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1. LA GAMME DE PYTHAGORE La fréquence mesurant la hauteur d’un son, est une grandeur connue depuis seulement deux siècles. Celà n’a pas empêché les mathématiciens de l’Antiquité d’associer la musique et les nombres, en partant notamment des longueurs des cordes et des tuyaux sonores mis en vibration. En musique, on appelle intervalle entre deux sons, comme le rapport (et non la différence) de leurs fréquences. Deux notes dont les fréquences sont dans le rapport double correspondent à une même note mais à deux hauteurs différentes. L’intervalle qui les sépare s’appelle une octave. Exemple. Un DO 3 (260,74 Hz) est une octave au-dessus d’un DO 2 ( 130,37 Hz). L’apparition des gammes est due à la nécessité de découper l’octave (intervalle simple et dont la consonance est reconnue depuis très longtemps) en intervalles plus courts. Une gamme est donc une suite finie de notes réparties sur une octave. Si les façons de découper un intervalle sont infinies, seules quelques unes aboutissent à des notes qui peuvent être combinées entre elles sans «choquer» l’oreille. Pythagore a proposé, il y a 2 500 ans, une gamme basée sur les modes propres de vibration d’une corde. En divisant par deux la longueur de la corde, on obtient un son de fréquence double (octave), soit f 2 = 2 f 1 . En la divisant par trois, la fréquence est triple (3 f 1 ) mais égale à 3f 2 /2. Deux sons dont les fréquences sont dans le rapport 3/2 forment une quinte et sonne de façon harmonieuse. Exemple. Un DO 3 (260,74 Hz) et un SOL 3 (391,11 Hz) forment une quinte car f SOL3 /f DO3 = 3 / 2 . En la divisant par quatre, la fréquence est quadruple (4 f 1 ) mais égale à 3f 2 /4. Deux sons dont les fréquences sont dans le rapport 3/4 forment une quarte. Aucun texte de Pythagore ne nous est parvenu, mais on retrouve chez Platon les termes du rapport du limma, soit 256/2435. Le plus ancien texte connu traitant du système pythagoricien est de Henri Arnault de Zwolle, écrit vers 14506. De proche en proche, Pythagore a ainsi construit des intervalles basés sur des rapports de nombres entiers de longueurs de corde (et donc de fréquence). Les gammes de Pythagore sont donc fondées sur le cycle des quintes, c’est-à-dire sur une série de note obtenues apr quintes successives. Mais le cycle des quintes n’est pas superposable à un nombre fini d’octaves, ce cycle ne «reboucle» jamais sur la note de départ. Les gammes construites à partir de cinq, sept ou douze quintes «rebouclent» presque mais, pour que la première et la dernière note du cycle soient identiques, il y a toujours une quinte mal dimensionnée pour laquelle le rapport des fréquences n’est pas exacte- ment égal à 3 / 2 . Cette méthode aboutit à des dissonances et a incité à trouver une autre gamme. Le cycle des quintes retombe «presque» sur la fréquence de la note de départ pour un nombre de notes égal à 5, 7 et 12. En effet, on a 3 5 à peu près égal à 2 8 ; 3 7 à peu près égal à 2 11 ; 3 12 à peu près égal à 2 19 . THEME 4. SON & MUSIQUE PORTEURS D’INFORMATION CHAP 2. LA MUSIQUE OU L’ART DE FAIRE ENTENDRE DES NOMBRES

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1. LA GAMME DE PYTHAGORELa fréquence mesurant la hauteur d’un son, est une grandeur connue depuis seulement deuxsiècles. Celà n’a pas empêché les mathématiciens de l’Antiquité d’associer la musique et lesnombres, en partant notamment des longueurs des cordes et des tuyaux sonores mis en vibration.

En musique, on appelle intervalle entre deux sons, comme le rapport (et non la différence) de leursfréquences.

Deux notes dont les fréquences sont dans le rapport double correspondent à une même note maisà deux hauteurs différentes. L’intervalle qui les sépare s’appelle une octave.Exemple. Un DO3 (260,74 Hz) est une octave au-dessus d’un DO2 ( 130,37 Hz).

L’apparition des gammes est due à la nécessité de découper l’octave (intervalle simple et dont laconsonance est reconnue depuis très longtemps) en intervalles plus courts. Une gamme est doncune suite finie de notes réparties sur une octave.

Si les façons de découper un intervalle sont infinies, seules quelques unes aboutissent à des notesqui peuvent être combinées entre elles sans «choquer» l’oreille.

Pythagore a proposé, il y a 2 500 ans, une gamme basée sur les modes propres de vibration d’unecorde.

En divisant par deux la longueur de la corde, on obtient un son de fréquence double(octave), soit f2 = 2 f1.

En la divisant par trois, la fréquence est triple (3 f1) mais égale à 3f2/2. Deux sons dont lesfréquences sont dans le rapport 3/2 forment une quinte et sonne de façon harmonieuse.

Exemple. Un DO3 (260,74 Hz) et un SOL3 (391,11 Hz) forment une quinte car fSOL3/fDO3 = 3/2.

En la divisant par quatre, la fréquence est quadruple (4 f1) mais égale à 3f2/4. Deux sonsdont les fréquences sont dans le rapport 3/4 forment une quarte.

Aucun texte de Pythagore ne nous est parvenu, mais on retrouve chez Platon les termes du rapportdu limma, soit 256/2435. Le plus ancien texte connu traitant du système pythagoricien est de HenriArnault de Zwolle, écrit vers 14506.

De proche en proche, Pythagore a ainsi construit des intervalles basés sur des rapports de nombresentiers de longueurs de corde (et donc de fréquence). Les gammes de Pythagore sont donc fondéessur le cycle des quintes, c’est-à-dire sur une série de note obtenues apr quintes successives. Maisle cycle des quintes n’est pas superposable à un nombre fini d’octaves, ce cycle ne «reboucle»jamais sur la note de départ. Les gammes construites à partir de cinq, sept ou douze quintes«rebouclent» presque mais, pour que la première et la dernière note du cycle soient identiques, il ya toujours une quinte mal dimensionnée pour laquelle le rapport des fréquences n’est pas exacte-ment égal à 3/2. Cette méthode aboutit à des dissonances et a incité à trouver une autre gamme.

Le cycle des quintes retombe «presque» sur la fréquence de la note de départ pour un nombre denotes égal à 5, 7 et 12. En effet, on a 35 à peu près égal à 28; 37 à peu près égal à 211; 312 à peu près égalà 219.

THEME 4. SON & MUSIQUE PORTEURS D’INFORMATIONCHAP 2. LA MUSIQUE OU L’ART DE FAIRE ENTENDRE DES NOMBRES

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Un raisonnement mathématique montre qu’il n’existe aucune suite de notes, construite sur le cycle des quintes qui «reboucle» exactement.En effet, l'intervalle de 12 quintes pures représente une étendue légèrement supérieure à 7 octaves, la dernière quinte est raccourcie (ducomma pythagoricien) pour donner à l'ensemble une étendue valant exactement 7 octaves : elle forme la quinte dite « du loup » car elle esttrès dissonante (elle « hurle »).

Une transposition consiste à adapter une mélodie au registre de la voix ou d’un instrument en la «déplaçant» vers l’aigu ou le grave. Cettequinte et la gamme Pythoricienne, rend difficile la transposition. C'est l'un des inconvénients à l'origine de la recherche de nouveauxtempéraments.

Dans la pratique, les musiciens qui préfèrent utiliser des octaves pures accordent leurs instruments sur une gamme pythagoricienne enreportant la quinte du loup dans un intervalle peu utilisé, en général sol# — mib. Les intervalles englobant la quinte du loup sonneront fauxaussi, il faut donc soigneusement l'éviter.

La tierce majeure, qui vaut deux tons purs successifs, a pour rapport 9/8 × 9/8 = 81/64 dans la gamme pythagoricienne. Elle diffèrelégèrement de la tierce pure de rapport 5/4 = 80/64. La différence entre ces deux tierces est le comma syntonique.

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2. UNE GAMME AU TEMPERAMENT EGAL: LA GAMME TEMPEREE.La gamme pythagoricienne a été progressivement délaissée au Moyen Âge lorsque l'on a commencé à considérer comme consonantl'intervalle de tierce. En particulier avec Gioseffo Zarlino qui donne une nouvelle définition de la tierce dans son Istitutioni Harmoniche en1558.

Newton (1704) était convaincu qu'il devait y avoir une parfaite correspondance entre les diverses couleurs et les notes de la gamme.

Voltaire, dans les Éléments de philosophie de Newton (1738), partie 2, chap. XIV, résume les résultats :

« La plus grande réfrangibilité du violet répond à ré ; la plus grande réfrangibilité du pourpre répond à mi. Violet/ré, pourpre/mi,bleu/fa, vert/sol, jaune/la, orange/si, rouge/do (ut)».Voltaire ajoute : “Cette analogie secrète entre la lumière et le son donne lieu de soupçonner que toutes les choses de la natureont des rapports cachés que peut-être on découvrira quelque jour.” »

La connaissance des nombres irrationnels a permis, au XVIIe siècle, de construire des gammes à intervalles égaux.

La gamme tempérée, mise en valeur par l’Allemand Jean Sébastien Bach, est utilisée actuellement dans le monde occidental. Elle n’est plusle résultat d’une construction harmonique mais simplement le résultat du découpage d’une octave en douze intervalles égaux.

Sachant que l’intervalle entre deux notes est défini par le rapport des fréquences de ces deux notes, deux intervalles égaux correspondentà deux rapports identiques.

Pour passer d’une note à celle située une octave au-dessus, il faut multiplier sa fréquence par deux.Par exemple la fréquence du la3 est 440 Hz. La fréquence du la4, une octave au-dessus est 880 Hz.

Pour passer d’une note à la suivante dans la gamme tempérée (par exemple du do au do dièse, soit un degré ou demi-ton au-dessus), on multiplie la fréquence par une constante k. L’octave étant découpée en douze intervalles égaux, il faut doncrecommencer cette opération douze fois pour doubler la fréquence de la note, ce qui note k12 = 2 soit k = 12 2.

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Lorsque les notes sont altérées par un dièse ou par un bémol, leur hauteur est augmentée ou diminuée d’un demi-ton donc leur fréquenceest respectivement multipliée ou divisée par 21/12.

Exemple:Sur le document ci-dessus, la hauteur du ré dièse est égale à celle du mi bémol.

Une gamme est souvent le reflet d’une culture et d’une époque. Elle varie d’une région d’une globe à l’autre. Aujourd’hui, des musicienstravaillent à de nouvelles gammes s’affranchissant de l’octave pure, base de la plupart des gammes connues à ce jour.

La convention en vigueur affecte une valeur de 440,0 Hz au la3. A partir de cette fréquence, on peut calculer la hauteur de toutes les autresnotes.

La gamme tempérée est donc divisée en 12 intervalles égaux, appelés demi-ton. Les notes de la gamme de do majeur se suivent par tonou demi-ton:

Exemple.Pour passer du médium (261,63 Hz) au mi suivant, on effectue le calcul suivant:

Gamme de Pythagore 9 2 Gamme tempérée261,63 x = 331,13 Hz 261,63 x (12 2 )4= 329,63 Hz

8( )

Intéret ?Les intervalles entre deux notes consécuties d’une gamme de Pythagore n’étant pas égaux, cela entrave la transposition pour desinstruments jouant dans des tonalités différentes. Alors que la gamme tempérée ayant des intervalles égaux, elle permet toutes lestranspositions de partitions musicales.

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3. GAMME TEMPEREE VS GAMME PYTHAGORICIENNE

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