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1 PROGRAMME ELECTORAL 2019 VOULOIR L’EUROPE ! Mai 2019

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PROGRAMME ELECTORAL 2019

VOULOIR L’EUROPE ! Mai 2019

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VOULOIR L’EUROPE !

12 priorités

Table des matières Introduction ....................................................................................................................................... 4 1. UNE EUROPE HUMAINE, DURABLE ET RESPONSABLE ................................................................ 6 PrioritÉ 1 : Bâtir un nouveau modèle de développement .................................................................... 8

1. Construire une politique alimentaire commune ...................................................................... 9 2. Développer un programme européen d’investissement axé sur la transition ........................ 11 3. Promouvoir l’innovation, l’éducation et la recherche ............................................................ 13 4. Soutenir la création de géants du numérique ....................................................................... 15 5. Réorienter la politique commerciale ..................................................................................... 16

PrioritÉ 2 : Mener le combat pour la protection de l’environnement et du climat ......................... 19 1. Mettre en œuvre le marché intérieur de l’énergie ................................................................ 20 2. Investir dans les technologies à faibles émissions et les énergies renouvelables ................... 20 3. Décarboner notre mobilité ................................................................................................... 21 4. Mettre en place une contribution carbone ........................................................................... 22

PrioritÉ 3 : Contribuer au developpement de nos voisins ................................................................ 23 1. Négocier un partenariat étroit avec le Royaume-Uni pour nos étudiants et nos entreprises.. 24 2. Construire un espace de co-développement avec l’Afrique ................................................... 25

2. UNE EUROPE SOLIDAIRE ET JUSTE ........................................................................................... 26 PrioritÉ 4 : Renforcer l’Union économique et monétaire ................................................................ 28

1. Donner à la zone euro son propre budget ............................................................................. 28 2. Réformer la gouvernance de la zone euro ............................................................................. 29

PrioritÉ 5 : Construire une politique fiscale commune..................................................................... 30 1. Mettre en place un impôt des sociétés européen ................................................................. 31 2. Poursuivre la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales ........................................................ 31 3. Établir une taxe sur les transactions financières .................................................................... 32 4. Soumettre les GAFAM à la juste contribution ....................................................................... 33 5. Prévoir un « budget-climat » ................................................................................................ 33

PrioritÉ 6 : Prévoir un pacte social pour la transition....................................................................... 34 1. Mettre en place un Fonds européen pour l’emploi ............................................................... 35 2. Assurer une transition juste pour les travailleurs .................................................................. 35 3. Améliorer la santé de tous les Européens ............................................................................. 36 4. Stimuler l’investissement social ............................................................................................ 37 5. Garantir un meilleur équilibre de vie .................................................................................... 38

PrioritÉ 7 : CrÉer des nouvelles opportunitÉs, renforcer les liens entre citoyens ............................. 39 1. Mettre en place un droit européen à la formation ................................................................ 39 2. Créer des universités européennes ....................................................................................... 39 3. Élargir le programme #discoverEU à tous les jeunes de 18 ans .............................................. 39

PrioritÉ 8 : Apporter une rÉponse humaine au dÉfi de la migration ................................................ 40 1. Assurer la solidarité européenne par une réforme du mécanisme de Dublin ......................... 40 2. Créer une agence européenne de l’asile ............................................................................... 41 3. Mettre en place des voies légales de migration économique ................................................ 42

3. UNE EUROPE FORTE ET ENGAGEE ............................................................................................ 43

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Priorité 9 : Renforcer le multilateralisme et le rôle de l’UE dans les instances internationales ...... 45 1. Œuvrer pour une réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies ..................................... 46 2. Mettre fin à l’unanimité en matière de politique étrangère et parler d’une seule voix .......... 46 3. Négocier un pacte mondial sur l’environnement et œuvrer pour la mise en place d’une agence de l’environnement au niveau international ..................................................................... 46 4. Coordonner la finance internationale ................................................................................... 47

Priorité 10 : Bâtir la défense européenne ........................................................................................ 47 1. Créer une force commune d’intervention d’ici 2030 ............................................................ 48 2. Créer une Cyber brigade commune ...................................................................................... 49 3. Lutter contre le terrorisme et le crime organisé .................................................................... 49 4. Améliorer le droit des victimes d’actes de criminalité ........................................................... 51

4. UNE EUROPE CITOYENNE ET TRANSPARENTE .......................................................................... 52 Priorité 11 : Renforcer la démocratie et faire respecter l’état de droit ........................................... 54

1. Mettre en place un registre de transparence tripartite obligatoire........................................ 54 2. Renforcer la légitimité démocratique du Président de la Commission européenne ............... 54 3. Donner au Parlement européen le droit d’initiative législative .............................................. 55 4. Renforcer les mécanismes qui assurent le respect des valeurs fondamentales de l’union ..... 55

PrioritÉ 12 : Encourager le dialogue, l’initiative et le débat ............................................................. 56 1. Adopter des mesures de soutien au plaidoyer citoyen .......................................................... 56 2. Renforcer l’initiative citoyenne européenne ......................................................................... 56 3. Permettre aux citoyens d’interpeller directement le comité fédéral sur les questions européennes ................................................................................................................................ 57

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« Ne désespérez pas, ils vont trouver des formules, des moyens technologiques qu’on n’imagine pas aujourd’hui » Philippe MAYSTADT

INTRODUCTION

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les fondateurs ont voulu l’Europe pour conjurer la guerre. Cette promesse, l’Europe l’a tenue, engageant ses membres dans une longue période de prospérité économique, qui a permis notamment le développement d’un haut niveau de protection sociale. L’Union européenne est ce projet ambitieux et unique, une tentative d’instauration de démocratie supranationale, l'initiative de paix la plus importante et la plus réussie de notre temps. L’Europe, c’est aussi la mise en place progressive d’un espace de liberté, de sécurité et de justice dont la Charte des droits fondamentaux constitue le socle.

Ce modèle est désormais en péril. Non seulement la construction européenne ne connait plus de nouvelles étapes qui portent son destin, mais elle régresse même avec le souhait d’un de ses États membres de la quitter. Les valeurs fondatrices de l’Europe – démocratie et participation, justice, solidarité, développement durable, promotion de droits de l'homme – sont fragilisées. Incohérences, crise financière, réponse désunie à l’arrivée de migrants, Brexit : le doute s’est insinué. Le fonctionnement actuel de l’Union convainc de moins en moins. La confiance dans l’UE s’étiole, très nettement dans plusieurs pays, avec une montée en puissance des extrémismes. Continuellement présentée comme source de tous les maux nationaux dans les médias, ou par certains gouvernements incapables d’assumer leur décision au niveau européen, l’Europe peine à se faire aimer. Pire : elle donne l’impression de ne pas être à même de pouvoir apporter des solutions. Une Europe qui n’est plus à la hauteur de ses promesses et des attentes de ses citoyens perd de sa légitimité.

Les crises traversées nous commandent de renforcer l’Europe. Car c’est précisément quand l’Europe et ses valeurs fondatrices ont reculé que ces crises se sont développées. Vouloir moins d’Europe, c’est amplifier les problèmes rencontrés au lieu de les résoudre : le repli, le nationalisme, l’absence de solidarité nous feront perdre prise sur la marche du monde.

« Il est temps de rallumer les étoiles ». Les populistes jouent sur la nostalgie du passé, sur le fait que "c'était mieux avant". Pour contrer cela, il faut donner une vision d'espoir et montrer que la lumière est devant.

Plusieurs chemins sont possibles pour renforcer l’Union des Européens. Nous avons choisi le nôtre. Vouloir plus d’Europe, c’est restaurer le projet européen dans ses ambitions. C’est rappeler que la culture, la connaissance, la création et l’innovation sont le ciment d’un projet dont la vraie nature va bien au-delà du marché unique.

L’urgence n’est pas de réfléchir à une nouvelle Constitution pour l’Europe, mais bien de répondre directement aux défis qui se présentent à nous. La plupart des grands défis auxquels nous sommes confrontés ne peuvent en effet trouver de solution efficace et pertinente qu’au niveau européen.

Quatre défis

Pour être à la hauteur de cette ambition forte, l’Europe doit relever 4 défis majeurs :

1. Le défi économique et de l’emploi. Celui d’organisations à réinventer à l’heure où l’ère digitale accélère les mutations. Si ces changements sont porteurs de croissance et de nouveaux emplois, ils en suppriment également. Les politiques doivent accompagner cette transition et ne pas la subir. Comme humanistes, notre conviction est que l’avenir n’est pas à craindre, mais à inventer.

2. Le défi technologique. Les nouvelles technologies et le numérique ouvrent des perspectives, mais risquent d’accentuer les injustices. Les changements technologiques sont en train de révolutionner nos vies. Ces changements affectent également la politique et nos démocraties

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européennes. Le développement technologique et numérique est d’importance stratégique face aux grandes puissances et seule une Europe unie et tournée vers des objectifs communs aux 27 états membres permettront à l’UE de se maintenir à la pointe du développement.

3. Le défi climatique. Enrayer le réchauffement climatique postule une transformation profonde de nombreuses dimensions de nos vies quotidiennes : habitat, mobilité, énergie, travail, alimentation… opportunité développer de nouvelles activités et pour améliorer notre qualité de vie et pour réorienter notre économie vers des développements alternatifs en matière alimentaire, énergétique, de mobilité, etc.

4. La place de l’Europe dans le monde. Là encore : soit nous sommes ensemble soit nous serons marginalisés dans le monde de demain. Le monde est devenu plus imprévisible et plus que jamais traversé par un repli sur soi et par un retour à l’isolationnisme ainsi que par des vues à court terme. Nous ne pouvons pas laisser cet enjeu à des puissances qui ne partagent pas nos valeurs, notre souci pour le bien commun et notre attachement au multilatéralisme doivent être le moteur mondial pour un monde meilleur. Seule l’Europe pourra “réformer la mondialisation” en cherchant clairement à concilier le développement social et écologique de l'humanité avec son développement économique : la voie du développement humain.

Notre feuille de route

C’est de ce constat qu’est née notre feuille de route pour une Europe plus forte et humaine. Nous proposons un plan en 12 priorités pour accroître l’adhésion et la qualité de vie des citoyens et initier une nouvelle dynamique vertueuse pour l’Union. Nous voulons donner priorité à quatre projets :

• L’affirmation d’un leadership mondial pour le développement humain, orienté vers la qualité de vie.

• La création d’un authentique espace social européen en renforçant les mécanismes de solidarité et de protection, au service du bien-être et de l’emploi de ses citoyens.

• La sécurité et la protection des droits humains par une gestion des frontières et une défense commune.

• La consolidation de l’Europe comme véritable espace démocratique.

Notre vision

Pour faire progresser cet agenda, l’UE a besoin d’avancer vers la formation de noyaux durs portant sur les enjeux qui représentent les priorités des citoyens européens. Cela implique d’une part, l’intégration plus poussée pour la zone euro et l’approfondissement du marché unique, la défense des compétences exclusives dans les domaines essentiels des politiques de la concurrence et de l’autre, la constitution de noyaux durs, volontaires et ouverts. Ces multiples communautés politiques permettraient des formes d'intégration plus avancées entre les États membres, ceux qui partagent les mêmes objectifs et sont prêts à les réaliser dans un cadre de coopération.

Dans un monde devenu hyper connecté et interdépendant où aucune nation européenne ne peut plus se dire « souveraine », seule l’Europe, forte d’une monnaie et d’une défense communes, peut nous donner une capacité d’action face aux grands défis contemporains.

Certes il reste encore bien des écueils à franchir. L’avenir nous appartient. À nous de réenchanter le projet européen en rendant sa centralité à la personne humaine. Éveillons le désir citoyen en lui ouvrant des horizons sur la monnaie, clé du modèle européen, et sur la défense, clé de la puissance. À nous de marquer l’Europe d’une nouvelle empreinte sociale et durable. Quand le réalisme conduit à l’impasse, osons l’idéalisme.

Faire aboutir rapidement des projets concrets renforcera l’adhésion des citoyens et le consensus pour franchir de nouvelles étapes dans la construction institutionnelle. D’abord recréer la confiance dans les domaines essentiels, pour exorciser l’idée que l’Europe serait la cause de tous nos maux, pour enraciner la conviction qu’elle est, au contraire notre avenir. À tous.

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1. UNE EUROPE HUMAINE, DURABLE ET RESPONSABLE

Diagnostic

Le World Happiness Report1 établit un classement des pays les plus heureux du monde en fonction de six indicateurs : produit intérieur brut par habitant, espérance de vie en bonne santé, liberté, générosité, aide sociale et perception de la corruption dans le gouvernement ou les affaires.

Les pays heureux sont ceux qui jouissent d’un équilibre sain entre la prospérité, mesurée de manière conventionnelle, et le capital social, qui signifie un degré de confiance élevé dans une société, des inégalités faibles et la confiance dans le gouvernement. Le bonheur est considéré la mesure appropriée du progrès social et l’objectif de la politique publique.

D’après le dernier rapport, cinq pays parmi les premiers dix sont des Etats membres de l’Union européenne. Plus globalement, sur les premiers vingt-cinq pays du classement, quatorze sont des pays européens. Au sein de l’UE, on a plus de chances d’être heureux.

Si la plupart des pays européen arrivent en tête du classement, d’autres tels que la Bulgarie notamment s’y retrouvent au fond.

Dans des pays comme la Bulgarie ou la Hongrie, le nombre moyen d'années en bonne santé perdues à cause de la pollution atmosphérique est supérieur à celui constaté en Chine ou en Inde.

Le chemin de la convergence entre les pays européens est donc encore long.

Les scientifiques s’accordent à dire que l’augmentation de la température moyenne mondiale au cours du siècle dernier est due en grande partie aux émissions de gaz à effet de serre, principalement provoqués par la combustion d’énergie fossile et les changements d’utilisation des sols, comme la déforestation. Dans son dernier rapport, le GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat

1 John F. Helliwell, Richard Layard and Jeffrey D. Sachs, World Happinness Report, 20 mars 2019.

fait état d’une concentration de CO2 et autre gaz à effet de serre atteignant des niveaux sans précédent.

Sans décarbonisation rapide de l’économie mondiale, le climat devrait se réchauffer globalement de 3, voire 4° ce qui engendrera de graves conséquences telles que la montée du niveau des mers, l’intensification de la désertification s’intensifiera ou encore l’accentuation de la famine.

À tel point que le coût de l’inaction sera, à terme, bien plus important que le coût des mesures à prendre dès aujourd’hui pour limiter nos émissions de gaz à effet de serre. Dès 2006, le rapport Stern tirait la conclusion qu’investir 1% du PIB annuel suffirait à atténuer fortement les effets du réchauffement climatique, tandis que les coûts et les risques globaux engendrés par celui-ci conduiraient à une perte annuelle d’au moins 5% du PIB mondial. Selon un rapport publié par la Banque mondiale en 2013, les pertes et dommages annuels liés à des événements climatiques sont passés de 50 milliards dans les années 1980, à près de 200 milliards au cours de la décennie précédente.

Pour le GIEC il faudrait, afin d’atténuer cette tendance, limiter la hausse de la température mondiale à 1,5° maximum conformément aux objectifs de l’accord de Paris. Pour ce faire, les émissions mondiales de CO2 doivent chuter drastiquement dès avant 2030 (-45%) et atteindre une « neutralité carbone » en 2050.

La Commission européenne a proposé le 28 novembre dernier sa stratégie en faveur d’une Europe neutre en carbone en 2050. Cette stratégie confirme l'engagement de l'Europe à prendre la tête de l'action pour le climat au niveau mondial.

Le principal instrument politique à disposition de l’UE pour atteindre ses objectifs climatiques est le système communautaire d’échange de quotas d’émission de l’UE (SCEQE). Ce dernier

https://s3.amazonaws.com/happiness-report/2019/WHR19.pdf

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couvre environ 45% des émissions de gaz à effet de serre (GES) induites par la production d’énergie, l’industrie et l’avion dans les pays de l’Union et de l’espace économique européen. En donnant aux émissions de gaz à effet de serre une valeur économique, ce mécanisme incite les pollueurs à intégrer ce prix dans leurs décisions et à arbitrer, entre leurs choix de production : soit réduire les émissions et revendre les quotas non utilisés si le coût des investissements pour réduire les émissions est inférieur au coût des quotas équivalents ; soit acheter des quotas couvrant la totalité des émissions si les investissements nécessaires à une réduction des émissions sont trop élevés. L’Europe décide ainsi de mettre en place une politique ambitieuse de lutte contre le changement climatique avec l’idée-clé que l’investissement réduirait les émissions de carbone. Aujourd’hui, à cause notamment du trop grand nombre de quotas attribués gratuitement, le prix d’une tonne de C02 est d’environ 5 euros. Ce prix est trop faible pour inciter clairement à la réduction des émissions.

L’objectif de décarbonisation de l’UE à l’horizon 2050 ne pourra pas être atteint sans une transformation majeure de notre économie, de la fourniture d’énergie, de notre mobilité, de notre alimentation.

Vision

L’Europe doit être à l’avant-garde de la transformation des modes de vie et de production pour lutter contre le changement climatique et protéger notre qualité de vie, notre santé et notre modèle social. Une société durable est une société où l’activité économique et sociale est compatible avec les limites de la planète et répartie équitablement entre ses citoyens.

Nous proposons un Pacte pour une Europe durable pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Ce pacte poursuit trois objectifs : lutter contre le changement climatique en poursuivant les objectifs européens ambitieux en matière de transition durable, renforcer la compétitivité et le potentiel d’emploi des industries européennes en stimulant les investissements dans les

secteurs qui seront au cœur de l’économie de demain ; garantir une transition juste.

Viser une croissance durable en Europe implique de relever le taux d’investissement et de l’orienter dans le sens de la qualité de la croissance.

La nécessité de relancer les investissements ne fait aucun doute, mais il est indispensable de s’interroger sur le type d’investissements que l’on souhaite réaliser. Le choix de ces investissements à réaliser nous projette en effet sur la nature du développement économique, social, environnemental, en un mot : humain, que nous souhaitons pour l’Europe.

L’Union européenne a une responsabilité majeure et première : celle de continuer à montrer l’exemple, d’être un leader pour développer cette dynamique vertueuse entre une économie riche d’activités et d’emplois, une protection sociale performante et un environnement sain.

Réussir cette transition vers une Europe durable implique de veiller à la cohérence de l’ensemble de ses politiques : l’alimentation et l’agriculture, la mobilité, l’économie, et l’énergie, le commerce. Comme des pièces d’un même rouage, ces politiques doivent toutes poursuivre des objectifs ambitieux au service de la durabilité.

Ces changements ne doivent pas être considérés comme de nouvelles contraintes, mais comme une opportunité de mettre en place une politique de transition durable basée sur une économie (re)localisée. Cette économie doit faire des objectifs sociaux et environnementaux européens un atout.

À l’horizon 2030, de nouveaux modes d’entreprises verront le jour. L’économie sera nécessairement circulaire, axée sur l’usage plutôt que la propriété, la valorisation de chaque déchet, la réutilisation, le recyclage et l’absence d’obsolescence précoce.

L’Europe sera pleinement autonome en énergie, en matières premières et en aliments. Le recours privilégié aux ressources locales, en ce compris pour ce qui est des espèces végétales et animales, sera la règle, non pas dans un esprit de repli sur soi, mais afin de

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renforcer les capacités locales et de minimiser l’impact des modes de consommation et de production sur les ressources du reste du monde.

Chaque personne aura accès à une alimentation suffisante, saine, de bonne qualité nutritionnelle et diversifiée, répondant à ce besoin essentiel de l’être humain. Cette alimentation privilégiera les produits locaux et sera issue d’un système agroalimentaire inclusif et équitable, respectueux de l’aliment, de l’homme et de l’environnement, et basé sur le principe de la souveraineté alimentaire. Les différents maillons du système auront réduit de façon substantielle le niveau de gaspillage et pertes alimentaires, et coopéreront pour créer plus de prospérité.

La qualité de l’air, de l’eau et des sols sera conforme aux ambitions les plus élevées grâce à la baisse des émissions de polluants dans tous les secteurs, tels que l’oxyde d’azote, les particules fines, les perturbateurs endocriniens, les nitrates ou les phosphates.

L’Europe anticipera les changements futurs en prenant des mesures pour diminuer sa vulnérabilité et augmenter sa résilience et sa capacité d’adaptation. Elle permettra aux secteurs et aux citoyens les plus exposés de s’y préparer et de s’y adapter.

Le bon fonctionnement des institutions ainsi que le bon état de santé et d’éducation de la population et le faible niveau des inégalités sociales permettront d’assurer des chances égales à tous et offriront les conditions propices pour permettre aux générations futures de s’épanouir individuellement et de participer pleinement au développement de la société.

Au niveau du capital économique, le stock d’équipements et d’infrastructures, qui représente les capacités de production futures d'un pays, présentera un niveau et des caractéristiques garantissant le bon fonctionnement et la compétitivité de l’économie et la satisfaction des besoins des citoyens, et leur qualité de vie, sans générer d’impacts environnementaux et sociaux négatifs. Cela sera renforcé par les investissements soutenus en recherche et

développement qui s’inscriront également dans cet objectif.

En 2030, l’Europe veillera à la cohérence de l’ensemble de ses politiques pour parvenir à un développement durable au niveau planétaire.

Ainsi, elle sera engagée dans un commerce international reposant sur des échanges équitables contribuant à la fois au développement socio-économique de l’Europe et à celui de ses partenaires commerciaux, notamment dans le respect des droits de l’homme, et dans un souci de préservation de l’environnement.

Nous avons exposé notre vision de l’Europe et notre ambition à l’horizon 2030. Pour y arriver il faut dès à présent poser des actes concrets et mettre en place des changements de nos politiques.

L’Europe a réussi à préserver la paix, aujourd’hui elle doit être un modèle en matière de développement économique de normes environnementales, de protection de la santé et être garante d’une alimentation de qualité.

Pour que le projet européen soit durable, il doit être ambitieux au niveau de ses politiques intérieures mais aussi vis-à-vis des autres pays et régions du monde. C’est notre responsabilité.

PRIORITÉ 1 : BATIR UN NOUVEAU MODELE DE DEVELOPPEMENT

L’UE a besoin d’une nouvelle stratégie de développement à moyen terme, cohérente et holistique capable d’orienter son action vers des objectifs partagés, en surmontant les résistances nationales, et de créer les meilleures conditions pour l’emploi, la croissance et le bien-être dans chaque État membre.

Il s’agit de construire une dynamique vertueuse entre le développement économique, social et environnemental européen : le développement humain. Un développement qui place le lien entre les êtres humains au cœur du modèle, alors même que

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l’individualisme et le consumérisme semblent guider trop souvent nos actions.

Un développement qui ne place pas la quantité de biens produits et consommés comme l’unique objectif commun, mais bien la croissance de la qualité de vie. En attachant davantage d’attention au développement endogène, ancré dans nos territoires, qu’au développement exogène basé surtout sur les investissements étrangers, vite arrivés, mais aussi vite partis. Un modèle qui considère les liens et les contacts humains comme essentiels à la solidarité. Un modèle qui tend à préserver nos ressources naturelles en recherchant l’adhésion et le rassemblement du plan grand nombre, plutôt que l’opposition entre clans. Voilà le modèle de développement qui donne du sens au projet européen.

Cette nouvelle stratégie doit viser avant tout la mise en place une véritable politique industrielle fondée sur l’innovation et la recherche pour faire de nos entreprises les leaders mondiaux de l’énergie propre. Elle place l’investissement dans des secteurs stratégiques au cœur de l’agenda politique européen. Ces investissements doivent intégrer pleinement les objectifs de la transition durable.

Elle doit également encourager la stimulation d’une économie plus humaine par une réorientation de la production et de la consommation encourageant la transition vers un modèle éco-efficient. Cette nouvelle stratégie devrait reposer sur trois piliers : -le pilier de l’investissement ; -le pilier de l’innovation, au travers de l’éducation et de la recherche ; -le pilier du marché intérieur.

La nouvelle dynamique économique européenne, en particulier en ce qui concerne les activités industrielles, ne peut reposer que sur des entreprises innovantes et économes en ressources. Si l’Europe veut atteindre un modèle de croissance « inclusive et durable », elle doit inciter ses entreprises à une utilisation efficace des ressources. Cet objectif est bénéfique tant pour l’environnement que pour notre économie. L’Europe est plus dépendante des ressources importées que toute autre région du monde. Au total, 40% des matériaux utilisés dans l’UE sont importés. Ce

pourcentage est beaucoup plus élevé pour certaines ressources stratégiques. De nouveaux modèles économiques tels que l’économie circulaire ou l’économie de la fonctionnalité doivent être encouragés. L’amélioration de l’efficacité dans l’utilisation des ressources passe par un détachement de l’économie linéaire actuelle, basée sur un modèle de production et consommation, consistant à extraire, fabriquer, utiliser et jeter. Dans une économie circulaire, tous les matériaux utilisés dans la fabrication d’un produit sont récupérés, traités, recyclés et réintégrés au maximum dans le cycle de production sous forme de matières premières secondaires et/ou d’énergie. L’Europe se doit de jouer un rôle de leader dans ces évolutions. Relevons que l’articulation entre ces différents piliers et structurée autour de secteurs-clés est de nature à définir cette véritable stratégie industrielle européenne souvent invoquée dans de nombreux débats, mais rarement identifiée et, surtout, mise en œuvre.

Enfin, les infrastructures, la recherche et développement, ainsi que l’apport en capital humain, conçus dans une perspective transnationale, sont à la base d’une intégration pouvant conduire à un renforcement de la conscience de la citoyenneté européen.

Actions

1. CONSTRUIRE UNE POLITIQUE ALIMENTAIRE COMMUNE

L’agriculture et l’alimentation de qualité doivent devenir l’épine dorsale du développement économique durable européen. Le modèle agricole actuel est trop vulnérable aux chocs économiques et aux phénomènes météorologiques extrêmes de plus en plus fréquents en raison du changement climatique et de la dégradation naturelle ; et ne garantit pas suffisamment la qualité de notre alimentation. Les coûts environnementaux liés aux pratiques agricoles intensives restent trop élevés. La transition vers des modèles plus durables devra être davantage soutenue par la Politique Agricole Commune. Elle rendra le secteur plus résilient,

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renforcera la souveraineté alimentaire de l’Europe et améliorera la santé des agriculteurs ainsi que celle des consommateurs.

L’immense majorité des agriculteurs en Europe est dépendante des aides reçues de l’Union, lesquelles soutiennent également des mesures de soutien aux services environnementaux rendus par les agriculteurs. La conséquence en est malheureusement aussi le maintien de prix bas sur les marchés de ces produits agricoles, dont profite l’industrie agroalimentaire. À cela s’ajoute un accroissement considérable de la volatilité des prix et donc des revenus des exploitants.

La politique agricole commune doit devenir une politique européenne pour la qualité de l’alimentation. Une telle transition constituerait également le choix le plus judicieux sur le plan économique, étant donné que des études démontrent un appétit croissant des consommateurs pour les produits fabriqués dans l'UE en recourant à des pratiques culturales et d’élevage durables. Nous devons aider les agriculteurs à investir dans une agriculture qui génère plus de revenus pour eux, les protège des changements erratiques sur le marché et valorise leurs pratiques durables et résilientes.

L’alimentation est à la croisée de nombreux enjeux sociétaux. Elle constitue tout d’abord un besoin fondamental des êtres humains, reconnu par le droit à l’alimentation. Elle est essentielle à la qualité de vie et à la santé publique. Elle joue par ailleurs un rôle de premier ordre en termes de développement économique et de création d’emplois ainsi que dans la préservation et l’amélioration de notre environnement (ressources naturelles, biodiversité, climat).

Le système alimentaire largement dominant actuellement au niveau mondial, et y compris en Europe, montre cependant de manière de plus en plus critique des signes de sa non-viabilité à long terme. Le système alimentaire est industriel et basé sur l’approvisionnement des marchés internationaux en aliments à faible coût financier. Les conséquences de ce système sont de plus en plus manifestes : des revenus insuffisants pour les producteurs, une volatilité élevée des prix, un impact de plus en

plus lourd sur la biodiversité et sur l’épuisement des terres, des problèmes de santé et de mauvaise nutrition.

Nous souhaitons dès lors soutenir une transition vers un système alimentaire plus durable en Europe.

Concrètement, nous proposons de :

- Définir une réglementation plus stricte et restrictive sur les pesticides, adopter un plan de réduction et interdire les OGM à échelle européenne ;

Ce modèle permettra de continuer à mettre en avant le territoire européen et la qualité des produits alimentaires qui en sont issus.

- Revoir les critères d’allocation des aides agricoles du premier pilier de la PAC

En tenant compte d’un ensemble de critères : intensité de travail, taille de l’exploitation, spécificités régionales, coûts de production (énergie, main-d’œuvre).

- Appliquer le principe de confiance et diminuer la charge administrative.

- Mettre en place un Observatoire européen du foncier agricole pour procéder à une évaluation des coûts de production et moduler les aidés en conséquence.

- Revoir l’accord de Blair House fixant un plafond de production d'oléagineux et de protéagineux dans l'Union européenne. Nous proposons de doter la PAC de mesures complémentaires pour soutenir la culture de protéines végétales, de créer des mécanismes de couverture des risques pour les agriculteurs innovants.

- Mettre en place un système de mutualisation des risques pour faire face aux aléas climatiques.

Pour améliorer les régimes alimentaires, il faut repenser toute une gamme de politiques.

Nous proposons à court terme de :

- Exonérer les fruits et les légumes de la TVA.

- Mettre en place un programme commun obligatoire d’informations nutritionnelles sur le devant des emballages au niveau de l’UE.

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- Des profils nutritionnels devraient enfin être établis pour s'assurer que les aliments et les boissons riches en matières grasses, en sucre et en sel ne peuvent plus prétendre être bénéfiques pour la santé.

- Mettre en place un Plan d’action de lutte contre l’obésité infantile dans l’UE pour l’après 2020 avec des mécanismes de suivi.

- Soutenir la mise en place de Plans nationaux pour une alimentation saine.

- Veiller à ce que la passation de marché public soutienne l’agriculture durable et une alimentation saine en i) exigeant que les externalités soient inclues dans le calcul des coûts ; et ii) en incluant la durabilité alimentaire et les lignes directrices nutritionnelles dans les directives sur les marchés publics « verts ».

Nous proposons à plus long terme de :

- Mettre en place une directive de l’UE sur le marketing des produits à forte teneur en matières grasses, en sel ou en sucre et des aliments hautement transformés, y compris des interdictions pour la publicité télévisuelle; interdiction de la publicité pour les produits à forte teneur en matières grasses, en sel ou en sucre dans les transports publics; interdiction des produits à forte teneur en matières grasses, en sel ou en sucre dans les distributeurs automatiques publics et aux caisses des supermarchés; périmètres d’exclusion des produits à forte teneur en matières grasses, en sel ou en sucre aux alentours des écoles; et restrictions sur le marketing numérique.

La sécurité de notre chaine alimentaire dépend aussi étroitement du respect de la santé animale, de leur mode d’élevage, de leur alimentation et donc de leur bien-être. Des animaux qui font l’objet de traitements antibiotiques systématiques et qui se retrouvent dans nos assiettes et contribuent à la hausse significative des résistances aux antibiotiques à laquelle doivent faire face les autorités de santé.

Nous proposons de :

- Mettre en place label spécifique « bien-être animal » garantissant aux consommateurs des méthodes d’élevage plus respectueuses.

2. DEVELOPPER UN PROGRAMME EUROPEEN D’INVESTISSEMENT AXE SUR LA TRANSITION

Investir, c’est projeter nos sociétés vers l’avenir. L’investissement doit anticiper les besoins et les produits d’avenir. Pour cela, il faut créer un espace de marché attractif afin d’inciter les entreprises à développer les biens et services socialement souhaitables, à les proposer aux meilleures conditions et à investir dans ce but.

La Commission Juncker a fait de la relance des investissements une priorité. Malgré les la prise de conscience que cette démarche a suscitée, le Plan Juncker n’a pas réussi à mobiliser suffisamment d’investissement. Il ne s’agit pas d’un programme européen susceptible de transformer la croissance.

Fin 2017, la Cour des comptes européenne exprimait son scepticisme quant aux plans d’action qui affichent des objectifs très ambitieux, mais attendent le miracle de dernière minute pour les atteindre. Elle demandait alors aux États membres d’investir collectivement au moins 1.115 milliards d’euros chaque année dans le climat.

Pour le cdH, trois secteurs clés doivent en particulier concentrer l’attention dans cette stratégie d’investissement : l’économie numérique, le transport et l’énergie. Trois secteurs dans lesquels l’Europe disposait d’une longueur d’avance avant d’être rattrapée progressivement puis dépassée par ses concurrents d’autres parties du monde.

L’économie numérique est essentielle, puisque l’imprégnation des nouvelles technologies dans les autres segments de l’économie en fait une source majeure d’amélioration de la productivité. Quant aux secteurs du transport et de l’énergie, ils constituent non seulement le noyau initial de la construction européenne, mais, surtout, sont déterminants pour le type de croissance souhaitée pour l’avenir, tant en Europe que dans le monde et pour atteindre

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l’objectif d’une Europe durable à l’horizon 2050.

Faire émerger l’Europe comme leader dans ces secteurs clés est donc un enjeu essentiel, tant pour l’avenir de l’économie que pour la qualité de vie des citoyens européens. Les investissements publics doivent accompagner cette transition. Bref, c’est une réelle stratégie industrielle européenne tournée vers le développement humain dont nous avons besoin.

Concrètement, nous proposons de :

- Faire évoluer le Fonds européen pour les investissements stratégiques, logé au sein de la Banque européenne d’investissement pour qu’il puisse financer que des projets en lien avec la transition durable. Ce fonds « Environnement Climat » serait capitalisé par un budget européen et placé sous l’égide du Parlement européen. Les banques publiques d’investissement de tous les pays européens pourraient entrer dans son capital, pour pouvoir participer à la sélection et coordination des projets. Un tel fonds doté d’un capital de 60 milliards d’euros serait en mesure d’émettre des euro-obligations pour attirer les investisseurs en vue de financer un programme de 500 milliards d’euros.

L’effet d’entraînement sur l’investissement privé pourrait être encouragé par la BCE au travers de sa politique d’assouplissement budgétaire.

Sur le long terme, nous voulons mettre en place une véritable banque européenne pour le climat.

- Mieux valoriser les investissements

L’enjeu des investissements doit être analysé de manière distincte dans le cadre de l’analyse des politiques macroéconomiques des États membres. Pour deux raisons. D’une part, il s’agirait d’éviter que, dans le souci d’atteindre leur objectif de déficit, les États membres ne sacrifient des dépenses d’investissement. La tentation est forte et de nombreux gouvernements y ont succombé : comme le Pacte de stabilité ne fait aucune distinction entre dépenses courantes et dépenses d’investissement, autant réduire d’abord ces dernières puisqu’il est électoralement moins

gênant de retarder un investissement en recherche ou en infrastructure que de diminuer une allocation sociale ou un subside de fonctionnement.

Dans le cadre du « semestre européen », le Conseil adresse des recommandations à chaque État membre ; celles-ci pourraient inclure une recommandation sur le niveau minimum d’investissements publics à maintenir sur le moyen terme (pas nécessairement le même pour chaque État membre). Ensuite, dans l’avis qu’elle doit remettre à chaque État membre sur son projet de budget pour l’année à venir, la Commission pourrait vérifier si cette recommandation est respectée.

D’autre part, le traitement plus systématique et plus approfondi de l’enjeu des investissements publics dans le cycle budgétaire européen pourrait favoriser une meilleure coordination des programmes d’investissements nationaux. Ce serait particulièrement utile dans le secteur des transports.

- Revoir les règles de surveillance budgétaire pour éviter qu’elles ne pénalisent l’investissement public.

Plusieurs gouvernements viennent d’en faire l’amer constat : les conséquences sur l’investissement public de l’application stricte des normes comptables européennes SEC 2010 sont énormes. En effet, il est désormais obligatoire que les dépenses d’investissement soient imputées directement et en totalité sur le déficit de l’année durant laquelle ces dépenses sont réalisées. Il n’est plus possible de considérer que ces dépenses d’investissement puissent s’amortir sur plusieurs années. Si l’on doit imputer sur une seule année le coût d’investissements amortis en moyenne sur 6 années, il est à craindre qu’à déficit constant, les investissements publics ne diminuent par un facteur 6. Bel exemple de schizophrénie européenne !

Le cdH propose de déterminer une catégorie d’investissements publics prioritaires qui n’entreraient pas en compte pour l’application de la règle de réduction de la dette fixée par l’article 4 du TSCG (l’écart par rapport à la

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valeur de référence – 60% du PIB – doit se réduire sur trois années à un rythme moyen d’un vingtième par an). Pour entrer dans cette catégorie, un investissement public devrait satisfaire simultanément à trois critères :

1) un critère d’intérêt européen : l’investissement doit être considéré comme d’intérêt commun européen au sens de la Communication de la Commission du 13 juin 2014, ce qui implique notamment qu’il contribue à la réalisation d’un ou plusieurs objectifs de l’Union européenne et qu’il présente un caractère transnational, le cas échéant avec la participation de plusieurs États membres ;

2) un critère de rentabilité économique : l’investissement doit atteindre un niveau minimum d’ERR (« economic rate of return »), calculé selon la méthodologie développée par la BEI ;

3) un critère de soutenabilité : l’investissement doit faire appel aux technologies les plus avancées de manière telle qu’il limite autant que possible la consommation de ressources naturelles et l’émission de gaz à effet de serre.

La vérification de ces critères serait confiée à un Comité budgétaire européen composé de représentants des institutions indépendantes chargées, au niveau national, de vérifier le respect des règles du TSCG (le Haut Conseil des Finances publiques en France ; le Conseil Supérieur des Finances en Belgique). Cet Office rendrait compte à la conférence parlementaire visée à l’article 13 du TSCG (conférence réunissant les représentants des commissions concernées du Parlement européen et des parlements nationaux).

En fait, en adoptant cette proposition, on reviendrait à une version limitée et encadrée de la véritable « règle d’or » : un Etat ne peut pas emprunter pour financer ses dépenses courantes ; en revanche, il peut emprunter pour financer des investissements productifs qui augmentent son patrimoine et surtout son potentiel de croissance à moyen et long terme.

Au-delà de la promotion des investissements, le changement de modèle économique passe aussi par des actions quotidiennes et très concrètes. L’Europe doit pouvoir mieux

informer les consommateurs et mieux les protéger.

- Rendre les produits plus durables

La durabilité devrait être dans l'ADN de la conception du produit. Les règles d'écoconception rendent certains produits plus écologiques dès la phase de conception. L'UE pourrait intégrer des exigences de durabilité.

Les informations sur la durée de vie devraient être fournies avant l'achat. Les consommateurs doivent connaître la durée de vie attendue des produits et les coûts associés, les options de réparation et la disponibilité des pièces de rechange pendant leurs achats. Cela les aiderait à choisir des produits plus durables qui leur conviennent mieux.

Les pièces de rechange devraient devenir systématiquement disponibles et plus abordables. De cette façon, les consommateurs peuvent faire réparer leurs machines à laver ou leurs imprimantes endommagées au lieu d’en acheter de nouvelles. Les pièces de rechange et les manuels de réparation doivent être disponibles pour une durée qui reflète la durée de vie prévue du produit.

3. PROMOUVOIR L’INNOVATION, L’EDUCATION ET LA RECHERCHE

L’investissement dans l’éducation constitue un enjeu essentiel pour soutenir la croissance à long terme. En effet, la capacité d’évolution de la structure économique des États membres dépend largement de la présence de citoyens formés et capables de s’adapter aux innovations. La compétitivité de l’Europe doit s’appuyer sur l’innovation, l’éducation et la recherche et développement.

Nous voulons que l’Union soutienne davantage les politiques et réformes éducatives des États membres. C’est pourquoi nous sommes en faveur de l’approfondissement de l’Espace européen de l’Education : mobilité à des fins d’apprentissage, compétences numériques, réseaux d’universités européennes, apprentissage de 2 langues en plus de la langue maternelle, reconnaissance des qualifications. Sur le plan budgétaire, les dépenses

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d’éducations doivent être considérées comme des investissements.

Les faibles résultats de l’Europe en termes d’innovation sont surtout la conséquence de la faiblesse des liens entre l’industrie et la recherche scientifique et de la mauvaise commercialisation des résultats de recherche.

Les dépenses européennes dans la R&D en pourcentage de PIB sont inférieures à celles du Japon, des États-Unis et de la Corée du Sud. La mise en place d’un espace de recherche intégré à l’échelle européenne s’avère fondamentale. Les Européens en pointe dans la recherche fondamentale ont des difficultés à transformer leurs découvertes en produits commercialisables, ce qui permettrait de créer de la croissance et de l’emploi. Nous proposons la mise en place de structures pilotes qui mettent en relation les ressources de plusieurs universités et centres de recherche à travers l’Europe et les entreprises.

La compétitivité européenne dépend de la capacité d’innovation des Européens. Une politique de l'UE en matière de R&I bien conçue est donc essentielle pour assurer la prospérité de l'Europe.

Dans les secteurs des énergies propres, l’Europe occupe la première place en matière d’énergie éolienne, mais la Chine est à l’avant-garde de l’énergie solaire, et la Chine et les États-Unis sont actuellement en tête des véhicules électriques et des batteries. Si l'Europe perd la course mondiale à l'énergie propre, les entreprises asiatiques et américaines assumeront ce qui restera de l'industrie européenne des transports et de l'énergie. Pourtant, l’Europe a toutes les cartes pour remporter la partie. Elle dispose d'excellents scientifiques, d'innovateurs brillants, de travailleurs bien formés, de villes dynamiques et de suffisamment de capital pour effectuer les investissements nécessaires. Pour ouvrir la voie à la renaissance industrielle de l'Europe, les Européens doivent seulement se focaliser sur la recherche et l’innovation en lien avec la transition énergétique.

Dans le cadre programme Horizon Europe 2021-2027, la Commission européenne propose déjà de mobiliser des partenariats et

des « missions » correspondant à des grands objectifs transversaux, de mettre en place un Conseil européen de l'innovation visant à soutenir les technologies à haut potentiel et d'augmenter le budget de l'UE consacré à l'innovation. C'est un pas dans la bonne direction.

Concrètement, nous proposons de :

- Doubler le budget global consacré à l’innovation dans le cadre du programme Horizon Europe. La Commission européenne propose une enveloppe de 100 milliards d'euros pour la période 2021-2027.

- Favoriser les projets communs. Même avec 120 milliards d'euros, Horizon Europe ne représentera qu'environ 10% des dépenses publiques de R&D en Europe et environ 4% de toutes les dépenses de R&D publiques et privées en Europe. La Commission européenne devrait donc créer davantage de synergies avec d'autres outils de financement, des systèmes nationaux et coopérer de manière transparente avec des acteurs privés.

- Co-élaborer, avec des territoires et des villes de l'UE partageant les mêmes ambitions, une mission visant à créer 100 territoires de l'UE/ villes neutres en carbone d'ici 2030.

- Créer des clusters de l’innovation en mettant en relation les ressources de plusieurs universités et centres de recherche à travers l’Europe et les entreprises. Comme l’Union européenne l’a fait en matière de Défense,

ENCADRÉ : Northvolt : le potentiel de l’industrie européenne du véhicule électrique

Le véhicule électrique est l’une des composantes les plus prometteuses de la mobilité du futur. Son développement est d’une importance stratégique pour que l’Europe puisse faire de ses fabricants automobiles les leaders mondiaux du véhicule électrique. Un élément clé de la chaîne de valeur du véhicule électrique est sa batterie. Il s’agit d’une raison majeure expliquant que les véhicules électriques restent plus chers que les autres. Afin de réduire le coût de ces batteries et de conquérir ce marché florissant en Europe, l’entreprise Northvolt a pu bénéficier d’un financement InnovFin de la BEI pour bâtir une giga-usine de production de batteries en Suède.

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nous proposons qu’elle puisse lancer des appels à projets pour encourager des universités de différents pays et des entreprises à travailler ensemble sur des projets spécifiques. On pourrait créer alors des pôles de compétitivité et d’innovation à l’échelle européenne. Pour que cela soit bénéfique pour l’ensemble des pays européens, la Commission doit veiller à une distribution géographique de ces pôles dans un objectif de convergence européenne.

- Créer un Erasmus pro dans les secteurs de la transition énergétique. La transition durable crée de nouveaux emplois. Selon le dernier rapport d’Eurofond2, la fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail, la Belgique serait un des pays européens qui bénéficieraient le plus d’une politique permettant d’atteindre les objectifs de l’accord de Paris. Ce rapport envisage la création de 80.000 emplois en Belgique à l’horizon 2030.

En Europe, alors que des millions de jeunes sont sans emploi et que les entreprises du secteur de l’énergie propre ont parfois des difficultés à trouver des personnes disposant des bonnes compétences au bon endroit au bon moment, la transition énergétique constitue une chance unique de lutter contre le chômage des jeunes en favorisant la création d’emplois dans les secteurs de la transition énergétique. À cet effet, l’UE pourrait affecter une partie du budget communautaire à un programme Erasmus pro vert permettant aux jeunes apprentis d’acquérir les « compétences vertes » qui augmenteront leurs chances de trouver un emploi de qualité, tout en les rendant acteurs de la transition énergétique.

4. SOUTENIR LA CREATION DE GEANTS DU NUMERIQUE

Pour créer un environnement favorable à la croissance et à l’investissement et libérer le potentiel d’attractivité de l’Europe, le numérique est un facteur déterminant. Il représente non seulement un levier de

2 https://www.eurofound.europa.eu/sites/default/fi

croissance, mais il génère des synergies dans des domaines cruciaux pour le marché unique.

La révolution numérique est en train de transformer tant la société que l’économie européenne. Si elle veut tirer parti des avantages économiques qu’offrent les nouvelles technologies, l'Europe doit agir rapidement. Dans le numérique, au niveau international, l’Europe n’est pas aussi visible qu’elle devrait être. Les États-Unis ont une position prédominante. Sur les dix plus grosses entreprises mondiales en termes de chiffres d’affaires, six sont américaines. De nombreux efforts restent à faire dans le développement d’outils et de compétences nécessaires dans une ère digitalisée. Des opportunités doivent être saisies, par exemple en ce qui concerne les équipements (la réussite puis la chute de Nokia montrent que des réussites sont possibles, mais doivent faire l’objet d’innovations et d’adaptations constantes) ou encore au niveau de la robotique (comme le montre le dynamisme des entreprises allemandes à cet égard).

L’Europe doit faire un effort pour augmenter les compétences et qualifications indispensables dans le secteur numérique. Notons qu’à l'échelle mondiale, c’est environ 35 % des compétences et des qualifications qui changeront en raison de l'automatisation d'ici 2030.

L’histoire récente nous démontre également que l’Europe a réussi à être leader dans ce domaine avec la technologie 2G, notamment parce qu’elle a réussi à harmoniser les standards d’utilisation de cette technologie et ainsi d’ouvrir le marché de manière large. Avec la 5G annoncée pour les années à venir, l’Europe dispose également d’une opportunité majeure de réinventer le paysage industriel des télécoms. Nous devons créer les conditions pour que l’Europe embrasse la révolution numérique.

Enfin, l’Europe doit également veiller à adapter son cadre réglementaire par rapport aux nouvelles technologies. L’adoption au Parlement européen du projet de directive sur

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les droits d’auteur à l’ère numérique est une avancée importante. Au sein de l’UE, les plates-formes numériques devront respecter le droit de propriété des artistes, écrivains et autres journalistes.

Concrètement, nous proposons de :

- Définir une stratégie numérique fondée sur une approche réglementaire commune. Une approche réglementaire commune est essentielle pour harmoniser les règles du droit d’auteur, de la protection de la vie privée, de la protection des consommateurs dans les transactions numériques ;

- Encourager les partenariats entre grands acteurs du numérique, start-up innovantes et instituts de recherche au sein de l’Europe. Pour cela, il faut encourager un écosystème favorable à l’émergence de clusters ou de consortiums. Un partenariat incluant les États, les startups, les grands groupes, mais également des Universités pourrait être le moteur de cette dynamique ;

- Soutenir la croissance des startups en facilitant l’accès au financement et éviter l'expatriation de ces entreprises du digital ;

- Renforcer l’imprégnation des technologies numériques dans le reste de l’économie, via des mécanismes de soutien aux investissements des entreprises et par le développement de réseaux d’entreprises ;

- Soutenir le financement des investissements à grande échelle dans des solutions numériques en vue d'améliorer la qualité et le coût des soins de santé ;

- Veiller au respect de la protection de la vie privée et des données personnelles lié à l’usage des nouvelles technologies. Un observatoire devrait être mise en place au niveau européen ;

- Renforcer les actions de soutien à l’acquisition de compétences numériques, tant dans la formation initiale que continuée ;

- Déployer un programme de codage « européen » pour les étudiants avec la possibilité de suivre un cursus de trois mois pour étudier une langue de programmation informatique dans une institution européenne partenaire. Le but étant de favoriser l’acquisition de compétences numériques et le

développement d’un sentiment européen en s’inspirant du succès d’un programme comme Erasmus ;

- Soutenir l’apprentissage tout au long de la vie afin de permettre aux travailleurs d’améliorer leurs compétences et se recycler continuellement : compétences numériques, esprit d'entreprise. En s'appuyant sur les engagements actuels de l'Europe en matière d'éducation, comme le programme Erasmus, l'amélioration des compétences doit être une composante essentielle d'une économie centrée sur l’humain.

Une mise en œuvre rapide et concomitante de ces actions est aujourd’hui un élément-clé de la compétitivité de l’Europe sur la scène internationale.

5. REORIENTER LA POLITIQUE COMMERCIALE

Dans ses déclarations, l’UE s’est toujours fortement engagée dans le multilatéralisme commercial défendu par l’OMC, considéré comme plus équitable et plus garant des droits de l’ensemble des parties. Mais depuis l’enlisement du cycle de Doha, elle a développé une nouvelle stratégie d’ouverture commerciale bilatérale. Alors qu'un ambitieux accord multilatéral pourrait être plus souhaitable, un moratoire mondial sur les accords bilatéraux est politiquement irréaliste et légalement inapplicable. Même un succès du cycle de Doha n'aurait pas mis fin à la vague actuelle du bilatéralisme. Par conséquent, le débat ne doit pas être présenté comme un choix dichotomique entre multilatéralisme et bilatéralisme. Au contraire, la question-clé est de savoir comment gérer les frictions entre les deux niveaux de négociations tout en essayant de trouver de nouvelles voies pour le système multilatéral.

Dans le contexte actuel, caractérisé par l’émergence de nouveaux acteurs sur la scène internationale ainsi que des défis mondiaux tels que les enjeux environnementaux et climatiques, les déséquilibres financiers et l’augmentation de la précarité, l’Union européenne doit pouvoir mettre en avant son agenda, son rôle et étendre son influence

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normative régionale et mondiale. Ce nouveau rôle de l’Europe dans le monde reposerait sur plusieurs principes, à commencer par la défense et le développement du multilatéralisme institutionnalisé. L’Union européenne doit encourager la coopération multilatérale dynamique et pluraliste qui inclurait des règles et procédures communes et serait un processus ouvert, par opposition à une alliance exclusive.

Pour l’UE, les négociations d’accords de libre-échange doivent être l’occasion d’en tirer le meilleur parti pour renforcer, lorsque c’est possible, le multilatéralisme. Pour cela, l’UE devrait mettre en avant sa volonté de situer ce type de négociation dans un cadre multilatéral et, dans un deuxième temps, d’en généraliser les résultats. Compte tenu de l’impact politique et économique sur le commerce international que la prolifération de ce type d’accords engendre, ils devraient être considérés comme des accords ouverts à d'autres partenaires qui pourraient se joindre sur base de conditions claires et prédéfinies. Ils devraient également se référer autant que possible aux institutions multilatérales existantes et élargir certains privilèges à d'autres membres de l'OMC.

Enfin, tout accord doit être conçu comme un accord dynamique prévoyant un cadre d'adaptation pour l'avenir et des négociations continues y compris sur des questions non initialement prévues. Il est indispensable, en particulier, et vu les blocages actuels au sein de l’OMC, de mettre de nouvelles thématiques à l’ordre du jour des négociations telles que la coopération scientifique et l’accès à la connaissance, la cohérence entre les accords climatiques successifs et les accords commerciaux, la lutte contre l'évasion fiscale ou encore la régulation bancaire. Le commerce international est, de tout temps, un puissant adjuvant pour renforcer les liens économiques et les liens entre les peuples. Toutefois, la multiplication des échanges ne peut se traduire par une mise en danger d’un modèle de développement davantage centré sur les besoins humains que nous appelons de nos vœux. Au contraire, les accords commerciaux, pour qu’ils soient porteurs d’un développement équilibré pour l’ensemble des régions du monde doivent davantage intégrer

les dimensions sociales, environnementales, de santé ou de droits humains.

Le traité actuellement en négociation à l’ONU sur les entreprises et les droits de l’Homme représente une occasion unique de revoir le cadre réglementaire international et faire en sorte que les entreprises soient tenues responsables des abus qu’elles provoquent, y compris dans l’ensemble de leur chaîne de production.

La soumission du commerce international à des règles plus élevées issues des objectifs du développement humain semble la seule voie susceptible de donner de l’espoir et de la légitimité aux accords conclus pour l’ensemble des peuples.

Concrètement, nous proposons de :

- Défendre les pratiques loyales, nos normes et nos droits grâce à une solide défense commerciale

La conclusion de futurs accords commerciaux devrait s’assurer le respect strict des cinq balises suivantes :

1. l’inclusion d’une clause sur les droits de l’homme, juridiquement contraignante et suspensive, afin de garantir le respect plein et entier des normes de l'Union dans le domaine des droits fondamentaux. L’importation de produits qui ne respectent pas ces droits fondamentaux (par exemple en ce qui concerne le travail des enfants) n’a pas de place sur le marché européen ;

2. l’instauration d’un principe « d’exception agricole » - à l’instar de l’exception culturelle – qui vise à défendre et développer la particularité du secteur agricole compte tenu de ses implications sur la vie rurale, la santé et l’environnement. Tout comme pour la culture, l’affirmation de « l’exception agricole » permet de reconnaître que les produits agricoles et agroalimentaires ne peuvent être traités comme ayant exclusivement une valeur commerciale. La qualité des produits agricoles et de leur transformation est essentielle pour la santé, l’environnement, mais ont également valeur d’identité et conditionnent la vitalité des sociétés rurales.

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3. l’inclusion de normes contraignantes sur le développement durable afin de soutenir les efforts en matière de lutte contre le changement climatique.

4. l’inclusion d’un véto climatique pour s’assurer que chaque accord commercial soit compatible avec l’Accord de Paris.

5. l’inclusion de mécanismes de coopération sur la convergence des réglementations financières et bancaires, l’échange de données et la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales.

Quant à la protection des investissements, nous sommes favorables à la mise en place d’une Cour multilatérale. Elle doit respecter des balises strictes entre autres en termes d’indépendance et d’équité procédurale.

- Adapter les droits de douane aux frontières de l’Europe

L’Union européenne doit adopter une démarche plus stratégique quant à la politique commerciale de l’Union européenne. Nous constatons en effet que la disparition de plus en plus généralisée des barrières aux échanges et la diminution des coûts de transport impliquent une mise en concurrence exacerbée des entreprises, quel que soit le lieu où elles sont établies. Cette mise en concurrence a pour effet que le coût de la production intervient également de plus en plus dans la compétitivité des entreprises. Dès lors, les entreprises qui diminuent leurs coûts de production grâce à des conditions de production peu soucieuses des normes sociales (conditions de travail, droit du travail, santé des travailleurs et risques liés à la production…) ou environnementales (recours à des produits dangereux pour l’homme ou pour l’environnement, à des sources d’énergie intensives en émissions de CO2, pollution de l’air et de l’eau…) ont un avantage sur les firmes européennes qui sont confrontées à des normes plus exigeantes. Nous défendons l’idée de continuer ce processus européen d’édiction de normes qui progressivement harmonisent, renforcent et améliorent les normes qui s’appliquent aux entreprises européennes en matière sociale ou environnementale. Mais ce processus ne peut être miné par les entreprises

situées en dehors de l’Union. Pour cette raison, nous proposons d’adopter un mécanisme d’adaptation des droits de douane en fonction des conditions de production qui ont été d’application pour la fabrication du produit importé. Ces droits de douane permettront de compenser (voire pénaliser) l’avantage compétitif dont profite l’importateur lorsque les objectifs sociaux, sanitaires ou environnementaux ne sont pas rencontrés. Il s’agit par cette voie de promouvoir, y compris en dehors de ses frontières, des modes de production respectueux de tous. Le respect de ces objectifs doit pouvoir être contrôlé par un corps d’inspecteurs européens, actifs auprès des pays importateurs et chargés d’assurer une traçabilité des produits importés. Cette évolution permettra de mieux soutenir et favoriser le développement de l’emploi au sein de l’Union.

- Mettre en place un mécanisme obligatoire de contrôle sur les investissements étrangers

Alors que toutes les grandes puissances économiques (États-Unis, Chine, Japon, Canada, Australie…) sont déjà dotées d’une capacité de contrôle des investissements directs étrangers (IDE), les Européens ont entrepris de se coordonner pour mieux évaluer les risques que présentent certains IDE dans le cadre du marché unique. À l’heure actuelle, seuls 12 États membres de l’Union européenne sont dotés de tels mécanismes.

La proposition votée au Parlement européen pour la création d’un mécanisme européen est un pas décisif dans la bonne direction. Nous proposons de mettre en place au niveau européen un instrument de contrôle des investissements étrangers en Europe.

Mais pour mieux réagir, les Européens doivent se doter d’une meilleure capacité d’anticipation des risques que présentent ces IDE avec une réflexion stratégique commune.

Nous proposons un instrument qui oblige les pays à opérer ce contrôle. Les États membres doivent notifier leur mécanisme de contrôle auprès de la Commission, ainsi que les IDE contrôlés et le bilan annuel de leurs IDE

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agrégés. La décision d’approuver un investissement devra s’opérer après l’avis de la Commission.

Pour que le mécanisme respecte le principe de proportionnalité et afin d’éviter tout filtrage inutile, nous plaidons pour une approche spécifique par secteur. L’objectif ne doit certainement pas être de soumettre les investissements étrangers dans chaque secteur à un examen approfondi, ce qui mobiliserait un budget important et demanderait beaucoup de temps. Chaque secteur ne présente en effet pas un risque aussi important pour la sécurité économique.

En cas d’analyse négative, les États membres restent maîtres de la décision finale. Néanmoins, pour certaines catégories d’investissements et notamment ceux qui peuvent constituer une menace pour la sécurité, nous préconisons la mise en place d’un droit de véto de la Commission. Il faudra également analyser la possibilité de mettre en place un fonds de compensation.

PRIORITÉ 2 : MENER LE COMBAT POUR LA PROTECTION DE L’ENVIRONNEMENT ET DU CLIMAT

« Nous avons l’Accord de Paris ; il s’agit désormais de le transformer en réalité »

Miguel Arias Cañete, Commissaire européen chargé de l’action pour le climat et de l’énergie

Depuis les années 1960, l’Union a progressivement réussi à adopter une législation environnementale parmi les plus ambitieuses au monde. Or, dans le même temps, elle a connu un développement économique stable, démontrant ainsi que les deux aspects sont compatibles et peuvent se renforcer mutuellement.

Après des décennies de négociations laborieuses, la communauté internationale est finalement parvenue à un accord mondial pour lutter contre le changement climatique lors de la 21e Conférence des Parties (COP) qui s'est tenue à Paris en 2015. L'Accord de Paris, signé

par 195 pays, constitue le traité climatique le plus complet et le plus ambitieux jamais conclu.

Malgré cela, la législation européenne contient certaines faiblesses. Le SEQE a été confronté à des problèmes internes depuis son lancement en 2005. En partie à cause des excédents et des bas prix du carburant, il n'a pas fonctionné comme prévu, car les tarifs du carbone ne sont pas assez élevés. Les tentatives précédentes de réforme des quotas ont été infructueuses. L'UE devrait adopter des mesures supplémentaires pour faire en sorte que le prix du carbone augmente, stimulant ainsi l'atteinte des objectifs d'émissions.

Efforts en matière d’efficacité énergétique et d’énergie propre, investissements dans les interconnexions, contribution carbone, ce sont les trois piliers de cette ambition pour l’Europe.

Le renforcement du combat pour la protection de l’environnement et du climat – au niveau européen, mais aussi sur le plan international - est aujourd’hui un projet porteur d’une vision positive de la construction européenne.

Si l’Europe prépare une transition démocratique, innovante, économiquement viable et socialement juste, elle aura su démontrer qu’elle contribue concrètement à la construction d’une Europe au service des citoyens et qu’elle montre la voie au reste du monde.

Pour que les citoyens puissent adhérer à ce projet de transitions, l’UE doit davantage encourager des projets concrets pouvant bénéficier de façon visible aux citoyens. Cela contribuerait à promouvoir l’idée que l’UE sait être un projet réellement utile pour ses citoyens ; montrerait les avantages directs que la transition énergétique peut apporter dans la vie quotidienne des citoyens, de manière à encourager le soutien à l’énergie propre à tous les niveaux de gouvernance.

Actions

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1. METTRE EN ŒUVRE LE MARCHE INTERIEUR DE L’ENERGIE

L’Accord de Paris fixe, pour la première fois, la cible finale de la transition énergétique : la neutralité carbone (c’est-à-dire zéro émission nette : les émissions de gaz à effet de serre issues des activités humaines ne doivent pas être supérieures à la capture de gaz à effet de serre réalisée par l’être humain, par exemple grâce à la reforestation). C'est-à-dire que dans environ 30 ans, les humains ne devraient pas émettre plus d'un gramme de CO2 qu'ils ne peuvent en capter. Soyons clairs, rien de tout cela ne se produira sans une innovation profonde et transformatrice.

Nous proposons les actions suivantes :

- Tout d’abord, la finalisation du marché intérieur de l’énergie.

L’UE importe 53% de son énergie, à un coût d’environ 400 milliards d’euros, ce qui en fait le principal importateur d’énergie au monde. L’Union de l’énergie prévoit à terme la mise en place d’un marché unique européen de l’énergie, l’établissement de règles communes et la mise en place d’infrastructure. Toutefois, il n’y a pas, pour l’instant, une volonté d’avancer sur la dimension politique de l’Union de l’énergie. Cela confirme la réticence des États membres à gérer ensemble les défis énergétiques ou à se faire confiance. Aujourd’hui, chaque État membre est responsable de son mix énergétique et de sa sécurité d’approvisionnement. Ce système est à la fois coûteux et inefficace. Pour y répondre, il est nécessaire de repenser radicalement les interconnexions européennes en matière d’électricité et d’hydrocarbures. Par ailleurs, les choix que nous faisons en matière d’énergie doivent se baser sur une vision commune des besoins et une plus grande solidarité. Nous proposons de laisser une certaine liberté aux États membres dans leur choix de mix énergétique et d’établir des lignes directrices politiques qui soient capables de garantir une coordination entre les pays. Ce système devrait pouvoir à terme conduire à une véritable Union politique de l’énergie. Cela implique de s’accorder sur une approche commune pour un mécanisme de gestion de capacité, un ensemble de règles partagées pour le

développement des énergies renouvelables et pour le renforcement de l’efficience énergétique.

La réalisation des infrastructures nécessaires à l’intégration physique du marché et à la suppression des « îlots énergétiques » doit être accélérée. Pour cela, il faut garantir l’interconnectivité des systèmes d’électricité et de gaz au niveau européen. L’intégration des marchés de l’électricité et du gaz n’est pas possible sans l’infrastructure physique permettant de garantir la libre circulation de l’électricité et du gaz dans toute l’UE. Atteindre le niveau d’interconnexion essentiel au bon fonctionnement du marché est une grande priorité. Tous les outils existent pour mobiliser les ressources et construire les infrastructures nécessaires. Il faut faire davantage d’efforts concernant l’approvisionnement des îlots énergétiques, où la diversification de l’approvisionnement peut dépendre de l’existence de nouvelles infrastructures. L’objectif de 10 % d’interconnexions au sein de l’UE doit être davantage explicite au niveau régional, soit l’échelon ayant le plus besoin de ces dernières. Les véritables obstacles au niveau national, qui sont avant tout de nature économique et politique, doivent être mieux évalués, puis rendus publics.

2. INVESTIR DANS LES TECHNOLOGIES A FAIBLES EMISSIONS ET LES ENERGIES RENOUVELABLES

L’UE vient d’adopter le paquet « Énergie propre pour tous les Européens », qui double notamment le niveau d’ambition du déploiement des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique dans la décennie 2020.

L'UE doit agir dans la décennie à venir pour créer la prochaine génération de technologies neutres en carbone et d'innovations devant être prêtes pour le marché d'ici 2030/2040 afin de répondre à la demande du marché des pays du monde qui souhaitent une économie neutre en carbone d'ici 2050.

Concrètement, nous proposons de :

- créer une ligne spécifique « Énergie, climat et mobilité » au sein du Conseil européen de l’innovation.

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- veiller à ce que l’argent de l’Union européenne ne soit pas dépensé en faveur des combustibles fossiles. Nous proposons de supprimer toutes les subventions accordées à la production et consommation d’énergie à forte intensité carbone. Selon une étude ECOFYS de 2014, le soutien à l’approvisionnement en énergie fossile s’élevait à 16,3 milliards d’euros en 2012. En outre, le soutien à la demande énergétique s’est élevé à 27 milliards d’euros, prenant généralement la forme d’exemptions fiscales sur la consommation d’énergie. L’UE devrait aider les États membres à définir des stratégies de long terme pour supprimer ces subventions à l’horizon 2030.

- Prévoir la sortie du charbon comme source d’approvisionnement et interdire dans les meilleurs délais les mécanismes de soutien aux centrales à charbon. Les aides structurelles régionales et sociales de l’UE pourraient être affectées en priorité à la réalisation de cet enjeu européen.

- Encourager la modernisation des systèmes de chauffage. Le chauffage au charbon et au mazout doit disparaître à l’horizon 2050.

3. DECARBONER NOTRE MOBILITE

Concrètement, nous proposons de :

- Promouvoir le déploiement des véhicules électriques. Les véhicules électriques constituent l’un des éléments les plus prometteurs de l’avenir de la mobilité. Leur développement est d’une importance stratégique pour l’Europe, afin qu’elle fasse de ses constructeurs automobiles les leaders mondiaux des véhicules électriques. Cela permettrait aussi de lutter contre la pollution de l’air, car les moyens de transport utilisant des carburants à base de pétrole y contribuent massivement. Cela contribuerait également à lutter contre le dérèglement climatique, à condition que les véhicules électriques fonctionnent grâce à de l’électricité propre. Enfin, cela rendrait l’Europe moins dépendante des importations de carburants fossiles.

Cette promotion passe par l’articulation de politiques de soutien (p.ex. déploiement des points de recharge pour les véhicules

électriques) et des incitations réglementaires de moyen et long terme. Des signaux forts sont récemment venus des villes et des États (p.ex. fin des ventes de voitures neuves fonctionnant à l’essence ou au diesel dès 2025 en Norvège, 2030 aux Pays-Bas et 2040 en France et au Royaume-Uni). Le déploiement massif de bornes de recharge pour les véhicules électriques serait facilité par une homogénéisation européenne des normes correspondantes, laquelle donnerait aussi un signal clair aux constructeurs.

L’Union doit jouer le rôle de facilitateur et soutenir des projets d’investissements visant, d’ici 2030, à équiper les autoroutes et villes européennes de bornes de recharge pour les véhicules électriques. Un tel projet pourrait bénéficier du soutien financier du Fonds d’investissement de la BEI.

Le déploiement doit s’étendre aussi aux zones périurbaines et rurales afin d’assurer une cohésion territoriale et un accès aux véhicules électriques par tous les Européens.

En même temps, l’Union doit agir pour encourager les changements dans les autres secteurs de la mobilité.

- Réviser la directive sur l'étiquetage des voitures afin que les consommateurs soient mieux informés sur la consommation de carburant de la voiture qu'ils souhaitent acheter. Les consommateurs ont besoin d'informations plus fiables, comparables, pertinentes et faciles à comprendre sur les émissions, la consommation de carburant et les coûts-performances des voitures. C’est la seule garantie que les constructeurs automobiles parviendront à réduire leurs émissions.

- Investir dans le rail

Les transports publics devraient jouer un rôle plus important non seulement à l'intérieur du pays, mais aussi dans le trafic entre États membres. Il faut mettre un terme aux tarifs élevés de l'"itinérance" pour ceux qui voyagent en transports publics vers un autre État membre. L'Europe peut mettre en place un réseau de base utilisant des trains accessibles à tous, sans surtaxe et à des prix raisonnables.

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Voyager à l'étranger en train devrait être aussi facile que de se rendre dans un pays voisin en voiture. Le transport en couchette devrait également être stimulé. Une véritable stratégie européenne doit également être développée pour diminuer le nombre de camions sur nos routes, stimuler le fret ferroviaire et le transport par les voies navigables.

- Taxer le kérosène

Depuis la convention internationale de Chicago de 1944 sur l’aviation civile internationale, les vols internationaux sont exonérés de toute taxe sur les carburants. L’objectif, à l’époque, était de développer le trafic international.

Le secteur aérien est indéniablement un des principaux responsables de la pollution mondiale, avec en outre une empreinte carbone de 241 kg de CO2 par passager pour un trajet de 500 km aller-retour en avion, contre 123 environ pour le même trajet effectué cette fois en voiture.

Le principe de la taxe est d'avoir un effet incitatif. À l'heure où un billet d'avion coûte souvent moins cher qu'un ticket de train, pour le cdH il est légitime de considérer qu'une taxe sur le kérosène pourrait financer le transport ferroviaire. Beaucoup moins polluant que l'avion, le train émet jusqu'à 40 fois moins de CO2 par km parcouru et par personne transportée.

A l’heure actuelle, nous ne payons pas la TVA sur les billets d’avion, mais nous la payons sur les billets de train.

L’introduction d'une taxe sur le kérosène ou application d'un niveau de TVA minimal à tous les billets d'avion pourrait générer plus de 50 milliards d’euros par an et apporter une contribution majeure à la lutte contre la plus grande source d’émissions de l’Europe qui sont les transports.

Le transport maritime, qui représente environ 3% des émissions globales de gaz à effet de serre, n'est pas soumis à des contraintes de réduction de ses émissions.

L’Organisation maritime mondiale s’est, elle, engagée à diviser par deux les émissions de CO2 des navires d’ici à 2050.

Ce secteur doit également participer à l’effort global de décarbonisation. La question de la fiscalité du diesel soulève avec pertinence l’iniquité qui persiste entre la taxation des carburants : le kérosène des avions et le fioul lourd des navires en sont exonérés.

4. METTRE EN PLACE UNE CONTRIBUTION CARBONE

Il nous faut aussi, pour réussir cette stratégie de transition vers une Europe durable fixer un véritable prix du CO2 et assurer pour nos industriels les plus exposés à la mondialisation d’être sur un pied d’égalité avec les entreprises, les industries concurrentes venant d’autres régions du monde qui n’ont pas les mêmes exigences environnementales. C’est pour cela qu’il nous faut un mécanisme d’ajustement aux frontières de l’Europe sur le carbone.

Une condition essentielle pour réussir l’évolution fondamentale des investissements à forte intensité carbone vers des investissements bas-carbone consiste à intégrer le coût du CO2 dans le prix de tous les biens et services, ce qui peut être fait de plusieurs manières : par les marchés du CO2, par une fiscalité directe sur le CO2, par des taxes et redevances sur la production ou la vente des produits, par l’établissement d’obligations et de normes réglementaires ou l’utilisation d’un coût fictif ou social du CO2 pour guider les décisions d’investissement public.

Au niveau de l’UE, le prix fixé sur le marché ETS est trop faible pour dissuader véritablement l’investissement dans des activités à forte intensité carbone. La mise en place d’un prix plancher européen, proposée par la France, est une mesure que nous soutenons.

Même si le système SCEQE est amélioré, il couvre moins de la moitié du total des émissions de gaz à effet de serre de l’UE. Pour le reste des émissions, soit le prix n’est pas fixé, soit il l’est par le biais de taxes nationales qui ne sont pas suffisamment élevées, varient

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selon les secteurs économiques et sont insuffisamment coordonnées au niveau de l’UE.

Pour les secteurs non-couverts par le SEQE, nous proposons d’adopter une « contribution sur le carbone ajouté » (CECA) sur tous les biens et services commercialisés qu’ils soient produits en Europe ou importés du reste du monde.

La CECA serait une taxe générale sur les transactions, sur le modèle de la TVA. Cette contribution permettrait de soumettre les produits à l’impôt en fonction de leur émission de carbone. Le montant dû ne serait pas une mesure de la valeur du bien ou service taxé, mais de la quantité de carbone émise à chaque stade de la production et de la distribution. Le carbone serait alors considéré comme un élément du coût de production et pris en compte dans le prix final.

La mise en place d’une CECA intra-européenne devrait être complétée par un ajustement carbone aux frontières, afin de mettre sur le même pied d’égalité les produits européens et ceux du reste du monde, et d’éviter le phénomène des « fuites de carbone ». Si cette contribution se traduit par un prix plus élevé, payé par le consommateur européen, celui-ci est compensé par au moins trois mécanismes : (1) l’augmentation de cette contribution augmente les recettes fiscales et permet dès lors de diminuer directement ou indirectement la pression fiscale sur les revenus des ménages ; (2) cette contribution favorise les activités localisées en Europe et, par conséquent, est susceptible de reconstituer des activités et écosystèmes économiques propres ; (3) l’adoption d’un levier puissant pour favoriser des modes de production économes en ressources et en énergie permet d’assumer pleinement le leadership et l’anticipation de l’économie européenne. Ce levier permet par conséquent de prendre une avance déterminante sur ses principaux concurrents, favorisant la pérennité des activités et des revenus des ménages européens.

Cette proposition aurait des effets positifs en termes environnementaux, économiques et politiques et permettrait de redonner du sens

à la fiscalité indirecte. Tout d’abord, elle pourrait concrétiser les efforts européens pour réduire les émissions de carbone. Ensuite, la mise en place d’un tel mécanisme aurait un impact positif sur l’activité économique et l’emploi en contrecarrant le phénomène de délocalisation dû aux réglementations en matière d’émission de carbone. Enfin, l'effet le plus important serait de déclencher une concurrence internationale vertueuse pour créer des produits et services avec une teneur plus faible en carbone.

Finalement, cette proposition aurait l'avantage d'être attrayante, même sans accords mondiaux, pour d'autres pays développés, mais également pour les pays émergents. Ceux-ci pourraient être poussés à être plus compétitifs sur le marché européen, à adopter des mécanismes similaires pour les émissions de carbone pour les biens et services exportés. Dans la perspective de la mise en œuvre de l’accord de Paris, elle représenterait un levier important pour la réduction des émissions globales, car elle agirait directement afin de modifier le comportement des producteurs.

PRIORITÉ 3 : CONTRIBUER AU DEVELOPPEMENT DE NOS VOISINS

Les premiers jalons de la politique européenne de voisinage (PEV) ont été posés au début des années 2000, lorsqu’une réflexion s’est engagée pour prévenir l’émergence de nouvelles lignes de division entre l’Union élargie et nos voisins. La politique de voisinage entend utiliser cette attractivité pour inciter les pays situés aux marches orientales et méridionales de l’UE à entreprendre des réformes, en échange d’une intégration plus poussée avec l’Union. Le renforcement de la démocratie, de l’État de droit et des libertés fondamentales figure en bonne place des priorités des Plans d’Action, les documents-clés de la PEV signés avec les pays partenaires au milieu des années 2000.

La PEV a été conçue pour promouvoir la paix, la stabilité et la prospérité aux frontières de l’UE. Or, l’Union se trouve désormais entourée d’un cercle de crises et de conflits. La révision de la PEV en 2015 visait à réduire ce

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décalage en réduisant les ambitions de cette politique et en cherchant à améliorer ses résultats en précisant les objectifs et en renforçant la différentiation, la flexibilité et l’appropriation.

Au cours de la première décennie, la PEV a souffert d’un écart marqué entre la conception et les performances. La vision initiale était trop idéaliste ; les ressources étaient trop limitées ; et l'UE était trop souvent incohérente. Avec la révision de la PEV de 2015, l'UE a reconnu ces lacunes. Elle s’est détournée de la vision idéaliste et a réduit l’ambition politique. Cependant, il existe toute une gamme d'obstacles à une performance efficace de la PEV. Malgré le nombre de crises, l'UE n'a pas augmenté le niveau de ses ressources. Les nouvelles priorités politiques de la PEV peuvent renforcer les problèmes de cohérence existants.

Les défis auxquels l'UE et ses voisins sont confrontés sont beaucoup trop importants pour faire l’impasse de la politique de voisinage. Les institutions de l’UE et les États membres devraient utiliser la prochaine législature pour élaborer une politique européenne de voisinage plus stratégique et plus politique, l’UE devrait appliquer un principe de géométrie variable, lier étroitement la PEV aux autres politiques d’action extérieure de l’UE ainsi que définir une feuille de route pour guider les États membres.

Enfin, nous proposons de mettre sur place un partenariat avec la Turquie au service du renforcement de l’état de droit, la démocratie et les droits humains. Ces relations nouvelles avec la Turquie doivent notamment s’appuyer sur le renforcement de l’union douanière.

Actions

Concrètement, nous proposons de :

1. NEGOCIER UN PARTENARIAT ETROIT AVEC LE ROYAUME-UNI POUR NOS ETUDIANTS ET NOS ENTREPRISES

Malgré le BREXIT, nous sommes favorables à un partenariat étroit avec le Royaume-Uni

fondé notamment sur la politique de sécurité et d’éducation.

La poursuite de la participation du Royaume-Uni aux opérations civiles et militaires de l'UE sera bénéfique pour les deux parties et pourrait être fondée sur un accord-cadre de partenariat. La Norvège est l’un des 18 pays ayant conclu un tel accord avec l’UE.

Pour la participation aux missions et opérations de l'UE, l'équilibre entre droits et obligations pourrait être défini dans un « accord-cadre de participation renforcé ». Comme le suggère le livre blanc britannique, le Royaume-Uni pourrait fournir une expertise, des renseignements, du personnel, des ressources spécialisées et des outils opérationnels spécifiques pour les opérations de l'UE. En retour, il serait autorisé à accéder à la planification opérationnelle.

La recherche et le développement des capacités de défense constituent un domaine important pour le Royaume-Uni. Il dispose du budget de défense le plus important en Europe et ses dépenses en recherche et développement dans le secteur de la défense représentent environ 40% du total des dépenses de l’UE.

À l'instar de la Norvège et d'autres pays, il pourra participer aux projets et programmes de l'Agence européenne de défense sur la base d'un arrangement administratif. Les questions les plus controversées sont la participation du Royaume-Uni à la Coopération structurée permanente (PESCO) et au Fonds européen de défense.

Nous proposons de créer un statut d'associé spécial pour le Royaume-Uni sur la base de contributions financières régulières. Compte tenu de la contribution de la Norvège à l’action préparatoire de l’UE sur la recherche en matière de défense (précurseur du guichet de recherche du FED), la contribution du Royaume-Uni pourrait atteindre 17% du financement total du FED, soit environ 255 millions d’euros par an.

L’autre domaine sur lequel doit se fonder ce partenariat est la politique de coopération en matière d’éducation et d’échanges universitaires. Considérant l’importance des

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relations actuelles, nous proposons de poursuivre ces politiques, cela implique une contribution équivalente du Royaume-Uni.

2. CONSTRUIRE UN ESPACE DE CO-DEVELOPPEMENT AVEC L’AFRIQUE

« L’Europe pourra, avec des moyens accrus, poursuivre la réalisation de l’une de ses tâches essentielles : le

développement du continent africain. » Déclaration de Robert Schuman le 9 mai 1950

Établir des relations nouvelles pour soutenir le chemin d'une Afrique ambitieuse, autonome, liée à l'Europe, dans un rapport équilibré.

Pourquoi ? D’abord, l'Europe est le premier investisseur en Afrique et son premier client. Ensuite, nous avons une responsabilité historique vis-à-vis du continent africain. Enfin, cette vision est réaliste au regard des défis communs tels que le terrorisme, l'immigration, le changement climatique et la défense des valeurs communes, qui imposent la mutualisation des objectifs et des moyens.

Partant de ces constats, nous posons une nouvelle initiative pour l’Afrique. Celle-ci est basée sur trois priorités politiques : l’éducation et la formation professionnelle, la santé, la gouvernance.

Il est vital pour l’avenir de l’Europe que l’Afrique réussisse ce parcours original. Il convient de l’y accompagner pour la faire réussir. Il s’agit avant tout d’investir dans l’éducation notamment des femmes pour faire en sorte que les ressources humaines des pays d’Afrique soient valorisées en vue du développement propre, « endogène » de ces pays.

Concrètement l’Union donnera son appui à la constitution de bourses du travail. De telles bourses de travail auraient d’abord une fonction d’animation de la formation professionnelle pour les qualifications de base et intermédiaires qui font cruellement défaut en Afrique pour les branches de la mécanique, des transports, du bâtiment travaux publics et des grands services collectifs de l’eau et de l’énergie. Elles pourraient aussi initier des

activités rattachées à l’acquisition de compétences de base en partenariat avec des réseaux de financement coopératif. L’Union de son côté mettra en place, en se fondant sur l’expérience du réseau européen EURES, un processus de reconnaissance des qualifications acquises dans les centres de formation africains.

La santé doit représenter un domaine privilégié des nouvelles relations euro-africaine que nous appelons de nos vœux. L’Europe doit mettre en place des programmes pour soutenir le développement des infrastructures de santé, des échanges accrus entre les personnels de santé et améliorer l’accès à la santé pour tous.

Ensuite, nous proposons de mettre en place des mécanismes et des institutions qui ont fait leurs preuves dans d’autres coopérations régionales dans le monde. Par exemple, la mise en place d’une fondation qui rassemble experts, intellectuels, représentants des sociétés civiles et chefs d'Entreprise travaillant à l'accélération des interconnexions, des réseaux techniques (eau, transport, électricité), financiers et culturels (reconnaissance des diplômes universitaires, échanges d'étudiants...).

Enfin, il faudrait un lieu de concertation politique. Ce sera l’institutionnalisation d’un dialogue politique et surtout un appui important aux processus indispensables de réforme de gouvernance.

Le renouvellement de l’accord de Cotonou offrirait une occasion unique à l’Union européenne de porter un tel message qui fait du développement humain l’axe prioritaire d’une refondation de la relation contrastant avec celle de puissances mondiales manifestement autocentrées, telles que les États-Unis et la Chine. Ce « New Deal » donnerait du sens à l'avenir de l'Europe et de l'Afrique.

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2. UNE EUROPE SOLIDAIRE ET JUSTE

Diagnostic

La solidarité est une des valeurs fondatrices du projet européen. Force est de constater qu’aujourd’hui cette solidarité entre États, entre régions, entre citoyens, entre travailleurs est mise à mal. Or dans tous les domaines où on constate une crise, un renforcement de la coopération, des liens et de mécanismes de solidarité est indispensable.

Aujourd’hui, les États membres se font concurrence mutuellement sur leurs régimes fiscaux. À ce petit jeu, c’est le citoyen européen qui se retrouve lésé : c’est un jeu où tout le monde perd. Faire converger au niveau européen la fiscalité sur les revenus des capitaux des entreprises est indispensable. Elle est d’autant plus urgente que notre système fiscal est en décalage croissant avec les pratiques économiques. La numérisation des relations économiques augmente la dématérialisation des activités. Les géants du net en profitent pleinement et localisent leurs bénéfices là où les régimes fiscaux sont les plus avantageux. Cette harmonisation des régimes fiscaux permettra d’éviter des montants gigantesques d’évasion et d’optimisation fiscale, estimés à 30 milliards d’euros rien que pour la Belgique.

Mais il n’y a pas qu’en matière fiscale que la coopération doit se renforcer. Au niveau social, la concurrence entre travailleurs en Europe a souvent renforcé le sentiment d’une Europe qui ne protège pas ses citoyens. Or des progrès importants ont été réalisés les dernières années grâce notamment à la révision de la Directive Détachement, la proclamation du Socle européen des droits sociaux à Göteborg, ou encore la mise en place de l’Autorité européenne du travail.

Mais l’Union européenne est encore loin d’atteindre l’objectif de la stratégie Europe 2020 de réduire de 20 millions par rapport à 2008 le nombre d’Européens vivant dans la pauvreté ou menacés d’exclusion sociale. En 2016, 118 millions de personnes étaient

menacées de pauvreté ou d’exclusion sociale, soit 800.000 de plus qu’en 2008.

Enfin, en matière d’asile, les États membres se livrent à une politique du « court-termisme » fondée sur l’égoïsme qui sape toutes les valeurs européennes. Seul le renforcement de la coopération est susceptible d’apporter une réponse adaptée à ce défi.

Vision

L’Europe que nous voulons doit contribuer à l’élévation des niveaux de vie et la réduction des inégalités entre les territoires européens. L’Europe est un espace de solidarité et de coopération, il ne peut plus être celui d’une concurrence déloyale.

Face à un monde qui change plus vite que jamais, l'unité et la solidarité européennes sont tout aussi importantes aujourd'hui qu'il y a 60 ans. La solidarité nous a unis et la solidarité est la seule voie d’avenir. Aucun des défis actuels ne peut être résolu par une seule nation ou un seul groupe de personnes.

Pour construire un espace économique commun et préserver ses capacités financières, l’Europe doit œuvrer à la convergence fiscale et salariale par le haut et poursuivre la lutte contre le dumping et la fraude.

L’Europe doit également être un acteur de cohésion et encourager la convergence et la cohésion territoriale. Non seulement au travers d’une ambition élevée pour sa politique de cohésion, mais aussi en faisant évoluer les critères de convergences à la lumière des nouveaux défis.

L’Europe doit se doter d’outils plus performants au niveau social. Nous pensons qu’il est nécessaire de mettre en œuvre un « fonds d’ajustement de la mobilité », intra-européen, destiné à supporter les coûts supplémentaires pour les services sociaux, et surtout de soutenir les efforts de formation et reconversion de la main-d’œuvre.

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Ce système aurait par exemple pu être utilisé au Royaume-Uni pour répondre aux partisans du Brexit qui s’inquiétaient de l’impact sur le système de santé britannique de la liberté de mouvement à l’intérieur de l’Union européenne. Il pourrait également servir à dédommager les pays qui doivent faire face à une augmentation d’étudiants dans le système d’enseignement supérieur.

Ce dispositif viendrait d’ailleurs compléter les efforts significatifs menés ces dernières années afin d’éviter que les travailleurs ne se fassent concurrence entre eux, en particulier par le biais du détachement des travailleurs. Les étapes franchies doivent être saluées en la matière, mais il convient de les mener à leur terme. Une règle simple doit prévaloir : les activités qui sont réalisées dans un pays doivent respecter les dispositions sociales de ce pays, tant du point de vue de la rémunération que des contributions sociales. Les travailleurs mobiles et les nationaux doivent bénéficier des mêmes conditions de travail pour un même emploi. Il est urgent de trouver un consensus en la matière. Des mécanismes particuliers peuvent être adoptés pour les activités mouvantes (tels que les transporteurs routiers), mais on ne peut accepter que sous prétexte de mobilité les conditions de travail de certains Etats tirent tout le monde vers le bas.

Pour compléter ces dispositions, l’Europe doit également veiller à ce que des dispositions sur le salaire minimum soient adoptées dans chacun des États membres, en référence au salaire médian de ces pays (en évitant le piège contre-productif d’adopter un même salaire minimum dans toute l’Union).

Pour concrétiser cette proposition, nous plaidons pour que la Commission, dans le cadre des recommandations spécifiques par pays (CSR), adresse une recommandation visant à l’instauration d’un salaire minimum. Cela permettrait de contourner le blocage relatif au

3 https://ec.europa.eu/commission/priorities/deeper-and-fairer-economic-and-monetary-union/european-pillar-social-rights_fr

manque de compétences de l’UE en matière de politique sociale. Par ailleurs, la Commission pourrait au travers des CSR contribuer activement à faire avancer la politique sociale européenne. Les différents principes du socle européen des droits sociaux3 pourraient ainsi faire l’objet de recommandations spécifiques.

Quant à la concurrence déloyale entre les travailleurs, un approfondissement des dispositions en matière de bien-être, santé et sécurité au travail est également un champ important dans lequel l’Union doit s’investir. En outre, il est nécessaire de renforcer le contrôle et le respect de la législation pour éviter des abus et les fraudes. La mise en place d’une Autorité européenne du travail est un pas en avant important en ce sens, elle doit être complétée par la création d’une véritable inspection européenne du travail.

Pour rendre plus efficace la prise de décision en matière de politique sociale4 et de politique fiscale, nous plaidons pour un recours accru au vote à la majorité qualifiée.

Enfin, la solidarité concerne aussi et surtout les relations entre les citoyens. La solidarité intergénérationnelle est une pierre angulaire indispensable dans la maison européenne. Aucun modèle de gouvernance démocratique ne peut être inclusif ou durable sans garantir le dialogue et la solidarité entre les générations. L’Union doit encourager les autorités locales à inciter les seniors à jouer un rôle dans les communautés locales pour entretenir le dialogue citoyen entre toutes les générations.

4 https://ec.europa.eu/info/law/better-regulation/initiatives/ares-2018-6446089_fr

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PRIORITÉ 4 : RENFORCER L’UNION ECONOMIQUE ET MONETAIRE

L’Union économique et monétaire européenne (UEM) a été instaurée en 1992 à la suite de la signature du Traité de Maastricht. Les avantages de l’euro sont nombreux : en plus de faciliter la vie des Européens qui voyagent, il a apporté de la stabilité et de la croissance tout en garantissant des taux d’intérêt faibles et la disparition des frais de change. Au niveau macroéconomique, la monnaie unique a porté l’Union européenne au rang des premières puissances commerciales mondiales grâce à une monnaie forte et des échanges internationaux facilités. Si les dirigeants européens ont décidé d’une monnaie commune, ils ont conservé leur souveraineté nationale en matière économique, budgétaire et fiscale. Les suites de la crise financière mondiale qui a éclaté en 2008, en particulier la crise des dettes souveraines, ont mis en évidence la faiblesse fondamentale d’une construction où la politique monétaire est devenue unique alors que les politiques économiques restaient nationales et souvent divergentes. Depuis la crise économique, des réformes ont été adoptées pour faire face aux chocs économiques extérieurs et pallier aux manquements de la gouvernance économique européenne. Mécanisme européen de stabilité, Pacte budgétaire, procédure relative aux déséquilibres macroéconomiques, Union bancaire ont déjà largement corrigé cette faiblesse fondamentale. Mais ce n’est pas suffisant. Au cdH, nous considérons qu’il est aujourd’hui capital de consolider la zone euro et renforcer la gouvernance européenne des outils nécessaires à une politique économique efficace. Concrètement, nous proposons :

1. DONNER À LA ZONE EURO SON PROPRE BUDGET

En décembre 2018, les dirigeants de l’UE se sont accordés pour la création d’un budget de la zone euro appelé « instrument budgétaire ». Les ministres européens se sont vu confier un mandat pour s’accorder avant juin 2019 sur les caractéristiques essentielles de ce budget.

C’est un pas en avant important. L’expérience des autres unions monétaires montre que, même si le degré de centralisation des instruments et les modalités de la solidarité financière peuvent varier, aucune union monétaire ne peut survivre sans un budget commun pour aider les pays participants à absorber des chocs asymétriques, c’est-à-dire des chocs économiques qui frappent plus durement un ou quelques États que l’ensemble des pays de la zone. La création d’un tel mécanisme est d’autant plus nécessaire que d’autres mécanismes correcteurs fonctionnent moins dans la zone euro que, par exemple, aux États-Unis : la mobilité des travailleurs y est beaucoup plus faible ; les tensions sur les marchés financiers provoquent rapidement une fragmentation qui aggrave les difficultés des pays en crise ; des rigidités structurelles, parfois réglementaires, freinent l’ajustement par les prix.

Notre proposition pour un budget de la zone euro porte sur deux volets. Un premier volet « production », pour soutenir des investissements ; un deuxième volet « stabilisation », pour équiper l’UEM d’une capacité d’absorption des chocs, indispensable au renforcement de sa structure.

On a besoin d’un budget de la zone euro pour atténuer les coûts budgétaires et sociaux de l’ajustement pour les pays frappés plus durement que d’autres. Ce budget fonctionnerait selon des règles établies à l’avance. Il interviendrait en faveur des pays qui connaissent une chute du PIB et/ou une augmentation du chômage sensiblement plus fortes que la moyenne de la zone euro. Son intervention serait temporaire, par exemple la prise en charge pendant un an d’une partie substantielle des dépenses additionnelles de chômage. Il n’interviendrait que si ces pays mettent en œuvre les recommandations

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spécifiques qui leur sont adressées dans le cadre du semestre européen.

Ce budget s’élèverait à 1% du PIB de la zone euro, à savoir quelque 100 milliards d’euros.

Ce budget pourrait être alimenté entre autres par une partie des bénéfices de la BCE. D’après les statuts de la BCE, une partie de ces bénéfices (20%) doit être affectée aux réserves de la BCE. Le reste doit être reversé aux banques centrales nationales. Les bénéfices annuels générés par les opérations monétaires de la BCE pourraient ainsi devenir une ressource financière propre de la zone euro. Cela impliquerait une modification des statuts de la BCE. D’après l’article 129.3 du TFUE, les bénéfices de la BCE peuvent devenir une ressource propre de l’Union, moyennant une réforme par procédure législative ordinaire de l’article 33.1.a des statuts de la BCE.

Nous proposons également de mettre en place des euro-obligations.

Chaque État membre de la zone euro émet des obligations qui présentent un profil de risque hétérogène. Ceci a pour conséquence qu’en temps de crise, la structure actuelle du marché des obligations souveraines et la forte exposition des banques sur leur État d’origine aggravent la volatilité et provoque une déstabilisation du secteur financier. Ce qui accroît la divergence entre États alors qu’une union monétaire ne peut fonctionner correctement que s’il y a une tendance à la convergence. Il y aurait donc un réel avantage à créer un actif sans risque européen, libellé en euros et d’un volume suffisant pour devenir la référence des marchés financiers.

En fait, des euro-obligations européennes existent déjà : les obligations émises par la Commission, gagées sur le budget communautaire, pour financer la facilité d’ajustement à la balance des paiements des pays hors zone euro auxquelles s’ajoutent les obligations émises par la Banque européenne d’investissement et celles émises par le Mécanisme européen de stabilité. Les unes et les autres sont notés AAA en raison de l’importance des fonds propres et de la qualité des actionnaires (les États membres). Mais aucun de ces trois types d’euro-obligations

n’atteint un volume suffisant pour jouer le rôle d’instrument de référence dont il est ici question. L’idée est donc de développer des euro-obligations.

Nous proposons d’émettre deux catégories de titres : une première dite qui bénéficierait de la garantie solidaire de tous les États membres, qui serait acceptée comme collatéral par la BCE et qui serait considérée comme véritablement « sans risque » par les autorités bancaires ; une seconde qui supporterait le risque en cas de défaut d’un État de la zone euro. L’idée est qu’en cas de défaut d’un ou de plusieurs États, la deuxième catégorie suffira à amortir le choc et préserverait la première catégorie.

2. RÉFORMER LA GOUVERNANCE DE LA ZONE EURO

Le contrôle démocratique du budget de la zone euro reviendrait à une commission ad hoc composée en son sein par des membres du Parlement européen ressortissants des pays de la zone euro.

Cette commission exercerait aussi le contrôle sur les décisions de la Commission et du Conseil lorsqu’il s’agit de mesures qui ne concernent que la zone euro. Cette formule suscite parfois des réserves au sein même du Parlement européen qui ne veut pas de deux classes de parlementaires. Pourtant, la distinction tient à la nature même de la différenciation entre l’UE et l’UEM et elle serait un élément de clarification qui accroîtrait la légitimité démocratique du contrôle. Sinon, le rôle du Parlement européen pourrait être remis en cause si des députés originaires d’États membres ne participant pas à l’UEM intervenaient dans le débat et, le cas échéant, inversaient l’équilibre des forces dans un vote sur une question concernant uniquement l’UEM. L’avantage de cette formule est qu’il ne faut pas créer de toutes pièces une nouvelle institution, un « Parlement de la zone euro », avec la multiplication de mandats et les coûts en personnel et en infrastructure que cela entraînerait. Ce sont les mêmes personnes, avec une seule et même rémunération, dans les mêmes locaux et avec le même staff, qui siégeraient tantôt comme parlementaires de l’UEM, tantôt comme parlementaires de l’UE.

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PRIORITÉ 5 : CONSTRUIRE UNE POLITIQUE FISCALE COMMUNE

Le marché unique est l’une des plus importantes réussites de l’Union européenne. La libre circulation des personnes, des services et des capitaux a certainement contribué à la croissance économique et la prospérité de l’Europe. En permettant une circulation plus fluide des personnes, des biens, des services et des capitaux, l’intégration européenne permet tout simplement le développement des relations commerciales, le renforcement des initiatives économiques sur des bases plurinationales et une meilleure allocation des ressources au sein de l’Union européenne. Toutefois, cette intégration ne s’est pas réalisée sur tous les fronts au même rythme. Si les instances européennes ont rapidement été intéressées à se doter de règles communes en matière de fiscalité indirecte, comme la TVA, elles n’ont pas du tout été aussi rapides en ce qui concerne la taxation des capitaux ou du travail. Par conséquent, l’intégration européenne et l’ouverture des frontières ont permis d’accroître la mobilité des bases taxables, susceptibles de se déplacer au sein du marché unique au gré des politiques dites "d'attractivité fiscale".

La fiscalité est devenue un instrument pour encourager une Europe des égoïsmes nationaux, du chacun pour soi. Chaque État se livre à une course inlassable pour tenter d'attirer les entreprises et l’épargne en appliquant des taux de prélèvements les plus bas possible sur les facteurs de production délocalisables. Cette course a certes des gagnants relatifs - les États capables de mener les politiques les plus agressives - mais, globalement, tant la construction européenne que les finances des États y perdent.

Dès lors, l’harmonisation des politiques fiscales au niveau européen prend une acuité particulière, étant donné l’intensification de l’intégration économique et la pression généralisée sur les finances publiques.

5 https://ec.europa.eu/taxation_customs/sites/taxation/files/15_01_2019_communication_towards_a_

Aujourd’hui, les États membres continuent de se faire concurrence mutuellement sur leurs régimes fiscaux. À ce petit jeu, c’est le citoyen européen qui se retrouve lésé : c’est un jeu où tout le monde perd. La convergence des régimes fiscaux européens sur les facteurs mobiles (et en particulier le bénéfice des entreprises et les revenus des capitaux) est indispensable. Elle est d’autant plus urgente que notre système fiscal est en décalage croissant avec les pratiques économiques.

De nombreux exemples montrent régulièrement que des grandes entreprises ou que des acteurs majeurs du secteur bancaire profitent des failles des régimes fiscaux en Europe. Quelles sont alors les conséquences économiques du statu quo fiscal dans un espace économique intégré tel que l’Union économique et monétaire ? Quelles solutions peut-on envisager pour mettre fin à l'aberrante concurrence fiscale au sein de l'Union européenne ?

La lutte contre l’évasion et la fraude fiscales pose une question centrale : comment renforcer l’équité de notre modèle fiscal au sein de l’Union européenne ? Si l’équité est une donnée essentielle, il convient également d’évaluer dans quelle mesure ce système fiscal répond à l’évolution souhaitée de notre modèle économique et social. En ce sens, l’émergence d’un modèle fiscal européen doit permettre d’alléger les contributions sur ce que nous devons valoriser davantage, en particulier l’activité et l’emploi, et d’autre part, augmenter les contributions sur des activités que nous souhaitons réduire, les activités polluantes et la spéculation stérile.

Afin de favoriser une plus grande intégration européenne en matière de fiscalité, une modification du processus décisionnel en la matière est incontournable. Les décisions seraient prises à la majorité qualifiée plutôt qu’à l’unanimité dans ce domaine5.

À 27 États membres, la prise de décision à l’unanimité bloque systématiquement les avancées significatives et rend impossible

more_efficient_democratic_decision_making_eu_tax_policy_en.pdf

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toute modification dont l’Europe a fortement besoin, notamment en vue de résoudre les problèmes persistants en matière de fraude et d’évasion fiscales. Or, l’intérêt général de l’Union européenne doit continuer à primer.

Le vote à majorité qualifiée qui s’applique au sein du Conseil européen est atteint si deux conditions sont remplies : 55% des États membres ont exprimé un vote favorable (soit 16 sur 28) et la proposition est soutenue par des États membres représentant au moins 65% de la population totale de l’UE. Il s’agit du mode de vote le plus courant au sein du Conseil, 80% de l’ensemble des actes législatifs de l’UE sont adoptés au moyen de cette procédure.

Actions

1. METTRE EN PLACE UN IMPÔT DES SOCIÉTÉS EUROPÉEN

Afin de permettre l’intégration progressive de l’impôt des sociétés au niveau européen, nous défendons un processus en trois phases.

Première phase : mettre en œuvre la proposition ACCIS au niveau européen. Sur base d’une déclaration fiscale unique, l’assiette imposable de l’entreprise serait répartie entre les États membres au sein desquels l’activité est réalisée en fonction de critères objectifs et non manipulables. Il s’agit de respecter une règle simple : l’impôt doit être prélevé sur le lieu où a lieu l’activité. Cette proposition permettra aussi bien d’avancer dans la construction du marché intérieur, de lutter contre les déplacements de bases imposables, mais aussi de réduire fortement les diverses charges administratives et les coûts de mise en conformité rencontrés par les entreprises lorsqu’elles veulent se développer au niveau européen. L’assiette commune consolidée est une étape intermédiaire vers un impôt des sociétés européen. En effet, l’assiette commune consolidée ne peut être le but final. Il en résulterait en effet un impôt fixé dans une directive, rendant toute modification compliquée et par conséquent un impôt au devenir obsolète. Avec la proposition ACCIS, on s’empêche d’utiliser l’impôt des sociétés comme outil de politique économique.

Deuxième phase : progresser sur la voie d’un « serpent fiscal européen ». Nous proposons d’instaurer une deuxième phase à la proposition ACCIS, qui consiste à déterminer un niveau maximal et un niveau minimal au sein duquel les taux d’imposition doivent se situer. En effet, la seule harmonisation de la base imposable aurait tendance à rendre encore plus pertinente la comparaison des taux, ceux-ci seraient le seul instrument de concurrence. La détermination d’une fourchette au sein de laquelle peuvent évoluer les taux d’imposition permet de favoriser cette convergence, de sécuriser les acteurs économiques, tout en conservant la possibilité des États de modifier leurs taux à la marge dans le cadre de leurs politiques économiques et budgétaires.

Troisième phase : établir un impôt des sociétés européen identique dans l’ensemble des États européens. Les recettes de cet impôt pourraient à terme être prélevées directement par une administration fiscale européenne, ou à défaut par les administrations nationales qui agissent pour compte de l’Union. Les recettes alimenteraient directement le budget propre de l’Union. L’adoption d’un impôt unique européen permettrait de renforcer l’attractivité européenne pour les investisseurs étrangers et d’éviter tout risque d’optimalisation fiscale.

2. POURSUIVRE LA LUTTE CONTRE LA FRAUDE ET L’EVASION FISCALES

Une transparence totale des multinationales

Parmi les actions du Plan BEPS de l’OCDE, la mesure country by country reporting a été particulièrement discutée. Cette action instaure, pour les grandes entreprises multinationales, l’obligation de déposer chaque année une déclaration indiquant diverses informations pour chacune des juridictions fiscales où elles exercent des activités, dont notamment le montant de leur chiffre d’affaires, leur bénéfice avant impôts, etc. Ces informations doivent permettre aux pays de mieux détecter d’éventuelles activités irrégulières et de renforcer la transparence. L’OCDE insiste sur le caractère confidentiel de

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la déclaration, répondant ainsi à une préoccupation majeure des entreprises. La déclaration ne serait destinée qu’aux administrations fiscales et ne ferait pas l’objet d’une publication plus large, pour le grand public.

Nous proposons de renforcer la voie indiquée par l’OCDE. Toutes les sociétés actives dans plusieurs pays doivent être assujetties à un devoir de transparence en ce qui concerne les éléments-clés de leur activité tels que le chiffre d’affaires, les bénéfices, les taxes payées, les subsides reçus, le nombre de personnes employées, etc. Nous proposons d’instaurer une déclaration publique de la part de ces sociétés afin d’assurer la transparence totale, à condition que cette large diffusion n’entrave pas la qualité des informations effectivement publiées.

Nous jugeons par ailleurs que le fait de rendre ces données publiques pourrait pousser les entreprises multinationales, soucieuses de leur image auprès du grand public, à corriger certains comportements dommageables

Assurer l’échange d’informations bancaires

L’échange automatique de renseignements en matière fiscale, considéré comme l’arme la plus efficace contre la fraude, est en marche et de nombreux progrès ont été réalisés en ce sens ces dernières années. Afin d’éviter que la mise en œuvre de ce système entraîne un glissement des capitaux vers les paradis fiscaux les plus proches et hors de l’Union, la Commission européenne doit parallèlement continuer de renégocier les accords signés entre l’UE et les pays proches, dont Monaco, Andorre ou la Suisse. L’objectif de la Commission doit être de faire appliquer le nouveau modèle de convention fiscale par ces pays le plus rapidement possible.

Par ailleurs, nous estimons que ces évolutions positives ne doivent pas être limitées aux 51 premiers pays qui font figure de précurseurs. La dynamique de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales doit se poursuivre au niveau mondial et intégrer le plus grand nombre de pays.

Responsabiliser les intermédiaires financiers

Les scandales récents ont démontré la responsabilité des banques et des intermédiaires financiers dans la dérive de la finance offshore et l’évasion fiscale. Ils jouent un rôle décisif dans la dissimulation d’actifs financiers vers les paradis fiscaux. Ils doivent être tenus pour responsables des montages réalisés en prévoyant des peines aggravées pour les intermédiaires financiers, mais aussi pour les conseillers fiscaux.

Établir une liste européenne des paradis fiscaux

Aujourd’hui, chaque État membre détermine sa propre liste des paradis fiscaux. La Commission établit également sa propre liste en se basant sur les listes mises en place par les États membres. Le Panama, par exemple, figure sur la liste noire de la Commission, mais sur la liste de seulement huit États membres. Nous estimons que le niveau européen doit s’accorder sur une définition du concept de paradis fiscal afin d’établir une liste commune. La création d’une telle liste est un signal déterminant pour les pays concernés à prendre les réformes nécessaires. Par ailleurs, des sanctions commerciales et financières pourraient être envisagées à l’égard des États figurant sur cette liste.

- Inclure dans l’ensemble des traités commerciaux bilatéraux et multilatéraux de dispositions permettant de lutter efficacement contre la fraude et l’évasion fiscale (notamment par la pleine transparence bancaire).

- Assurer non seulement l’échange d’informations entre les administrations fiscales des pays de l’Union, mais aussi la constitution d’un corps européen d’inspecteurs fiscaux.

3. ÉTABLIR UNE TAXE SUR LES TRANSACTIONS FINANCIÈRES

Si l’idée d’une taxe Tobin n’est pourtant pas neuve et remonte au début des années septante, la mise en place d’une taxe sur les transactions financières a refait surface à la

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suite de la crise financière et de la période de difficultés budgétaires qui a suivi.

Les banques ont été considérées comme une des principales causes de la crise alors que dans le même temps, elles ont bénéficié d’aides publiques pour éviter qu’elles ne s’écroulent. On a alors considéré qu’il était indispensable que le coût ne soit pas uniquement supporté par les États, mais également à l’aide d’une taxe sur les transactions financières. Négociée initialement entre onze États membres, et bien qu’un accord ait été trouvé fin 2015, sa mise en œuvre semble éternellement reportée. L’Estonie s’est retirée et pour l’instant, la Belgique elle-même semble hésitante quant à l’adhésion à cette taxe.

Pour le cdH, il est nécessaire qu’une contribution sur les transactions financières soit instaurée. Cette contribution doit non seulement permettre au secteur bancaire de contribuer au projet européen, lui qui a tellement bénéficié de la solidarité des États ; mais aussi et surtout constitue un puissant instrument pour lutter contre la spéculation compulsive, le trading à haute fréquence et d’autres comportements qui trop souvent déstabilisent notre écosystème économique. Les recettes générées par cette contribution doivent constituer des recettes propres pour la zone euro. Concrètement, une contribution minime serait prélevée (de 0,1% sur les échanges d’actions et de 0,01% sur les produits dérivés), directement auprès des opérateurs du secteur financier. Cette contribution permet par conséquent de rééquilibrer les transactions vers l’économie réelle et les fondamentaux économiques.

4. SOUMETTRE LES GAFAM A LA JUSTE CONTRIBUTION

La digitalisation et la numérisation des relations économiques augmentent la dématérialisation des activités. Les géants du net en profitent pleinement et localisent leurs bénéfices là où les régimes fiscaux sont les plus avantageux.

Le 20 mars 2019, l’UE a une nouvelle fois sanctionné Google – une amende de

1,49 milliard d’euros – pour abus de position dominante.

Le 4 octobre 2017, la Commissaire européenne Vestager faisait ainsi observer que dans l'Union européenne, les entreprises numériques paient ainsi en moyenne 9% d'impôts, contre 23% pour les autres sociétés.

Google a transféré légalement 20 milliards de dollars des Pays-Bas vers une société-écran aux Bermudes, paradis fiscal bien connu.

Une part significative du résultat réalisé par les GAFAM échappe ainsi à l’impôt, leur permettant de gonfler significativement le bénéfice de leur activité par rapport aux entreprises d’autres secteurs. Selon le rapport des députés européens Paul Tang et Alain Lamassoure, Google et Facebook ont ainsi économisé à l’échelle de l’Union européenne près de 5,4 milliards d’euros d’impôts entre 2013 et 2015.

Il convient dans cette perspective de soumettre à un juste niveau d’impôt les géants du numérique. Comme souligné dans le cadre des travaux de l’OCDE, pour nous, il faut taxer les bénéfices des entreprises (numériques) là où la valeur est créée. Il s’agit d’une question de justice fiscale, notamment vis-à-vis des opérateurs économiques traditionnels implantés au cœur de nos territoires qui contribuent à notre système d’imposition et de sécurité sociale via les cotisations sociales, le précompte immobilier, la TVA ou encore l’impôt sur les sociétés.

À terme, l’harmonisation fiscale européenne et la soumission des activités à l’impôt en fonction du lieu où a lieu cette activité résoudront cette question. En attendant, une taxe de 3% sur le chiffre d’affaires des GAFAM a été proposée par la Commission, et constitue certainement une avancée nécessaire.

5. PREVOIR UN « BUDGET-CLIMAT »

Le budget de l’Europe est insuffisant par sa taille. Il représente aujourd’hui 1% du PIB européen et il est alimenté par les contributions des États membres. Pour être réellement efficace, l’Union doit bénéficier de ressources propres. Ces ressources doivent

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permettre de promouvoir la compétitivité, l’innovation, la solidarité, l’économie numérique et la transition énergétique.

Le cdH plaide pour un budget ambitieux pour faire face aux défis actuels.

Nous voulons un budget européen permettant une politique de Cohésion ambitieuse, animée d’une vision globale de long terme, inclusive de tous les territoires, combinant sans exclusive et dans la complémentarité le développement des villes et des espaces ruraux au profit de la qualité de vie de leurs habitants.

Nous voulons également une politique de Cohésion territoriale donnant toute sa place aux coopérations transfrontalières et au développement intégré des zones frontières, au travers notamment des programmes Interreg. C’est essentiel pour la Belgique et ses Régions, ouvertes sur le noyau central du cœur de l’Europe. Ce l’est également pour la cohésion de l’Europe, les zones frontières et les espaces transfrontaliers étant la pépinière où pousse l’Europe de demain et le ciment qui la solidifie.

Pour donner véritablement à l’Europe les moyens de ses ambitions, il faut lui attribuer des ressources propres : une taxe sur les transactions financières ; une taxe sur l’impôt des sociétés et une contribution carbone aux frontières ou encore une soumission aux accises du kérosène des avions ou du fioul lourd des navires. Ces ressources propres permettront de diminuer la contribution des États membres et ainsi de diminuer la pression fiscale sur le travail ou encore de soutenir une transition énergétique socialement équitable.

Ce budget permettra de produire des biens publics d’envergure européenne, ainsi que pour servir de catalyseur à l’investissement. Une partie de ce budget serait réservée aux investissements dans des projets de transition énergétique ou environnementale pour lesquels le financement privé est insuffisant par manque de rentabilité immédiate.

En plus d’être une source de revenus pour le budget de l’UE, cette contribution contribuera également à inciter les investisseurs à accélérer la transformation vers l’avenir de l’énergie propre. Cela aidera également l'Europe à

réduire ses importations de charbon, de pétrole et de gaz, rendant le continent plus prospère sur le plan économique, plus résistant aux variations des prix pétroliers et plus indépendant de toute ingérence étrangère.

Un budget « climat » de 100 milliards d’euros pourrait soutenir des projets sur le territoire européen et investir massivement dans la recherche (sur le stockage de l’énergie, les transports, etc.) et lutter contre le réchauffement climatique, en Europe ainsi qu’en Afrique et dans le pourtour méditerranéen.

Ce budget climat permettra d’intervenir pour soutenir directement les investissements nécessaires pour assurer la transition vers une société bas carbone, et viendra dès lors renforcer le recours aux prêts de la Banque européenne d’investissement. Ces interventions doivent cibler en particulier trois domaines : 1) l’isolation des bâtiments publics et privés ; 2) le développement d’infrastructures adaptées aux modes de déplacement actifs et aux transports collectifs ; 3) le développement d’énergies renouvelables et à la modernisation des réseaux de transport et de distribution d’énergie.

Quant à la gouvernance du budget européen, nous proposons un pilotage politique fort par un Haut Commissaire européen au budget et aux finances et un contrôle parlementaire au niveau européen. Ce Haut Commissaire serait en même temps Président de l’Eurogroupe. Il poursuivra l’intérêt général de l’économie de l’UE, en assurera la représentation au niveau mondial.

PRIORITÉ 6 : PREVOIR UN PACTE SOCIAL POUR LA TRANSITION

La montée des inégalités sape les contrats sociaux et peut menacer la paix sociale à la fois au sein des pays et entre les générations.

L’Union doit apporter des réponses concrètes à la transformation économique, au dumping et l'évasion fiscale, aux pratiques commerciales

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déloyales et aux craintes d'être laissés pour compte dans un environnement économique de plus en plus concurrentiel dans lequel la part de l'Europe dans le commerce mondial, le PIB et la population diminue. L’UE devrait renforcer son « bras protecteur » pour contrer son image d’institution promouvant une course sociale vers le bas, où les intérêts des acteurs du marché influents l’emportent sur les préoccupations socio-économiques des citoyens. La cohésion sociale et territoriale doit rester une priorité dans les politiques de l’Union.

En vertu de l’article 3 du Traité de l’Union européenne, l’Union a notamment pour but de promouvoir le bien-être des citoyens européens, par exemple en luttant contre l’exclusion sociale et les discriminations et en promouvant la justice et la protection sociale, l’égalité entre les femmes et les hommes, la solidarité entre les générations et la protection des droits de l’enfant.

Le 17 novembre 2017, au Sommet social de Göteborg, le Parlement européen, le Conseil et la Commission ont proclamé le Socle européen des droits sociaux. Il s’agit d’un ensemble de 20 principes et droits essentiels destinés à doter l’Union européenne de marchés du travail et de systèmes de protection sociale qui soient équitables et qui fonctionnent au mieux.

Au sein de ce Socle européen figurent notamment les différents principes liés à l’accès à l’emploi, la mobilité, ou encore le droit à l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée.

Pour réaliser notre projet d’Europe durable à l’horizon 2050, il faut renforcer la politique sociale et concrétiser les principes du socle. C’est le meilleur moyen de garantir la « transition juste », voulue par l’Accord de Paris, et de contribuer à l’« amélioration des conditions de vie et de travail [des Européens], permettant leur égalisation dans le progrès » désirée par les traités de l’Union.

Notre stratégie s’appuie sur quatre piliers complémentaires : assurer une transition juste pour les travailleurs ; améliorer la santé publique de tous les Européens ; fixer des objectifs en termes d’investissements

sociaux ; enfin, garantir un meilleur équilibre de vie et une assurance autonomie.

Actions

1. METTRE EN PLACE UN FONDS EUROPEEN POUR L’EMPLOI

Nous proposons de mettre en place un instrument financier ad hoc, un Fonds européen pour l’emploi, afin d’intervenir, en cas de graves crises économiques et/ou de chocs asymétriques, sur l’augmentation du chômage dans certains pays.

Ce système venant en appui aux systèmes nationaux, renforcerait les « stabilisateurs automatiques » permettant d’amortir les chocs économiques affectant, parfois de manière asymétrique, les Etats-membres.

Le fonds européen transférerait des moyens budgétaires aux systèmes nationaux, en cas de choc économique violent qui se traduirait par une hausse importante du chômage.

2. ASSURER UNE TRANSITION JUSTE POUR LES TRAVAILLEURS

La transition énergétique transforme profondément l’économie et redessine le marché de l’emploi. De nouveaux emplois « verts » sont créés, par exemple dans les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique ou l’économie circulaire. Certains emplois existants sont redéfinis et exigent une mise à niveau des compétences des travailleurs. D’autres emplois sont détruits, notamment dans les secteurs de l’énergie fossile et certaines industries fortement émettrices de gaz à effet de serre. Souvent, c’est l’organisation de filières entières qui est en cause comme dans l’agriculture et les transports. Depuis 2007, l’UE dispose d’un Fonds européen d’ajustement à la mondialisation (FEM) qui lui permet de cofinancer, avec les États membres, des politiques visant à faciliter le retour vers l’emploi des travailleurs ayant perdu leur travail en raison de restructurations majeures causées par la mondialisation. Jusqu’à fin 2017,

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ce fonds a bénéficié à 147.000 travailleurs européens. Néanmoins, malgré un budget relativement faible, ce fonds a été sous-utilisé.

Concrètement, nous proposons de :

- Soutenir les travailleurs touchés par l’impact de la transition énergétique et durable. L’Europe devra aussi accompagner cette transition, soutenir les secteurs qui en auront besoin, accompagner ceux qui seront les victimes de ces changements.

- Anticiper et planifier les transitions des secteurs et régions menacés de pertes d’emplois. La Commission européenne devra mener à bien, en partenariat avec les États de l’UE, les régions et les partenaires sociaux, une analyse des risques et opportunités de la transition énergétique pour chaque région européenne, afin d’anticiper et de prévenir les situations de déclin économique, source de chômage structurel. Sur base de ces projections, les responsables, décideurs politiques et partenaires sociaux pourront prendre ensemble les décisions adéquates, au plus près du terrain, pour limiter, lisser dans le temps et compenser les pertes d’emplois liées à la transition énergétique. L’initiative prometteuse de la plateforme pour les régions charbonnières en transition lancée par la Commission fin 2017 est une bonne source d’inspiration.

- Accompagner les travailleurs vers la transition. Si les mesures de soutien et d’accompagnement relèvent avant tout de la solidarité nationale, la solidarité européenne doit également se renforcer. Nous proposons, dans le cadre des Fonds de la politique sociale, un soutien accru aux États membres et aux autorités locales pour financer des mesures de formation, de reconversion, d’accompagnement et d’entreprenariat pour les travailleurs ayant perdu leur emploi à la suite de changements structurels majeurs liés à la transition énergétique.

L’accompagnement des travailleurs doit concerner également les travailleurs âgés au travers de l’apprentissage tout au long de la vie, et la mise en place de projets visant le « vieillissement actif ».

- Pour tirer pleinement parti de la dynamique créée par la transition énergétique sur l’emploi, il faut que suffisamment de travailleurs disposent des compétences requises pour les emplois nouveaux et/ou redéfinis de la transition énergétique. Afin d’attirer les jeunes dans les métiers de la transition énergétique, l’UE doit amplifier son expérimentation d’un Erasmus pour les apprentis (Erasmus Pro) et en développer un volet « vert » qui fera de millions de jeunes européens les artisans de la transition énergétique.

3. AMELIORER LA SANTE DE TOUS LES EUROPEENS

Les soins de santé sont une préoccupation majeure des citoyens européens. Une enquête Eurobaromètre récente a révélé qu’un tiers des personnes interrogées (34 %) placent ce thème en tête de leurs préoccupations.

Les fonds de la politique de cohésion financent des projets visant à améliorer l'accès aux soins de santé, à lutter contre les inégalités en la matière, à réformer les systèmes de soins de santé, à développer des solutions numériques et de soins de santé en ligne, à améliorer la recherche et l'innovation, l'éducation à la santé, le vieillissement en bonne santé ainsi que la santé et la sécurité au travail.

Actuellement, les moyens de la politique de cohésion interviennent dans le soutien à l’offre des soins de santé. Le cdH insiste pour que cela se poursuive à l’avenir. Par contre, nous pensons que ces fonds de cohésion doivent être davantage intégrés avec les autres instruments de l’Union, dont en particulier le fonds pour l’investissement (InvestEU) et les programmes d’investissement nationaux.

Améliorer la santé des Européens passe également par la poursuite des efforts consentis au niveau européen en matière de

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qualité de l’alimentation, de pollution ou encore de santé et sécurité au travail.

Le cancer est la première cause de mortalité liée au travail dans l’Union européenne. Selon les chiffres de la Commission européenne, sept à douze personnes meurent d’un cancer d’origine professionnelle toutes les heures en Europe.

Afin d’endiguer ce phénomène et permettre un mieux vivre au travail, l’Union européenne a un rôle important à jouer. En effet, le Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne lui confère le droit de fixer des prescriptions minimales en matière de santé et sécurité au travail. Afin d’être le plus efficace possible, la fixation de ces prescriptions minimales doit se faire en étroite collaboration avec le monde scientifique et les partenaires sociaux, véritables acteurs de terrain.

La Directive 2004/37/CE sur les substances cancérigènes au travail est l’une des Directives phare en la matière. Elle vise en effet à protéger les travailleurs contre les risques résultants d’une exposition à des substances cancérigènes et mutagènes, notamment en fixant des valeurs limites d’exposition.

Durant la dernière législature, la Commission européenne a proposé trois révisions de cette Directive, avec pour objectif de fixer davantage de valeurs limites ainsi que d’étendre son champ d’application à de nouvelles substances nocives. Ces révisions devraient contribuer à sauver jusqu’à 100.000 vies dans les cinquante années à venir.

Par son investissement au sein du Parlement européen, le cdH a non seulement permis l’aboutissement de ces trois révisions, mais a aussi et surtout renforcé sans cesse les propositions émises par la Commission européenne. Valeurs limites plus strictes pour les poussières de bois et le chrome VI, lancement des travaux pour une meilleure protection face aux substances toxiques pour la reproduction et aux médicaments utilisés en chimiothérapie (et auxquels est exposé le personnel médical) ou encore renforcement du rôle des partenaires sociaux sont autant d’avancées obtenues par notre parti. Mais s’il y a bien un combat remporté par le cdH, c’est

celui qui a permis d’inclure les émanations de moteurs diesel dans le champ d’application de cette Directive, émanations qui coûtent la vie à près de 5000 personnes par an en Europe.

Pour le cdH, il est indispensable de poursuivre cette dynamique en assurant une révision permanente de cette Directive au regard des évolutions technologiques et techniques, et en assurant un contrôle efficace de sa mise en œuvre dans les différents États membres. Pour ce faire, il est crucial de s’appuyer sur les recommandations émises par les comités scientifiques et des partenaires sociaux. Ce faisant, l’Union européenne permettra d’améliorer encore les conditions de travail de l’ensemble des travailleurs européens.

Pour améliorer la santé des citoyens, nous proposons de :

- Imposer que tous les produits de puériculture (y compris, par exemple, les poussettes, les tapis de jeux et les sucettes) soient exempts de produits chimiques cancérigènes.

- Fixer des limites pour les produits chimiques dans les produits d’hygiène (par exemple les couches).

- Moderniser la législation européenne afin de tenir compte de l’exposition cumulative (le « cocktail chimique »). Les limites maximales doivent porter non seulement sur des substances individuelles, mais également sur le fait que les consommateurs sont simultanément exposés à de nombreuses autres substances.

- Les consommateurs doivent recevoir des informations précises, faciles à comprendre et fiables sur les produits chimiques dans les produits qu'ils achètent, au moyen d'un étiquetage clair et cohérent.

4. STIMULER L’INVESTISSEMENT SOCIAL

Une proposition ambitieuse récente — le Plan Prodi-Sautter — présente une vaste feuille de route pour stimuler l’investissement dans les infrastructures sociales, sous la coordination de l’UE. L’objectif est de mobiliser des ressources publiques et privées pour combler les déficits d’investissement dans des domaines tels que l’éducation et la formation

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(garderies, écoles, universités, centres de formation), la santé et les soins de longue durée (hôpitaux, technologies médicales, soins aux personnes âgées) et le logement abordable. L’UE a traditionnellement promu et soutenu de vastes infrastructures économiques pour les transports, les télécommunications et l’énergie, qui aidaient la libre circulation et le commerce intra-UE, mais n’a pas été suffisamment active dans ces domaines pourtant cruciaux pour le développement humain.

Pour le cdH, l’Union doit apporter un soutien équivalent aux infrastructures répondant aux besoins sociaux des territoires et des communautés locales et permettant à l’UE d’être un acteur tangible de cette solidarité au niveau local.

Concrètement, nous proposons de :

- Intégrer les investissements dans les infrastructures sociales dans l’analyse du Semestre européen et formuler des recommandations spécifiques aux pays.

- Développer de nouveaux instruments financiers pour les infrastructures sociales tels que des social bonds.

5. GARANTIR UN MEILLEUR EQUILIBRE DE VIE

Le dernier accord relatif à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée constitue une avancée vers une Europe plus sociale. Il prévoit le principe d’un congé paternité partout dans l’Union, pouvant être pris à la naissance d’un enfant et devant durer « au moins dix jours ». Il devra être rémunéré, au niveau du congé maladie dans l’État membre.

Le projet de directive confirme aussi un congé parental d’au moins quatre mois, dont deux non transférables d’un parent à l’autre, pouvant être pris jusqu’aux 12 ans de l’enfant. Il devra lui aussi être rémunéré « à un niveau adéquat », à déterminer dans chaque État. Enfin, la directive introduit un « congé aidant » d’au moins cinq jours par an et par travailleur, pour s’occuper d’un proche (sans obligation de rémunération).

Ces dispositions s’appliqueront aux travailleurs disposant d’un « contrat de travail » ou d’une

« relation de travail », mais pas aux indépendants.

Ces améliorations n’auront pas d’impact en Belgique, dès lors que ces dispositions existent déjà. Pour le cdH, il faut aller plus loin si nous voulons améliorer la mise en œuvre du principe de l’égalité entre les hommes et les femmes au travail.

Concrètement, nous proposons :

- D’augmenter la durée du congé de maternité dans l’ensemble des États membres ;

- De prévoir un congé familial complémentaire de 1 mois pouvant être reporté sur l’un ou l’autre parent. Une telle durée minimale imposée dans l’ensemble de l’Union européenne constituerait effectivement une mesure susceptible d’avoir une influence sur la répartition des rôles au sein des familles et sur l’accès des femmes au marché du travail dans des conditions similaires aux hommes.

- De prévoir un niveau de rémunération équivalant au moins à ce que le travailleur concerné recevrait en cas de congé maladie.

Cette proposition s’inscrit pleinement dans un des objectifs du socle européen des droits sociaux qui vise l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée. Selon ce principe, les parents et les personnes ayant des responsabilités familiales ont droit à des congés appropriés, à des régimes de travail flexibles et à un accès à des services de garde d’enfants.

De plus, nous proposons la mise en place d’un soutien spécifique aux familles. Concrètement, nous proposons un renforcement des services aux ménages qui contribueront à garantir un meilleur équilibre de vie au quotidien. L’Union européenne pourra contribuer au financement via les fonds sociaux.

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PRIORITÉ 7 : CRÉER DES NOUVELLES OPPORTUNITÉS, RENFORCER LES LIENS ENTRE CITOYENS

Le programme Erasmus a contribué à réaliser un réseau d’échange des savoirs, de partage des expériences. Erasmus est un des symboles de la réussite du projet européen. Depuis son lancement plus de 3 millions de jeunes Européens ont eu l’opportunité de connaître de nouvelles opportunités et des cultures différentes. La proposition de la Commission visant au renforcement du budget alloué à ce programme est pour nous une priorité.

L’Europe que nous voulons déployer encore davantage les programmes Erasmus pour que la moitié au moins des jeunes Européens ait, avant leurs 25 ans, passé six mois dans un autre pays d’Europe.

Les échanges et la culture doivent être au cœur de la refondation de l’Europe.

Ce sont les citoyens, avant les institutions, qui pourront porter l’Europe. Si nous voulons réveiller en chacun la conscience européenne, nous devons concrétiser l’espace européen de la culture. Nous devons renforcer cette communauté de lettres, de langues, d’histoire, de mémoires. C’est avec cette âme qu’il nous faut renouer.

Actions

1. METTRE EN PLACE UN DROIT EUROPEEN A LA FORMATION

Cela fait désormais plus de trente ans que l’Union européenne développe des initiatives en matière d’éducation et de jeunesse ayant pour vocation de donner aux citoyens de tous horizons l’opportunité d’être mobiles en Europe. Une mobilité qui apporte connaissances, compétences, savoir-faire, savoir-être et ouvre l’esprit de toutes celles et tous ceux qui peuvent en bénéficier, trop peu nombreux à ce jour en dépit des efforts nationaux, bilatéraux ou européens pour en augmenter le nombre.

En pratique, malgré une augmentation régulière du nombre de bénéficiaires de fonds

pour une mobilité, seule une minorité de jeunes profite aujourd’hui du soutien de l’UE à la mobilité.

L’Europe a su promouvoir et encourager la mobilité et doit maintenant permettre aux plus jeunes d’en faire l’expérience. En particulier, la mobilité doit permettre l’acquisition de compétences humaines et professionnelles. Nous avons besoin d’une action européenne en faveur de l’apprentissage continuel.

Nous proposons dès lors de mettre en place un droit à la formation. Concrètement chaque jeune aura droit à un compte-individuel pour financer sa formation dans un autre pays européen. Il pourra choisir d’effectuer sa formation dans un établissement scolaire, une entreprise, etc. dans n’importe quel pays européen. L’Europe pourra contribuer au financement via les fonds sociaux et les partenaires sociaux seraient associés.

Le système du compte-individuel fera de la formation continue une norme et incitera les personnes à investir davantage dans le développement de leurs compétences.

2. CREER DES UNIVERSITES EUROPEENNES

La refondation de l’Europe passe également par le renforcement de l’apprentissage des langues et de nos connaissances mutuelles. Nous proposons de créer des véritables universités européennes avec un programme commun s’appuyant sur l’excellence des établissements des États membres.

À l’instar de la proposition faite par Borislaw Geremek, nous proposons d’installer une université européenne à Strasbourg dans les locaux du Parlement européen. Ces locaux seraient ainsi utilisés de manière permanente et les déplacements des députés rationalisés.

3. ÉLARGIR LE PROGRAMME #DISCOVEREU A TOUS LES JEUNES DE 18 ANS

DiscoverEU est un programme de l'UE offrant aux jeunes de 18 ans l'opportunité de voyager à travers l'Europe. L'objectif est d'aider des jeunes Européens à découvrir l'identité

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européenne et à véhiculer les valeurs clés de l'Union européenne à travers les voyages.

Le Pass Interrail est une occasion unique pour les nouvelles générations de mieux appréhender le sentiment d'appartenance à l’Europe. Voyager à travers l'Europe est un excellent moyen pour expérimenter la liberté de circulation, mieux comprendre la diversité de l'Europe, de rencontrer de nouvelles personnes avec des cultures différentes, mais avec qui nous partageons un patrimoine matériel et immatériel commun. Cette expérience formative permettrait aux jeunes citoyens européens de donner vie à la devise européenne "Unie dans la diversité".

Lorsque ce programme a été lancé en 2018, plus de 100.000 jeunes ont posé leur candidature, et 15.000 jeunes ont reçu un Pass Interrail pour voyager à travers l’Europe.

Le cdH propose de généraliser ce Programme à tous les jeunes de 18 ans.

Tisser des liens avec d'autres citoyens européens et bénéficier d'un programme européen de mobilité sont autant d'investissements à long terme à destination des nouvelles générations pour bâtir le futur de l'Europe.

PRIORITÉ 8 : APPORTER UNE RÉPONSE HUMAINE AU DÉFI DE LA MIGRATION

La politique migratoire est l'un des plus grands défis auxquels l'UE est actuellement confrontée. L’afflux massif de migrants et de demandeurs d’asile dans l’Union européenne en 2015 a provoqué une crise politique sans précédent et des clivages profonds dans l’opinion publique et entre les États membres. Cette "crise" a mis à rude épreuve la politique de l'UE et révélé les difficultés liées à l’absence d’une solidarité réelle entre les États membres.

La politique européenne en la matière est insoutenable. Elle est poussive, divise les États de l’Union et déboussole les opinions européennes.

Au niveau national, les politiques ont été davantage orientées vers des mesures qui sapent les valeurs fondamentales et les principes de solidarité de l'UE.

L'UE a besoin d’une politique d’asile efficace et sa réponse face à la vague populiste ne doit être ni défensive ni hésitante. Nous appelons dès lors à établir des bases solides d’une politique européenne commune de l’asile ; à prévoir une politique de migration économique encadrée et à mieux lutter contre l’immigration illégale.

Aujourd’hui, les chiffres concernant les demandes d’asile montrent sans aucune ambiguïté que la situation est gérable, si on veut la gérer.

Actions

1. ASSURER LA SOLIDARITE EUROPEENNE PAR UNE REFORME DU MECANISME DE DUBLIN

La politique d’asile européenne est structurée par la convention de Dublin. Cette convention prévoit que les pays par lesquels entrent les migrants sont chargés d’analyser les demandes d’asile qui sont formulées. Ceux qui introduisent une demande d’asile dans un autre pays européen se voient renvoyés dans le pays d’accueil afin d’y instruire la procédure. La « crise » de 2015 a montré toutes les limites de ce régime de Dublin. Il fait supporter une charge disproportionnée aux pays de premier accueil.

Pour remédier à l’incohérence manifeste du règlement de Dublin, en cas d’accroissement sérieux du nombre de demandeurs d’asile, la Commission a apporté dès 2015 une dérogation au principe du pays de première entrée en l’atténuant par un dispositif de relocalisation visant à répartir en deux ans 160.000 demandeurs accueillis en Grèce et en Italie, exprimant ainsi la solidarité des États membres situés « à l’intérieur » de l’UE. Le refus des pays de Visegrad de se voir imposer au nom du principe de solidarité une relocalisation jugée par eux contraire à la souveraineté nationale a conduit à l’impasse et

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est participe à l’échec du programme de relocalisation.

Nous proposons la mise en place d’un système de répartition équitable et permanente qui serait géré par une future agence européenne en matière d’asile.

Pour y parvenir et surmonter les blocages politiques actuels, nous proposons l’instauration d’un pool européen de solidarité pour l’asile composé des pays situés aux frontières extérieures de l’UE et d’autres pays volontaires. Nous proposons la mise en place de plafonds annuels pour garantir un partage équitable de la responsabilité entre les Etats. Ces plafonds seront définis d’un commun accord sur base d’une clef raisonnable, ajustée annuellement en fonction des efforts constatés pour chacun globalement.

Les dépenses liées à la réinstallation devraient être prises en charge intégralement par le budget de l’Union européenne, jusqu’à l’achèvement de la procédure d’asile, y compris les dépenses initiales liées à l’intégration.

2. CREER UNE AGENCE EUROPEENNE DE L’ASILE

Nous proposons création d'une agence d'asile centralisée, élément clé d'une politique d'asile durable et équitable. Cette agence serait en charge de la réception et répartition des demandes recevables enregistrées aux frontières de l’Union en lien avec les administrations nationales compétentes sur base d’un entretien approfondi d’orientation tenant compte des projets des personnes, de leurs capacités, d’une conception large des liens familiaux et des chances d’insertion.

Cette agence serait aussi responsable de la politique de retour.

La création d’une agence européenne de l’asile devrait aller de pair avec la poursuite de la diversification des voies d’accès extraterritoriales. La réinstallation en coopération avec le HCR depuis les camps de réfugiés a le mérite d’atteindre les réfugiés qui se trouvent dans les situations humanitaires les plus dramatiques. Si l’UE décidait de recourir

régulièrement à cette pratique, ce serait aussi un moyen de stabiliser les populations en attente dans ces camps.

Afin d’éviter que ces candidats à l’asile ne passent la frontière de l’UE de manière illégale et a fortiori parfois dangereuse, nous préconisons de mettre en place des centres de traitement des demandes d'asile dans les principaux pays de transit. La future agence européenne en matière d’asile et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés seraient alors chargés d'évaluer l'éligibilité des candidats à l’asile dans le cadre d'une procédure de demande accélérée. La mise en œuvre du parrainage de réfugiés par des communautés d’accueil préparées à recevoir et accompagner les réfugiés (une pratique répandue au Canada) doit être encouragée, car elle présente l’avantage de garantir les meilleures conditions ultérieures de l’intégration.

De même qu’elle implique le régime d’asile commun, la libre circulation implique que l’Union se dote des moyens d’assurer effectivement le contrôle de ses frontières extérieures.

L’Union européenne met progressivement en place des outils, notamment des bases de données, dans le domaine de la gestion des frontières et des frontières intelligentes (smart borders), mais ces dispositifs ne sont pas encore pleinement déployés ni utilisés au maximum de leurs possibilités, notamment en matière d’introduction et d’exploitation de données biométriques.

Opérationnelle depuis mai 2005, l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’Union européenne « Frontex » avait initialement pour seul objectif de fournir une assistance technique ou opérationnelle aux États dans leur mission de contrôle de leurs frontières extérieures. À partir de 2014, le périmètre et les moyens d’action de Frontex ont été considérablement renforcés.

Les effectifs de Frontex, soit un peu plus de 1.500 personnes, restent toutefois modestes en comparaison, par exemple, de ceux de l’U.S.

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Customs and Border Protection, qui emploie plus de 60.000 agents, pour un kilométrage de frontières à garder sensiblement équivalent (12/000 km de frontières terrestres environ pour les États-Unis ; 13.000 km environ pour l’Union européenne). La protection des frontières extérieures de l’Europe repose donc encore essentiellement sur les policiers ou douaniers des États membres.

Nous plaidons pour confier à Frontex des moyens suffisants et un rôle propre pour qu’elle agisse comme un véritable corps de garde-côtes et garde-frontières.

Pour cette raison, nous soutenons l’accord entre les négociateurs du Parlement et du Conseil sur la réforme de Frontex. L’objectif est de mettre en place un corps permanent de 10.000 agents d'ici 2027.

Par ailleurs, les différents mécanismes informatisés de contrôle des entrées et sortie du territoire européen doivent être intégrés et permettre un contrôle effectif et coordonné, en particulier vis-à-vis des personnes qui ne peuvent plus entrer sur le territoire européen (suite, par exemple, au non respect d’une obligation de quitter le territoire).

L’évolution de Frontex vers une véritable agence rendrait possible le renforcement des contrôles au travers d’une meilleure coordination des organes de renseignement et de poursuite (Europol) avec la lutte contre les réseaux de passeurs conduite par l’agence et en permettant à celle-ci d’engager via Eurojust des poursuites transnationales.

Cette démarche progressive devrait permettre de mieux prendre en compte les arbitrages entre souveraineté nationale et renforcement de la sécurité collective des Européens. Il s’agit d’articuler sur le terrain des forces nationales de première ligne et des capacités européennes permanentes d’appui.

3. METTRE EN PLACE DES VOIES LEGALES DE MIGRATION ECONOMIQUE

Sans voies légales de migration économique, les demandes d’un accès au territoire européen se reportent sur l’asile. Pour offrir une réponse cohérente et globale aux mouvements de population, il convient de permettre des voies encadrées de migration économique. L’ouverture de voies de migration économique, avec des balises précises, permet en effet de préserver l’accueil lié à l’asile proprement dit et donc le respect des droits fondamentaux des personnes en détresse.

Nous proposons de clarifier les voies d’une immigration européenne légale de travail.

Pour ce faire, nous proposons :

1. Approuver, sur proposition de la Commission européenne, un plan quinquennal pour la migration. Ce plan serait établi en tenant compte : les besoins du marché du travail européen, des différents niveaux de qualification requis par l’UE, mais aussi des besoins des grandes régions du monde avec lesquelles l’UE entretient un partenariat politique, spécialement le continent africain.

2. Crée un visa européen pour la recherche d’un emploi. Ce visa donnerait accès à l’Union pour une période limitée en vue de chercher un emploi. L’obtention d’un emploi permettrait de résider temporairement dans l’UE. Si la recherche d’emploi n’est pas fructueuse, le ressortissant du pays tiers doit retourner dans le pays d’origine avant l’expiration du visa. Le non-respect de cette condition doit entraîner l’interdiction définitive d’accès au territoire européen. Ces mesures de mobilité ciblées et visibles pourraient encourager la coopération des pays tiers en matière de réadmission et de retour.

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3. UNE EUROPE FORTE ET ENGAGEE

Diagnostic

Le contexte politique et stratégique international a considérablement évolué ces dernières années. Les tensions internationales sont plus vives. L’aggravation des menaces en Europe et contre l’Europe oblige les gouvernements à prendre plus au sérieux les exigences de la sécurité et de la défense. Alors que la politique de voisinage visait à créer un cercle de pays stables et prospères à ses frontières, l’Union européenne est entourée par un « arc d’instabilité », qui ne représente pas seulement une menace extérieure, mais aussi un danger en son sein même.

Les risques se multiplient. À l’Est, la Russie est plus menaçante que jamais. Après l’agression de la Géorgie en 2008, c’est vers l’Ukraine qu’elle a tourné son agressivité, annexant la Crimée et déstabilisant le Donbass, tout en multipliant les manœuvres militaires aux frontières orientales de l’Union et autres attaques hybrides dans les pays d’Europe de l’Est. Au Sud, ce sont les dislocations étatiques en chaîne – Irak, Libye, Syrie, Sahel - qui nourrissent la violence des guerres locales et la folie djihadiste contre les Occidentaux. Le terrorisme est en effet devenu, depuis 2005, une menace constante pour les sociétés européennes.

À cela s’ajoute une grave instabilité en Afrique centrale, la montée en puissance de la Chine, les cyber-menaces, la montée des autoritarismes en Europe. Rarement l’équation stratégique de l’Union européenne aura été aussi complexe, aussi instable, aussi inquiétante. Car ces crises, pour lointaines qu’elles soient, ont des effets à l’intérieur de l’Union européenne et concernent tous les citoyens européens. Ces évolutions induisent de manière frontale ou insidieuse la remise en cause des valeurs européennes, sans parler de la montée du populisme et de l’euroscepticisme.

Face à ces multiples crises et aux inquiétudes qu’elles suscitent, les citoyens européens attendent de l’Union qu’elle les protège. C’est

à cette condition seulement qu’elle retrouvera à leurs yeux toute sa légitimité.

Il n’est donc pas surprenant que les questions de sécurité, aussi bien à l’intérieur qu’autour de l’UE, arrivent en tête des préoccupations des citoyens comme des chefs d’État. La plupart des sondages font du renforcement de la défense commune une aspiration prioritaire des citoyens : l’eurobaromètre d’avril 2017 révèle que 68 % des sondés souhaitent plus d’implication de l’Europe en matière de sécurité et de défense et 70 % plus d’implication dans la protection des frontières extérieures. Face à des menaces globales, qui affectent l’ensemble des États membres, la réponse doit en effet être européenne. Il faut donc se réjouir que l’Europe ait fait de la sécurité une priorité. Depuis 2016, de nombreuses initiatives ont ainsi été lancées afin de donner toute sa portée à une politique de sécurité et de Défense commune (PSDC) aujourd’hui largement en retrait des autres politiques européennes, et permettre à l’Union européenne d’assurer elle-même sa sécurité et celles de ses citoyens.

L’Union européenne ne peut plus se contenter de s’appuyer sur le soft power, par la diffusion de normes, d’idées et de modèles institutionnels ; elle doit agir de manière plus concrète pour la sécurité de ses citoyens.

Vision

Le cdH porte l’ambition d’une Europe engagée en faveur du développement humain. Une Europe aux avant-postes d’une mondialisation plus juste et régulée.

L’Europe doit relever le défi de la promotion de nouvelles normes mondiales pour une gouvernance globale équilibrée et juste. C’est une question de solidarité, mais aussi de durabilité politique et économique. La nouvelle architecture mondiale que nous réclamons doit tenir compte des nouveaux défis et y répondre.

Une Union européenne en tant qu’acteur engagé doit peser dans notre monde

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multipolaire, et se doit de construire, avec ses voisins du Sud comme de l'Est, un espace de sécurité, de stabilité et de prospérité.

L’Europe a un projet, une culture et une identité basée sur une histoire commune, sur des valeurs universelles, et des intérêts fondés sur la défense de ce projet et de ces valeurs. L’Europe doit, sur cette base, s’engager dans les grands défis du monde, favoriser l’émergence de nouveaux équilibres à l’échelle planétaire et porter le combat pour réorienter le cours de la mondialisation. Ce n’est qu’à l’échelle de l’Union que les peuples européens peuvent retrouver les moyens d’une authentique souveraineté, c’est-à-dire la capacité de maîtriser leur destin collectif.

Sur la scène internationale, l’Europe peine souvent à faire entendre sa voix. Elle donne trop souvent le sentiment d’accompagner la marche du monde plutôt que d’en infléchir le cours. Elle peine à défendre ses intérêts, à se faire respecter et à s’affirmer comme puissance mondiale. Face aux nouveaux défis, l’Europe apparaît comme une puissance incomplète.

Quand les Européens sont fidèles à leurs valeurs et convictions humanistes, ils peuvent marquer le monde de leur empreinte. C’est l’Europe qui a pris ainsi le leadership de la lutte contre le réchauffement climatique. D’abord avec son engagement dès l’origine de la concertation de Kyoto, ensuite avec son rôle déterminant dans le succès de la COP21. Ce sont les Européens qui ont œuvré pour la création d’un Tribunal pénal international pour juger les crimes de guerre dans l’ex-Yougoslavie et dans d’autres pays. C’est l’Europe qui est à l’origine du combat en faveur de « l’exception culturelle » dans les années 1990 et qui a porté à la conclusion de la Convention sur « la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles ».

La relance du projet européen doit s’inscrire dans les transformations profondes de l’ordre international. L’Europe est celle qui, mieux que d’autres, peut influencer les évolutions économiques, stratégiques et politiques de la mondialisation, dans le sens du progrès et non celui de la régression.

Si les effets positifs de la mondialisation ne doivent pas être sous-estimés sur le plan du développement et de la réduction de la pauvreté dans le monde, les dérives qu’elle engendre doivent trouver une réponse : déséquilibres commerciaux, conditions de travail inhumaines, dégradation de l’environnement, surexploitation des ressources naturelles, inégalités flagrantes et en hausse au sein de nos sociétés et entre nos sociétés. Les règles du système international ne peuvent bien entendu pas être réécrites par l’Europe à elle seule. Cependant, elle devra prendre les devants. Changer la donne doit être le nouvel horizon de la diplomatie européenne.

Nos chantiers prioritaires :

- Préserver la paix. L’Europe doit défendre de nouvelles coopérations internationales, pour promouvoir la paix, les droits universels et la diversité culturelle, le respect des biens communs, et le développement durable.

- Lutter contre le changement climatique. Le changement climatique est un défi mondial qui ne peut être traité que par une coordination mondiale. Il exige de faire en sorte que chaque pays puisse faire sa part.

- Coordonner la finance mondiale. Nous devons œuvrer à une coordination plus globale dans ce domaine.

- Réorienter le commerce. Nous savons maintenant que les avantages des accords commerciaux ont été exagérés et les coûts sous-estimés. À tout le moins, nous devons être attentifs aux conséquences qui en résultent pour les travailleurs, l'environnement et la santé.

- Refonder la fiscalité. Nous devons éliminer les paradis fiscaux et créer un système équitable de taxation des multinationales.

Enfin, l’Europe doit poursuivre la construction de son autonomie en matière de défense en se dotant d’une capacité stratégique et militaire commune. La dispersion de moyens, de

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stratégie des États membres quant à leur politique extérieure et de défense ne permet pas de répondre efficacement aux inquiétudes des citoyens. La construction d’une Europe de la Défense est non seulement un outil pour une utilisation plus efficace des moyens dépensés par chacun des États membres, mais également d’assumer le leadership de l’Union pour favoriser la Paix et la prospérité. Cette épreuve peut être fondatrice d’une solidarité de destin. Face au flou quant à l’engagement des États-Unis dans l’OTAN, la perspective d’une Défense européenne devient une impérieuse nécessité.

PRIORITÉ 9 : RENFORCER LE MULTILATERALISME ET LE RÔLE DE L’UE DANS LES INSTANCES INTERNATIONALES

Pour le cdH, l’Europe doit continuer à promouvoir les valeurs universelles qui fondent la démocratie et l’État de droit. Ces valeurs découlent directement de notre histoire, de nos textes fondateurs et notamment la Charte européenne des droits fondamentaux. Les Droits humains, la place des femmes et celle des minorités, la liberté d’opinion et d’expression, l’indépendance des médias sans laquelle aucune conscience politique digne de ce nom ne peut être forgée, la solidarité et le développement, le respect du droit international et de la diversité culturelle, tous ces principes doivent être affirmés et respectés.

Son action au niveau international doit servir la paix et la stabilité mondiale. La promotion du respect des droits humains, de l’État de droit, de la gouvernance démocratique à tous les niveaux sera une ligne directrice. L’Europe par son histoire est un symbole de paix et d’espoir, mais aussi la première pierre d’une gouvernance mondiale démocratique.

Dans cette perspective, le cdH plaide pour que l’Europe puisse renforcer son action dans les instances internationales pour la défense des droits humains, politiques, économiques,

sociaux, culturels et environnementaux. Leur application doit être soutenue et encouragée.

L’Europe doit se faire le chantre d’un multilatéralisme efficace et agir en faveur d’une refondation de l’ordre mondial.

Le système de l’après-guerre, né de la charte de San Francisco, de Bretton Woods, ne répond plus au monde d’aujourd’hui. Les problèmes de notre siècle exigent plus de multilatéralisme, mais un multilatéralisme différent, plus représentatif et plus efficace.

Le monde est confronté à de profondes mutations et de nouveaux rapports de force sont en train de s’établir.

Le renforcement du multilatéralisme en est la meilleure réponse. Face à l’annonce d’un nouveau G2 : États-Unis – Chine, l’Europe doit redéfinir le cadre multilatéral et y garantir, dans un esprit de coresponsabilité, la place de tous les acteurs internationaux qui veulent déployer leur propre influence et leur hégémonie.

L’Union européenne doit bâtir un nouveau multilatéralisme, où les États, la société civile, les ONG, le secteur privé, les médias, les syndicats, les citoyens travaillent de concert. Ce multilatéralisme efficace est le seul moyen,

Le vote à l’unanimité dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune

DROITS DE L’HOMME AU NIVEAU INTERNATIONAL En juin 2017, en raison de l’exigence d’unanimité, l’UE a été dans l’incapacité d’adopter au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies à Genève une déclaration sur la situation des droits de l’homme en Chine, ce qui n’était jamais arrivé auparavant

SANCTIONS DE L’UE Durant l’été 2017, le vote à l’unanimité a bloqué l’adoption de mesures restrictives ciblées de l’UE à l’encontre du Venezuela en réponse à la neutralisation de l’Assemblée nationale démocratiquement élue. Des mesures ont finalement été adoptées en novembre 2017, après une nouvelle dégradation de la situation. Les règles de l’unanimité ont également retardé ou empêché un accord sur les personnes et entités à inscrire sur une liste dans le cadre des régimes de sanctions existants de l’UE.

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pour un pays de la taille de la Belgique et pour l’UE dans ses différentes composantes, de promouvoir les valeurs et les intérêts de nos concitoyens.

Nous avons maintenant un nouvel agenda : l’agenda 2030, les objectifs de développement durable. Les dix-sept Objectifs de développement durable (ODD) doivent faire partie des nouveaux paradigmes de l’Union européenne. C’est l’agenda du futur. C’est pour cela que l’Union devrait proposer la convocation d’un sommet en l’an 2020 pour relancer l’application de cet agenda.

Actions

1. ŒUVRER POUR UNE REFORME DU CONSEIL DE SECURITE DES NATIONS UNIES

Le Conseil de Sécurité est l'organe le plus puissant du système des Nations Unies. Il est seul compétent pour constater la violation par un Etat de ses obligations en matière de respect de la paix et de la sécurité internationales. Il peut décider un embargo économique ou, dans les cas les plus extrêmes, des actions militaires.

Nous plaidons pour une réforme du Conseil de Sécurité des Nations Unies afin d’assurer une meilleure représentativité de la planète, tout en prévoyant un siège permanent de l’Union européenne.

La composition du Conseil de Sécurité ne reflète plus la société internationale contemporaine.

Si nous, Européens, voulons peser sur la marche du monde, l’Union est la seule capable de défendre efficacement nos valeurs et nos intérêts. Elle seule semble capable de ramener la sérénité et le dialogue, mais aussi de promouvoir le multilatéralisme et la résolution pacifique des crises.

Pour que l’Union puisse devenir un véritable acteur mondial, elle doit pouvoir jouer un rôle clé dans les instances internationales et en premier lieu au Conseil de Sécurité qui agit pour le maintien de la paix et de la sécurité internationale.

2. METTRE FIN A L’UNANIMITE EN MATIERE DE POLITIQUE ETRANGERE ET PARLER D’UNE SEULE VOIX

L’Union est progressivement passée de l’unanimité au vote à la majorité qualifiée. Introduite pour la première fois par l’Acte unique européen, la majorité qualifiée est aujourd’hui la procédure de vote standard pour le processus décisionnel de l’UE. Une situation qui contraste avec la politique étrangère et de sécurité commune de l’UE, pour laquelle le vote à l’unanimité demeure la règle, même si les traités prévoient des possibilités de recourir à des formes de prise de décision plus souples.

Si la PESC de l’UE a été considérablement renforcée au cours des dernières années, la capacité d’action de l’UE doit être améliorée dans un certain nombre de domaines. Il s’agit notamment de la défense et de la promotion des droits de l’homme, de l’imposition de sanctions par l’UE ou de l’adoption de positions sur les grandes questions régionales et géopolitiques. Un mécanisme de prise de décision plus souple et plus efficace est nécessaire pour permettre à l’UE de répondre de façon rapide et adéquate à l’évolution constante des défis mondiaux.

Le cdH plaide pour le vote à la majorité qualifiée en matière de politique étrangère pour faire de l’Union un acteur plus fort, plus efficace et plus crédible sur le plan mondial.

3. NEGOCIER UN PACTE MONDIAL SUR L’ENVIRONNEMENT ET ŒUVRER POUR LA MISE EN PLACE D’UNE AGENCE DE L’ENVIRONNEMENT AU NIVEAU INTERNATIONAL

Le leadership européen lors de la COP21 était davantage axé sur son rôle de médiateur et d'organisateur. L'UE a en effet contribué à créer un cadre nécessaire permettant la signature de l'Accord de Paris par 195 États en établissant des liens entre les pays développés et ceux en développement. Il est essentiel que l'Europe poursuive ses efforts au sein du régime climatique mondial.

L'Europe peut et doit devenir le gardien de l'Accord de Paris sur le changement climatique.

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L'UE et ses États membres ont la capacité d'exercer leur leadership en montrant l'exemple, puisqu'ils ont promulgué certaines des législations environnementales les plus ambitieuses au monde. Cependant, il faudra aborder les problèmes de coordination entre les États membres et les institutions européennes relevant des compétences partagées, ainsi que les contradictions éventuelles entre les politiques climatiques et de sécurité énergétique. De même, il est important que l'UE travaille au renforcement du cadre juridique pour le régime climatique mondial.

En tant que puissance normative, l'UE peut s'appuyer avec succès sur des outils tels que la diplomatie multilatérale afin d'influer sur l'agenda climatique international et devenir le gardien de l'Accord de Paris.

L’objectif de la création d’une organisation mondiale de l’environnement doit être poursuivi, dans un format renouvelé, adapté au 21ème siècle, celui du « multilatéralisme participatif » qui associe les territoires, le secteur privé et la société civile en plus des États. Notre second objectif doit être la négociation d'un Pacte sur l'environnement.

4. COORDONNER LA FINANCE INTERNATIONALE

En 2008 et en 2009, sous l’influence de Gordon Brown, alors Premier ministre britannique, le G-20 a décidé de coordonner ses politiques expansionnistes pour lutter contre la contraction déclenchée par la crise financière. Malheureusement, cette coopération ne s’est pas inscrite dans la durée, à cause notamment de la volonté de l’Allemagne de suivre une orthodoxie fiscale stricte. Or, en l'absence de coordination, chaque pays bénéficiera non optimales. S'il y avait eu plus de coordination et de coopération, l'économie mondiale aurait très probablement pu se rétablir plus rapidement. Même l’Europe peut être confrontée à des problèmes lorsque les flux de capitaux entraînent des variations importantes des taux de change en peu de temps.

L’Europe doit promouvoir une coopération plus forte dans le secteur financier en particulier. En l'absence d'une telle coordination, il existe un risque lorsque les pays tentent d'attirer les banques en offrant un environnement moins réglementé. Compte tenu du degré élevé d'interdépendance des institutions financières mondiales, la coopération en matière de réglementation financière est cruciale. L’Europe devrait continuer à lutter, dans toutes les enceintes au sein desquelles ces questions sont débattues, en faveur d’une réglementation bancaire plus stricte.

Enfin, l'Europe doit reconnaître que les frontières sont importantes. Les flux transfrontaliers diffèrent des flux internes à un pays et doivent être soumis à une réglementation plus stricte. L'instabilité de ces flux engendre l'instabilité des taux de change, qui à son tour engendre l'instabilité macroéconomique.

PRIORITÉ 10 : BÂTIR LA DÉFENSE EUROPÉENNE

La première mission de l’Europe est de contribuer à la paix du monde qui est avec l’environnement, le bien public planétaire par excellence. Face au désordre du monde, aux nouveaux conflits et à l’insécurité, l’Union ne peut continuer à s’afficher en tant que puissance civile. Autrement dit, elle doit rompre avec le tabou de la puissance militaire et de l’usage de la force.

Croit-on encore sérieusement à la fiction d’une puissance normative, d’un ‘soft power’ désincarné dans un monde où les rapports de force reviennent au premier plan ? L’Europe sera-t-elle happée dans cette compétition ou disposera-t-elle d’un poids propre pour faire prévaloir le multilatéralisme sur le retour à la bipolarité du monde ? Pas de véritable ‘soft power’ sans ‘hard power’ en appui. Pas de puissance normative civile sans une autonomie stratégique.

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L’Europe doit s’organiser suffisamment et s’unir pour influencer les évolutions politiques, économiques et stratégiques de la mondialisation. La construction d’une Europe de la Défense représente une première réponse indispensable à ce rôle plus proactif de l’Union dans le monde.

Depuis 2016, le débat sur les questions de sécurité et de défense en Europe a connu un nouvel essor sous l'impulsion d'un sentiment d'urgence renouvelé dans la stratégie globale de l'UE. La coopération européenne en matière de défense européenne est devenue une priorité politique de l’UE. Malgré des préoccupations géopolitiques et des cultures stratégiques distinctes, les États membres sont de plus en plus conscients de la nécessité d'approfondir leur coopération pour assurer leur sécurité. L’instabilité régionale et globale, l’incertitude par rapport à l’engagement des États-Unis dans la sécurité de notre continent, le choc Brexit, et une nouvelle ambition de la Commission européenne ont créé un terreau propice pour progresser vers une coopération européenne en matière de défense.

De nombreuses initiatives, naguère impossibles, sont en cours de réalisation : le lancement, conformant aux dispositions du Traité de Lisbonne (Articles 42.6 et 46), d’une Coopération structurée permanente (CSP) en est la plus sérieuse illustration. Première historique, la Commission a même débloqué une enveloppe de plusieurs milliards d’euros pour booster l’industrie européenne de l’armement, par le biais d’un fonds européen de défense. Ce dernier doit financer le développement d'équipements et de technologies de défense par deux " volets ", un " volet recherche " et un " volet capacitaire ". Le volet recherche doit financer (au titre du budget de l'Union) la recherche de défense à hauteur de 500 millions d'Euro par an au cours du Cadre financier pluriannuel 2021-2027, 90 millions d'Euro d'ici à 2020. Quant au volet capacitaire, il doit agir comme levier pour faciliter le développement et l'acquisition d'équipements militaires par les États membres. À terme, l'idée est de financer ce développement à hauteur d'1 milliard d'Euro par an (au titre du budget UE), complété par 4 milliards d'Euro apportés par les États

membres. Les projets réunissant au moins trois sociétés basées dans au moins deux États membres seront éligibles à ce financement.

L’objectif primordial d'un accord entre l'UE-27 sur la défense doit être l'autonomie stratégique européenne grâce au développement intégré des capacités et à la passation des marchés, ainsi que des efforts opérationnels. Cela permettra de profiter non seulement d’économies d’échelle importantes, mais aussi d’une interopérabilité renforcée entre les armées.

La mise en œuvre d’une telle coopération systématique implique un degré élevé d’engagement politique afin de surmonter la réticence de certains acteurs militaires et industriels. La défense constitue l’un des domaines dans lesquels l’intégration européenne est non seulement judicieuse et réalisable, mais aussi plus que nécessaire. Le renforcement de la coopération en matière de défense bénéficie d’un soutien constant de la population et est facilité par la perspective du Brexit, le gouvernement britannique ayant cessé d’avoir systématiquement recours au veto sur ces questions.

Actions

1. CREER UNE FORCE COMMUNE D’INTERVENTION D’ICI 2030

L’Europe a besoin d’une politique de sécurité unique, articulée en trois dimensions : intérieure, frontière, extérieure.

Nous proposons que cette stratégie soit gérée par un Conseil de sécurité de l’Union européenne. Ce Conseil – composé des chefs d’États et de gouvernement, le Président de la Commission et le Haut Responsable – devrait s’occuper des urgences et s’assurer que tous les acteurs et instruments de l’Union appliquent ses directives dans la même direction.

Les objectifs de sécurité internes et externes cohérents doivent être définis afin de traduire les objectifs de la stratégie globale de l'UE dans la pratique. Nous proposons aussi le renforcement de la coordination entre les

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institutions et agences de l'UE chargées des questions de sécurité internes et externes.

Il faut également construire une culture stratégique partagée. Pour créer ce rapprochement, nous proposons d’accueillir dans les armées nationales des militaires venant de tous les pays européens volontaires pour participer aux travaux d’anticipation, de renseignement, de planification et de soutien aux opérations.

La dispersion de moyens, de stratégie des États membres ne permet pas de répondre aux inquiétudes des citoyens ni de contribuer au rôle global. La première étape est de coordonner les équipements. Aujourd’hui, ils sont très différents d’un État à un autre, ne peuvent pas communiquer entre eux et rendent des opérations intégrées très difficiles sinon impossibles. L’Union a besoin de rationaliser, de développer, de construire des moyens de commandement et d’intervention permanents : une mutualisation des équipements, un centre de commandement militaire autonome. Ce centre de commandement doit être capable de mener des opérations militaires temporaires, en lien avec l’OTAN, mais sans être strictement dépendant de celui-ci.

Si les Européens doivent intervenir sur des théâtres hostiles et s’acquitter de tâches de gestion de crise étendues, il est essentiel de progresser sur ces trois questions. Des opérations militaires plus exigeantes nécessiteront non seulement une plus grande mise en commun des ressources et un partage des coûts, mais également la mise en place d’unités déployables et d’un quartier général adéquat pour mener ces opérations.

Au début de la prochaine décennie, l’Europe devra ainsi être dotée d’une Force commune d’intervention, d’un budget de défense commun et d’une doctrine commune pour agir.

L’Europe doit jouer un rôle moteur pour la prévention des conflits, en particulier dans les zones où ses intérêts sont en jeu. Cela nécessite de renforcer sa politique extérieure, qui ne peut se concevoir de manière pertinente qu’en articulant tous les outils nécessaires à la défense de nos intérêts et de nos valeurs :

l’outil diplomatique, l’outil militaire, l’outil de la coopération au développement et de l’aide humanitaire. Ainsi, lorsqu’une catastrophe humanitaire intervient, chaque État dispose d’unités d’intervention (B-FAST en Belgique). Il est évident que ces unités seraient beaucoup plus efficaces si elles étaient intégrées au niveau européen (un EU-FAST). Une Europe qui s’unit pour protéger, intervenir, sauver des vies, c'est une Europe qui retrouve le sens de cette fraternité que nous avons placée en son centre, qui sort de l’incantation pour agir concrètement et démontrer la force de l’action collective.

2. CREER UNE CYBER BRIGADE COMMUNE

La cybersécurité est un domaine d’importance stratégique, qui suscite de vives préoccupations. De plus en plus, nous devons répondre à des attaques non conventionnelles sur le territoire européen, telles que des cyberattaques. Ces attaques visent à déstabiliser nos sociétés, nos valeurs démocratiques et nos économies, voire à fragiliser le pôle de stabilité que représente l’Union européenne dans un environnement international de plus en plus volatil.

Pour parvenir à une véritable approche paneuropéenne en matière de cybersécurité, il convient de concevoir et de mettre en d’œuvre une stratégie européenne commune dans ce domaine.

Nous proposons également de mettre en place une cyber brigade européenne commune pour faire face aux menaces cybernétiques croissantes qui menacent l’infrastructure informatique européenne et celle des États membres, mettant ainsi en danger le fonctionnement normal des institutions.

Ces missions constituent la contribution commune de l’Europe à la sécurité de nos citoyens.

3. LUTTER CONTRE LE TERRORISME ET LE CRIME ORGANISE

L'Europe est devenue une cible du terrorisme et nous devons nous préparer à ce que ce risque reste à un niveau élevé. Les enquêtes

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montrent qu'il est au centre des préoccupations des citoyens européens.

Le terrorisme est un phénomène mondial et les groupes terroristes opèrent au-delà des frontières nationales. Le défi ne peut donc pas être relevé au seul niveau national, mais nécessite une action coordonnée au niveau européen. Ces dernières années, l'UE a adopté de nombreuses déclarations et mesures pour lutter contre le terrorisme. Des mesures concrètes ont été prises : par exemple pour améliorer l’échange d’informations entre les services répressifs nationaux ; bloquer la propagande terroriste en ligne et développer des contre-narrations ; sécuriser les frontières par une collecte et un partage plus efficace des données ; gérer le risque posé par le retour des combattants terroristes étrangers ; ou de restreindre l’accès des terroristes aux armes à feu, aux explosifs et au soutien financier.

Les débats sur la constitution d’un fichier de passagers aériens (PNR) ont toutefois montré qu’il fallait faire davantage pour renforcer la capacité de l’UE à lutter contre le terrorisme.

Pour renforcer l’action de l’Union, nous proposons concrètement de :

- Renforcer la coopération policière transfrontalière

Promouvoir une culture de coopération transfrontalière entre les services de renseignement nationaux et les autorités répressives, qui ne sont souvent pas disposés ou capables de partager des informations et de coopérer au-delà des frontières nationales. La fragmentation est un obstacle fondamental à la lutte antiterroriste menée à l'échelle européenne. Il est nécessaire de surmonter les limites opérationnelles des outils existants et de renforcer la confiance des acteurs nationaux. Sans un meilleur échange d'informations entre les agences nationales et avec les agences européennes, l'UE27 ne sera pas en mesure de combler les lacunes techniques et les lacunes en matière de renseignement, ce qui limitera à son tour leur capacité à saper efficacement les activités terroristes.

Les autorités nationales doivent améliorer l'interopérabilité et l'interconnexion de leurs

systèmes d'information et de leurs bases de données. Tout en assurant une protection adéquate des données personnelles, ils doivent être capables et disposés à échanger des informations sur les mouvements de terroristes potentiels, les données biométriques (profils ADN et empreintes digitales), les données relatives à l'application de la loi, y compris les casiers judiciaires, les preuves numériques et les transactions financières, afin d'identifier le financement du terrorisme. Il faut également renforcer la capacité du Centre européen de lutte contre le terrorisme à jouer le rôle de centre de renseignement des forces de l’ordre pour l’analyse des risques.

- Renforcer les efforts pour prévenir la radicalisation

À ce jour, les actions menées aux niveaux national et européen se sont principalement concentrées sur le renforcement des réponses sécuritaires aux attaques terroristes. Ceci est évidemment essentiel, mais il est également important de concentrer les efforts sur la prévention de la radicalisation et la lutte contre ses causes multiples.

Les terroristes cherchent à polariser les sociétés, à saper leur cohésion et à provoquer une réaction excessive répressive qui alimente encore plus de violence et déclenche une spirale de violence et de contre-violence visant à radicaliser les sociétés. Les organisations terroristes ciblent les personnes qui se sentent exclues, marginalisées et discriminées dans nos sociétés et cultivent le sentiment de « nous » contre « eux ». Ces dernières années, la plupart des suspects impliqués dans des attaques terroristes étaient des Européens radicalisés qui se sont retournés contre leurs concitoyens. Il existe un risque sérieux qu'une réaction au terrorisme basée sur la sécurité prenne le pas sur une stratégie plus globale à long terme. Ce dernier devrait mettre l’accent sur la prévention et la lutte contre les causes de la radicalisation. Cela inclurait les politiques sociales, économiques, d'éducation et d'intégration et impliquerait une variété d'acteurs à tous les niveaux, en particulier au niveau local. Une stratégie à long terme doit inclure des mesures favorisant l'inclusion

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sociale ; renforcer la connaissance, la compréhension, la tolérance et le respect interculturel mutuels ; s'attaquer aux inégalités socio-économiques ; prévenir la marginalisation et la stigmatisation de certains groupes ou communautés ; et lutter contre le discours de haine et le crime. L’UE a déjà progressé dans cette direction, mais il reste encore beaucoup à faire. Les mesures de lutte contre la radicalisation doivent être mises en œuvre sur le terrain et relèvent principalement des États membres. Compte tenu de la nature similaire et de l'interdépendance de la menace terroriste dans l'ensemble de l'Europe, l'Union peut toutefois jouer un rôle de soutien.

Dans le prochain cadre financier pluriannuel, l'UE27 devrait accepter d'augmenter son soutien à la recherche comparative sur la radicalisation et la dépolarisation, intensifier les efforts pour contrer la propagande terroriste et le discours de haine en ligne ; briser le cycle de la radicalisation dans les prisons ; développer des programmes de prévention et de déradicalisation à l’échelle européenne ; renforcer le dialogue interculturel ; et soutenir l'éducation aux médias pour sensibiliser aux risques de l'extrémisme en ligne.

4. AMELIORER LE DROIT DES VICTIMES D’ACTES DE CRIMINALITE

Chaque année, environ 15% des Européens, soit 75 millions de personnes dans l'Union européenne, sont victimes d’actes de criminalité. De plus en plus de personnes voyagent, vivent ou étudient à l'étranger dans un autre pays de l'UE et peuvent devenir des victimes potentielles d'actes criminels. L’UE œuvre sans relâche pour que les victimes reçoivent le soutien et la protection dont elles ont besoin, partout dans l’Union.

L’UE a adopté un ensemble de règles sur les droits des victimes. La directive de 2012 sur les droits des victimes, en particulier, accorde aux victimes le droit d’être reconnues et traitées 6 https://ec.europa.eu/info/policies/justice-and-fundamental-rights/criminal-justice/victims-rights_fr

avec respect, tact et professionnalisme. La directive de 2004 sur l’indemnisation établit, quant à elle, un droit d’accès aux régimes d’indemnisation nationaux pour les victimes de la criminalité intentionnelle violente, quel que soit le lieu de l’Union européenne où l’infraction a été commise. Cette directive facilite également l’accès à l’indemnisation publique dans les situations transfrontalières.

À l’instar des recommandations du rapport6 de la conseillère spéciale auprès du président de la Commission européenne, sur le renforcement de l’aide aux victimes, nous préconisons :

- Nommer un coordinateur de l’UE pour les droits des victimes responsable de l'amélioration de la coordination et de la cohérence au sein l’UE, ainsi que du développement des politiques en la matière. Ce coordinateur sera également responsable de l’implémentation et de la supervision du futur centre de coordination de l’UE pour les droits des victimes.

- Mettre en place un fonds de solidarité européen en faveur des victimes du terrorisme.

- Établir des nouvelles règles de coordination entre le secteur des assurances et les systèmes existants au niveau national. En particulier, il faut définir plus précisément les devoirs des acteurs privés envers les victimes et de les obliger à accorder des secours d'urgence et paiements initiaux, pour simplifier la procédure et décider d'un système commun d'expertise et de preuve.

- Améliorer l’indemnisation publique, l'indemnisation devant porter au-delà des simples versements en espèces et englober des services pluridisciplinaires d’aide aux victimes (tels que des centres pour la résilience) ainsi que des assistants personnels pour les victimes des actes criminels les plus graves.

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4. UNE EUROPE CITOYENNE ET TRANSPARENTE

« L’Union est fondée sur les valeurs de respect de la dignité humaine, de liberté, de démocratie, d’égalité, de l’État de droit, ainsi que de respect des droits humains, y compris des personnes appartenant à des minorités. Ces valeurs sont communes

aux États membres dans une société caractérisée par le pluralisme, la non-discrimination, la tolérance, la justice, la solidarité et l’égalité entre les femmes et les hommes » Article 2 TUE

Diagnostic

L’Europe reste une entité politique inachevée sur le plan démocratique. Les citoyens ont à raison le sentiment de ne pas peser sur les politiques publiques européennes, de ne pas contrôler les décisions prises par une superstructure devenue technocratique qui ne les protège pas assez des crises, des menaces et d’une mondialisation insuffisamment régulée. La légitimité de l’action de l’Union reste trop faible. La nécessité de faire entendre la voix des citoyens dans la vie publique est dès lors une priorité et urgence absolue. L’émergence de forces populistes prétendant représenter la population dans son ensemble a fini par éclipser l’agenda participatif de l’UE, au lieu de l’accélérer.

L’Union doit adopter un nouveau paradigme participatif en plaçant les citoyens à l’avant-garde du processus d’intégration européen. L’action de l'UE doit être davantage intelligible, compréhensible et accessible aux citoyens. Cela implique de rendre l'UE responsable de son action et représentative de ses peuples non seulement en tant que somme de nationaux, mais également en tant que communauté transnationale de citoyens européens.

L’élection du Parlement européen au suffrage universel direct lui confère la légitimité démocratique ; en cela, elle est l’enceinte qui traduit le mieux ce souhait démocratique. Ce scrutin est toutefois cloisonné : les députés sont élus dans des circonscriptions nationales, les modalités de vote diffèrent selon les États et les candidats sélectionnés par des partis. Trop souvent les campagnes électorales européennes portent sur les sujets nationaux. Par ailleurs, les citoyens considèrent également à raison que des règles plus strictes doivent s’appliquer pour l’utilisation des

deniers publics dans les institutions européennes.

Si les partis politiques paneuropéens ont bien obtenu une reconnaissance institutionnelle et des ressources financières au fil du temps, ils sont toujours constitués de fédérations extra-parlementaires des partis nationaux. L’UE manque de partis politiques capables de promouvoir un véritable espace transnational de débat politique et de dialogue dans lequel les citoyens peuvent comprendre, influencer et participer au processus décisionnel qui touche leurs intérêts communs en tant qu’Européens. À cela s’ajoute la tendance des responsables politiques nationaux à se défausser sur l’Union européenne. Nul ne doit être surpris que les électeurs finissent par y croire.

Alors que dans le passé les citoyens européens participaient au processus politique seulement par l'intermédiaire de leurs représentants élus, via le Parlement européen et les gouvernements réunis au sein du Conseil, les citoyens peuvent y participer aujourd’hui directement via une multitude de canaux. Ceux-ci comprennent des consultations publiques, des pétitions, des plaintes ainsi que l’Initiative citoyenne européenne (ICE), le premier instrument transnational de démocratie participative permettant à des citoyens de l’UE provenant de 7 États membres de proposer, après avoir recueilli 1 million de signatures, de nouvelles initiatives politiques. Malheureusement, ces moyens de participation restent inconnus du plus grand nombre et ne parviennent donc pas à saisir la demande participative croissante.

Vision

L’Europe que nous voulons est une Europe qui améliore la démocratie participative et recueille le plein assentiment de ses citoyens.

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Les citoyens veulent contribuer au débat politique et attendent des formes de participation plus complètes. Si les pratiques de démocratie participative existantes étaient améliorées, mieux intégrées aux procédures décisionnelles et utilisées plus souvent, elles pourraient offrir un système capable de rendre l'UE plus réactive, rétablissant ainsi la confiance du public dans ses institutions politiques et transformant l'UE dans un véritable projet de citoyens.

Alors que les profondes transformations sociétales et la révolution technologique suscitent de plus en plus d'attentes en matière de participation, le moment est venu pour l'UE de devenir plus participative et collaborative dans ses prises de décision.

Pour que cela se produise, l’UE doit créer un environnement politique propice et fondé sur la collaboration favorisant la participation des citoyens au-delà des élections. Un tel espace peut donner naissance à des formes de participation alternatives capables de canaliser la contribution des citoyens et rapprocher les citoyens de nos représentants et vice-versa. L’Union doit encourager le débat, la controverse, le dialogue. C’est la vertu de la démocratie, elle vit de la confrontation entre

des choix de fond. L’Union européenne a besoin d’un débat public pan-européen.

Ce débat est inévitablement lié à la forme concrète que doit prendre le projet européen au sein de l’Union européenne elle-même. L’architecture du système communautaire (avec la Commission comme garante de l’intérêt général, le Conseil et le Parlement européen) n’est plus adaptée à des modes de décision touchant à des domaines importants tels que les questions monétaires, fiscales, sociales ou encore de Défense.

L’Europe ne va pas se construire par la reproduction, à une large échelle, des mécanismes législatifs ou exécutifs établis au niveau national. Il faut, au contraire, penser l’Europe sur un modèle transnational, celui d’une démocratie des peuples. Cela consiste, au fond, à organiser la décision comme la résultante d’une confrontation entre une pluralité de peuples qui restent pour l’heure organisés dans des espaces publics nationaux.

Il est temps de faire preuve d’audace. La citoyenneté européenne doit être renforcée, en réformant l’élection du Parlement européen et en renforçant ses pouvoirs. Nous voulons des élections authentiquement européennes, donnant la chance à un débat européen.

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PRIORITE 11 : RENFORCER LA DEMOCRATIE ET FAIRE RESPECTER L’ETAT DE DROIT

1. METTRE EN PLACE UN REGISTRE DE TRANSPARENCE TRIPARTITE OBLIGATOIRE

Le cdH est favorable à un registre européen de transparence obligatoire. Ce registre permet de répertorier les lobbyistes, y compris un certain nombre d’informations à leur égard.

S’il existe, ce registre est à l’heure actuelle facultatif, en ce sens que les décideurs sont libres de rencontrer des acteurs non enregistrés. Il ne concerne par ailleurs que la Commission et le Parlement européen.

Nous proposons dès lors de mettre en place un registre de transparence tripartite obligatoire. Cela doit inclure une interdiction stricte de rencontrer les représentants d’intérêts non-inscrits à tel registre.

Pour renforcer la transparence au sein des institutions européennes, nous proposons également :

- transparence du Conseil en matière législative. Il est fondamental que le Conseil siège en public lorsqu’il délibère et vote sur un projet d’acte législatif afin que les parties prenantes, médias et au-delà les citoyens puissent avoir accès à la diversité des positions en présence et aux fondements des compromis conclus, et donc essentiel que ses décisions soient formalisées via des relevés de votes largement diffusés indiquant la position des États membres, y compris lorsqu’elles ne débouchent sur aucun accord ou sur un rejet des projets présentés par la Commission.

- transparence dans la désignation des membres de la Banque centrale européenne (BCE). Les candidats, à la présidence notamment, doivent être auditionnés devant les représentations nationales et qu’ils disent leurs engagements.

- réforme de la comitologie pour renforcer la transparence en ce qui concerne les positions adoptées par les États membres. Nous soutenons la proposition de la Commission, car

elle introduira davantage de responsabilité dans le processus décisionnel.

En particulier, nous sommes favorables à une plus grande transparence du vote au niveau du comité d'appel, obtenue en rendant publics les votes émis par les représentants des États membres.

Enfin, nous plaidons pour la révision des règles concernant le financement des partis politiques européens et en particulier la mise en place d’un cadre légal interdisant le financement par des entreprises.

2. RENFORCER LA LEGITIMITE DEMOCRATIQUE DU PRESIDENT DE LA COMMISSION EUROPEENNE

Le système des « Spitzenkandidaten » mis en place au cours des élections européennes de 2014 a été une avancée dans le processus d’amélioration de la légitimation citoyenne de la nomination de la Commission européenne.

Il insuffle une dimension européenne à campagne en mettant des visages sur un processus électoral trop souvent perçu comme distant et montre un lien entre les résultats des élections et le rôle du président de la Commission européenne.

Le cdH est favorable au maintien de ce principe, mais propose néanmoins l'amélioration des modalités de sa mise en œuvre, afin de favoriser son appropriation par les électeurs européens et renforcer le mandat démocratique de la Commission.

Nous proposons que les électeurs aient également leur mot à dire dans l’élection du Spitzenkandidaten par famille politique.

Pour renforcer la légitimité démocratique, nous proposons également :

- la révision de la procédure de désignation du président du Conseil européen pour qu’elle fasse l’objet d’un débat public accessible aux citoyens. La procédure doit évoluer :

- En exigeant un véritable acte de candidature, incluant un programme politique clair de chaque candidat ; - En s’assurant qu’au moins deux candidats pour la fonction portent leur candidature ;

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- En organisant une audition publique des candidats et un débat public entre eux ; - En rendant publics le débat et le vote du Conseil européen à ce sujet. - la révision de la procédure de désignation des commissaires pour la rendre plus transparente.

Pour renforcer l’efficacité, nous proposons :

- Conférer la responsabilité de la politique budgétaire de l’Union à un Haut Commissaire qui présidera en même temps l’Eurogroupe. Il fera ainsi le pendant à la gestion de la politique monétaire par la BCE.

- Réduire la taille de la Commission, comme le traité le prévoit déjà, à 18 membres.

- Établir le siège unique du Parlement européen à Bruxelles.

3. DONNER AU PARLEMENT EUROPEEN LE DROIT D’INITIATIVE LEGISLATIVE

Pour faciliter le processus décisionnel européen et le rendre plus démocratique, la procédure législative ordinaire doit être étendue à toute la législation.

Le système résiduel des « lois spéciales du Conseil » dans lequel le Parlement n’est que consulté ou qu’il ne lui est simplement demandé de consentir, doit être aboli. Elle permettra une intégration plus étroite dans tous les secteurs qui bordent le marché intérieur, notamment la politique environnementale, fiscale et sociale.

Conférer au Parlement un droit d’initiative raffermirait le sentiment que ce sont les citoyens qui à travers leurs représentants donnent l’impulsion au processus législatif.

Enfin, le Parlement européen doit devenir un parlement de plein exercice qui vote le volet « recettes » du budget européen. C’est un

7https://oeil.secure.europarl.europa.eu/oeil/popups/ficheprocedure.do?reference=2018/0136(COD)&l=en Protection of the Union's budget in case of generalised deficiencies as regards the rule of law in the Member States.

enjeu majeur de la démocratie : le contrôle de la levée des impôts.

4. RENFORCER LES MECANISMES QUI ASSURENT LE RESPECT DES VALEURS FONDAMENTALES DE L’UNION

L’Union européenne est avant tout un espace de droit. Elle est porteuse d’un certain modèle de société et repose sur un socle de valeurs communes et universelles : la démocratie, l’État de droit, et la protection des droits fondamentaux. Ces valeurs se retrouvent dans les Traités européens et en constituent l’épine dorsale de l’Union.

Le respect de ces valeurs ne peut pas se limiter à une condition pour l’adhésion à l’UE, mais constitue un engagement continu de la participation à cet espace de droit.

Aujourd’hui, en Europe, ces valeurs sont remises en question, défiées sous prétexte du principe de souveraineté.

L’Union doit pouvoir agir plus efficacement lorsque l’un de ces États membres met à mal ses valeurs fondamentales.

Le mécanisme prévu par les traités (l’article 7 TFUE) se heurte à son caractère intergouvernemental et à l’exigence de l’unanimité.

La Commission Juncker a proposé de lier le respect de l’État de droit aux fonds régionaux. C’est un premier pas important qui doit être mis en œuvre7.

Si l’UE veut protéger les démocraties pluralistes, les États membres doivent renforcer sa capacité à agir en tant que garde-fou démocratique. Une Europe qui ne peut pas défendre ses principes perd sa crédibilité tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Europe.

Concrètement, nous proposons de :

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- Introduire un processus pleinement fonctionnel pour imposer des sanctions si les gouvernements ne respectent pas les valeurs et les droits fondamentaux de l'Union. À l’avenir, ces décisions devraient être prises à la majorité inversée (c’est-à-dire que la recommandation de la Commission est réputée adoptée, à moins que le Conseil ne décide à la majorité qualifiée de la rejeter).

PRIORITÉ 12 : ENCOURAGER LE DIALOGUE, L’INITIATIVE ET LE DEBAT

Notre première priorité vise à restaurer le lien entre les citoyens et l’Union et redonner du souffle à la vie démocratique européenne. Au cdH, nous pensons qu’il faut mieux informer et mieux consulter les citoyens sur l’Europe. Pour ce faire, nous pensons qu’il faut plus systématiquement donner aux citoyens la possibilité de faire connaître et d’échanger leurs opinions. Le traité de Lisbonne a introduit la notion de démocratie participative européenne. Il dispose, dans son article 11, que « les institutions donnent, par les voies appropriées, aux citoyens et aux associations représentatives les possibilités de faire connaître et d’échanger publiquement leurs opinions dans tous les domaines d’actions de l’Union ». La démocratie nécessite de créer un espace public de débat pour permettre aux citoyens de s’exprimer, de partager leurs avis et leurs attentes, et aux institutions de les écouter et si pertinents de les prendre en considération dans la formulation de leurs politiques. Enfin, les citoyens doivent investir une nouvelle démocratie européenne que nous proposons de réformer.

En ce qui concerne le cdH, nos futurs parlementaires européens s’engagent personnellement à rendre des comptes et à stimuler la participation citoyenne.

Actions

1. ADOPTER DES MESURES DE SOUTIEN AU PLAIDOYER CITOYEN

Aujourd’hui, les lobbies sont une réalité de la vie politique, tant au niveau national qu’européen. Au-delà de la nécessité de garantir une pleine transparence sur ces activités, nous pensons qu’il est nécessaire que les citoyens puissent également agir pour défendre leurs causes.

Pour renforcer les capacités des citoyens de se faire entendre, ils doivent bénéficier d’une série d’actions de soutien, telles que (i) l'ouverture des services de recherche parlementaire - tels que le Service de recherche du Parlement européen (EPRS) aux citoyens ayant besoin de conseils en matière de plaidoyer (ii) le soutien des plateformes de plaidoyer pour le partage des compétences, telles que The Good Lobby, qui fournit des services juridiques et de plaidoyer bénévole aux citoyens et aux ONG et iii) l’incitation au lobbying permettant aux citoyens de bénéficier d'allégements fiscaux ou de subventions pour qu’ils puissent soutenir les causes qui leur tiennent à cœur.

2. RENFORCER L’INITIATIVE CITOYENNE EUROPEENNE

L’initiative citoyenne européenne (ICE) est un instrument fondamental de la démocratie participative dans l’Union européenne. Il amplifie les voix des citoyens au niveau européen en permettant aux citoyens de déposer des propositions de réformes législatives à soumettre à la Commission européenne. Institué en 2011, le mécanisme de l'ICE requiert actuellement un million de signatures de citoyens résidant dans au moins un quart des États membres pour qu'une initiative soit considérée. La Commission a présenté des mesures pour rendre la procédure plus accessible aux citoyens. L'Union européenne a fait un pas dans la bonne direction en créant cet outil d'engagement innovant, il faut maximiser son potentiel. Notre proposition vise à rendre le règlement plus simple, plus clair en veillant à ce que les citoyens reçoivent le soutien nécessaire pour pouvoir enregistrer et soumettre une initiative

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citoyenne de la manière la plus efficace possible. Son objectif est de doter l'ICE de mécanismes de retour d'information et de suivi appropriés afin d'accroître l'efficacité de la procédure.

Notre proposition comprend les éléments suivants :

1. Créer un conseil ad hoc pour examiner les ICE. Aujourd’hui, la CE est à la fois juge et partie, encadrant les citoyens dans leur initiative et en examinant les ICE en dernier ressort.

2. Impliquer d'autres institutions de l'UE à différentes étapes du processus et notamment le Parlement européen. Ce système apporterait expertise et visibilité, contribuant ainsi au succès d'un plus grand nombre de propositions d'ICE. Le Parlement européen et le Comité des régions pourraient apporter une plus grande visibilité aux ICE proposés. Ils pourraient organiser des auditions ou des travaux préparatoires.

3. Réformer le critère d'admissibilité juridique La Commission devrait indiquer quelles parties d'une ICE sont admissibles en droit de l'Union et celles qui ne le sont pas. Les aspects des ICE acceptables devraient être examinés par la Commission. La CJUE a récemment exprimé ce sentiment en déclarant que tous les organisateurs d'ICE doivent être en mesure de comprendre les aspects de leur proposition qui, selon la Commission, peuvent être enregistrés, de sorte qu'ils soient en mesure de soumettre à nouveau leur proposition s'ils le souhaitent. Un soutien juridique devrait également être proposé aux organisateurs des ICE.

4. Organiser une campagne de promotion pour faire connaître les opportunités offertes par l'ICE, en particulier auprès d'un public plus jeune. Il est important que les citoyens

européens obtiennent des informations et des incitations à s’engager auprès de l’ICE.

La société civile devrait jouer un rôle clé dans la transmission de ce message, avec le soutien actif de l'Union européenne. Par exemple, le Service d'action citoyenne européenne (ECAS) fournit des conseils, des recherches et un plaidoyer de haute qualité, ainsi que le renforcement des capacités des organisations de la société civile.

3. PERMETTRE AUX CITOYENS D’INTERPELLER DIRECTEMENT LE COMITE FEDERAL SUR LES QUESTIONS EUROPEENNES

Le Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes a été créé dans le but de renforcer la participation des parlements nationaux aux activités de l'Union européenne.

Parmi ses compétences, ce Comité coordonne le contrôle parlementaire du processus décisionnel européen. Dans ce sens, il s’agit du lieu privilégié pour permettre aux citoyens de mieux appréhender l’Union européenne, ses institutions et son processus législatif.

Nous proposons de modifier le règlement de la Chambre pour permettre aux citoyens d’interpeller directement les membres du comité fédéral d’avis sur les questions européennes. Les citoyens auraient aussi la possibilité de débattre ou de proposer.

Afin de contribuer au débat sur les questions européennes et d’assurer une information plus objective sur ces enjeux, nous proposons de mettre en place un comité d’avis interparlementaire avec les différents parlements de la Belgique. Les citoyens auraient la possibilité d’y être associés en faisant entendre leur voix notamment par rapport aux positions prises par la Belgique au niveau européen.