenariat avec Collège au Cinéma 37.

Nous avons proposé aux collégiens deux ciné-débats exceptionnels sur Osama, film afghan fort et nécessaire sur la condition des femmes sous le régime taliban, avec la participation de Zohal et de Naheed accompagnée de sa mère, toutes trois réfugiées en France après avoir fui l’Afghanistan.

Notre premier concours Bons Becs de Rimouski a suscité six candidatures parmi les collégiens et vous trouverez le nom du lauréat et du professeur qui l’accompagnera au festival québécois sur le Ciné-Zoom élèves en page 32…

Enfin, lors de nos « Rencontres Collège au ciné-ma » le 14 juin 2008, nous avons découvert le jeune réalisateur tourangeau Gilles Guillaume promis à un bel avenir après sa participation au film Bled Number One en tant qu’assistant !

Dominique Roy, Présidente de l’association Collège au Cinéma 37

A propos des films …

PREMIER TRIMESTRE 2007/2008

L’Île de Black Mor Formation avec Hervé Joubert-Laurencin

Pages 2 et 3

Le Tombeau des lucioles Formation avec Xavier Kawa-Topor

Pages 4 à 7

DEUXIEME TRIMESTRE 2007/2008

Bashu, le petit étranger Formation avec Alain Brunet

Pages 8 à 11

Latcho Drom Formation exceptionnelle avec Thierry Vaillot et Héloïse Lefebvre

Pages 12 et 13

TROISIEME TRIMESTRE 2007/2008

Kes Pistes pédagogiques en anglais de Veronica Guilgault-O’Neill et Dominique Roy

Pages 14 à 16

Osama Formation avec Marie-Anne Lieb

Pages 17 à 27

PROGRAMMATION 2008/2009 Page 27

Réalisations de films en 2007/2008 dans les quatre collèges d’Indre-et-Loire

Page 28

Édition : Association Collège au Cinéma 37 3 rue Camille Flammarion 37000 TOURS Tél. : 02 47 46 06 14/Fax : 02 47 26 02 06 [email protected] http://collegeaucinema37.free.fr Directrice de la publication : Dominique Roy Conception et réalisation : Claire Tupin

n°12 – JUIN 2008

Bulletin de l’association Bulletin de l’association Bulletin de l’association Bulletin de l’association Collège au Cinéma 37Collège au Cinéma 37Collège au Cinéma 37Collège au Cinéma 37

SUPPLÉMENT ENSEIGNANTS

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Le mercredi 24 octobre 2007, l’association Collège au Cinéma 37 a invité Hervé Joubert-Laurencin pour parler du film L’Île de Black Mòr programmé aux classes 6ème/5ème des collèges d’Indre-et-Loire. Hervé Joubert-Laurencin est enseignant de cinéma à l’université de Paris-Diderot (Paris VII) et critique de cinéma.

Pour lui, L’Île de Black Mòr est un film facile à travailler qui peut permettre d’aborder le travail sur la musique (le son du violoncelle). Les enseignants peuvent visionner plusieurs extraits contribuant à faire une comparaison avec le personnage du fantôme de Nosferatu de Friedrich Wilhelm Murnau et peuvent également expliquer ce qu’est le film d’animation à leurs élèves.

(…) Jean-François Laguionie était un très grand animateur dans ses courts métrages mais Le Château des singes (1999) a été un échec esthétique partiel. C’est un film plus normatif que les précédents, Laguionie est alors rentré dans un système de production de long métrage se privant de beaucoup de liberté de création. Dans Le Château des singes, les singes chantent, par exemple, comme dans les films Disney contemporains. L’Île de Black Mor est différent même s’il reste un film fait pour être vu par le plus large public. Pour Hervé Joubert-Laurencin, l’animation est une forme de cinéma et non un genre.

LE FILM D’ANIMATION (…) L’Île de Black Mor n’est pas un film simpliste ; c’est un dessin animé. Dans le cinéma d’animation, Jean-François Laguionie a une capacité incroyable à faire vibrer la mobilité car en général, l’animation manque d’immobilité car le cinéma d’animation représente ce qui vit par ce qui bouge. La-guionie est capable de créer des moments d’immobilité, ce qui est rare dans le cinéma d’animation. La part la plus évidente du réalisme dans le cinéma d’animation tient précisément dans la stylisation expressive des détails du mouvement.

LE SCENARIO Le scénario de L’Île de Black Mor est subtil et peut être utilement mis en relation avec l’extrait d’une ancienne inter-view de Jean-François Laguionie.

« Quand je n’étais qu’un enfant, mon père entreprit la construction d’un bateau dans le jardin de notre mai-son, imaginant de longues croisières. Nous avions ache-té les cartes nautiques de l’océan Pacifique. Le bateau ne fut jamais achevé. Ce-pendant, sa construction avait représenté le vrai voyage. C’est peut-être pour cela que j’ai choisi de faire de l’animation. » Entretien avec G. Bendazzi, Cartoons, Liana Levi, 1991, p. 376

La construction du bateau est plus importante que le voyage et cela correspond bien au scénario de L’Île de Black Mor. Il faut aider l’élève à suivre cette idée car elle mène à différents niveaux de compréhension et d’appréciation du film. - Le voyage = le film, la recherche de l’île au trésor = la recherche de la vie d’adulte et le fait de grandir - L’aventure de pirate et l’aventure maritime = l’aventure de la vie - Le héros a besoin d’embarquer avec lui quelqu’un qui sache lire = le film en tant qu’aventure est l’équivalent d’un livre (pour vivre l’aventure, il faut la lire)

� Extrait de L’Arche de Noé (1967, 10 minutes) de Jean-François Laguionie : Ce film d’animation est un dessin animé en papiers découpés. Le point commun avec L’Île de Black Mor est le ba-teau. Le papier découpé peut produire des effets propres à l’articulation. Au dessin animé traditionnel s’ajoute la raideur stylisée de la tradition des figurines articulées.

� Extrait de quatre minutes de Gwen (1985) de Jean-François Laguionie : Mystère, beauté, lenteur, obscurité. C’est un exemple de l’art de Laguionie en totale liberté. Passage de la ren-contre amoureuse et muette dans le désert : un voile tombe.

L’ÎLE DE BLACK MOR de Jean-François LAGUIONIE

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DVD L’Île de Black Mor

Compteur à 55 minutes

Le Kid parle du trésor de son père et il trouve la lettre de celui-ci et le miroir en forme de gouvernail. Le rôle de la lettre peut être comparé à la morale de la fable de La Fontaine, Le laboureur et ses enfants, qui commence par « Travaillez, prenez de la peine », mais dit aussi que la vie est belle en elle-même au moment où on la vit et non pour les buts lointains qui cherchent vainement à la justifier.

SIGNIFICATION GENERALE DE L’HISTOIRE

« Nowhere » peut avoir deux significations répondant à la même question : « Où va-t-on ? » Les deux réponses possibles sont : « nulle part » (nowhere) ou « maintenant, ici » (now, here). Le spectateur a l’impression de voyager mais il est déjà arrivé. Le trésor représente le voyage alors que la vie est le but de la vie elle-même.

L’ÎLE DE BLACK MOR et TINTIN - Extrait DVD (Compteur : 53 minutes 25 sec : cheminement dans le tunnel). Pour Hervé Joubert-Laurencin, le tunnel est la seule relation directe entre L’Île de Black Mor et l’album d’Hergé, L’Île Noire. Mais un rapport plus diffus et général existe. La couverture de cette bande dessinée est représentée dans L’Île de Black Mor et s’accompagne de cette idée de mystère. L’île est un personnage qui donne le titre du film et de la bande dessinée ; cette île se retrouve du reste dans plusieurs ouvrages de Tintin. - L’album Le secret de la Licorne peut également être étudié afin de parler des secrets de famille (secret sur le père du capitaine Haddock et secret sur le père du Kid). - Le Kid a un visage « à la Tintin ». Il est d’une extrême simplicité, très concis, avec un regard vide. Le visage de Tintin est universellement connu. Henri Destouches, enseignant au collège du Parc de Neuillé Pont Pierre, trouve que son visage rappelle également celui de Bécassine. (…) Hervé Joubert-Laurencin dit que son visage est volontairement inexpressif et que ce geste rappelle celui d’Hergé avec son personnage, pour cette raison universel, de Tintin, ovale en forme d’œuf dans lequel chacun peut projeter ses propres traits. Gérard Lafite, enseignant au collège Raoul Rebout de Montlouis-sur-Loire, a remarqué que le personnage de la Ficelle a le même visage que l’acteur qui lui prête sa voix (Jean-François Derec, ndlr).

L’ÎLE DE BLACK MOR et NOSFERATU de F.W. Murnau Nosferatu de Friedrich Wilhelm Murnau (1921) est une adaptation du célèbre film Dracula de Bram Stoker.

DVD Dans le film L’Île de Black Mor

Compteur à 5 minutes 5 secondes

Familiarité avec le fantôme (passage de la main sur le visage du Kid). Ressemblance très nette avec Nosferatu. La scène où l’ombre de la main arrive sur le visage du Kid est identique à la séquence du film Nosferatu.

Compteur à 20 minutes Accompagnement musical de Nosferatu de Murnau. Compteur à 30 minutes Personnage attaché au mât comme un personnage dans Nosferatu.

Dans Nosferatu, la peste est transportée par bateau vers la civilisation avec le même voilier et avec le même ca-drage que dans L’Île de Black Mor. Dans L’Île de Black Mor, le Kid va chercher un trésor dans la tombe de Black Mor et dans Nosferatu, le personnage a une révélation terrifiante dans le caveau du château du comte Dracula (effroi du voyageur de commerce devant le visage du vampire endormi pendant la journée dans son cercueil dont le couvercle est brisé à la hauteur de visage : moment du plus célèbre des « faux raccords » de l’histoire du ciné-ma – la tête n’est pas tournée dans le bons sens = le monde des « non-morts » ne correspond pas à celui des vi-vants). La séquence où le bateau fait son entrée dans le port dans Nosferatu se retrouve dans L’Île de Black Mor lorsque le Kid vole son premier bateau. Dans L’Île de Black Mor, il y a le mythe du bateau fantôme qui se lie au fantôme humain que constitue le personnage de Black Mor.

� Extrait de La demoiselle et le violoncelliste (1955, 8 minutes 50 secondes) de Jean-François Laguionie : Hervé Joubert-Laurencin conseille de lire l’interview de la page 11 du dossier pédagogique édité par le CNC où Jean-François Laguionie parle de la musique du film, et particulièrement du rôle du violoncelle, et de regarder (et écouter) Gauche le violoncelliste, un dessin animé de moyen métrage d’Isao Takahata d’une rare qualité qui raconte l’histoire de l’éducation d’un jeune musicien. (…) Compte rendu rédigé par Claire Tupin et relu par Hervé Joubert-Laurencin, Nicolas Carli-Basset et Dominique Roy

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Le mercredi 17 octobre 2007, l’association Collège au Cinéma 37 a invité Xavier Kawa-Topor afin de parler du film Le tombeau des lucioles programmé aux classes 4ème/3ème des collèges d’Indre et Loire.

Xavier Kawa-Topor a travaillé huit ans au forum des images à Paris comme directeur de l’action éducative. Depuis l’automne 2005, il est directeur de l’abbaye de Fontevraud. Le centre culturel de l’Abbaye de Fontevraud ambi-tionne d’en faire le jardin des cultures du monde et est appelé à se développer autour de quatre orientations car-dinales :

• le patrimoine, • la musique et la voix, • les arts visuels, • le fait religieux dans les sociétés contemporaines / la place de la spiritualité dans la société rationnelle

(Site Web : http://www.abbaye-fontevraud.com/web/abbayedefontevraud-le_centre_culturel_de_l_ouest-7-13.html)

Actualité DVD de Takahata Isao : Souvenirs, goutte à goutte Pour lui, Le tombeau des lucioles est un grand film avec une charge émotionnelle importante. Il ne faut pas être otage de l’émotion de ce film. Avant de commencer, Xavier Kawa-Topor fait remarquer que sur l’affiche du film, il est spécifié que le « film est écrit et ani-mé par Takahata Isao » alors qu’il aurait fallu mettre « écrit et mis en scène » car il n’est pas animateur. Le tombeau des lucioles est l’un des trois films de Takahata Isao où le réalisme et le merveilleux sont présents.

Quand il demande les réactions des enseignants sur le film, Christiane Denat, enseignante au collège Michelet de Tours, avoue qu’elle a pleu-ré tout au long du film. Marie Mignot, documen-taliste au collège Gaston Huet de Vouvray, est admirative devant le personnage de la petite fille, très réaliste. Xavier Kawa-Topor lui répond que l’émotion ressentie est à l’image du réalisme des personnages. Blandine Stévenard, ensei-gnante au collège Saint Grégoire de Tours ne sait pas comment se détacher émotionnellement du film pour le travailler en classe. Xavier Ka-wa-Topor signale que la distance d’un adulte ou d’un adolescent par rapport au film est diffé-rente ; un adolescent n’aura pas les mêmes réac-tions qu’un adulte. Véronique Gatignol, ensei-gnante au collège Ste Jeanne d’Arc de Tours, venue au prévisionnement avec son fils de 10 ans, dit que tout dépend de l’enfant et que ce film n’a pas marqué autant son fils que Blandine Stévenard. Xavier Kawa-Topor pense que les adultes sont souvent plus choqués que les enfants devant un tel film. Il ajoute que le spectateur adulte devient otage de l’émotion car il est mi-roir de sa propre vie et que ce dessin animé permet d’aller plus loin dans l’histoire. Emilie Sapielak, enseignante au collège Célestin Freinet de Sainte-Maure-de-Touraine, signale qu’il faut montrer le parti pris de la fuite. En effet, le jeune garçon va chercher l’argent à la fin du film alors qu’il aurait pu aller le chercher plus tôt, tout comme le fait qu’il décide de partir de chez sa tante alors qu’il aurait pu rester et survivre.

Xavier Kawa-Topor précise que Seita ne veut pas courber l’échine pour être humilié par sa tante et il prend le risque de sortir de ce cadre familial où Seita et sa soeur auraient survécu. Ce refus de se plier à la réalité donne lieu à un processus de marginalisation de l’adolescent. Ce film évoque l’apprentissage du deuil, le travail du deuil.

LE TOMBEAU DES LUCIOLES de TAKAHATA Isao

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Takahata Isao n’aurait pas fait le film avec des vrais comédiens. Un film d’animation peut être un projet de réali-sation et le spectateur peut reconnaître la « patte » de Miyazaki Hayao ou de Takahata Isao mais c’est avant tout un travail d’équipe. Valérie Petit, enseignante au collège Jules Romains de Saint-Avertin, exprime son mal-être devant les films d’animation même si ce genre de film permet de regarder ce qui n’est pas regardable. Xavier Kawa-Topor dit que ce film montre bien la représentation du réel. D’ordinaire, le dessin animé n’évoque pas ces sujets. Par la vé-racité du récit, le spectateur y croit plus, tout est cohérent ; dans un contexte homogène, représentation homogène. Ce qui empêche l’adhésion de Valérie Petit au film d’animation, ce sont les bouches des personnages. Xavier Ka-wa-Topor lui précise que c’est une question culturelle liée à un certain nombre de malentendus et à la condition historique de la réception du cinéma d’animation en France.

Grands yeux Bouche - filiation esthétique du Japon - acculturation avec l’animation américaine (Bet-ty Boop) - travail sur l’émotion du personnage

Pour la France, la voix est enregistrée avant d’avoir dessinée les lèvres. Au Japon, les livres sont faits et ensuite, il y a l’enregistrement des voix.

TAKAHATA ISAO (cf. dossier pédagogique du CNC sur Le tombeau des lucioles) Il a connu la fin de la guerre et l’après-guerre. Takahata Isao est un intellectuel, très cinéphile. Il a fait l’école po-lytechnique au Japon et a été très rapidement intéressé par la France et particulièrement par Jacques Prévert. La Bergère et le ramoneur a eu une influence capitale sur cette génération de réalisateurs par l’enjeu du mouvement et par Paul Grimault et Jacques Prévert ayant montré qu’il y avait une alternative à Disney. Dans Le voyage de Chihiro de Miyazaki Hayao, il y a une séquence qui rappelle la première séquence du film Le tombeau des lucioles.

LE TOMBEAU DES LUCIOLES

L’argument du film est l’errance de deux enfants dans la ville de Kôbe qui subit les attaques aériennes américai-nes. Ils vont être livrés à eux-mêmes car : - leur père est officier de marine, - leur mère meurt après les premiers

bombardements. Le tombeau des lucioles est l’adaptation d’une nouvelle de Nosaka Akiyuki, La tombe des lucioles (1967), écrivain à part dans la littérature japonaise. No-saka Akiyuki avait refusé tous les pro-jets d’adaptation sauf celui de Takaha-ta Isao car il était d’accord avec le dessin animé et par le parti pris du personnage de Setsuko. (Lire la note d’intention de Takahata Isao à la page 16 du dossier pédagogique du CNC).

La composition musicale est une partie importante du film.

� Etude de la première séquence du film (Pages 9 à 11 du dossier pédagogique CNC) : Xavier Kawa-Topor signale que l’unité chromatique de cette séquence est le noir et commencer un dessin animé par ce chromatisme là, le rouge et le noir est une façon inhabituelle de rentrer dans un film d’animation. Le specta-teur rentre d’emblée dans le ton du film. Dominique Roy ajoute que les couleurs sont extraordinaires. Véronique Gatignol a aimé les détails comme par exemple, cette mouche nettoyant ses pattes. Brigitte Mono, en-seignante au collège Lamartine de Tours, souligne que cette mouche signifie la mort présente à chaque apparition d’insectes. Xavier Kawa-Topor explique que la manière de jouer sur des superpositions d’échelles existantes est le miroir de ce que le spectateur peut voir dans la gare ; la mort est au centre et la vie autour (un côté fourmilière). C’est une vision d’entomologiste. Joël Collot, enseignant au collège Beaulieu de Joué-lès-Tours, trouve que le spec-tateur rentre dans un code avec tous ces flash-back. Il a remarqué que la première couleur est une première cou-che et plusieurs couches chromatiques représentent plusieurs niveaux de vie. Dominique Roy a été surprise par le dédoublement du personnage de Seita. Xavier Kawa-Topor précise que la mise en scène de Takahata Isao n’est pas la même que dans le livre de Nosaka Akiyuki ; Takahata Isao choisit de jouer sur ces différentes temporalités. Dominique Roy trouve qu’avec le son, les spectateurs plongent tout de suite dans le mystère. Pour Xavier Kawa-Topor, le caractère hypnotique dans ce traitement visuel et sonore se retrouve dès le début du film par cette mise en abyme et ainsi le dédoublement s’opère.

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Plan 4 : le halo de lumière isole Seita. Quelle est la position du spec-tateur ? Dans cette introduction, le spectateur pressent être dans un récit en bou-cle. Plans 5a et 5b : lorsque le specta-teur s’approche de la mort, un pano-ramique de Seita analyse son corps et l’approche de la mouche convainc le spectateur de l’approche de la mort.

Takahata Isao montre que Seita n’est pas le seul à se trouver dans cette « salle des pas perdus ». Le traitement du son est particulier, tel que le spectateur peut avoir l’impression d’avoir cette voix dans sa tête. Jean-Lou Thierry, enseignant au collège Georges Besse de Loches, pense que cette séquence ne tourne pas à la caricature et qu’il y a une dose de compréhension de la part des gens avec cette main donnant à manger à Seita. Xavier Kawa-Topor signale que c’est le seul geste de solidarité du film et c’est un parti pris de rendre compte de la diversité du peuple japonais. Le film ne tombe pas dans le manichéisme et Takahata Isao ne montre pas un Ja-pon victime pour parler du Japon impérial. Jean-Lou Thierry trouve que le spectateur peut, par moments, s’interroger sur la façon de voir du réalisateur. Xa-vier Kawa-Topor répond que Takahata Isao ne se permet pas de juger, il dépeint seulement une réalité et n’est pas dans une position de jugement. Marie Mignot fait remarquer que la boulette de riz déposée par la passante auprès de Seita rappelle la boulette de riz que la tante refuse de leur donner. Pour Xavier Kawa-Topor, le spectateur est placé dans un processus de compréhension du personnage. Pour Marie Mignot, ce qu’il y a de plus étrange dans cette séquence, c’est que le spectateur entend Setsuko dire « Maman… » puis l’entend courir et ensuite Seita appelle Setsuko.

Sur le mouvement de l’animation, Xavier Kawa-Topor pense que dès le premier plan, il y a un jeu entre des per-sonnages figés et des personnages qui bougent. Marie Mignot ajoute qu’il y a également un jeu entre l’ombre et la lumière. Dans le plan 19a, Setsuko, en rouge, regarde Seita mourir et court vers lui mais elle est rattrapée par Seita, également rouge. Setsuko ne semble pas avoir conscience de sa propre mort et le spectateur se retrouve dans une perception de la mort différente de celle de Setsuko. Seita et Setsuko forment un couple d’amour frater-nel très fort.

Le cœur du film est la séquence où Setsuko enterre, en même temps, les lucioles et sa mère ; Seita est un parent de substitution et ne veut pas admettre la mort de sa mère. Ce film pose la question du passage de l’adolescence à l’âge adulte. Son osmose avec Setsuko est due au fait que Seita n’a pas encore quitté l’enfance d’où son idée de vivre à côté de la mer. Christine Denat fait remarquer qu’il n’abandonne pas les cendres de sa mère. Joël Collot n’est pas d’accord sur le fait que Seita n’assume pas. Pour lui, il protège sa sœur. Pour Xavier Kawa-Topor, la première séquence lui fait penser à la féerie de la boîte à musique au moment de l’apparition de Setsuko, de la musique suivie de la danse des lucioles ; c’est un émerveillement de l’enfance. Cette boîte à musique est remontée par le spectateur comme l’histoire remonte dans le temps. Il y a un projet pédagogi-que posé comme un appel à la mémoire. Le film s’ouvre en même temps avec une mort et avec un retour à la vie des lucioles. Le double de Seita emmène sa sœur dans un train qui les ramène vers le passé. Au moment de sa mort, Seita retourne sur sa vie pour comprendre sa mort et met le spectateur dans une position de témoin. Il y a quatre morts dans le film : Seita, la mère, le père et Setsuko. L’apprentissage de la mort passe par Seita car le spectateur apprend d’emblée que Setsuko est morte. Tout au long du film, Setsuko est toujours en avance sur son frère. Il faut peut-être faire un retour au texte, à la fois très proche et très éloigné du film. Dans le livre de Nosaka Akiyuki, ce dernier écrit en utilisant « il » alors que Takahata Isao utilise le pronom « je ». Nosaka Akiyuki se sent responsable de la mort de sa petite sœur. Par le « je », Takahata Isao passe par-dessus et par le « il », c’est un « je » collectif. Takahata Isao remplace d’emblée son projet par un retour vers une situation donnée et une exposi-tion collective. Le projet de Takahata Isao est différent de celui de Nosaka Akiyuki. Le film reste proche du texte.

� Processus de marginalisation de Seita et de Setsuko : Le premier bombardement 5 juin 1945 Mort de Setsuko 22 août 1945

L’histoire du film se passe en très peu de temps et en très peu de lieux. Mort de Seita 21 septembre 1945

La marginalisation se passe par le fait que Seita se déshumanise et tombe dans la folie.

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� Extrait de la séquence d’introduction de Goshu, le violoncelliste : Dans les motifs et dans les dispositions, on peut s’apercevoir que la séquence d’introduction a été faite par le même homme (les fourmis). Il y a une attention particulière portée aux détails. Takahata Isao a une capacité à mettre des anecdotes du quotidien pour asseoir la véracité du récit. L’orage est annoncé par le chat comme une forme de prémonition. Dominique Roy souligne que tout est orchestré comme dans Le tombeau des lucioles. Xavier Kawa-Topor précise qu’il y a deux compositions musicales. Il y a une cohérence très forte entre le propos et la manière de tourner de Goshu, le violoncelliste et du Tombeau des lucioles.

Pour Valérie Petit, le train représente une réanimation de Setsuko. Xavier Kawa-Topor précise que cela visualise le projet du retour d’un drame singulier. Takahata Isao est réfléchi, exigeant, cérébral et ne travaille pas sur les symboles. Joël Collot fait un rapprochement entre les films de Takahata Isao et de Miyazaki Hayao. Pour lui, le traitement de l’image de Takahata Isao et de Miyazaki Hayao sur les bombardements est différent, le spectateur souffre plus sur les bombardements de Takahata Isao.

Alors que chez Miyazaki Hayao, une inquiétude mentale est traduite par des superpositions et des surcharges, chez Takahata Isao, il y a un regard inquiet sur le devenir de la Société, ce n’est pas son univers cérébral qu’il dépeint dans ses films. Contrairement à Takahata Isao, Miyazaki Hayao écrit son scénario en story-boardant. Ce sont deux trajectoires intéressantes.

(…) Compte rendu rédigé par Claire Tupin et relu par Nicolas Carli-Basset

Quelques sites utiles

http://www.abc-lefrance.com/fiches/Tombeaudeslucioles.pdf http://www.buta-connection.net/films/hotaru.php (Site francophone consacré au studio Ghibli de Takahata et Miyazaki) http://www.cndp.fr/TICE/teledoc/dossiers/dossier_lucioles.htm Fiche pédagogique réalisée par Anne Henriot, professeur de lettres et de cinéma au lycée Eugénie Cotton de Montreuil (93) http://www.cinehig.clionautes.org/article.php3?id_article=202 Fiche professeur et élève par Vincent Marie, professeur d’Histoire Géographie http://cinehig.clionautes.org/article.php3?id_article=230 Fiche élève par Catherine Didier-Fèvre, professeur d’Histoire Géographie http://www.etab.ac-caen.fr/collegebrassens/travail/film/seq-lucioles.htm Travail pédagogique du collège Georges Brassens à Caen (14) http://www.ia49.ac-nantes.fr/33397015/0/fiche___pagelibre/&RH=49ped_artcine Proposition de séquences pédagogiques sur le film d’un enseignant de l’académie du Maine-et-Loire

http://www.collegeaucinema92.ac-versailles.fr/IMG/doc/Le_Tombeau_des_lucioles_H._J.-L.doc Compte rendu de la conférence donnée par Hervé Joubert-Laurencin

http://www.plan-sequence.asso.fr/bo/documents/LeTombeaudesLucioles.pdf?PHPSESSID=7a05206a9d5f41f3cb84decb64759682 Présentation agréable du film accessible aux enfants

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Le mercredi 9 janvier 2008, l’association Collège au Cinéma 37 a invité Alain Brunet afin de parler du film Bashu, le petit étranger de Bahram Beizaï programmé aux classes de 6ème/5ème des collèges d’Indre-et-Loire.

Présentation du formateur : Alain Brunet est un formateur en cinéma, réalisateur et spécialiste du cinéma iranien.

GUERRE IRAN/IRAK (…) La guerre éclate le 22 septembre 1980 car pour Saddam Hussein, l’accès de l’Irak au golfe Persique est ridi-cule par rapport à l’accès de l’Iran. L’objectif de l’Irak est d’occuper le territoire iranien pour bloquer la provision de pétrole. Pendant les deux premières années, la guerre est à l’avantage de l’Irak. De 1982 à 1985, les Iraniens lancent des contre-attaques.

Depuis 1980, Révolution islamiste de Khomeyni, et Khameney (actuel chef du régime) ; ils font appel au sentiment nationaliste dans la population, ce qu’ils avaient déjà fait en 68 pour commémorer les 2500 ans de l’Empire perse. Le président Reagan et l’Union Européenne proposent des compensations financières faramineuses pour qu’ils arrê-tent la guerre. Le président Reagan déclarera à propos de cette guerre : « This shifty was must stop ! ». Entre 1985 et 1988, la guerre est une véritable boucherie dans les deux camps et mobilise des combattants de 13 à 70 ans. Les Etats-Unis et l’Union Européenne sont mobilisés en faveur de l’Irak et l’Iran est soutenu par la Syrie, la Libye, la Chine et la Russie. Le gouvernement iranien a continué de travailler avec Israël car d’une part, l’Iran a travaillé avec le Mossad et d’autre part, l’armée israélienne possède des avions américains. Aujourd’hui, le problème Iran-Israël est en fait Irano-Iranien car les têtes du gouvernement israélien sont d’origines iraniennes. Quand Bahram Beizaï réalise Bashu, le petit étranger, l’Iran a capturé 80 tanks irakiens et l’Irak, 100 tanks ira-niens. Ils décident de faire une trêve dans la guerre pour remettre les choses dans l’ordre, ils se redonnent chacun les tanks capturés et ensuite, ils recommencent leur guerre. Un rappel de cette tragédie a permis aux enseignants présents de bien comprendre les raisons et les enjeux de ce conflit pratiquement oublié, voire occulté, qui a provoqué deux autres guerres aussi meurtrières l’une que l’autre dans les années 1990 et 2003 : l’invasion du Koweït en 1990 et l’intervention américaine en Irak en 2003. De plus, pendant la guerre Iran-Irak, les Etats-Unis avaient mobilisé des flottes de navires dans le golfe Persique et ces dernières y sont toujours mobilisées.

(…) LE FILM Le but premier poursuivi par le réalisateur était de dénoncer la guerre et surtout la propagande gouvernementale distillée à longueur de programmes par la télévision d’état et les médias du pays. Tourné en 1985, le film se situe à une charnière bien particulière du conflit c'est-à-dire à l’époque où l’agression irakienne est devenue pour l’état iranien LA GUERRE IMPOSEE. Une propagande omniprésente articulée par et autour du vice-ministre de la culture de l’époque Monsieur Mohammad Khatami (qui deviendra président de la République de 1997 à 2004) sera mise en place par les autorités qui prônent une mobilisation générale.

BASHU, LE PETIT ETRANGER de Bahram BEIZAI

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PREMIERE SEQUENCE DU FILM Bombardements. C’est une ville iranienne du Sud, à la frontière de l’Irak. L’Irak bombarde depuis l’autre rive du fleuve. Les Irakiens vont prendre la ville, commettre des massacres. Bashu appartient à la population iranienne arabophone (qui parle également le farsi) près de la frontière. Le climat est sec et très chaud. Les habitants y ont la peau mate. Il s’enfuit en se cachant dans un camion qui emporte tout ce que les réfugiés peuvent emporter. Ce camion va vers le nord et arrive dans une zone non désertique. Bashu est traumatisé par les bombes. Il arrive dans une zone qui parle un dialecte local. Il s’aperçoit qu’au village, il y a à manger, à boire. Mais Bashu est une bouche de plus à nourrir. De plus, apparaissant comme un étranger, il peut être un oiseau de mauvais augure. LOCALISATION : Bashu doit fuir la ville de Khorramshar, mitoyenne de la frontière irakienne, qui fut le premier objectif de l’attaque irakienne : la raffinerie d’Abadan, la plus importante installation pétrolière du Moyen-Orient, était installée à quelques kilomètres de cette grande ville. La ville martyre, comme l’appellent les Iraniens, fut l’objet de combats intenses et particulièrement meurtriers (lecture d’un passage de l’ouvrage de Zacharia Hashe-mi : « La colline des cadavres »). Le film sera interdit de sortie pendant plus de trois ans. Les membres du bureau de la censure lui reprochaient par-ticulièrement la dénonciation des méfaits de la guerre et surtout le thème du film allait systématiquement à l’encontre de la propagande officielle qui misait sur le mythe de la « guerre sainte » pour inciter les jeunes Iraniens à rejoindre le front. Le film débute par la destruction totale de la province où vit Bashu et l’obligation qui lui est faite de quitter son foyer. Dans l’esprit du réalisateur, c’est la guerre et la violence que quitte l’enfant. Beizaï fait de son petit héros le symbole des dizaines de malheureux habitants de la province qui ont été obligés d’abandonner leurs biens et leurs champs. Il faut aussi insister sur un point particulièrement impor-tant développé par le réalisateur : la guerre Iran-Irak s’est déroulée, dans sa plus grande partie, dans le sud du pays, à savoir les immenses provinces du Khuzistan et Hormozgan. Ces provinces iraniennes qui font partie de la frange arabophone du pays sont particulière-ment arides et la chaleur y est souvent insupportable. A part les champs d’exploration pétrolière, on ne trouve guère d’autres ressources dans ces régions dé-sertiques. (voir film iranien : Les enfants du pétrole de Ebrahim Forouzesh). Par contre, quand Bashu se réfugie dans le nord du pays, c’est pour découvrir une région verdoyante, où le problème de l’eau n’existe pas ; les cultures locales du riz, du thé et du coton constituent la richesse de ces provinces du nord qui sont également le grenier à blé du pays. BEIZAI oppose donc deux régions iraniennes qui sem-blent totalement étrangères l’une à l’autre : le sud où tout brûle (allégorie du soleil implacable et du ton-nerre de feu déclenché par les forces irakiennes) et le nord où tout est calme, où l’eau coule en abondance, où l’image de la guerre semble lointaine parce que située dans une région du pays qui n’a rien à voir avec celle dans laquelle vivent les habitants du sud…

La guerre n’est ici présente que par le biais de la télévision et les bureaux de recrutement. Le film a même provo-qué une polémique en Iran car les « sudistes » prétendaient que les habitants du nord refusaient de participer à la guerre… Ceci est totalement faux et il suffit de parcourir les villages et les villes du nord pour voir à l’entrée de chaque agglomération les portraits des « martyrs » locaux qui ont donné leur vie pour la défense sacrée. De plus la prétendue opposition entre le sud pauvre et le nord riche ne tient pas dans la mesure où le village dans lequel se réfugie l’enfant n’est pas une terre de richesse et d’opulence. La nature seule n’arrive pas à masquer complètement les difficultés auxquelles sont confrontés ces paysans du nord. Dans sa recherche de simplicité et de dépouillement, le réalisateur schématise à l’extrême les moyens utilisés pour permettre au jeune garçon de s’échapper de l’enfer dans lequel il vit : un simple camion qui symbolise à lui seul la technique dans cet univers fait de renoncement et de pauvreté ; pas de téléviseur, pas d’électricité, pas de maison, pas de responsable local… Le réalisateur stigmatise de la façon la plus évidente le désastre total dans lequel la guerre a plongé le pays : comment revenir à une vie normale après avoir subi et enduré tant de douleurs ? Les déracinés du sud sont contraints à « s’exiler » dans les provinces du nord qui représentent pour eux un monde nou-veau, inconnu et inquiétant… Mais le réalisateur met aussi l’accent sur le sentiment d’iranité, d’exacerbation de la fierté nationale qui unit tous les Iraniens et une très belle séquence souligne le propos : Bashu ramasse un livre

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d’écolier et se met à le lire : « L’Iran est notre patrie, nous appartenons à un seul pays, nous sommes tous les en-fants de l’Iran »…

LE PERSONNAGE DE BASHU Le premier véritable problème auquel est confronté le jeune garçon est la couleur de sa peau : il faut savoir que tous les habitants des régions du golfe persique, ceux que l’on appelle en Iran les Bandari, les gens des ports, ont la peau très foncée, en opposition avec ceux des autres régions d’Iran qui ont la peau claire. Quand le jeune gar-çon arrive dans ce village paisible, il est forcément assimilé à un étranger tant la couleur de sa peau diffère de celles des autres habitants. Dans ce petit village, tout le monde se connaît, quand on n’est pas de la même fa-mille… On retrouve donc une société fermée sur elle-même, pétrie de superstitions, sans pour autant être opposée à la présence d’un étranger, surtout un enfant…Se pose aussi un problème de langage ; les villageois parlent un dialecte gilani, du nom de la province du Gilan, que seuls les habitants de la région comprennent… Sur le plan économique, Bashu va devenir un fardeau supplémentaire pour la petite communauté : une bouche de plus à nourrir…

LE NOUVEAU CONTEXTE FAMILIAL Bashu va être hébergé dans une famille du village qui a aussi un rapport avec la guerre : le mari de Naïe est parti sur le front dont il reviendra, d’ailleurs, amputé d’un bras. Naïe est le personnage emblématique d’un certain cinéma iranien post-révolutionnaire qui a glorifié à travers certains films le rôle extraordinaire qu’ont joué les femmes pendant la guerre. Pendant les 100 mois qu’a durés ce conflit meurtrier, ce sont les femmes qui ont tenu le pays à bout de bras en s’investissant dans la direction des écoles, des universités, des usines, faisant preuve d’un courage extraordinaire qui leur permettra d’exiger des gouvernements successifs la reconnaissance de leurs droits et le respect de tous les responsables gouvernementaux.

(…) LES ELEMENTS SYMBOLIQUES, LA FEMME EN NOIR ET ETUDE DE LA PREMIERE SEQUENCE : 1/ Les éléments symboliques : Le Bien : la mère adoptive représente le Bien. C’est le seul personnage positif. C’est l’archétype de la mère ira-nienne, une Mère-Courage, le socle de la famille.

On voit dans le film des réminiscences de la religion zoroastrienne avec les vautours qui dépècent les cadavres. De même, le motif du feu éternel est présent. Le réalisateur Bahram Beyzaï est de religion Baha’i, qui est un syncré-tisme des trois religions monothéistes.

La censure : le film a été interdit pendant trois ans en Iran. Les femmes doivent être couvertes à l’écran, y compris dans leurs maisons, même si les femmes iraniennes retirent leur voile quand elles sont chez elles. Il ne doit pas y avoir de rapports physiques entre les personnes, et la mère ne peut embrasser son enfant à l’écran. Certains en Iran reprochent au réalisateur de donner une image négative de la guerre mais il s’est tenu à cette volonté de montrer les conséquences désastreuses du conflit pour la jeunesse. Le mari revient de la guerre mais ne l’avoue pas à sa femme. Il a perdu un bras et n’a pas été payé car l’Iran n’a plus les moyens de payer les soldats.

Deux personnages incarnent le Bien et le Mal : l’épicier incarne le Mal. Il a le pouvoir sur les habitants car il a la nourriture ; c’est l’allégorie des populations nanties. Le guérisseur incarne le Bien, certes il est rebelle, bougon, mais il soigne gratuitement. Les autres personnages incarnent les archétypes de la société iranienne. La zone de guerre quittée : brûlée par le soleil. Allégorie du feu des bombes. Au contraire, la zone d’accueil est une région verdoyante, loin de la guerre.

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2/ La femme en noir : Flash-back par rapport à sa mère. Elle représente la mort, elle est toujours présente dans l’esprit de l’enfant. Les masques : tradition qui remonte à l’occupation portugaise et qui a été conservée dans certaines régions.

3/ Etude de la première séquence : Le père devient l’étranger. Le fils s’est intégré. La flûte : très peu de musique dans le film. Quand il va à l’école, on entend les enfants chanter. Avant, la musique était interdite au cinéma. L’épouvantail : il représente le père. La première fois éclairé, puis à contre-jour. Il symbolise la mort. C’est le pen-dant de la mère tuée au début du film. Le père n’est qu’un épouvantail car il a été remplacé par l’enfant. Bashu est accepté comme fils adoptif. En contrepartie, il aidera à la maison.

Le GUÉRISSEUR sera la seule personne qui ne rejettera pas Bashu. Quelque part, il symbolisera la réconciliation entre le nord et le sud comme une sorte de métaphore entre la guerre et la paix. On peut voir dans la dernière séquence du film avec la chasse au sanglier et l’envolée des colombes une sorte d’allégorie, un peu primaire mais efficace, de cette prise de position du réalisateur. Une nouvelle fois, il faut saluer ce rôle de mère-courage qui s’illustre dans le personnage de Naïe. Envers et contre tous, la femme va imposer la présence de l’enfant, essayer de l’intégrer dans la communauté villageoise, non sans avoir elle-même éprouvé de singulières frayeurs en présence de l’enfant : la séquence dans laquelle elle tente de « nettoyer » l’enfant est particulièrement significative. Dans une population simple et très sensible à la superstition, Bashu va être considéré comme un oiseau de mauvaise augure, une calamité envoyée par le ciel… La couleur de sa peau n’arrangera pas les choses… seule Naïe se battra envers et contre tous pour sauver l’enfant… Elle explique d’une jolie manière à son mari que Bashu est l’enfant de la terre et du soleil.

Quand il tombe malade, Naïe le soigne comme son propre fils et l’enfant tente avec ses faibles moyens de se ren-dre utile en faisant de menus travaux dans la petite ferme. Encore une fois, le réalisateur se sert des enfants pour faire passer un message aux dirigeants de son pays : c’est l’enfant qui va remplacer le père parti sur le front, assurer les tâches domestiques et le symbole du père qui a quitté le nord pour le front des combats qui se déroulent dans le sud du pays vient renforcer cette impression… De même que Bashu a déserté le sud pour rejoindre le nord… Autant de symboles utilisés par Beizaï pour faire pas-ser son propos… Cette impression est singulièrement renforcée par l’utilisation de l’épouvantail qui représente à la fois le rejet des prédateurs et la mutilation du mari de Naïe qui revient du front amputé d’un bras, tout comme l’est l’épouvantail. Quand l’enfant tend la main à l’homme, c’est toute la passation des pouvoirs qui s’opère : Bashu va se substituer au père pour les travaux difficiles et sa main remplacera le membre mutilé de l’homme… c’est à la fois un message d’espoir mais aussi l’acceptation tacite de la présence définitive de l’enfant dans la cellule familiale. Compte rendu rédigé par Claire Tupin à partir du texte écrit par Alain Brunet et des notes prises par Nicolas Carli-Basset et Claire Tupin relu par Nicolas Carli-Basset, Dominique Roy et Thierry Guillou

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Le mercredi 16 janvier 2008, l’association Collège au Cinéma 37 a invité Thierry Vaillot, compositeur, guitariste, enseignant spécialiste de la musique tzigane à l'école de Jazz à Tours et fondateur, entre autres, du groupe de jazz tzigane Hùrlak. Il était accompagné de son élève, Héloïse Lefebvre, âgée de 18 ans, violoniste pour une ren-contre exceptionnelle autour de Latcho Drom de Tony Gatlif, film programmé aux classes de 4ème/3ème des collè-ges d’Indre-et-Loire en janvier, février et mars 2008.

Thierry Vaillot explique que la rencontre se fera autour de trois axes : 1. Echange avec les impressions sur le film, 2. Voyage musical en Tziganie : la musique des Roms, des Gitans,… 3. Apprentissage d’un chant rom, « Ederlezi », avec les paroles en rom.

Dominique Roy, présidente de l’association Collège au Cinéma 37, souligne l’importance de préparer le film avec les élèves pour qu’ils puissent se plonger dans le film. Il faut préparer les collégiens à ce qu’ils voient un film sans dialogue car cela peut déstabiliser un collégien non préparé. En 2003/2004 lorsque Latcho Drom avait été choisi, la formation portait sur l’histoire des gens du voyage alors qu’il aurait fallu former les enseignants sur la musique.

Marie-Zélia Beaumont, enseignante au collège Raoul Rebout de Montlouis-sur-Loire, est chargée d’une classe d’enfants du voyage ; elle explique qu’elle a une classe de 31 enfants du voyage qui ont entre 11 et 17 ans. La moitié d’entre eux ne savent pas lire mais ils veulent apprendre à lire et à compter. Les parents veulent que leurs enfants se sédentarisent un peu. La religion est très importante ; ils ne peuvent pas chanter des chansons qui ne sont pas chrétiennes. Ils vivent dans le présent mais ne parlent pas du passé, des morts ou du futur.

Thierry Vaillot présente les trois branches du peuple Rom : • Inde – Turquie – Roumanie – Allemagne : les Tsiganes / les roms • Méditerranée : les gitans • France – Allemagne : les manouches

Pour la musique, les gens du voyage assimilent la culture du pays dans lequel ils vivent. Rien n’est écrit, le fil conducteur même est la danse / la fête / la tradition orale.

Julien Nay, enseignant au collège Racan de Neuvy-le-Roi, a trouvé le film trop esthétique manquant d’authenticité d’après lui. Catherine Félix, enseignante au collège La Béchellerie à Saint-Cyr-sur-Loire, reconnaît que c’est une image « idéale » des gens du voyage. Dominique Roy pense que les enseignants peuvent demander à leurs élèves de relever les indices qui permettent d’identifier chaque pays.

Thierry Vaillot fait remarquer que Latcho Drom montre des évènements historiques par des signes très discrets comme les barbelés, la neige et le sifflet de train, ce qui rappelle Nuit et brouillard). Le film est rempli de signes

LATCHO DROM de Tony Gatlif

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pour rappeler le rejet des gens du voyage par la population : les rails séparant les gens du voyage de la dame hongroise et de son fils à la gare d’un petit village, les barbelés, les chiens, les chasseurs et les policiers. Il fait remarquer que dans le film, une musique peut durer dix minutes.

Il pense également que l’apprentissage d’un chant tzigane peut permettre aux collégiens de rentrer plus facile-ment dans le film.

Consuelo Argilès, professeur d’espagnol au collège Jules Romains de Saint-Avertin pense leur expliquer le titre du film et prendre l’enfant comme fil conducteur. Thierry Vaillot ajoute que c’est l’enfant qui crée le changement de scène. D’après lui, la musique est ce qu’il y a de plus important dans le film.

VOYAGE EN TZIGANIE Thierry Vaillot et Héloïse Lefebvre interprètent en duo successivement des pièces du :

1. Courant tzigane : musique dite rom Roberto de Brasov - une « aura » : rythme à 4 temps (la pompe) : guitare + violon - le rusten : danse rythme à 3 temps - la sirva danse ternaire - un jumparale : musique asymétrique à 5, 7, 13 temps … (il manque une croche) - une aura avec un mode toujours roumain (degrés de notes) - la brazza : danse 7 gammes au violon qui reviennent (mineur harmonique) présente dans les thèmes, im-

provisation. - La czarda hongroise de Monty avec une reprise à la manière roumaine

2. Courant Manouche Django Reinhardt + Grappelli Jazz américain + âme manouche

Thème des « Yeux noirs » (Russe) � jazz manouche Le jazz manouche s’empare de chansons françaises « La mer » de Charles Trenet

3. Courant gitan flamenco Mesure 12/8 la base 1 2 3 4 5 6 7

En synthèse Le thème de la 40ème symphonie de Mozart dans trois différents styles

1. Tzigane 2. Manouche 3. Gitan

Chanson Ederlezi fête tsigane (serbe). Un petit garçon ne peut pas participer à la fête de la Saint Georges car il doit surveiller le camp.

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Ces pistes pédagogiques en anglais ont été élaborées par Veronica Guilgault-O’Neill et Dominique Roy, profes-seurs d’anglais. En Indre-et-Loire, le film est programmé pour le niveau 6ème/5ème en 2007/2008 au troisième trimestre. Ce travail destiné aux élèves de 6ème/5ème porte sur la première partie du film qui dure environ 18 minutes. Avant la projection du film au cinéma, deux démarches sont possibles : - soit visionner la première partie en entier et laisser réagir les élèves puis travailler sur les différentes séquences de la première partie, - soit fractionner le visionnement de la première partie en travaillant sur chaque séquence au fur et à mesure. Après la projection du film au cinéma, le travail peut être fait à la maison avec recherche de vocabulaire.

BEFORE VIEWING THE FILM

BILLY’S WORLD I – INSIDE IN THE BEDROOM: 1/ Billy is � 10 years old.

� 13 years old. � 16 years old.

2/ Jud is � Billy’s brother � Billy’s father � Billy’s cousin 3/ Jud is going � to work � to school � shopping II – OUTSIDE: 4/ Billy is going to the shed to look for � his dog � his bike � his schoolbag 5/ Billy runs to � walk his dog � catch the bus � go to the shop 6/ Billy lives � in the country � in a town � in a big city III – AT THE NEWSAGENT 7/ � Billy wants to buy a newspaper � Billy wants to buy cigarettes � Billy wants to work for the newsagent 8/ The newsagent is � pleased with Billy because he hasn’t got his bike The newsagent is � angry with Billy because he hasn’t got his bike 9/ The newsagent thinks Billy is � honest � dishonest

� lazy

KES de Ken LOACH

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IV – BILLY’S PAPER-ROUND 10/ � The newsagent gives Billy a sweet. � Billy takes (nicks) a sweet in the shop. � Billy buys a sweet at the shop 11/ The milkman gives Billy some milk � true

� false 12/ In the newspaper, Billy reads

� a cartoon strip � an article about football results � an article about horse racing

V – BACK AT THE SHOP 13/ Billy is trying � to help the newsagent on the ladder

� to push the newsagent off the ladder � to climb the ladder

14/ The newsagent says to Billy “Don’t _____________________________!” VI – AT SCHOOL 15/ � The teacher is calling the register.

� The teacher is giving back tests. � The teacher is giving detention (a punishment).

16/ Billy’s surname is _______________________________. 17/ The teacher � is pleased with Billy.

� is angry with Billy. � doesn’t pay attention to Billy.

Note: The shipping forecast (météo marine) on the radio begins with “Fisher German Byte and Cromerty”. This is what you hear on the shipping forecast on the radio in the UK. En France, tous les soirs sur France Inter après le journal de 20 h. VII – BILLY WITH HIS FRIENDS 18/ Complete the conversation: Boy: Are you coming ____________ tomorrow? Billy: Aye. I’ll come. Boy: What time? Billy: ____________ Boy: Don’t be _________.

19/ The red-haired boy can’t come nesting (dénicher les oiseaux) tomorrow because � he’s going to visit his grandmother in Sheffield. � he’s taking his girlfriend to Sheffield. � he’s playing football. VIII – THE WALK THROUGH THE WOODS: GOING NESTING 20/ Mike can’t come nesting because

� he’s ill � he’s asleep � he’s not there

IX – AT THE FARM 21/ What are Billy and the farmer looking at?

� Hens � Pigeons � Kestrels

22/ What’s the title of the film? __________________________

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AFTER VIEWING THE FILM 1/ Do you think Billy has a happy family life? Why? Why not? ………………………………………………………………………………………………………………………

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2/ Your impressions about Billy’s school (teachers, school friends, discipline…). ………………………………………………………………………………………………………………………

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3/ What does Kes represent for Billy? ………………………………………………………………………………………………………………………

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4/ Can you remember any funny moments in the film? ………………………………………………………………………………………………………………………

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5/ When do you think the film was made? ………………………………………………………………………………………………………………………

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6/ Do you like this film? Say why or why not. ………………………………………………………………………………………………………………………

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Portrait Siddiq Barmak, né en 1962, est un des rares cinéastes afghans à retrouver le chemin de la réalisation cinémato-graphique en Afghanistan. Diplômé de l’Ecole de cinéma soviétique - VGIK – dès 1987, après des études de russe, et nourri par les films de Paradjanov, de Tarkovski ou bien des polars français que son père affectionnait, Barmak se voit pourtant contraint de partir auprès du Commandant Massoud pour combattre contre les Soviétiques.

Après un exil au Pakistan suite au régime Taliban qui règne à Kaboul, il rentre au pays et monte une association culturelle destinée aux enfants, avant d’entreprendre le projet d’Osama. Tourné entre 2002 et 2003, alors que le régime Taliban s’effondre progressivement, ce film pointe du regard acéré de Barmak et de son héroïne, le totalitarisme religieux du point de vue de la femme et de l’enfance.

Loin d’être un film emphatique, Osama est juste et sobre, sans mouvements esthétisants qui viendraient affaiblir ou déguiser le sujet. Ce que l’on apprend au cours d’un entretien de Barmak, c’est que le projet était intitulé « L’arc-en-ciel » et que la fin était optimiste, ouverte à l’inverse du film présent. Au cours du tournage, Barmak réécrit constamment les dialogues et les scènes, puis doute de l’épilogue. Il change le destin de son film en collant plus au réel et coupe les scènes « idéalistes » déjà tournées pour rencontrer de façon plus radicale, la réalité qui continue.

Proche en cela des cinéastes iraniens, tels que Abbas Kiarostami ou la famille Makhmalbaf (Moshen, Hana, Sami-ra) avec laquelle il travaille souvent ou du grec Théo Angelopoulos, son film insiste sur ce réel dont il témoigne sans prendre le parti de totalement s’en éloigner. Est-ce son souci d’amener le spectateur à changer de point de vue, de regard sur ce pays, qui le rend si concret ? Ou bien est-ce le poids du réel « contenu » déjà dans ses acteurs non-professionnels, comme il nous l’explique avec Marina Golbahari ? Ce film est le 43ème de toute l’histoire du cinéma afghan et marque une renaissance emplie de l’idée suivante : « là où il y a du cinéma, il y a de la liberté ! ».

Contexte Avant tout, il convient de redire que le tournage se passe bien en Afghanistan, pays aux limites du Moyen-Orient et de l’Asie et que sa position stratégique est ce qui entraîne des luttes. Si en 1996, ce pays comptait 30 millions d’habitants, composé de plusieurs ethnies, aujourd’hui le nombre de réfugiés s’élèvent à au moins 5 millions et l’analphabétisme règne à plus de 70%. Ces précisions sont là pour esquisser le portrait des acteurs que Barmak a choisis. En effet, ceux-ci sont des non professionnels et ont vécu la ou les guerres, les camps de réfugiés, la misère et le deuil.

Sujet Barmak lit en exil au Pakistan, un article sur une jeune fille battue à mort pour s’être déguisée en garçon. Cette histoire le hante deux années et il décide de la mettre en images. La recherche de son héroïne lui fera voir plus de 3000 fillettes avant de trouver Marina Golbahari. Ce qui frappe le cinéaste, c’est la paralysie dans laquelle son peuple est contraint, après des années d’un régime qui s’est attaché à casser l’honneur et à spolier l’identité de celui-ci et particulièrement celui des femmes. Il désire un regard d’enfant qui appuierait la « compassion du public ». Il veut que nous puissions « pénétrer son monde de souffrances » et « faire le voyage avec elle ». Marina est repérée en train de mendier et ce qui la rend intéressante, c’est son attitude à fleur de peau, sa sensibilité extrême. Dans un bonus proposé du DVD, aucune petite fille ne réagit aux questions sur la guerre que pose Barmak, seule Marina ne peut retenir son émotion.

OSAMA

de Siddiq Barmak

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Travail Barmak fonde son travail sur la réaction des personnes et ne donne aucun dialogue, il est donc intéressant de trou-ver les acteurs capables de suturer les manques du scénario. La mère et la grand-mère de Marina seront ren-contrées dans un camp de réfugiés, l’une et l’autre ayant perdu leur famille. Les acteurs sont « acteurs » de leur propre vie en somme et le film est nourrit de leur vécu, de leurs émotions, de leurs rêves et de leurs peurs.

Film A l’inverse du film de Samira Makhmalbaf, Cinq heures de l’après-midi qui est très esthétisant ou bien du film Le cahier de sa sœur Hana, qui s’attache à l’après-régime taliban, Barmak opte pour un traitement réaliste et proche du documentaire, comme nous le verrons dans la séquence introductive. Il ne s’agit ni d’un reportage sur ce pays, ni d’une histoire manichéenne mais d’une fiction dont la dramaturgie éprouve les émotions et la réflexion.

En amont de cette analyse, prenons le temps de dire quelques mots sur l’affiche. Le titre évoque comme il est souli-gné à maintes reprises, celui qui procéda au recrutement des talibans parmi les islamistes du Proche-Orient, à sa-voir : Oussama Ben Laden. Par ailleurs, l’affiche laisse entrevoir le visage d’une fillette, entrecoupé par les lettres du prénom, tels des barreaux. Nous avons un indice sur l’histoire qui nous est proposée. Son regard est tourné vers la gauche comme si elle cherchait à s’en échapper. Passons à cette séquence d’ouverture qui annonce le « pro-gramme » du film à venir.

Analyse séquence- Ouverture : 6 minutes. Sur fond noir, s’inscrit une phrase de Mandela : « Je ne peux pas oublier mais je peux pardonner ». Film

aux consonances politiques et humanistes de par cet exergue. Une note très basse d’orgue et un son strident (comme un roulement) rythment de façon inquiétante ce début et sur le même fond noir, le titre « Osama », puis le nom du réalisateur apparaissent. Le son s’amoindrit et le fondu au noir s’ouvre sur un gros plan de jour.

Un jeune garçon agite sa boîte en fer comme un encensoir pour « éloigner le mauvais œil » dit-il. Son regard mali-cieux apaise la tension ressentie dès le court générique. Il est face à nous, regard-caméra jusqu’à ce qu’un dollar se tende vers lui, hors-champ. « Follow them !» déclare en voix off le journaliste étranger. La caméra talonne donc le jeune garçon, qui poursuit deux femmes, une fillette à visage découvert et selon toute vraisemblance sa mère. Un plan montre un homme avec une charrette chargée de potirons et deux femmes en train de courir, de fuir.

Nous sommes face à une manifestation de femmes toutes vêtues de burkas bleues. Le garçon se fait à nouveau payer l’information. C’est une véritable marée humaine sans visages. Elles demandent du pain et précisent qu’elles sont veuves. Un contre-champ cadre la fillette apeurée et sa mère dont la burka recouvre le visage, leurs corps se figent. Un son de camion et une annonce des « talibans » paniquent la foule qui fuit dans tous les sens, traquée par ces derniers qui l’encerclent. C’est la confusion générale, les canons à eau tentent de disperser cette marée hu-maine.

La fillette, sa mère et le garçon trouvent avec difficulté refuge dans une entrée de maison. Le garçon récite sa litanie du début. La fillette entrouvre la porte et voit l’eau s’abattre sur la foule et un jeune enfant perdu, puis une burka chassée par l’eau dans la boue. Des femmes sont prises au piège et encagées littéralement avec en arrière- plan le son de poules caquetant, comme pour mieux signifier le rôle à quoi elles sont destinées. Le cadenas se clôt et un taliban furieux arrive face caméra le bras en l’air pour assommer le journaliste, le son strident du début l’accompagne. Noir.

I. Le regard en question. Si nous prenons du temps à décrire par le menu cette séquence, c’est qu’elle est la clé de tout le récit. Nous

sommes de plain-pied dans le documentaire et elle nous laisse douter de la nature du film, de par la présence d’un journaliste mais surtout, de par cette caméra subjective. Sommes-nous face à un documentaire sur l’Afghanistan ou bien sommes-nous dans une fiction ? Ce mélange adroit pose la question du regard. Celui de l’étranger au sens large du terme, celui qui, de fait n’a pas droit de regard sur ce qui se passe là-bas.

Nous pouvons parler de leurre de la mise en scène qui nous ramène à des images d’actualité que nous avons pu voir ici et là ; toutefois, le glissement vers la fiction se fait de façon évidente, lorsque le cameraman est assommé. Nous quitterons le procédé de la caméra à l’épaule propre au journalisme de terrain (images floues, tremblées, suivant l’action dans l’immédiateté) pour entrer dans un filmage plus « classique ». Le conseil que donne le garçon est un autre indice de la question du regard puisqu’il insiste en disant « Ne me filmez pas. Filmez les femmes là-bas ». Il existe donc un autre point de vue, celui des femmes, que ce garçon fait entrer en tant que vecteur de la fiction naissante.

Manifestant le regard entravé par leur burka, ces femmes bravent l’interdit. Nous n’avons jusqu’alors vu que des femmes et un commerçant fuir. Le climat est celui de l’oppression, renforcé par la manifestation filmée de l’intérieur. Nous tournons, nous nous perdons, nous sommes dans le flou sous une eau ruisselante avec les cris des femmes et le son de l’eau qui jaillit. Le son autant que l’image sont les vecteurs d’une immersion totale.

Enfin, de plain-pied dans la réalité d’un pays, où les enfants mendient, où les femmes sont voilées et où l’oppression est maître mot, un dernier regard s’offre à nous, celui de l’enfance. Le jeune garçon malicieux et la fillette apeurée au seuil de la porte, sont témoins d’une réalité qui met en question l’avenir. L’enfance est-elle d’ailleurs une terre sur laquelle ils évoluent encore ou sont-ils à la lisière d’un autre monde que leur impose cette

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réalité violente ? Le présage de l’affiche se confirme par cette ouverture brutale et franche. A mi-chemin entre le témoignage et la fiction, nous avons trois regards avec celui de la fillette qui se détache lorsqu’elle ose ouvrir la porte. A cet instant, celle qui est sur l’affiche, se dévoile clairement à nous et Barmak en fait l’héroïne du récit. II. Engagement. Nous devons souligner le ton qui est sous-jacent à cette introduction. Ce film se veut politique et engagé. Après dix années sans images sur ce pays, nous le redécouvrons avec une nuance supplémentaire. En effet, si le premier regard posé est celui du journaliste étranger, très vite on lui interdit de regarder. Nous sommes plongés au cœur de ce film sans pouvoir acheter d’images et sans la possible manipulation des médias ainsi que celle des habitants qui peuvent monnayer quelque chose de faux pour pouvoir survivre. Le regard médiatique ne vaut plus rien, il est passé à celui de spectateur du regard des Afghans eux-mêmes. Cela veut dire que Barmak permet à son peuple de parler en son nom. Dans la scène du jugement, il filme deux hommes assis et manifestement lucides sur le régime, sorte de contrepoint à ceux qui n’ont plus la parole (« Où est le témoin ? »).

Les talibans sont de suite nommés contrairement aux différents points de vue qui n’ont pour l’heure pas de noms. Désignées comme hostiles et violentes au fait de regarder, ces silhouettes barbues et enturbannées, sont mobiles mais silencieuses dans ce début. Le seul mot « taliban » suffit à affoler la foule rassemblée et à les rendre inquié-tants, comme la suite des évènements le confirme. Oser parler de ce régime, même des années après est un enga-gement sérieux et jamais voyeuriste ou zélé dans le traitement que choisit Siddiq Barmak. Cette dispersion faite à coups de canons à eau, comme pour insister sur la salissure que représentent ces femmes, donne également une autre inflexion. Premier film de Barmak qui ose la relecture de ce que le spectateur sait ou ignore, qui l’amène à un questionnement sur les conditions de vie contemporaines de ces femmes et de ces enfants. Le climat d’urgence et d’injustice pèse désormais et sert de moteur à l’intrigue. La vision socio-historique qui s’offre à nous se déclinera selon le cloisonnement, l’enfermement, l’entravement de la société afghane, des femmes et de cette fillette. Par l’artifice du reportage, nous pénétrons dans la réalité de deux mondes secrets : celui des tali-bans-monde extérieur et celui des femmes-monde intérieur. Pistes pédagogiques proposées : - Mode de filmage de l’introduction. Question des images de télévision, du rapport aux médias et la connaissance des évènements. - Définir le cadre des images : lieux, pays, personnes, langue. Où sommes-nous et que se passe-t-il ? - Pouvons-nous savoir quel est le (ou les) points de vue dès cette ouverture ? Comment le comprenons-nous ? - A-t-on une idée du récit à venir ? Sons, images, actions permettent-ils de dégager le ton du film ? III. Récit Très vite, nous pouvons remarquer que le destin de cette fillette sans nom, flirte avec le mythe de l’androgynie, qui sous-tend la légende de Roustam que récite la grand-mère : « Au pied d’un arc-en-ciel, les hom-mes peuvent devenir des femmes et les femmes devenir des hommes ». Ce récit aux allures de conte populaire, est le récit initiatique et tragique de cette héroïne. Contrainte d’abandonner son identité par le régime taliban, la métamorphose qu’elle subit ne la protègera ni de la violence des talibans, ni de la fin de l’enfance avancée.

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Il est indispensable de se pencher sur la question du travestissement, de l’abandon de soi-même, de l’interversion des pôles masculins/féminins dans un pays où les ablutions prennent plus de temps et d’importance que le jugement d’un être humain. D’un regard empêché, nous avançons vers une spoliation de soi puis vers un châtiment. Personnage(s)

La fillette, appelée « Osama » par Espandi, le mendiant du début, n’aura jamais droit à être nommée par son prénom de baptême. Elle est le seul espoir de survie de sa famille composée de femmes uniquement. Dès la seconde séquence, nous découvrons que sa mère est infirmière et qu’elle n’a pas le droit de travailler. La manifes-tation du début s’éclaire à nos yeux. Sa fille terrorisée, est celle qui peut « jouer » sur son corps équidistant de la féminité naissante et de la masculinité adolescente. D’ailleurs, le mollah qui fait les ablutions lui dira qu’elle res-semble à un « éphèbe ». Il est certain que son corps, comme ceux des garçons qui l’entoure dans le hammam, est non sexué et joue pour beaucoup dans l’effacement de son identité supposée. Son corps est un passeur que nous suivons d’un univers à l’autre. Espandi est un jeune garçon des rues, orphelin semble-t-il et est un des éléments enthousiastes de ce film. Unique personnage relativement enjoué, il est à l’aise avec tout le monde, fanfaronne, dérange, ameute la foule d’enfants dans l’école coranique. Il est à son niveau également un passeur en tentant de convoquer ou d’annihiler le mauvais œil, comme il est cruel avec Osama (en lui révélant qu’il la reconnaît) et à la fois, celui qui va tenter d’être son ange gardien (en l’aidant à prouver sa « virilité » en montant dans l’arbre). Passeur enfin parce que c’est lui qui guide les reporters du début du film et qui mène au regard des femmes, de la société afghane. Nous pouvons donc y voir l’alter ego du réalisateur Barmak en lui. En recadrant l’action sur la manifestation cela souligne sa place de metteur en scène sur celles qui n’ont pas la parole. Autre personnage masculin en forme de contrepoint aux talibans, c’est le commerçant. Il tente de parler à sa peur et de prendre soin de la fille de son ancien ami mort. Dépourvu également de nom, il réussit à préserver un temps Osama du regard menaçant des talibans (la guide dans la gestuelle des rituels masculins). Les talibans quant à eux sont filmés sans psychologie aucune et plutôt soumis à leur loi. « Taiseux mais scrutateurs » comme il est dit justement, ce sont des êtres omniprésents mais à la fois fantomatiques et insaisissables. Entité malveillante et sym-bole d’une répression toute masculine.

Ces femmes, que ce soit celles qui manifestent, celles qui attendent dans la prison, celles qui accueillent Osama dans la maison du mollah ou bien encore sa mère et sa grand-mère, sont le cœur de ce récit. Ce qu’elles ont en commun, c’est d’être cachées, enfermées, dissimulées. Elles sont quasi interchangeables de par leurs burkas bleues (à une exception près avec celle beige de la mère) et l’interdit règle leur vie comme le témoigne la scène du mariage qui se mue précipitamment en cérémonie de deuil. Comme souligné dans l’introduction, l’espace inté-rieur est le leur, à l’inverse des hommes et des talibans. Ce qui émane c’est la condition des femmes et par conséquent le destin tracé d’Osama. Osama ayant eu le mal-heur d’être née fille, sa grand-mère décide de la sauver de la sentence maternelle en la déguisant. Parenthèse à part, le dernier film de H. Makhmalbaf -Le cahier- est sous tendu par l’idée que pour vivre, il faut faire le mort. Ici, nous ne sommes pas loin de celle-ci, à savoir que pour survivre, il faut taire ce que nous sommes.

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Mise en scène

Barmak utilise les règles classiques du cinéma. Elles exposent une maîtrise du jeu des comédiens non pro-fessionnels, la clarté des cadres, le goût des décors, le sens de l’espace (extérieurs, intérieurs), comme la gamme des couleurs insistant sur le rapport entre individus-personnages et la masse d’anonymes identifiés par leur cos-tume, soumis aux préceptes religieux ou manifestant contre la contrainte. Il y a peu d’éléments didactiques ou de détails topographiques ou chronologiques, ce qui porte à une thématique intemporelle propre aux contes et dont l’enfant est le vecteur. Le choix de mise en scène de Barmak est « moral », en ce sens, qu’il évite le « close up » intégral (le gros plan) sur l’héroïne et utilise généralement des plans moyens ou d’ensemble, afin que l’histoire soit perçue tant du point de vue d’Osama, que de celui du peuple afghan au travers de la mère, de la grand-mère, d’Espandi, du commerçant et autres. A. Thématiques formelles et narratives : l’entravement.

Osama est construit sur la notion de cadre en tant que prisons physiques et mentales. Le cadrage accentue l’impression d’enfermement, de cloisonnement et d’interdit sous-jacent, par des plans qui montrent un pied, une roue de vélo, un pot de terre, le lait qu’une cuillère de bois fait tourner, les chaussures de petite fille à échanger avec des mules d’hommes, un assemblage de cadenas, la poulie, l’oxygène, etc. L’utilisation du gros plan ou du plan rapproché sur eux, indique deux choses : l’une est la nécessité de bien voir donc d’identifier l’objet, l’autre est la volonté de gonfler l’effet. Barmak tente de nous mettre, spectateurs, à la place des talibans en somme. De voir ce qu’ils voient et donc ce qu’ils conçoivent comme étant interdit. Autre notion, celle du surcadrage qui insiste sur le cloisonnement. Par exemple, la porte d’entrée de l’habitat d’Osama et de sa famille, qui encadre le taliban boiteux ; la porte du magasin et sa fenêtre ; le mariage et sa salle privée soulignée ; la porte d’entrée de l’école coranique ; le puits de la punition ; le palais de justice avec son architecture partiellement détruite (« juge » allongé dans le cadre) mais dont quelques arcades subsistent et enfin, les portes d’entrées dans la maison du mollah qui s’ouvrent et se ferment telles des boîtes (poupées gigo-gnes) sur les femmes qui attendent. De même lorsque Osama attend dans la maison du mollah avec les femmes, elle est assise devant la cheminée, nous pourrions dire face au foyer au sens propre comme au sens figuré ; celui qu’on lui fait et celui qu’elle va créer. De même, nombre de plans mettent en avant une occultation des femmes, que cela soit par un rideau de cordes dans le magasin ou bien les panneaux de bois pour le fermer, par les barreaux de la prison, par les burkas elles-mêmes ou bien encore la fenêtre embuée qui sépare de la rue et sur laquelle Osama se dessine. Autre digression au sens linguistique, celle de la maisonnée qui s’active à effacer toute trace de la famille et de la fillette en déchi-rant des photos, découpant des papiers et cachant les tresses, vestiges de sa féminité et de sa véritable identité. Par ailleurs, l’attente au pied de l’arbre dans la cour, le tournoiement des gamins dans l’école coranique, la traque des talibans dans la manifestation ou bien le cercle de la foule que fendent Osama et le mollah qui l’achète, sont autant de formes visuelles et de mouvements qui encerclent et quadrillent l’espace. Peu d’échappatoires en défini-tive. A cela s’ajoute le travail sur la bande-son avec les sons stridents durant le générique ou après chaque scène-climax, les crissements de la poulie, les cris des femmes mêlés à la pluie, les cadenas et différentes grilles, portes, le saut à la corde qui rythment et qui appuient la sensation d’étouffement et d’engrenage implacable de certaines scènes.

Par ce travail formel et sonore, la narration portée par Osama nous entraîne dans un monde aux contours déterminés et non malléables. Nous visitons les institutions grâce à Osama mais tous les lieux sont des prisons, des boîtes closes. En effet, si les rues ressemblent à un labyrinthe de par leur similitude, l’hôpital passe d’un lieu de soin et de travail pour la mère d’Osama, à celui du danger. L’école coranique ne laisse voir qu’ânonnements d’enfants embrigadés et salles obscures ou une cour qui expose et livre à l’ennemi. Et à l’inverse de ce que dit la mère d’Osama, à chaque fois qu’une porte s’ouvre, c’est pour mieux se fermer ! Ces espaces cloisonnés ressortent d’autant mieux que le décor principal du film est fait de ruines et de rues poussiéreuses.

Du début à la fin du film, le cadrage légitimé et désiré du réalisateur exprime l’enfermement d’Osama. Du début du film où elle passe la tête par la porte, nous suivons son regard à l’hôpital (lorsqu’elle fait le guet), puis depuis l’extérieur sur la chambre du grand-père mourant. La fillette est dans le champ visuel et ne franchit jamais les limites du cadre pour disparaître hors-champ. Malgré ses tentatives de fuite, comme la course en avant depuis la cour de l’école coranique, elle est traquée par la caméra et n’échappe pas à son regard. De ce choix, il s’en dégage un sens fort et évident de vouloir restreindre ses mouvements et de signifier en cela sa privation de liber-té. Elle est cadrée dans le plan de façon à faire comprendre sa condition. Le cadre borne la liberté d’aller et venir dans un espace découpé par la caméra, ce qui verrouille les points de vue selon une vision répressive des lieux et de la vie. Le conflit entre le fond et la forme permet de construire la spoliation d’identité à laquelle est sujette Osama.

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Pistes pédagogiques : - Quel trait formel pouvons-nous repérer par le cadrage ? - Parlez du décor, des lieux extérieurs et intérieurs. - Comment la fillette est-elle filmée ? Que pouvons-nous en dire ? - Citez une scène qui vous frappe le plus sur cette opposition intérieur/extérieur ; pouvez-vous dire à qui ces espa-ces appartiennent ? - Que pouvez-vous déduire de par cette forme sur l’histoire, son sens ?

Analyse séquence- chapitre 4 / 5- l’arc-en-ciel - 8 minutes. Cette séquence débute par la réprimande de la grand-mère envers sa fille, d’avoir exposé au danger de la rue la fillette. La mère se plaint d’avoir une fille et de n’avoir pas de fils pour sub-venir aux besoins de la famille. Nous avons ici un élément de compréhension sur la situation dans laquelle cette famille se trouve. Progressivement la caméra zoome en avant vers le visage d’Osama qui a la tête sur les genoux de sa grand-mère. Elle est l’objet de la discorde, le sujet du film et celle qui envers et contre tout va être le sauveur. La grand-mère parle d’égalité entre les hommes et les femmes, sous le regard dubitatif de sa fille.

Elle prend la décision de couper les cheveux d’Osama, tandis que sa mère devra couper les vêtements de son défunt mari. A cet instant Barmak décide de monter la séquence par une répétition de champ et contre-champ sur la grand-mère puis Osama seule et sur la mère et le tissu. Il relie l’acte de raccourcir les vêtements à l’aide d’une paire de ciseaux au conte que récite la grand-mère pour endormir Osama et à la coupe des tresses qui tombent sur le tapis. Nous allons revenir sur celle-ci car elle est montée de façon très signifiante quant à l’identité. Pour finir sur une description sommaire, le jour se lève et la caméra en plongée sur un corps endormi, remonte des pieds à la tête. Osama est transformée, elle découvre son nouveau visage dans un miroir rond, tel l’iris de l’œil qui se dissimule d’ailleurs très adroitement. Un chant de femme très solennel accompagne Osama qui récupère ses tresses et qui les plante dans un pot de terre. Plus loin dans les rues de Kaboul nous suivons Osama qui subit l’épreuve du regard des hommes et des talibans sur elle. B. L’abandon de soi. Ce qui rend cette séquence très forte, c’est l’insertion de trois flash-back à l’intérieur de la série de champ et contre-champ. Le premier montre des gens fuyant et pénétrant dans une entrée. Nous reconnaissons le plan de la manifestation et de la cachette. Suit un premier coup de ciseaux sur les tresses. Le second flash-back dévoile le visage d’Osama qui regarde la manifestation sous la pluie et un arc-en-ciel naissant. Un autre coup de ciseaux. Le troisième laisse Osama sortir et se voir elle-même jouant à la corde à sauter sous cette même pluie. Les tresses tombent toutes au sol et la porte se ferme dans un ultime flash-back. Cette insertion signifie l’abandon de soi, l’abandon de sa condition de petite fille qui tremble à la vue et à l’arrivée des talibans, sa condition d’enfant également qui rêve de faire de la corde à sauter en toute liberté et enfin, de passer peut-être sous cet arc-en-ciel qui appartient au conte de sa grand-mère, en sachant que si elle passe dessous, elle deviendra un garçon. Lorsqu’elle se découvre dans le miroir, la tristesse indique toute l’angoisse qui l’attend. Il lui faudra feindre, trom-per le regard des autres, des femmes et des hommes, celui des talibans. Elle est contrainte de renier ce qu’elle est

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au plus profond d’elle-même, en endossant une seconde peau qui est celle de son père et du déshonneur égale-ment. Enterrer ses tresses est un geste qui dit toute l’importance de cet acte, et en les mettant dans la terre, c’est un secret et vain espoir de perpétuer, voire d’engendrer la pousse des cheveux et la part féminine contenue en eux. Elle enterre ce qu’elle a été, comme les flash-back le soulignent aussi. La porte fermée est celle qui s’est close sur sa féminité, sur son identité et son enfance. Nous la verrons plus tard, placer l’intraveineuse du patient décédé au-dessus du pot. L’eau du goutte-à-goutte est ici plutôt synonyme de maladie, d’hôpital et non de pureté comme nous le verrons par ailleurs avec les ablutions. La première sortie d’Osama est très importante, car elle est toujours suivie du chant de la femme comme pour rap-peler son identité et le côté mélancolique, tragique de l’histoire. Le regard des hommes dans une charrette sur leur pas de porte ou celui des talibans, est une épreuve du feu. Arrive-t-elle à feindre ? Arrive-t-elle à tromper leurs regards acérés ou est-elle en train de se dévoiler ? Toute la suite du récit parlera de l’apprentissage qu’elle a à faire, pour duper tous ces hommes et maîtriser sa peur du regard extérieur. La grand-mère lui racontera à nou-veau la légende de Roustam et le zoom avant tentera de montrer qu’il faut à Osama intégrer cette nouvelle iden-tité, qu’elle la fasse sienne. C. Thématique socioculturelle : identité et dévoilement.

Commerce : chez cet homme, Osama dessinera sur la vitre embuée sa silhouette avec des tresses, rappelant qu’elle peut changer d’habits, de peau extérieure mais que son âme, son moi au sens psychanalytique est toujours féminin. Elle est dans sa réalité et non dans le déni. Elle doit changer de chaussures, rendre sa voix plus rauque et appren-dre à faire ses ablutions, puis la prière. Ce qui ressort c’est une division nette entre le monde des femmes et celui des hommes. Dans le dernier plan chez lui, elle saute à la corde, voulant retrouver au moins son enfance. Talibans : Embrigadée avec d’autres enfants mâles, elle se retrouve au cœur d’un monde encore plus réglementé, celui des talibans et de la virilité qui sera mise à l’épreuve. La distribution de turbans blancs tente d’unifier, de rendre semblables tous ces garçons, mais très vite Osama sera source de questionnement au-delà des rites islami-ques. Hammam : La scène des ablutions met en lumière plusieurs choses. Le choix des éclairages rend ce lieu sensuel et le jeu d’ombres et de lumières, insiste sur le côté amoral et libidineux du mollah. Osama prise au piège de cet exer-cice pudique et maladroit dans son explication, doit s’y plier sous réserve d’être découverte. Le mollah la repère quand il sort de son baquet comme si sa plongée dans l’eau lui avait métaphoriquement redonné la vue, une vue perçante et sournoise. Osama comparée à un éphèbe plonge et ressort avec des gestes de retenue sur son torse.

Nous allons traiter depuis le versant socio-culturel l’apprentissage gestuel et comportemental qu’Osama effectue, en entrant dans le monde mas-culin, islamiste et taliban, ainsi que son dévoilement. La scène qui inaugure cet état est celle où elle commence à travailler pour le commerçant. Ce qui est déjà à noter, c’est le raccord par le geste qui relie la fin de la scène où Osama est engagée et le début de celle qui la montre à l’ouvrage. Nous sommes en gros-plan sur le lait fumant et l’homme tourne sa cuillère de bois selon un rythme en ferme-ture de plan, nous rouvrons l’autre par ce même plan, sauf que les mains puis le corps dévoilé par la caméra qui remonte, laisse voir Osama. Premier geste passé, celui de tourner le lait, pour se fondre dans le décor, pour apprendre le métier et pour prendre une place qu’elle n’a jamais eu le droit d’occuper. Le rythme variera selon les évènements et c’est une belle idée dramaturgique de montrer sans mots, la peur qui envahit Osama à l’approche d’un taliban ou d’un homme bousculé contre la vi-trine.

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Analyse de séquence - Chapitres 11/ 12- Arbre/ Fille : 8 minutes Osama est contrainte de grimper dans un arbre pour dissiper les soupçons sur son identité. Son corps an-drogyne est mis en avant (ses pieds, sa voix, ses mains) et en haut de l’arbre, le silence se fait comme si, l’espace d’une respiration, se faufilait un espoir de prouver ce qu’elle n’est pas. C’est également une scène qui crée la confusion en insistant sur ce qui relève de la virilité, de la féminité et la ségrégation latente faite aux corps d’adolescents prépubères. Seule au milieu de jeunes garçons élevés dans le strict respect des règles discriminatoi-res et propagandistes des religieux, Osama doit assimiler à la mosquée, au hammam, à l’école coranique, les rites dans lesquels elle se perd. Un taliban remarque dès sa prière avec le commerçant, qu’elle prie comme une femme en ne se relevant pas. De sa voix perçante, elle crie qu’elle n’est pas une fille et pourtant, elle ne saura pas redes-cendre de cet arbre. Au sommet, elle apparaît tel un chaton en proie au vertige, telle une figure emblématique des femmes afghanes désorientées et dépossédées de leur identité. Punie pour n’avoir pas su descendre, elle est suspendue à une poulie dans un puits. Osama pleure et crie, nous l’apercevons dans un premier temps en contre-plongée. Silhouette qui se balance contre les parois. Scène violente quant à la démesure et l’origine du supplice, les enfants continuent leurs récitations du coran et regardent en si-lence en direction des pleurs. Barmak n’abuse pas de mouvements de caméra mais saisit la douleur de par cette plongée et contre-plongée (tel un gibet) sur la fillette. Le gros plan sur la poulie laisse comprendre que sa vie ne tient qu’à un fil autant qu’il souligne l’engrenage dans lequel sa vie est entraînée. Etre femme est synonyme de transgression, de salissure, d’impureté et cette scène renvoie à une dimension socioculturelle évidente et ambiguë. Silence et attente en contrepoint aux balancements et pleurs de la fillette sont insoutenables. La forme ronde de-vient antinomique avec cette punition, bien loin de protéger tel le ventre maternel, il est le vide, l’absence, l’absurdité.

Sortie droite comme un I du puits, Osama découvre en même temps que le mollah que du sang coule le

long de ses jambes. Elle est découverte, elle est imposture et ils crient son identité sexuée « C’est une fille ! » comme si elle était un monstre. Course-poursuite des enfants jusqu’à ce qu’un taliban lui mette de force une burka. Barmak n’accompagne pas de travellings son héroïne mais la laisse courir en tous sens, affolée, ne la laissant ja-mais sortir du cadre comme vu auparavant. Espandi, alter ego du réalisateur, part en pleurs, abasourdi par la scène. Le destin d’Osama est scellé.

Elle a eu conscience tout au long du récit, d’être une provocation aux yeux des talibans et s’effraie dès qu’ils apparaissent, exprimant par conséquent le travestissement comme étant inopérant. Sa vraie différence est manifeste et au-delà de son déguisement ou de la burka que lui mettent les talibans, cela rappelle qu’elle est une femme et que rien ne pourra changer. Si elle échappe à la mort, elle disparaît définitivement aux yeux de tous, condamnée à vie. La question du regard est à nouveau centrale, puisqu’elle ne sera plus l’objet de regard, ne sera plus sujet du regard sur le monde qui l’entoure, et symbolise toutes les femmes afghanes qui ne doivent pas être vues et ne doivent pas voir. Sa féminité ne lui sera rendue que pour être violée.

Seule la séquence du mariage est une tentative de respiration avec ses chants, sa musique interdits. Nous sommes introduits par Osama dans le monde intérieur, invisible et défendu de la féminité. Indice supplémentaire sur la vie des femmes, lorsqu’une jeune fille demande où est le marié et qu’Osama répond : « En Iran ». En somme, nous ne savons pas s’il a fui pour combattre, s’il a fui pour échapper aux talibans et peu importe, mais ce que cela sous-

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entend, c’est que les femmes sont laissées seules, livrées à elles-mêmes et à leur condition d’être emmurées vivan-tes. Chez le mollah, les femmes lui redonnent son apparence féminine, en la maquillant, en l’habillant avec une robe et tandis qu’elles s’occupent d’Osama, elles témoignent de la vie et de ce qui attend Osama. Loin d’être le conte de sa grand-mère ou la fête vécue au mariage clandestin, elle entend avec chacune d’entre elles, la réalité qui rend caduc tout le discours sur l’égalité. Les cadenas se trouvent à chaque plan de cette séquence et prouvent qu’il n’y a pas d’issue. Osama est figée lorsqu’elle doit choisir son propre cadenas, et ne peut que pleurer. En la couvrant de la burka pour ne plus voir son corps et donc l’identité de son sexe, la société taliban fait d’elle une nubile par ce geste brutal et bref. Pistes pédagogiques : - De quoi Osama est-elle coupable ? Quels éléments vous aident à comprendre ? - En quoi la scène de l’arbre est-elle une clef ? Etudiez l’utilisation de la bande-son lorsqu’elle est perchée, que vous apporte cette indication ? - Quel regard les jeunes garçons, les hommes et les talibans portent-ils sur les fillettes et les femmes en général et que pouvez-vous en déduire ? - Quel rôle joue Espandi dans ces deux scènes ? Quelle réaction a-t-il et que veut-elle dire ? L’enfance. Mise en scène sobre et morale, Barmak use de plans relativement fixes afin de montrer le côté figé de son peuple et l’absence de liberté des femmes. Comme si le temps avait été arrêté avec les talibans en leur sein. Dans une dimension documentaire et socioculturelle, ce film déploie ses thématiques selon une temporalité elliptique, presque intemporelle au sens d’un conte cruel. Barmak sait par son enfance qu’une forme d’éducation passe par le cinéma et clin d’œil contemporain et symbole de renaissance, les écoles coraniques en Afghanistan sont devenues des cinémas. Par le fait d’avoir choisi un regard d’enfant, il nous a dit vouloir être à même d’amener le spectateur à l’émotion, à la souffrance vécues, mais il s’avère que ce regard d’Osama est plus fort que cela. A. Anthropologue : Le regard d’Osama comme celui d’Espandi, est anthropologique, au sens qu’il voit et rapporte en tant que point de vue, qu’il est une ouverture sur le monde, différente de celles des adultes soumis ou élus. A tout moment dans le récit, Osama pose les yeux de façon désintellectualisée sur les institutions et nous délivre, tel Espandi au début qui devient un guide, des informations sur son pays. Lorsque les talibans embrigadent les garçons dans les rues, le réalisateur souligne le regard d’Osama qui se dirige vers une porte depuis la foule, observant les parents contraints de laisser leur fils partir. Osama n’explique pas, ne disserte pas, elle est là dans l’instant présent et transmet ce qu’elle voit. Quand bien même elle est à la sortie de l’enfance et à l’orée de l’adolescence, son regard et son esprit sont toujours retenus par l’enfance, le besoin vital d’insouciance. B. Jeu : ainsi est-il si surprenant de voir à l’arrivée des enfants à l’école coranique des garçons juchés sur un tank et jouer à la guerre. Pour eux, le lien ne se crée pas, ils sont dans l’instant et apprennent à leurs dépens ce qui se passe et se dessine pour eux dans ce lieu. La cloche sonne et c’est une cour de récréation que nous avons sous les yeux.

Ce qu’il faut souligner, c’est que le retour à l’enfance est une attitude cognitive, un chemin tracé pour ap-préhender la réalité. L’enfant est le lieu de sensibilité, il ne pense pas le monde mais le vit ; il est donc un être de sensations, qu’il accumule et restitue. Il s’agit de retrouver cette vision primitive que détiennent les yeux infantiles. Entrent en jeu le méta regard de la caméra et celui de l’enfant, qui tient le privilège de tout voir, de tout capter. Dans cette appréhension, les apparences restent en marge, et l’enfant acquiert son entière cognition en les igno-rant. « L’enfant se trouve face aux choses, en contact intime avec leur vérité » (Santiago Amon).

En choisissant un regard d’enfant, Barmak nous a dit vouloir être au plus près du monde de souffrances d’Osama. Il parle bien de sensations, d’émotions et en cela son regard plus neutre parce que non sujet à l’intellectualisation, permet de nous donner à voir un monde tel qu’il est, sans qu’il soit jugé ou modelé totalement au préalable. Le point de vue et le cadrage sont des indices mais le regard même d’Osama se porte sur ce qu’elle désire comprendre. C’est par la rencontre avec l’Autre que se fonde et se reconnaît l’homme. C. Temporalité : nous n’avons jusqu’alors que peu ou pas parlé de temporalité. Cette mise en scène donne une atmosphère troublante, inquiétante, presque fantasmatique. Elle semble à mi-chemin entre le cauchemar éveillé et l’invraisemblable. A peu décrire les lieux et les êtres, la réalisation amène plus au sentiment de terreur suscitée par eux. En effet, avec la peur vécue quotidiennement, Osama va vivre avec la hantise d’être démasquée, et le récit progresse dans une continuité de scènes. Cela est propre au point de vue enfantin, qui met bout à bout les évène-ments et peine à rendre cohérent un ensemble. Nous ne sommes pas dans un récit de souvenirs ordonnancés mais dans une narration constituée d’instants du présent qui sont hachés par cette peur constante. Le traitement elliptique

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permet le suspens de cette histoire mais renvoie immanquablement à un esprit d’enfant qui absorbe très vite les données. En guise de contrepoint, les séquences poétiques, oniriques, les images mentales, les flash-back sont des lieux de liberté préservés par cette enfant. Divagations narratives, elles offrent un sentiment de joie et d’amertume mêlées. Le monde des possibles s’estompe et laisse place à une réalité trop abrupte, dont Osama se protège en rêvant. Analyse de séquences- Chapitres 13- Prison /15 -maison mollah : 6 minutes.

Au sein de la prison, cette scène relativement courte (deux minutes) s’ouvre par un gros plan sur les jambes d’une femme qui longe des boxes à barreaux. Des femmes sont assises, Osama est la dernière dans une burka couleur sable. Un son cadencé est présent et dans un premier temps, les chaussures de cette femme sèment le doute. En off nous entendons le son d’une porte qui grince. Suit un plan sur Osama assise derrière les barreaux puis son contre-champ se voyant jouer. En fait le rythme n’est pas celui des chaussures lorsqu’elle marche mais d’Osama avec sa corde à sauter. Le second son en off d’une fermeture de porte initie le contre-champ sur Osama assise. S’ensuivent une série de champ/contre-champ sur Osama qui joue, puis une occidentale (celle de l’hôpital) derrière les barreaux, retour sur la corde à sauter, la femme est en plan de plus en plus rapproché et enfin Osama qui la regarde. Le son s’arrête. Barmak filme avec un léger travelling courbe comme s’il tournait autour des scènes, insis-tant sur le côté vertigineux, le côté voyeur également (femmes en cage comme celles de la manifestation) et le côté « universel » (englobant) de la condition faite aux femmes dans ce pays. Nous nous souvenons des scènes de rêves pendant que sa mère lui coupe ses cheveux, ici après une image qui tra-duit son désir de rester enfant et de jouer dehors en liberté, elle se voit telle qu’elle est devenue (soit travestie en garçon) jouant toujours à la corde à sauter. D’ailleurs, l’espace d’un instant, nous doutons de cette scène. Est-ce un rêve ou saute-t-elle à la corde dans cette prison, puis très vite nous nous rendons compte qu’elle ne le pourrait pas et que ce sont bien des images mentales. Cette séquence est complexe car elle évoque à la fois l’enfance définiti-vement confisquée et le monde des femmes (oriental et occidental) mis à l’index, emprisonné, mis sous séquestre.

L’ultime scène de ce genre est celle de sa nuit de noces. Par un travail sur la lumière qui se voit tout au long de son film, Barmak inscrit son récit et certaines de ses scènes rêvées, dans un clair-obscur. Nous avons en mémoire la lumière du hammam, celle de la prison. Cette même pénombre rend non plus onirique mais libidineux ce qui se joue dans la maison du mollah. Comme si l’esprit était embrumé ou taché par les intentions. Le mollah est à la recherche de son « achat » et ouvre toutes les portes. Il finit par trouver Osama cachée dans un four à pain creusé dans le sol. Quand elle est sortie de là, il lui propose ses cadenas et de faire sien un de la série. Ils montent à une échelle puis succède un plan sur le mollah se coulant dans un bain inondant de vapeur la nuit. Le son de la corde à sauter s’entend, alors qu’Osama jouant, clôt le récit.

Ce son sera présent encore un tiers du générique qui défile sur fond noir, avant que le chant d’une femme (celui du miroir) monte. C’est la même image que la précédente mais le sens de celle-ci est encore plus violent. D’ailleurs un léger décalage se fait entre le son et l’image comme pour souligner qu’ici Osama abandonne ses rêves puisqu’elle a été mariée, puis violée. Finis ses jeux d’enfants et sa liberté d’action. D. Poétique ? : il est difficile de parler de poétique au sens strict du terme, même si le jeu des couleurs pastel, les mises en lumière avec le clair-obscur et la mise en espace sont subtiles et significatives. Il y a des éléments clefs qui nous ont permis d’approcher au plus près l’univers d’Osama, comme ses tresses plantées solennellement dans la terre, ses images mentales ou l’utilisation de l’eau. En effet, nous ne sommes pas de plain-pied dans la poétique mais plus un jeu subtil avec tel ou tel élément. L’eau est tour à tour purificatrice (ablutions, manifestation) et vecteur

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de maladie (intraveineuse, pot). Elle ne renouvelle rien en soi mais tente d’effacer les traces, de laver les corps et les esprits ou de donner l’espoir de voir grandir ce qui a été coupé.

Ce qui semble le plus se rapprocher d’une poétique, c’est le fait que ce type de cinéma s’investit d’une mis-

sion superbe : éduquer au moyen de l’émotion, de l’image et de l’histoire. Eduquer, non seulement l’enfant mais le spectateur adulte, lui dessiller les yeux sur ce monde, cette « terra incognita », l’ouvrir à son regard, ses nécessités, sa personnalité. Osama est bien un film pour jeunes spectateurs mais pas uniquement et c’est la force de ce film qui arrive à nous emmener, en tant que jeune spectateur, en tant que spectateur adulte et en tant que jeunes specta-teurs que nous ne sommes plus…

Ce type de film permet la reviviscence partielle d’émotions enfantines…et met en place au travers du regard de l’enfant une prégnance forte des évènements. Nous sommes cueillis par un regard qui n’est plus le nôtre.

Car ranimer cette enfance qu’il y a en nous, le jeu des enfants, leur vie intime offerte à notre regard, ré-pond à une des fonctions de l’invention du cinématographe. Cela apparente le travail une fois de plus avec le langage poétique, dont le rôle principal est d’amener l’être à se révéler.

Si regarder est synonyme de mort, de disparition, de punition dans ce récit, nous nous demandons si Osa-ma cachée sous la burka maternelle, revient métaphoriquement à son origine ou si nous pouvons y voir une accusa-tion et une solution : que les ventres n’enfantent plus. Si l’enfance part d’un refus du monde pour se protéger de la réalité telle qu’elle est, elle n’a parfois d’autre issue que de comprendre, de subir la réalité, donc de l’accepter et d’en arriver à une acceptation qui est illustrée dans cette histoire de façon tragique.

Texte de Marie-Anne LIEB

ANN É E S CO L A I R E 2 0 0 8 / 2 0 0 9 P ROG RAMMA T I ON D É F I N I T I V E

Niveau 6ème/5ème Niveau 4ème/3ème

1er trimestre Le petit prince a dit

de Christine Pascal (1992) Les temps modernes

De Charles Chaplin (1936)

2ème trimestre Tex Avery Follies

de Tex Avery (1964) La planète des singes

de Franklin J. Schaffner (1967)

3ème trimestre Abouna

de Mahamat Saleh Haroun (2003) Persepolis

de Marjane Satrapi (2007)

APPEL APPEL APPEL APPEL ÀÀÀÀ A A A ADHDHDHDHÉÉÉÉSIONSIONSIONSION

Enseignants, manifestez votre soutien et prenez part aux décEnseignants, manifestez votre soutien et prenez part aux décEnseignants, manifestez votre soutien et prenez part aux décEnseignants, manifestez votre soutien et prenez part aux décisions isions isions isions prprprpriiiises par l’association en adhérant à titre personnelses par l’association en adhérant à titre personnelses par l’association en adhérant à titre personnelses par l’association en adhérant à titre personnel : : : :

8 € 8 € 8 € 8 € par anpar anpar anpar année scolairenée scolairenée scolairenée scolaire !!!!

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REALISATIONS DE FILMS EN 2007/2008

Pour la deuxième année consécutive, l’association Collège au Cinéma 37 a proposé à la Direction de l’Éducation et de la Jeunesse de la ville de Tours le concours « Cartes Postales Filmées » dans le cadre de ses actions éducatives sur le thème « Couleurs ». Les classes souhaitant participer au concours devaient envoyer une « carte postale » au format 10x15 cm qu’elle avait confectionnée : photo, dessin, collage, peinture… accompagnée d’un court texte de présentation du projet. Cette carte postale était la première image d’un petit film dont l’histoire était écrite au verso ou la première image d’un story-board. Les deux projets les plus créatifs ont été sélectionnés par un jury et ont fait l’objet d’un film d’animation d’une à deux minutes tourné avec les enfants avec une réalisatrice profession-nelle. Le lundi 11 février 2008, Véronique Aguenier et Audrey Villa (Actions éducatives de la ville de Tours), Gilles Blan-chard (Inspection académique) et Dominique Roy (Collège au Cinéma 37) ont sélectionné, parmi les sept cartes postales en compétition, les deux cartes qui deviendraient des petits films d’animation ! En avril et mai 2008, les deux classes sélectionnées ont bénéficié d’une journée de tournage pour animer sa carte postale avec l’aide de la réalisatrice Nathalie Pat.

La couleur, c’est

le bonheur Classe de CM2

École Alain de Tours Animation

2 min

Une classe qui va vous en faire voir de toutes les couleurs

Classe de sixième Collège St Grégoire

de Tours Animation

2 min 40 sec

Les deux classes ont ensuite présenté leurs films au festival Courts d’écoles qui s’est déroulé du 19 au 23 mai 2008 aux cinémas « Studio » à Tours.

En septembre 2007, l’association a fait l’acquisition du matériel nécessaire pour réaliser un film avec des élèves : un caméscope, un trépied télescopique, un enregistreur minidisc, un microphone, un ordinateur portable équipé de logiciels de montage, projecteurs ! De plus, notre assistante, Claire Tupin, a suivi en 2006/2007 deux stages de réalisation de films ; elle a égale-ment accompagné plusieurs enseignants tout au long de l’année 2007/2008 leur projet de création d’un film avec leur classe. Elle peut donc se mettre à votre disposition pour vous assister dans toutes les phases de votre projet, depuis l’écriture du scénario jusqu’au montage, selon un calendrier à définir ensemble.

En 2007/2008, l’association a soutenu et encadré trois réalisations de film (projet d’octobre à mai) qui ont été présentés au festival Courts d’écoles :

La nuit de la malédiction

Film d’animation réalisé par une classe de cinquième du collège Roger Jahan de Descartes

M’enfin ou la journée d’un collégien pas ordinaire

Film vidéo réalisé par les délégués de troisième du collège Le Réflessoir de Bléré

Le réveil du volcan Film d’animation réalisé par la classe de 4ème C du collège Ste Jeanne d’Arc de Tours