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Le nombre de ganglions retrouv6s sur un curage ganglionnaire apr6s colectomie d6pend de la tech- nique chirurgicale mais 6galement de la technique de mise en 6vidence des ad6nopathies. Afin de minimi- ser le risque de classer ~ tort un patient NO, il est sou- haitable qu'au moins 8 (en France) 5 12 (aux Etats- Unis) ad6nopathies soient identifi6es sur la piece op6ratoire ; dans le cas contraire, le statut ganglion- naire est incertain et la tumeur doit atre class6e pnx. L'importance pronostique du nombre de ganglions retrouv6s sur la piece op6ratoire (ind6pendamment du nombre de ganglions envahis) vient d'6tre prdci- s6e par l'6tude ici rapport6e [1]. ,~ partir de la base de donn6es de l'essai INT0089, 6tude prospective de chimioth6rapie adjuvante qui a regroup6 3561 patients, une 6quipe am6ricaine a voulu 6tudier l'impact du curage ganglionnaire sur la survie des patients. Les donn6es de 3 411 patients ont pu 6tre analys6es. Le nombre m6dian de ganglions sur piece 6tait de 11 (de i h 87). t~taient pris en compte le nombre de ganglions envahis (NN+) et le nombre total de ganglions sur pi6ce (NG). Comme pr6vu, la survie 6tait inversement corr616e ~ l'importance de l'envahissement ganglionnaire. Toutefois, fi stade d'envahissement ganglionnaire 6gal (patients pN1 ou pN2), la survie 6tait meilleure en cas de NG plus important : ainsi pour les patients pN2, la survie globale ?a 5 ans passait de 71% en cas de NG sup6- rieur ?a 35 contre 51% en cas de NG inf6rieur ~ 35 (p = 0,002). De m~me, chez les patients pN1, la survie globale ~ 5 ans passait de 74 % en cas de NG sup6- rieur ?~40 contre 67 % en cas de NG inf6rieur ~ 40 (p < 0,0001). Plus int6ressant encore, dans le groupe des 648 patients sans envahissement ganglionnaire, il existait 6galement une corr61ation positive entre sur- vie globale et NG. En cas de NG sup6rieur ~ 20, la survie globale/~ 5 ans 6tait de 87 % versus 80 % en cas de NG compris entre 11 et 20 et 73 % en cas de NG inf6rieur ?al0 (p < 0,0001). Ainsi, en analyse multiva- ri6e, le nombre total de ganglions sur pi6ce apparaR un facteur pronostique ind6pendant. Discussion : I1 semble donc certainement exister des diffdrences de technique chirurgicale, aboutissant de meilleurs curages ganglionnaires et done h de meilleures survies. De telles diff6rences op6rateurs- d6pendantes sont connues pour la chirurgie des can- cers de l'cesophage, du pancr6as ou du rectum mais n'avaient pas 6t6 rapport6es dans le cas du cancer colique. Cependant, un nombre faible de ganglions retrouv6s sur la piece peut aussi 6tre ddpendant de la qualit6 du travail de l'anatomo-pathologiste. Ainsi les techniques de dissolution des graisses augmentent de fa~on importante le NG. Une telle 6tude met en 6vidence la n6cessit6 de curages ganglionnaires complets pour am61iorer les r6sultats de la chirurgie carcinologique colique. Au vu des r6sultats ddcrits, un minimum de 20 ganglions n6gatifs devrait 6tre exig6 pour retenir un stade pN0. Dans l'immddiat, il para~t impdratif de sensibiliser nos chirurgiens et anatomo-pathologistes fi ces chiffres et de ne plus se satisfaire de curages non optimaux... L'amdlioration de nos rdsultats passera par l'augmentation du NG de nos curages... Pascal ARTRU & G6rard LLEDO Novembre 2003 RI~FI~RENCE LE VOYER T., SIGURDSON E., HANLON A. et al. -- J Clin Oncol, 2003, 29, 2912-9 CANCI~ROLOGIE DIGESTIVE : L'IMPORTANCE DES UCPO I1 est important que les h6pato-gastroent6rologues conservent la totalit6 des activit6s pour lesquelles ils ont montr6 au fil des ann6es leurs comp6tences. La canc6rologie digestive fait partie de ces comp6tences, car nous sommes au cceur du d6pistage, du diagnostic et du traitement des cancers digestifs en g6n6ral et du cancer colorectal en particulier. travers la mise en place d'une r6gulation des th6- rapeutiques, en r6servant certains m6dicaments uti- lis6s en chimioth6rapie aux seuls canc6rologues, progressivement une exclusion de fait des h6pato- gastroent6rologues tend ~t se mettre en place ~a et 1?~. Le plan cancer voulu par le Pr6sident de la R6pu- blique, Jacques Chirac et pilot6 par Madame Briand, veut la constitution de canceropoles qui peuvent atre la meilleure et la pire des solutions. Les canceropoles, comme les r6seaux, se justifient par la coordination des soins autour des patients. Nous avons de tout temps 6t6 en faveur des r6seaux ; par contre, il est extr6mement fr6quent que cette volont6 louable se transforme en v6ritable filibre avec des Gatekeeper. Plus de 60% de la canc6rologie est trait6 dans le monde lib6ral. Le plan cancer tel qu'il a 6t6 pr6sent6, semble vouloir oublier ce chiffre important et cette confiance de fait que nos concitoyens font aux m6de- cins sp6cialistes lib6raux en g6n6ral et aux h6pato- gastroent6rologues, en ce qui concerne la canc6rolo- gie digestive. I1 faut donc rester vigilant, utiliser les canceropoles pour ce qu'ils sont, un lieu de concerta- tion, un lieu d'initiatives coordonn6es, un lieu per- mettant aux sp6cialistes lib6raux d'inclure leurs patients dans les protocoles. Nous avons en m6moire, une phrase de Jean Faivre, lors des derni~res assises de l'h6pato-gastroent6rologie : plus de 50 % de chi- mioth6rapie utilis6e dans le traitement du cancer du 260 Volume 34 - N ~ 2 - 2004 Acta Endoscopica

Cancérologie digestive : L’Importance des UCPO

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Le nombre de ganglions retrouv6s sur un curage ganglionnaire apr6s colectomie d6pend de la tech- nique chirurgicale mais 6galement de la technique de mise en 6vidence des ad6nopathies. Afin de minimi- ser le risque de classer ~ tort un patient NO, il est sou- haitable qu'au moins 8 (en France) 5 12 (aux Etats- Unis) ad6nopathies soient identifi6es sur la piece op6ratoire ; dans le cas contraire, le statut ganglion- naire est incertain et la tumeur doit atre class6e pnx. L'importance pronostique du nombre de ganglions retrouv6s sur la piece op6ratoire (ind6pendamment du nombre de ganglions envahis) vient d'6tre prdci- s6e par l'6tude ici rapport6e [1].

,~ partir de la base de donn6es de l'essai INT0089, 6tude prospective de chimioth6rapie adjuvante qui a regroup6 3561 patients, une 6quipe am6ricaine a voulu 6tudier l'impact du curage ganglionnaire sur la survie des patients. Les donn6es de 3 411 patients ont pu 6tre analys6es. Le nombre m6dian de ganglions sur piece 6tait de 11 (de i h 87). t~taient pris en compte le nombre de ganglions envahis (NN+) et le nombre total de ganglions sur pi6ce (NG). Comme pr6vu, la survie 6tait inversement corr616e ~ l'importance de l 'envahissement ganglionnaire. Toutefois, fi stade d'envahissement ganglionnaire 6gal (patients pN1 ou pN2), la survie 6tait meilleure en cas de NG plus important : ainsi pour les patients pN2, la survie globale ?a 5 ans passait de 7 1 % en cas de NG sup6- rieur ?a 35 contre 51% en cas de NG inf6rieur ~ 35 (p = 0,002). De m~me, chez les patients pN1, la survie globale ~ 5 ans passait de 74 % en cas de NG sup6- rieur ?~ 40 contre 67 % en cas de NG inf6rieur ~ 40 (p < 0,0001). Plus int6ressant encore, dans le groupe des 648 patients sans envahissement ganglionnaire, il existait 6galement une corr61ation positive entre sur- vie globale et NG. En cas de NG sup6rieur ~ 20, la

survie globale/~ 5 ans 6tait de 87 % versus 80 % en cas de NG compris entre 11 et 20 et 73 % en cas de NG inf6rieur ?al0 (p < 0,0001). Ainsi, en analyse multiva- ri6e, le nombre total de ganglions sur pi6ce apparaR un facteur pronostique ind6pendant.

Discussion : I1 semble donc certainement exister des diffdrences de technique chirurgicale, aboutissant

de meilleurs curages ganglionnaires et done h de meilleures survies. De telles diff6rences op6rateurs- d6pendantes sont connues pour la chirurgie des can- cers de l'cesophage, du pancr6as ou du rectum mais n'avaient pas 6t6 rapport6es dans le cas du cancer colique. Cependant, un nombre faible de ganglions retrouv6s sur la piece peut aussi 6tre ddpendant de la qualit6 du travail de l'anatomo-pathologiste. Ainsi les techniques de dissolution des graisses augmentent de fa~on importante le NG.

Une telle 6tude met en 6vidence la n6cessit6 de curages ganglionnaires complets pour am61iorer les r6sultats de la chirurgie carcinologique colique. Au vu des r6sultats ddcrits, un minimum de 20 ganglions n6gatifs devrait 6tre exig6 pour retenir un stade pN0. Dans l'immddiat, il para~t impdratif de sensibiliser nos chirurgiens et anatomo-pathologistes fi ces chiffres et de ne plus se satisfaire de curages non optimaux... L'amdlioration de nos rdsultats passera par l'augmentation du NG de nos curages...

Pascal ARTRU & G6rard LLEDO

Novembre 2003

RI~FI~RENCE

LE VOYER T., SIGURDSON E., HANLON A. et al. - - J Clin Oncol, 2003, 29, 2912-9

CANCI~ROLOGIE DIGESTIVE : L ' IMPORTANCE DES UCPO

I1 est important que les h6pato-gastroent6rologues conservent la totalit6 des activit6s pour lesquelles ils ont montr6 au fil des ann6es leurs comp6tences. La canc6rologie digestive fait partie de ces comp6tences, car nous sommes au cceur du d6pistage, du diagnostic et du traitement des cancers digestifs en g6n6ral et du cancer colorectal en particulier.

travers la mise en place d'une r6gulation des th6- rapeutiques, en r6servant certains m6dicaments uti- lis6s en chimioth6rapie aux seuls canc6rologues, progressivement une exclusion de fait des h6pato- gastroent6rologues tend ~t se mettre en place ~a et 1?~. Le plan cancer voulu par le Pr6sident de la R6pu- blique, Jacques Chirac et pilot6 par Madame Briand, veut la constitution de canceropoles qui peuvent atre la meilleure et la pire des solutions. Les canceropoles, comme les r6seaux, se justifient par la coordination

des soins autour des patients. Nous avons de tout temps 6t6 en faveur des r6seaux ; par contre, il est extr6mement fr6quent que cette volont6 louable se transforme en v6ritable filibre avec des Gatekeeper. Plus de 60% de la canc6rologie est trait6 dans le monde lib6ral. Le plan cancer tel qu'il a 6t6 pr6sent6, semble vouloir oublier ce chiffre important et cette confiance de fait que nos concitoyens font aux m6de- cins sp6cialistes lib6raux en g6n6ral et aux h6pato- gastroent6rologues, en ce qui concerne la canc6rolo- gie digestive. I1 faut donc rester vigilant, utiliser les canceropoles pour ce qu'ils sont, un lieu de concerta- tion, un lieu d'initiatives coordonn6es, un lieu per- mettant aux sp6cialistes lib6raux d'inclure leurs patients dans les protocoles. Nous avons en m6moire, une phrase de Jean Faivre, lors des derni~res assises de l'h6pato-gastroent6rologie : plus de 50 % de chi- mioth6rapie utilis6e dans le traitement du cancer du

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c61on ne correspond pas actuellement ~ une indica- tion reconnue. L'inclusion de malades du secteur lib6ral, dans les protocoles de la FFCD, est donc un enjeu important pour am61iorer la qualit6 des soins que nous devons a nos patients et faire reconna~tre notre place importante dans la prise en charge des patients atteints de cancer digestif.

Un autre moyen de prouver notre existence et notre efficacit6 est de participer voire de diriger une UCPO. Ceci permet en effet de r6ellement regrouper autour du patient toutes les comp6tences : h6pato- gastroent6rologues, oncologues, radioth6rapeutes, chirurgiens, radiologues, mais aussi personnel para- m6dical pour la prise en charge globale du patient. Le temps consacr6 est minime, les dossiers sont discut6s en commun, un relev6 de conclusions va figurer dans le dossier du patient et 6tre adress6 ~ tousles interve- nants. Outre l'int6r6t 6vident pour le patient de voir les m6decins qui le prennent en charge, dialoguer et se concerter autour de son dossier, il y a 6galement un avantage certain pour les praticiens qui est la d6fense m6dico-16gale. En effet, nous voyons r6guli~rement une mise en cause des ddcisions th6rapeutiques que

nous prenons, souvent par les families plus que par les patients, souvent a posteriori, souvent dans le cadre de distension familiale et le fait de pouvoir opposer ~ une demande 16gitime de renseignements, ?a une demande d'information,/~ une demande sou- vent moins 16gitime des raises en cause ordinale voire juridique, une d6cision coll6giale face a des demandes parfois abusives d'une famille, est la meilleure d6fense pour le praticien.

.A travers les UCPO, il est donc possible de conser- ver une coordination dans le traitement des malades atteints de pathologie canc6reuse, les diverses th6ra- peutiques sont d6cid6es en commun et l'oncologue charg6 de mettre en ~euvre la chimioth6rapie, rede- vient un des acteurs au m6me titre que le chirurgien, le radioth6rapeute...

La canc6rologie digestive est un secteur bien trop important, dans notre activit6 quotidienne, pour que nous l'abandonnions aux seuls oncologues.

Jean-Franqois REY Novembre 2003

JOURNI~ES EUROPI~ENNES : J~ L'IMAGE DE L'ACTUALITI~

Que lit-on actuellement dans la presse ? La France est le mauvais 61bve de la communaut6 europ6enne alors qu'elle en a 6t6 fondatrice : elle ne suit pas le pacte de stabilit6, mais surtout, plus grave, elle devient sous-repr6sent6e par rapport aux petits pays et ?a l 'Allemagne, au sein de la commission, de l'assembl6e et elle perd ses droits de vote. On est tent6 de faire un parall61e avec les journ6es euro- p6ennes de Gastroent6rologie.

Lors des dernibres journ6es europ6ennes de Madrid d6but novembre, la maigre participation des Franqais 6tait remarqu6e. En nombre de participants, la France arrivait derri6re la Gr6ce, la Belgique ou les Pays-Bas, juste avant le Japon ou la Pologne. I1 y a eu 2 fois moins de Franqais que d'Anglais ou d'Alle- mands et 3 fois moins que d'Italiens alors que les pays de l'Est sont arriv6s en nombre, avec des travaux de qualit6.

Certes, la participation des Franqais n'a jamais 6t6 forte lors des r6centes journ6es europ6ennes pour des raisons diverses. On peut citer entre autres, probable- ment le niveau actuel de la formation continue mise en place par les repr6sentants de la sp6cialit6, en par- ticulier lots des Journ6es Francophones, de Vid6o Digest, du s6minaire de formation de la SNFGE, ce qui limite le besoin de formation compl6mentaire. On peut 6galement citer la r6ticence classique mais r6elle de notre pays a communiquer en anglais. Mais

il existe certainement cette fois-ci un autre facteur : un certain nombre de jeunes qui avaient des pr6sen- tations/~ ces journ6es europ6ennes n'ont pu venir faute d'avoir obtenu un soutien de la part de l'indus- trie pharmaceutique, qui n'a pas senti que les m6de- cins franqais 6taient int6ress6s et qui n'y a pas vu son intdr~t.

Une question se pose : est-ce utile d'aller aux jour- n6es europ6ennes ? Certes le contenu scientifique innovant des journ6es europ6ennes a toujours 6t6 consid6r6 comme maigre. Mais cela n'est plus tout fait exact : il y a eu de tr6s bonnes pr6sentations Madrid avec une discussion constructive. Par ailleurs, ces journ6es sont 6galement un lieu d'6changes et de renforcement des liens entre les diff6rentes 6quipes europ6ennes, beaucoup plus adapt6 que pendant la grande loire de la DDW am6ricaine. I1 faut encoura- ger les jeunes a conna~tre les autres Europ6ens et collaborer avec eux. De plus les industriels viennent voir les Europ6ens et prennent du temps pour eux, ce

~ ui n'est pas le cash I'AGA. Enfin, il n'est pas inter- it de penser que le contenu scientifique des journ6es

europ6ennes s'am61iore avec le temps (il commence le faire), et il serait dommage que la France ne

contribue pas a cette am61ioration. Comme il serait dommage que du fait de leur faible participation, les Franqais ne puissent plus pr6tendre ~t rentrer dans les instances d6cisionnelles comme le ~ board >> des soci6t6s et des journaux europ6ens (certes, il y aura

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