CHARLES&CHRISTAIN

L’amour…malgrétout

V.DPRIN

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CHAPITREI5

12

CHAPITREIII21

CHAPITREIV28

CHAPITREV43

CHAPITREVI51

CHAPITREVII68

CHAPITREVIII76

CHAPITREIX84

CHAPITREX

91

ÉPILOGUE102

CHAPITREI

Letempsétaitgrisetpluvieux.Aumilieudeschampsimbibésdepluie,leducdeChanoineregardaitlecorpssansviedesafemme.Sesbeauxcheveuxblondsétaientcouvertsdeboue,commetoutsonvisage.Elleétaitpartiellementdéshabillée.Ilneluirestaitsurlecorpsquesoncorsetetsachemise.Sarobedesoiréesetrouvaitàquelquepas.Ilseretournaverssonintendant,quiavaitretrouvéladuchessequelquesheuresplustôt.Celui-ci,visiblementémunelaquittaitpasdesyeux.

—Ilfautlaramenerauchâteau,ditleducd’unevoixatone.Jeneveuxpasquen’importequilavoitainsi.

L’intendantfitveniruncarrosseetdélicatement,lesdeuxhommesportèrentladuchesseàl’intérieur.

Leducs’assitenfaced’elle,pendantquel’autrehommeprenaitlesrênes,assisdevantaveclepalefrenier.Avecsonmouchoir,ilenlevadélicatementlabouequimaculaitsonvisage.Ilpritsamainetl’embrassa.Sesyeuxcaressèrentlecorpssansvie.Ilnepensaitàrien,neressentaitrien.

Sonintendantluijetaunregardparlapetitefenêtreetilsentitsoncœurseserrerpoursonmaître.CommentleducdeChanoineallait-ilvivreaprèsceterribledrame?Ilconnaissaitlessentimentsdujeunehommepoursafemme.Malgrécequ’ilsavaitdeladuchesse,elleneméritaitpasdemourirainsi.Leducétaitjeuneetsafemmeavaitétésonamourd’enfance.Ilsétaientmariésdepuisdeuxansetdemi.Leduc,quin’avaitque22ans,allaitavoirdumalàs’enremettresurtoutquelajeunefemmevenaitd’annoncersatouterécentegrossesse.

Quandilsarrivèrentunebonneheureplustard,lesoleilcommençaitàpercerderrièrelesnuages.Lesserviteursattendaientdevantlaporteprincipale,ainsiquelesmembresdelafamilleetlesquelquesinvitésquiétaientrestésdormirauchâteauetquiavaientétéprévenuedudrameparl’agitationquiyrégnait.Lesilenceétaitcomplet.

Lorsqueleducpritlajeunefemmedanssesbras,iln’yeutpasuncri,pasunelamentation.Ilfranchitleseuilduchâteau,quiavaitabritédesdizainesdegénérationsdeChanoine.Samère,MargueritedeChanoinelesuivitainsiquesonplusjeunefrère,Hans.

Ilsedirigeaverssesappartementsetposadélicatementladuchessesursonlit.Illaregardaitfixement,commepourluiinsufflersapropreénergie.Maislamortavaitfigésestraitspourl’éternité.

Ilsecouchaàcôtéd’elleetsemitàpleurer.

Samèreneputretenirsespropreslarmes.Lajeunefemmeavaitétélafillequ’ellen’avaitpaseue.Ellel’avaitrecueilliàlamortdesesparents.Lapetiten’avaitalorsquequatreans.EtavecCharles,ilsavaientforméuncoupletrèssoudédèsledébut.Leurmariageavaitétéuneévidence.Elleavaitpasséplusdetempsavecsabelle-fille,qu’ellen’enavaitpasséavecsespropresfils.

SonjeunefrèreHanspréféraquitterlapièce.Sophieavaitétécommeunesœurpourlui.Elleavaittoujoursétégentille,unpeubizarrequelquesfois,maisill’adorait.

Georges,lemajordomedeCharlesregardaitsonducavecinquiétude.Illeconnaissaitbien,illeservaitdepuissonplusjeuneâge.Laduchesseavaittoujoursfaitpartiedesavie,etellel’avaitsoutenu.Quandàdouzeans,sonpèreétaitdécédéetqu’ilavaitreprisletitre,iln’avaitconnuqu’elle,entantqu’amieetensuite,entantquefemme.Ilsepromitd’êtretoujourslàpourlui,quandillevitpleurer.

Lemédecinfutappelé.Quandilarriva,leduc,toujourscouchéprèsdesaduchesse,semblaitavoirvieillidedixans.Illuicaressaitlescheveuxetluidemandaittoutdoucementdeseréveiller.

—Monsieurleduc,ditlemédecin.Ilfautquej’examineMadameladuchessepoursavoircequis’estpassé.

Leducleregardaettournalesyeuxverssamère.

—Ilfauttelever,monfils,lemédecinabesoindelaplaceetnousdevonsprocéderàsatoilette.

Ilselevapéniblement.Samèrelepritparlebrasetlefitsortirdesachambre.Ellel’emmenadanslesalon.Sonintendantyétaitinstallé.Quandilvitentrerleduc,ils’approchadelui.

—Nousallonstrouverlecoupable,milord,jevouslepromets.

Charlesallaseservirunverredecognacets’assitlourdementsurunfauteuil.Sonespritétaitavecsafemme,là-hautdanssachambreetilmitquelquesminutesàintégrercequ’illuidisait.

—Jesaisdéjàquiafaitça,Mike,jelesaisparfaitement.

—Quiauraitpufaireunehorreurpareille?demandasamère.

—LecomtedeSaxe,dit-ilens’asseyantdansunfauteuil.

—Lecomte?

—Oui,iln’apassupportéqueSophierefusesademandeenmariageetqu’elleacceptelamienne.

—MaisSophieatoujoursétéamoureusedetoi.Jamaisellen’auraitépouséunautrehomme.

—Jesais.

Ileutunsouriretriste.

—Hiersoir,elleestvenuemetrouver,bouleversée.Ilavaitencoreproposédefaired’ellesamaîtresse.

—MondieuCharles!s’exclamaladuchessedouairière.

—Jel’aifichudehorsavecl’aidedeGeorges.Ilapromisdesevenger.

Ilmitsesmainsdevantsesyeuxpuisreprit.

—Jen’auraisjamaispenséqu’ils’enprendraitàmaSophie.

—Oh,monchéri!

Samères’approchadeluietlepritdanssesbras.Leducenlaçasamèreenpleurantcontresonventre.

—Jevaisenvoyerunmessageauroi.Ildoitintervenir,sinonc’estmoiquiiraistuercemonstre,leurdit-ilunefoisqu’ilsefutunpeuremis.Jeveuxqu’ilsoitjugédevanttoutlemonde.Jeveuxqu’ilneluiresterien,unefoislejugementrendu.Jeveuxqu’ilsoitpenduchezlui,devantlessiens.Jeveux…

—Nousallonsécrireauroi,monfils,lerassurasamère.Etnousluidemanderonsdenousfairejustice.

Lemédecinvintleurfairesonrapport.

Laduchesseavaitétéétranglée,aprèsavoirétéviolée.Etilneleurditpasquelagrossessedeladuchesseétaitplusvieillequecequ’ellen’avaitdit.Ilsoupçonnaitquecelle-ciavaitmentiintentionnellement.Connaissantsaréputation,ilsavaittrèsbienpourquoi.IlconnaissaitlejeuneCharlesdepuissanaissance.Etcombiendefoisavait-ileuenviedeluiavouerlavéritésursafemme.Maisiln’avaitjamaisosé.Ilpensaàcetinstant,qu’ilavaitsûrementeutort.Mais,ilétaittroptardmaintenant.

Lelendemain,unémissairepartitavecunelettredeCharles,l’informantdudécèsdesafemmeetdessoupçonsqu’ilavaitenverslecomte.

Troisjoursplustard,laduchessefutmiseenterre.Sesfunéraillesfurenttrèséprouvantespourtoutesafamille.Lerois’étaitdéplacéenpersonne,commeunetrèsgrandemajoritédelanoblessedupays.Plusdedeuxcentspersonnesarrivèrentàentrerdansl’église.Autantrestèrentàl’extérieur.

CharlesdeChanoinerestatrèsdigne,pendanttoutletempsdelacérémonie.Ileutunmouvementdereculaumomentoùilfallutmettresafemmeenterre.Samèreluipritlamainetnelelâchaplus.Alorsquetoutlemondesedirigeaitverslechâteauoùunecollationlesattendait,leroivinttrouverlejeunehomme.

—MoncherCharles,toutesmescondoléances.C’estunvéritabledramed’enterrerunesibellejeunefemme,pleinedevie.

—Jevousremercie,votremajesté,d’êtrevenu,dit-il.Ilfautquejevousparle,enprivé.

—Jem’endoute,Charles.J’ailuvotrecourrier,jesuissurprisparvosaccusations,maisjesuisprêtàendiscuteravecvous.Jevousretrouvedansvotrebureauplustard.Jevousprometsquelemeurtredevotreépouseneresterapasimpuni.

—Mercivotremajesté.

IlsserencontrèrentdanslebureaudeCharles,quelquesheuresplustard.Lajournéeavaitétééprouvantepourlejeunehommeetsafamille.Encoreplus,quandlecomtedeSaxevintleurfairepartdesagrandetristesse.LamèredeCharlesavaitdûleretenirpourquecelui-cin’aillepasfairejusticelui-même.

—Charles,vousportezdesaccusationsgravescontrevotrevoisin,lecomtedeSaxe.Jenevousapprendsrienenvousdisantquelecomteesttrèsaimédessiensetqu’unegrandepartiedelanoblessepensequecethommeestunsaint.Jenevousnarreraispastoutcequ’ilafaitpourlepays,jepensequevousn’avezpasenviedel’entendre.Maissivousconfirmezvosaccusations,ilyvadesonhonneur,desavie,desonavenir.Maintenant,racontez-moi.Ques’est-ilpasséexactement,Charles?luidemandaleroi.

—NousavonsretrouvélecorpsdeSophieaupetitmatin.D’aprèslemédecin,mafemmeaétévioléeetétranglée.Sophieétaittoujourstrèsénervéeettendue,quandelledevaitrencontrerlecomte.Jeluiaidemandépourquoi,ilyadeuxans.Ellem’aalorsavouéquelecomtelaharcelaitetvoulaitfaired’ellesamaîtresse.Ilavaitégalementvoulul’épouser,maisnousétionsdestinésl’unàl’autredepuisnotreenfance,etilnel’ajamaissupporté.Ellevivaitdanslahantisedelecroiserànouveau.Lesoirdubal,j’aiétéobligéderenvoyermoi-mêmelecomte.Sophieétaitbouleversée.Illuiavaitfaitdespropositionsmalvenues.Jesuiscertainquelecomteestl’assassindemafemmeetjedemandejusticevotremajesté.

—Qu’avez-vouscommepreuveCharles?Jenevousdispaslesrépercussionsqu’ilpourraityavoirsursesaffaires,safamille,sicequevousditesnereposaitsurrien.

—Voilàcequej’ai,dit-ilenouvrantuntiroird’oùilsortitungant.

Ilétaitrecouvertdesang.Illetenditauroi.

—Ilétaitàcôtéducorpsdemonépouse.C’estmonintendantquil’aramassé.Ilportelesinitialesducomte.

Leroipritlegantetl’examina.IlreconnutlesarmoiriesdelafamilleducomtedeSaxe.

—Oui,effectivement,cegantluiappartient.Quepouvez-vousmediresurlasoiréedubal?

—Sophieestvenuemevoirenpleure,lecomtel’avaitànouveauharcelé.Ellem’aditqu’ill’avaitcoincédansuncoinetqu’ilavaiteuenverselledesgestes…Avecl’aidedemonmajordome,jel’airenvoyé.Ilétaithorsdeluietfaisaitceluiquinecomprenaitpas.Jesuissûrqu’ensuite,ilaattendudepouvoirtrouverSophieseuleetqu’il…

—Jecomprends,monami.N’enditespasplus,luiditleroienpressantsamainsursonépaule.Lecomteestveufdepuistroisans.Safemmeestmorteàlanaissancedeleurtroisièmeenfant.Ilaungrandgarçondequatorzeans,unedeuxièmefilledehuitansetlapetitedernière.Ilvafalloirfairetrèsattentionànepassetromper.Cesenfantssontinnocentsetjen’aimeraispasqu’ilssouffrentdelafoliedeleurpère,sionlereconnaissaitcoupable.Jevaisdiligenteruneenquête.Sicelle-cireconnaîtlecomtecoupable,jedevraisdestituertoutesafamille.

—Ilneméritequeça.Etsesenfantsneserontquedesdommagescollatérauxdelafoliedeleurpère.Etj’espèrequ’aucund’euxn’ahéritédesongène,déclaraleducenhaussantleton.

—MoncherCharles,calmez-vous.Jevousfaislapromessequejenelaisserairienauhasard.J’aimaisbeaucoupvotrefemme,etjeferaitoutpourquelecoupablesoitpuni.

—Jevousremercievotremajesté.Jesaistrèsbienquevousfereztoutlenécessaire.Mafemmeétaitenceintedetroismois.Nousavionsprévudel’appelerÉdouard,commevous,s’ilavaitétéungarçonetVictoirepourunefille.Toutcelaesttellementinjuste,dit-ilenpleurantdanssesmains.

Leroirestaprèsdeluietattenditquelacrisepasse.Ilssemirentensuited’accordsurlesdécisionsàprendre.LeroifitpromettreàCharlesdenerienfaired’irréparable.Ilpromit,labileaufonddelagorge.Lelendemain,leroirepartitpourlacapitale.Delafenêtredesachambre,Charlesregardalemonarques’éloigner.Ilavaitenvied’allerlui-mêmedemanderjusticeaucomte,maisilavaitfaitunepromesse.Ilsetournaverssonlitetsonairdésespéréfittressaillirsonvaletdechambre.

—Monsieur,luidit-ildoucement.Jevousaipréparéunbain.

—Merci,Georges,dit-ild’untonlas.

Georgesl’aidaàsedéshabilleretàprendresonbain.Saminceurluifitpeur.Leducn’étaitplusquel’ombredelui-mêmedepuisledrame.Mais,pensa-t-il,ilestjeuneetvigoureux.Unjouroul’autre,ilretrouveraquelqu’unàaimer,quelqu’unplusdignedelui,espéra-t-il.

Dixjoursplustard,leroirevintsurlesterresdesChanoine.Lesnouvellesqu’ilapportaitallaient,ill’espérait,procurerunpeudebaumeaucœurdujeunehomme.Ilaimaitbeaucoupleducqu’ilavaitconnuenfantetqu’ilavaitvugrandirtroprapidement.Audécèsdesonpère,ilavaitétéobligédeprendredesresponsabilitésqu’unjeunegarçonn’auraitjamaisdûavoir.Ils’étaittrèsbiendébrouilléetleroiadmiraitlamanièredontilavaitgérésesterresetsesgens.

Iln’avaitmalheureusementpasvécul’insouciancedetouscesjeunesgensdel’aristocratieetleroiavaitsouventregrettéqueCharlesnepuissepasconnaîtrecettevie.Lesbals,lesmaîtresses,lesjeux,lesbeuveriesàneplussavoirquil’onest.Peut-êtrealors,aurait-ilpusavoirquandquelqu’unluimentaitouletrompait.Maiscen’étaitpasàluid’enleverlesillusionsqueCharlesavaitausujetdesafemme.

Ilfuttrèsviteintroduitdanssonbureau.

—Moncherami,jecroisquejevousapporteunebonnenouvelle.Nousavonsretrouvéuntémoinquiassureavoirvulecomtedansvotrepropriété,lesoirdumeurtreetilaffirmel’avoirvubienaprèsquevousl’ayezmisàlaporte.

—Quiest-ce,votremajesté?

—L’undevosmétayers,LéonPlon.

—Jevoisdequivousparlez,votremajesté.Vousêtessûrdecequ’ilraconte?CeLéonestplussaoulqu’àsontour.Jenevoudraispasquequiconquepuisseremettresontémoignageenquestion.

—Noussommessûrs.Sonfilsaînéétaitavecluiquandilavulecomte.Iln’aquedixans,maisilconfirmequ’ilsontcroisélecomtequipartaitàbrideabattuedansladirectiondesondomaine.Sontémoignage,legant,jepeuxsansrisquedirequevousavezprobablementraisondepuisledébut.C’estle

comtedeSaxequiatuévotrefemme.Jen’auraisjamaispenséqu’ilpuissecommettreungesteaussiterrible.Jeleconnaisdepuistoujours.C’est…c’étaitunhommesidroitetdigne.

—Sidigne,qu’iln’apashésitéàs’enprendreàunepauvrefemmesansdéfense.Quefaisons-nousmaintenantvotremajesté?Ildoitpayerpoursoncrime!

—J’aienvoyéuneescouadedemonrégimentpourl’appréhender.Nousallonsnousyrendresurl’heure.CombiendetempspourallerchezlesdeSaxe?

—Unepetiteheure,votremajesté.

—Trèsbien,partonsmaintenant.Plusvitecetteaffaireseraréglée,mieuxcesera.Lecomteaénormémentd’amisetaucunnevoudracroirequ’ilaitpufaireça.

Letrajetjusqu’àlademeureducomteparutinterminableàCharles,quiavaithâtedeleconfondre.Depuisledécèsdesafemme,ilnepensaitqu’àcela.Voirlecomtependuàunepotence,voirtoutesafamilleroulerdanslecaniveau.

Quandilsarrivèrent,leshommesduroil’avaientintercepté.Celui-ciattendaitdanssonbureau,sesenfantsautourdelui.Desgardessetenaientdevantlaporteetdevantlesfenêtres.Àleurentrée,lecomteselevaetallaversleroi.

—VotreMajesté,jenecomprendspascequisepasse!Etquevientfaireleducchezmoi?

—Vousdevriezdireàvosenfantsdesortircomte,luiditleroi,quandilvitleregardpaniquédanslesyeuxdufilsducomte.Jeunehomme,dit-ilaugarçon,quelesttonprénom?

—Christian,votrealtesse,répondit-il.

Leduceutàpeineunregardsurlui.Ilétaittropconcentrésurlecomte.

—Jeviensdemanderréparationaunomdemonépouse…

—Laissez-moiparler!l’interrompitleroi.ComtedeSaxe,unetrèsgraveaccusationestportéecontrevous.Nousvoussoupçonnons,d’avoirvioléettuéladuchessedeChanoinele23avrildecetteannée.

Lecomteeutl’airsurpris.

—Etquim’accuse?Le23,aprèsavoirétéjetédehorsparleduc,jesuisrentrédirectementchezmoi.Jenevoispascommentj’auraisputuerladuchesse.

—Untémoinvousavuàl’heureducrimesurlesterresduduc,pastrèsloindel’endroitoùladuchesseaétéretrouvée.

—Impossible,cetémoinsetrompeoubienilment.Faites-levenirpourqu’ilmediseenfacequ’ilm’avuecesoir-là.Iladûmeconfondreavecuneautrepersonne,iln’yapasd’autreexplication.

—Iln’yapasquecela.L’undevosgantsaégalementétéretrouvéprèsdeladuchesse.

—Ungant?J’aieffectivementperduungantcesoir-là,maisjel’avaislaisséauprèsdevotremajordome,duc.

—Iln’ajamaisrienperdudesavieetbiensûr,ilperdvotregant,justeàcemoment?Quelleheureusecoïncidence.Vouscroyezvraimentquenousallonscroirecela?

—S’ilvousplaît,duc.Laissez-moipoursuivre!lefustigealeroi.

—ComtedeSaxe,auvudespreuvesquenousavonsetconsidérantvotreattitudeenversladuchesse,quic’étaitplainteplusieursfoisàsonmaridevotreharcèlement,jemevoisdansl’obligationdevousdéclarercoupableetiln’yauraaucunrecourt.Jevouscondamneàlapendaisondansles24heures.Jedestitueégalementvotrefilsaînédetouscesdroitsnobliaux.Ilsdevrontquitterluietsessœurs,lechâteautoutdesuite,aprèsvotreexécution.Ilnepourrajamaisréclamerquoiquecesoit.

—Mais,qu’est-cequevousmeracontez?Jen’aijamaiscouruaprèsladuchesse.C’estellequimecouraitaprès.Cettepersonneétaitcomplètementinintéressante.Etaprèsmachèrefemme,aucuneautren’auraitpuprendresaplace!

—Comte,inutiled’essayerdevousdéfendre.Ilestmalheureusementtroptardpourcela.Monjugementestrenduetcequeroiveut,dieuleveut.Vousserezexécutédemainmatin.

Lecomteatterréparcequ’ilentendaitrestaitassissansbouger.Leduc,trèssatisfaitdelasentencedesonroi,arboraitunsourire.

Lefilsducomteregardalestroishommes,comprenantenfincequisepassait.

—Monpèreditlavérité!Intervint-il.Ilest…il…ilestrentré…très…tôt…delasoirée,etilnenousapas…pasquittéparlasuite.Vousfaiteserreur!Demandez…àqui…quivousvoulezau…auchâteau…etilsvousdirontlamêmechose.L’émotionlefaisaitbégayer.Vousnepouvezpascondamnermonpère!

Ils’approchadesonpèreetlepritparlecou.Lecomteleregarda,fierdesonfils.Iln’hésitaitpasàprendresadéfensedevantsonroi.

—Écoutezmongarçon,luiditleroi,toutaccusevotrepère.Jesuisdésolépourvousetvotrefamille,maisjenepeuxpaspermettrequ’unmembredelanoblesseseconduisecommeledernierdeshommes.Votrepèreseraexécutédemain.

—VotreMajesté,repritlegarçon,vousfaiteserreur!

Ilseredressadetoutesahauteur.Poursonâge,iln’étaitpastrèsgrand,maisavaituneprésenceincroyable.

Onsentaitenluiunegrandematurité.Ilavaitlescheveuxtrèsnoirsetlesyeuxjustesunpetitpeuplusclair.Ilneressemblaitpasàsonpère,quiétaitblondauxyeuxbleus.Sesdeuxsœursressemblaientplusaucomte,bienquel’onretrouvâtdansleurstraits,lemêmeairimpérieuxqueceluideleurfrère.Leducn’avaitpasconnulacomtesse,maisilavaitentendudirequ’elleavaitététrèsbelle,etqu’elleavaitdesdescendancesgitanes.Cequiexpliquaitsûrementlephysiquedujeunegarçon.

—Jeunehomme,jenefaisaucuneerreur.Etjevousprieraisdequitterleslieux.Préparezquelquesaffairespourvousetvossœurs.N’oubliezpasquedemain,jeveuxquevoussoyezparti.

—Maisoùirons-nous?

—Peum’importe,ditleroiquel’attitudedujeunegarçoncommençaitàagacer.Sivousdevezenvouloiràquelqu’unpourcequivousarrive,c’estàvotrepèrequ’ilfautvousenprendre.Allez,sortez!

Lejeunegarçonenlaçasonpère.Celui-ciluifitlâcherprise.

—Allezmongarçon,iln’yarienquevousnepuissiezfaire.Préparezvosaffairesetallezchezmasœur,LadyDray.Ellevousaccueillera.Partezmaintenant.Jeneveuxpasquevousassistiezà…cela.

—Non,père,jeresteraiavecvousjusqu’aubout.Nousnepartironsqu’après.Jesaisquevousn’avezrienfait.Nousresteronsavecvousjusqu’aubout.Éloïse,Marie,venezavecmoi.

Lespetitess’approchèrentdeleurfrère.

Lapluspetiteluipritlamain.

—Onvaoù?luidemanda-t-elledesapetitevoix.

Legarçonlapritdanssesbras.

—Nousallonsallercheztamarraine.Elleseracontentedetevoir.

—Avecpapa?

Ilenfouitsonvisagedanslescheveuxdesapetitesœur.Quandilrelevalatête,sesyeuxétaientbrillants.

—Non,dit-ild’unevoixenrouée,pasavecpapa.Touslestrois.Toi,Éloïseetmoi.Tuverras,ceseratrèsamusant.

Lepauvresourirequ’iladressaàsasœursemblalarassurer.

—Embrasse,papa,maintenant,nousdevonssortir.

Ilpenchalapetiteverssonpèrequilapritsursesgenoux.Elleluimitsespetitsbrasautourdesoncouetleserrafortcontreelle.

—Aurevoir,papa,tutedépêcherasdevenirnousvoirhein?

—Oui,monange,jemedépêcherais.

Ill’embrassaetrespirasonparfum.Ilvoulaits’imprégnerdesabonneodeurdebébé.Illareposasurlesoletluicaressalevisage.

—SoitbiensageavecChristianetÉloïse.D’accord?

—Oui,papa.

Elles’éloignapourserapprocherduroi.

—Monpapa,c’estleplusfortdespapas,luidit-elletrèssérieusement.

Leroisepenchaverselleetluicaressalajoue,sansluirépondre.Pendantcetemps,Éloïses’étaitavancéeverssonpère.Elleleregardaitdanslesyeux.Elleavaitcompris,malgréseshuitans,qu’ellenelereverraitplusjamais.Deslarmescoulaientauxcoinsdesesyeuxetdanssonregardselisaittoutel’incompréhensiondumonde.

Sonpèreselevadesachaiseetlapritdanssesbras.

—Çavaaller,monange,luidit-ild’unevoixrauque.Tatanteprendrabiensoindevous.

Ill’embrassaetlatintunmomentserrécontrelui.

—Vaavectonfrèremaintenant.

Lapetitefillesedirigeaverssonfrèreetauderniermomentfitfasseauroi.

—Monpèren’arienfait.Ilesttrèsgentil.Vousnepouvezpasluifairedumal.

Christianlapritparlesépaulesetlafitseretournerverslui.

—Celanesertàrien,Éloïse,ilsontprisleurdécision.JeveuxquetuemmènesMariedanssachambreetquevousprépariezquelquesaffaires.J’arrive.

IllapoussaverslapetiteMarieetleurouvritlaportedubureaupourlesfairesortir.Ilsursauta,quandilvitlenombreimpressionnantdesoldatsquiattendaitderrière.Nina,lanourricedespetitesvintleschercher,enpoussantleshommesduroi.

—Venezavecmoi,mesbébés.

Elleleurpritlamainetelless’enallèrent,sousleregarddessoldatsetdesdomestiquesquiétaientmassésdanslevestibule.

Christianrefermalaportedubureau.Ilregardasonpèreetsejetadanssesbras.Leslarmesqu’ilavaitretenuesdevantsessœurssemirentàcouler.

—Papa,papa...

—IlfautêtrecourageuxChristian.Vousnedevezpasvouslaisseraller.Vousallezdevoirvousoccuperdevossœurs.Ellesvontavoirbesoindevous.

—Jesaisrépondit-ild’unepetitevoix.

Ilsetournaalorsversleroietleducquinel’avaientpaslâchédesyeux.

—Vousfaiteserreur!Pourquoin’interrogez-vouspasnosdomestiques?Ilsvousdirontquemonpèreétaitlà,cefameuxsoir!

Leducleregardadurement.

—Votrepèreestunassassinetildoitpayer.Etcen’estpasvous,duhautdevosquatorzeans,quialleznousdirecequidoitêtrefaitoupas!

SontonhaineuxetsonregardmauvaisfirentperdrelatêteàChristian.Ilsejetasurluienlemartelantdecoupsdepiedetdepoings.

—Jevoushais!Jevoushais!cria-t-il.

Leducessayaitdelemainteniràdistance,maislejeunegarçonavaitplusdeforcequen’enrévélaitsonapparencefluette.Sonpèredutleprendreparlesbraspourl’éloigner.

—Calme-toiChristian.Calme-toi.Tunefaisquerendrelasituationencorepluspénible.Regarde-moi,monfils.

Christiansecalmaetregardasonpère.

—Tudoisresterdigne,malgrécequinousarrive.Tuledois,pourmoi,pourtessœursetpourtamaman,quidoitnousvoirdelàoùelleest.Jesuisinnocent,tulesaisettousceuxquimeconnaissentbien,lesaventaussi.Unjour,j’espèrequelavéritééclatera.Cejour-là,ilfautquetusoisprêtàreprendrecequit’appartient.Tonnom,tontitre,tademeure.Alorss’ilteplaît,restegentiletdoux.Nepermetspasàlahainedetechanger.Soisceluiquetamèreetmoivoulonsquetudeviennes:Unhommedroitethonnête.Prendssoindetessœursetveillesurelles.Jetefaisconfiance,Christian.Etn’oubliepasquequoiqu’ilsepasseàpartird’aujourd’hui,tuesundeSaxeetquetamamant’adonnécequ’ilyavaitdemeilleurenelle.Sers-t’enpourmeneruneviedigneetpourprotégertessœurs.

Legarçonhochalatête.Sonpèrel’enlaça.Aprèsquelquesinstants,illerelâchaetlepoussaverslaporte.

—Vamaintenant.

Quandilsortit,Christianjetaundernierregardàcepèremerveilleux,qu’ilnepourraitplusjamaisvoir,saufdevantlegibet.Iltournalatêteversleduccommepourbiens’imprégnerdesestraits.Leduceutunfrissondevantceregardpleindehaineetdemépris.Ilnesaluapasleroicommeilauraitdûlefaireets’éloigna,droitetfier,neregardantpersonne.

—Votrefilsauraitétéunbonseigneur.Jeregrettecequiluiarrive,ditleroiaucomte.Jem’assureraimoi-mêmequevosenfantsarriventbienchezvotresœur.

—Merci.Pourrais-jeresterseulmaintenant?Jedoismettremesaffairesenordresavant…

—Trèsbien.Duc,suivez-moi.Laissons-leseul.

Leducfaillitprotester,maisilsetutdevantleregarddesonroi.Illesuivitjusqu’àlagrandeporte

d’entréeduchâteau.Ilsavaientbesoind’air.Apeineavaient-ilsfranchileseuil,qu’unedétonationsefitentendre.Leducseprécipitaverslebureau.Maisenouvrantlaporte,ilsavaittrèsbiencequ’ilallaitdécouvrir.Lecomte,latêteappuyéesurlebureau,étaitmort.

Christianavaitluiaussientenduladéflagration.Ilarrivaderrièretousceuxquis’étaientagglutinésderrièrelaporte.Illespoussaetsepétrifiadevantlecorpsdesonpère.Ungrandcrisortitdesabouche.

—Non,non!cria-t-il.

Leduceutjusteletempsdel’attraperavantqu’ilnesejettesursonpère.Illuitournalatêteetleserracontrelui.Degrandssanglotsagitaientsoncorpsfragile.Leducétaittristepourl’enfantetenmêmetemps,illuienvoulait,carilétaitlefilsdel’hommequiavaittuésafemme.Ill’éloignadelui.

—Reprenez-vous,cen’estpasdigned’uncomte!luidit-il.

Legarçonleregardaetluienvoyauncoupdepoingdanslevisage.

—Jenesuispascomte,jen’aipasàêtredigne,niàrecevoirdesleçonsdevotrepart.Toutçac’estvotrefaute!Monpèren’auraitjamaisfaitdemalàunefemme.Etc’estvotreduchessequilecherchaittoutletemps.Unevraiechienneenchaleur,quandellelevoyait.Ilenriaitquandilrevenaitetqu’ill’avaitcroiséàuneréception.Toutlemondelesavait,maispersonnen’ajamaisosévousledire!Vousêtestellementsuffisantetimbudevous-même!Jesuissûrquemêmevotreroilesavait!

Leducneputensupporterdavantage.Ilenvoyauneclaquemagistraleaugarçon.

Ill’empoignaparlesépaules:

—Jet’interdisdeparlercommeçademafemme!Tum’entends?lesecoua-t-il.

Lemajordomeducomtetiral’enfantversluipourl’éloignerdesmainscruellesduduc.Lerois’interposa,quandCharlesvouluts’élancersurChristian.

—Çasuffit!ordonna-t-il.Duc,reprenez-vous!Ettoi,mongarçon,sortdecettepièce.Vousallezpartiraujourd’huimême,pourvousrendrechezvotretante.Préparezunevoiturepouremmenerlesenfants!cria-t-il.

Plusieurspersonness’éparpillèrent.

—Jeneveuxpaspartir,criaChristian,quelemajordomeéloignait.Jeveuxresterpourl’inhumationdemonpère!

—Votrepèreserajetédanslafossecommune!criaégalementleduc.Ilneméritequeça!

Christianvoulurevenirversleduc,maisAlbertlemajordomel’enempêcha.

—Venez,MonsieurChristian,venez,nerestezpaslà.

Avantdepartir,commepourledéfier,l’enfantregardaleducbienenface.

—Unechienneenchaleur,voilàtoutcequ’étaitvotrefameuseduchesse.Etl’enfantqu’elleportaitn’étaitsûrementpasdevous.

Dessoldats,surunsigneduroiempêchèrentleducdes’élancerversl’enfant.

CHAPITREII

Quandlecalmefutrevenuetqueleduceutretrouvésonsang-froid,leroiordonnad’enleverlecomterestédanslamêmeposition.Ungrandsilencesefitquandlecorpspassadevantlesdomestiquesrassemblésdansl’entrée.Beaucoupd’entreeuxpleuraientetleshommessedécouvrirentpourrendreundernierhommageàunhommequilesavaittoujoursbientraités.

Certainssuivirentsadépouille.Maislaplupartd’entreeuxvoulaientêtreprésentspourledépartdestroisenfants.

Quandilsdescendirentlegrandescalier,touslesregardssetournèrentverseux.Lesfemmespleuraientetleshommesessuyaientleslarmesquicoulaientaucoindeleursyeuxenseretournant.

Lespetitesfillesétaientlespremières.Laplusjeuneserraittrèsfortlamaindesagrandesœur.Christianétaitderrièreellesetavaitposésesmainssurleursépaules.LapetiteMarieportaitsapoupéepréféréeetregardaittoutcemondeensouriant.Éloïse,avaitlesyeuxrougesetfixaitlesol.

Arrivésenbas,lesdomestiquessemirentdechaquecôtédugrandescalierdansunensembleparfait,pourleurfaireunehaied’honneur.Leroietleducregardaientcesgensquimontraienttoutel’estimequ’ilsavaientpourcesenfantsetsurtoutpourleurdéfuntmaître.Lespetitsparcoururentlesquelquesmètresquilesséparaientdelagrandeportedansungrandsilence.Christianavaitlâchésespetitessœursetserraitlesmainsdeshommesetenlaçaitlesfemmes.Ilfranchitlesportesdesonchâteau,sansjeterunseulregardauxdeuxhommes,quivenaientdedétruirelaviedesafamille.Ilaidasessœursàmonterdanslecarrossequeleroiavaitfaitpréparerpoureuxetalorsqu’ilmontaitsurlapremièremarche,uncrivenantdelamaisonlefitseretourner.

—Aurevoir,Monsieurlecomte,disaitAlbert.

—Aurevoir,Monsieurlecomte,reprenaientenchœurtousleshabitantsdelamaison,lesunsaprèslesautres.

Christianleursourit,montadanslecarrosseetfermalaporte.Lacalèchecommençaàs’éloignerduchâteau,maisilpouvaitencoreentendresesgensl’interpeller.Malgrésatristesse,ilneputs’empêcherdesourire.Leducdevaitêtrevertderaged’entendrequetousleconsidéraientcommelecomteduchâteau.

Pendantquelecarrossedisparaissaitdeleurvue,leducetleroiregardaienttoussesgensquigardaientleuraffectionintactepourlefilsd’unhommeaccusédemeurtre.Danslatêtedechacundesdeuxhommes,undouteinfimevintsesubstitueràlacertitudeabsoluedelaculpabilitéducomte.

Lesenfantsarrivèrentdevantlademeuredeleurtantedeuxjoursplustard.

Leroiavaitchargél’undesesgardesdes’occuperd’eux,jusqu’àcequ’ilssoientbienarrivés.Ilsavaientdormidansuneaubergetrèsagréableoùlespetitesfillesavaientpusedégourdirlesjambesetoùellespurentprendreunbain.Christianétaitrestéderrièrelaportedeleurchambre,afindesurveillerquepersonneneviennelesdéranger.Lelieutenantquilesaccompagnaitétaitrestéprèsdelui.Iln’étaitpastrèsbavardetChristiansesentitàl’aiseauprèsdelui.

Quandledînerfutapportéaprèslebain,cefuttoutnaturellementqueChristianproposaaulieutenantdesejoindreàeux.Lasoiréefutplacéesouslesignedelasimplicité.Lelieutenant,Yvan,c’estainsiqu’ilvoulaitquelesenfantsl’appellent,racontadesanecdotessursavieàl’armée.LapetiteMarieendormiesurlesgenouxdesonfrère,tressautaitquandcelui-ciseprenaitàriredoucement,grâceàl’unedeseshistoires.

QuandÉloïsefutelle-mêmeendormie,Christianparlaalorsdesonpère.Lelieutenantlelaissafaire.L’enfantavaitvraimentbesoindeseconfier.Quandilexpliquaqu’ilnecomprenaitpascommentilavaitpuêtreaccusé,alorsqu’ilétaitchezeuxcesoir-là.Lelieutenantluiexpliquaquelespreuvesavaientétérécoltéessurleslieuxdudrameetletémoignaged’unepersonneayantvulecomtecettenuit-làavaitaccusésonpèreirrémédiablement.MaisChristiannevoulutriencroiredetoutcela,etilnesutplusquoidirepourledéfendre.Etpuis,pensa-t-il,àquoibon,sonpèreétaitmortetluietsessœursavaientétéexilésloindeleurdemeure.

Yvancomprenaitladétressedupetitgarçon,quienquelquesheuresavaitvusonmondedisparaître.Alorsquedeslarmescoulaientdesesyeux,Yvanlepritdanssesbras,luipromettantquejamaisilnelesabandonneraitluietsessœurs.Christians’endormitpluspaisiblement.

QuandilsarrivèrentchezladyDray,celle-ci,ainsiquesonmariétaitdéjàaucourantdecequ’ils’étaitpasséchezlecomte.Elleaccueillitlesenfantsplutôtfroidement,etdemandaàunefemmedechambredelesemmeneràlacuisine.Elleemmenalelieutenantdanslebureaudesonmarioùcelui-cilesattendait.

Ilattaquatoutdesuitelesoldat.

—Jenepeuxpasgardercesenfantschezmoi,luidit-ild’emblée.Jesuisunmembretrèsrespectédelavilleetjeneveuxpasquelahontequis’estabattuesurmonbeau-frère,rejaillissesurmoiousurmesenfants.J’aideuxfillesenâgedefaireleurentréedanslemonde,etsil’onsavaitquejegardechezmoilesenfantsd’unvioleuretd’unmeurtrier,ellesnetrouverontjamaisàsemarier.

—Écoutez,j’aipassédeuxjoursaveccesenfants,ilssontmerveilleux.Lespetitesfillesnepleurnichentpaspourunouioupourunnon.Ellessontgentillesetpolies.Legarçonesttrèsintelligentetilestassurémentunepersonneenquil’onpourraavoirconfianceplustard.Vousferiezuneerreurenneleurproposantpasuntoitetlachaleurd’unefamilleaimante.Ilsontbesoindevous.

—Jeunehomme,cen’estpasàvousdenousfairelamorale.Jenegarderaipascesenfantssousmontoit,unpointc’esttout.Emmenez-lesoùvousvoulez.

—Ilsontd’autresfamillesquevous?

—Non,mafemmeétaitlaseulesœurducomteetsafemmen’avaitaucunefamilleproche.Sesparentssontdécédésilyalongtempsmaintenant.

—Quevoulezquej’enfasse?Leroilesaenvoyéschezvouspourquevouslesgardiez.

—Leroinepeutpasm’obligeràhébergerlesenfantsd’uncriminel.Jesuisdansmondroitetvouslesavezparfaitementbien.Etquivam’aiderfinancièrementàélevertroisenfantsdeplus?Leroi?Jenecroispas.Jevousdemanderaidoncdequittermamaisonetdelesemmener.

Lelieutenantétaitfurieux.Quandilouvritlaporte,Christianétaitderrièreetd’aprèslapâleurdesonvisage,ilavaittoutentendu.

Ilentradanslebureau,sansfermerlaporte.

—C’estvous,mononcle,quinoustraitezcommedesmendiants?Alorsquemonpèrevousaaidéquandvousn’aviezplusunsouetquevousavezfailliêtremisàlaportedecettemaison.Votrefemme,matante,estvenuelesupplieràgenouxdevousaider.Illuiadonnéunefortesommed’argent.Quevousneluiavezjamaisremboursé!Maisjenem’imposeraipasdanscettemaison.Jevoudraisjustequevousgardiezmessœursenattendantquejepuissetrouveruntravailetqu’ellespuissentvenirmerejoindre.MarieestgentilleetÉloïses’enoccupera.Jevousdemandedelesgarderchezvous,pendantunmois.Aprèstoutcequemonpèreafaitpourvous,vouspouvezbiennousrendreceservice.

Lelieutenantétaitimpressionnéparl’attitudedujeunegarçon.Ilnefaisaitaucundoutequ’ildeviendraitdanslesannéesàvenirunepersonnequirallieraittoutlemondeàsacause.Ilavaitcepetitquelquechosequienfaisaitunvraidirigeant.

—Etoùunenfantdevotreâgeva-t-iltrouverdutravail?Ironisasononcle.

—Jesuisuntrèsbondresseurdechevaux.Vousavezdûenentendreparler.Monpèreavaitlesmeilleurschevauxdetoutlepays.Etc’estmoiquim’enoccupais.Jevaismefaireengagerdansuneécurieetjevousprometsquejeneresteraipaslongtempsunsimplelad.Alors,quelleestvotredécision?

L’oncledeChristianleregardaattentivement.Safemmevintluiparlerdansl’oreille.Ilacquiesçaàcequ’elledisait.

—Trèsbien,jegarderaivossœursjusqu’àcequevousveniezleschercher.Jevouslaissetroismois.

Christianpoussaunsoupirdesoulagement.Sesyeuxsefirentplusbrillants.Iltournalestalonspourrejoindrelespetites,quil’attendaientdanslevestibule.

Ils’agenouillaitenfaced’elles.

—Jevaisdevoirvouslaisserici.

Éloïsepoussauncri.

—Non,s’ilteplaît,Christian,nenouslaissepaslà.Emmène-nousavectoi.

—Chutmapuce,luidit-ilenlaprenantdanssesbras.Jevaisrevenirvouschercher,danspastrèslongtemps.Tuverras,tun’auraspasletempsdet’ennuyer.TudevrasprendresoindeMarie.Jetedonneraismonadressedèsquejeseraisinstallé.Etquandj’auraisassezd’argent,jeviendraisvous

cherchermoi-même.

Éloïsel’écoutaitattentivement.Ellesavaitquesonfrèreferaitexactementcequ’ildisait.Jamaisilneluiavaitmenti.

Ellel’enlaçaetluidittoutbasdansl’oreille.

—Dépêche-toi!

Aprèsavoirdéchargéleursaffaires,Christianaidalesdomestiquesàlesmonterdanslachambrequesessœursallaientoccuper.Ilvoulaitêtrecertainqu’ellesseraientbieninstalléesavantdepartir.

Quandilsredescendirent,lelieutenantétaitlàetattendaitChristian.

—Vousn’êtespasencoreparti,Yvan?luidemanda-t-il.

—Non,jenepeuxpastelaisserseul,sanssavoircequetuvasdevenir.Leroim’abienprécisédevouslaissertouslestroisensécurité.Tessœursvontêtrebienici,etmaintenantilfautquel’ons’occupedetoi.

Christianneréponditpas,maissesentitsoulagerquelelieutenantnel’abandonnepas.Ilembrassasespetitessœurs,maisnes’attardapassurcesadieux.Ilavaitl’impressiondelesabandonner.

—Jereviendrais,leurdit-ilencoreunefoisavantdefranchirlesportesdelademeuredesononcle.

Celui-cineluiadressapaslaparole,pasplusquesatante,d’ailleurs.YvanfitmonterChristiandanslecarrosse,accrochasonchevalàl’arrièreduvéhiculeetmontaàcôtédelui.

—C’estvraicequetuasdittoutàl’heure?Tut’yconnaisenchevaux?

—Jesuislemeilleur.

LesaffirmationsdeChristianfirentrirelelieutenant.

—C’estvrai,renchéritl’enfant.Donnez-moin’importequelchevalunpeuteigneuxetj’enferaiunvrainounours.

—Jetecrois,Christian.Jevaisd’ailleurstemettreàl’épreuve.MonpèreestleducdeBoigel.Ilpossèdeunetrèsgrandeécurieetjet’emmènelà-bas.Sivraimentcequetudisestvrai,ilvoudrat’embauchertoutdesuite.Tutesenscapabledefairefaceàmonpère?Illeverratoutdesuitesitumens.

—Jenemensjamaisetjesuissûrdemoi.Yvan,çaseraitgénialsijepouvaistrouveruntravailtoutdesuite.

—Oui,çaseraitvraimentbienpourtoiettessœurs.

Illeregardaensouriant.

—Allez,c’estparti!

Lechâteaududucsetrouvaitàmoinsdedeuxjoursàchevaldelamaisondel’oncledeChristian.Ilsyarrivèrentlelendemainaprès-midi,alorsquelanuitcommençaitàtomber.Avantdedescendredevoiture,Yvaneutunedernièrerecommandationàfaireaugarçon.

—Écoute,nedispasquetueslefilsducomtedeSaxe.Tuasvularéactiondetononcleetdetatante.Jenesaispasquelleseralaréactiondemesparents,alors,disquetut’appellesTristanSaxon,quetuasperdutesparentsdansunincendieetqu’ilterestedeuxpetitessœursàélever.Monpèresemontreraindifférent,maismamèrenepourrapasrésisteràtonhistoire.Sitoutsepassebienetquetunem’aspasmenti,tessœursserontavectoidansmoinsd’unmois.

—Jenet’aipasmenti,Yvan.Jesuisvraimenttrèsbonavecleschevaux.

—Onverracelademainmatin.Viensdescendonsmaintenant,mesparentsontdûêtremisaucourantqu’uncarrosseavaitpénétrédanslapropriété.

Ilsentrèrent,accueillitavecenthousiasmeparlemajordome.

—MonsieurYvan,quellejoiedevousrevoir,luiditl’hommeenledéchargeantdesonveston.

—Merci,François,jesuiségalementheureuxd’êtreici.Mesparentssont—ilslà?

—Oui,Monsieurvotrepèreestdanssonbureau,votremèredanssonsalon.Voulez-vousquejevousyemmène?

—NonFrançois,jevaisyallerseul.Jevaisluifaireunesurprise.

—BienMonsieur,Madameladuchesseseraheureuse.Depuisvotredépart,votremères’ennuie.

YvanfitsigneàChristiandelesuivreetilsedirigeaverslesalon.Quandilouvritlaporte,celle-ciétaitentraindelire.Ellerelevalatêteetpoussauncridejoieenvoyantsonfils.

—Yvanmonchéri,luidit-elleensejetantdanssesbras.

—Maman,jesuisheureuxdevousvoir.

Ill’enveloppadanssesbrasetlaserratrèsfort.

—Vousêtestoujoursaussijeuneetbelle.

—Ohmongrand,commec’estdouxdetevoirici.

Ellelepalpapartout,pourêtresûrqu’ilétaitenbonnesanté.

—Maman,arrêtez.Jevaisbien,trèsbienmême.Tristan,dit-ilensetournantverslegarçon.Approchequejeteprésenteàmamère.

Lamèred’Yvanleregardaaveccuriosité.

—Quiestcetenfantmonfils?Pasletien,ilesttropvieux.

—Nonmaman,répondit-ilenriant.JevousprésenteTristanSaxon,ilvientdeperdresesparentsdansunincendieetcherchedutravail.Leroim’avaitchargéd’unemissionimportanteetjel’airencontrésurlaroute,avecsesdeuxpetitessœurs.

—Deuxpetitesfilles?

LaduchesseregardaderrièreChristian.

—Maisoùsont-elles?

—Tristanapréféréleslaisseràunevieilletante,enattendantdepouvoirtrouveruntravailetdelesfairevenirjusqu’àlui.Jel’aiamenéici,carilm’affirmeêtrelemeilleurdresseurdechevauxdupays.Jevoudraislevoirfaire.Pèrevoudraégalementlemettreàl’épreuve.

—Ahvraiment,lemeilleurdetoutlepays?D’oùtirez-vouslaconclusionquevousêteslemeilleur,Tristan?

—Jelesais,Madame.C’estainsi.

—Soit,dit-elle,j’aimeraisbienvoirça,moiaussi.Venez,allonsvoirtonpère,ilestdanssonbureau.

Ilstrouvèrentleducderrièresonbureau.Unheureuxsourireéclairasonvisagequandilreconnutsonfils.

—Yvan,commentvas-tumongarçon?luidemanda-t-ilenleserrantcontrelui.

—Jevaistrèsbien,père.Etvous,jevoisquevousêtesengrandeforme.Ilmesemblequevousavezminci.

—Ohoui,tamèrefaittrèsattentionàcequejemangeetàcequejebois,depuisqu’elleaassistéàuneconférencesurl’alimentation.Etquiestcejeunehomme?demanda-t-ilcurieuxenvoyantlejeunegarçonquisecachaitderrièresonfils.

Yvanluirépétacequ’ilvenaitdedireàsamère.

Leducsemitàrire.

—Lemeilleur,vraiment?Quivouspermetdedirequevousêteslemeilleur,Tristan?

—Monpère,monsieur.

—Votrepère?Etils’yconnaissaitenchevauxvotrepère?

—Biensûr,Monsieur.Monpèreatoujourstravaillépourlesgrandesécuriesdupaysetilm’atoujoursditquej’avaisundonavecleschevaux.Jepeuxvousmontrermaintenant,sivousvoulez?

—Non,demainserabienasseztôt.Nousverronsçademainmatin.Vousdevezavoirfaim?

—Oui,papa.Jedoisvousavouerquelesrepasdanslesaubergesnes’améliorentpas.JesuisaffaméetTristanaussi,jepense.

Legarçonhochalatêtevigoureusement.

Leducattrapauneclochetteetlafittinter.Unefemmeapparutàlaporte.

—Mathilde,regardezquiestlà.

LadénomméeMathildepoussauncrietsejetasurlelieutenantquifutobligédesebaisserpourl’enlacer.Luiétaittrèsgrand,commesonpère,maisMathildeétaittrèspetiteetsurtoutaussilargequ’elleétaithaute.

—Mondouxbébé,luidisait-elle.Maisvousavezmaigri!Monsieurleduc,onnedonnepasbienàmangerauxsoldatsdansl’arméedenotreroi.

—YvanetsonamiTristanontfaimMathilde,pensez-vouspouvoirleurtrouverquelquechose?

—Etcomment!Jevaismefaireunplaisirderemplumerunpeumondouxbébé.

—Mathilde,jenesuisplusunbébé.J’aivingtans.

—Pouf,dix,vingt,trente,c’estpareil,voussereztoujoursnotrepetitdernier.N’est-cepas,Monsieurleduc?

—Toutàfait.Yvan,jevouslaisse.Allez-vousrestaureretensuitenousnousretrouveronsausalon.Nemangezquandmêmepastrop.JesuissûrquelacuisinièreestdéjàaucourantdetaprésenceYvanetqu’elleestoccupéeàtepréparerunbonpetitplatcommetulesaimes!

Ilétaitplusdevingt-troisheuresquandilsmontèrentsecoucher.

—Tuvasdormirlàcettenuit.Prendstonbain,détends-toi.Nousallonsavoirunematinéechargéedemain.Tun’aspastroppeur?

—Non,lieutenant,jen’aipaspeur.Jesaiscequejevaux.

—D’accord,sourisYvanfaceàladéterminationdeChristian.Alorsbonnenuitetàdemain.

—Mercilieutenant,àdemain,luiréponditl’enfant.

Aprèssonbain,Christian,secouchaets’endormitcommeunemasse.

IlfutréveillélelendemainparunYvandéjàprêtquiluisecouaitlebras.

—Allez,paresseux,réveille-toi.Monpèrevanousattendreetilahorreurdeça.

Tristanselevaetsedépêchades’habiller.Ilsdescendirentensemblepourprendrelepetit-déjeuner.Leducétaitdéjàattablé.

—Ahvousvoilà.Dépêchez-vousdemanger,j’aihâtedevoircejeunegarçonàl’action.

Ilsdéjeunèrentrapidementetcefutensemblequ’ilsserendirentauxécuries.Celles-ciétaientàunebonnedistanceduchâteauetilsmirentpresqueunedemi-heureàpiedpourlesrejoindre.

—Vousfaitesletrajetàpiedtoutletempsmaintenant,papa?demandaYvan.

—Oui.Nonseulementtamèrem’obligeàmangerpluséquilibrécommeelleledit,maisjesuiségalementtenudefaireunpeudesport.Etlamarcheestexcellentepourlecœur,paraît-il.

Dansl’undesprés,unchevalparessaittranquillement.Quandillesentendits’approcher,ilhennit,tapaavecsessabotsets’écartadelabarrièreenagitantsaqueue.

Christiansuttoutdesuitequec’étaitaveccechevalqu’ilallaitdevoirfairesespreuves.Maisilnecraignaitrien.Ilavaittoujoursétéattiréparleschevaux.Ilavaithuitans,quandson«don»s’étaitrévéléàluietauxsiens.C’étaitcommeuneforcequilepoussaitàallerverslesanimaux.Ils’étaitrenducomptequeceuxquiétaientlesplusdurementtouchés,soitparcequ’ilsavaientétémaltraités,soitparcequ’ilsn’étaientpasoupeudressés,l’attiraientplusquelesautres.Ilserappelaitlapeurquesonpèreavaiteuelapremièrefoisqu’ilétaitentrédansunenclosavecunchevalquisemblaitfou.Celaavaitétéplusfortquelui.Ils’étaitsentiobligéd’allerlevoirpourlerassurer.

Ilavaitréussigrâceàsavoixetàson«don»,commeledisaitsamère,àcalmerl’animaletàs’enapprocher.Ilavaitmisdutemps,maisàlafin,lechevalavaitacceptéqueChristianl’approcheetensuitequ’illemonte.Ensuite,cenefutqu’unequestiondequelquesmoispourquel’animalacceptesursondosn’importequi.Ilavaitétéachetétrèscherparunnoblequirecherchaitlesmeilleurspourlescourses.L’animalavaitgagnédenombreusesfois.Lafortunedel’acheteuravaitétéfaiteetcelledesonpèreégalement.

LeducetYvanleregardaient,sedemandantsil’enfantallaitvraimententrerdansl’enclos.Quandilouvritlabarrière,Yvanl’arrêta.

—Nelefaispassitunet’ensenspaslecourage.Monpèreestd’accordpourtedonnerunemploi,mêmesituasunpeutrafiquélavérité.

—Jen’airientrafiquédutout.Restezunpeuàl’écartleurordonna-t-il.Iladéjàtrèspeur,jenevoudraisqu’unfauxmouvementlefassepaniquer.

Aprèsavoirrefermélabarrière,Christiansedirigeaversl’animalquileregardaitencrachantparlesnasauxetentapantlesolavecl’undesessabots.

—Toutdoux,monbeau.Chut!Regarde-moi,écoute-moimonbeau.Jeneteveuxaucunmal.Jesuislàpourt’aideràallermieux.

Savoix,qu’ilavaitfaitedouceetenvoûtantesemblaitcaptiverlechevalrebelle.Ilcontinuaainsipendantunelongueheure,tournantautourdel’animal,faisantdegrandcercleaudébutetrétrécissantsestoursaufuretàmesure.Audébutcelui-citournaitenmêmetempsquelui,puispetitàpetit,ilnebougeaquelatêtepourvoiroùilétait.QuandChristianputenfinposerlamainsursondos,lechevaleutunesortedefrisson.Pourlapremièrefoisdepuisdesannées,ilselaissaittouchervolontairementparunhomme.Christiancontinuaainsi,toutenparlantdesavoixdouceetillecaressadeplusenpluslongtemps,jusqu’àcequesesbrasentourentsatêteetqu’illaposasursonencolure.

—Voilàmonami,tusaismaintenantquejeneteferaijamaisdemal.Jesuislàpourtoietjeviendraistouslesjours.Jenet’abandonneraipas.

Ilressortitdel’enclos,lesoleilétaitdéjàhautetplusieursdizainesdepersonnesl’attendaientàl’extérieurencompagnieduduc,desafemmeetd’Yvan.

—Incroyable,ditleduc.J’avaisentenduparlerd’hommesquiparlaientauxchevaux,maisjen’avaisjamaiseul’occasiond’envoirunàl’œuvre.

Ils’étaitapprochédel’enfantetluiavaitmislesmainssurlesépaules.

—C’étaitincroyable!Jevousfélicite!Jevousembauchequandvousvoulezjeunehomme.Quelâgeavez-vous?

—Quatorzeansmonsieur,bientôtquinze.Maisavantquejevousdiseoui,ilfautquevoussachiezquejechercheàfairevenirmespetitessœursavecmoi.ÉloïseàhuitansetMarie,trois.Jen’accepteraiscetemploiquesivousmepermettezd’allerleschercheretdemedonnerunlogementoùjepourraisêtreavecelles.Sinon,jepartiraisailleurspourmefaireembaucher.

—Ohlà,jeunehomme,quedecondition!Jenesaispassivouslesvalezvraiment.

—Monsieurleduc,l’interrompitunhomme,cequecejeuneafaitestvraimentincroyable.Personnen’estarrivéàletoucherdepuissixmoisqu’ilestici.

—Jesais,Martin,jesais.

—Etsijeprenaislespetitesàlamaison?lesinterrompitladuchesse.

—Attentionmafemme!Nevousmêlezpasdecela.

—Biensûrquejevaism’enmêler.Yvanm’aditquelespetitesétaienttrèsbienélevéesettrèsgentilles.Pendantqueleurfrèretravailleraici,moijepourraism’enoccuper.J’aitoujoursrêvéd’avoirdesfillesàlamaison.

—Mais,Madameladuchesse,cen’estpascelaquejeveux.Jepeuxm’occupermoi-mêmedemessœurs.

—Tristan,croyez-vousvraimentquevousaurezletemps?Vousallezpartirdechezvouslematinde

bonneheureetvousnerentrerezsûrementquetrèstardlesoir.Àlamaison,ellesauronttoujoursquelqu’unautourd’elles.JesaisdéjàquelapetiteÉloïsesaitlireetécrire,ilfaudraqu’ellecontinueàétudier.EtMarievaavoirbesoind’unemaman.Etjemeferaisunplaisird’essayerdeleurapporterl’amourquevotremamanauraitpuleurdonner.

Christianavaitleslarmesauxyeux.Ilsavaitbienquelapropositiondeladuchesseétaitlameilleure.Maisilavaitpeurdeperdresesdeuxamoursauprofitdecettefamilleàquiilmentaitsurleurvéritableidentité.

—Non,jenecroispasquecelamarchera.Jesuisdésolé.Jevaispartir.Jetrouveraiautrechose.

Ilcommençaàs’éloigner.Yvanl’arrêta.

—Quesepasse-t-il,Christian?luidemanda-t-ilneserendantpascomptequ’ilutilisaitsonvraiprénom.

—Jenepeuxpasmentirainsiàvotrefamille.Jenepourraipasvivreaveccepoidssurmaconscience,surtoutsivotremèredécidedeprendrelespetitessoussonaile.Ellealedroitdesavoirlavéritésurnous,etquandellelesaura,ellesedétourneradenous.C’estsûr.

—Arrête,viens.

Iltiral’enfantjusqu’àsesparents.Leducetladuchesseétaientrestésprèsdel’enclos,lesautresétaientpartis,aprèsqueleducleureutfaitsignedes’éloigner.Leducparlaitàladuchesseetelleavaitleslarmesauxyeux,quandilsserapprochèrentd’eux.

—Tristan,ditleduc,oubienChristian,d’aprèsleprénomquemonfilsvousadonné.Jen’aientenduparlerqued’unseulenfantdanslepaysquiétaitcapablededresserleschevauxlesplussauvages.Cegarçons’appelleChristiandeSaxe.Sonpèrevientdesesuicider,aprèsavoirétéaccuséd’avoirvioléettuéladuchessedeChanoine.Êtes-vousceChristiandeSaxe,mongarçon?

—Oui,c’estmoi.Maismonpèren’ajamaistuéladuchesse.Ilaétéaccuséàtort.Maisjecomprendsquevousnevouliezplusm’embaucherensachantquijesuis.Jevaispartir.Jetrouveraisbienunendroitquin’apasentenduparlerdemoioudemonpère.

Ilseretourna,prêtàpartirànouveau.

—Stopmongarçon!letonduducl’obligeaàs’arrêter.Jen’aijamaisditquejenevoulaispasvousembaucher.

Christiansetournaverslui,lesyeuxpleinsd’espoir.

—Vousvoulezbienmeprendreàvotreservice?Ohmerci!Jevousprometsdebienfairemontravail!Etmessœursaussipourrontaider.Ellessontgentilles,ellesnedemanderontqu’àfairecequevousvoulez.Éloïsepourraaiderauchâteau,maispastropquandmême,elleestencorepetite.Ellepourratravaillerquatreheuresparjour,lerestantelleresteraavecmoietMarie.ParcequeMarieestunbébé,ellenepeutpasencoretravailler.Maisnevousinquiétezpas,ellesemettradansuncoinetellenebougerapas.C’estsûr.Sijeluidis,elleserasage.

Christianparlaits’enpouvoirs’arrêter.

—Etpuispourlelogement,cen’estpasgrave.L’´écurieestimmense.Jetrouveraisbienuncoinpournousfairedormirtouslestrois.Etnousmangeronsauxcuisines,vousdéduireznotrenourritureetnotrelogementdemapaye.Etsivousnevoulezpasmedonnerdepaye,cen’estpasgrave.J’aiunpeud’argentsurmoi.Sijefaisattention,jepourrai…

—Stop,s’ilteplaît,Christian,stop!luiordonnaYvanenlesecouantgentiment.

—Oui,jeunehomme,çasuffit.Vousallezcherchervossœursetnousallonsfairecommeladuchessevousl’adit.Lespetitesserontlogéesàlamaisonetnouslestraiteronscommesiellesétaientnosfilles.Vouspourrezlesvoirquandvousvoulezetmêmenousréprimander,sivoustrouvezquenouslesgâtonsdetrop.Etvous,vouslogerezdanslamaisondemonanciengardeforestierquisetrouveàdixminutesd’ici.Vousvousoccuperezdeschevauxcommevousvousenoccupiezchezvotrepère.

—Mais…mais,vousn’avezpascompris.JesuislefilsducomtedeSaxe.

—J’aiparfaitementcomprisjeunehomme.Etiln’estpasnécessairedeledireàtoutlemonde.Mafemmeetmoigarderonslesecretsurvosorigines.

—Maispourquoifaites-vouscela?

—Parcequemonami,j’aiconnuvotrepèrequandnousétionsjeunes,etlesouvenirquejegardedeluin’estpasceluid’untueurdefemme.Jenesaispascequis’estpasséchezvousetquiapul’accuser,maispourmoi,ilresteinnocentjusqu’àcequel’onmeprouvelecontraire.Bon,maintenantqueleschosessontdites,allez-vousacceptermaproposition,monchercomte?

—OuiMonsieur.Merci,merci.

Ilsejetacontreluietl’entouradesesbras.Leduccaressadoucementlescheveuxdel’enfant.

—Çavaaller,mongarçon.Demainmatin,vouspartirezchezvotreoncleetvousrécupérerezvossœurs.Nousvousattendonsicidansquatrejours.

—Ilfautquejeprépareleschambrespourlesfilles.Quejeleurcommandedesvêtements,quejetrouveunprécepteurpourÉloïse,quejetrouveunenounoupourMarie,queje…

—Stop,mafemme.Nousavonsquatrejourspourfairetoutça.Cinq,sinouscomptonsaujourd’hui.Allezlesgarçons,rentronsauchâteau,ilestdéjàl’heurededéjeuner.J’aifaim.Ah!Jesuiscontent,j’aipasséunebonnematinée.

Christianétaitétourdipartoutcebonheur.Aprèsavoirvécul’enfer,ilentrevoyaituneportedesortie.Ilsuivitleducetsafemmeàcôtéd’Yvanquinelequittaitpas.

—Yvan,tuascombiendefrères?

—Deux.Jesuisledernier.Turencontrerasmonfrèreaînébientôt.Ilvientdesemarieretilestpartienvoyagedenoce.Mondeuxièmefrèreestactuellementenmer.Ilestcapitainedesonvaisseau.Ildoit

revenirdansquelquemois.Etmoi,jesuisauserviceduroidepuisunan.Quandjerepartirais,jenepourraissûrementpasreveniravantplusieursmois,sûrementmêmeuneannéeentière.

—J’espèrequejenevaispasdécevoirtonpère…

—As-tudéçuletien?

—Non,jamais.

—Bien,alorsneteposeplusdequestion.Tuserasparfait.

—MerciYvan,mercipourtout.

Christians’étaitarrêtéetleregardait.Yvanleregardaégalement.

—J’aitoujoursrêvéd’avoirunpetitfrère,dit-ilenriant.

Christiansemitàrire.Sonpremiervrairire,depuisqu’ilsavaientquittéledomaineducomtedeSaxe.

—Moiaussi,j’aitoujoursvouluungrandfrère.

Lelendemainmatin,ilspartirentdebonneheure.Ilsarrivèrentunpeuavantquelejournetombe,deuxjoursplustard.L’oncledesenfants,quilesavaitvusarriver,lesattendaitsurlepasdelaporte.

—Vousêtesdéjàrevenu,monneveu?

—Oui,jevienscherchermessœurs.

—Ah.Bien,euh…!

—Oùsontmessœurs?demandaChristiand’unairinquiet.

—Ellessontlà.Maisellessontdéjàenchemisedenuit.Enfait,mafemmelestrouvetoutàfaitcharmantesetsicelavousarrange,nouspouvonslesgarder.

—Non,j’aitrouvéunemploietlespersonneschezquijevaistravaillerm’autorisentàprendremessœursavecmoi.Jepeuxlesvoircesoir?Jevoudraisleurannoncerlabonnenouvelle.

L’onclelesfitentrerdanssamaison.Ilappelasafemme.Celle-cidescenditetregardasonneveuétonné.

—Vousêtesdéjàrevenu?

—Oui,jeviensleschercher.Nouspartironsdemainmatindebonneheure,Marie,Éloïseetmoi.Pourrais-jelesvoir?

—Écoute,Christian,tessœurssonttrèsbienfinalementavecnous.Ellessonttellementmignonnes.J’aimeraislesgarder.

—Ilyapeineunesemaine,vousaviezhontedenousetvousnouschassiez.J’aidûvoussupplierpourquevouslesgardiez,etlà,vousmeditesquevousvoulezlesgarder?!Etdemain,quandvosamisdemanderontleursnoms,vousleschasserezànouveau?Ehbiennon!Jerécupèremessœursetvousn’avezrienàdire.

Lespetitesarrivèrentàcemoment-là.Ellescoururentdanslesbrasdeleurgrandfrère.

—Christian,commejesuisheureusedetevoir,luiditÉloïse.Tuviensnouschercher?luidemanda-t-ellepleined’espoir.

—Oui,nouspartironsdemainmatin.Préparezvosaffaires.Nousnenousattarderonspasici.

Marie,serréecontresonfrère,leregardaitavecamour.

—Moiaussi,jeveuxveniravectoi.Jeneveuxpasresterlà.

—Biensûr,monpetitcœur,quetuviensavecmoi.Ilesthorsdequestionquejetelaissetouteseuleici.

—Ah!C’estbien,dit-elle.Jet’aime,moi.

Christianserrasatoutepetitesœurdanssesbras.

—Moiaussi,mapuce,jet’aime.

Illareposaausolets’agenouilladevantelles.

—Jenousaitrouvéunendroittrèsbienoùnousneseronspasséparés.MonamiYvannousyconduirademain.Vousverrez,mespuces,toutsepasserabien.

Lespetiteshochèrentlatête.

—Etpapa?demandaMarie.Ilvanoustrouver?

—Net’inquiètepasmapuce.Ilnoustrouvera,réponditChristianunebouledanslagorge.

Éloïsepritsapetitesœurdanssesbras.

—Jetel’aiditMarie,papanepourrapasveniravecnous.AvecChristian,nousenreparleronsplustard.D’accord?

—D’accord.JevaismonterdansmachambrepourdireàTinaquenouspartons.Mapoupées’ennuyaitdetoi,Christian,ellemel’adit.

—Ehbien,disàtapoupéequ’àpartirdemaintenantnousneseronsplusjamaisséparés.

Lapetitepartie,ungrandsouriresurleslèvres.Éloïseembrassasonfrèreetlasuivit.L’oncleetlatanten’avaientplusrienàdire.Lesdeuxjeunesgenspassèrentleursnuitsdansl’écurie.Yvanavaitlouéunechambreàl’aubergeduvillage,maisChristianrefusades’yrendre.Ilvoulaitresterleplusprèspossibledesessœurs.

Lematinlestrouvabayantauxcorneilles.Ilsétaienthabituésàdormirdansdeslitsbienconfortablesetleurnuitdansuncoindel’écurienecorrespondaitpasvraimentàleurconforthabituel.

LespetiteslesrejoignirentdèsqueChristianfrappaàlaportedelamaison.Ilnepritmêmepaslapeinededireaurevoiràsononcleetàsatante.Ilmitsessœursdanslecarrosseetilspartirentsansunregardenarrière.Unenouvelleviecommençaitpoureux.Christianespéraitqu’elleneleurréserveraitquedebonneschoses.Saplusgrandehantiseétaitdeperdrel’uneoul’autredesessœurs.Maisilavaitconfiance.Ilnepouvaitdetoutemanièrepasfaireautrement.

CHAPITREIII

Dixansplustard…

—ChristiandeSaxe,criaunevoix.Oùes-tu?

—Dansledernierbox,Éloïse.

Ilentenditsasœurcourirjusqu’àlui.Ilneputs’empêcherdesourire.Siladuchessel’avaitvufaire,elleauraitsûrementditàÉloïsequ’unejeunefillebiennecouraitpas,quellesqu’ensoientlescirconstances.Éloïsearrivaalorsqu’ilsortaitdelastalleoùilvenaitdebichonnersoncheval,Ara.

—Christian!Christian!Cequej’aiàtedireesttrèsimportant!

—Bonjour,machèresœur,tuvasbien?ironisa-t-ildevantsonairimpatient.

—Oui,oui,bonjour.

Elleluipritlesmains

—Voilà…j’aiuntrucimportantàtedire.

—Onneditpasuntruc,mais«j’aiquelquechosedetrèsimportantàtedire».

—Oui,c’estbon,arrêtedefairetaduchesse,soupira-t-elle.Alors,jepeuxteledirecequelquechosedetrèsimportant?

—Vas-y.Ils’assitsurunebottedepaille.Jesuistoutouï.

—Hiersoir,àlaréceptionducomtedeVar,unjeunehommeestvenumevoirpourm’inviteràdanser.Christian,Jecroisquejesuisamoureuse.Ilestbeau,lescheveuxblondfoncé,lesyeuxmarronclair,iln’estpasaussigrandquetoi,maisilmedépassed’aumoinsunetête.Etilesttrèsgentil.Quandilm’aprisedanssesbraspourdanserunevalse,j’aicruquemoncœurallaitexploser.Etjeluiaipluaussi.Iln’apasarrêtédemeregarderaprèsnotredanse.Etilestmêmevenum’inviterunedeuxièmefois.Mais,moncarnetétaitcomplet,jen’aipuaccepter.

—Etquelestlenomdecemerveilleuxjeunehommeetquelâgea-t-il?

—Ils’appelleHansetildoitavoirdanslesvingt-deux,vingt-troisans.Jeneconnaispassondefamilleetjet’avouequejen’aipasdemandé.

—Bon,s’ilétaitinvitéàcettesoirée,c’estqu’ildoitfairepartiedugratin.Etilt’adonnél’impressiondevouloirterevoir?

—Ilnem’ariendit,maisjesuissûrqu’ilvalefaire.Ilsavaitquej’accompagnaisleducetladuchesse,carilaparléavecNanouavantdevenirm’inviter.

—Etladuchesseaaccepté?

—Oui,doncceladoitêtrequelqu’undebien.TusaiscommeNanoufaitattentionauxgarçonsquim’invitent.

—Oui,jesais.Ehbien,mapetitesœur,c’esttrèsbientoutcela.Pourtespremièressorties,turencontresbeaucoupdesuccès.Maisjevoudraisquetun’aillespastropvite.Tun’asquedix-huitansettuasdutempsdevanttoi,pourfairelebonchoix.

—Jesais,tumel’asdéjàdit.MaisjetejureChristian,jamaisjen’avaisressenticesentimentavant.

Christianselevaetallaprendresasœurdanssesbras.

Ilétaittellementfierd’elle.Elleétaitl’unedesplusbellesjeunesfillesqu’iln’aitjamaisvues.Elleavaitgardélablondeurdesonenfanceetsesyeuxbleusétaienttrèsexpressifs.Elleavaitbeaucoupgrandiaufildesdixdernièresannées.Sasilhouettelongueetfineattiraitlesregardsmasculins.Etcequifaisaitsonsuccès,c’étaitsonextrêmeintelligenceetsagrandegentillesse.Biensûr,certainesmèresdefamilledéblatéraientsurelle,carleducetladuchesseprésentaientàlasociétéunejeunefillequ’ilsavaientadoptée.Personnenesavaitd’oùellevenaitetquielleétaitvraiment.Etc’étaittrèsbienainsi.Lejouroùunprétendantvraimentsérieuxetamoureuxseprésenterait,ilsdevraientluidirelavérité.EtChristianespéraitvraimentquesasœurneconnaissepasdedéception.Lesapparencesétaienttrèsimportantesdansleurmilieuetsicejeunehommereculaitensachantqu’ÉloïseétaitunedeSaxe,Christiannesavaitpascequ’ilferait.Luicasserlafiguresûrement,pourcommencer.

—Allezviens,jeteramèneauchâteau.EnmêmetempsjepasseraifaireunpetitbisouàMarie.

LapetiteMarieavaitbiengrandiégalement.Âgéeaujourd’huidetreizeans,ellenesesouvenaitpasvraimentdescirconstancesquilesavaientamenéschezlesdeBoigel.Elleconsidéraitladuchessecommeçamèreetleduccommesonpère.Elleparlaitdetempsentempsducomte,maisnesemblaitpasnostalgique.Elleétaitégalementtrèsintelligente,maissouventdissipée.Cequ’ellepréférait,c’étaitregardersonfrèredresserleschevaux.Dèsqu’ellepouvaits’échapperquelquesheures,c’étaitversluiqu’elleaccourait.

Christianétaitsatisfaitdelaviequemenaientsessœursetdelasienne.Ilavaitcomplètementprisenmainlesécuriesduduc,quiavaientaujourd’huilameilleureréputationdetoutlepays.OnneparlaitplusdeschevauxdelafamilledeSaxe.

Desgensvenaientdetrèsloinpourpouvoiracquérirunchevalduduc.Christiangagnaitbiensavie.Ilavaitaménagésamaisondefaçonàcequ’ilpuisserecevoirsespetitessœursquandellesledésiraient.Ilétaitnourritouslesjoursparlescuisinesduchâteau.Lacuisinières’étaitentichéedecejeunehommetravailleur,beauettoujourspolietelleluiconfectionnaittoujoursdedélicieuxpetitsplats.

Ilavaitbeaucoupgrandi.Petit,ilétaitplutôtfluet,maisils’étaitbiendéveloppéavecl’âge.Plusgrandquelamoyennepoursonépoque,ilétaitégalementtrèsmusclé.Peud’hommesosaientleprendreenaparté.Etceluiquis’yrisquait,nerecommençaitplusjamaisaprès.Côtésentimental,ilavaitbeaucoupdesuccèsauprèsdesfilles.Mais,ildevaitbiens’avouerqu’ilpréféraitlavirilitéetl’odeurd’unhomme,àladouceuretauparfumd’unefemme.Sesaventuressentimentalesétaientalorstrèsraresetquandilrencontraitquelqu’un,ildevaitprendremilleprécautions.Ilavaitd’ailleursaménagéchezlui,unepiècedontpersonneneconnaissaitl’existenceetdanslaquelleilramenaitsesraresamants.Unepersonnequiviendraitàl’improvistedanslamaison,alorsquelui-mêmeseraitdanssapiècesecrète,penseraitquelamaisonétaitvide.

C’étaitarrivéunefois,Éloïseavaitdécidédeluirendrevisite.Luiétaitdanssapiècesecrèteavecunhommedesonâge,depassageauchâteau.Quandill’avaitentenduappeleretfaireletourdesamaison,ilavaitcraintuninstantqu’elleneletrouve.Elleétaitrepartie,sansimaginerunseulinstantqu’ilétaitlà.L’hommeaveclui,avaiteutellementpeur,qu’ilavaitpréférépartirtoutdesuite,sansfinircequ’ilsavaientcommencé.Christianenétaitressortifrustrésexuellement,maiségalementsatisfaitdesachambresecrète.

Leducetladuchesseluivouaientuneaffectionréelle.Pasunseuljoursansquel’unoul’autreneviennelevoir.Ilss’inquiétaienténormémentdelesavoirseuldanssamaison,maisavaientcomprissonbesoindeliberté.Laduchesseavaitessayédebatailleravecluipourqu’ilviennevivreauchâteau,maisiln’avaitpascédé.Ilestimaitqu’illeurdevaitdéjàassezcommecela,sansenpluss’imposerdansleurviedetouslesjours.

Ilavaiteuunpeudemalavecleurfilsaîné.Quandcelui-ciétaitrevenudevoyagedenoce,iln’avaitpasvraimentappréciéquesesparentsaientrecueillidesorphelinsetqu’ilss’occupentdesfillescommesiellesétaientlesleurs.IlavaitaussidoutédelacapacitédeChristianàdresserleschevaux.Toutcelan’avaitpastenu,quandsaproprefemmesepritd’affectionpourlespetitesetqu’ilserenditcomptecombienChristianétaitvraimentdoué.Ilstravaillaientmaintenantsouventensemble,dansunevraierelationamicale.LefuturducdeBoigelhabitaitunedemeurehéritéedesafemme,où,ilavaitcommencéluiaussiàdresserdeschevaux.Cen’étaitpasrarequ’ilfasseappelàChristianpourl’aider.Sespropresenfantsleconsidéraientcommeleuroncleetsafemmel’obligeaitàlogerchezeux,quandilserendaitsurplace.

Yvanétaitrepartiauprèsduroi.Ilnerevenaitpasassezsouvent,selonsamère,maisdèsqu’ilétaitlà,l’amitiéquilesavaitliéesdepuisledébutrevenaitintacte.Ils’étaitmariél’annéed’avantavecunejeunefillerencontréelorsdel’undesesdéplacements.Christianavaitétésontémoinavecsonfrèreaîné.Lesfillesavaientjouéauxdemoisellesd’honneur.

Iln’avaitrencontréletroisièmefils,quedeuxoutroisfois.Celui-cinerestaitpaslongtempsàterre.Iln’avaitfaitaucuneremarqueausujetdesenfantsarrivésdanslademeuredesesparentsetavaitétéplutôtamicalavecChristian.Maisl’homme,plutôtbeau,étaitfroid,plusfroidquelaneigeenpleinhiver.Christiansedemandaitsouventcequipourraitamenerunjourunsouriresurcevisage.Ilavaitrarementdiscutéaveclui,etpersonneauchâteaunesavaitriendesavie.Laduchesses’inquiétaiténormémentpourlui.

Marielesavaitvusarriverparlafenêtredesasalledeclasse.Sonprécepteuressayabiendelafairerasseoir,maiselleétaitviveetilneputquelavoirfranchirlaporte.Ellesortitdechâteauencourantet

sejetasursonfrère.Christian,quil’attendait,l’aprisdanssesbrasetlafittourner.Elleéclataderire.Sonrireétaitcommunicatifetcefutunefratriejoyeusequeladuchesserejoignit.

—Alors,Marie,tut’esencoreenfuie.MonsieurMeyern’estpascontent.

—Oh,maman,jevoulaisvoirChristian.

—Tulevoispresquetouslesjours.Allez,retourneencoursavantquetonprofesseurnedécidededonnersadémission.

—Jeviendraistevoirdansl’après-midi.Christian,tuserasàl’enclosaveclenouveau?

—Ilyadegrandeschances.Cechevalestvraimentuncas.

—Jesuissûrquetuvasréussiràl’approcher.Tueslemeilleur.

—Mercipourtesencouragements,mapuce.Vatravaillermaintenant.

Ellepartitentraînantlespieds.

—Soulèvelesjambesquandtumarches,Marie,c’estbeaucoupplusjoli,luicrialaduchesse.

—AlorsChristian,jesupposequ’Éloïset’aparlédecebeaujeunehommequisemblel’avoirtantimpressionné.

—Oui,Madame.Vousleconnaissez?

—Paspersonnellement,maisilmesembleêtreunjeunehommebien.Jecroisquenousn’allonspastarderàfairesaconnaissance.N’est-cepas,Éloïse?

Lajeunefillequilesécoutaitdevinttouterouge.

—J’espère,dit-elletimidement.

—Danstouslescas,Éloïsepenseàcequejet’aidittoutàl’heure.Neprécipiterien.D’accord?

—D’accord,grandfrère.

—Jedoisyretourner,mesdames,j’aibeaucoupdetravail.

—Christian,l’arrêtaladuchesse.Vousvenezaubalquej’organiseàlamaison,n’est-cepas?

—Euh,etbien,jenesais…

—Pasdeçaavecmoi,jeunehomme.Vousvenezunpointc’esttout.Etnemeditespasquevousn’avezrienàvousmettre,voussavezquejemeferaisplaisirenvousachetantmoi-mêmevotrehabit.

—Non,non,Madame.J’aicequ’ilfaut.

—Donc,vousn’avezaucuneexcuse?

—Non,aucune,dit-ilensoupirant.

Laduchesseluifitungrandsourire.

—Nefaitespascettetête,jesuissûrquevousvousamuserez.

—Sivousledites.

Ilsalualaduchesse,embrassasasœuretpartitenmaugréant.Éloïseéclataderireenl’entendantetilluijetaunregardqu’ilauraitvoulufurieux,maisquinedonnaàlajeunefillequel’enviederireencoreplusfort.Laduchessearboraitégalementungrandsourire.

Surlecheminquileramenaitprèsdesécuries,Christianrencontraleduc.Celui-ci,quimontaitunsuperbeétalonnoir,galopajusqu’àlui.

Lecheval,quil’avaitreconnuallaluiflatterl’épauleavecsatête.

—Bonjour,monbeau,ditChristian,enlecaressant.Bonjour,Monsieurleduc.

—Commentvas-tu,Christian?

—Bien,trèsbienmême,ironisa-t-il.Votrefemmem’obligeàveniràvotrebal.Vousnepourriezpasluiparler?

—Alorslàsûrementpasmongarçon,sielleteveutàcebal,tuasintérêtàyêtre.Àmoinsquetuneveuillesl’entendretecrierdessuspendantlesdixprochainesannées?

—Non,pasvraiment.

—Alors,faitcequ’elleteditetviens.Tuasletempsdet’ypréparer,iln’auralieuquedansunbonmois.

—Oui,bonetbienmercidevotresoutien.

Leducricana.

—Toutleplaisirestpourmoi.Alorstut’ensorsavecBlaicky?

—Pasfacile,cetanimal.Ilestvraimenttraumatisé.Hier,j’aipum’approcheràdeuxmètres,maisdèsqu’ils’enestrenducompte,ilafilé.

—Essaiedefaireattentionquandmême,jenevoudraispasqu’iltedonneunmauvaiscoup.

—Unmauvaiscoup?Pasbêteça.

—N’ypensemêmepas.C’estdansunecivièrequetuviendrasaubal,s’illefaut.

—J’auraistoujoursessayé.

Leduclesaluaetretournaàsapromenade.

—Madameladuchesse,désolédevousdéranger,maisunjeunehommedésireraitvousvoir,vousetMonsieurleduc,ditFrançoislemajordomeenentrantdanssonsalonprivé.

Laduchesserelevalatêtedesonbureau.

—Quiestcejeunehomme?

—Voicisacarte.

Lemajordometenditlacarteàladuchesse.Celle-cineputs’empêcherdepousseruncrienlisantlenomquiyétaitinscrit.Elleselevarapidementetsanssefaireannoncerentradanslebureaudesonmari.

—Alors,mafemme,quesepasse-t-il?luidemanda-t-ilenvoyantsonvisageinquiet.

—Tenez,regardezlenominscritsurcettecarte.

Leduclalutetrelevaaussitôtlatête.

—C’estcejeunehommequiestintéresséparÉloïse?

—Oui.

Laduchesses’assitenfacedesonmarienpoussantunsoupir.

—Jenesavaispasquiilétait,quandilestvenumedemanderl’autorisationdedanseravecÉloïse.Jepensaisqu’ilétaitdelafamilledesVar.Lesdeuxfrèresneserontjamaisd’accordpourquecesdeux-làsefréquentent.

—Non,effectivement:HansdeChanoine!Detouslesjeunesgensprésentscesoir-là,ilafalluquecesoitluiqu’Éloïseaitremarqué.Et,ilafalluqu’illaremarqueégalement.

—Notrefilleestbelle,Edmond.

Ilapprouvad’unhochementdetête.

—Oui,jelesais.Ilattend?

—Oui,danslepetitsalon.Quefait-on?

—Luidirelavérité.Etsansattendrequ’unsentimentfortsedéveloppeentreeuxdeux.Leducnevoudrajamaisd’uneallianceaveclafilleduprésumémeurtrierdesafemme.EtChristiann’accepterajamaisquesasœurfréquentelefrèredeceluiquiafaitmourirsonpère.Nousn’avonspaslechoix.Lejeunehomme

doitêtreintelligent,ilcomprendra.

—Dixansontpassédepuis.Leducs’estremariéetilaeuunpetitgarçon.

—Oui,maisjedoutequ’aucundesdeuxaientpuoubliercettetragédie.Christianrefusequejevendeunseulchevalauduc,malgrésesdemandesrépétées.Jenesaisplusquoiluidire,quandjelecroise.

—Nouslerecevonstouslesdeux?

—Oui,c’estpréférable.Nousdevonsmontrerunfrontsoudé.

Leducsonnasonmajordomepourluidemanderdeconduirelejeunehommeàsonbureau.Quandilentra,HansdeChanoinenesavaitpasàquois’attendre.Ilavaittrouvéletempslongdanslevestibuleetd’aprèscequ’ilensavait,celaneprésageaitriendebonpourlui.Ilpritlamaindeladuchesseetl’embrassa.

—Meshommages,Madame,dit-il.

Iltenditsamainauduc.Celui-cilaluiserra,avantdel’inviteràs’asseoir.

—Vousvousdoutezdupourquoidemavenue.Depuisquej’aivuvotrefille,jenepenseplusqu’àelle.Jevoudraisvotrepermissionpourluifairelacour.Jenesuispasunséducteur,jen’entretiensaucunemaîtresse,jenesuispasunjoueuretj’aivraimentétéémuenvoyantvotrefillepourlapremièrefois.Jepensequej’aieulecoupdefoudre.

Leducetsafemmeécoutaientlejeunehommeavecattention.Ilsserendirentcomptequecequ’ilsallaientluirévélerrisquaitdelepeinerplusqu’ilsnelepensaient.

—MoncherHans,avantd’allerplusloin,mafemmeetmoiavonsunerévélationimportanteàvousfaire.Ilfautquevoussachiezquiestexactementnotrefille.Jenepensepasquevousaurezencoreenviedeluifairelacourensuite.

—Monsieur,sachezquequoiquevousmedisiez,celanechangerapaslessentimentsquej’aidéjàpourelle.

—Laissez-moipoursuivre,s’ilvousplaît.

Lejeunehommehochalatête,angoissédecequeleducallaitpouvoirbienluidire.

—Jevaisvousrévélerlevrainomd’Éloïse.J’aimeraisquevouslegardiezpourvousensuite,quoiqu’ilsepasse.Jeveuxvotreparoled’honneur.

—Vousl’avez,monsieur.Surmavie,jenerévéleraisjamaissonnom.

—Trèsbien.Mafillesenomme…ÉloïsedeSaxe.

Hansleregardauninstant,sansavoirl’airdecomprendre.Puisl’informationarrivajusqu’àsoncerveauetillâchaunjuron.

—Excusez-moi,dit-iluneminuteplustard.C’estunchoc.

—Jecomprendsetjecomprendraisaussitrèsbien,sivousvouliezpartir.NousnedironspasàEloïsequevousêtespassé.

Hansselevaetmarchajusqu’àlafenêtre.

—J’étaisjeunequandledrameestarrivé,maisjemesouviensencoretrèsbiendeladouleurdemonfrèreetdelanôtre,celledemamèreetdelamienne.Sophieétaitcommeunegrandesœurpourmoi.Etmonfrèren’aplusétélemêmedepuis.Mêmemaintenant,alorsqu’ilestremariéetaunenfant,jenel’aiplusjamaisentendurire,commeillefaisait

Ilpritunelongueinspiration.

—Maisc’étaitilyalongtemps.Lesenfantsducomten’yétaientpourrien.J’aitrouvéinjusteàcetteépoque,qu’ilssoientchassésainsi.Onm’aracontélesderniersmomentsdufrèred’Éloïsedanssademeure.Lafaçonqu’ilaeuededéfendresonpère.Iln’aaccordéparait-ilaucunregardauroietàmonfrère,quandilestpartiavecsessœurs.Etlesdomestiquesquiluidisaientaurevoirenl’appelantMonsieurlecomte.Lapersonnequim’aracontél’histoireenétaitencoreémue.

Ilregardaleducetsafemmeetvintserasseoiràcôtéd’eux.

—Toutcelaestdupassé.Jeneretirepascequej’aidit.JeveuxvraimentfairelacouràÉloïsedeSaxe.Etjesaistrèsbienqu’elle-mêmeaeulamêmeréactionquemoi,quandellem’avue.Jesuissûrqu’ellesouhaiteraoublierlepassé,pourconstruirenotreavenir.

—Ehbien,votreattitudemeplaît.EtpoursavoirsiÉloïseveutvraimentoublierlepassé,jevaislafaireveniricietjevaisluiposerlaquestion.Voulez-vousassisteràl’entretien?

—Oui,s’ilvousplaît.

Éloïsearrivaenvironunquartd’heureplustard.Elleentradanslebureau,prêteàsaluersesparents,quandellereconnutHans.Elleluifitungrandsourire,trèsheureusequ’ilsoitvenu.

—Bonjourmachérie,luiditladuchesse.

—BonjourNanou.Bonjourpapou.

—BonjourÉloïse,luiréponditleduc.Tureconnaiscejeunehomme?

—Ouibiensûr.Nousnoussommesvusl’autresoir.

Ellesedirigeaversluietluitenditlamain.

—Commentallez-vous?luidemanda-t-elle.

—Trèsbien,merciMademoiselleÉloïse.

—Éloïse,lesinterrompitleduc.Assieds-toi.TutedoutespourquoiHansestici,n’est-cepas?

Lajeunefillerougitjoliment.

—Oui,répondit-elled’unevoixtimide.

—Éloïse,voicilacartequenousaprésentéeHans.Ilestimportantquetulalises,maisassieds-toiavant.

Leductenditlacarteàlajeunefille.Celle-cilapritetlaregarda.EllelevalatêteversHansetregardaànouveaulacarte.Sonvisagepâlitetelleseleva.Lacartequ’elletenaitdanslesmainstombaparterre.

EllesetournaànouveauversHans.

—VousvousnommezHansdeChanoine?

—Oui.

Elleserassitetmitsesmainsdevantsonvisage.Samères’approchad’elleetlapritdanssesbras.Éloïsesenichacontreelle.

EllerelevatatêtequelqueinstantplustardetregardaHans.

—Voussavezquijesuis?

—Oui,vosparentsviennentdem’eninformer.

Ellehochalatête,lâchasamèreetseleva.Ellesedirigeaverslafenêtre,commeHansquelquesminutesplustôt.

—J’avaishuitansquandleshommesduroisontvenusarrêtermonpère.Jemetrouvaisdanssonbureau,quandleroietvotrefrèrel’accusèrentdumeurtredeladuchesse.Cefutdanscebureauquemonpèrem’aembrassépourladernièrefoisetm’afaitpromettred’êtresageavecChristianetdem’occuperdeMarie.Ensuite,jesuismontéeavecmapetitesœurdansnotrechambre.Nousdevionspréparernosaffaires.Jen’avaispastoutcompris,maisjesavaisquenousdevionspartirpournejamaisrevenir.J’entendaisdeshurlementsquivenaientdubas.JereconnaissaislavoixdeChristianetjesavaisqueceluiquiluirépondaitétaitleduc.Ensuite,ilyeutuncalmeetj’aientendulebruitd’unfusil.J’aientendulesgenscrier.J’aientendumonfrèrecrier.Jesuissortidemachambreetjesuisrestéeenhautdesescaliers,assise.J’aivuleducs’enprendreàChristian,quisouslecoupdel’émotiontraitaitsafemmedéfuntedetouslesnoms.J’aientenduChristiandirequ’ilnepartiraitpasavantd’assisteràl’inhumationdenotrepère.J’aientenduleducdirequenotrepèreseraitjetédanslafossecommune,commeilleméritait.J’aivunotremajordomeportermonfrèrepourl’éloigner.Ensuite,manounouestvenuemechercher.J’aifinidepréparernosaffaires.Christianestvenunousrejoindre.Ilétaitpâleetilavaitlesyeuxrouges.Ils’estagenouilléenfacedenouspournousdirequepapaétaitmort.Marien’apascompris,maismoioui.Jen’aipaspleuré.JenevoulaispasqueChristians’inquiètepourmoi.Ilavaitdéjàl’aird’êtrecomplètementeffondré.Jel’aiprisdansmesbrasetilm’aserrétrèsfortendisantquejamaisilnenousabandonnerait.Ensuitenoussommesdescendus.Lesdomestiquesnousattendaientenbas,ainsiqueleroietleduc.J’auraisvoulucrier,direquejevoulaisresterdansmamaison,maisjesavaisquepersonnenem’auraitécouté.Nosgensnousontaccompagnésjusqu’aucarrossequiallaitnous

emmener.Noussommesmontésdedans,etnoussommespartis.Nousavonstoutlaissélà-bas,cejour-là.Passeulementnotretitre,maislesgensquenousconnaissionsdepuistoujours,nossouvenirs,nosaffaires,quenousn’avonspaspuemporter.Machèrenounou,quin’apaspunoussuivre.Nousyavonslaisséégalementunepartiedenotreinnocence.

Leduc,laduchesseetHansl’avaientécoutésansl’interrompre.Lesdeuxhommesavaientleslarmesauxyeuxenentendantlesconfidencesd’Éloïse.Laduchesse,elle,neseretintpas.Elles’approchadesafille,l’enlaçaetpleuraavecelle.C’étaitlapremièrefoisqu’Éloïseparlaitdecequ’elleavaitvécuaumomentdudécèsdesonpère.QuandÉloïses’arrêtadepleurer,ellesedétachadesamèreetsetournaversHans.

—Jenecroispasquevotrefrèreoulemienaientpuoubliertoutcela.Monfrère,c’estsûr.Jelevoissouventlesyeuxdanslevagueetjesaisqu’ilpenseànotrepère.Jenesaispassinotrepèreétaitcoupableounon.MaisjesaisqueChristianestsûrqu’ilétaitinnocent.Quandàvotreproprefrère,jenevoispascommentilpourraitaccepterquevousfassiezlacouràlafilledel’hommequiatuésafemme.Ilvautmieuxlaisserleschosescommeellessontetnejamaisnousrevoir.

—NonÉloïse,s’écriaHans.Regardez-moi!

Lajeunefillelefixadanslesyeux.

—Jememoquedecequiapusepasserilyadixans!Nousétionsdesenfantstouslesdeux.Nousn’aurionsrienpuchanger.Monfrèreneserapascontentetlevôtreencoremoins.Maisest-ceuneraisonpourmettrenotrebonheurdanslabalance?Quandjevousaivuaubal,cefutunmomentmagique.Etcettemagieestrevenueaujourd’hui,quandvousêtesentrédanscebureau.Nepensez-vouspasquenousayonsledroitaubonheur,mêmesiungravecontentieuxdivisenosfamilles?NousnesommespasRoméoetJuliette.Nousavonslepouvoirdefairechangerleschoses,sanstragédie,sinouslevoulonsvraiment.

—Hansn’apastort,Eloïse.EtquetediraitChristian,s’ilétaiticiavecnous?luidemandaladuchesse.

—Ilcrierait,iltempêterait,puisilsecalmerait,carilverraitquej’aidelapeine.Ensuite,ilmeprendraitdanssesbras,ilregarderaitHansd’unairmauvaisetilmediraitquej’ailetemps.Ensuite,ilmedemanderaitsijesuissûrdemoietenfinqueseulmonbonheurluiimporteetquesicebonheurestavecundeChanoine,ill’accepterait.Après,ilsetourneraitversHansetluidiraitdebienfaireattentionànejamaismefairedepeine,sinonilluidémonteraitlatête.

Leducneputs’empêcherderiredevantleportraitquefaisaitsasœurdeChristian.Maiselleavaittoutàfaitraison.

—Etvotrefrère,luidemandaleducens’adressantàHans,quedira-t-il?

—Oh,ilmedéshéritera,sansaucundoute,maiscen’estpastropgrave.J’aiunedemeurequim’appartientenproprepastrèsloind’icietj’aidesrevenuessuffisantpourdonneràmafemmeetàmesenfantsleconfortdontilsaurontbesoin.

—Bien,alorsÉloïsequedécides-tu?demandasamère.

—JeveuxbienqueHansdeChanoinemefasselacour,dit-elleenrougissant.

Unimmensesourirefleuritsurleslèvresdujeunehomme.Éloïseleregardaitdéjàavecamour.Iln’yavaitaucundoutequetouslesdeuxavaienteulecoupdefoudrel’unpourl’autre.

—Bon,trèsbien.Ilnemanqueplusqu’àledireàChristianetàeninformervotrefrèreHans.Jevaisd’ailleursl’inviterpournotrebalannuel.Jeluidemanderaisdevenirquelquesjoursavant,pourluiexpliquerlasituationetpourqu’ilfasseconnaissanced’ÉloïseetdeChristian,intervintleduc.

—Ilnevasûrementpasdanserdejoie,moncher,tut’endoutes?

—C’estpourcelaquejepréfèrel’avoirunpeuavant.Aumoins,s’ildoitfaireunscandale,ilneleferapasdevanttousnosinvitésetletempsqu’ilarriveetquel’onprévienneChristian,cesdeuxjeunesgensvontpouvoirfairemieuxconnaissanceségalement.

—Tuasraison,monépoux.Lesenfants,leurditladuchesse,allez-vouspromenerdanslejardin.

Ilsneselefirentpasdiredeuxfois,etilspartirenttouslesdeux,ÉloïsedonnantlebrasàHans.Leducetsafemmelesregardaients’éloigner.

—Celanevapasêtrefacile,luidit—il.

—Non,pasvraiment.LeducetChristiann’accepterontjamaisquecesdeux-làsefréquentent.Àmoinsque…

—Dis-moi.

—EnavertissantChristianavant.Jepensequ’ils’opposeraàcequeHansfassesacour,maisquandilsauraqueleducs’yopposeégalement,pourlecontrarierilfinirapardireoui.

—EtcommeChristianauraditoui,leducseretrouveratoutseuletilpasserapourlemonstresanscœurdel’histoire.

—Etdonc,ildiraforcémentoui,àunmomentouàunautre.

—Maisvousêtesunfinstratège,machèreépouse.

Leduclapritdanssesbras.Ellepassalessiensautourdesoncou.

—C’estcommecelaquevousm’avezeu?

Ellel’embrassadoucement.

—Cela,c’estmonsecret,luirépondit-elle,avantqueleducnelafassetaired’unbaiserpassionné.

CHAPITREIV

CelafaisaitaumoinsunesemainequeChristiann’avaitpasvuÉloïse.IlavaitdesnouvellesparMarie,quiluiracontaittoutcequisepassaitauchâteau.Ilsavaitquelegalantd’Éloïsevenaittouslesjoursetqu’ilssemblaientdeplusenplusamoureux,aufildesesvisites.

Àl’heureoùilsutquelejeunehommeétaitlà,ildécidad’allerlessurprendre.Ilmontajusqu’auchâteauetlesaperçutquisepromenaientmaindanslamaindanslesjardins.Ilarrivaderrièreeuxdoucementetilputentendresasœurrire.Unsourirefleuritsurseslèvres.Sasœuravaitl’airheureuxetc’étaittoutcequiluiimportait.Iltoussaafindesignalersaprésence.Lesjeunesgenssursautèrentetseretournèrent.

—Christian!criaÉloïse,tunousasfaitpeur.

Elleembrassasonfrère.

—Tuasl’airfatigué?

—Non,çava.Ettoi,jevoisquetuesenbonnecompagnie.Tunemeprésentespas?Bienquej’aiel’impressiondevousavoirdéjàvuquelquepart,continua-t-ilendévisageantHansavecinsistance.

—Euh,non,jenecroispas.

—Vousêtesdequellerégion?

—Christian,viens-làetassieds-toi,l’interrompitÉloïseenlepoussantsurunbancdepierre,justederrièrelui.

Aprèsquesonfrèresefutinstallé,Éloïsepritlaparoleenprenantunegrandeinspiration.

—Christian,jevoudraisteprésentermonami,Hansde…Chanoine.

LesourirequeChristianavaitsurleslèvresdisparutenquelquessecondes,letempsqu’ilcomprennequisetrouvaitenfacedelui.Ildevinttrèspâle.Ilselevalentementets’éloignadequelquespas.Ilrespiraplusieursfoisàfondcommepoursecalmer.IlseretournaversHans.Sesyeuxétaientbrillantsdelarmes.

—Jenevousaijamaisvu,dit-ild’unevoixrauque,maisvousressemblezétonnammentàvotrefrère.Éloïse!cria-t-iltoutàcoup,tusaisquiilest?C’estlefrèredel’hommequiatuénotrepère.Commentas-tupuseulementsongeràcontracteruneunionavec…lui.

—Jen’ypeuxrienChristian,jel’aime.

—Tul’aimes!dit-ilenlaprenantparlesbras.Maistunepeuxpasl’aimer!Tuasdix-huitans,tuentrouverasunautre.Tuesbelleetintelligente,troppourlafamilledece…

—Monsieur,intervintHansquelacolèreetlahainedeChristianimpressionnaient.Toutcequevouspouvezdire,nousnouslesommesdéjàdit.Maisj’aimevotresœuretellem’aime.Jesaisquecen’estpasunesituationfacilepourvous.Maiscroyez-vousquecelalesoitpourÉloïseoupourmoi?Croyez-vousquenousnenoussommespasinquiétésdevotreréactionetdelaréactionquemonfrèreaura?J’aimevotresœursincèrementets’illefaut,nousnousenfuironsensembleetvousnepourrezplusvousopposeralorsànotreunion.

Christianregardalejeunehommeavecunecertaineadmiration.Iln’hésitaitpasàsedressercontreluietilavaittoujourseudel’admirationpourceuxquiallaientauboutdeleursidées.

—Éloïse,peux-tuvraimentfaireabstractiondufaitquecethommeestundeChanoine?Peux-tufaireabstractiondufaitquesonfrèreapoussénotrepèreàsesuicider?Qu’ilsnousontchassés,luietleroicommedesmalpropresdecheznous?

—Oui,jepeux.Hansn’yestpourrien.Ilavaitdouzeansàcetteépoque.Commemoi,iln’arieneuàdire.Detoutemanièrepersonnenenousauraitécoutés.Tuastoi-mêmeessayédedéfendrenotrepère,maistoutlemondeafaitcommesitun’avaisriendit.Alorsoui,jepeuxvivreavecça.Ehoui,jepensequesituleveuxvraiment,tupeuxtoiaussiaccepterHans.C’estunhommetrèsgentiletfiable.Situfaisaisuneffort,tuverraisquetupeuxtrèsbient’entendreaveclui.

—Jenecroispasquejepuissel’accepter.

—Alorstoitunel’acceptespas,repritÉloïsed’unevoixangoissée,lefrèredeHansvaledéshériter…

—Quoi?

—Biensûrqu’ilvamedéshériter,jem’yprépared’ailleurs.

—Iln’irapasjusque-là,toutdemême!

—Biensûrquesi.Monfrèreestcommevous,ilgardesahainecontrevotrefamillebienblottieaufonddesoncœur.

—Je…

—C’estcequevousfaites,Monsieur.

—S’ilteplaît,Christian.

—Monfrèrevasûrementmechasserdechezlui,quandilsauraquejeveuxépouserÉloïse.Ilnemepermettrapasdemedéfendreetdeluiexpliquercommevousvouslefaitesactuellement.

—Cethommeestvraimentunabruti.Déjàilyadixans,ilneréfléchissaitpasbeaucoup,maisavecl’âgeiln’apasdûs’arranger.Éloïse,tuasletemps,tusais?Tun’asquedix-huitans.

Illapritdanssesbras,toutenjetantunregardmauvaisàHans.

—Oui,jesais.

—Maistuasdéjàdécidé,n’est-cepas?

—Depuistoutepetite,j’airêvéd’unhommecommeHans.Ilteressembleunpeu,ilestbon,ilestintelligentetilestbeau.

—Cenesontpascescompliments-làquipourraientmefairechangerd’avis,tusais,dit-ilensouriant.

—Jesais.Maiscequejevoudraisquetucomprennes,c’estquejel’aimemalgrétout.Jesuisvraimenttrèsheureuse.

Christians’éloignadequelquespasetregardacemagnifiquechâteauquilesavaitaccueillislorsqu’ilsétaientenfants.Etlesermentqu’ils’étaitfaitcejour-là,quandsessœursétaientrevenuesavecluietYvan.Quequoiqu’ilsepassedansleurvie,ilseraittoujourslàpourelles.

Ilrevintverseuxetregardacettepetitefillequiétaitdevenuefemmeetquileregardaitavecuneangoisse,qu’iln’avaitvueauparavantquecejourfuneste.Celuiquiavaitdécidédeleurdestin.Etilsutàcemoment-làcequ’ildevaitfaire.

—Bontrèsbien,jenesuispasravidetonchoix,maisjem’incline.Jeneveuxpastefairedelapeine.Quantàvous,vousavezintérêtàbienvouscomporteravecmasœuroujevouscasselatête.Pourcommencer.

Éloïsesejetadanssesbrasenpleurant.

—Merci,Christian!J’aimeHans,maisj’aibesoindetoiégalement.Jenemevoispasvivremaviedefemmesanst’avoiràmescôtés.

Christianlaserracontresoncœuretluiembrassalescheveux.Hanss’approchad’euxetÉloïsevintseblottirentresesbras.

—Merci,monsieurdeSaxe.Jevousprometsdeprendresoindevotresœur.

—Etvotrefrère,qu’allez-vousenfaire?

—Jen’aipasbesoindemonfrèrepourprendresoindemafemme.J’aidesrevenustrèsréguliersetimportantsetjepossèdemapropredemeurepastrèsloind’ici.Alors,mêmesimonfrèremerenie,jenemeretrouveraispassansrien.

—Ehbien,jevoisquevousavezpenséàtout.Bon,jevaisyaller.Ilfautquejedigèretoutcela.JerisquedemefairediscretsesprochainsjoursÉloïse.J’aibesoindem’éloignerunpeu.

—D’accordChristian,mais…tu…m’aimes…quandmême?dit-elleenpleurant.

—Oh,madouce,luidit-ilenlareprenantdanssesbras.Biensûrquejet’aime.Riennipersonnenepourraenleverl’amourquej’aipourtoioupourMarie.Mavieseraitincomplète,sijenevousavaispas.Mais,ilfautquejem’habitueàl’idée,tucomprends?

—Oui.Jecomprends.

Ils’éloignadoucement,lesépaulesunpeuvoûtées.

—Ilnel’apassimalpritfinalement,luiditHansenlaprenantdanssesbras.

Elleposasonfrontsursonépaule.Hanslaserracontrelui.

—Net’inquiètepas,luidit-ildoucementdansl’oreille,nousnousensortirons.Ettuverras,tonfrèrearriveraàm’aimer.Jesuisleplusgentilgarçondumonde,jenevoispascomment,ilnepourraitpasm’aimer.

Éloïseriaitdoucement.

—Mercid’êtrerestéavecmoi,malgrémalourdehérédité,luidit-elleironique.

Ilsfurentinterrompusparladuchessequiarrivaitverseux.

—Alors?leurdemanda-t-elle.J’aivuChristianvenirvousvoir.Commenta-t-ilprislanouvelle?

EtÉloïseexpliqualaréactiondeChristian.

—Net’inquiètepastropÉloïse,tonfrèret’adore.S’ilabesoind’unpeudetempspourdigérertoutcela,ilfautlelaisser.Etpuis,n’oubliezpasquedansquinzejours,ildevrafairefacel’hommequ’ildétesteleplusaumonde.

—Commentcelava-t-ilsepasser,Manou?

—Jenesaispas,machérie,honnêtement.Leducestintelligent,peut-êtresera-t-ilcommeChristian.Ilaccepteraquevousvousfréquentiez,pourlebonheurdesonfrère.Quantàentrevoiruneréconciliationentrelesdeuxhommes,jecroisqu’ilnefaudrapasycompter.

LesjoursquipassèrentfurentpourChristianunvraicalvaire.PenserquesasœurétaitamoureusedeHansdeChanoineluiétaitinsupportable.Maisilnepouvaitrienyfaire.Sapetitesœuravaitbesoindesonsoutienetilleluidonnerait,quoiquecelaluiencoûte.EtpenseràlatêtequeferaCharlesdeChanoinequandilsauraquiavaitattirél’attentiondesonfrère,étaitcomplètementjouissif.

Leducvintletrouver,cariln’étaitpasvenuauchâteaudepuisplusieursjours.Mêmelacuisinières’inquiétaitpourlui.

—Alors,Christian,onnetevoitplus.

—J’avaisbesoinderesterunpeuseul.

—Oui,jecomprends.Quevas-tufaire?

—JeveuxqueCharlesdeChanoinemeured’uneapoplexie,quandilsaurapoursonfrèreetÉloïse.Je

veuxêtreprésentquandill’apprendra.Ilestinvitéaubal?

—Nousnepouvionspasfaireautrement.Ilvaarriverdansquelquesjours,avecsafemme.

—Danscombiendetemps?

—Ilsarriventaprès-demain.S’ildoitfaireunscandale,jepréfèrequ’illefasseavantquenosinvitésn’arrivent.Jesuissûrqu’ilvapenserquejeveuxluivendrel’undemeschevaux.

—Alorslà,ilpeuttoujourscourir.Aucunchevaln’estàvendrepourlui.

—Jesais,Christian.Tantquetunemedonnespastonaccord,jeneluienvendraisjamais.

—Ehbien,jenesuispasprèsdevousladonner.Iln’aurajamaisunseulchevalquej’auraisdressé.

—Quandilvaarriver,ilseraitbienquetunouslaissesuneoudeuxjournéesavantdeteprésenter.J’aiunpeupeurdesaréaction,quandilteverraetsurtoutdelatienne.

—Jen’aiabsolumentpasl’intentiondelevoiravantlebal.

—Tunevoudrasmêmepasdiscuterunpeuavecluiavant?

—Sûrementpas.Etjesuisvraimentobligéd’yaller,àcefichubal?

—Tul’es.Tun’aspasvraimentlechoix.

Christiansoupira.

—J’auraisledroitdecasserlafigureauduc?

—Non,pasdescandale,s’ildécidederesterjusque-là.Tupourrasluijeterautantd’œilnoirquetuveux,maistun’aspasledroitd’ytoucher.

—Dommage…

Ilfitunclind’œilauduc.

—Jemecomporteraisbien.Detoutemanière,c’estcequemonpèreauraitvoulu.

—Trèsbien.Ehbien,jeremonte.Montemangercesoir.Éloïseneditrien,maiselles’inquiète.

—D’accord.

Aprèsdesretrouvailleslesoirmême,ChristianrevitsouventÉloïseetsonami.Lejeunehommemalgrélenomqu’ilportaitétaittrèsagréableetChristians’étaitsurprisàsourireplusieursfoisenécoutantseshistoires.Unevraiesympathiecommençaitànaîtreentreeux.Etvoirsapetitesœuraussiheureuseluiréchauffaitlecœur.

MarieétaitfâchéecontreÉloïse,qu’ellenevoyaitplusbeaucoup.Christianavaitessayédeluiexpliquerpourquoi,maislapetitenevoulaitrienentendre.IlallaenparleràladuchessequiduttrouverlesmotspourrassurerMarie,carelleredevintpluscalmeavecsagrandesœur.

Leducetsafemmearrivèrentquatrejoursavantlebal.Christianquivoulaitlesvoir,sefitpasserpourunlad,devantleregardétonnédesafamille.Ilaidamêmeladuchesseàdescendredesoncarrosse.Lafemmen’étaitpastrèsbelle,unpeuenveloppée,mêmepasmal,etelleavaitunvisageunpeurevêche.Leducluiétaitarrivéàchevaletmalgrésondésird’allerlevoiretd’endécoudreaveclui,Christianneputquel’admirer.Ilétaitbelhomme,unpeupluspetitquelui,cequisurpritlejeunehomme,quiavaitgardéensouvenirl’imaged’unhommegrand,levisagedéforméparlahaine.Sonvisageétaitavenant,mêmes’ilnesouriaitpas.Quandilpritlesrênes,leducneleregardamêmepas.

Ilsautadesonchevaletalladirectementsaluerleducetladuchesse.Ilpritlamaindecelle-cietlabaisa.

—Raviedevousavoirparminous,luidit-elle.

—Enchantéd’êtrelà,également.

—Votremèrenevouspasaccompagné?demandaladuchesse.

—Non,levoyageétaittropfatiguantpourelle.

Ilsetrouvaversleduc.

—Commentallez-vous,Edmond?

—Trèsbien,moncherCharles.Levoyagea-t-ilétéagréable?demanda-t-ilensetournantverslafemmedeCharles,quin’avaitpasdaignélessaluer.

—C’étaithorrible.Leroi,aulieud’investirsonargentdansjenesaisquelconflit,feraitmieuxderefairelesroutes.J’aimalpartoutetj’aifaimetsoif.

—Biensûr,machère,luiditVictoria,venez,j’aifaitservirunepetitecollation.

LafemmedeCharlessetournaalorsversHans.

—Tueslà,toi?luidit-elled’untonpeuamène.

—Commetulevois,Anna,dit-ilironique.Contentquevoussoyezbienarrivé.

Ilpritsamainpourlabaiser

—Surtoutpastroptôt.

Elleretirasamainvivement,etregardaÉloïse.

—Votrefille,duchesse?demanda-t-ellesèchement.

—Oui,notreÉloïse.Notreplusjeunefilleestavecsonprécepteur,ellenedevraitpas…lavoilà.Marie,viensquejeteprésente.

LajeuneMarieregardalesinvitésdesesparentsetlessaluaélégamment.Samèreeutunpetitsouriresatisfait.Ellesavaitquiilsétaient,etregardaCharles,quidiscutaitavecleduc,avecunpeuplusd’attentionquenécessaire.Elletournalatête,etaperçutalorssonfrère.Elleallaitsedirigerverslui,quandellefutretenueparsamère.

—Non,Marie,turesteslà.

—Maismaman,Chri…

Ellesetutdevantleregardfoudroyantdesamère.

Christianluifitunclind’œilenpassantprèsd’elle.Charlesquiregardaitalorsdeleurcôté,trouvaleurattitudebizarre.Ilregardaalorsplusintensémentlejeunehommequiavaitattrapélesrênesdesoncheval.Plusgrandqueluidequelquescentimètres,lescheveuxtrèsnoirs,unvisagebienfait,ilavaituneprestancequeCharlesavaitrarementvue.Toutenluiclamaitqu’iln’étaitpasunsimplelad,etCharlesenfutinexplicablementtroublé.Ildétournalesyeux.

—Alors,Hans,commentvas-tu?

—Trèsbien,Charles.J’auraisquelquechoseàtediretoutàl’heure.Situvoulaism’accorderquelquesinstantsdetontemps.

—Biensûr,Hans,aprèslacollationetnotreinstallationdansnoschambres.

Ilentouralesépaulesdesonfrère,etilssuivirentleducetladuchesseàl’intérieurduchâteau.

Aucoursdelacollation,laconversationroulasurlessujetsd’actualités,lesnouveauxéditsduroietlesimpôtstoujourspluslourdsqu’ilréclamaitàlanoblesse.Charlescommeleduc,refusaitdefaireporterlepoidsdesesaugmentationssurleursfermiers,maiscelan’entamapasleurpatrimoine.Commeleduc,Charles,nevivaitpasquesurlesrevenusqueluirapportaientsesterres.Ilavaitdepuislongtemps,comprisqu’ilfallaitdiversifiersesactivités,etavaitinvestidessommesimportantesdanslesnouveauxmoyensdelocomotion,danslarecherchedenouvellematièrepremière.Etcelarapportait.Beaucoup.

Safemmenepritaucunepartàlaconversation,secontentantdemangeretdeboire.Sonairunpeuhautaincrispaitlesfemmesdelamaison.Etmêmequandsonhôtesseluidemandadesnouvellesdesongarçon,ellenepritpaslapeinederépondre,laissantcesoinàCharles.

Aprèssoninstallationdanssachambre,qu’ilnepartageaitpasavecsafemme,CharlesredescenditpourretrouverHans,quil’attendaitdanslebureaududuc.

—AlorsmoncherHans,qu’as-tudesiimportantàmedire?

—Voilà,Charles,jesuisamoureuxd’Éloïseetnousavonsl’intentiondenousmarier.

Charlesleregardaétonné.Iln’avaitpasvraimentfaitattentionàlafilledesonhôte.Elleluiavaitparu

trèsjolie,avecsescheveuxblondsetsesyeuxbleus.Desyeuxquiluirappelaitquelqu’un,maisilétaitincapabledesavoirqui.

—Ehbien,c’estunegrandenouvelle.Etvousenpensezquoi,Edmond?

—Sicesdeuxjeunesgenssontamoureux,jenevoispascequilesempêcheraitdesemarier.

—Rien,effectivement.

—Ilfautquandmêmequejetediseautrechose,Charles…

—Plustard,Hans,l’interrompitleducenluifaisantlesgrosyeux.Plustard!

Charleslesregarda,étonné,maiscommeilétaitbienélevé,ilneditrien.

—Etvousprévoyezd’annoncervosfiançaillesaucoursdubal,Hans?

—Oui,peut-être.

—Pourquoipeut-être?

—PourrienCharles,intervintencoreunefoisleduc.Bon,venez,j’aipromisàmafemmedelarejoindredanssonboudoir.Nousallonsfaireunepromenade,sivousn’êtespastropfatigué.

—Aurais-jeleplaisirdevoirenfinvosécuries?

—Désolé,pasmaintenant.Nousfaisonsdestravauxetc’estplutôtdangereux,encemoment.

—Ah!dit-ildéçu.

—Maisavantvotredépart,jesuissûrquenouspourronsyaller.

—Tantmieux,jesaisquevousn’avezjamaisvoulumevendreunseuldevoschevaux,ilvad’ailleursfalloirquevousm’expliquiezunjourpourquoi,maissinosjeunesgenssemarient,celaferaitbizarrequevouscontinuiezdanscettevoie.

—Nousverronscelaplustardaussi,Charles.

—Ah,ah,jevoispoindrecommeunelueurd’espoirpourmoi,souritCharles.

LesquelquesjoursquepassaCharlesavecleducetsafamillefurenttrèsagréables.IlfitmieuxconnaissanceavecÉloïse,qu’iltrouvatrèsagréableetparfaitepoursonfrère.Illejalousamêmeunpeu,devantl’évidencedeleuraffectioncommune.

Leducl’emmenasursesterres,luimontralesdispositionsqu’ilavaitprisespouraméliorerleconfortde

sesfermiersetdeleurfamille.Charlesenpritnotepoursespropresfermiers.

Commelesaffairesnes’arrêtaientpasparcequ’ilavaitprisquelquesjoursdecongé,iltravaillaitlematindanslebureaududuc,quiluiavaitfaituneplace.Lesecrétaire,quiétaithabituéauxmanièresdefairedesonemployeur,retrouvachezCharles,lamêmefaçondesedonneràfonddanscequ’ilfaisait.Entravaillantensemble,ilsserendirentcomptequ’ilsavaientfaitlesmêmesinvestissementsetàpeuprèsàlamêmepériode.

Christianpendantcesquelquesjours,étaitrestétrèsdiscret.Ilnevintpasauchâteau,nesemontrapasuneseulefoispendantlesbaladesdelafamilledeBoigelavecleurinvité.CarladuchessedeCharlesrefusaitdesortir,secontentantdelesrejoindreaumomentdesrepas.Etquandelleétaitaveceux,elleneparlaitquedecequ’ellemangeait.Laduchessefutheureused’avoirunecuisinièreaussiparfaiteàsonservice,carlafemmedeCharlesnonseulementétaitgourmande,maisellen’hésitaitpasàfairesescritiquesàhautevoix.

Lesinvitésaubalvenantdeloin,arrivèrentunejournéeavant.Lechâteaufutbientôtenvahipartoutescespersonnes,heureusesd’avoirétésurlalisteduducetdeladuchessedeBoigel.

Christianpendantcetempssurveillaitdeloincequisepassait.Éloïseétaitvenuelevoir,enluiavouantqueleducavaitrefusédelaprésenteràCharlesparsonvrainomdefamille.Ilvoulaitquesonfuturbeau-frère,l’apprécieavantdeluirévélerlavérité.Christianfutétonnédevoirqu’Éloïse,sansvraimentaimerCharles,l’appréciaitelleaussi.

Lematindubal,ilfallutquandmêmebienserésoudreàannonceràCharles,quiétaitvraimentÉloïse.

Alorsqu’avecleduc,ilsavaientcommencéàtravaillerdebonneheure,versdixheures,Éloïse,HansetladuchessedeBoigel,entrèrentdanslebureau.Charleslesregarda,étonné.

—Charles,nousn’avonspasétécomplètementhonnêtesavecvous,luiannonçaleducsansprendredegant.

—Commentcela?

—Restezassis,s’ilvousplaît,alorsqu’ilvoulaitseleverpourallersaluerladuchesseetÉloïse.

—Voilà,Charles,intervintHans.J’aiquelquechosed’importantàtedire.Éloïsen’estpaslafilleduducetdeladuchesse.Ilsl’ontadopté,alorsqu’elleavaithuitans.

—TucroisquejevaisrejeterÉloïseàcausedecetteadoption,Hans.Tudevraismeconnaîtremieuxquecela.

—Jesais,Charles,maisc’estplusimportantqu’uneadoption.C’estlevéritablenomd’Éloïsequirisquedeposerproblème.

—Arrêtedetournerautourdupot,Hans,dis-moicequisepasse.

—Éloïse,s’appelleenréalitéÉloïsedeSaxe.

Charlesneditrienpendantquelquesinstants.

Ilregardalajeunefille.Effectivement,ill’avaitvupeudetempsdixansplustôt,maisc’étaitbienlapetitefille,quidonnaitlamainàsapetitesœur,quandilsavaientquittéleurchâteau.

—Ettumediscelamaintenant,Hans!cria-t-il.Tusaistrèsbienpourtantcequesonpèreafait.

—ÉcouteCharles.C’étaitilyalongtemps.

—Pourmoi,c’estcommesic’étaithier,moncher.Ilestbiensûrhorsdequestionquejedonnemonavalàcemariage.

Éloïsepoussauncrietsamèrevintlaserrerdanssesbras.

—Charles,intervintleduc,laissez-vousletempsderéfléchiràcettesituation.Nelaissezpasvotrehainepourlepèred’Éloïsegâcherlebonheurdecesjeunesgens.

—Enfin,commentpouvez-vousmedemanderderéfléchir.Sonpèreatuémafemme!Etsonfrère…ouest-ilvotrefrère,Éloïse?EtjesupposequeMarieestvotrepetitesœur.

—Oui,Marieestmapetitesœur,elleatrèspeudesouvenirsdecettejournée.Etmonfrèreesticiluiaussi.

—Ilestlà?Ilsecache?

—Non,ilneveutpascauserdeproblèmeàÉloïse,ilneveutquesonbonheur.Etmêmes’ilaeudumalàaccepterquevotrefrèrefassesacour,ilafaituneffort,poursasœur,luiditleduc,eninsistantsursadernièrephrase.Cequevousdevriezpeut-êtreenvisagerdefaireaussi,Charles.

—Jen’aiaucuneleçonàrecevoir,etsurtoutpasdecegamin.Ilaacceptécommecela,queHansfassesacour?

—Non,pasaussifacilementquecela,luiréponditleduc.Maiscommejevousledisais,Christianferaittoutpoursessœurs.

—Vouspensezquemoi,jen’ensuispascapable?Jenesuispasnonplusdénuédesentiment,etj’aimemonfrère.Laissez-moiyréfléchir,sansmemettrelapression,d’accord?

—D’accord,Charles,luiditHansenluitendantlamain.

Celui-cilapritetl’attiradanssesbras.

—Tun’aspaschoisilafacilité,monfrère.

—Tusais,jesuistombéamoureuxd’Éloïseavantmêmedesavoirquielleétait.Etsijel’avaissu,detoutemanière,jenecroispasquemessentimentsauraientétédifférents.

Charleshochalatête,serrasonfrèreencoreunefoiscontresoncœur,salualaduchesseetÉloïseetsortit.Ilavaitbesoind’air,defairelepoint.

Christiann’avaitpasenvied’alleràcebal.Maismalgrésessupplications,laduchesseavaitétéintraitable.Deplus,s’ilsdevaientannoncerlesfiançaillesdeHansavecÉloïse,ilsedevaitd’êtrelà,carilreprésentaitlafigurepaternelledelajeunefille.Christianfitvaloirqueleduclereprésenteraittrèsbien,maisladuchesseétaitgentillemaistêtueetautoritaire.Ilduts’incliner.

Lesoirdubal,ilpritgrandsoindesatenue.Ilavaitdemandéconseilauduc,quiluiavaitétébienutile.Ilportaitpourl’occasionunpantalonnoir,avecunechemiseblancheetpardessusunelongueredingotedansuntonplusclairquesonpantalon.Seschaussuresnoiresetplatesfinissaientsatenue.

Aveccecostume,qu’iltrouvaitridicule,ilnedépareraitpasaveclesautreshommes.Ilarrivaàl’heurediteauchâteau.Touteslespiècesétaientéclairées,ainsiquelejardin.Lesinvitésétaientdéjàentraindediscuter,deboireetdemanger.

Ilavaitlecœurquibattaitplusvitequed’habitude.Laperspectivederevoirleducetsurtoutdeluirévélerlavérité,yétaitpourbeaucoup.Honnêtement,ilnesavaitcommentilallaitréagir.Maisilavaitpromisdebiensecomporter.Maisbon,maintenant,sileduclecherchait,ilneselaisseraitpasfairenonplus.Etilespéraitvraimentqueleduclecherche.

Ilfutaccueilliparladuchesse,quin’hésitaàpasàl’embrasserdevantsesinvités.Leducluiserralamain,assezlongtempspourfairecomprendreàtoutlemondequeChristianétaitlebienvenudanssamaison.Éloïsevintleserrerdanssesbras.Hansluiseraégalementlamain,ainsiquelefilsaînéduduc.Safemmeelle-mêmesedétachadugroupedanslaquelleellediscutait,pourvenirl’embrasser.Christianétaitunpeugênépartoutecetteattention.Lesinvitésregardaientd’ailleursd’unaircurieux,cejeunehommequisemblaitfairepartiedesintimesduducetdesafamille.

Hanslepritàpart.

—Monfrèreestdéjàarrivé.Ilad’ailleursfroncélessourcilsquandilt’avu.Jepensequ’ilt’areconnu,maisjen’ensuispassûr.Ilnousregardeencemomentmême.

CommeChristianregardaitautourdelui,iltombalesyeuxdanslesyeuxavecleducdeChanoine.Celui-cireconnutlejeuneladquiétaitvenucherchersonchevalàsonarrivée.Maisdanscettetenue,sabeautésombreressortaitencoreplus.Etiln’eutaucundoutesursonidentité.Sesyeux,lançantdeséclairslorsqu’ilss’étaientconfrontésplusjeunes,n’avaientpaschangé.Maisalorsqueleursregardss’accrochaient,uneespècedecourantpassaentreeux.

C’étaitcommesi,d’unseulcoup,ilsétaientseulsdanslasalledebal.Ilsfirent,àlamêmeseconde,unmouvementpoursedirigerl’unversl’autre.ChristianfutretenuparHansetparleduc,etCharlesparsa

femme.

—Pasdescandale,luiditdoucementleducenl’obligeantàleregarder.

Christianduttousserpourfairerevenirsavoix.

—Non,pasdescandale.

—S’ilteplaît,Christian,luidemandaHans.FaisuneffortpourÉloïse.

—Oui,oui.Vouspouvezmelâchermaintenant.Jevaisbienmetenir.Maisilfaudradireàtonfrèredenepasmechercher,quandmême.

—J’essaieraideleluidire.

Christianrespiraprofondémentpourrelâcherlapressionquil’avaitsaisieenvoyantleduc.Sonexcitation,carilavaitétéexcité,commejamaisauparavant,devaitvenirdufaitdevoirsonennemid’aussiprès.Commentpourrait-ilêtreexcitéparunhommequ’ilhaïssait?

Leducétaitégalementénervé.Ilavaitregardé,commetoutlemonde,lafamilledeBoigell’accueillircommeunhôtedemarque.Ilnelescomprenaitpas.Maisquandcelui-ci,quidiscutaitavecsonfrère,l’avaitregardé,onauraitpuluienvoyeruncoupdepoing,qu’iln’auraitriensenti.Ils’étaitsentiaspiréparlepouvoird’attractiondesonregard.

Jamais,iln’avaitconnucela.Mêmepasavecsapremièreépouse,qu’ilavaitaimédetoutsoncœur.Amourqu’ilavaitregrettéplustard,quandilavaitapprislaréputationqu’elleavaitdansleurmilieu.

Ilavaitfaitunpasverslui.Heureusementquesafemmeletenaitparlebras,sinonilétaitsûrqu’ill’auraitrejoint.Ilcontinuadeleregarderpendantqu’ildiscutaitavecsonfrèreetleduc.PourquoiHansluitenait-illebras?

—Alors,monami,luiditsafemme.Vousn’avezpasréponduàlaquestionquevousaposéelordGeostir.

—Euhoui,pardon.Quemedemandiez-vous?

—Jevoulaissavoirsivousalliezacheterl’undeschevauxduduc?

—Non,celan’estpasprévu.

—Vousêtesl’unedesrarespersonnesquineluiaitjamaisachetéuneseuledesessuperbesbêtes.

—Oh…vraiment?Nousrestonsquelquesjoursdeplus,aprèslebal,jepensequ’aprèslavisitedesesécuries,leducmepermettrad’yremédier.

—Vousallezavoirl’occasiondevoirlefleurondenotrepays.Depuisdixans,leducestcapabledefournirlesmeilleurschevauxdumonde.Jeluienaiachetédeux.Pasplus,illesvendtrèscher,dit-ilsurletondelaconfidence.

—Vousconnaissezbienleducetsafamille?

—Oui,nousavonslebonheurdelescôtoyerdetempsentemps.

—Quiestlejeunehommequ’ilsonttoussaluétoutàl’heure?demanda-t-ilpourêtresûrdesonfait.

—Ahvraiment,jenesauraivousledire.Jenel’avaisencorejamaisvu.Peut-êtreunneveu?

—Oui,peut-être,réponditleduc.

Ils’éloignalaissantsafemmediscuteravecladyGeostir.

Ils’approchadesonfrère,quiavaitquittéChristianetleducetquisedirigeaitverslui.

—Hans,tuascinqminutesàmeconsacrer?C’estChristiandeSaxequivientd’entrer,n’est-cepas?

—Oui,c’estlui.Leducdemandequetuviennesavecnous,danssonbureau,pouruneprésentationmoinsinformelle.

Éloïse,lerejoignitetregardaitleducavecappréhension.

—MonfrèreapromisdebiensecomporterMonsieurleduc,sivouspouviez…

—BiensûrÉloïse,jenevaispasfairedescandaleici.Alors,commecelavotrefrèreaapprisàsetaire?

Malgréelle,Éloïsesourit.

—Oui,ilaappris.

Leducluirenditsonsourire.Elleétaitvraimentcharmante.

—Sivousépousezmonfrère,vousdevriezm’appelerCharles,voussavez?

—Merci,ceseraitplusagréable,effectivement.Jesuis…

—Tuasunproblème,Éloïse?demandaunevoixfortederrièreeux.

Éloïsesursauta.

—JediscutaissimplementavecleducdeChanoine.Monsieurleduc,jevousprésentemonfrère,Christian.

Hansquiavaitpeurquelasituationnedégénère,partitrapidementchercherleducdeBoigel.

Lesdeuxhommesseregardaientfixement.CharlestenditsamainetChristianlaregarda.Aprèsquelquessecondesd’hésitations,iltenditlasienne.

Lecourantélectriquequipartitdeleursdeuxmainsetallasenicherdirectementauniveaudeleuraine,leurfitunchoc.Ilsselâchèrentrapidement,chacunfrottantsamainsurlereversdeleurpantalon.

Àcemoment,Hansetleducarrivèrent.LeducpritChristianparlebraspourl’éloignerdeCharles.

—PasdescandaleChristian,luidit-ildoucement,afinquepersonnenelesentende.

Christianleregardad’unairexaspéré.

—Jevousaiditquenon.Jesaismetenirtoutdemême.

CharlesnequittapasdesyeuxleducetChristian.Ilsedemandaitcequesesdeux—làavaientàsedireetquelsecretilspouvaientbienpartager.

—Charles,Éloïse,Hanset…Christian,sivousvoulezbienmesuivre,nousallonsàmonbureau.

CharlesétaitimpatientqueleducfasselesprésentationsofficiellesentreluietChristian.Ilsuivitdoncleduc,ressentantauplusprofonddeluilejeunehommelesuivrecommesonombre.Soncorpsfrémitenlesentantaussiprès.S’ildevaits’arrêter,aucundoutequeChristianluirentreraitdedans.Sesmainsseposeraient-ellessursataille?Ilfutpresquetentédefairel’expérience.Maisilseressaisit,necomprenantrienauxsensationsquelejeunehommeéveillaitenlui.Unefoisdanslebureau,leduclefits’asseoir.Hansrestadebout,Christianégalement.Éloïsepritplacedansunechaiseàcôtédeluietleducs’installaderrièresonbureau.

—Charles,jecroisquevoussavezcequejevaisvousdire.NousavonseuuneconversationcematinetdoncvousneserezpassurprisquejevousprésenteChristiandeSaxe,lefrèred’Éloïse.

Charlessetournaversluietseleva.Christianaffichaitungrandsourire,queCharlesauraitbienaiméfigésursonvisage,enluibalançantsonpoingdanslafigure.

—ChristiandeSaxe,ditCharles.J’avaisespéréquevoussoyezpartiloin,très,trèsloin.

—Hénon,réponditChristianmoqueur.Jenevoulaispasm’éloignerdevous.Alors,quepensez-vousdenosretrouvailles?Votrefrère,avecmasœur.Etsivousvoulezmonsentiment,jetrouvequ’ilsformentuntrèsbeaucouple.

Charless’approchadelui,commeunchatdevantunoiseau,calmement,doucement.MaisChristiann’étaitpasunoiseau,etill’attendaitenleregardantbienenface,décidéàparertoutessesattaques.

—Moivivant,réponditCharlesquel’attitudedujeunehommeénervait,jamaisjen’autoriseraismonfrèreàépouservotresœur.

Éloïsepoussauncri.

—Bondieu,Charles!ditHans.Tuaspourtantditcematinquetuallaisyréfléchir.

—Vraiment?Quandjelevois,jen’aipasvraimentbesoinderéfléchir,dit-ilenmontrantChristiandelatête.

Ilsétaientmaintenantàseulementdeuxpasl’undel’autre.Presqueaussigrand,ChristiandevaitdépasserCharlesd’àpeined’unedemi-tête.Ilsneselâchaientpasdesyeux.LeducdeBoigelcontournasonbureau.L’électricitéquicrépitaitdanslapièceétaitimpressionnante.Ilfitunsigneauxdeuxjeunesgensdes’éloigner.Hansattrapalebrasd’Éloïseetlafitsortirmalgrésesprotestations.

—Messieurs,leurdit-il,reprenez-vous.Vousn’alleztoutdemêmepasvousbattreici,dansmonbureau,chezmoi,alorsqu’ilyaunecentained’invitésderrièrecetteporte?

Lesdeuxhommesn’avaientl’airdenerienécouter.

—Christian,vousm’avezpromisdebienvouscomporter.

—J’aipromisoui,maissionm’attaque,jedoismedéfendre.

SonregardétaittoujoursfixédanslesyeuxdeCharles.Pasuninstant,ilnelesdétourna.

—Charles,pensezàvotreréputationetàvotrefemmequivousattend.

—Rienàfairedemafemme,etmaréputationn’estplusàçaprès.

—Oui,maislamienneestencorebonne.Alorsmaintenantasseyez-vous,touslesdeux!

Leducavaitélevélavoixetsonautoritéfitseretournerlesdeuxhommes.

—Assis,redit-il.Touslesdeux!

Charless’inclinaetpritunsiège.Christianvouluresterdebout.

—Christian,assis!luiordonnaànouveauleduc.

Celui-cimaugréamaisobéit.

Leducallaservirtroisverresdecognacetleurendonnaunchacun.Ils’assitsurleborddesonbureauenespérantfairetamponentrecesdeux-là.

—Bon,Charles,nousnousdoutionsquecettenouvellen’allaitpasvousfaireplaisir.Maisnosjeunesgenss’aimentvraimentetilseraitpeut-êtretempsd’enterrervosrancunespourleurbonheur.Jem’adresseégalementàtoi,Christian.

—Maismoi,j’aiditquej’acceptais,protestalejeunehomme.

—Oui,tul’asdit,maisseulementparcequetusavaisqueleducrefuserait.Tuveuxtefairepasserpourlegentildel’histoire.Maisjeteconnaisbien.Toutcequeturecherches,c’estuneconfrontationavecleduc.

—Etalors,s’ilm’attaque…

—Jesais,tumel’asdéjàdit.Maisjustement,jevoudrais,mêmesituesprisàpartieparleduc,quetuteretiennes.

—Alorslàpasquestion!Leducetmoiavonsunvieuxcontentieuxàrégleretilestpeut-êtretempsquenousleréglions.

—Charles,sivouspouviezéviterdevousenprendreàChristian,iln’attendqueça.Vousl’avezentendu?

—Maisquivousditquej’aienviedel’éviter.Cegaminainsultémafemmealorsqu’ellevenaitdemourir…

—Oui,etvous,vousavezaccusémonpèrequinel’apassupportéetquis’estsuicidé.Etenplusvousavezmanigancéavecleroi,pourquemoietmessœursnepuissionsrienréclamerdenotrehéritagelégitime!

—Jeneregretterien,aucontraire.J’estimequelesenfantsd’unassassinetd’unvioleurn’ontrienàrecevoir.

Christianselevad’unseulcoup,tropvitepourqueleducdeBoigelpuisseinterveniretsepostadevantlesiègeduduc.Ilsepenchadangereusementverslui,lesmainssurlesaccoudoirs.

—Monpèren’étaitpasunassassin!Etvotrefemmeétaitune…

LepoingdeCharlespartitavantqueChristiann’aitpufinirsaphrase.Christianreculasouslecoup.Charlesenprofitapourselever.Iln’eutpasletempsdesestabiliser,queChristianluiassénaunméchantcoupdanslamâchoire.Ilretombasursonsiègeàmoitiéassommer.Christiansepenchaànouveauversluipourl’attraperparlereversdesaveste.Ilapprochasabouchedelasienne.

—Monpèren’étaitpasunassassinetvotrefemmeétait…

Ilreçutuncoupdegenouxbienplacé,avantdepouvoirfinirsaphrase.Ladouleurlefitseplierendeux.LeducdeBoigell’attrapaparlesépaulespourlefaireasseoir.IlrepoussadanslemêmetempsCharles,quivoulaitselever.

—Celasuffittouslesdeux!Nousnesommespassurunring!

LebruitavaitalarméHansetÉloïse,quitapaientsurlaportedubureauqueleducavaitprissoindefermeràclé.

—Papou,quesepasse-t-il?cria-t-ellederrièrelaporte.

—Charles,nefaisriend’irréparable,renchéritHans.

Leduclaissalesdeuxhommesseremettreetallaouvrirlaporte.HansetÉloïsecherchèrentàregarderàl’intérieur,maisilneleurenlaissapaslapossibilité.

—Nerestezpaslà.Vousallezattirerlescurieux.Jem’occupedesesdeuxtêtesdemules.Allezpartez!

Ilrefermalaporte.

Quandilseretourna,CharlesavaitattrapéChristianparlecoldesachemiseets’apprêtaitàluienvoyerunautrecoup.Celui-ci,pasencoreremis,neréagissaitpas.LeduceutjusteletempsdepousserCharles,avantquesonpoingnes’écrasesurlafiguredeChristian.

—Maiscen’estpasvrai.Charles,çasuffit!Bonsang,reprenez-vous!Vousêtesdevraissauvagestouslesdeux.Charles,vousêtesduc,nel’oubliezpas.C’estàvousdemontrerl’exemple.

—Jesuisduc,maisjen’ensuispasmoinsunhomme,etce…putois,ajouta-t-ilméchamment,doitpayer!

—Quiestunputois,espècededucdégénéré.Vousseriezincapabledevoirunhommecouchédanslelitdevotrefemme,mêmesionvouslemontrait!

—Christian,celasuffit!crialeducdeBoigel.Tuappuiesexactementoùilnefautpas.PensezunpeuàHansetàÉloïse,arrêtezd’êtreégoïste.

Christiann’entendaitplusrien.IlétaitremisducoupprécédentetilregardaitCharlesensefrottantlespoings.Charlesnelequittaitpasdesyeux,prêtàbondirs’ils’approchait.

—Ohetpuisallez-y,soupiraleduc.Tapez-vousdessustantquevousvoulez,maispasici.Suivez-moi.Maisvous,Charles,àmadroiteettoi,Christian,àmagauche.

Illesfitsortirparlaporte-fenêtredesonbureau.Iltenaitlesdeuxhommesparlebras.Christianmarchaitdoucement,ladouleurdanssonentrejambes’étaitquelquepeuréveillée.

—Putain,dit-il.Ilm’aémasculéececon.

—Mais,non,lerassuraleduc,tuvasavoirunpeumalquelquetemps,c’esttout.Tupourrast’enservirànouveau.

—Ilyaintérêt.

Charlesrigoladoucement.

—Voustrouvezceladrôle?luidemandaméchammentChristian.

—Assezoui.Sicelavousempêchede…

—Taisez-voustouslesdeux.Nousarrivons.

Ilslesavaientemmenésàl’arrièredujardinoùiln’yavaitqu’unegrandeétendued’herbe.Cetteétenduearrivaitdirectementsurlarivièrequilabordait.

—Voilà,icivouspouvezfairecequevousvoulez.Personnenevavenirs’aventureraussiloin.Vousêtestranquillespourvousbattre.Moi,jevouslaisse.Laseulechosequejevousdemande,c’estdenepasvousentre-tuer.

Leducleslaissaseul.Lesdeuxhommes,trèssurprisleregardèrentpartir.

Christianenlevasavesteetsachemisepoursemettretorsenu.Charlesleregardafaireenavalantsasalive.Oh,iln’avaitpaspeur,maislavirilitéaffichéedeChristianlelaissaitinterdit.Sonventreétaitplat,despoilsrecouvraientsontorseetilétaittrèsmusclé.

CharlesfitcommeChristianetenlevasesvêtements.Iln’avaitrienàenvieraujeunehomme.Luiaussiétaittrèsbienbâti.Christianregardasonventre,etdescenditplusbas,sedemandantcequ’ilpouvaitcachersoussonpantalon.Ilsentitsonsexegonfler.Aumoins,ilétaitsûrqueleducnel’avaitpascassé.Ilsesecoua.Iln’auraitjamaisdûpenserauducdecettefaçon.C’étaitsonennemi.

Charlessemitenpositiond’attaque.Christianavaitdel’expérienceetattenditquecelui—cicommence.Lepremiercoupdepoingduducn’atteignitpassacible,maisceluiquelançaChristianalladirectementsurl’estomacduduc.Ilsepliaendeux,etChristianenprofitapourluienvoyeruncoupdegenouxdanslamâchoire.Leduccriadedouleur,maisserelevaassezfacilement.Ilcompritquesonadversairen’étaitpasunnoviceetchangeasastratégie.IlfitcroireàChristianqu’ilallaitl’attaqueravecsonpoingdroit,maisc’estlegauchequipartit.Etlevéritablecombatcommença.Chacunayantévaluélescapacitésdel’autre,ilsnesefirentpasdecadeaux.

Auboutd’unquartd’heure,lesdeuxhommesavaientlevisageensang.Ilsatterrirentdanslarivièreencontrebas,quandChristianbloquaunnouveaucoupdeCharlesetqu’illemaintintcontrelui.Charlesbasculaenarrièreetilsroulèrenttouslesdeuxpouratterrirdansl’eauglacée.

Ilsserelevèrentensecouantleurstêtes.

ChristiantenaittoujoursCharlesparlebras.Celui-ciessayadesedégager,maissonpiedglissaetilretombadansl’eau,suivitparChristianquiatterritsurlui.Lachaleurdel’hommesouslui,encontrasteavecl’eaufroide,excitaChristiandefaçontoutàfaitinattendu.Ilsebattaituneminuteavantetilavaitmaintenantuneérectiond’enfer.IlvoulutsedégagerdeCharles,afinquecelui-cinesentepasàquelpointilétaitréceptifàsavirilité,maisilseretrouvabloquerparsesbrasquileretenaient.

Charlesavaitdécidéqu’ilnevoulaitpaslelâcher.IlseretrouvaitdanslemêmeétatqueChristianetsoncerveauavaitcomplètementdisjoncté.N’ayantjamaisconnulevraidésirphysique,ilseretrouvaitdansunmondecomplètementinconnu.

Avecsapremièrefemme,ç‘avaitétédel’amourtoutsimplement.Ilsseconnaissaientdepuistoujoursetleurrelationavaitévoluélogiquementverslemariage.Leurnuitdenocefuttendre,maisdépourvudecedésirquivousfaisaitmonterauseptièmeciel.

SonmariageavecsonactuelleépouseAnna,nes’étaitfaitquepourdonnerunhéritieràsonduché.Etheureusementqu’unenfantavaitétéconçuaprèsleurnuitdenoce.Annaétaitfroidecommeunglaçonetilavaitdûfairebeaucoupd’effortpourassumersondevoirconjugal.Aprèslaseulenuitqu’ilsavaientpasséeensemble,Annas’étaitretrouvéenceinte.Lanouvelleduchesseétaitvierge,sinonCharlesauraitdoutédesapaternité.Depuis,ilsesoulageaitavecdesfemmespayéespourunenuit.Iln’avaitjamaisprisdemaîtresse,celaluiauraitcoûtétropd’effortettropdetemps.Etiln’enavaitjamaiseul’envienon

plus.

Alors,aveccethommeau-dessusdelui,soncorpsfermepressécontrelui,ildécouvraitlevrai,l’authentiquedésir.Soncorpssecrispaitdenepasêtreplusprèsencore.Ilauraitvouluenleversesvêtementsetlesentirnu,surlui.Sonanusseserraitd’envie.Bonsang,illevoulaitégalementenlui.

Ilsavaittrèsbienquecertainshommespouvaientêtreattiréspard’autres.Ilconnaissaitlesortquileurétaitréservé,sicelasesavait.Pourlesgensdupeuple,lapeinedemortavaitétéremplacéeparunepeinedeprisonàvie.Pourleshommesdesonmilieu,s’ilsavaientassezd’influenceetd’argent,c’étaientunehospitalisationrapide,dansunasileetensuitel’obligationderesterdiscrettoutlelongdeleurvie.

Laréactiondesoncorpslelaissaitcomplètementabasourdi.Toutesavie,ilavaitpenséquelessodomitesétaientdespersonnesmaladesetdégénérés.Etvoilàquelui,ilavaitenviedececorpsd’hommefermeetmusclé.Etpourtant,ilnesesentaitnimalade,nidégénéré.Etmême,pourlapremièrefoisdesavie,ilsesentaitvivant,commejamaisilnel’avaitétéavant.

IlrepoussaChristianviolemmentavantdefairequelquechosequ’ilauraitpuregretter.Ilserelevaets’éloignaàmoitiéàquatrepattes,pourremonterlapentequ’ilsvenaientdedévaler.

Arrivéenhaut,ilrécupérasachemiseenévitantderegarderlejeunedeSaxe.

—Vousallezfairequoi,Monsieurleduc?demandaChristianderrièrelui.

—Votresœurn’épouserajamaismonfrère.Madécisionestsansappel.

—Alors,vouspréférezlesvoirmalheureuxtouslesdeux…

—Jenepréfèrerien.Ilestseulementhorsdequestionqu’unedeSaxeentredansmafamille.

Ilcommençaàs’éloigner.

—Alors,moi,jeferaistoutcequ’ilfautpourqu’ÉloïseépouseHans.Etnousn’avonspasterminé,luicriaChristian.

Leducneseretournamêmepas.Unpeugroggyparlescoupsreçusetcomplètementincapabledecomprendrelesréactionsdesoncorps,ilsemitàcourirendirectionduchâteau.Ilsefaufilaàl’intérieur,évitantquiconque.Arrivédanssachambre,Georgequil’attendaitserelevarapidement,faisanttombersonverredecognacqu’ils’étaitservietlelivrequ’illisait.

—Monsieurleduc,jenevousattendaispassitôt,ditGeorgesenramassantsonverre.

—Pasdesouci,Georges,jenepouvaispasretourneraubaldansmonétat.

Sonvaletdechambreleregardainterdit.

—Jevoisquevousavezreçuunboncoup.

Charlessemitàrire.PasbesoinderaconterdebobardàGeorge.Ils’étaitsuffisammentbattuavantderentreràsonservice,poursavoirreconnaîtredesblessuresparcoupsdepoing.

—Oui,maisj’enaidonnébeaucoupaussi.

—Quevousest-ilarrivé?

—VousvoussouvenezdeChristiandeSaxe?

—Oui,Monsieur,lefilsdel’hommequi…

—Oui.Ilestici.LeducdeBoigell’arecueilli,luietsessœursaprèsleurdépartdeleurdemeure.C’estluiquej’airencontré.Enfin,luietsespoings.

—Ilestamochéaussi,j’espère?

—Oui,aussi.Maisjenepeuxpasredescendre.Jevaisjustemecoucheretj’aviseraidemain.Hans,s’estamourachédelasœurdeSaxe.Ilveutl’épouser.

—Ah…qu’allez-vousfaire?

—Jenesaispas.J’aiditàce…Christianquejerefusaislemariage,maissijefaisça,jesuissûrdeperdreHans.Ilnemepardonnerajamais.Jesuisdansuneimpasse.Ilfautquejeréfléchisse.Nelaissezpasmafemmeentrer.Jen’aivraimentpasenviedelavoir.Etsicen’estpastroptard,jepourraisavoirunbain?

—Iln’estpastroptard.Jevouslefaismontertoutdesuite.

—Georges,luidemanda-t-ilavantqu’ilnesorte.Vousferiezquoi,vous?

—Jecroisquevouslesavezdéjà,Monsieurleduc.

—Oui,Georges,jelesais.Pouvez-vousporterunmessageauduc,etluidirequej’aimeraislevoirdemainmatindanssonbureauetsi…ChristiandeSaxepouvaitêtrelà,également,celaseraitparfait.

—Bien,Monsieur,luisouritGeorges.Jevaisallerdonnervotremessage.Lebainseraprèsdansunquartd’heure.

—MerciGeorges,etensuite,allez-vouscoucher.Jemedébrouilleraistoutseul.

—Bien,Monsieur,bonnenuit.

—Bonnenuit,Georges,etmerci.

—Jen’airienfait,Monsieur.

—Vousenfaitesplusquecequevousnepensez.

Aprèsledépartdesonmajordome,ilrestaassissurunfauteuilàcontemplerlefeudanslacheminée.

L’attirancequ’ilavaitressentiepourChristianluiapparaissaittellementabjecte,tellementanormale.Mêmes’ilavaitconnududésirpourd’autreshommes,commentpouvait-ilenressentirpourceluiquiétait,danssescauchemars,sanscesseentraindecrierquesafemmeétaitunetraînée.Mêmesicelas’étaitavéréexact.

GeorgesréussitàvoirleducdeBoigelalorsquecelui-ciregardaitparl’unedesfenêtresdelagrandeentrée.

—Monsieurleduc,puis-jevousparlez?

—Biensûr.Etvousêtes?

—LemajordomeduducdeChanoine.Ilvientderentreret…

—Commentest-il?

—Unpeuabîmé.Maisilvabien.IlvoudraitquevousorganisiezuneréunionentrevousetlejeunedeSaxe,demainmatin.Ilaprissadécisionsurlemariagedesonfrèreaveclajeunefille.

—Vousêtesaucourant?

—Oui,Monsieurleduc.Monmaîtremeditbeaucoupdechoses.

—Alorsdites-luiquejel’attendsdemainàdixheures,àmonbureau.Celavousdérangeraitd’allervoirdanslescuisines?JesuissûrqueChristiandoitêtreentraindesefairechouchouterparnotrecuisinière.Vousluidirezquejel’attendsdemainmatinégalement.

—BienMonsieur,j’yvais.

Georgesavaithâtedevoirl’enfantquiavaitfaitsihauteimpressionàCharles,dixansplustôt.CommeleducdeBoigell’avaitdit,lacuisinièrelesoignait.Ilselaissaitfaire,unsourireauxlèvres.

—MonsieurChristian?demanda-t-iltoutdemême.

—Oui?leregardalejeunehomme.

—JesuisGeorges,lemajordomeduducdeChanoine.LeducdeBoigelmefaitvousdirequevousserezattendudemainàdixheuresdanssonbureau.Monmaîtreseralàégalement.

—D’accord,j’yserais.Hé,luidemanda-t-ilalorsqueGeorgess’éloignait.Ilestcomment?

—Commevous,réponditGeorgesensouriant.

—Parfait,souritàsontourChristian,aie,dit-ilàlacuisinièrequivenaitdeluiappliqueruneespèced’escalopesurunœil.

—Arrêtezdebougercommeça,MonsieurChristian,sinondemain,vousallezêtrenoir.

Georgespartitenriant.Ilavaitl’airtrèsagréablecejeunehomme.

QuandilrejoignitCharlesdanssachambre,celui-ciétaitdéjàplongédanssonbain.Illuidonnal’heuredurendez-vousetlequittapourlanuit.Ilauraitpeut-êtreétéjudicieuxqu’ilprenneluiaussiuneescalopepourl’œildesonmaître.

—Hans!Sursautacelui-cienvoyantsonfrèreentrersansfrapper.Queviens-tufaire?Tudevraisêtreenbas,aveclesdeBoigel.

—Jeviensauxnouvelles.

—Quellesnouvelles?

Ilregardalevisagedesonfrère.

—Tuvasavoirmaldemainmatin,dit-ilenfaisantlagrimace.Alors?Qu’avez-vousdécidéavecChristian?

Charleseutbesoinderéfléchirunmoment.Parcequ’àpartlesmomentsdetroublequ’ilavaitressentispoursonadversaire,ilnesesouvenaitpasdegrand-chose.

—Nousn’avonsriendécidé.Hans,tuessûrdetoi?

—Trèssûr,Charles.

—TuesjeuneHans,tudevraisessayerdet’amuser,devivre.

—Jen’aipasenviedecela,Charles.J’aienvied’avoiruneviecalmeetéquilibrée.EtmarencontreavecÉloïse,mefaitressentirencorepluscedésir.Jel’aime,Charles.Dèsquejel’aivu,jel’aiaimé.

—Jecomprends,Hans.J’aidécidédet’accordermonaccord,pourquetuépousescettejeunefille.

—Vrai?demandaHans,ungrandsourireauxlèvres.Jevaispouvoirfairemademandeofficielleauprèsduducetdesonfrère!

—Attendsdemain.Cesoir,j’aiditàChristiandeSaxequejen’accepteraisjamais.Laisse-lemijoterencoreunpeucettenuit,s’ilteplaît.

—Pasdesouci,Charles,merci.

Ilsepenchasursonfrèrepourl’embrassersurlajoue.

—Onsecalme,Hans,luiditCharlesenlerepoussantd’unairdégoûté.Allezsors,varejoindretafuturefiancée.

Iln’eutpasletempsderajouterquoiquecesoitqueHansétaitdéjàparti.

CHAPITREV

Lelendemain,CharlesretrouvaChristiandanslebureaududuc.Installéconfortablementdansunfauteuil,ilbuvaitdéjàunverredecognac.Ilavaitremissesvêtementsdetouslesjours.Charlesleregarda,ets’ilavaitpenséquel’attractionqu’ilavaitressentiepourlui,venaitdeleurempoignade,ildutrevisitersescertitudes.Ilsesentitgonflerdanssonpantalon.Cetteréactionétaitcomplètementnouvellepourlui.Ilsoupira.

—Cen’estpasunpeutôt,pourboire?luidemanda-t-il.Etleducn’estpaslà?

—Ilvaarriver.Etnon,cen’estpastroptôt.Celafaitsixheuresquej’aidémarrémoi,jenesuispascommecertains…

—Cequiveutdire?

—Qu’ilyenaquiselèvedebonneheure,pourgagnerleurvie,etquin’attendentpasquecelaleurtombetoutcuitdanslabouche.

—Jevousinterdisde…commença-t-ilenseredressant.

—Holà,jeunesgens,vousn’allezpasrecommencer!Charles,asseyez-vous,ettoiChristian,posetonverre.Ilesttroptôtpourquetuboivesdel’alcool.

Celui-ciobéitauducsousl’œilmoqueurdeCharles.

—Charles,qu’aviez-vousànousdire?EtjolislesyeuxMessieurs,celavafairebiendevantlesautres.Vousdevriezutiliserunpeudemaquillage.Etcommentvontvosarticulationscematin?

Aucundesdeuxnevoulutseplaindre,etleducpouffaderire.

—Àmonavis,c’estdemainmatinquevousaurezleplusmal.

—Detoutemanière,moi,ilsnemeverrontpas,jeretourneauboulotaprès.

—Nousendiscuteronsaprès.Alors,Charles?

—Ehbien,j’aidécidéquej’acceptaiscemariage.

—Vousêtesdevenuraisonnable,luiditChristian.Vousaviezpeurdeprendreunenouvellerouste?

—Absolumentpas.Maisj’aimemonfrère,moncheretjeveuxlevoirheureux.Etheureusementquevotresœurnevousressembleenrien,sinon…

—Stop,crialeduc,nousavonscomprisCharles.Christian,tuvasterendredansmachambre.J’ai

demandéàPeterdetepréparerdesvêtementsplusappropriés.

—Maisjedoisretournerautravail.

—Horsdequestion,turestesavecnouspourlajournée.Hiersoir,nousn’avonspasannoncélesfiançaillesdeHansetd’Éloïse,maisjevaislefairecemidi.EtChristian,tuesobligéd’êtrelà,pourquetoutlemondeconstatequetoietCharlesvousêtesréconciliés.

—Maisnousnesommespas…,râlalejeunehomme.

—Ehbien,vousferezcommeci.C’estd’accordCharles?

—D’accord.

Ilselevadesonfauteuil,attrapaleverrequeChristianavaitmissurlebureauetl’avalaculsec.

—Eh,ditChristian,c’estàmoi!Jecroyaisqu’ilétaittroptôtpourboire,dit-ilcommeunpetitgarçonàquionauraitenlevésonjouet.

LeduclevalesyeuxaucieletCharleséclataderire.

ChristianregardaCharlesrire.Ilétaitvraimenttrèsbeau,quandilsedétendait.Sesyeuxparcoururentsoncorpsetledésirqu’ilavaitressentipourluilaveille,revintenforce.

Ilpréférafuir,plutôtquederesteràlecontemplercommeungamin.

Ilretrouvatoutlemondedanslasalleàmangerdeuxheuresplustard.Certainsinvitésétaientdéjàrepartis,maisilrestaitencorebeaucoupdemonde.SaplaceavaitétéréservéeàcôtédelafemmedeCharles,quileregardadehautenbas,l’airdesedemander«quia-t-onosémettreàcôtédemoi».Charlesétaitpresqueenfacedelui.Lerepasfutlongetdésespérémenttriste.LafemmedeCharles,n’avaitaucuneconversation.Savoisinedegaucheétaitmonopoliséeparlefilsaînéduduc,quivoulaitfairedesaffairesavecsonmari.IlcroisaleregarddeCharlesplusieursfois.Celui-ci,avaitl’airdetrouverlasituationtrèsagréableetsonregardmoqueurcommençaitàluitapersurlesnerfs.Ilallaitjetersaservietteetpartir,quandleducdeBoigeldemandalesilence.

—Charles,Christian,sivousvoulezvenirprèsdemoi.ÉloïseetHansaussi,s’ilvousplaît,demanda-t-il.

Leducs’étaitlevéetlesattendaitderrièresachaise.

—Mesamis,dit-il,jesuisheureuxdevousfairepartd’unegrandenouvelle,quijesuissûrapporteralapaixetl’amourdansnoscœurs.

Christiantoussadoucement.Charles,placéàcôtédelui,luienvoyadiscrètementuncoupdepieddanslajambe.Leregardfuribondqu’illuijeta,lefitsourire.LeducdeBoigellesregardaenfaisantlesgrosyeux.Ilssecalmèrenttoutdesuite.

—Jevousannoncelesfiançaillesdemafilleadoptive,Éloïse,illuipritlamainetlaportaàseslèvres,

avecHansdeChanoine.Commevouslesavezpeut-être,nousavonsrecueilliÉloïseetnotrepetiteMarie,ilyadixans.Cesdeuxpetitesfillesvenaientd’êtrejetésdechezellesavecleurfrèreaîné,quevoici,dit-ilenprenantChristianparlebras,etenlepoussantdevant.CejeunehommeestChristiandeSaxe.Jevoisàvosyeuxquevousvoussouvenezdecettetragédie.Lemariagedecesdeuxjeunesgens,signelaréconciliationdedeuxdesplusvieillesfamillesdenotrepays.Charles,Christian,veuillez-vousserrerlamain.

CharlestenditlasiennesanshésitationàChristian,quimitquelquesinstantsavantdedonnerlasienne.Ilyeutdesapplaudissementsetsurtoutbeaucoupdemurmures.

Christianretirasamainrapidement.IllevalesyeuxversCharles,etcequ’ilyvit,étaitlerefletdecequ’ilavaitressentilui-même.

CefutCharleslepremierquibaissaleregard.

Aprèslesfélicitationsd’usage,ilfutdécidéd’alleràl’extérieur.Beaucoupdesinvités,décidèrentderesterauchâteaupourjoueràdescharadesoupourécouterdelamusique.LaduchessedeCharles,elle,seréfugiadanssachambre.Ellen’avaitriendit,secontentantd’allerbiensûrféliciterlesfiancés.

Desjeuxfurentorganisésàl’extérieur:Croquet,jeudepaume.

Charlesyparticipabienvolontiers,heureuxdepouvoirsedéfoulerunpeu.

IlsentaitsouventleregarddeChristiansurlui.

Quandilentamaunepartiedejeudepaume,ilseretrouvaavecHanscommepartenaire.Enface,ilyavaitChristianetlefilsaînéduduc.Lapartiecommençaplutôtcalmement.CefutlorsqueChristianenvoyalaballesurCharlesavecl’intentionévidentequ’elleatterrissedanssonvisage,queleschosesdégénérèrent.Hansetlefilsduducnepurentalorstoucheraucunesballes.Lesdeuxhommesavaientmonopolisélejeu.Leursfrappesétaientdeplusenplusfortesetellesnevisaientjamaislesol.Laballevolaitenl’air,etàlamoindredistractiondel’unoudel’autre,pouvaitlesheurterviolemment.Cefutquandl’uned’ellefrappaCharlesàl’épaule,queleducdeBoigeldécidad’intervenir.Malgrélenombreimpressionnantdespectateurquis’étaitagglutinésautourduterrain,iln’hésitapasetpénétrasurcelui-ci,enrâlant.AlorsqueCharlesallaitrenvoyerlaballe,illuisaisitlebras,pritsaraquetteetl’envoyavalser.

—C’estbon,lapartieestterminée,dit-ildevantlevisagefurieuxdeCharlesetdevantunChristian,quiavaitsautélefilet,poursavoircequisepassait.

—Nousn’avionspasfini,fitsavoirlejeunehomme.

—Ohsi!C’estfinipourvous,plusdejeudepaume.Sortezetlaisserlaplaceàd’autresquiont,eux,vraimentenviedejouer.

Cefutenrageantetpourunefoisd’accord,qu’ilssortirentduterrain,sousleregard,amusé,horrifiéoujoyeuxdesinvités.

Leduclesmitalorsensembledanslamêmeéquipepourjoueraucroquet.Malgrélesnomsd’oiseaux

qu’ilssedonnaient,toutbas,pournepasattirerl’attentionduduc,toutsemblaitbiensepasser.Jusqu’àcequeChristianhurlededouleur.Charles,venait,sanslefaireexprès,deluilancerunméchantcoupdemailletdanslesjambes.Leducencoreunefoisintervintaumomentoùlejeunehommelevaitlesienpourrépondreàl’attaque.

—Vousallezarrêtertouslesdeux,leurdit-ilencolère.Touslesyeuxsontbraquéssurvous,etvousfaitesdelapeineàÉloïseetàHans.Voulez-vousqu’ilsgardentdecettejournéelesouvenirdeleursfrèressebattantcommedeschiffonniers?!

Enjetantunregardàsasœur,Christianconstataqu’Éloïseavaitvraimentdumalàretenirseslarmes.Charlessuivitsonregard.

—Trèsbien,dit-il.DeSaxe,faisonsunetrêvepourcetaprès-midi,voulez-vous?

—Oui,deChanoine,restonspolisetcourtois.

LeducdeBoigelsoupira.

—Mercid’essayerd’êtreraisonnable.Vouscontinuez,ouvousarrêtez?Vousdevriezarrêter,vousêtesentraindeperdre.

Lesdeuxhommesseregardèrent.

—Nouscontinuons,dirent-ilsenchœur.

Ilsréussirentàrattraperleurretard,etgagnèrenthautlamain.

Lerestedel’après-midi,sepassapluscalmement.ChristianetCharlesarrêtèrentdejoueretessayèrentd’oublier,qu’ilsavaientaiméleurpetitealtercation.Pasunseulinstant,aucundesdeuxhommesn’ignoracequefaisaitl’autre.

Lesoirtombait,etChristianavaitbesoindesolitude.Pendantqueleducetladuchesse,ramenaientleursinvitésàl’intérieur,ils’éclipsadiscrètement.Ilallaitentrerdanslesbois,quil’emmèneraientjusqu’àchezlui,quandilentenditcourirderrièrelui.

—Qu’est-cequ’ilt’arrive,deSaxe?Tufuis?

Ilseretourna.Charlesl’avaitsuivi.Ilsoupira.Ilavaitbesoindes’éloignerdeluietillepoursuivait.

—J’ailedroitdem’isolerunpeu,non?

—Biensûr,sic’estdel’isolementquetuveux.

—Jeneveuxriend’autre.Alorslaissez-moi,Monsieurleduc.

Charlesn’appréciapassaréponseetl’attrapaparlebras.

Christianessayadesedégager.Ilpoussaleduccontreunarbreetlecoinçaavecsoncorps.

—Qu’est-cequevousvoulez,Monsieurleduc,unebonneraclée,commehiersoir?

—Jenemerappellepasquec’esttoiquiasgagné,deSaxe.

—Entoutcas,cen’estpasvous.

Ilsepoussa.Lecontactduducl’excitait,plusquederaison.

—Etsinousfinissionscequenousavonscommencéhier,deSaxe?

SavoixunpeurauquefitseretournerChristianquis’éloignait.

—Nemecherchezpas,Monsieurleduc.J’aifaituneffortpresquetoutl’après-midi,maisjesuislimite.

—Pauvregarçon,semoquaCharles,obligédefairecopain,copainavecson…

Christianluibalançauncoupdepoingdansleventre,quifits’écroulerCharlessurledos.Illuisautadessus,ets’allongeasurlui.

—C’estquoitonproblèmedeChanoine?Qu’est-cequetuveuxexactement,Monsieurleduc,cela?demanda-t-ilensefrottantcontrelui,pourluifairesentirsonexcitation.

Charlesgémit.

—Bondieu…Christian!haleta-t-il.

Christianlerelâchaets’apprêtaitàserelever.

—Ahnon!crialeduc,enserelevantetenl’attrapantparlebras.Tunevaspasmelaissercommeça.

Christianseretournaetlepoussa.Charlessecognalatêtecontreunepierre.Lecridedouleurqu’ilémit,fitseretournerChristianquis’éloignait.

—Charles,çava?

—Non,çanevapas!Bonsang,j’aimalaucrâne.

Christiansepenchasurlui.Charlesseredressad’unseulcoupetlefitbasculer.Allongésurlui,lejeunehommeétaitàsamerci.

—Pourquoitumefaisça?Tusaisdansquelétatjesuisdepuishiersoir.Quecrois-tuquej’aipensédemoi,quandjemesuisretrouvéexcitécommejamaisjenel’aiété?Tusaiscequel’onditdespédérastes?Qu’ilssontmalades,fous!Bondieu,Christian,jenemesensnimalade,nifou.Pourquoim’excites-tucommetulefais?

—Jenecherchepasàt’exciter,c’estplusfortquemoi.Laisse-moi!cria-t-il.Jedevraistehaïr,maismoncorpsenestincapable!Jenesaispascequ’ilm’arrive.Jemesenstellementcoupabledetedésirer,alorsquetuastuémonpère!

—Jen’aipastuétonpère.Ils’estsuicidé.Tulesaistrèsbien.

—Sauf,ques’iln’yavaitpaseutesaccusations,monpèreseraittoujoursenvie.Messœursetmoi,toujoursdansnotrechâteau.Etmêmes’ilnes’étaitpassuicidé,vousl’auriezpendu,toiettonroi.

—Maistonpèreatuémafemme,Christian!

—Commentaurait-ilpulatuer?Ilétaitavecnouscesoir-là!

—Jesuisdésolépourtoi,maistouteslespreuvesétaientcontrelui.

—Jesuissûrquevousn’avezpasbienfaitvotreenquête.

—C’estleroilui-mêmequil’afaitfaire,Christian,surdessoupçonsdemapartsoit,maisiln’apastrichésurlerésultat.Jesuisdésolé.

—Jen’ycroispasetjen’ycroiraisjamais.

IlvoulutpousserCharles,maiscelui-cileretint.

—S’ilteplaît,restecommeça.J’aitellementenvie…

—Tuasenviedequoi?secalmasoudainChristian.

—Jenesaispas,cedontj’aienvie.Maismoisurtoi,jen’aijamaisétéaussiexcitédetoutemavie.

D’unmouvementsouple,Christianinversaleurposition.Etcommecontrel’arbre,ilsefrottaauduc.

—C’estdeceladonttuasenvie,Charles?

—Ohoui,s’ilteplaît,net’arrêtepascettefois.

Christiandéboutonnarapidementsonpantalon,etsesaisitdesonsexeengorgé,quisuintaitdéjàdeplaisir.Ilfitallersamainlelongdugland.

—Prendsmoiaussi,Charles.

—Jenel’aijamaisfait.

—Tut’esdéjàmasturbénon?

—Oui,biensûr.

—Alors,faitcommepourtoi.

Charlesn’hésitapasuninstant.IldéboutonnaChristianetlepritdanssamain.Quelleincroyablesensationdetoucherunautrehomme.Commesilavieétaitlà,danscesexe,prèspourlui.

D’unmouvementpeusûr,ilcommençaàfairecoulissersamainlelongdupénis.Christianfaisaitlamêmechoseaveclui.Lejeunehommerapprochasabouchedelasienne,etseslèvresallèrentseposersurlessiennes.Charlessecrutauparadis.Sonodeurétaitsientêtante,sidouce.Lamainquicourraitsurlui,étaitunpeurâpeuse,maiselleluidonnaitdessensationsqu’iln’avaitjamaisressenties.Heureusementquepersonnenesetrouvaitàproximité,carleursgémissements,nelaissaientaucundoutesurcequ’ilsfaisaient.Christiann’allaitpaspouvoirtenirencoretrèslongtemps.LamaindeCharles,audébutunpeuhésitante,étaitmaintenantsûred’elle.

—Putain,Charles,jevaisjouir,cria-t-il.

—Moiaussi,oh…,moiaussi,Christ…

Ilsselaissèrentalleralorsdansunmêmeensemble.Leursmainsseretrouvèrentpleinesdesperme,permettantàchacundefaireglisserleursexepascomplètementapaisé,plusfacilement.

Christiansepoussa,essuyasamainsurl’herbe,pendantqueCharlesenfaisaitautant.Cefutàcemoment-là,qu’ilsentendirentappeler.

—Charles,Christian!

—C’estÉloïse,etjesupposequeceluiquihurlecommeunloup,c’estHans?

—Oui,moncherfrèreatoujourseulavoixquiportaitloin.

—Relève-toi,Charles.Ilnefautpasqu’ilnoustrouvecommeça.

Charlesserelevarapidement,serhabillaets’épousseta.Sansqu’ilss’enrendentcompte,lanuitétaitcomplètementtombée.Ensetournantverslui,Christianeutunmauvaisgesteetsoncouderencontral’œildéjàbienamochédeCharlesquisepenchaitaumêmemoment.

—Merde!dit-ilens’écroulantunefoisdeplus.Tuesmaladeouquoi?Putain,çafaitmal!cria-t-il.

Christians’approchaverslui,maisCharleseutunmouvementderecul.

—Tunemetouchespas…gémit-il.

—Jesuisdésolé,Charles.Jetejurequejenel’aipasfaitexprès…

—Ah,vousêteslà,ditÉloïseens’approchantd’eux.Vousvousêtesencorebattu?

—Maiscen’estpasvrai!criaHansenvoyantl’œildesonfrère.Sivousvouscroyezintelligentsenvousbattant,vousvoustrompez.Detoutemanière,avecÉloïsenousavonsdécidéquequoiqu’ilsepasse,nousresterionsensemble.Maintenant,venez.Nousrentrons.Nousallonspasserparlescuisines.Ilesthorsdequestionquequelqu’unvousvoitdanscetétat.

Illeurtenditleursvestes,qu’ilsavaientenvoyéespromenerquelquetempsplustôt.

—Christian,tun’asrientoi?demandaÉloïse.

—J’aimalauxcôtes,situveuxtoutsavoir.

—C’estbienfait.Aprèsl’annoncedenosfiançailles,j’auraispenséquevousauriezfaitunminimumlapaix,aumoinspournousépargner,Hansetmoi.

—Nousnenousbattronsplus,n’est-cepas,Charles?

—Non,dumoinspasaveclesmains,dit-iltoutbas.

Lesdeuxjeunesgenspassèrentdevant.Charlessemitàmarcherdoucement.Ilavaitmalàl’œiletsesarticulationsétaientdouloureusesdepuislaveille.Etcequ’ilvenaitdefaireavecChristianlesavaitréveillés

—Jesuissûrquedemain,jenevaisplusrienvoir.Tudevraisavoirhontedetoi,Christian,luidit-il,alorsquelejeunehommeavaitmisunbrasautourdesesépaulespourl’aideràavancer.

—Maisj’aihonte,Charles.

—Detoncoup,oudecequenousavonsfait?

—Surtoutdel’avoirfaitavectoi,dit-il,amer.

Charleslerepoussa.Christiancomprenantqu’ilvenaitdeluifairedelapeine,lerepritparlesépaules.Charlesessayadesedégager.

—Laisse-moi!luidit-il.

—Excuse-moi,Charles.Jenelepensaispas.

Illeseraalorsencorepluscontresonflanc.

Christianpassasamainsoussavesteetsachemiseetluicaressaleventre.Charlessemitàfrissonner.Sonsexerepritdelavigueur,àsongrandétonnement.

—Bondieu,arrête,luidit-il.Toutlemondevavoirquejesuisexcité.

—Laissetachemisesortir,personneneserendracomptederien.

Etsurcesbonsconseils,ilpassasamainbaladeuse,souslepantalonetl’attrapa.Charlesneputreteniruncrideplaisir,quandChristianluiempoignalesexeplusvigoureusement.

—Chut,luidit-il.

—ÇavaCharles?luidemandaHansenseretournantverseux.Situastropmal,jepeuxaiderChristianàtesupporter.

Christiannel’avaitpaslâché.Charlestoussafortpouressayerderetrouverunevoixàpeuprèsnormale.

—Non…çava.S’ilteplaît,Christianarrête,dit-iltoutbas.Nousarrivons.

—Faiscommesitutombais.

—Quoi?

—Faiscommesitutombais,Vite!Jevoisleslumièresduchâteau.

CharlesnecomprenaitpasoùvoulaitenvenirChristian,maisselaissachoirsurlesol.Ilpoussauncri.Christianl’avaitlâchéets’accroupitàcôtédelui.

—Éloïse,Hans,courezauchâteaupourallerchercherdel’aide.Leducnepourrapasfaireunpasdeplus,ilmesemble.

—Jevaisresteravecvous,ditÉloïse.

—Non,machérie,luiditChristian,rentreavecHans.Ilcommencevraimentàfairefroid.Jevaisresteravecleduc.Allez,courez.

—TunefaisrienàCharles,Christian.Celaneseraitpasbiendanssonétat.

—Jenevaisrienluifaire.Jevaismecontenterd’essayerdelegarderenvie,allezdépêchez-vous.Vousdevriezêtredéjàrevenu.

Aprèsundernierregardsurlesdeuxhommes,lesjeunesgenssemirentàcourir.

Christianlesregardapartiretdisparaîtredanslanuit.IlsetournaalorsversCharles.Sansprendredegant,ill’allongeasurlesol.

—Maisquefais-tu?demandaCharles,unpeuinquiet.

—Laisse-toifaire,tutesentirasmieuxaprès.

Christiansepenchasurlui,luibaissasonpantalonetempoignasonsexe,quiavaitunpeuperdudesasuperbe.Endeuxcoupsdemain,ilretrouvatoutesagloire.Charlesgémissait.

Christianseléchaleslèvres,etsansleprévenirlesposasurleboutduglanddeCharles,quisursauta.

—Christian,merde!cria-t-il,ensentantlalanguedujeunehommelelécher.

Ilmitsamainsursabouchepourétouffersescris.Christiannecessapasdelelécher,lemordilleretaprèsavoirjouéavecsestesticules,ilaspirasonglandaufonddesagorge.Ilappuyaavecl’undesesdoigtssursapetiterosace,sansjamaislelâcher.Leducsoulevasesfesses,permettantàChristiandefaireentrersondoigtdansledouxcanalqu’ilcaressa.Ilsutqu’iltouchaitsonpointleplussensible,quandCharlescriadeplaisir.Undoigtdanssoncul,saboucheallantetvenaitsursongland,Christiandonnaitàl’hommequ’ilavaitdétestéunepartiedesavie,lemeilleurplaisirqu’ileutjamaisreçu.

Charlesn’étaitplusconscientderien,sicen’étaitceplaisirincroyablequ’ilressentait.Ilneserendait

mêmepascomptequeChristianlecaressaitdel’intérieur.Ilavaitl’impressionquetoutessesterminaisonsnerveusesvibraient.Moinsdecinqminutesaprèsledébutd’unefellation,commejamaisiln’enavaitconnu,ilexplosadanslabouchedesonamant.Deslarmess’écoulèrentdesesyeux.Christiansereleva,luipritlevisageentresesmains.

—Jenevoulaispastefairepleurer,dit-ild’unevoixanxieuse.

—Non,tunemefaispaspleurer,dit-il.Maisc’esttellementbonavectoi.Jen’aijamaisconnuçaavant.

Christianluiembrassalesjoues,séchantseslarmesenmêmetemps.

—Ehbien,jesuisplutôtsatisfaitdetefaireautantd’effet.

—Quenousarrive-t-il,Christian?demanda-t-il.Pourquoicetteattractionentrenous?Jedevraistehaïr,avoirenviedet’envoyermespoingsdanstafigure.Etlaseulechoseàlaquellejepense,c’est…

—Quoi?

—C’estunjeupourtoi,pourtevenger?Mefairedevenircomplètementdépendantdetoi,etensuitemelaisser?

—Non!Crialejeunehomme.Commentpeux-tupensercela?Tunecroispasquejesuiscommetoi,complètementperdupartoutcela?Crois-tuvraiment,quecequejeviensdetefaire,jel’auraisfaitpourmevenger?Non,pourrienaumondejenepourraisfairecelaparvengeance.Jel’aifait,carj’enavaisvraimentenvieetquejevoulaistegoûter.

—C’estinsensé.

CharlesenlaçaChristianetletintbienfortcontrelui.

—Toutachangémaintenant,continuaCharles.Jenepourraisjamaisplustedétestercommejet’aidétesté.

—Jesais,moinonplus.Jenesaispascommentjevaislegérer.

Charlesseredressaetilremontasonpantalon.

—Voilàdumonde,luiditChristian,rallonge-toi.

Lesgensduchâteaulestrouvèrentassisl’unàcôtédel’autre.Aucund’euxneparlait.IlsemmenèrentCharlessurunecivière.

Christianrestéàl’arrière,necomprenaitrienàcequiluiarrivait.Cequ’ilavaitvécucesoir,c’étaitcommeuntremblementdeterre.Jamaisiln’auraitimaginéavoircegenrederelationavecunhommequ’ilavaithaïpendantautantd’années.Personnenepouvaitchangerainsi.Ilnecomprenaitrien.Ilessayadesedirequel’hommecouché,devantluiavaittuésonpère,maisilnevoyaitqueceluiquiavaitcriédeplaisirsoussesdoigtsetsabouche.

Ilfallaitabsolumentqu’ilprennesesdistances.Iln’yavaitquecommecelaqu’ilarriveraitàreprendrelecourtnormaldesavie.Celanepouvaitriendonnerdebon,luietCharles.Etcettehorribleimpressiondetrahirsafamille,sonpère.

Quandilsarrivèrentauchâteau,lafemmedeCharles,prévenuparundomestique,attendaitl’arrivéedesonmari.Ellecriaquandellelevit.

—Ohmondieu,maisquevousest-ilencorearrivé?Déjàhiersoiret…

—Jesuistombé.

—Surlevisage?

—Unarbrem’aarrêté.

Sontonétaitexaspéré.Ilselevadelacivière,ettournalatêtederrièreluipourvoiroùétaitChristian.

Lejeunehommediscutaitavecsasœuretn’eutmêmepasunregardpourlui,quandilentradanslechâteauavecsafemme.

«Ilauraitaumoinspumesaluer,pensaCharles.Celam’auraitaidéàsupporterlesattentionsdemafemme.Etblablablaetblablabla.Ouijesais,jesuisungranddistrait.Tombersurunarbre,quelleidée.»

—ÉcoutezAnna,j’aimalàlatêteetjen’aipasenviedesubirvosjérémiades.Alors,retournezàtable,carjesupposequec’estdelàquevousvenezetmoijemontedansmachambre.

—Maismonami,toutlemondevas’étonner.Déjàque,quandvousêtessortiavecleduchiersoir,votrefrère,lafilleduducetse…cethommequi,entrenous,àl’airtrèsvulgaire.Vousavezvucommentilsecomportait,commes’ilétaitdesnôtres,alorsqu’ilestlefilsdel’assassinde…voussavezqui,dit-ellesansoserprononcerlenomdeSophie.Etvousavezvuquecemidi,ilsl’avaientplacéàcôtédemoi!JesuisladuchessedeChanoine,etoserplacerce…

—SuffitAnna!N’enditespasplusoujepourraisvraimentmefâcher.Cegarçonesttrèsbienetjeneveuxentendreaucunecritiquevenantdevous,nidequiconqued’ailleurs.Alors,débarrassez-moileplancher,avantquejen’explose.

Arrivéàlaportedesachambre,safemmetoujourssursestalons,ill’ouvritetlaluiclaquaaunez.Sonvaletétaitlàetunbainavaitétécoulé.

—MerciGeorges,vousavezpenséàtoutencoreunefois.

—Jesuislàpourcela,Monsieur.Jevoisbien,Monsieur,ouvotreœilestencoreplusgonfléqu’hiersoir?

—Non,Georges,vousnerêvezpas.Maisjenemesuispasbattucettefois,j’aireçuuncoupdecoude.Donnéparaccident,précise-t-ildevantleregardinquietdesonmajordome.

—Ilvafalloirfaireplusattention,Monsieur.Bientôt,vousneverrezplusrien,sil’autredoitluiaussiêtreattaqué.

—Celan’arriveraplus,Georges,nevousinquiétezpas.Vouspouvezyaller,jefiniraiseulcesoir.

—Vousêtessûr,monsieur?

—Oui,Georges,merci.Çaira.

AprèsledépartdeGeorges,Charlessemitnuetseregardadanslemiroir.Sonvisageétaitboursoufléetsonœilétatpresquedéjàfermé.Ilinspectasoncorps.LescoupsqueChristianluiavaitportéslaveillenesevoyaientpas.Ilregardasonpénisetletrouvaunpeurouge.MaisaprèslessoinsqueluiavaitprodiguésChristian,celan’étaitpasvraimentétonnant.Rienqued’ypenser,sonsexegrossissait.Ill’empoignaetcommençaàfairedelégersmouvements,samaintrouvantexactementlebonrythmepourl’amenerjusqu’àl’orgasme.Sonexcitationgrandissaitenmêmetempsqu’ilpensaitàl’incroyableplaisirquil’avaitparcouruquandChristianl’avaitprisdanssabouche.Ilneluifallutpaslongtempspourjouirdanssapaume.Latêtesurlemiroir,ilhaletaitetétaitensueur.Sonplaisiravaitétéagréable,maisrienencomparaisondetoutàl’heuredansleparc.

Ilenjambalabaignoireetselaissaallerdansl’eau.Ilpoussaunsoupirdesatisfaction.Ilsursauta,quandilentenditlaportes’ouvrir.

—C’estmoiCharles.Commentvas-tu?

—Hans,onnet’ajamaisditdefrapperavantd’entrer?Celadevientunemaniecheztoi.

—Excuse-moi,maisj’aicrut’entendrepousseruncri,j’avaispeurquetutetrouvesmal.

—J’aijusteététrèssoulagéderentrerdansl’eau.

—Vousallezarrêterdevousbattre,j’espère?Éloïseétaitencoretrèsperturbéecesoir.

—Nousallonscesser,Hans,tupeuxallerrassurertafiancée.Nousallonsnouscomporterdorénavantcommedespersonnescivilisées.

—Ah,tantmieux.Jesaisquec’estdurpourtoi,Charles,tuaimaistellementSophie.Mais,pourÉloïse,MarieetChristianaussi,celaaétéunepériodedifficile.

—JesaisHans,jem’enrendscompte.Laisse-moimaintenant,j’aivraimentenviedemeretrouverseul.Etnem’embrassepas,s’ilteplaît.

Hanséclataderireetsortit.Aprèssondépart,Charlesdécidadesedétendresanspenseràrien.

CHAPITREVI

PendantqueCharlesprenaitsonbain,Christianrentrachezlui.

Ilétaitpensifetinquietdesconséquencesdesonattitudevis-à-visdeCharles.Maissondésirpourcethommeavaitétésifort,qu’ilavaitcomplètementoubliétoutcequilesséparait.Etilétaitàcraindrequecelasereproduiseàchaquefoisqu’ilsseretrouveraientensemble.Ilentradanssamaison,sonhavredepaix,avecl’impressiondel’avoirquittédepuisdesannées.Ilsedéshabillaetsortitpourselaverlevisageetlecorpsdansl’étangàcôté.Illefitrapidement,l’eauétaitfroideetilpensaàCharlesquidevaitêtreconfortablementinstallédansunebaignoireduchâteau.

Ilsesecoua.Ilnevoulaitpluspenseràlui.Ilvoulaitjusteoubliertoutcela.Etpouroublier,ilallaitdevoiréviterlechâteauetleduc.D’aprèsÉloïse,ilsnedevaientresterquequatrejoursaprèslebal.Cen’étaitpasexceptionnelpourlui,denepasmonterauchâteaupendantunsilonglapsdetemps.IlespéraitjustequeleducdeBoigel,malgrésapromesse,n’allaitpascéderàlapressionetfairevisitersesécuriesàCharles.Loindesyeux,loinducœur,ilespéraitquecetadageallaitmarcherpourlui.Sursesbonnesrésolutions,ilrentrachezluietsecoucha.Avantdes’endormir,sonregarddérivasurl’entréedesapiècesecrète.Ilfrémitenpensantqu’ilpourraitl’amenerici.Etlà…

Lelendemain,Charlesseréveillatard,aveclesondelavoixdesafemmedanssesoreilles.Ildevaitsûrementfaireuncauchemar.Ilfermalesyeuxtrèsforts,espérantlafairepartir.Maisnon,elleétaitencorelà,àluiparler.Illesouvritetlavitpencherau-dessusdelui.Ilserelevaensursautant.

—Maisquefaites-vousici?cria-t-il.

—Jeviensvousprévenirquejeparsjusteaprèslepetit-déjeuner,etjevoulaissavoirsivousvouliezveniravecmoi?

—Vousallezoù?

—Jemerendschezmesparents.Sinouspartonscematin,nouspouvonsarrivercesoir.

—Nousdevionsrestericijusqu’àjeudiaumoins.Pourquoivoulez-vouspartiravant?Savoixétaitexaspérée.

—Voyez-vous,jenemesenspasàl’aise.Laduchesseesttrèsgentille,maisunpeu…froide.C’estàpeinesiellem’aadressélaparolehieretavant-hier.

—Ellenerecevaitpasquenous.Elleavaitd’autrechatàfouetter.

—Enfin,Charles,votrefrèrevasûrementépousersafilleadoptive.D’ailleurs,sivousvoulezmonavis,ilfautabsolumentempêchercetteunion.Vousrendez-vouscompte?Lafilled’unassassin!Enfin,ouivousdevezvousenrendrecompteétantdonnéquecethommea…maisjem’arrête,jeneveuxpasraviverdemauvaissouvenir.Enfinbref,laduchessem’asnobéeetjedésirepartir.

—Sivousavezparléainsidesafilleetqu’ellel’aappris,nesoyezpasétonnéequ’ellenevousadressepaslaparole.Etjevousdemanderaisd’arrêterdecancanersurÉloïse.J’aieul’occasiondediscuteravecelle,elleestparfaitepourHans.Cen’estpasladuchessequiestsnob,maisvous.Etjeneviendraispasavecvous.Jevousrejoindraischeznous,aprèsmonséjourici.Etpuis,retournez-vous,jevaismeleveretjesuisnu.

—Ohmondieu!

Charleslevalesyeuxauciel.

—Etvouspensezrentrerauchâteauàquelmoment?

—Jemedisaisquejeresteraibienunequinzainedejourschezmesparents.Voussavezcommemamèreestfragile!

Charlesricana.

—Sielleestfragile,alorslemondeentierestmourant.Etnotrefils.Vousenfaitesquoi?

—Ilaunebonnenounou,jenem’inquiètepaspourlui.

—Vousêtesvraimentunemèreparfaite.

—Merci,monami.

Ellen’avaitpascomprisl’ironiedanslesparolesdeCharlesetarboraitungrandsourire.

—Bon,commevousnevenezpasavecmoi,jenevaispasattendreledéjeunerpourpartir.Mesaffairessontprêtes,jevaisdemanderquel’onmeprépareunpanier,etjepartiraitoutdesuiteaprès.

—Faitesdoncça.Jevousdisaurevoir,carjenevousreverraispas.

Elles’approchadeluipourrecevoirunbaisersurlajoue.Charlessepenchaverselleetl’effleuraàpeinedeseslèvres.

—Àbientôt,monami.Jepasseraislebonjouràmesparentsdevotrepart.

—Oui,faitescela.

Ilpoussaunsoupirdesoulagementquandellefutsortie.

Georgesentra,dèsqueladuchessefutpartie.

—Jedoisrangerlesaffaires,Monsieurleduc?

—Non,surtoutpas.Jerestelà.Quevoulez-vousquej’aillefairechezmesbeaux-parents?Jemourraid’ennui.

Georgesdutcacherlesourirequiétaitapparusurseslèvres.

—Oh!Vouspouvezrire,voussavez.Jenevaispasmevexer.

—Excusez-moi,Monsieur,jenevoulaispasmemoquer.

—Pasdeproblème,Georges.Nousresteronsicijusqu’àjeudi.Quesedit-ilsurmoiaujourd’hui?

—Absolumentrien.Ilsemblequevotrerencontreavec“unarbre”n’intéressepersonne.Parcontre,quandilsvontvousvoircematin,celavafairejaser.

—C’estàcepoint?

Ilsedirigeaverslemiroir.L’undesesyeuxétaitbleuetl’autreviolet.Ilavaitunebellemarquerougesurlajouedroite.

—Ouah,effectivement.C’estencorepirequ’hiermatin.Etvouspensezquemon“arbre”serapareil?

—Sivousaveztapéoùilfaut,iln’yaaucundoute.Vousvoulezquejevousappliqueunepommadequicacheraunpeulesdégâts?

—Non,celanecacherapasgrand-chose.C’estbizarre,maismafemmen’amêmepashurléenmevoyant.

Georgesnepouvaitpasluidire,qu’àpartelle-même,safemmenevoyaitpasgrand-chose.

—JesaiscequevouspensezGeorges.

—VraimentMonsieur?

—Oui,vraiment.Bon,donnez-moidesvêtementsconfortablesaujourd’hui,j’espèrequeleducmeferaenfinvisitersesécuries.

—J’ysuisallé,Monsieur,c’estvraimentunendroitincroyable.

—Vousavezdelachance,jen’aijamaiseul’honneurdelesvoir.Jevaisêtreleseulparmitouteslespersonnesprésentes,ànepaslesavoirvu.C’estunmondequandmême!JevouspréviensGeorges,sionnemeleproposepasaujourd’hui,demainnousnousréveillonsàl’aube,etj’iraisencatimini.

—Trèsbien,Monsieurleduc,jevousaccompagnerais.

—C’étaitprévucommeça,Georges.

Ildescenditàlasalleàmangeroùlepetitdéjeunerattendaitlesconvives.Ilyavaitdéjàdumonde,etCharlesserenditcomptequetouslesinvitésdevaientpartircematin.Ilcroisasafemme,quin’eutpasletempsdeluiparler,cequil’arrangeait.Leducétaitprésent,etl’invitaàs’installeràcôtédelui,laplaceluiayantétévisiblementréservée.

—Ehbien!Christiannevousapasraté.

Charlesleregardasurpris.

—Jesuisaucourantdecequ’ils’estencorepasséhiersoir,Charles.J’aieuunrapportcompletdelapartdeHansetd’Éloïse.Quandallez-vouscesser,touslesdeux?

—Nousavonsconcluunpactedenon-agression.Celan’arriveraplus.

—Vousavezplutôtintérêt.Vousn’allezressembleràrien,sivouscontinuezcommeça.

—Ilestsûrquejenepassepasinaperçu,dit-ilenregardantlespersonnesinstalléesàtable.

Laplupartdesinvitésavaientleregardbraquéverseux.EntresesapartésavecChristiansurleterraindujeudepaumeetsurceluiquicroquet,ilsavaientfaitbeaucoupparléd’eux.

—Alors,allez-vousenfinmefairevisitervosfameusesécuries.?MêmeGeorges,monmajordomeaeuledroitd’allerlesvoir.Celafaitcombiendetempsquenousnousconnaissons?Sixouseptans?Nosrapportsn’ontjamaisétéplusloinquelesformulesdepolitesse,jecomprendspourquoimaintenant,maiscommevotrefillevaépousermonfrère,celavanouslierenquelquesorte.Etceseraitvraimentétrangequejesoisleseulànepasavoireuleshonneursd’unevisite.Etenmêmetemps,peut-êtrequevousmepermettrezd’acheterl’unedevosbêtes?

—Pourlavisite,j’avaisbienl’intentiondevouslafairefaire,maisquandàacheterl’undemeschevaux,ça,c’estuneautrehistoire.C’estChristianquidécideàquiilveutvendre.Moi,jemecontentedeprendremesordresdelui.

—J’auraisdûm’endouter.Ilvousainterditdemevendreuneseulebête,quandilestvenutravaillerchezvous?

—Oui,désolé.C’étaitnotreaccord,sinonilrepartaitavecsessœurs.Aujourd’hui,lasituationachangé.ÉloïsevaépouservotrefrèreetMarieestnotrefilleàpartentière.Jepensequ’ilnedirarien,sijevousemmèneauxécuries,maisquandàvousenvendreun,j’endoute.Christianconnaîttrèsbienlesbêtesetsaitégalementjugerparfaitementleshommes.D’aprèssessœurs,ilaledon.Etjedoisvousavouerqu’avantdelerencontrer,jenecroyaispasàceshistoires.J’aidûrévisermonjugementquandjel’aivufaire.Maiscegarçonestégalementtrèstêtu.Pirequelapluspiredesmules.

—Peut-êtrequ’ilchangerad’avis.

Leduceutunemoueseptique.

—Vousdéjeunezetjevousemmène.

—D’accord!Ahvoilàmafuturebelle-sœuretmonfrère.

Lesjeunesgenslesvirenttoutdesuite,etÉloïseneputs’empêcherdemettrelamaindevantsabouchepourétoufferl’exclamationqu’ellenepouvaitretenirdevantlevisagedeCharles.

—Charles,tun’espasbeauàvoir,vraiment!

—MercidetasollicitudeHans.Vousavezbiendormijeunesgens?

ÉloïsedevinttrèsrougeettimideetHanseutluiaussiunelégèrecolorationquiluimontaaufront.

Charlescomprittoutdesuited’oùvenaitleurgène.Ilsetrouvaversleduc.

—Nousallonsavoirintérêtàlesmarierrapidement,jecrois.

—Oui,j’enail’impression.

Ilseleva,pritÉloïseparlebrasetl’entraînaaveclui.

—Nousallonsdevoirparler,jeunefille.

Ilattrapasafemmequientraitdanslasalleettouslestroisserendirentàsonlebureau.

—Tupensesquejedevraisalleraveceux?demandaHansd’untonanxieux.

—Restelà,ilsteconvoqueronts’ilsveulenttevoir.Tuesprêtàtemarierj’espère?

—C’estmonvœulepluscher.

Hansassitàcôtédelui,seservitunebellegrosseassiettedecharcuterie,depainetdefruits.

—Jevoisquecelanetecoupepasl’appétitquetonamantesubisselesréprimandesdesesparents.

—Detoutemanière,lemalestfait.Ilsnepeuventpaslabattre,n’est-cepas?demanda-t-il,inquiettoutàcoup

—Non,cen’estpasvraimentlestyledelamaison.

—Ouf,tumerassures,dit-ilavantderetourneràsonplantureuxpetit-déjeuner.

Aprèsleretourd’Éloïseetdesesparents,leducentraînaCharlespourluifairevisitersondomaine.Hans,rassuréparlesouriredelajeunefille,lessuivit.

Ilsserendirentàpiedjusqu’auxécuries.Ilsdébouchèrentsurtroisbâtimentsàl’apparenceneuve.Aucun

necollaitàl’autre.Toutautourdesbâtiments,unepistedecourseavaitététracée.Elledevaitfairedeuxbonskilomètres.Derrièrelapiste,lesanimauxpouvaients’ébattredansdesprésverts.Lesprésetlapisteétaientséparéspardesclôtures.Chaquepréétaitdélimitéetunportailpermettaitd’yfaireentrerousortirleschevaux.

—Lebâtimentleplusgrand,expliqualeducàCharlesestl’écurieproprementdite.Lesanimauxsontsortistouslesjours,pourêtreentraînésetensuiteilspeuventresterdanslespâtures.J’aidixpersonnesquis’occupentd’euxàtempspleins,touslesjoursdelasemaine.Chaqueanimaldisposed’unboxouvertsurl’extérieur.

—Vousavezcombiendebêtes?demandaCharles.

—Unevingtaine,plusquandChristianestimequecen’estpasunbonmomentpourvendreetqu’ildécidedestoppertoutdépart.

—Jenesavaispasqu’ilyavaitdespériodesoùleschevauxnepouvaientpasêtredéplacés.Commentpeut-illesavoir?

—Illesent,jecrois.Etilasouventraison.Laseulefoisoùj’airefusédel’écouteretoùj’aifaitpartirdeuxchevauxsanssonaval,ilssontarrivésentrèsmauvaisétat.J’aidûrembourserl’acheteuretrécupérerlesbêtes.Christianamissixmoispourqu’ilsredeviennentcalmes.Lepluspetitbâtimentnoussertàmettrelesanimauxtropnerveuxoupasencoredressés.Nousévitonsdeleslaissertroplongtempsloindesautresetdèsquenoussentonsunelégèreaméliorationdansleurattitude,nouslesremettonsdanslagrandeécurie.Nousnoussommesaperçus,enfinc’estChristianquinousl’afaitremarquer,qu’ilssecalmaientplusfacilementauxcontactsdeleurscongénères.Letroisièmebâtimentnoussertàentreposerlematériel,lesvivres,lesmédicaments,etlesateliersdesmaréchaux-ferrants

—Regardezlà-bas,ditleducenmontrantunpré,unpeuàl’écartdesautresoùunchevaletunhommeétaientseulsfacel’unàl’autre.Christianestentraind’amadouerunanimalquenousavonsreçuilyaunpeuplusd’unmoismaintenant.IlarrivedeFrance,ilétaitcomplètementsauvage.Christiantourneautourdeluidepuisquinzejoursmaintenant.Ill’alaissés’acclimater,avantdecommencersondressage.Là,vousvoyez,iltendlamain.Sil’animallasent,c’estgagné.Sinon,ilfaudraqu’ilrenouvellel’opérationencoreetencore.Ilyestdepuisplusd’unmois,etiln’apasencoreréussi,maisiln’enestpasloin.Oui!cria-t-il,regardez!

Lechevals’étaitapprochédeChristianetluisoufflaitsurlamain.Sonattituden’avaitriendemenaçant.AprèsavoirreniflélesdoigtsdeChristian,lechevalserendittranquillementaumilieudel’enclosoùilcommençaàbrouter.Lejeunehommelevalepoingensignedevictoireetlesgensagglutinésautourlevèrentlesmainsenl’air.Personnenecriait.Charlescompritqu’ilsnevoulaientpasaffolerlecheval.Christiansortitdel’enclosetilreçutdepuissantetapeàl’épaule.Ilgrimaça.

Charlesneputs’empêcherdesourire.

—Iln’yapasquemoiquisoismalenpoint,semoqua-t-il.

—Oui,etiln’arienàvousenvierauniveaudesyeux.Peut-êtremoins…bouffis.

Lestroishommess’approchèrentdelui.

—Christian,magnifique,luiditleduc.Tuavaiscomptédeuxbonsmoisetdemipourl’amadouer,ilnet’enafalluqu’un.

Christiansetournaverseux.Ilinclinalatêtedevantleduc,saluaHansetregardaCharles.Unsourirenaquitsurseslèvresendécouvrantlevisagedesonennemi.

—Çafaitmalhein?luidit-ilmoqueur.

—Çanefaitpasdubien.Vousensavezquelquechose.

—Allonsmessieurs,n’allezpasvousénerverànouveau,leurdemandaleduc.Charlesvoulaitabsolumentvisiter,Christian,jen’aipaspuluirefuser.

—Oui,jem’endoute.Alorscommenttrouvez-vousnosinstallations?luidemanda-t-il.

—Jevouslaisseunmoment,l’interrompitleduc.JedoisallervoirVictor.

—Victorestnotrepalefrenierenchef,luiexpliquaChristian.

Ilenglobalatotalitédesbâtiments.

—Qu’enpensez-vous?

—Trèsimpressionnant.Toutàl’airneuf?

—Oui,nousavonsagrandietrénovéaufuretàmesureetnouspourrionsenavoirplusencore,sijen’avaispasarrêtéleduc.

—Leducvousécoutetoutletemps,Christian?demandaHans.

—Pastoutletemps,rigolalejeunehomme.Mêmerarement,maispourunefois,ilaétédemonavis.

Christianvitleducquis’éloignaitavecVictor.

—Venez,jevaiscommenceràvousfairefaireletour,leducenapourunmoment.

Illesfitentrerdanslagrandeécurie.Ellesentaitbonlechevaletétaittrèspropre.Lesboxesétaientgrandsetiln’yavaitquequelquesanimauxàl’intérieur.Plusieurshommessetrouvaientlà,etlesbichonnaientounettoyaientlesboxes.

—Lesanimauxsontsortistouslesjoursdanslesenclos,nouslesentraînonsetensuite,ilsrestentdanslespâtures.Nouslesrentronslesoir,avantquelanuitnetombe.Lesplussauvages,commeceluiavecquij’étaistoutàl’heure,vontdansl’autreécurie.Ilsyrestentletempsd’êtrepluscalme.

Ilscontinuèrentainsilavisite.Christianétaitvéritablementpassionnéparsontravailetneselassaitpasd’expliquertoutcequ’ilsvoyaient.Leduclesrejoignitencoursderoute.Christianleslaissaensemble,prétextantuntravailimportantàfaire.

Charlesleregardapartir.

Toutcequ’ilavaitvuetentendul’avaitvraimentimpressionné,maistoutavaitétéditdefaçontrèsformelle.Ilnecomprenaitpasl’attitudedujeunehommequil’avaittraitécommeunsimplevisiteur.Aprèscequ’ilsavaientvéculaveille,ilavaitespéréaufonddeluiqueChristianl’entraînedansunendroitdésert,pourpouvoirserapprocherplusintimement.Bon,avecHansaveceuxetleducpastrèsloin,celan’auraitpasétéraisonnable,mais,ilauraitaumoinspuluisourire,ouluifairecomprendrequ’ilsétaientintimes.L’heuredurepasétaitdepuislongtempsdépasséequandilsrentrèrent.Dessandwichslesattendaient.

L’après-midifutconsacréàdiscuterdel’organisationdumariage.Lesjeunesgenssemarieraientdansunmoisetdemi.Ilsnepouvaientattendrepluslongtempscarilsavaientanticipéleurnuitdenoce.Ceseraitunmariageplutôtintime.Lenomcompletdelajeunefilleapparaîtraitdanslesfaire-parts,ainsiqueceluideChristianetdeMarie.Éloïseétaitunpeuinquiètedesragotsquiallaientforcémentressurgirent.ToutlemondelarassuraetHans,Charlesetleducluiaffirmèrentqu’ilsferaientfrontcommundevaitlesmédisances.Charlesleurinformaqu’ilavaitdécidéd’organiserunbalenl’honneurdesfiancés,pourprouveràtousqu’ilétaitd’accordaveccetteunion.Samèreseferaitunejoiedetoutorganiser.Ilneparlapasdesafemmeetpersonneneluiposadequestion.

Audîner,Christiannefitaucuneapparition.Unjeunegarçonvinttrouverladuchessepourluidirequelejeunehommeavaittropdetravailpourpouvoirvenir.Ellenemontraaucunecontrariété,maisonsentaitqu’elleauraitbienétélechercherparlapeaudesfesses.

Lelendemain,àbordd’uncarrosse,lesdeBoigelfirentvisiterlarégionàCharles,avecHansetÉloïse.Marierefusadelessuivre.

Hanslesinvitaàvenirvisitersapropriété,héritéed’unvieilonclequil’avaitprisenaffection.Ilétaitfierdepouvoirmontreràsesfutursbeaux-parentsl’endroitoùvivraitleurfille,unepartiedel’année.SesobligationsenversCharles,leforçaientàlogerauchâteauducal,lerestedutemps.

Sademeureétaittrèsagréable,unetrèsbellemaison,touteblanche,grandesurtroisniveaux,uneterrasseabritéefaisanttoutletoursurlaquelleétaientinstallésdestablesplusoumoinsgrandes,deschaisesetdesfauteuils.Chaquepiècedurez-de-chausséeavaitaccèsdirectementàcetteterrassepardegrandesportesfenêtres.Ungrandparcdevantetderrière,biensentretenus,avecdemagnifiquesparterresdefleurs.Onsentaitunemaisonoùilferaitbonvivre.

Lepersonnel,quis’étaitprisd’affectionpourleurnouveaumaître,futravid’êtreprésentéàlafuturemaîtressedemaison.

Leretourauchâteaufutjoyeux,lesdeuxfemmesfaisantdesprojetspourladécorationdelamaison.Leshommeslesécoutaientaveclesourire.

Etencoreunefois,ledînersepassasansChristianquin’eutmêmepaslapolitessed’envoyerquelqu’unpourl’excuser.

—Jevaisallerlechercher,ditleduc,avantdes’installeràtable.Ilcommenceàm’agaceravecses

enfantillages.

—Ilnedoitpasvouloirvenirparcequejesuislà,intervintCharles.Laissez-moiyalleràvotreplace.Nevousinquiétezpas,nousnenousbattronsplus.

—Ilhabitelamaisondernièrelepâturagenord,vousn’avezqu’àsuivrelesentierilvousyemmènera.Voulez-vousquejevousfasseselleruncheval?

—Non,jevaisyalleràpied.Marchermeferadubienetjefiniraisbienpartrouver.Nem’attendezpaspoursouper.Jegrignoteraisquelquechosequandjerevendrais.

—Jevaisalleravecvous,luiditÉloïse.

—Non…ilvautmieuxquej’yailleseul.J’aideschosesàluidireetjevoudraislesluidireenprivé.Restezlà,jevousprometsquecelasepasserabien.

Illuifallutunebonnedemi-heurepouratteindrelesécuriesetencoredixminutespourserendrejusqu’àlamaisondeChristian.Delafuméesortaitparlacheminée.Ilregardaparl’unedesfenêtresettrouvalejeunehommeassisàunetable,entraindemanger.Ilfrappasurlecarreau,lefaisantsursauter.Quandcelui-cilevit,ilselevapourouvrirlafenêtre.

—Monsieurleduc,quemefautvotrevisite,àcetteheure?

—Faites-moientreretjevousledirai.

ChristianrefermalafenêtreetCharlesentenditlaclenchedelaporte.Ilpénétradanslamaison.Lacheminéediffusaitunedoucechaleuretçasentaitbonlasoupe.Christians’étaitrassisàlatableetleregardait.

—Laduchesseetleducn’étaientpascontentsquevousnesoyezpasencorevenucesoir,dîneravecnous.Etcommejesaisquej’ensuislacause,jevienspouravoirunepetiteexplication.

Charless’étaitavancédanslapièceetseulelatablelesséparaitl’undel’autre.

—J’aieuénormémentdetravail,jeviensjustederentrer.Jen’avaispasenviedemonterjusqu’auchâteau.J’irailesvoirdemainetjem’excuserai.

—Nemeracontezpasn’importequoi.Jesaistrèsbienquevousnevenezpasàcausedemoi.Pourquoi?Sivousavezpeur…

—Jen’aipeurderienetsurtoutpasdevous!

Christianseleva,débarrassasatableetserenditàlacuisine.Charleslesuivit.Ilyrégnaitundésordreincroyable.L’évierétaitencombréd’assietteetdebolssales,lapetitetablen’avaitsûrementpasvuuncoupd’épongedepuisunmomentetleréchaudétaitencrassé.

—Ouf,dit-il,etvousarrivezàvousfaireàmangerici?

—Jen’aipasdepetitesmainspourvenirfairemonménage,moi!Etjetravailletoutelajournée,dit-ilenmentanthonteusement.

—Peut-être,maisvousdevriezyconsacrerunmomentpourtant,lesratsnevontpastarderàenvahirvotrecuisine.

—Ilestdéjàdanslacuisinelerat,ditChristianméchammentenleregardantdanslesyeux.

LamoutardecommençaàmonteraunezdeCharles.IlacculaChristiancontrel’évier.

—C’estquoitonproblème,deSaxe,turegrettescequetum’asfaitl’autresoir?Lescoupsoulereste?

Christianessayadesedégager,maisCharless’appuyacontrelui.

—Tuaspeurdecequetuéprouvespourmoi,c’estpourçaquetum’évites?Tunecroispasquemoiaussi,j’aipeur?Tunecroispas,quemoinonplus,jenemesuispasposédequestion,quejen’aipaseuhontedemonattitudeenverstoi?Nonseulementj’éprouvedudésirpourunhomme,maiscethommeétaitlegaminquej’aileplushaïaumonde,àcausedecequ’ilm’avaitditsurmafemme!

ChristianrefusaderegarderCharlesdanslesyeuxetdeluirépondre.Ils’appuyasurl’évierleplusloinpossible,pourévitersoncontact.

—Trèsbien,jenevaispastedérangerpluslongtemps.

Charless’écartaetsortitdelacuisine.Ilrécupérerasonpardessus,qu’ilavaitposéenentrantetsedirigeaverslaported’entrée.

—Jevaisavancermondépartàdemain.NousnousreverronsaumariagedeHansetd’Éloïse,maisjenet’importuneraisplus.Jeferaisensortederesterloin,trèsloindetoi.Etévite-moiaussi!

Illeregarda,espérantuneréactiondelapartdujeunehomme.Christianrestaitàsaplace,sansbouger.Charlesouvritlaporteetsortitpresqueencourant.Ilavaitenviedepleurer.Iln’étaitquandmêmepasattachéàChristianàcepoint?

Ilempruntalecheminleramenantauchâteau.

Christianregardalaporteserefermerbrutalementsouslapressionduduc.Ilsursauta.Sansmêmes’enapercevoir,niréfléchiràcequ’ilfaisait,ilsortitetsemitàcourir.Charlesn’étaitpastrèsloin.Illerattrapa,l’attrapaparlebrasetleretournaverslui.Charleseuuncoupaucœurdevantsonvisage.Ilavaitlesyeuxfous.

—Neparspas!S’ilteplaît,neparspas,luimurmurait-ilenleserrantcontrelui,levisagedanssonépaule.Jesuisdésolé,désolé.

Charlesselaissaallercontrecegrandcorpspressécontrelui.

—Charles,Charles,gémissaitChristian.J’aitellementenviedetoi.Neparspas,Reste.

Christianluipritlevisageentresesmains,luiembrassalesyeux,lenez,lefront.

—Charles,Charlessoufflait-il.

Ilposaseslèvressurlessiennesetsonbaiserdemandaitunecomplèteredditionàl’autrehomme.Charlesselaissafairesansprotester.Ilreçutlebaiserleplusfougueuxdesavie.LalanguedeChristianavaitinvestisabouche,dèsqu’ill’avaitouverte.Plusriennesemblaitvouloirleretenir.Sesmainssefaufilèrentsoussavesteetsachemise.Illuicaressaledos,luipétritlesfesses.Charlesdécollaseslèvres,lesoufflehaletant.

—Christian,nousnepouvonspasnousembrasserici.

Christian,quivoulaitluireprendreleslèvress’immobilisa.Ilposasonfrontsurlesien,cherchantsonsouffle.

—Viens…rentrons!

Illuipritlamainetl’emmenachezlui.Laporteàpeineferméeàclé,ilrepritCharlesdanssesbras,luienlevantsonpardessusetarrachalesboutonsdesachemise.Illaluiretirasanslâcherseslèvresunseulmoment.Ilpétritavecpassionsontorse,descenditsesmainsplusbas,pourprendresesfessesàpleinesmains.Illesempoignaetleserratrèsfortcontrelui,leursdeuxsexessefrottantl’uncontrel’autredansunmouvementincontrôlable.Charlescomplètementsousladominationdujeunehommenepouvaitqueselaisserallerfasseàsesassauts.

Desgémissementsdeplaisirssortaientdesabouche.

—J’aitellementenviedetoi,murmurait-il.Jeveuxtesentir,tegoûter,teprendre.

Charlesn’avaitjamaisétéaussiexcité.Personneneluiavaitjamaisditcegenredechose.Etsurtoutaveccettepassion,cedésir.

—Vas-y,Christ,chuchota-t-il,neteretienspas.

—Jenevaispaspouvoirmeretenirdetoutefaçon,luiréponditlejeunehommed’unevoixrauque.Jen’aipenséqu’àtoi,jen’airêvéquedetoi.Ils’interrompit,voulantsecalmerquelquesinstants.Tusaiscequejeveuxfaire?

Charlessemitàrire.

—J’enaiunepetiteidée.Mais…tupourrasfaireça…euh…doucement?

—Trèsdoucement,maistuverras,c’esttoiquimedemanderasd’yallerplusfort.

Illeseraànouveaudanssesbras.

—Bondieu!Jen’aijamaisvouluquelqu’uncommejeteveux,toi!Viens.

Illetiraparlebraspourl’emmenerdanssachambre.Charlesramassasonpardessusetremitsachemise.ÀlagrandesurprisedeCharles,ildéclenchaunmécanismeintégrédanslemurpourouvrirlaportedesapiècesecrète.

—Onestoùlà?

—Icinousseronstranquilles.Personnenesaitquej’aiconstruitcettepièce.Ilallumalesbougiesposéessurunecommode.Siquelqu’uns’amusaitàentrerchezmoi,ilnetrouveraquedespiècesvides.

—Çasentunpeulerenfermé.

—Ilyalongtempsquejenem’ensuispasservi.Leshommesdepassagequiontlesmêmesgoûtsquemoi,sontassezrares.J’aieuentoutetpourtoutquatreamantsetuncinquième,quiaététellementstressé,qu’ilestpartiavantquenousayonsfaitquoiquecesoit.

Charlesrestésurlepasdelaportepénétradanslachambre.

—Jedoistedirequeçanemedittroprien,defaireçaici.

—Arrêtedefairetachochotte,lesdrapsdulitsontpropres,etj’aifaitleménagehier.

—Tuavaisl’intentiondet’enserviralors?

Charless’étaitapprochédeluipourleprendredanssesbras.

—Jen’ensaisrien.Jen’avaispasvraimentmatête,quandjemesuisattaquéauménage.J’espéraisetenmêmetemps,jemedisaisquecen’étaitpaspossible.Pasavectoi.

Ilappuyasatêtesurl’épauledesonamant.Celui-ci,comprenantsondilemme,attenditquelquessecondes.

—Tuveuxarrêter?demanda-t-ild’unevoixbasse,inquiète,carluiavaitprissadécisionetilvoulaitallerjusqu’aubout.

Christianrelevalevisage.Unsourirejoyeuxseformasurseslèvres.

—Bondieu,non!Tueslà,jetegarde.Jenetelibéreraiquedemainmatin.

Ilfermalaporte.

LebaiserqueCharlesreçutluidonnalevertige.

Christianluiretirasachemisequ’ilavaitremise.Illepoussasurlelitoùiltombasurledos.Lejeunehommesemitàcalifourchonsurlui,sonbassinfrottantlesexedéjàdurduduc.Ilsepenchasursontorsepourluimordillerlestétons.Ceux-ci,trèsréactifsseredressèrentsoussespetitscoupsdedentetdelangues.Ilgémissait,endemandantplus.

Christiandescenditpourembrasseretmordillersonventre.Sesmainsétaientoccupéesàbaisserson

pantalon.Ilsaisitsonsexesuintantdéjàdedésir.Ilposaseslèvressurluipourrécupérerlespremièresgouttesquiperlaient.

—Christ,c’est…bon.Prends-ladanstabouche.

—DoucementMonsieurleduc,icic’estmoiquicommande.

Ilsereleva,luienlevaseschaussuresetsonpantalon.Ilsedéshabillaalorslui-mêmecomplètement.Charlesputadmirerlecorpstoutenmuscle,exposéàsesyeux,etsurtout,lesexe,longetépaisquiseredressaitfièrementsursonventre.

—Cequetuvoisteplaît,Monsieurleduc?demandalejeunehomme.

—Très…mais…tuessûrque…etbientuvois…tumeparaisunpeu…gros,non?

—Net’enfaispas,rigola-t-il,çavaentrer.Etjevaisfaireattentiondenepastefairemal.Tuasconfiance?

—Oui…oui,j’aiconfiance.

Ilseremitsursonducetl’embrassaavectoutelapassionqu’ilressentait.Ilvoulaitsurtoutluifaireoublierl’angoissequ’ilavaitressentieenlevoyantnu.IlempoignaseshanchesetfrottasonsexesurlesexedeCharles.Celui-ci,quiavaitcommencéàdébanderàlavisiondumatdeChristian,netardapasàreprendreuneformeplusavantageuse.Ilsebaissaànouveausurlui,etlerepritdanssabouche.Avecl’undesesdoigts,ilallatrouversonentréeetcommençaàlepréparer.Charles,quiavaitl’impressionquejamaispersonneneluiavaitfaitunefellationaussiincroyable,gémissaitmaintenantsansseretenir.Ilsoulevaitseshanchesinconsciemmentpourpermettreaujeunehommed’avoirunmeilleuraccèsàsonentrée.

—Bondieu…Christian,jecrois…

ChristiancomprittrèsbienqueCharlesétaitàlalimite.Ilnevoulaitpasqu’iljouissedanssabouche,pascettefois.Ilvoulaitêtreàl’intérieurdeluietlepilonnerpendantqu’iljouirait.Ilvoulaitressentirlescontractionsdesajouissancesursonsexe,pourpouvoirluiaussiselibérer.

Ilserelevaetfouilladanssacommodepourenressortirunflacon.Ils’enduisitlesdoigtsetcommençaàcaresseretàpénétrerCharles.Celui-ci,laréalitédecequ’ilsfaisaientrevenantsenforce,secrispa.

—Détends-toi,jeneteferaipasmal.

Charlesl’écoutaetessayadesedétendre.Christiancontinuasonintrusioneninsérantundeuxièmedoigt.Charlesressentaitunegêneetpuistoutàcoup,unepointedeplaisir,quandilletouchaàunendroitbienprécis.

—Oh,c’est…savoixmontadanslesaigus.Oh!C’estbon.Christ,quemefais-tu?

—Jetefaisdubien.Tuaimes?

—OUI!!…s’ilteplaît…cria-t-ilnesachantpaslui-mêmecequ’ilvoulait.

—Jevaisyallerdoucement,maistum’arrêtessitusensquejetefaismal,d’accord?

—Oui.

—J’attendraisquetut’habituesàmoipourcontinuer.

—Allez,arrêtedediscuter,vas-y.

—Trèsbien,Monsieurleduc.

IlsepréparasousleregardappréciateuretunpeuangoissédeCharles.Ilenduisitsonsexedel’huilequ’ilvenaitdesortir.Charlesneputs’empêcherdegémir.Ilavaitl’impressionquesonanusfrétillaitd’impatience.Christianseprésentadevantlui,repoussasesjambesetilpoussadoucementàl’intérieurdesonamant.Sapénétrationsefitparàcoup,pourpermettreàCharlesdes’habitueràlui.

—OhCharles…c’estbon.J’ysuispresqueàfond.Çava?

—Oui,oui,continue.C’estouf…,Bon.Ohouichrist,pousse,plusfort.Oh!Christ,bondieu!

MaisChristiann’entendaitplusgrand-chose,justeleplaisirqu’ilavaitdepilonnersonamantdeplusenplusfort.LescrisdeCharles,seshalètements,luidonnaientenviedeplusencore.IlélevalesjambesdeCharles,plushaut,etsansplusaucunerestriction,selaissaalleràsapassion.

Charlesn’enpouvaitplus.

Ilavaitpensédirestopaujeunehomme,quandilavaitcommencéàlepénétrer.Etpuis,àunmoment,ladouleuravaitétéremplacéeparunepointedeplaisirincroyable.EtquandChristianavaitcommencéàbouger,leplaisirs’étaitfaitplusintense.Ilavaitl’impressionquesoncorpsneluiappartenaitplus.Cequ’ilressentaitétaitindescriptible.EtquandChristiansaisitsonsexedanssamainpourlefairealleretvenir,ilnetintplus.Iléjaculapardelongsspasmessursonventre.LacontractiondesessphinctersfutfataleàChristianquilesuivit.Ils’abattitsursonamant,leurssoufflessaccadés,leursrespirationshaletantes.Christianenfouitsonvisagedansl’épauledeCharles.Deslarmesdeplaisirscoulaientlelongdesesyeux.Charlesluicaressaledos.Iléclataderire.

Christianrelevalatête,sesyeuxrougisetleregardaintensément.

—Oh,moncœur!luiditCharlesd’unevoixdouce,c’étaittellementbien.

Illeseracontrelui,seslèvrescherchantlessiennes.

—Merci,merci.

—Pourquoi?demandaChristiand’unevoixrauque.

—Pourm’avoirfaitdécouvrirlevraiplaisir.Tuterendscomptequejamaisjen’avaisressentiça?!Oh!

Dis-moiquetuesenforme,jeveuxrecommencer.

—Attendsquelquesminutesetjesuisàtoi,ricanaChristian.

Ilsortitsonsexedel’anusdeCharlesets’allongeaàcôtédelui.Ilsselovèrentl’uncontrel’autre,CharlesembrassantlesépaulesdeChristian.

—Commentas-tusuquec’étaitdeçadontj’avaisenvie?luidemandaCharles.

—Tuessûrquetuveuxvraimentlesavoir?

—Oui!

—Ehbienquandjet’aiprisdansmabouche,l’autrejour,tunet’enétaispasrenducompte,maisjet’aimisundoigtettun’arrêtaispasdebougerautourdelui.

—C’estvrai?

—Biensûrquec’estvrai.

—Jenem’ensouvienspas.J’étaistropexcité.J’avaisl’impressionquemoncorpsnem’appartenaitplus.Commemaintenant.

Christianselevaaprèsunbaiser.

—Oùvas-tu?

—Chercherdequoinousnettoyer.L’amourc’estbien,maisçafaitbeaucoupdesaleté.EtMonsieurleducaimebienquandtoutestpropre,luidit-ilmoqueur.

Ilrevintquelquesminutesplustard,trouvantCharlesàmoitiéendormi.Ilsautasurlelit,enleréveillantensursaut.

D’unemaindouce,ilnettoyasontorse,sescuissesetsesfesses.

—Voilà,toutbeau,toutpropre.

Aprèsavoirlancélaserviette,ils’allongeaetrepritsonamantdanssesbras.

—Alors,prêtpourundeuxièmeround?

Ilcommençaàluicaresserletorse,pourensuiteprendresonsexeàdemi-dressédanssesmains.Celui-ci,retrouvavitetoutesavigueuretCharlescommençaàgémir.

—Mets-toisurleventre,luiordonnaChristian.

Leducsemitsurleventre,latêteenfoncéedansl’oreiller.IlsentitlalanguedeChristianparcourirsondos,pours’arrêterenhautdesesfesses.Illessouleva,semettantàgenoux,pourluidonnerunmeilleur

accèsàcettepartiedesonanatomiequepersonnen’avaitjamaistouchéavantetsurtoutpasembrassé.Lejeunehommeluiécartalesfessesdesesdeuxmainspourallertitillersonentréeavecsalangue.LeplaisirqueCharlesenressentîtluifitlâcherunbeaujuron.

—Ah!Christ…j’ai…besoin…

—Oui,jesaiscedonttuasbesoin.Soulèveteshanchesunpeuplushautes.Voilà,commeça.Tiens-toiaumontantdulit,tuvasêtresecoué.Voilà.Tuesprêt?

—Oui.(Savoixétaitsifflante.)Prêt.

Christiansepositionnaderrièrelui,ets’enfonçaavecimpatiencetoutenfaisantattentionàlaréactiondeCharles.Celui-ciseraiditquelquessecondesdevantcetteinvasion,maissedétenditassezvite.Christianl’attrapaparlataille,etsansluilaisserletempsdedireouf,commençaàalleretvenirenlui,deplusenplusvite,deplusenplusfort.Ilavaitl’impressiondenepasêtreencoreloinassezenlui.Ilvoulaitleremplircomplètement,l’envahiràtelpointqu’ilnesauraitplusquiilétaitetc’estcequeCharlesressentait.Ilétaitenvahidelapuissancedujeunehomme.Lesmainscrispéessurlemontantdulit,iln’avaitjamaisressenticetteimpressiond’apparteniràquelqu’uncommeilluiappartenaitàcemoment-là.Lescoupsdebutoirdujeunehommeétaientdeplusenpluspuissants.Latêteenfouiedansl’oreiller,ilnepouvaitpass’empêcherdelaissers’échappersescrisdeplaisir.Ilnevoulaitpasjouirtoutdesuite,etseretenaitdetoutessesforces.

Maiscefutluilepremierquicraqua.Impossibledeseretenirpluslongtemps.EtChristianlesuivit,deuxallersretoursaprès.Leurscris,leursgémissementsenvahirentlachambre.Ilss’écroulèrenttouslesdeux,CharlesécraséparChristian.Celui-cirepritsarespirationetseretira.

—Çava?

—Oui,répondit-il.Maisj’enaiassezpourcesoir.

—Ahbon!J’auraisbienrecommencétoutàl’heuremoi.Tuesfatigué?

Illepritdanssesbras.

—Tum’ascrevé.Etdemain,jevaisfaireunerandonnéeàchevalavecleduc.Jenepourraisjamaismonterenselle.

—Demain,jet’appliqueraiunepommadequiteferadubien.Ellenesentpastrèsbon,maislàoùelleseramise,àpartmoi,personnenepourras’enapercevoir.Allez,unepetitetoiletteetdodo.Turesteslàoùturepars?

—Non,jereste.Sinoncommentveux-tum’appliquertapommade?

Ilss’endormirentpresqueaussitôt,Charlessurlecôté,sondosencastrécontreletorsedeChristianquiletenaitserrédanssesbras.

Lelendemain,lesretrouvadanslamêmeposition.Àcroirequ’aucund’euxn’avaitbougédelanuit.Charlesfutlepremieràseréveiller.Ils’étonnad’aborddenepasreconnaîtrelachambreduducet

encoreplusdesentiruncorpsfermeetvisiblementenformecontrelui.Lessouvenirsrevinrent,etcefutaveclesourirequ’ilfrottasesfessessurlesexedeChristian.Celui-ciseréveillaaussitôt.Ilavaitl’impressiond’êtredansunrêve,trèschaud,trèssensuel.Quandilréalisaquesonrêveétaitunemerveilleuseréalité,ilneputs’empêcherdegémir.

—Ah!Charles!Continuecommeça.Viens,colle-toipluscontremoi.

Ilinstallasesfessesdefaçonàcequ’ilpuissealleretvenirentreelles.

—Jenevaispasteprendrecematin,ceseraittropdouloureuxpourtoi,maisenrestantainsi,jecroisquel’onvaavoircequel’onveuttouslesdeux.

IlattrapalesexedeCharlesetlemasturbaenmêmetempsqu’ilsedéhanchait.Leurcorpsàcorpsnedurapastrèslongtemps.Christian,levisageenfouidanslecoudeCharlessesentitpartir.Illemorditplutôtbrutalementaumomentdesonorgasme.Charlessursautasousl’effetdeladouleuretduplaisirquis’accompagnadesapropreexpulsion.

—Bondieu,luidit-ilensuite,jevaisavoirunesacréemarquemoi.Commentj’expliqueçaàGeorges,monmajordome?

—Tuesduc,tun’asrienàexpliquer.

Ilembrassalesmarquesqu’ilavaitlaissées,plutôtfierdelui.

—C’estàtafemmequetuvasdevoirdonnerdesexplications.

Charlesseretournaetneputs’empêcherderiredevantl’airsatisfaitdeChristian.

—Aucunrisque,elleestpartiehierchezsesparents.Jenelareverraiquedansquinzejours,minimum.Etpuisdetoutemanière,jenevaisplusdanssonlitdepuisnotrenuitdenoce.Elles’estretrouvéeenceintedèscettepremièrefois.

—Tunefaispasl’amouràtafemme?

—Jamais,cettefemmeestunvéritableglaçonambulant.Rienquedel’approcher,jesuisgelé.

—Etcommenttufaispourtesbesoinsintimes.Tuasunemaîtresse?

—Non,quandjevaisàLondres,unefoisparanàpeuprès,jemesoulagedansunemaisonclose.

—Eh,tun’aspaspeurd’attraperdesmaladies?

—Cen’estpasn’importequellemaisonclose.Latenancièrenousobligeàmettredescapuchonsfaitsàbasesdeboyauxdeporc,avanttoutrapport.Çaluiévited’avoirdesfillesmalades,etlesclientssontsatisfaits,carainsieux-mêmesneramènentrienchezeux.

—Alors,sijecomprends,tunefaisl’amourqu’unefoisparan?

—Non,jebaiseunefoisparan.Avanttoi,jen’avaisplusfaitl’amourdepuisdixans.

Christiansouritdevantcettenuance.

—Bon,Monsieurleduc,ilestpeut-êtretempsqueturetournesauchâteau.Avecunpeudechance,tupourrasrejoindretachambresansrencontrergrandmonde.Maisavant,nousallonsnousbaignerdanslelacetensuitejetemettrailapommade,dontjet’aiparléhier.

Leursablutionsfaites,lederrièredeCharlessoigné,ilsseséparentsurunlongbaiseretaveclacertitudedeserevoirlesoirmême.

Charlesrentraauchâteausansrencontrerâmequivive.Lespremiersdomestiquescommençaientseulementleursjournéesetilsavaientbiend’autreschosesàfairequedesepréoccuperduretourdesibonmatindel’undesinvités.IlrejoignitsachambreoùGeorges,endormidansunfauteuill’attendait.

—Georges,réveillez-vous.Jesuisrentré.

—Ah,Monsieurleduc!Vousallezbien?

—Trèsbien,Georges,maisvousn’auriezpasdûm’attendre.Allez-vouscoucherdansvotrelit,jevaism’occuperdemoi-mêmecematin.

—Vousêtessûr?

—Certain.Allez,filez,jeneveuxpasvousrevoirdelamatinée.

Aprèssondépart,Charlesn’eutpasenviedeserecoucher.Ilsechangea,etneputempêcheruneexpressiondedégoûtensentantl’odeurdelapommadedeChristian.Maisilavaitraison,elleluifaisaiténormémentdebien.

Ildescenditensuiteàlasalleàmangeroùpersonnen’étaitencoreattablé.Lesserviteursavaientdéjàinstallélanourriture.Ilseservitgénéreusement.Ilavaittrèsfaimcematin.

Leducarrivadoucement,etobservasoninvité.Celui-ciavaitl’aird’êtretrèsdétenduetchoserarissime,ilsouriait.Ilétaitégalementsûrdel’avoirentenduchantonner.Ils’approchadeluientoussant.Charlesrelevalatête,etsouritchaleureusement.

—Bonjour,monami,vousavezl’airenpleineformecematin?

—Jevaistrèsbienetj’aisurtouttrèsfaim.JesuisrentrétardhierdechezChristian,etjen’aipasmangé.

—Ettouts’estbienpasséaveclui?luidemandaleduc.J’aifaillivenirvousrejoindre,maismafemmem’aconvaincudevouslaisserréglertoutça.

—Çavatrèsbien.Nousavonstrouvéunstatuquo.Pourlebiendenosfamillesetdenosjeunesfiancés.

—Parfait!Nousallonspouvoirorganisercemariagedefaçonsereine.Ilvavenirdîneravecnousce

soir?

—Oui.Ilétaitdésoléd’avoircontrariéladuchesse.

—Ill’acontrariesouvent.Lapremièrefois,c’estlorsdesonarrivé.Mafemmevoulaitabsolumentquecejeunegarçonviennevivreavecnous.Ilarefusécatégoriquement,nousmenaçantdenousreprendrelesfillesetdepartir,sinousnelelaissionspasvivresaviecommeill’entendait.Ellen’endormaitpasdelanuitdelesavoirtoutseuldanscettemaison.

—Ilatoujourseuducaractère.Quandsonpèreaétéaccusé,iln’apashésitéàsedresserfaceauroipourprendresadéfense.C’étaittrès…impressionnant.

—Oui,j’imagine.Vousrepartezdanstroisjours,c’estcela?

—Oui,bienquejeseraisrestépluslongtemps.

—Qu’est-cequivousenempêche?

—Monfils.Ilestavecsanounouetmamère,maisilmemanqueénormément.

—Ilaquelâge?

—Troisansetdemi.Ildoitcommenceràs’ennuyer.J’ail’habituded’allerlerejoindredanssanurserypourjoueraveclui,l’emmenerpromener.Jeluifaismêmelalecturelesoir,avantqu’ilnes’endorme.

—Ilfaudral’amenerlaprochainefois.

—Oui,jevousremercie.

Ilsfurentinterrompusparl’arrivédeHansetd’Éloïse,suivitdeMarie.

—Bonjour,papa,bonjour,Monsieurleduc,leurdit-elleenfaisantunerévérenceimpeccable.

—Bonjour,mafille,réponditleduc,alorstuasdécidédeveniravecnous,fairecettepromenadeàcheval?

—Oui,j’aiconvaincumamand’annulerlescourspouraujourd’hui.J’espèrequeChristianm’aurapréparéLili.

—Liliestvotrejument,Marie?demandaCharles.

—Oui,Christianmel’adonnépourmesdixans.Elleesttrèsgentilleettrèsbelle.Alors,celas’estbienpasséavecluihiersoir?

—Vousêtesaucourantdemavisitechezvotrefrère?

—Ilyapeudechosequim’échappeauchâteau.

—Alorsoui,celas’esttrèsbienpassé.

IlregardaHansetÉloïsequil’écoutaitattentivement.

—Nousavonsdécidét’enterrerlahachedeguerre.Votremariageesttrèsimportantpourlui.IlsouhaitequevoussoyezheureuseÉloïse.

—Jesais,ilsefaittoujoursdusoucipournous.Monfrèreesttrèsraisonnable,quandonsaitleprendre.

—Alorsj’aidûdirecequ’ilfallait,carilaététrèsraisonnable,sourit-il.

—Tantmieux.Celamerassure.Jevaisallervoircequefaitmaman,vousparteztoutdesuite?

—Dèsquetoutlemondeafinidedéjeuner,réponditleduc.Hans,asseyez-vousetmangez.Éloïse,disàtamère,quesiellecommenceàfairelesinvitations,nousavonsdécidéehierd’unmariageintime.

—Jepeuxtoujoursluidire,maisaufinal,elleferacequ’ellevoudra,réponditÉloïseenriant.Àtoutàl’heuretoutlemonde.

Aprèsledéjeuner,quandilssortirent,Christianétaitdéjàlà,etavaitamenéquatrechevaux,prêtsàêtremontés.Ilpritsasœurdanssesbras,l’embrassaetlahissasursajument.

—Tuévitesdetroplapousser,Marie,elleestunpeufatiguéeencemoment.

—JesaisChristian,jelesens.

—Ouijesais,luirépondit-ilensouriant.Hans,jevousaipréparéVigo,ilesttrèsdoux,maisquandildémarre,onnepeutplusl’arrêter.Monsieurleduc,jevousaipréparéBlaicky,commed’habitudeett…vousCharles,jevousaiscelléprincesse.Elleestassezfougueuse,faiteattention.

—MerciChristian,tu…,vousnenousaccompagnezpas?

—Non,j’aibeaucoupdetravail.Maisjeserailààvotreretour.

—Tumangesavecnouscesoir,Christian!

—Oui,Monsieurleduc.Jeserailà.

Ils’approchadeCharlesquandcelui-cimontasursoncheval.Alorsquelestroisautrescommençaientàs’éloigner,ilretintlecheval.

—Tun’aspasmal?demanda-t-ild’unevoixbasse.

—Non,tapommadeestmagique.Jecroisquecesoir,jeseraisenpleineforme.

—Bien,trèsbien.J’aipleind’idéescoquinespourtoi.Essaiedetrouverunprétextepourpouvoirpartiravecmoi,aprèslerepas.Etn’enfaitpastrop.TugalopesDOUCEMENT.

Charless’éloignaenriant.

—Etbien,luiditHans,ilyalongtempsquejenet’aipasvurire.Quet’aracontéChristian?

—Rien,ils’éloignalesourireauxlèvres.

HanssetournaversleducquiregardaitCharleségalementavecétonnement.

—Jenesaispascequ’ilssesontdit,maisvisiblement,leursrapportssesontaméliorés.

—VotrefrèreetChristianontbeaucoupplusdechoseencommunqu’ilsnelepensaient,etjecroisqu’ilsl’ontdécouvert.Tantmieux,celasoulagetoutlemonde.

—Oui,Éloïseseraraviequandjeluidiraisqu’ilss’entendentsibien.

Lajournéesepassatrèsbien,avecunCharlesagréable,souriant,plaisantantsurtoutetrien.LeducetHansleregardaientsouventbizarrement.Marieétaitravied’avoirunauditoirepourécoutersesprojetsd’avenir,sessolutionspouraidersonpèreetsonfrère.Charlesserenditcomptequelajeunefilleétaittrèsintelligenteetqu’elleavaitbienl’intentiondetravaillerplustarddansl’exploitationfamiliale.Leducécoutaitégalementsafilleavecattention.Iln’étaitpascontresonaide,maispréféreraitquesaplusjeunefillesuivelespasdesasœuraînée,tombeamoureuse,semarieetleurfassedespetitsenfants.

IlsramenèrentlesanimauxdirectementauxécuriesoùChristian,malgrésondésirdepasserunmomentaveceux,seretrouvaobligédes’occuperd’unanimalnerveux.Ilsremontèrentauchâteauàpied.

Aprèsleurretour,Charlesretournadanssachambrepoursereposer.Georgesluifitmonterunbainetfutsurprisendécouvrantlatracedemorsurequ’ilarboraitdanslecou.

—Vousnel’aviezpashier?

—Heu…non.

Ilnerajoutarien,sesouvenantdesparolesdeChristian.Ilétaitduc,iln’avaitpasd’explicationàdonner.

Georgescompritqu’ilneluidonneraitpasplusdedétailsetsetut.Mais,ilimaginaitpleinsdescénariospourcomprendrecommentsonducavaitpusefairemordrelecou.Aucunn’ayantunrapportavecChristian.

Ilpassaensuitesonaprès-midiavecleducetHans.Ilsdevaientmettreaupointlecontratdemariage.Hansnevoulaitrienvenantduducetcelui-cidutsefâcherpourluiimposerladotqu’ilavaitprévuepourlajeunefille.IlleurfitsavoirégalementqueChristianavaitaccumuléunjolipéculepourÉloïse,maisquecetargentresteraitaunomexclusifdelajeunefille,quipourraitenfairecequ’ellevoudrait.Hansn’ytrouvarienàredire,aucontraire,ilétaitheureuxdesavoirquesafuturefemmeauraitsonindépendancefinancière.

Charless’étonnaqueChristian,leplusprocheparentd’Éloïse,nesoitpaslà,maisleducluiexpliquaqu’illuifaisaitcomplètementconfianceetqu’ilapprouveraittoutcequisedéciderait.L’heuredurepasapprochait,quandilssemirenttouslestroisd’accordetquelespapiersfurentsignés.Lorsqu’ilsarrivèrentàlasalleàmanger,Christianétaitdéjàlà,enpleinediscussionavecÉloïseetladuchesse.

—Quesepasse-t-il?demandèrent-ilsàMarie,quiattendaitensurveillantsonfrère.

—IlsembleraitquemamanaunpeudépassélebudgetqueChristianavaitcomptédépenserpourlemariage.Etiln’estpascontent.Pasdutoutmême.

—Jevaisallerlesvoir.

IlserapprochaetsemitàcôtédeChristian.

Illuipassadiscrètementsamaindanssondos.Christiansetournaversluietluisourit,malgréleplidecontrariétéquiplissaitsonfront.

Unsourireheureux,séducteur,pleindepromesse.

Laduchesses’étonnaenvoyantcesourire.Ellenefitaucuncommentaire,maisobservalesdeuxhommesdiscrètement.

LeducavaitbienvuaussilegestedeCharles.Finalement,celanel’étonnamêmepas.Mêmes’iln’étaitpaspourlesrapportsentrepersonnedumêmesexe,ilsavaitquecelaexistaitetsavaitégalementqueChristiannefréquentaitjamaislesfemmes.Ilenavaittirélesconclusionsquis’imposaient.Ilenavaiteuconfirmationunsoirqu’ilserendaitchezluiàl’improviste.EnentendantdesvoixchezChristian,ilavaitregardéparlafenêtreetl’avaitvuembrasserunladdepassage.Iln’avaitrienditàpersonne,mêmepasàsafemme.

Cequil’étonnaitleplus,c’étaitqueCharlesfutcommeChristian.Jamaisiln’auraitpenséceladelui.

—Quesepasse-t-il?demandaCharles.

—Masœuretladuchesseontunelistedeplusdetroiscentspersonnesàinviter.Jevoulaispayerunepartiedumariage,maislàcommentjefais?Jen’aipaslesmoyens!Jepourraisjustepayerlarobedemarié,lesvêtementsdeMarieetpourseulementunevingtained’invités.Cen’étaitabsolumentpasprévucommeça.

—ÉcoutezChristian,jenevaispasmarierÉloïseencatimini.ElleestunedeSaxe.Vousêteslesdescendantsd’unedesplusvieillesfamillesdupays.Quoiqu’ilsesoitpasséilyadixans,etexcusez-moiCharles,maismonmariquiaconnulecomteintimement,estabsolumentcertainqu’iln’apaspufairecedontvousl’avezaccusé.Donc,jedisaisquejeferaitoutpourqu’Éloïseaitlemariagequiluiestdû.Unpointc’esttout.

Ellepartitrejoindresonmarilaissantlàlesjeunesgens.Christiancompritqu’ilnepourraitrienfairecontreladuchessequiavaitprissadécision.

Charlesétaitsurpris.Ilcomprenaitmaintenantpourquoileducetladuchessenel’avaientjamaisinvité

avant.Ilcomprenaitégalementpourquoi,ilsavaientrecueillilesenfantsaprèsledrame.CharlesregardaChristian.

—Jepeuxt’aidersituveux?

—Comment?

—Etbienjeteprêtecequitemanqueettupourrasmerembourserquandtuveux,petitàpetit,ouendeuxoutroisfois.Enfin,c’esttoiquiverras.

—MerciCharles,maiscen’estpascommeçaquej’avaisprévuleschoses.

—Vousvoustutoyezmaintenant?demandaHansétonnédevantl’évidentecomplicitédesdeuxhommes.

—Ilsontledroit,s’agaçaÉloïse,quin’avaitrienperdudeleurapparentecomplicité.Tun’aspasàt’enmêler.

—Maisjen’airiendit.

—Oui,etbiencontinuecommeça.Bon,Christian,tuvasaccepterlapropositiondemonfuturbeau-frèreoupas?

—Ilfautquel’ondiscute.

—Aprèslerepas,nousendiscuteronstranquillementcheztoi.Çateva?

—Parfait.Jevaisemprunterunebonnebouteilledeportoauduc,etjetesaouleraispourquej’obtiennecequejeveux.

Charlesricana.

—Pasbesoindemesaoulerpourça,luirépondit-ilenluifaisantunclind’œil.

—Vousêtesvraimentbizarretouslesdeux,leurfitHansquiavaitsuivileuréchange,tunetrouvespasÉloïse?

—Maisnon,tutefaisdesidées.

LajeunefillesavaitexactementpourquoiHanstrouvaitl’attitudedesdeuxhommesbizarres.Elleconnaissaitdepuismaintenantdeuxans,lesecretdesonfrère.Elleavait,cejour-là,accompagnél’unedesfemmesquifaisaitleménagerégulièrementchezChristian.Ilétaitpartiechezlefilsaînéduducàcemoment-là,etavaitoubliédefermerlaportedelachambresecrètedesamaison.Ellecompritsanstropdemalàquoielleluiservait.Surlatabledenuit,unhommeavaitlaisséunmessage,leremerciantpoursesbonssoinsetquil’appelait“monbelamant”.Choquéesurlecoup,elleavaitprislalettreetl’avaitdéchiréeenmillemorceaux.Etpuis,elleétaitressortieetavaitbrûlélesmorceauxdanslacheminée.Enlesregardantseconsumer,elles’étaitpromitdegarderlesecretdeChristianpourelle.Quoiqu’ilfassedanssavie,ellel’aimaitetsouhaitaitqu’ilsoitheureux.

Lesquatrejeunesgenss’installèrentdanslesfauteuilspourapprécierlecognacduduc.

—Alors,demandaleduc,vousaveztrouvéunesolution,carmachèrefemmenecéderasuraucunpoint?

—NousallonsendiscutercalmementchezChristian,cesoir,luiditCharles.Jepensequenoustrouveronsunterraind’entente

—Jen’endoutepas.Bonpassonsàtable,maintenant.

Lerepasfutconvivial.Maries’étaitjointeàeux,etchacunputappréciersonsensdel’observationetsesreparties.

—Jecomptedonnermonbaldanstroissemaines,sicelavousagrée,leurditCharlespendantunmomentoùMarieavaitlabouchepleine.J’espèrequevousmeferezl’honneurd’arriveraumoinsdeuxjoursavantetquevousresterezquelquesjoursensuite.

—Troissemaines,ceneserapastropjustepourtoutpréparer?Votrefemmeetvotremèreaurontletemps?

—Mamèresansaucundoute.Mafemme,jenepensepasqu’elleparticipeàl’élaborationdubal.Ellen’estpastrèsdouéepourça.

—Nousnepouvonspasêtredouéspourtout,répliqualaduchesse.

—Leproblèmeavecmafemme,c’estqu’ellen’estdouéepourrien.

—C’estunpeudurCharles,luiditHans,ellet’aquandmêmedonnéunbeaugarçon.

—Oui,c’estvrai.RendonsàCésarcequiappartientàCésar.Monfilsestmagnifique.

—Quelestsonprénom,jenem’ensouvienspas?demandaladuchesse.

Charleseuunmomentd’hésitationetregardaChristian.

—Christian.

—Oui,réponditcelui-ci.

—Non,monfilss’appelleChristian.

L’étonnementsevit,surlesvisagesdeseshôtes,d’ÉloïseetbiensûrdeChristian.Hansquin’avaitjamaisfaitlarelationentrelesdeuxprénoms,mitlespiedsdansleplat.

—C’estbizarre,leurdit-il.Monfrèreaappelésonfilsdumêmeprénomquelefilsdel’hommequia…

Devantleregardfuribonddesonfrère,duduc,deChristianetd’Éloïse,ilsetutetcachasonvisagedanssaserviette.

—Jen’airiendit,jen’airiendit,murmura-t-il.

—C’estbienquevousl’ayezappeléChristian,intervintMarie,s’ilestcommemonfrère,vousneleregretterezjamais.

LesparolesdeMariedétendirentl’atmosphère.

—Quandmonfilsestné,jenesavaispasquelprénomluidonner.Mafemmevoulaitquejel’appelleGeorges,commesonpère,maisc’estlenomdemonvalet.Mamèrevoulaitquejel’appelleÉdouard,maisfranchement,iln’avaitpasunetêted’Édouardetdeplus,c’étaitlenomquej’auraischoisisi….Etpuis,jemesuissouvenud’unjeunegarçonquiavaitdéfendusonpèrecontreventsetmarées.Ilm’avaitbeaucoupimpressionné,malgrélescirconstancesetj’aisouhaitéquemonfilsportelemêmeprénomquecejeunegarçon.Jevoulaisqu’ilsoitaussi…combatifquetoi,dit-ilensetournantversChristian,s’ilm’arrivaitquelquechose.

—Ehbien,malgrétout,jenet’aipaslaisséquedemauvaissouvenirs,ditChristianvisiblementému.

—Bon,pourenreveniraubalquevousallezorganiser,quandvoulez-vousquel’onarriveprécisément.

—Jepensaisquevouspourriezarriverlejeudi,danslajournée,cequivouslaisseraletempsdevousinstaller.Etvousnerepartiriezquelemercredioulejeudid’après.Cequinouslaissera,jepenseassezdetempspourfinaliserlesdernierspréparatifsdumariage.

—C’esttoutàfaitfaisable.NousviendronsavecMarie,biensûr.

—Jen’avaispasimaginécettesemainesansMademoiselleMarie.Donc,jevousprévoislescinqmeilleureschambresdemonchâteau.

—Pourquoicinq?demandeHans.Leducetladuchesse,toutlemondesaitbienqu’ilsdormentensemble,unechambrepourÉloïseetunepourMarie.Çafaitquatre.

—Tulefaisexprèsouquoi?demandaÉloïsepassablementénervée.EtChristian,ilvadormiroù.Danslagrange?

—Ohpardon!JenesavaispasqueChristianétaitinvitéaussi.C’estvraiquoi,expliqua-t-ildevantlevisagefurieuxdeCharlesetd’Éloïse,ilyaàpeinetroisjours,ilsnepouvaientpassevoir,etlà,Charlesdevraitl’inviteràcebal.Celaneluirappelleraquedemauvaissouvenirs.Nonvraiment,Christian,jevousaimebeaucoup,maismonfrèrecommenceseulementàrireetàsouriredenouveau,jeneveuxpasquequiconquegâcheça,etsurtoutpasvous.

—Hans,jet’assurequeChristianestlebienvenuechezmoi.Jesaisquetut’inquiètespourmoi,maisiln’yaaucuneraison.

—Bon,bond’accord.AlorsChristian,vousêteslebienvenuaubal,etilnousfaudrabiencinqchambres.

—Tunedevraispast’occuperdeschambresHans,laissetonfrèrelefaire.

—Pourquoimedis-tuça?Ilfautcinqchambresnon?

—Oui,ouimonchéri.Cinq,quatre,quelleimportance?

—JenecomprendsrienàcequetumedisÉloïse.

—Cen’estpasgrave,unjourjet’expliquerais.

CharlesetChristianregardèrentlajeunefilleavecétonnement.Pouvait-elleêtreaucourantdeleurrelationnaissante?Impossible!

Lerepasterminé,CharlesetChristians’échappèrentassezvite.

Hans,ÉloïseetMarieallèrentsecoucher,laissantleducetladuchesseseuls

—CharlesetChristian,c’estbiencequejecrois,Edmond?

—Tucroisquoi,Victoria?l’interrogealeduc.

—Etbientusais,ilsontunerelation.

Etdevantlemutismedesonmari,elleinsista.

—Ilsontunerelationdecouple.Ilscouchentensemble.

—Oui,ilssembleraientquecesdeux-làsesoientbientrouvés.

—Commentest-cepossible?Enfin,jesaiscequidoitsepasser,maiscommentCharlespeut-ilêtrecommeça?JemedoutaispourChristian.Toiaussi?

—Jelesaisdepuisunmomentdéjà.Jel’avaissurprisunjourchezluiavecunautrehomme.Ilnem’apasvu,doncilnesaitpasquejesais.

—Tunemel’avaisjamaisdit!

—Cen’estpaslegenredechosequel’onditàsafemme,monamour.

—Peut-être,maiscommentexpliques-tulesoudainchangementdeCharles?

—Tusais,d’aprèscequej’aientendudire,leshommesoulesfemmesquisontainsi,nepeuventpasyfairegrand-chose.Ilsnepeuventquevivreleurviediscrètement,oùrenonceràcequifaitleurvraienature.Certainsaimeraientquecesoitunemaladie.D’ailleurs,beaucoupsonthospitalisésdansdesasiles,pourlessoigner.JepensequeCharlesatoujourseucettetendance,maisqu’ill’adécouverteavecChristian.Ils’estmariéjeune,trèsjeunepourungarçon.Iln’ajamaiseuletempsd’explorersesbesoinsintimes.Etaprèsledécèsdesafemme,ilavécuseulpendantunmoment,ceconsacrantàsademeureetensuite,ils’estremarié,pourdonnerunhéritieràsonduché.D’ailleurs,leprénomdesonfilsmontrequ’iladûêtretrèsimpressionnéparnotreChristianàl’époque.Jemedemandejusqu’àquelpoint?Enfinbref,jem’inquiètepoureuxdeux.Sicen’étaitqu’uneliaisonpassagère,jenem’enferaispas.Maisvule

contentieuxqu’ilyavaitentreeux,ilestévidentquec’estplusqu’uncoupdefolie.Maistoi,mafemmetun’aspasl’airsichoquéequeça?

—Sibiensûr,jenecomprendspasleplaisirqu’ilsdoiventéprouver,maissicelalesrendheureux,queveux-tuyfaire?

—C’estsûrquejen’aijamaisvuCharlescommeça.Lesfoisoùj’aipulecroiser,ilm’avaittoujoursparutristeetguindé.Ettul’asvuaujourd’hui,onauraitditquel’onvenaitdeluioffrirleplusprécieuxdestrésors.Bon,assezparlerd’eux.Vienslà.J’aidesprojetspournous.

Ilenlaçasafemmeetl’embrassa.

CharlesetChristiannesedoutaientpasqu’ilsfaisaientl’objetdebiendessuppositionsauchâteau.Enferméstouslesdeuxdanslachambresecrète,CharlesdémontraitàChristianqu’ilnesouffraitvraimentplusdesoninconfortdelaveille.Assissurlejeunehommeprofondémentancréenlui,iloubliaittout,saufleplaisirqu’ilrecevaitetqu’ildonnait.

CHAPITREVII

Charlesattendaitsesinvitésavecimpatience.Celafaisaittroissemainesqu’ilétaitrentrédechezleducetladuchessedeBoigel.Iln’enpouvaitplus.

DireaurevoiràChristian,ensachantqu’ilsresteraientunmomentsanssevoiravaitétéunedéchirure.Lejeunehomme,pourleurdernièrenuitensemble,luiavaitdonnétantdeplaisir,qu’ilseréveillaitlanuitensueuretexcitécommejamaisilnel’avaitété.

Iln’avaitpasencoreannoncéàsamèrelevrainomdelafiancéedeHans.Etcommesafemme,rentréelaveille,neluiadressaitpaslaparole,cen’étaitpasparelle,qu’elleauraitpul’apprendre.Iln’enavaitpasvul’utilitésurlemoment,redoutantdelapartdesamère,desrécriminationsetdesexplicationsqu’iln’avaitpasenviededonner.Sonfilsdanslesbras,illesattendaitsurleperrondesonchâteau.IlvitarriverenpremierHansetChristian,touslesdeuxàcheval.Soncœurbondit,quandilvitsonamantarriveraugalop,Hansletalonnant.Ilarrivalepremierets’arrêtajusteenbasdesescaliers.Charlesdescenditlesquelquesmarches,redoutantunpeucesretrouvailles.EtsiChristianavaitchangéd’avissurleurrelation?Tandisqu’unjeunegarçonattrapaitlesrênes,Christiandescenditetsedirigeaverslui.Sonregardétaitsanséquivoque.Illevoulait.

Charlessedétenditinstantanément.Sonfilssecontorsionnapourêtreposéausol.IlsemitdevantChristianpourledétailler.

—Ilestbeaulecheval,luidit-il.

Lejeunehommesebaissapourêtreaumêmeniveauquelepetitgarçon.

—Oui.Tuesdéjàmontésuruncheval?

Lepetitsetournaverssonpère.Commecelui-cisouriait,ilsesentitrassuré.

—Non.Papaneveutpas.

—Jeteprendraisavecmoi,situveux,commecelapapanedirarien.

—Ohoui!Tuveuxbien,papa?

—Onverra,plustard.BonjourChristian.

Illuiprésentasamain.

—BonjourCharles.

Christianpritsamainetlaserrabienfort.

Lesyeuxdanslesyeux,ilsneserendirentpascomptequelecarrossearrivaitàcôtéd’eux.Hans,donnaunegrandetapedansl’épauledeChristian.

—Jet’aipresquebattu.

—Oui,presque.

—Ehbébé,viensdirebonjouràtontonton.

Hanspritlepetitgarçondanssesbras.

—Cequetuasgrandi.IlestmagnifiqueCharles.

—C’estvrai.

CharlesdétournadifficilementsesyeuxdeChristian.Ilallaensuiteouvrirlaporteducarrosseetleducendescenditaussitôt.

—Charles,jesuisbiencontentd’êtrearrivé.Commentallez-vous?

—Trèsbien,merci.Bonvoyage?

—Avecdespipelettescommej’enai,ilnefutassurémentpasennuyeux.

—Arrêtedediredesbêtisesetaide-moiàdescendre,l’interrompitladuchesse.

Charlesseprécipitapouraiderladuchesse.Ellel’embrassasurlesjoues,créantl’étonnement.

—Charles,votrechâteauestmagnifique.Allezlesfillesdescendez.

Trèsheureusesdedescendre,ellesn’attendirentpasquequelqu’unlesaide.

—Laprochainefois,jeviensàchevalaussi,ditMarieaprèslesembrassadesdebienvenu.J’auraisétémieuxàgaloperàcôtédeChristianetdeHans,qu’àécoutermamanetÉloïseparlerdumariageetdubal.

Sonpèreapprouvaparunmouvementdetêteetenlevantlesyeuxauciel.LepetitChristiantrouvatrèsvitedesbraspourleporter.LesfemmesdelafamilledeBoigelletrouvèrentadorable.Celui-cinesefitpasprierpourembrasseretêtreembrasséàtourdebras.CharlesnecessaitderegarderChristian,sedemandantquandiltrouveraitletempspourl’accueillircommeilenavaitenvie.Pendantquelesmembresdupersonneldéchargeaientleurbagage,ilsentrèrenttousdanslechâteau.LamèredeCharleslesattendait.

—Maman,jeteprésenteleducetladuchessedeBoigel.Éloïse,MarieetChristian.

—Jesuisravidevousaccueillir.Jevousaifaitpréparerleschambres.Vousdevezêtrefatigués.Désirez-vousvouschangermaintenantouvenirprendreunepetitecollationavant?

—Jeprendraisvolontiersquelquechoseàboire,réponditladuchesse.Noussommespartisdel’auberge

cematintrèstôtetnousn’avonsrienbu,nimangédepuis.Christiannousainterditdedescendreavantd’êtrearrivé.Etjevousavoueraisquej’aibesoindefairematoilette.

—Ohoui,moiaussi!s’exclamaMarie.

—Veuillezmesuivre,Mesdames,leurditlamèredeCharles,leshommesneserendentpascomptequenouslesfemmes,n’avonspaslesmêmesbesoinsqu’eux.

Charleslesemmenadansunsalon,oùlacollationavaitétéserviedèsquelecarrosseavaitfranchilesgrillesduchâteau.Illaissaentrerd’abordleducetHansetretintChristiandiscrètementpaslamanchedesonveston.

—Dansdixminutes,tusorsetjeterejoinsderrièrecetteportelà-bas,luidit-ilenlaluidésignant.C’estmonbureau.

Christianfitunsigned’assentiment.Charlesneputs’empêcherdeluicaresserledos,quandilpassadevantlui.

Lesfemmesrevinrentetcefutdansunjoyeuxbrouhaha,qu’ilsprirentleurcollation.ChristianattenditlesdixminutesprescritesparCharles,pours’excuseretsortit.Ilentradanssonbureauetattendit,pastrèslongtemps.Charlesfutàpeineentréqu’ilseretrouvadanslesbrasdesonamant.

—Bondieu,quetum’asmanqué,disaitChristianentredeuxbaisers.

—J’aicomptélesjours,lesheures,lesminutes,luiréponditCharlestoutaussifougueux.Ohbonsang,j’aienviedetoi,Christ!Jeveuxquetumeprennes.J’enairêvélanuit.

Ilessayaitdedéfairelachemisedujeunehommequilegênait.MaisChristiannelelaissapasfaire.

—Arrête,ilsnousattendent.Nousnepouvonsrienfairemaintenant.

—M’enfou.Jeteveuxenmoi,Christ,s’ilteplaît.Tunemeveuxplus?

—Bondieusi,jeteveux.

Etpourleluiprouver,illeseracontrelui,luifaisantsentirsonexcitation.

—Jeteveuxtellement,situsavais,maispasici.Viensmerejoindredansmachambretoutàl’heure,quandnousallonsmonter.Enplus,j’aiprislenécessaireavecmoi.

Illuicaressalesfesseseninsistantavecundoigtsursonanus.

Charlesgémissaitd’envie,incapabled’empêchersonsexedefrottercontreceluidesonamant.Christiandutlepousserunpeurudement,poursortirdesonétreinte.

—J’yretourne.Calme-toietviensnousrejoindredanscinqminutes.Etrhabille-toiunpeu.Tuasl’airtoutchiffonné.

Ilsemitàriredevantl’expressionconfusedesonduc.

Ilsortitetretournaausalon.Sonabsenceainsiquel’absencedeCharlesn’avaientpasétonnéleducetladuchesse,quiavaientbeaucoupparlé,pourfairediversion.Ilssavaienttouslesdeux,quelesdeuxhommesavaientdûsedonnerrendez-vouspoursesaluercommeilsenavaientenvie.Etl’airdeChristianquandilentra,leleurconfirmèrent.EtcelafutencoreplusflagrantquandCharlesrevint.Ilavaitleslèvresrouges,lesyeuxbrillantetn’arrivaitpasàcachersonénervement.Ilgesticulaitdanstouslessens,sonregardtoujoursdirigéversChristian,quisouriaittrèssatisfaitdel’effetqu’ilfaisaitàsonamant.

—Maisqu’est-cequetuasaujourd’hui?luiditsamère.Assieds-toietprendsunthé.Tumedonneslevertigeàtournerenrondcommeça.

—VotrefemmenenousrejointpasCharles?demandaladuchesseunefoisquecelui-cisefutinstalléetqu’ilaitprissonfilssurlui.

—Non,elledoitdormirencore.Jevaisvousemmenerdansvoschambres,ledéjeunerseraserviàuneheure.Nousnousretrouvonstousici,sicelavousconvient.

Ilselevarapidement,appelalanounoudesonfilspourleluiconfier.

—MaisCharles,nosinvitésn’ontpasfini.

—Maissi,venezsuivez-moi.

—Jenesaispascequ’ila,cematin,maisilestintenable,ditlamèredeCharlesàladuchesse.

—Cen’estrien,l’excitationdubalprobablement.

Leducetladuchessedansunechambre,ÉloïseetMariedanslaleur,ilnerestaplusqu’àmontrersachambreàChristian.Maisildevaitégalementsedébarrasserdesamère.

—Maman,vousdevriezallervoirsitoutsepassebienauxcuisines,jem’occupedemontrersachambreàChristian.Àtoutàl’heure.

Neluilaissantpaslechoix,ellepartitengrommelant.

—Tuesàlalimitedel’impolitesse,Charles,luiditdoucementChristiandansl’oreille.

Ilpassasamainsoussachemisepourluicaresserledos.Charless’arrêtapourprofiterdecettecaresse.

—Continueàavancer,sinonnousallonsfairel’amourdanslecouloir.Etcen’estpascequetuveuxhein?

—Non.

IlemmenaChristiandansunechambre,quisetrouvaitdansl’autreaileduchâteau.

—Tumecachesouquoi?

—Çanevapas!Jemesuisditqu’ici,onpourraitfairedubruit,personneneviendranousdéranger.

—Bienraisonner.

Lachambreétaittrèsbelle,elledonnaitsurl’arrièreduchâteau,devantlelacetétaittrèsbienéclairée.MaisChristiannevitriendetoutcela.Leducsejetasurluidèsqu’ilsfranchirentlaporte.Ilss’écroulèrentsurlelittoutens’embrassant.Leursvêtementsvolèrentautraversdelapièceetilsseretrouvèrentnus,collésl’unàl’autre.Charlesn’enpouvaitplusdelécher,decaresserChristian.SonétatdemanqueétaitflagrantetChristiannefutpaslongàs’insinuerenlui.

—Oh!Christian…tum’astant…manqué.Viens…plusprofond.

Lejeunehommeletirahorsdulit,lemitàquatrepattessurlesoletlepénétraànouveau.

—Ohoui,là!C’estbon!

Latêteentresesbras,Charlesselaissaitcomplètementaller.Ilremuaitlesfesses,venantau—devantdescoupsdereinsdesonamant.

Christianétaitprochedelajouissance.IlagrippaleshanchesdeCharles,pourlefairetenirtranquilleets’enfonçabrutalementplusieursfoisenlui.Charlesneseretintpas,etsansmêmesetoucher,iljouitdansdelongsspasmesinterminablesencriantsonplaisir.LajouissancedeCharlesdéclenchacelledeChristian,quis’affalasurledosdesonamant.

—Ahbondieu!ditCharlespeuaprès.C’esttropbon.

IlserelevaetsevautrasurChristiancouchésurledos.Ill’embrassapassionnément,luiinfligeantdespetitesmorsuressurleslèvres.Sesmainscaressaientsoncorpssansqu’ilpuisses’enempêcher.

—Christian,jeteveuxencore.

Ilsefrottaitcontrelui,faisantréagirlejeunehommedefaçonévidente.

—Alors,àtoidebosser.Faiscequetuveux.

Charlesfrissonnad’anticipation.IlattrapalesexedeChristianets’empaladoucementdessus.Quandilfutcomplètementintroduit,ilcommençaàbouger,d’abordlentement,sesoulevantpourlefaireressortirpresqueentièrementetseréintroduisantenlui,plusprofondémentetplusbrutalement.

—Tuaimesquejefasseça?demandaCharlesd’unevoixrauque.

—Ah…oui.Continue…c’esttrop!Ché…Charles.

—Tupeuxm’appelerchéri,ah…situveux.

—D’accord,maiss’ilteplaît,accélère.Ahoui…Charles,jeviens…

Charlesempoignasonpropresexe.Ilsjouirenttouslesdeuxquasimentenmêmetemps.

—Situmedisqu’aprèsça,tuasencoreenvie,jen’ycomprendsplusrien,ditChristianquelquesinstantsplustard,enluicaressantsonvisagequ’ilavaitposéaucreuxdesonépaule.

—Non,çavaaller.Jepourraisattendrejusqu’àcesoir.

—Encoreheureux.Allez,bouge-toi.Ilfautquenousfassionsnotretoiletteetquenousnouschangions.

CharlesselevaetaidaChristian.

—Laprochainefois,nousferonsl’amourdanslelit.Lesoln’estpasconfortable.

Charlesserhabilla,sousleregardintéressédeChristian,quis’étaitallongésurlelit.

—Tuesvraimentbienfoutupourunduc.Pasunseulbourrelet,debeauxabdominaux,lesépaulescarréesetuncul…Bondieu!Quelcul.Jel’adore.

CharlessedonnaunetapesurlederrièreetsetournaversChristian.

—Tupourraslerevoircesoir,jeviendraisterejoindre,quandtoutlemondeseracouché.

—J’ycomptebien,jenesuisiciquepourlui,dit-ilgoguenard.

Ilsseretrouvèrenttousausalon.LafemmedeCharlesétaitlà,discutantavecladuchesse.Leduc,Charles,HansetChristianfaisaientdesprojetspourl’après-midi.Charlesétaitbeaucouppluscalmequelorsdeleurarrivé.

Leducneputs’empêcherdericanerencomprenantpourquoiCharlessouriaitautant.MêmeAnna,safemmeremarquaitqu’ilétaitparticulièrementdétendu,gaietagréable.IlnequittaitpasChristian,quirecherchaitégalementsaprésencequandils’éloignait.Leducfaillitleurdiredefaireattention,leuramouretleurcomplicitéapparaissaientdanstousleursregardsettousleursgestes.Charlesnes’enrendaitpascompte,maisilletouchaitdèsqu’ilenavaitl’occasion.Unemainsurl’épaule,desdoigtsquisefrôlaient.Christianselaissaitfaire,appréciantlespetitsgestesdesonamant.

Heureusement,personneàpartleducetsafemme,nefirentattentionàeux.

—Tudevraisleurdired’êtreunpeuplusdiscret,chuchotaladuchessedansl’oreilledesonmari,quandilssemirentàtable.

—Etcommentjefaispouraborderlesujet.“Eh,lesenfants,vouspourriezéviterdevouspeloterenpublic.”

—Euh,peut-êtrepascommeça.

—Vousavezunproblème?leurdemandalamèredeCharles.Quelquechosenevousconvientpas?

—Non,non,excusez-moi,jedemandaiscommentMarieavaittrouvésachambre.

Celle-ciquiétaitàcôté,lesregarda.

—Jesuislà,vouspouvezmeledemanderdirectement.

—Oui,excuse-moi,machérie.

—AlorsCharles,vousnousfaitesvisitervosécuries?demandaleduc.

CharlesoccupéàdiscuteravecChristian,qu’ilavaitplacéàcôtédelui,bousculanttouteslesrèglesenvigueur,relevalatête,presquesurprisquel’ons’adresseàlui.

—Euh,oui.Nousironsaprèsdéjeuner.

—NousavonsfinidedéjeunerCharles,luiditsafemme.Vousavezmêmebuvotrecafé.

—Ahoui!Désolé,j’étaisdanslalune.Oui,etbiennousyallons.

Ilselevaetentraînasesinvitésàsasuite,Christianàcôtédelui.Leducdécidad’intervenir,avantqued’autrespersonneneserendentcomptequ’ilyavaitplusquedel’amitiéentreeuxdeux.

IlsefaufilaentreCharlesetChristian,obligeantlejeunehommeàluicédersaplaceetàresterderrièreavecHans.Charlesnefitaucuneffortpourcacherquecettedispositionneluiconvenaitpas.Ilseretournaitsouventetleducsoupira.Ilnepouvaitmalheureusementpasinterdireaujeuneducderegarderderrièreluirégulièrement.

SesinstallationsétaientplutôtmodestesparrapportàcelledesdeBoigel.Maistoutyétaitpropreettrèsbienentretenu.Charlessemblaittrèsanxieuxdesavoircequ’enpensaitChristian.Lejeunehommeaprèsavoirfaitletour,fitquelquessuggestionsàsonducpouraméliorersesperformances.

LeducdeBoigelréussitàresterentreeuxdeuxlaplupartdutemps,maiscenefutpasfacile.Sanss’enrendrecompte,lesdeuxhommescherchaientsanscesseàsemettrel’unàcôtédel’autre,àserapprocher,attiréscommepardesaimants.

Leducdevaitvraimentleurparler.Maiscommentamenerlesujet?

CefutHansquiluipermitdemettrelespiedsdansleplat.Envoyantdeuxétalonsessayerdesemonterdessus,ilsemitàrire.

—HéCharles,ilfaudraitdireàteschevaux,quedeuxmâlesnevontpasensembles.

—Hans,ditleduc,àvotreâge,vousdevriezsavoirquecelaarrive,mêmedanslesmeilleuresfamilles.

—Quoi?demandaHans,oubliantdéjàcequ’ilvenaitdedire.

—Ehbien,quedespersonnessoientattiréespard’autrespersonnesdumêmesexequ’eux.

—Oui,biensûrquejelesais,maisc’estcomplètementcontrenature.

—Quivousaditcela?

Lejeunehommesemitàrire.

—Maistoutlemondeledit,l’église,leshommesdesciences,lesautorités.

—Etvouspensezquecesgens-làontraison?Qu’enpensez-vous,Charles?

—J’avaistendanceàpensercela,àuneépoque,maisjedoisdirequecen’estpluslecas.

—Quoi,Charles!Tupensesquedeshommesquivontavecdeshommes,c’estnormal?

—Normal?Jenesaispas,maisc’estsûrementplusfortqu’eux.

—Ilsn’ontqu’àrésister,assuraHans.

—VoussavezHans,celaleurestprobablementimpossibleetjesuissûr,qu’ilyenabeaucoupplusquevousnelepensez,repritleduc.

—Non,vousvoustrompez,avectoutmonrespect.Personnellement,moi-même,jen’enaijamaisconnu.

—MaisHans,vousnecroyezquandmêmepasquecespersonnesvontvousledire?

—Euh…non,biensûr.

—C’estcertainmême.Cesgens-làsecachent,pourjustementnepasfinirdansunasile,ouêtremisaubandelasociété.Christian,tunedisrien?

—Non,jevousécoute.Jenesavaispas,Monsieurleduc,quevousvousintéressiezausujet.

—Toutm’intéresse,Christian,tudevraislesavoir.Etj’observe,beaucoup.J’aiunehistoireàvousraconter.Ilyaquelquesannées,j’avaisinvitéchezmoideuxamis,quines’étaientjamaisrencontrés.Ilsonteul’unpourl’autre,lecoupdefoudre.Ilsnepouvaientpass’empêcherdeseregarder,desetoucher,devouloirêtreensemble…

—Ilsontfinidansunasile,j’espère,ditHans,faisantseregarderd’inquiétude,ChristianetCharles.

—Non,Hans,ilsn’ontpasfinidansunasile.Etvoussavezpourquoi?

—Non,réponditlejeunehomme.

—Parceque,avantqu’ilsnerepartent,j’aitenuàleurparler.J’aimaisbeaucoupmesamisetfranchement,jetrouvaisqu’ilsallaientbienensemble.Etjeleuraiconseilléd’êtreprudents,trèsprudent,même.

—Vousleuravezditcela?s’étonnaHans.

—Biensûr,jenepouvaispasleslaisserquittermonchâteausanslesmettreengarde.

—Etquesont-ilsdevenus,vouslesavezrevus?demandaChristian,unpeuinquiet.

—Biensûr,ilssonttoujoursensembles,maispersonnen’ajamaissuqu’ilsétaientplusquedesamis.

—Etcelanevouschoquepas?demandaCharles.

—Non,Charles,jen’aipasétéchoqué,etjenelesuistoujourspas.Jepensequel’amourpeutprendredescheminsdifférentsetcen’estpasàmoidedirequoiquecesoit.Siaujourd’hui,cecasdevaitsereprésenter,jediraisencorelamêmechose:Soyezprudent,retenez-vousdevousregardertropsouvent,mêmesivousavezdumal,retenez-vousdevoustouchertoutletemps,gardezpourvousvotreamour.Gardezpourvouscequivouspoussel’unversl’autre,parcequ’unjour,voustomberezsurdespersonnesmal-intentionnées,quivousvoudrontdumal.Vouscomprenezcequejeveuxdire?demanda-t-ilenregardantCharlesetChristian.

—Oui,j’aisaisi,réponditCharles,quis’étaitéloignédeChristiandequelquespas.Ettoi,Christian?

—J’aicomprisaussi.

—Oui,moiaussij’aicompris,intervintHans,maisavouezqueçaseraitvraimentbizarredevoirdeuxhommesoudeuxfemmess’embrasser.

—Vousiriezjusqu’àlesdénoncer,Hans?demandaleduc.

—Non,pasaprèscequevousvenezdemedire,jenesuispassanscœur.Peut-êtrequejeferaicommevous,quej’essayeraideleurparler.Maisfranchement,jepréfèren’avoirjamaisl’occasiondetestervosméthodes,Monsieurleduc.

—Jelesouhaiteaussipourvous,Hans,mais,dit-il,plusbas,vousallezêtreconfrontéàceproblèmeunjouroul’autre.

—Vousmeparlez?demandaHans.

—Non,Hans.Bon,nouscontinuons.

Ilsretournèrentauchâteaupeudetempsaprès.ChristianmarchaitderrièreavecHanstandisqueCharlesétaitdevantavecleduc.Ilneseretournaqu’uneseulefois,pourregardersonjeuneamant.

Charlesdécidad’allerjouerunpeuavecsonfils.

Ilétaitsurprisqueleducaitcomprislarelationqu’ilentretenaitavecChristian.Lesavoirl’avaitconsidérablementrefroidi.Ilauraitpuarrêtertout.Cetteidéeluiavaittraversél’espritunedemi-secondeetill’avaitrejeté,dèsqu’elles’étaitformée.Non,cequ’ilfallaitc’étaitqu’ilsoitplusdiscret,commel’avaitfaitremarquerleduc.Ilétaitvraiqued’avoirlejeunehommeàcôtédeluileremplissaitd’unsentimentdeplénitudeincroyable.Heureusementquepersonned’autren’avaitrienvu.Ilsavaitceque

risquaientleshommesaccusésd’êtredessodomites.Ilpassaunebonneheureavecsongarçon,trèsheureuxd’avoirtoutel’attentiondesonpère.

—Papa,jeveuxmonteràchevalaveclemonsieur,luiditlepetit.

—Oui,jesais,tum’enasdéjàparléaumoinsdixfois.

Lanounou,quisetrouvaitdanslamêmepiècequ’eux,éclataderire.

—Ilesttêtu,Monsieurleduc.Ilmeparledesontourdechevaldepuiscematinsansdiscontinuer.

—Oui,jem’endoute.Dis-moi,monbébé,sic’estpapaquit’emmènefaireuntourdecheval,tuvoudrais?

—Non,jeveuxlemonsieur.Ilal’airgentil.

—Ilesttrèsgentil.Restelà,jevaisvoircequel’onpeutfairepourcetaprès—midi.

—Tuvasoù?

—DemanderàChristian,legentilmonsieurs’ilveutbien…

—S’ilveutbienquoi?entendirent-ilsderrièreeux.

—C’estlemonsieurpapa,ilvam’emmenerfaireuntourdecheval.

LepetitChristians’étaitprécipitéverslegrandettiraitsursonpantalonpouravoirsonattention.

—Tum’emmènes,hein?

—Jeveuxbien,maisqu’adittonpapa?

—Sonpapaaditqu’ilvoulaitbienteprêterpourquetuluifassesfaireuntourdecheval.

—Meprêter?Vraiment?Christianhaussalessourcils,cequifitrireCharles.

—Oui,tuasletempsmaintenant?Ilestdéjàplusdeseizeheures.

—Biensûrquej’ailetemps.

Ilpritlepetitgarçondanssesbrasetlejetaenl’air.Lanounoueutuncridepeur,pendantquelepetitChristianéclataitderire.

—Ildoitpeut-êtremettreuneveste?suggéra-t-ilàCharles.

Lanounouallachercherunmanteauetunchapeauetcefutentrelesdeuxhommes,unemainpourchacun,qu’ildescenditlesescaliers,trèsexcitéd’allerfaireuntouràcheval.Leducetladuchesse,lesvoyantdescendretouslestrois,l’airtrèsabsorbéparuneconversation

importante,nepurents’empêcherdesourire.

—Vousallezoùainsitouslestrois?demandaladuchesse.

—Jevaisfaireuntourdechevalaveclemonsieurlà,ditlepetitenmontrantChristiandudoigt.

—Ilnefautpasmontrerdudoigt,Christian,lerepritsonpère,jetel’aidéjàdit.

—J’avaisoublié.

—Bonnebaladeàcheval,petitChristian,luiditleduc.Àtoutàl’heuremessieurs.

—Àtoutàl’heure.

Christianfitscellersonproprechevaletaprèsêtremontédessus,attenditqueCharlesluiconfiesonfils.

—Faisbienattentionhein!Nevapastropvite,luidit-ilunpeuanxieuxdevoirsontoutpetitgarçonsurcegrandcheval.

—Net’inquiètepas.Jenelelaisseraitomberpourrienaumonde.Etnousn’allonsquedanslemanège,pasplusloin.Tupourrassurveillertousmesgestes.

—J’aiconfianceentoiChristian,luidit-ilenposantsamainsurlacuisse.Jesuisinquiet,c’esttout.

Christianrecouvritlamaindesonamantaveclasienne.

—Jesais.Allezjeunehomme,c’estparti.

Etcefutd’unpaslent,quelesdeuxChristiancommencèrentleurpetitebalade.Ilconduisitlechevaljusqu’aumanège,etcommençaàtourneraupas.Ilfitallersonchevaluntoutpetitpeuplusvitequandlepetitenfitlademande.Ilstournèrentainsipendantunpetitquartd’heure,puisChristiandécidad’arrêter,estimantquec’étaitassezpourunepremièrefois.Lepetitbonhommeessayabiendediscuter,maisilrestaintraitable.Illefitdescendreenletendantàsonpère.Lanounou,quilesavaitsuivis,s’empressaderécupérersonprécieuxpaquet,pourleramenerdanssachambre.Pasrancunier,ilfitdegrandcoucouàChristianquiréponditbienvolontiers.IlconfiaensuitesonchevalàunpalefrenieretrejoignitCharles.

—Ilesttropmignontongarçon.Ilteressemblebeaucoup.

—C’estvrai.Ilamabeautéetmonintelligence.Heureusementpourlui.

Christianricana.

—Jeneferaispasdecommentaire.Celateditd’allerfaireuntourtouslesdeux?

—Où?

—Dansmachambre,luidit-ild’unaircoquinenseléchantleslèvres.

—Jenesaispas.Tuasentenduleductoutàl’heure?

—Oui,ilnousafaitcomprendredenousmontrerprudent.Ledînerestservià20heures,ilestàpeine17heures,çanouslaisseletempsdenousamuserunpeuetd’allernouschangerensuite.

—D’accord,jeterejointsdansdixminutes.Tusaurasêtrepatient?

—Situesenretard,jeviendraistecherchermoi-même,monduc,ettucomprendrasalors,àquelpoint,jenesuispaspatient.

Cefutenriant,qu’ilsfranchirentlesportesduchâteau.

CHAPITREVIII

LamèredeCharlesdevaitlesattendre,carellesortitdesonsalonprivédèsqu’ellelesentendit.

—Charles,jedoisabsolumentteparler.

—Quesepasse-t-il,maman?

—Jedoistevoirenprivé.

—J’allaismontrerquelquechoseàChristian,tunepeuxpasattendrejusqu’àcesoir?

—Non…ohmondieuCharles!Situsavaiscequejeviensdedécouvrir.Cethomme,dit-elleenmontrantChristian,c’estlefilsducomtedeSaxe.Éloïseestsasœur.Ilfautabsolumentempêcherlemariagedetonfrèred’avoirlieu.Ilnepeutpasépouserlafilledel’hommequiatuétafemme.

EllesetournaalorsversChristian.

—Jevousprieraisdequitterimmédiatementcechâteau,Monsieur,vousetvossœursn’yêtespaslesbienvenus!

Ilseredressadetoutesahauteur.

—MessœurssontavecleducetladuchessedeBoigel.Vouslesmettezégalementàlaporte?

—Évidemmentquenon.Maisquandilssaurontquivousêtesvraiment,ilsvousjetteronthorsd’ici,eux-mêmes!

—Mère,calmez-vous.Leducetladuchesseontadoptélesdeuxpetitesfillesaprèsledrameetilssavaienttrèsbienquiellesétaient,ainsiquel’identitédeleurfrère.J’auraisdûvousenparleravant,maisj’aioublié.

—Commentas-tupuoublier?Votresœurn’épouserajamaismonfils.Votrepèreétaitunperversetjesuissûrquevousetvossœursluiressemblez!

—Jevousinterdisdeparlerainsidemonpèreetdemessœurs!cria-t-il.Soit,vousvousexcusezsur-le-champ,soitnouspartonsimmédiatement.

—Jamais,jenem’excuseraisauprèsdevous,misérable.Vousavezosédirequemachèrebellefilleétaitunecatin.Jamaisjenel’oublierais.Elleétaitlaperledemavie,etnonseulementvotrepèrel’atué,maisvousavezosébafouersamémoire.Sortezdechezmoi!Immédiatement!

—Mamanstop!Christianrestelà,ditCharlesenleretenantparlebrasalorsqu’ilallaitpartir.

—Maman,toutcequiaétéditsurSophieétaitvrai.Machèrefemmecouchaitavectoutcequiportaitpantalon.L’enfantqu’elleportaitn’étaitpeut-êtremêmepasdemoi.Jen’aijamaisvouluvousledire,carvousl’aviezmisesurunpiédestal,commemoid’ailleurs.Maisilesttempsquevoussachiezlavérité.Ellenem’ajamaisétéfidèle.Jenesuismêmepassûrqu’ellefûtviergeànotremariage.Mais,commejen’avaisaucuneexpérience,jenemesuispasposélaquestion.

—Cen’estpaspossible.MapetiteSophien’étaitpascommeça.

—Venezmaman,nerestonspasici.

Ill’entraînaverssonsalonetlafitasseoir.Ilservitunverredecognac.Laduchesseétaittrèspâle.Christianvintprèsd’elle,luipritlamainetluiparlacalmement,luiracontantunecomptinedesonenfance.Ellesecalmaetleregardaensuiteétonné.

—Quem’avez-vousfait?

—Riendemal,jevousaijustecalméunpeu,j’avaispeurquevousnetombiezdanslespommes.

—Ah…euh,merci.Charles,commentpeux-tuêtresûrpourSophie?

Ilritjaune.

—Commejen’avaispasvraimentenviedemeremarier,leroim’aconvoqué,environunanetdemiaprèssamort.Tutesouviens,commemoi,qu’ilaimaitbeaucoupSophie?

—Nemedispasqueleroiet…

—Non,riend’aussiscabreux.Mais,ilm’adittoutcequisedisaitsurmafemmequandellevenaitdanslacapitale,seule.Jenevoulaispaslecroire,maisdevantcertainespreuvesqu’ilm’aavancées,jen’aieuqu’àm’incliner.

—C’estàcemomentquetuasfaitenlevertoussesportraits?

—Oui,jenevoulaispluslavoir.Nousnousconnaissionsdepuisnotreenfance.Biensûr,cen’étaitpaslagrandepassionentrenous,maisjepensaisqu’ilyavaitquandmêmebeaucoupd’amouretderespect.Etc’estcequim’afaitleplusmal.Savoirqu’ellen’avaitjamaisrespectélenomquejeluiavaisdonnéetsurtout,qu’ellenem’avaitjamaisrespecté.

—Monpauvregarçon,tuauraisdûm’enparler.

—Jepréféraisvoussavoirdansunebienheureuseignorance,mère.

—MaisCharles,çan’empêchequetonfrèrenepeutpas…

—Maman,comprenezquenousnepouvonspasannulercemariage.HansetÉloïseontdéjàfaitunepetiteentorseàleurnuitdenoce.Vousavezpeut-êtreunpetit-filsouunepetitefilleenroute.

—Ohmondieu!Alorstoutestperdu.Monpauvregarçon,commevousdevezmaudirevotrefrèreetcette

fichuefamille.Mais,jevousprometsquejamais,jen’accorderaislamoindreaffectionàcettepetitedévergondée.

—Cettefois,lacoupeestpleine!criaChristian.Vouspouvezdéfinitivementannulerlemariage.Ilesthorsdequestionquemasœurentredansunemaisonoùelleneserajamaisconsidéréequecommeunefillederien!

Christianécœuré,sortitdelapièceenclaquantlaporte.Onl’entenditcrier.

—Éloïse,Marie,préparezvosaffaires,nouspartons!

—Mondieu,maisquesepasse-t-il?ditleducenaccourant.Pourquoiveux—tuquelesfillespréparentleursaffaires,Christian?

—LamèreduducainsultéÉloïseetmafamille,iln’yaurapasdemariage.Siunenfantaétéconçu,jel’élèverai,maissûrementpascettefamille,quiluiferahaïrsononcle,satante,etsesgrands-parents.

—Christian!

Charlesarrivaencourant.

—Nefaisriend’inconsidéré.Jesuissûrquemamèrevateprésentersesexcuses.

—Etaprès?Desexcusesdonnéesàcontrecœur?Tucroisquejevaislaissermasœurici,faceàlavindictedetamèreetjesuissûràcelled’unepartiedetonpersonnel,quandilsapprendrontlavérité?Etlerestedetafamille?Ilslamettrontdecôté,quandilyauradesréunionsouqu’elleiraàunbal,toutcelaparcequetamèreleleuraurademandé.

—Christian,luiditleducdeBoigel,onpeutessayerd’arrangerleschoses.JesuissûrquelamèredeCharlesregrettedéjàsescommentaires.N’est-cepas,madame?dit-ilfroidementàcelle-ciquisortaitdesonsalon.

—Oui,jeregrettevraiment.Jen’étaispasdansmonétatnormal.

Christianlaregardaavechargne.Ilsetourna,quandilentenditÉloïse,HansetMariedescendre.

—Quesepasse-t-il,Christian?demandaÉloïse.

—Viens,dit-il,jedoisteparler.C’estàtoideprendretadécision.

Ilsortitduchâteauentenantlajeunefilleparlebras.

Pendantcetemps,CharlesexpliquaitàHansl’attitudedeleurmère.Ildevintfoufurieux.

—Maman,sijevousentendsdireuneseulefoisdumald’Éloïse,vouspourreznousdireadieu.Nouspartironsetjamaisjeneremettraislespiedsici.Vousm’avezbiencompris?!

Tous,leregardèrentétonné.Pourunefois,Hansdisaitcequ’ilfallaitaubonmomentetavecuneautorité

dontsonfrèrefuttrèsfier.

—Quesepasse-t-ilici?demandaAnna.Vousenfaitesdubruit,jen’arrivepasàmereposer.

Charleslaregarda,dégoûté.Safemmenefaisaitquedormiretmanger.ElledevaitavoiraumoinspristrentekilosdepuislanaissancedeChristian.

Personnenedaignafaireattentionàelleetellerepartit,dépitée.

ToutlemondeattenditdanslasalleàmangerleretourdeChristianetd’Éloïse.LeducetladuchesseparlaientàlamèredeCharles.Cequ’ilsluidirentdutladétendre,carCharleslavitmêmesourire.Ils’inquiétaiténormémentdeladécisionqu’allaitprendrelajeunefille.Pourlebonheurdesonfrère,biensûr,maiségalementpourlesien.Sielledécidaitdepartir,ilétaitsûrdenejamaisrevoirsonjeuneamantetcela,ilnelesupporteraitpas.Ilfaisaitlescentpas.Àunmoment,leducvintprèsdeluietleforçaàs’asseoir.

—Calmez-vous,Charles,ondiraitquec’estvouslefiancéquiattendavecimpatienceladécisiondesadouce.

—Sielledécidedepartircesoir,jerisquedenejamaislerevoir,vouslesavezbien.

—Cequejesais,c’estqu’ilyaunmois,ilseraitpartisansmêmeunregardenarrière,avecsessœurs.Aujourd’hui,ilvoulaitpartirtoutdesuite,maisilaréfléchietilenatirélamêmeconclusionquevous.S’ilpartmaintenantenemmenantÉloïseetMarie,ilsaitqu’ilnevousreverrajamais.Àmonavis,ilvaexpliquerlasituationàsasœur,maissansprendreparti.Éloïseécouteénormémentsonfrère,siellesentqu’ilneveutabsolumentpasdecemariage,elleannulera.Maisjevousledis,ilachangé.Ilnevapasl’influencer,nidansunsensnidansl’autre.

—J’espèrequevousavezraison.

Samères’approchad’eux.

—Jem’excuse,Charles.Jen’auraisjamaisdûdiretoutesceshorreurs.Pourras-tumepardonner?

—Cen’estpasauprèsdemoiqu’ilfautquevousvousexcusiez,maisauprèsdeHans,d’ÉloïseetdeChristian.

—Jem’excuseraisauprèsdeHansetd’Éloïse,maisceChristian,jamais.Terends-tucompteCharlesqu’ilestcommesonpère?Fieretorgueilleux.C’estcequiadétruitleurfamille.

—Suffit,maman.Arrêtezavecça.Jenesuisplusaussisûraujourd’huidelaculpabilitéducomtedeSaxedanslemeurtredeSophie.J’endoutemêmeénormément.

—Commentpeux-tudirecela?C’estleroilui-mêmequiamenél’enquête.Toutaétébienfait,ettulesais.

—Jesais,maisjevaislarefaire.Jesuissûrquej’airatéquelquechose.Jedoistrouverquoi,afinquelesenfantsducomtesoientrétabliesdansleurdroit

—Maisenfin,Charles,tunetrouverasjamaisrien,celafaittroplongtemps!

—Touslesprotagonistessontencorevivantsnon?Jevaisinterrogerànouveautoutlemondeetcettefois-ci,jetrouveraislevraicoupable.Christianpourrareprendresontitredecomteetrevenirhabiterdanssonchâteau.

Leducsemitàrire.LamèredeCharlesleregarda.

—Pourquoiriez-vous?

—Euhrien.Justeuneidéequim’atraversélatête.Ah,voilàChristianetÉloïse!

Touslesregardssetournèrentverseux.ChristiancherchaCharles.Ileutunpetitsourirediscretquandilletrouva.

—Noussommesvenusvousdirecequ’Éloïseadécidépoursonavenir.Vas-y,machérie,luidit-ilenlaprenantparlataille.

—J’aidécidéd’épouserHans,malgrécequesamèrepensedemoi.

Toutlemondelaissaexplosersajoie.

—Jen’aipasfini,leurrappela-t-elle.J’épouseraiHans,maisjen’habiteraipasici.Hansnousamontrésademeure.Jeveuxalleryvivre,etjenedésirepasavoirtropdecontactavecvous,dit-elleenregardantlamèredeCharles.Jeneveuxpasentendrecequevouspensezdemoietsurtoutdemonfrèreetdemonpère.J’espèrequevousn’avezrienditcontremapetitesœur,parcequesinon,j’annuletoutetjeparsdèsmaintenant.

—Jen’airienditcontrevotrepetitesœurÉloïseetjeregretteprofondémentmesparoles.Jejuresurmaviequejamaisplusjeneparleraissurvotrefamille.Jevousdemandeinstammentdemepardonneretdemelaisserunechanced’êtreune…belle-maman.

ÉloïseregardaHans.Celui-ciattendaitqu’elleluifassesignedevenirlarejoindre.ElleluisouritetHansserapprochad’elle.

—Tuacceptesmesconditions?

—Jet’aime,Éloïse.Jeveuxquetusoisheureuseetencequimeconcerne,jeseraisheureuxpartoutoùtuseras.

Illuipritlesmainsetlesembrassa.

—Jet’aimeaussiHansetjeveuxquetusoisheureuxaussi.

Ilss’embrassèrenttendrement.

—Nousnepartonsplusalorsmaman?demandaMarie.

—Nonmachérie,nousrestons.

—C’estbien,ditlajeunefille.Maman,vouspensezqu’unjourmoiaussi,jetrouveraisquelqu’uncommeHans,oucommevousetpapa,oualorscommeChristianet…

—Chut,luiditsamère,enluimettantlamainsurlabouche.Jesuissûrquetutrouverasquelqu’undebien.Celanepeutpasêtreautrement,tuesunemerveilleusepetitejeunefille.

MariesefaufilaalorsentreHansetÉloïseetenlaçasasœur.Hanssedécalaetlesregardatendrement.

—Bon,jepensequenouspouvonsallerdîner,ditHans,j’aifaim.

Toussedirigèrentverslasalleàmanger.

—Christian,jepeuxteparler?demandaCharlesdevanttoutlemonde.

—Jesuisàvotredisposition,duc.

QuandlamèredeCharlespassadevantlui,ellelegratifiad’unsouriretimide.Illuirenditsonsourire.SilamèredeCharlesdécidaitdefaireuneffort,ilétaitprêtàenfaireunlui-même.Aprèsleurdépart,Charlesfermalaporte.IlseretournaversChristianetleregardauninstant.Ilallaseservirunverredecognac,enservitunàChristianetleluitendit.

—Alors,puis-jesavoircequetuasditàtasœur?

—Non,cequej’aiditàÉloïseestdel’ordreduprivé,Monsieurleduc.Maisilvafalloirconvaincretamèred’êtregentilleavecelle,parcequesinon,ellenerisquepasdevoirsouventsespetits-enfants.

—Jeleluidirais,maisjecroisqu’elleacompris.Tuseraisvraimentparti,siÉloïsel’avaitvoulu?

—Oui,j’aipromisàmonpèredetoujoursprendresoindemessœurs.Etça,riennipersonnenepourramefairerevenirsurmapromesse,mêmepastoi.

Ilsereculaverslafenêtreetregardaàl’extérieur.

—J’airéfléchiànouspendantquejediscutaisavecÉloïse.Nousdeux,çaaétéassezrapide,unebonnebagarreetjetetaillaisunepipe.Jenesaispasvraimentcequetuéprouvespourmoi,àparttondésir.Cela,jel’aitrèsbienintégré.Tuveuxmaqueue?Elleesttouteàtoi.Maisjeparledesentimentslà,Charles,d’amour,d’affection.Moijesaiscequej’éprouve,maistoi,jenesaispas.Maqueuet’amanqué,maismoiCharles,moi,ChristiandeSaxe,estcequejet’aimanqué?Moi,mapersonnalité,monsalecaractère.Moiquoi!Est-cequejet’aimanqué?

—Pourquoimedemandes-tucelamaintenant,Christian?

—Parcequejeveuxsavoir,s’énerva-t-il.Toi,(ilappuyasurletorsedeCharlesavecsonpoing),toitum’asmanqué.Pourlabaiseetsurtoutpourtoi.Jemesuislanguidetonvisage,detavoix,detoncaractère.Jemesuislanguidemonhomme,commeunefemmeamoureuseselanguiedesonfiancéoudesonmari.Jeveuxsavoirsitoi,tuéprouveslesmêmessentiments.

—Oui,d’accord!criaCharles.Jemesuislanguidetaqueue,c’estvrai!Maissitusavaiscombienjemesuislanguidetoiaussi!L’hommequimefaitressentirdeschosesquejen’aijamaisressenti.Oui,jemesuislanguidetoi,ChristiandeSaxe,etjemourraissij’étaisobligédeneplustevoir!

Puisplusdoucement,etenserapprochantdeChristian,ilreprit.

—Jenepourraispasvivresanstoi,jemourraissidemain,tumedisaisquenousdeux,c’estfini.Jet’aimeChristian,commejen’aijamaisaimépersonne.Jecroyaisaimermapremièrefemme,maiscen’étaitqu’unamourdejeunehommenaïfetidéaliste.Jamais,jen’aiéprouvépouraucunedesrelationsquej’aieuedepuis,cedésir,cetteenviedemefondreenquelqu’un,commej’aienviedemefondreentoi.Alorsoui,ChristiandeSaxe,j’airessentilesmêmeschosesquetoi.Jet’aimeChristian,commejamaisjen’aiaiméetcomme,jen’aimeraisjamaisplus.

Christianlepritalorsdanssesbras,l’embrassantavectoutelapassionqu’ilressentaitpourlui.

—Jet’aimeaussiCharles,tellement.Jenesaispascequejeferaissanstoi.C’esttellementincroyable!Monpèreestmortàcausedetoi,parcequetuneconnaissaisriendelaviedetafemme.J’aiperdutellementàcausedetoi.Monpère,mafamille,mavie,montitre.Jenesaispaspourquoijet’aime.Bonsang,non,dit-ilpresqueencolère,jenesaispas.

Charlesleserratrèsfortcontrelui,leberçantcontrelui.

—Jesuisdésolé,monamour,tellementdésolé,pourtoi,pourtessœurs,pourmoi.Jesuisdésolé.

Ilsrestèrentdanslesbrasl’undel’autresansbouger,puisChristiancherchaseslèvres,enroulasalangueautourdelasiennepourunbaiserpleindeconfiance.

—J’aienviedetoi,maintenant,luidit-il,prenantsamainpourlaposersursonsexeenérection.Ohoui!Caresse-moicommeça,Charles!

—IlfautnousarrêterChristian,ilsnousattendent.

Ilréussitàrécupérersamainquelejeunehommenevoulaitpaslâcher.

—Viens,moncœur,allonsmanger.Jeterejoinsdanstachambre,dèsquejepeux.

Christianseréajustaetsuivitleduc.Quandilsarrivèrentàlasalleàmanger,touslesconvivesétaientdéjàinstallés.LafemmedeCharlesprésidaitàunboutdelatable,pendantqueCharlesallaitprendreplacedel’autrecôté.Christians’assitàladroitedesasœuretavaitlamèredesonamantàsagauche.

LamèredeCharlesavaitdécidédeseplaceràcôtédujeunehommeintentionnellement.Ellevoulaitpouvoirexpliquersonattitudeetleressentimentqu’elleéprouvaitpourlafamilledeSaxe.

—J’ai…,luidit-elleens’arrêtant.

—Oui…vousavezquoi?luidemanda-t-ilsansmêmelaregarder.

—Jevoudraisquevousmesuiviezdansmonpetitsalonaprèslerepas.Jepensequenousdevrions

discuterdetoutcequis’estpassé.

—Jelepenseaussi,maispascesoir.Noussommestropàfleurdepeau.Demainmatin,sivouslevoulezbien?

—Trèsbien,demainmatin.

Lerepassepassadanslecalme.L’ambiancen’étaitpasdesplusgaies,maischacunfituneffortpourdétendrel’atmosphère.LepetitChristianfutautoriséàlesrejoindrepourledessert.Ilcourutjusqu’àsonpère,nefaisantabsolumentpasattentionàsamère.Celle-cid’ailleurs,l’ignoracomplètement.CetteattituderévoltaladuchessedeBoigel.Elleétaitprêteàfaireuneréflexion,quandsonmari,d’unsourire,luifitcomprendredeneriendire.Charlespritsonfilssursesgenoux.Lepetitgarçonétaittoutheureuxd’êtreaveclesgrands.IlvitChristian,etsautadesjambesdesonpèrepourallerrejoindrelejeunehomme,quin’eutpasd’autrechoixquedel’installersursesgenoux.

—Monfilss’estprisd’affectionpourtoi,Christian,luiditCharles.

—Oui,ilsaitreconnaîtrelesgensbiens,lui,queveux-tu,n’est-cepasmoncopain?Alorsqu’as-tupensédutourdecheval?

—Vousl’avezfaitmonteràcheval,Christian?luidemandasagrand-mère.

—Oui,ilaadoré.Jevousrassure,ilétaitavecmoi,ilnerisquaitrien.

—C’étaitbien,grand-mère.Christianm’emmènerademainencore.

—Ahoui?Etquit’aditquej’avaisencoreenviedemonteràchevalavectoi?

—Personne,maisonira?demanda-t-ilanxieuxdelaréponse.

—Oui,poussin,jeteferaifaireuntourdemainettouslesjoursjusqu’àcequejereparte.

—Hourra!Papat’asentendu?

—Oui,j’aientendu.Maisenattendant,disaurevoiràtoutlemondeetvatecoucher.

Lepetitgarçon,obéissant,fitletourdelatable.IlfutembrasséparlesfemmesdelafamilledeBoigeletparsagrand-mère.Ilsalualeshommesd’unmouvementdetête,commelevraipetitducqu’ilseraitunjour.Ilsaluasamèredelamêmefaçon,sansessayerdes’approcherd’elle.Ellemangeaituneénièmepartdegâteauetfitjusteunpetitmouvementdelamainpoursaluersonfils.Charles,samèreetHansnefurentpaschoquésdesonattitude.Ilsétaienthabituésàvoirladuchessefroideetindifférenteàtoutcequin’étaitpassespetitsplaisirs.

MaislesdeBoigel,ainsiqueChristian,quiavaientpourlafamilleunprofondamourenfurenthorrifiés.Ilsseregardèrentetsansavoirbesoindemot,secomprirent.Ilsnepouvaientriendire,nifaire,maisladuchessedeBoigeĺdécidaquelelendemain,elleauraitunepetiteexplicationaveclajeunefemme.

Aprèslerepas,leshommess’éclipsèrentpourfaireunepartiedebillard,pendantquelesfemmes

prenaientunedernièreboisson.LafemmedeCharlesnerestapasavecelles.Etellesenfurentsoulagées.

—Éloïse,jepeuxvousparler?luidemandalamèredeCharles.

—Oui,biensûr.

—Jevoudraisquevousmepardonniezmespropos.J’aipumerendrecomptequevousêtesunejeunefilleabsolumentadorableetjevoisbienàquelpointmonfilsestamoureux.Pardonnez-moi,s’ilvousplaît,luidit-ellefaiblement.

Éloïseregardasamère.Celle-ciluisouritenfaisantunpetitsignedetête.

—Trèsbien,Madame,j’excusevosparoles.Maisjetiensàvousdirequejeneveuxrienentendresurmonpère.Jemerappelledeluicommeétantunhommebonetunpèreaimantetjeveuxpenserqu’iln’apaspufairecedontonl’aaccusé.

—Jecomprends.Maintenantparlonsdumariagequiauralieudansmoinsdedeuxsemaines.Pourrais-jevousaider?J’aidesidéesàrevendre.

Marie,dégoûtée,préféraquitterlapiècepourallersecoucher,laissantlestroisfemmesentreelles.

LeshommeseuxfinissaientleurpartiedebillardmenéelargementparleclandeChanoine.Ilsprirentundernierverreetchacunrejoignitsesappartements.

Charlespritunbain,queGeorgesluiavaitpréparé.

—Jen’auraisplusbesoindevouscesoir,luidit-il.Jefiniraisdemepréparerpourlanuit.Vousviderezlabaignoiredemainmatin.

—Vousêtessûr,Monsieurleduc?

—Certain,Georges.Allez-vouscoucher,vousl’avezbienmérité.

—Merci,àdemainmonsieur.

—Georges?

—Oui,Monsieur?

—Vousétiezaucourantquelapremièreduchesseétaiteuh…disonslégère?

Georgesréfléchitàlaquestionquelquesinstants.

—Toutlepersonnellesavait,monsieur.

—Ehbien!J’aipassépourleplusgrandcocudelaterrealors?

—Non,personnen’auraitoséfairelamoindreréflexiondésobligeantesurvous.Nousétionstristes

surtout.Vousaimieztellementladuchesse.

—Voussavezquiétaientsesamants?

—Ilyaeudesrumeurs,maisjamaispersonnenelasurpriseavecunautre.Safemmedechambrepourraitvousendireplus.Elleestmaintenantauservicedevotrefemme.

—Mafemme!Ilvafalloirquejerègleceproblème-làaussi.

—Comment,Monsieur?

—Rien,Georges,jemeparlaisàmoi-même.Àdemain.

—Àdemain,Monsieur.

Aprèsledépartdesonvaletdechambre,Charlessortidelabaignoireetn’enfilaqu’unpeignoir.Ilpassalatêtehorsdesachambre.Personnenetraînaitdanslescouloirs.Ilsedirigearapidementversl’aileoùilavaitlogéChristian.Àpeineavait-ilfrappé,quelaportes’ouvrit.Christianavaitluiaussipritunbain,etportaitunesimpleservietteautourdesreins.

—Alorsmonduc,bienremisdecettesoiréeassezdifficile?luidemanda-t-ilenleprenantdanssesbras.

—Oui,ettoi,çava?

—Çava.Tueslà,çavamêmetrèsbien.

Illuiretirasonpeignoir.Charlessentitsonsexegonflerdevantleregardqueluijetaitlejeunehomme.Illuicaressaletorse,commes’ilvoulaitconnaîtresoncorpsparcœur.Sesdoigtspincèrentlégèrementsestétons.Sonsexefitunbondenavant.Christiandescenditsesdoigtsplusbasetl’attrapadanssesmains.Ilcaressalapeauveloutée,passantsonpoucesurleboutdugland.IlnelâchaitpasCharlesdesyeux.Celui-cifrissonnaitsoussescaresses.Lejeunehommepritensuiteseslèvres,leforçantàouvrirsabouche,envahissantdesalanguelacavitéhumide.Charleslelaissajoueravecsalangue,secollantàluiengémissant.Christiannel’avaitpaslâchéetfaisaitcourirsesmainslelongdesahampe,serrantetdesserrantsesdoigts,jouantaveclui.Ilsebaissalentement,faisantcourirseslèvressursoncou,sestétons,sonnombrilavantdes’agenouillerpourlelécher.Ill’engloutitalorscomplètementdanssabouche,l’aspirantbienaufonddesagorge.Sesmainsavaientattrapésestesticulesetlesfaisaientroulerentresesdoigts.

—OhChrist,s’ilteplaît!Bougetatête.

Lejeunehommericana,faisanttremblerlesexeenfouienlui.Ilcommençaàlefaireentreretressortidesabouche,seslèvresbienserréesautourdelui.Charlesétaitauborddegouffre.Ilhaletait,gémissait.

—PlusviteChristian,oh…s’ilteplaît,jevaisvenir.

Christianaccéléralemouvementdesatête,etCharlesneputseretenir.Iléjaculadanslabouchesiadroite.

Christianlerelâchaetlereçutdanssesbras,quandleducs’écroulaausol,sesjambesneleportantplus.

—Onvaaulitmaintenant.Moijen’aipasfini,dit-il,l’aidantàserelever.

Ilenlevalaserviettequ’ilavaitautourdesreins,sonsexedresséfièrement,prêtàl’action.

IlmitCharlessurledos,pritl’huilemiraculeuseets’enenduisît.Ilpréparasonamantdesesdoigts.Quandill’eutbienécarté,quandils’assuraqueCharlesavaitrepristoutesavigueur,ilmitlesjambesduducsursesépaulesetcommençalentementàlepénétrer.

—Ohputain,c’esttropbonCharles.Jenevaispasmeretenir,turisquesd’avoirunpeumal.

—Neteretienspas,vas-y,jesuisplusqueprêt.

Christiancommençaàbouger,lentementaudébutetpuisdeplusenplusrapidementnepouvantseretenir,grognantdeplaisir,d’êtreenlui,sichaudetsiserré.Etdecoupdebutoirencoupdebutoir,ilatteignitrapidementlepointdenon—retour.IlsaisitlesexedeCharles,lemasturbaetcefutsimultanémentquelesdeuxhommespoussèrentleurscrisdedélivrance.Christians’écroulasurCharles,toujoursprofondémentenfouienlui.Charlesremualesfesses,essayantderedonnerdelavigueurausexequ’ilsentaitseratatiner.

Christiansemitàrire.

—Jenecroispasqueçavamarcherchéri,iltefaudraattendreunpeu.

—Ouais,jecroyaisquevouslesvraishommes,ceuxquitravaillenttoujoursàl’extérieurvousétiezplus…virilqueça.

—Tudoutesdemavirilité,petitduc?

Christiansortitdeluietlechatouillasurleventre.Charlescriacommeunefille.

—Arrête,jem’excuse,jenediraisjamaisplusriensurtavirilité.

—J’aimemieuxça.

Ils’allongerasurledos,pritsonducdanssesbras,satêtetrouvantnaturellementsaplacesursonépaule.

—Onestbiencommeça,luiditCharlesauboutdequelquesminutes.

—Oui,trèsbien.(Ilbailla).Ondortunpeu.

—Oui,maisavantjevaisallercherchercequ’ilfautpournouslaver.Nebougepas.

—Pasl’intention.

IlregardaCharlesselever,nucommeunver.Ilsourit.Ilétaitheureux.Ils’endormit,nesebougeant

mêmepasquandCharlesvintl’essuyer,niquandilrevints’allongerprèsdelui.Ilseréveillalelendemain,sonsexedanslabouchedeCharles.

—Ahoui,putainc’estbon!Prends-moiplusàfondCharles.Oui,commeça,commesituavalais.Ohoui,c’estbon!Net’arrêtepas.

MaisCharlesnevoulaitpasl’emmenerauboutdesonplaisir,sansavoireulesien.IllâchalesexedeChristian,pritl’huile,l’enduisitdélicatement,sepositionnasurluienlefaisantentrerprofondémentdanssesentrailles.

—Ahoui,làc’estbon.

Ilsesoulevait,serabaissaitdeplusenplusvite,deplusenplusfort.Leurprestationduralongtemps.Charlesmenaitladanse,accélérantouralentissant,quandilsentaitquel’unoul’autreétaitprêtàjouir.Maisilarrivaunmomentouaucundesdeuxneputcontinuer.CefutCharleslepremierquijouit,enserrantsifortChristian,qu’illesuivittoutdesuiteaprès.

—Bon,trèsbondébutdejournée,conclutChristian.J’espèrequecelavacontinuer.

CHAPITREIX

QuandChristiandescendituneheureaprès,unvéritablebranle-basdecombatagitaitlechâteau.Lepersonnelcouraitpartout,lamèredeCharlesdonnaitsesordress’agitantdedroiteàgauche.LaduchessedeBoigelavaitdécidédel’aideretavaitprisenmainlesfemmesdechambre,pourqu’ellessachentquelappartementpréparer,quidormiraitlàoùlà.Éloïseécoutaitets’instruisait.Marieassisesurunemarchedel’escalierlesregardaitfairel’airdégoûté.Quandellevitsonfrère,elleseprécipitaverslui.

—Emmène-moiavectoi,cematin,s’ilteplaît,s’ilteplaît.

—D’accord,mapuce,rigola-t-il,jeprendsunpetit-déjeuneretonfileauxécuries.

—Ohmerci,jet’aime.

Ellel’accompagnaàlasalleàmanger,pluscalme.Ilsretrouvèrentleduc,HansetCharles.Safemmeétaitlàégalement,àdévorerunénormepetit-déjeuner.Illasalua,elleluiréponditàpeine.Charleslevalesyeuxauciel.Iltapasurlachaiseàcôtédelasienne,luiintimantl’ordredevenirs’installeràcôtédelui.

Christianaprèss’êtreservi,lerejoignit.

—Biendormi,Monsieurleduc?luidemanda-t-ilinnocent.

—Commeunloir.Monréveilfutparticulièrementagréable.Jesuissûrd’avoirentenduchanter.

—Ahoui.Agréablelachanson?

—Très,trèsmusical.

Hanslesécoutait,l’airdeneriencomprendre.

—Quipeutchanterlematindebonneheure?

Ilsetournaversleduc.

—C’estvotrefemmeouÉloïse?

—Nonmonami,aucunedesdeux.Moiaussi,lematinj’entendssouventunechanson.Trèsagréable,n’est-cepas,lesgarçons?

Leurpetiteconversationcoquineseretournaitcontreeux.Lesdeuxhommesrougirentlégèrement.

Leducéclataderire.

—Jenecomprendsrienàcequevousdites!ditHans,énervé.

—NormalHans,vousn’êtespasencoremarié.

—Moi,intervintladuchesse,jen’entendsjamaispersonnechanterlematin.Ilnefaudraitpas,d’ailleurs.Jerenverraisceluiquisepermettraitdemechanterauxoreillesdebonneheure.

CharlesetChristianseregardèrentensouriant.Leductoussadanssonmouchoirréprimantdifficilementunéclatderire.

—Vousavezl’intentionderaconterencorecegenredechoselongtemps?leurdemandaMarie,quiavaittrèsbiensuivilesensdelaconversation.

Christianlaregarda,étonné.

—Benquoi,jenesuispasplusbêtequ’uneautre,luirépondit-elledevantsaquestioninformulée.

—Dequoiveux-tuparler,Marie?demandaHans.Non,nerépondspas.Moientoutcas,jenerestepasici.Çavaêtrel’enfertoutelamatinée.

—Christiannonplusetilm’emmène,ajoutaMarie.

—Tunedevraispasaider,machérie?luidemandaleduc.

—Jenecroispas.Maman,ÉloïseetlamèredeCharlesonttoutbienenmain.

—TuappellesleducCharles?ditsonpèreenfronçantlessourcils.

—Pourquoipas?Ilfaitpartiedelafamillemaintenant.Cen’estpasluiquiaentenduunedoucechanson?semoqua-t-elle.

Christianquibuvaitsoncafélerecrachaentoussant.

—Marie,stop,luidit-il.

—Trèsbien,j’arrête,maisjeviensavectoi.

—Moiaussijeviensavecvous,ditHans.

—Moiaussi,avecmonfils.Lepauvrepetit,jenepeuxpaslelaisseravectoutessesfemmeshystériques.

—Jevousrejoinsdèsquej’aifinid’écriremoncourrier,leurditleduc.Charles,àquipourrais-jeconfiermeslettrespourlesporteràlaposte?

—NousdemanderonsàGeorges.C’estluiquis’occupedetoutemacorrespondance.

—Qu’allons-nousfaire,Charles?demandaMarie.

—Nousallonsenquêter,chosequej’auraissûrementdûfairemoi-même,ilyadixans.J’espèrequ’iln’estpastroptardpourtrouverlevéritablecoupabledumeurtredemafemme.

—Vousn’allezquandmêmepasremettrecettevieillehistoiresurletapis,Charles.C’esttrèsinconvenant.

—ÉcoutezAnne,occupez-vousdevosaffaires,dit-ild’unairexcédé.

Pendantquelesautressortaientdelasalleàmanger,ildécidaderéglerlesortdesafemme.

—Ilfautquejevousparlecetaprès-midi.Soyezàmonbureauà14heures.

—Oui,biensûr.Dois-jem’attendreàquelquechosededésagréable?Commeporterunsecondhéritier?

—Non!s’exclamaCharleshorrifié,surtoutpascela.Jevousparleraiscetaprès-midi.

Heureusedesavoirqu’ellen’allaitpasêtreobligéedetomberenceinteunenouvellefois,ellerepritunegrossepartdebacon.

Charlesallacherchersonfilsetdonnacongéàlanounoupourtoutelamatinée.

Ilsallèrentinterrogerlespaysans,toujourslesmêmes,poursavoirs’ilsn’avaientrienvulesoirdelamortdeladuchesse.LedénomméPlonavaitdisparudelacirculationtoutdesuiteaprèsledrameetilsignorèrentoùlechercher.Ceuxqu’ilsinterrogèrentnepurentriendire,maisCharlesétaitpersuadédetrouver,mêmesansletémoignagedePlon.Ildevaitjusteinterrogerlabonnepersonne.Etquimieuxquelafemmedechambredesonépousedécédée,pourluidonnerdesinformations.Ilsdécidèrentd’arrêterquandlepetitmontradessignesd’impatience.Ilvoulaitfaireuntouràcheval.

EtcefutsurlesépaulesdeChristianqu’ilsserendirentauxécuries.Cesdeux-làs’entendaientcommelarronsenfoire.Charlesenétaitheureux,maisunpeujalouxquesonfilsledédaigneauprofitdesonamant.

Lorsqu’ilsrentrèrentauchâteau,lepetitChristianépuisédormaitdanslesbrasdesonpère.Ilsretrouvèrentlesfemmes,unpeupluscalmes,quilesattendaientpourledéjeuner.

ChristianeutsonentretienaveclamèredeCharles,oùilenressortitqu’elleétaitdésoléedesonattitude,qu’ellenesoupçonnaitpassonanciennebellefilled’avoirpufauteretqu’elleétaittrèsaffectéeparcesrévélations.Elleluiassurasonsoutienpourfairejaillirlavérité.Ilsneressortirentpasdel’entretienenétantlesmeilleursamisdumonde,maisavecunrespectplusgrandpourl’unetl’autre.

Charlesreçutsafemmeà14heuresprécises.

Elleentradanssonbureau,couvertedebijoux,unerobetrèsprèsducorps,quiauraitconvenuàunefemmeunpeuplusmince.Ellen’étaitpasvilaineenfait,pensa-t-il,blonde,lesyeuxbleus,elleauraitpuêtrelacoqueluchedesréceptions,maisellen’avaitriendanslatête.Ellepensaitquelesimplefaitd’êtreduchesse,luipermettaitdefairecequ’ellevoulait.Etcequ’elleaimait,c’étaitsesrepas,sachambreet…c’étaittout.

—Asseyez-vous,Anna.Cequejevaisvousdirevasûrementvousfaireplaisir.Enfinj’espère.Voilà,j’aidécidédevousoctroyerunepensionplusimportantetouslesmois,àlaconditionquevousquittiezmonchâteau.VousserezbiensûrtoujoursladuchessedeChanoine,maisjeneveuxplusvousvoirici.

—Mais…maisoùvoulez-vousquej’aille?

—Ehbien,jenesaispas.Chezvosparents,àParis,àLondres.Oùvousvoulez.

—Maispourquoimaintenant?Celafaitcinqansquenoussommesmariés,jenevousaijamaisgêné.

—Vousnemegênezpasnon,maisvotreattitudeenversmoi,enversvotrefilsetlerestantdelamaisoncommencesérieusementàm’indisposer.Jeveuxquevouspartiezaprèslebal.Vousn’êtesmêmepasobligéderevenirpourlemariagedeHans.Jevoustrouveraisunebonneexcuse,nevousinquiétezpas.

—Bon,trèsbien!J’iraischezmaman.Elleneserapascontentedelafaçondontvousmetraitez!

—Sivoussaviezcequej’enaiàfairedecequevotremèrepensedemoi.Voilà,jevousaitoutdit.Vouspouvezdisposer.

Ellesortitdelapiècesansunregardenarrière.Charlessavaittrèsbienqu’elleétaitplutôtsatisfaitedepouvoirpartir.Etluiétaittrèscontent.Iln’allaitplusvoirsatêtetouslesmatins,midisetsoirs.Quelsoulagement!Etellenemanquerapasàleurfils,ellenes’enétaitjamaisoccupée.L’enfantignoraitmêmequ’ilavaitunemère.Ill’appelaitMadameladuchesse,quandillavoyait.

Ilfitconvoquerlafemmedechambredesafemme.Elleentra,pascertainedecequiallaitluiarriver.

—Asseyez-vous!luiordonna-t-il.

Ellepritplaceenfacedelui,lesjambestremblantes.

—Nevousinquiétezpas.Jeveuxjustequevousrépondiezàquelquesquestions.Vousétiezauservicedelapremièreduchesse,n’est-cepas?

—Oui,Monsieurleduc.

—Alorsvousétiezaucourantdetoutcequ’ellefaisait?

—Oui,dit-elled’unepetitevoix.

—Dites-moi,quiétaitsonousesamants.Vouspouvezparlermaintenant.Dixansontpassé,jenevoustiendraispasrigueurdecequevousallezmeraconter.

—MadameSophieétaittrèsjolie,etlesmessieursl’aimaientplutôtbien.QuandellepartaitfairecesachatsàParis,elleenretrouvaitsouventquelques-uns.

—D’accord,parlez-moidesondernieramant,quiétait-il?

—Jenesaispassi…

—Allez-y,c’estunordre.

—C’étaitvotreanciencomptable.

—Quoi,JimCarry?

—Oui,Monsieur.

—Etilestpartitoutdesuiteaprèslemeurtre?sedit-ilàlui-même.

—Oui,Monsieur,réponditlafemmedechambre.

—Vousavezuneidéedepourquoiilauraitvoulufairedumalàladuchesse?

—Jecroissavoir,Monsieur.

—Ehbien,parlez!

—Madamevoulaitrompreaveclui,ellepensaitencorequelecomtedeSaxevoudraitd’ellecesoir-là.Ellevoulaitêtredisponiblepourlui.

—Commentcela?

—Elleétaitamoureusedeluidepuislongtemps.Lecomten’ajamaisfaitattentionàelleetn’ajamaisvoulurépondreàsesavances.Ilavaittropderespectpourvous,luiavait-ildit.Quandellesavaitqu’elleallaitlevoir,cequiarrivaitenvirondeuxfoisparan,ellerompaitavecsonamantdumomentpourêtrelibre,s’illuiproposaitdedevenirsamaîtresse.

—Elleétaitamoureusedelui?

—OhouiMonsieur!Depuislapremièrefoisqu’ellel’avaitvu.Maisilétaitmariéàl’époqueettrèsamoureuxdesafemmeetilneregardaitaucuneautrefemmequelasienneetMademoiselleSophie,étaitencoreuneenfant.Unefoisveuf,c’étaitellequiétaitmariéeavecvous.Elleatoujoursgardél’espoirqu’illaremarque,malgrétout.Elledéprimaitàchaquefoisqu’illuisignifiaitsonrefusdelaprendrepourmaîtresse.

—Dites-moiunechose,pourquoinem’avez-vouspasdittoutçaàcemoment-là?J’aifaitprobablementaccuseruninnocent.

—Ellem’avaitfaitpromettresurDieudenejamaisriendire,jesuisdésolée,Monsieurleduc,réponditelleenpleurant.

Charlesnepouvaitpasvraimentenvouloiràcettefemme.C’étaitSophiequ’ilauraitdûhaïr.Maiselleavaitpayédesaviesoninconstance.Ilespéraitquelàoùelleétait,elleavaittrouvécequiluimanquaitencebasmonde.

—Vouspouvezyallermaintenant.Laduchessevapartir,sûrementchezsesparents.Vousavezlechoix,soitdelasuivre,soitderesterici.C’estàvousdedécider.

Lafemmedechambres’essuyalesyeux.

—Jepréféreraisresteràvotreservice,Monsieur.LajeunedemoisellequivaépouserMonsieurHansaurapeut-êtrebesoindemoi?

—C’estentendu.Etsiellen’apasbesoindevous,nousvoustrouveronsbienunemploi.Vouspouvezdisposer.

Ellesortitcommeelleétaitvenue,petitesouriseffrayée.

Charless’enfonçadanssonfauteuiletlevalesyeuxauciel.Ildevaitretrouversonanciencomptable.Iln’auraitpasbeaucoupdemal.Iln’avaitqu’àdemanderàsesconnaissances.Ilétaitbonethonnêtedanssescomptes,ilavaitdûretrouverfacilementdutravail,ilconnaissaitassezdemondeparsonintermédiaire.

IlrédigeaplusieurscourriersetappelaensuiteGeorgesàquiillesconfia,luidemandantdepasservoirleduc.

IlavaitenviedevoirChristian.Illecherchapartoutdanslamaison,serendantmêmedanssachambre.Maislejeunehommen’étaitnullepart.IlarrêtaÉloïse.

—OùestChristian?

—Ilestsortiavecmonpère.Ilvoulaitrevoirnotrechâteau.

Lesentimentd’abandonqu’ilressentitlepritaudépourvu.Ilcomprenaitsondésirderevoirlechâteauoùilétaitné,oùilavaitpasséunepartiedesonenfance.Maisilauraitaiméêtreaveclui,pourceretourauxsources.Ilsauraientalorscertainementpufaireensemble,cecheminverslepardoncomplet,surcesmomentsterriblesqu’ilsavaientvéculà-bas.

Ilattenditleurretouravecimpatience.Samèreletrouvantunpeutropprésentdanslegrandvestibule,l’envoyas’occuperdesonfils.LepetitChristianpleura,quandilappritquesongrandamiChristiann’étaitpaslà.Ileutdumalàlecalmer.Etquandilsortitenfinduchâteaupourlepromener,illesaperçutarrivantencarrosse.Illesattendit,sonfilsdanssesbras.Christiandescenditlepremier.Ilavaitlevisagefroid,lesyeuxrougis.Ilembrassalepetit,neregardapasCharlesetentradanslechâteau.

Ilinterrogealeduc.

—Çanes’estpastrèsbienpassé,n’est-cepas?

—LecomtedeSaxearefuséqueChristianpénètresursesterres.Jel’avaisfaitprévenirquenousluirendrionsvisite,cematin.Quandnousnoussommesarrêtésdevantlapropriété,troishommesducomtesetenaientlà,desarmesàlamain,pournousempêcherdepasser.J’aiessayédeparlementeraveceux,leurexpliquantquej’étaisleducdeBoigel.Mais,iln’yarieneuàfaire.Noussommesrestésàl’extérieur.Iln’amêmepaspuserendreàl’endroitoùsonpèreavaitétéenterré,niserendresurletombeaudesamèreetdesesgrands-parents.

—C’estvraimentignoble!luiditHansencolère.Etilparaîtquec’estdetafautetoutça!Tuaurais

demandéaunouveaucomtequ’ilrefusetouteslesdemandesprovenantdeChristiandeSaxeoudesessœurs.Jenesuispasfierdetoi.Iladécidédepartir.Ildoitdéjàêtreentraindepréparersesaffaires.EtsiÉloïsedécidedesuivresonfrère,jetejurequejetecasselafigure.

Hansrentradanslechâteau,trèsencolèrecontresonfrère.

—Jenemesouvenaismêmepasavoirfaitcetterequêteaucomte.Quelimbécilejesuis!

—Allezluiparlerouvousnelereverrezjamais.

CharlescourutverslachambredeChristian,aprèsavoirconfiésonfilsauduc.Sansmêmefrapper,ilpénétraàl’intérieur.Ilpréparaitsonsac,jetantpêle-mêletoutessesaffaires.

—Qu’est-cequevousvoulez,Monsieurleduc?Vousn’enavezpasfaitassezcommeça?

—ÉcouteChristianje…

—Tu…quoi?dit-ilensetournantverslui,prêtàseservirdesespoings.Turegrettes?Ouais,extraordinaire,Monsieurleducregrette.Maisturegrettestoujourstroptard.Jeparsetnemetouchesurtoutpasoujetecasselagueule,luicracha-t-ilalorsqueCharlesvoulaitleprendreparlebras.

—Christian,jenemesouvenaismêmepasavoirdemandéaucomtedet’interdirel’entréedesapropriété.Jesuissincèrementdésolé.Neparspas,nousallonstrouverunesolution.

—Tuvasvoirsijenevaispaspartir.Ettun’espasprèsdemerevoirets’ilnetenaitqu’àmoi,j’emmèneraiÉloïseetMarieloind’ici.

—Nedispasça,jevaisallervoirlecomte,jevais…

Christianseretournaetilluibalançaalorssonpoingdanslafigure.Celui-civitmillechandellesetvacillasurlelit.

—PutainChrist,tum’ascassélenez!

—C’esttoutetasalletêtequejevaiséclater,luirépondit-ilensautantsurluietenluibourrantlecorpsdecoupdepoing.

—PutainChristianarrête…

—Jen’arrêteraisquequandtonvisageseratellementensang,quemêmetamèrenepourrapastereconnaître.

—Arrête,bordel,arrête…tumefaisbander.

Lejeunehommearrêtasonpoing,qu’ils’apprêtaitàenvoyerdanssescôtes.Illeregarda.Ilfrottasoncorpscontrelesien,poursentirsiCharlesluimentait.Maisnon,Charlesarboreraitunsexeenpleinegloire.Ilsefrottaunedeuxièmefois.Ilneputs’empêcherdegémir.Lui-mêmeavaituneénormeérection.IlpritlatêtedeCharlesdanssesmains,écrasantseslèvressurlessiennes,leforçantàouvrirlabouche.

Ill’envahitsansdouceur.Illuidéfitsonpantalonetretiralesien.Illuiremontalesgenouxsursonventre.

—Christian,s’ilteplaît,nemefaispasmal.

—Si,commetoitum’enasfait.Jevaisteprendre,tevioler,tefairesouffrir!

—Christ,s’ilteplaît,non,chuchota-t-il,sansmêmeessayerdesedéfendre.

Lejeunehommeleregarda.Illelâchaetsecouchasurledos.Sonbrassursesyeux,ilpleuraitdoucement,sansbruit.

CharleslepritdanssesbrasetChristianseblottitcontrelui.Charlesnedisaitrien.Ilattendaitquesespleurscessent.

—Jen’aimêmepaspumerendresurlatombedemamère,hoqueta-t-il.Etmonpauvrepère,toutseul,danscettefosse.

—Chutmoncœur.Chut.Tonpèren’estpastoutseul.

—Commentpeux-tudirecela?

—Jelesais.Lelendemaindevotredépart,j’aidemandéàvosgensdedéplacerlecorpsdetonpèreetdelemettredansletombeauauprèsdetamèreetdetesgrands-parents.Jel’aifaitenpensantàcetenfantquiavaittenutêteauroietàmoi,tellementencolère,tellementtriste.Tellementcertaindel’innocencedesonpapa.

—Tuasmismonpèreavecmamère?

—Oui,amour.Iln’estpastoutseul.Iln’apaseudecérémoniereligieuse,maisilaétéinhuméavecrespectetavecl’amourdespersonnesquileconnaissaient.Ilyavaittoutvotrepersonnel,tousvosmétayers,touslescommerçantsdelavillevoisine.Leprêtrenepouvaitfairedecérémonie,maisilaabsolumentvoulubénirlecercueil.Personnenes’yestopposé.Jenesaispascommenttouscesgensfurentaucourant,maisilsétaienttouslà.Ilnemanquaitquevous.Situsavaiscommej’airegrettéquevousnesoyezpaslà,toiettessœurs.

—OhCharles!Merci,merci.J’aitellementpleurélesoir,ensachantmonpèreseul.Ilétaitlapersonnequej’aimaisleplusaumonde.Mamèreétaitmortetellementvite.Dis-moi,pourquoidemanderaunouveaucomtedem’interdirel’accèsàlatombedemesparents?

—Jenesaisplus.J’aiagisurlemoment.Jenesauraisvraimentpastedonnerd’explication.Jen’enaipas.Demainmatin,situveux,nousironsensembleauchâteauetjedemanderaiàvoirlecomte.Tusais,cen’estpasunhommemauvais.Ilnevoulaitmêmepasdetontitre.Iltrouvaitquetoutecettehistoireavaitétéungrandgâchis.

—Demain,c’estlebal.

—Demain,c’estàtoiquejemeconsacre.Nouspartironsdebonneheuretouslesdeuxouavecleduc,quituveux.Mepardonneras-tujamaisChristian,pourtoutlemalquejet’aifait?

Christiansetournaverslui.Sesyeuxrougesavaientreprisleurslueurshabituellesetunechargesemblaitavoirquittésesépaules.

—Jecroisquejevaisfaireuneffortpourtepardonner.

Ilseremitsurlui.Ill’embrassaplusdoucement,plussensuellement,voulantsefairepardonnersonattitudeviolente.Charless’ouvritàlui.Ilenlaçalejeunehomme,leserracontrelui.Sefrottant,voulantdéjàplus.

—Christian,viensenmoi,maintenant.J’aitellementenviedetoi.

—Oui,jevaisvenir,lèvelesgenoux.Voilàcommeça.

Ilsaisitleflacond’huile.

—Tum’asfaitpeurtoutàl’heure,tusais.

—Désolé,j’étaishorsdemoi.

—Allez,montre-moicommeturegrettes.

Christians’enduisitlesexeetsemitdevantsonentrée,quifrétillaitd’impatience.Ils’aidadesamainpoursedirigeretlepénétraplutôtbrutalement.Charlessursauta.

—Çava?luidemandaChristian.

—Laisse-moideuxsecondes.

Christiann’attenditpaslongtempsavantqueCharlesneluidised’yallerplusfort.

—Jemesenstellementcompletquandtuesenmoi,Christ,gémitCharles.Tuesàmoi,Christ.Promets-moidenepasalleravecunautre.Ohputain,Christ…

—Je…te…promets…tues…tropbon…chéri,tellementchaud,étroit…faitpourmoi.Tusens…commetume…vabien…,Charles…bondieu.

Lesmotsétaientdetrop.Alorspourluiprouveràquelpointilsétaientfaitsl’unpourl’autre,Christianluidonnatoutcequ’ilavait.Avecbrusquerie,force,tendresse.

—Christian,jene…,oh,oui.Je…

Charlesleserracontrelui.Iljouitsursonventre,sonspermeéclaboussantleventredesonamantcollécontrelui.

Christiannetintpaspluslongtemps.Ilcriasonplaisir,avantdes’abattresurlui.

—Charles,retiens-toiunpeupluslaprochainefois.J’auraisbiencontinué,unpeumoi

—Plustardpeut-être,quandnousseronssihabituésl’unàl’autrequenouspourronsprendrenotretemps.Maislà,franchement,quandjetesensenmoi,j’aimesboursesquiseserrenttellement,quejenepeuxpasmeretenir.

Christianlesagrippaetlesserra.

—Jevaistelescomprimerentremesmainslaprochainefois,peut-êtrequecelateferatenirpluslongtemps.

—Situveux,maisjecroisqueçairaencoreplusvite.Allezbouge-toi,nousdevonsallerdîner.Etjecroisquecertainsinvitéssontdéjàarrivés.

—TuvasprésenterÉloïsedesonvrainom?

—Biensûr,ettoiaussi.C’estlamoindredeschosesquejepuissefairepourvous.Allezmonange,bouge.

CHAPITREX

ChristianétaitrevenusurledomaineduducdeBoigeldepuisunesemaine.Sonhumeurn’étaitpasmerveilleuseetmêmelesanimauxlesentirent.Ilsétaientagitésensaprésence.Toutlepersonnels’enrenditcompte.Leducfutinformédecetétat.Ilsemoquaitunpeudel’humeurdeseschevaux,maisilétaitinquietpoursonprotégé.Ilsavaitquelétaitleproblèmedujeunehomme.Luiaussi,s’ilavaitdûvivresanssafemme,iln’auraitpasétéaumeilleurdesaforme,etilsétaientmariésdepuisplusdetrenteans.IlsedécidaàparleràChristianlejouroùilnepritmêmepaslapeinedevenirvoirsesbêtes.Illetrouvaattabléàlatabledesacuisine.Ilbuvaitunverre,quin’étaitvisiblementpaslepremier.

—Çava,Christian?Nousnet’avonspasvueaujourd’hui.

—Jesais,jesuisdésolé,j’avais…

—Christian,s’ilteplaît,pasàmoi.Charlestemanque?

Christiansursauta.

—Non,biensûrquenon.

—Allez,Christian,jesaisbiencequ’ilyaentrevousettusaisquejelesais.Alorsdis-moi.TupeuxmeparlerdetoutChristian,tuescommemonfils,mêmesitun’asjamaisvoulumevoirainsi.

Christianleregarda.Ilétaitvraiqueleducavaitétépourluiunpère.Ils’enrendaitcomptemaintenant.Ill’avaitprissoussonailedepuissonarrivé,luiavaitdonnéunlogement,l’avaitfaitaménageretjamaisiln’avaiteulacuisineàfaire.Touslesjoursparn’importequeltemps,quelqu’unluiapportaitsesrepas,s’iln’allaitpasauchâteau.Sonlingeétaitlavé,samaisonnettoyéeunefoisparsemaine,desvêtementsdontilnesavaitquefaire,arrivaitdanssonarmoire.Ilavaitétépayéplusquecorrectement,cequiluiavaitpermisdemettredel’argentdecôtépoursessœurs.IlavaitconstituéunejoliedotepourÉloïse,quiluiappartiendraitenpropreetqueleducétaitchargédegérer,afindelafairefructifier.EtcelledeMariecommençaitelleaussiàêtreconséquente.

—C’estvrai,jenevousaijamaisremerciépourtoutcequevousm’avezapporté.

—Jeneveuxpasdetesremerciements,Christian.Jeveuxquetumeparles!

—Jenesaispasquoifaire.JesuisamoureuxdeCharles.

Ilattenditqueleducluidisequelquechose.Maisilneditrien.Ilattendait.Christianreprit.

—Jesaisquejevaislerevoirdansquelquesjourspourlemariage,maisaprès?NousnenousreverronsquelejouroùÉloïseauraunenfant.Etaprès,quandelleauraledeuxième.Nousnepourronsjamaisrien

faireensemble,êtreensemble.Pourquoitomberamoureux,sic’estpoursouffriraprès?

—Ilyatoujourslasolutionquetuaillestravailleraveclui.

—Impossible.Jesuisavecvous.Jamaisjeneferaiça.

—Etpourquoipas?Marenomméeestbienconnue,ettupourraisveniriciquandj’auraisdesproblèmesavecl’undeschevaux.Celavousferadesvacancesàtouslesdeux.Laviedecouplen’estpastoujoursfacile.

—Jenesaismêmepass’ilaenviequel’onserevoit,aprèslemariage.

—Biensûrqu’ilenaenvie.Pourquoiàtonavisfait-ilcetteenquêtepourprouverquetonpèreestinnocent?Parcequ’ilveutquetuviennesvivreprèsdelui,queturetournesdanslechâteaudetafamille.Uneheureàchevalpourvousretrouver,cen’estrien.Etiltrouvera,jesuissûr,unebonneexcusepourresterprèsdetoi,leplussouventpossible.Etenplussonfilst’aime.

—Vousn’avezpasl’airchoqué?

—Jenecomprendspascequivousattirel’unchezl’autre,c’estcertain.Avantdesavoirpourtoi,jepréféraismêmeignorerquecegenred’amourexistait.Oupensercommetoutlemonde,quec’étaitmaladif.Quandjeteregarde,quandjetevois,jesaisquetun’esnimalade,nifou.Lanatureestfaiteainsi,c’estdansl’ordredeschoses.ToietCharles,vousvousêtestrouvés,malgrélesdifficultésrencontrées.Vousavezfranchibiendesobstacles.Queplusd’unn’auraitjamaisessayédepasser.Charlesàmonavisafaitplusd’effortquetoi.Ilarouvertl’enquête,aenvoyésafemmechezsesparents,t’adéfenducontresamère.Ilt’aréintroduitdanslasociété.C’estàtoimaintenant,Christian,d’allerdel’avant.Tuvasêtreobligédet’éloignerdetessœurs,maisellessontensécuritéavecnous,etbientôtEloïseseramariée.Ilfautvivretaviepourtoiàprésent.Tun’asquevingt-quatreans,ettoutcequetuasfaitjusqu’alors,tul’asfaitpourtessœurs.Tonpèreettamèrepeuventêtrefiersdetoi,oùqu’ilssoient.Marievoudramêmepeut-êtretesuivresitupars.Elletevoueunetelleadmiration.

—Non,jenecroispas.Ellem’aime,maisvousêtessesparents,danstouslessensduterme.Ellen’aconnuquevous.Votrefemmeetellesontcommelesdeuxdoigtsd’unemain.Ellenevoudrajamaisquittersamamanethonnêtementjenelevoudraispas.Elleatellementbesoindevous.C’estdurpourmoi,maisc’estlavérité.Etpuis,jecroisqu’ellealedonelleaussi,peut-êtrepasaussifortquelemien,maiselleaquelquechose.Sijedevaispartir,nouspourrionsfaireunesorted’association.

—Cen’estpasunemauvaiseidée.Nousenreparleronsplustard.Avant,ilfautquetumettesleschosesaupointavecCharles.Ilarrivedansdeuxjours.Sitoi,tuessûrdecequetuveux,alorsn’hésitepasmongarçon.

Christians’approchaduducetlepritdanssesbras.

—Merci.

—Non,Christian,c’estmoiquiteremercie.Quandtuesarrivéici,tunousasapportétonsavoiretdeuxmagnifiquesjeunesfillesquinousontpermisderesterjeunes.Mafemmen’étaitplusheureusedepuisle

départd’Yvan.Ellearetrouvélesourirequandlesfillesettoiêtesarrivés.C’estlachoselaplusmerveilleusequinoussoitarrivée.Allez,j’espèrequenotreconversationt’aurafaitdubien.Moi,jeretourneauchâteau.C’estl’apocalypselà-bas.Jevaismefaufilerparlaportedeserviceetjetejurequepersonnen’aintérêtàmedemanderquoiquecesoit.

Christianéclataderire.

Aprèssondépart,ilpoussaunsoupir.C’étaitàluideprendreunedécision.Etbiensoit,ilallaitenprendreune.Ilsechangeaetdécidad’allervoirsesbêtes.Pluscalme,plussereindanssatêteaprèscetteconversation,ilétaittempspourluidereprendreletravailcorrectement.Bondieu,queCharlesluimanquait!

Lelendemaindeleuraltercation,aprèssonretourduchâteaudesdeSaxe,ill’avaitemmenélui-mêmesurlesterresdesesancêtres.Lenouveaucomteavaitsembléheureuxdefairesaconnaissance.Ilavaitpuallerserecueillirsurlatombedesesparents.ÉloïseetMarielesavaientaccompagnés.Cefutunmomentduretémouvant,quedeseretrouvertouslestroispourlapremièrefois,devantletombeau.Charlesetlecomteétaientrestésenretrait,permettantàlafratriedeserecueillirensemble.

Ilavaitétésurprisparl’accueilquileurfutfait.Toutlepersonnelétaitdevantlesmarchesduchâteau,quandilsétaientdescendus.Ilavaitreconnulemajordomedesonpère,quileslarmesauxyeux,luiavaitserrélamainetl’avaitgardélongtemps

—Jesuissiheureuxdevousrevoir,MonsieurChristian.Vousressemblezdefaçonspectaculaireàvotrechèremaman.

—Merci,Albert,jesuisheureuxdepouvoirrevenir.Vousm’avezmanqué.

—Vousnousavezmanquéaussi,vousetvossœurs.Lamaisonasemblébienvide,aprèsvotredépart.Videettriste.

Lanounoudesfillesn’avaitpasrésistéetelleavaitcouruverslesjeunesfillespourlesenlacer.Éloïsefutémuedelarevoir.Marie,quiavaitmoinsdesouvenir,selaissainspecter,souriantdevantsesmanifestationsdetendresse.

Lacuisinièreétaitelleaussisortitdurang,poursedirigerverslui.

—C’estpourvousMonsieurChristian,dit-elleenluitendantunplatrecouvertd’uneserviette,lemêmegâteauquejevousfaisaisquandvousétiezpetitetquevousveniezchiperdansmacuisine,quandvouspensiezquejen’yétaispas.Jenel’aijamaisrefaitdepuisvotredépart.Jem’étaisfaitunepromesse:lejouroùjelecuisineraisànouveau,celaseraitquandvousreviendriezauchâteau.

—Merci,Martha,jesuis…

Illapritdanssesbras,ému.

Aprèsavoirsaluétoutlemonde,ilsétaiententrésdanslechâteau.Christianavaitaussitôtregardélaportedubureaudesonpère.Ilpensaitquelesmauvaissouvenirsallaientrevenir,maisenfait,ilneserappelaquelesbons.Quandilentraitsansfrapper,quesonpèrelegrondaitenluidisantqu’ildevaitse

comportercommeunfuturcomte.Lejouroùilavaitsurprissesparentsdansunepositionfâcheuse.Samèreétaitrougedehonte,etsonpèrel’avaitànouveausermonné.Iln’avaitpasalorscompriscequ’ilvenaitdevoir,etn’enavaitétéabsolumentpaschoqué.

Lecomteleuravaitfaitletourduchâteaupourleurmontrertousleschangementsqu’ilavaitfait.

Chaquechambreavaitmaintenantuncabinetdetoilette.Ilavaitdûcondamnercertaineschambrespoursestravaux,enprécisantqu’ilenrestaitbienassez,pourrecevoirdumonde.Lecomteavaitreprisl’inventiond’unaméricainetavaitamenél’eaupartoutoùelleétaitnécessaire.Lepersonnel,aulieudemonterquinzeseauxd’eaupourmettredanslabaignoire,n’enmontaitplusmaintenantquequatreoucinqchauds.Lecomteleurexpliquaqu’ilcherchaitencorecommentfairepouravoirégalementdel’eauchaudedanslessallesdebain.CesinventionspassionnèrentCharles.Ilpritrendez-vousaveclecomte,pourvoircequ’ilpourraitfairedanssonproprechâteau.

Quandilavaitpénétrédanslebureaudesonpère,avecunecertaineappréhension,toutdemême,ilfutdéçuetenmêmetempssoulagé.Celui-ciavaitététransforméenunsalondelecture.Lecomtel’avaitregardé,sachantpertinemmentcequisepassaitdanslatêtedujeunehomme.Ilss’étaientsourietcompris.

IlsétaientretournéschezCharlesasseztardetlaplupartdesinvitésquidevaientlogersurplaceétaientarrivés.

L’ailedeChristianétaitmaintenantpleine,lesportesclaquaient,lesgenspassaientdevantsachambreendiscutantetenriant.Ilsechangea,remettantlesmêmesvêtementsquepourlebaldesdeBoigel.

Ilattendaitlesfillesenbasdesescaliers,quandCharles,trèsélégantdanssoncostumeensoie,lerejoignit.

—Eh,pasmaldis-moi.Tuasuneclassefolle,luidit-ildiscrètement.

—Merci,lasoieesttrèsfacileàporteretsurtouttrèsfacileàenlever.

Leclind’œilsuggestifqu’illuienvoyaémoustillaChristian.

—Continuecommeçaetjevaistel’enlevermaintenant,tonbeaucostume.

—Pasmaintenantchéri,tessœursarrivent.

Mariedescendaitlesescaliersrapidement,malgrélajolierobequ’elleportait.Desfrisettesdanslescheveux,unerobed’unrosepâle,sesyeuxbleusquiressortaientd’excitation,elleétaittoutsimplementcharmante.

—Onvaavoirdutravailsurlaplancheaveccelle-là,ditChristianenlaregardantdescendre.Dansquelquesannées,ilfaudrasurveillersesprétendants.

Mariesejetaàsoncou.

—Tuesmagnifique,petitesœur,unevraiejeunefille.

—MerciChristian,tuesbeauaussi,etvousaussibeau-frère,dit-elleensetournantversCharles,unsouriremoqueursurleslèvres.

—Beau-frère?Jenesuispasvotrebeau-frèreMarie,maisceluidevotresœur.

—Ahoui!J’avaispourtantcrucomprendrequevousaviezentenduunedoucechanson,unmatindansvotrechambreouc’étaitpeut-êtrecelledeChristian?

—Marie,chut!Commentpeuxsavoirça,toi?

—J’observemoncherfrère,etjevois.Maisnevousinquiétezpas,avecmoivotresecretserabiengardé.

Elles’éloignasousleregarddesdeuxhommes.

—Commentunejeunefilledelabonnesociété,protégéecommeellel’est,peut-elleêtreaucourantpour…nous?demandaCharles.

—Jen’ensaisrien.Ilvafalloirqu’ellemedonnequelquesexplications.Waouh!RegardeÉloïse!

Éloïse,accompagnéedeladuchesses’apprêtaitàlesrejoindre.Vêtud’unerobevertpâle,lescheveuxremontésenchignonsouple,quelquespetitesmèchessavammentdisposéesdépassant,sesyeuxbleusfardésd’unmaquillageléger,maisquilesfaisaitressortir,étaittoutsimplementradieuse.Elles’approchad’eux,enfaisantunerévérenceimpeccable.

Christianluipritlamainetlabaisa.

—Éloïse,tues…jenetrouvepasmesmots.

—Merveilleuse,vousêtesmerveilleuseÉloïse,repritCharlesenprenantlamaindelajeunefilleetenl’embrassant.

—Oui,merveilleuse,turessemblesàpapa,maistuasdansleregard,cequelquechosequemamanavait,c’estincroyable.

Lajeunefilleenlaçasonfrère.

—MerciChristian,c’estleplusbeaucomplimentquetupouvaismefaire.

—AlorsMessieurs,commenttrouvez-vousmafille?

Lesdeuxhommess’inclinèrentdevantladuchesse.

—Trèsbelle,maisvousl’êteségalementmadame,ditCharlesenluirendantlamainqu’ilvenaitdebaiser.

Christianenfitautant.

—Jevousremerciepourtout,Madame,nousavonseuvraimentbeaucoupdechancedevousavoirrencontré.

—C’estmoiquienaieeuleplus.Ah,voilàmonmariavecHans.

Lejeunehommerestasansvoixdevantsafiancée.UnpetitcoupdecoudedelapartdeCharleslefitreveniràlui.Ils’empressadelaprendreparlebras,pourlaconduiredanslagrandesallequiavaitétépourcejourtransforméeensalledebal.Christians’apprêtaitàlesaccompagnersuivideCharles,duducetdeladuchesse.

—VousnepouvezpasveniravecnousCharles,ilvousfautattendrevotrefemme,luirappelaladuchesse.

—Ellenevapasarriveravantaumoinsuneheure.Ellevientdesefaireporterunplateau.

—Oui,biensûr,ditladuchesse,uneexpressionentenduesurlevisage.Etbienallons-y,alors.

LamèredeCharlesrecevaitsesinvitésàl’entréedelasalle.Charlesrestaprèsd’ellepourl’aideràlesaccueillir.

L’orchestreavaitcommencéàjouerdiscrètement,maislebrouhahadesvoixcouvraitlamusique.

—Jecroisquetoutaétéfaitcorrectement,Charles.J’espèrequej’aiprévuassezdepetitfouretdechampagne.

—Nevousinquiétezpas,maman,toutàl’airparfait.

Pendantuneheure,ilsreçurentlegratindelasociété.Ilsallèrentensuitelesrejoindredanslasalle.Lepersonnelavaitfortàfairepourpasserentrelesdifférentsgroupesquis’étaientcréés.

—Charles,ilfaudraitquetuleurprésenteEloïsemaintenant,avantquetoutlemonden’aittropbu,luiditsamère.

Ilmontasurl’estradeoul’orchestreavaitprisplaceenentraînantHansetÉloïse.

—Mesdames,Mesdemoiselles,Messieurs,dit-il.Jevousaiconviéàcebalpouruneraison.Vousn’êtespassanssavoirquemonfrèreHansvientdesefiancer.JesuisheureuxdevousprésentercesoirEloïse,quecertainsd’entrevousontdûconnaître,ilyaquelquesannées.Eneffet,EloïseestlafilledecomteArmanddeSaxe.

Ilpritlesdeuxjeunesgenschacunparunemainetlesrapprochadelui.Aunomdelajeunefille,ungrand

silences’étaitfaitdanslasalle.

—Jevoisquevousêtessurpris.Ehbien,jel’aiétélepremierquandmonfrèrem’aparlédelamerveilleusejeunefilledontilétaittombéamoureux.Etjesuisfièredesavoirquebientôt,elleferapartiedemafamille.Etjesuiségalementheureuxd’accueillircesoir,ChristiandeSaxe,sonfrère,dit-ilenledésignantdelatête,etsasœurMarie.J’espèrequevouspasserezunebonnesoirée.Mercidevotreattention.

Ilsredescendirentsouslesapplaudissementsdiscretsd’unefoule,quinesavaitpassielledevaitmanifestersajoiepourcetévénement.

Personnen’osal’arrêterpourluidemanderdesexplicationsetilrejoignitChristian,montrantàtousquelejeunehommeétaitlebienvenuchezlui.Éloïsefutembrasséeparungrandnombredefemmes.Desvieillesconnaissancesdeleursparentsavaientl’airtrèsheureusesdelesrevoir.Laplupart,leursoutinrentqu’ilsn’avaientjamaiscruenlaculpabilitédeleurpère.Même,sicertainsmentaientpeut-être,celamitencoreplusdebaumeaucœurdeChristianetdesessœurs.

Ilsn’entendirentaucuncommentairedésobligeantetlasoiréesepassafortbien.

CharlesouvritlebalavecladuchessedeBoigel,pendantquesamèredansaitavecleduc.HansetÉloïsedansèrentensemble.ChristianpritMariedanssesbras,lafaisaientvalserpourlapremièrefoisdesavie.Elleétaitradieuseetbeaucoupserendirentcomptequecettetoutejeunefilleseraitbientôtàmarier.

LafemmedeCharlesarrivalemoinsdiscrètementpossible.Elleétaitvêtued’uneroberouge,quifaisaitressortirsesformes,lescheveuxtirésstrictementsursoncrâne.Elleneressemblaitenrienàuneduchessedignedecenom.LapauvreneserendaitpascomptequelesgenslaregardaientensemoquantetenadressantàCharlesleurscondoléancessilencieusespouravoirunetellefemme.Elles’empiffradepetitfour.Etcommeellevenaitdemanger,ellenetardapasàêtremal.Soncorsetdevaittroplaserrer,caronlavitpâliretpartirencourant.Personnenelarevitdelasoirée.

LecomtedeSaxefitunrapidepassage,allantsaluerostensiblementChristianetdiscutaavecluipendantunmoment.

Lesinvitésn’avaientpasenviedesecoucheretlasoiréeduratrèstarddanslanuit.Christianrejoignitsachambre,satisfaitdel’accueilqu’onleuravaitréservé,àlui-mêmeetàsessœurs.Charlesnelerejoignitpas.Ilyavaittropdemondeauchâteauetlescouloirsn’étaientjamaisvides.

LerestantdeleurséjourfutmarquéparledépartdelafemmedeChristian,lelendemaindubal.Pasmoinsdetroischarrettespleinespartirentavecelle.

Sonmarinevintmêmepasluidireaurevoir,tropoccupéqu’ilétaitàdonnerduplaisiràsonamant.

Pasencorecomplètementàl’aisepourfaireunefellation,ilfuttrèsattentifauxconseilsquelejeunehommeluiprodiguaetàpartquelquescaressesbuccalesmaladroites,ils’amélioratantqueChristianneputtenirbienlongtemps.Lejeunehommel’informadesaprochainedélivrance,luidonnantlapossibilité

deseretirer,maisilallajusqu’auboutetavalaavecunecertainegourmandisetoutlespermequienjaillit.

Cefutquandilredescendit,qu’ilappritledépartdesafemme.Illesavaitpourtant,maisilavaitoublié.Leducleregardaunsourireauxlèvres.

—Qu’avait-ildeplusimportantqueledépartdevotrefemme,Charles?

Celui-cirepensaàcequ’ilvenaitdefaireàsonamantetnepûtempêcherunerougeurcoupabledesepropagersursonfront.Leducéclataderire,luitapadansledosetlelaissa.

Ilspartirenttroisjoursaprèslebal.CharlesproposaàChristianderesteraveclui.Lejeunehommehésita,maisildevaitbeaucoupauducetnesevoyaitpasl’abandonnerainsi.

Ilallaitrevoirbientôtsonamant,etespéraitqueladécisionqu’ilvenaitdeprendrelessatisferaittouslesdeux.

Lelendemainquandilarrivaauchâteau,Éloïsel’attendaitdevantleperron.

—Ilsviennentd’arriver,Christian.

—C’esttrèsbien.Tuvois,tonfiancéneferapasmachinearrière.

—Jelesavaisdéjà.Jevoulaistedemander,Christian,jevoudraisquetum’emmèneslejourdumariage.

—Oui,biensûr,jeteconduiraijusqu’àl’église.

—Non,jevoudraisquecesoittoiquimeconduisesjusqu’àmonfuturmariédansl’église.

—Mais,leducnedevaitpasteconduire?

—Si,c’estcequiétaitprévuaudépart,maisj’aichangéd’avis.J’enaiinforméleduc,etiln’envoitpasd’inconvénient.

Christianluipritsesdeuxmains.

—Jeseraisplusqu’heureuxdetemenerjusqu’àl’autel,Éloïse.

Illaserradanssesbrasplusémuqu’ilnel’auraitpensé.

—C’estprivéoujepeuxmejoindreàvous,leurdemandaMarie,arrivéederrièresasœur.

—Vienslà,toi!

Charleslestrouvaenlacétouslestrois.

—Ehbien,sijepouvaisavoirunaccueilpareil,çameplairaitassez,plaisanta-t-ilenregardantChristian.

—VousnepouvezpasCharles,cen’estpastrèsbienvudeuxhommesquisefontuncâlin,luiditlaraisonnable,maisnonmoinspetitemoqueusedeMarie.

—Charles,heureuxdeterevoir,luiditChristianenluitendantlamain.Vousêtesarrivéstôt?

—Aveclepetit,j’aipréférépartirhiermatindebonneheure.Nousavonsvoyagétoutelajournéeettoutelanuit.Sanounounedevraitpastarderàdescendreaveclui.IlveutabsolumentvoirsonamiChristian.

CharlesrelâchalamaindeChristian.

—Jepeuxteparleruninstant,Charles?Enprivé,précisa-t-ilalorsquesessœursnelesquittaientpasdesyeux.

—Tuveuxdiscuterdanslebureaududuc?Ilestencemomententrainderéglerundifférendentresafemmeetsonmajordome.

—D’accord,vas-y,jeterejoins.Bonlesfilles,soyezsageetoccupez-vousdupetitpendantunmoment,jusqu’àcequel’onrevienne.D’accord?

—Biensûr,tuvasenavoirpourcombiendetemps?

—Paslongtemps.EtMarie,ilvafalloirquel’ondiscutetouslesdeux.

—Oui,plustard.Dépêche-toi,Charlest’attend.Commes’ilallaitmefairecroirequec’estàcausedesonfils,s’ilestarrivéaussitôt,entendit-ildireàsasœur.

Ilentradanslebureau,qu’ilfermaàclé.

Charlesl’attendait.Ils’étaitdéshabilléetétaitpartiellementnu,leculposésurlebureaududuc,excitantsonsexedesesmains.Christiannepritmêmepasletempsderéfléchir,qu’ilétaitdéjààgenouxpourleprendredanssabouche.Maiscen’étaitsuffisant,nipourl’un,nipourl’autre.Christian,leretourna,luifitappuyersesmainssurlebureau,lesjambesécartées.Ilsaisitsonpetitflacond’huilequ’ilavaitdanssapoche,pourcegenred’intermèdesetilpénétraleducavecimpatience.Sescoupsdereinsfaisaientbougerlebureau.Despapierstombèrentsurlesol.Charleslesbrasécartésselaissaitbesognerengémissant.

—Plusfort,Christ!Plusfort!

Deplusenplusexcité,avecl’impressiondenepasallerassezprofond,Christianneseretintpas.Plusfort,plusvite,maintenantleshanchesduducavecsesmains,decoupencoup,ahanantdes«jet’aime,tuesàmoi»,ilexplosa,lecorpsensueuretcouvertdefrisson.Charlesétaitdanslemêmeétat.IlavaitéjaculéquelquessecondesavantChristian.

—Christian,pousse-toi,j’enaimispartout.Ilfautessuyer.

—Donne-moiuneseconde.

—Non,pousse-toi.Viteavantqueleducnevienne.

—J’aifermélaporteàclé,ditChristiannevoulantpasbouger,desminimesrépliquesdesonorgasme,lefaisantbougerencoreenCharles.

Charlessemitàrire,envoyantdessecoussesdanslesexetoujoursenfouienlui.

—Arrêtederire,jebandedenouveau.

Charlesl’avaitbiensenti,maisilétaithorsdequestionderemettreçaici.Ilsereleva,etd’uncoupdehancheexpulsaChristiandelui.Ils’éloignadujeunehommequileregardaitcommes’ilavaitcommisunénormepéchéetrécupérasonpantalonqu’ilenfilarapidement.

—Bouge-toi,Christ.Nousn’avonspastoutelajournée.

—Queltuel’amourtufais,ronchonnaChristian.

Maisilserhabillaetregardasonamantessuyerlestracesdeleurforfait.Charlesramassaensuitelespapierstombéssurlesol,pendantqueChristianallaitdéverrouillerlaporte.

—Voilà,leducpeutentrer,ilnes’apercevraderien.

—C’esttoiquiledis,Charles,çasentlesexeàpleinnez.

Leducseprécipitasurunefenêtrepouraérer.

Ilsecouasesbraspourfairevenirl’airdudehors.

—C’estbonCharles,jeplaisantais.Assieds-toi,ilfautvraimentquejeteparle.

Charless’assitsurunfauteuil,etattendit.Christianfaisaitlescentpasdanslapièce,visiblementcequ’ildevaitluidireétaitimportant.Ilespéraitquelanouvellequ’ilallaitluiannoncerluiferaitplaisir.

—Allez,vas-y.Qu’as-tuàmedire?

—Aprèslemariage,sinousnefaisonsrien,nousnenousreverronsquasimentplus.Jenesaispaspourtoi,maismoi,tuvois,jen’aimeraispasquecelaarrive.Alorssitapropositionderesterprèsdetoi,surtapropriété,tienttoujours,j’aimeraisydonnersuite.

Charlesleregardasansrépondre.

—Tun’asrienàdire?luidemandaChristian,inquiet.

—Si,maiscelanevapasêtrepossible.Tunepeuxpasvenirtravaillerpourmoi,ettunepeuxpasvenirhabiterchezmoinonplus.

—Ah!ladéceptiondeChristianétaitvisible.Tunetiensplusàmerevoiraprèslemariage.Oui,j’auraisdûypensertoutseul.Aprèstout,tuesduc,tupeuxavoirquituveux.Jen’avaispascomprisquenousdeuxcelasetermineraientaprèslemariage.Désolé,jenevoulaispast’embarrasseravecmessentiments.Ahmerde!C’estunsacrécoup,là.Unebonnedroitenem’auraitpasfaitplusmal.

Ils’assitsurunfauteuiletsepritlatêtedanssesmains.Ilrespiraàfond.

—Laisse-moiunpeudetempspourdigérerça.Ilfautquejerespire.Putain!

Ilseleva,allaàlafenêtreetinspirafortement.

—Sijem’attendaisàcela!

Cesyeuxs’étaienthumidifiés.

—Qu’est-cequetumefaislà,Christian?luidemandaCharlesenletournantverslui.Est-cequejet’aiditquenousdeux,c’étaitfini?Non,oualorsjeperdslatête.

—Tuasditquetunemevoulaispassurtapropriété.Pourmoi,c’estclair.C’estsous-entenduquetunemeveuxplus.

—C’estsous-entendu,quesitunepeuxpasvenirchezmoi,c’estquetuvasavoiruncheztoi,MonsieurlecomtedeSaxe.

—JenesuispascomtedeSaxe!

—Si,tul’es.

—J’auraisdûl’être,jesuisd’accord,mais…

—Christianmefais-tuconfiance?

—Jetefaisconfiance,maislà,tumeperturbes.

—Trèsbien,alorsattendsjusqu’àcesoirpouravoirdesexplications.Etnetemetspasmartelentête,jesuisàtoi,commetuesàmoi.Cela,riennipersonnenepourralechanger.Maintenant,nousallonsallervoiroùestmonfils,ildoits’impatienter.

Illuipritlamainl’entraînantaveclui.Quandilssortirentdubureau,Charleslerelâchaetunepetitebêteàdeuxjambessejetasurlui.

—Papa,oùestChris…Ah,ilestlà!ditlepetitgarçonencourantsejeterdanssesjambes.Christian,onvafaireducheval?

—Situveuxetsitonpèreestd’accord.

—Jesuisd’accord.Allons-y.MaisChristian,dit-ilàsonfils,jenet’aipasentendudirebonjour.

—Ohpardon,bonjourChristian.

—Bonjourbonhomme,allez!dit-ilenleprenantdanssesbras,onyva?

—Ehbien,lesinterrompitunevoixalorsqu’ilspartaient,onnemesaluepas?

Christianseretournaetungrandsourireilluminasonvisage.

—Yvan!cria-t-ilenseprécipitantsurleplusjeunefilsduducetdeladuchesse.

Ilstombèrentdanslesbrasl’undel’autre.

—Tuesarrivéquand?demandaChristian,enlerelâchant.

—Ilyatroisheures,etj’enaipasséaumoinsuneavecmamère,etuneautreaveclacuisinière.Commentvas-tu?

—Trèsbien,quejesuisheureuxdetevoir.Tupourraisfaireuneffortpourvenirplussouvent.Tafemmeettesenfantssontavectoi,j’espère?

—Biensûr,tulesverrastoutàl’heure.Tuasl’airenformedis-moi.Alorsheureuxdemariernotresijoliesœur?

—Etcomment!Tuaseul’occasiondefaireconnaissanceavecsonfiancé?

—Rapidement,jel’aijusteaperçu,maisilal’aird’unjeunehommetrèsbien,ettrèsamoureux.Maiscen’estpasunpeuprécipitécemariage?

—Ilssonttrèsamoureux,situvoiscequejeveuxdire.

Yvanéclataderire.

—Pourquoi,onnevapasfaireuntourdecheval?ditunepetitevoixplaintivederrièreeux.

Yvanregardalepetitgarçonetl’hommequiluidonnaitlamain.Commeiln’avaitpasvraimentétémisaucourantdesdernièresnouvelles,sonvisages’assombritquandilreconnutleducdeChanoine.

—Nousallonsyaller,luiréponditChristian.Yvan,tuneconnaispasleducdeChanoine,jecrois,outuasdujustel’apercevoir?Charles,jeteprésenteYvandeBoigel.

—BonjourMonsieurleduc,dit-ilfroidement,jemesouvienstrèsbiendevous.C’estmoiquiaiétéchargéd’escorterChristianetsessœurs,chezleurtante.Jenegardepasdecetterencontreunsouvenirimpérissable.

—Yvan,c’estfinitoutcela,luiditChristian,Éloïseépousesonfrère,etnousavonsaplaninosdifférents.

CharlesregardaitlejeunedeBoigelfixement.QuandChristians’étaitprécipitésurlui,ilavaitfaillisemettreentraversdesonchemin.L’hommeétaitgrand,beauettrèssûrdelui.Unsentimentnouveauavait

jaillienlui:lajalousie.

Etilsavaientl’aird’êtresiprochestouslesdeux.Lefaitqu’Yvansoitmarié,nelerassuraitpasvraiment.

—Jenemesouvienspasdevous,Yvan.Maisjevousremercied’avoirprissoindeChristianetdesessœursetdelesavoiremmenésenlieusûrchezvosparents.

Yvanleregardasurpris.Etpuis,l’évidenceluisautaauxyeux.

Ilconnaissaitlesgoûtsdesonami,depuislongtemps.Christians’étaitmêmecruamoureuxdeluiàuneépoque,quandsoncorpsavaitcommencéàchangeretquesesaspirationssexuelles,l’emmenaientàdésirerdeshommesplutôtquedesfemmes.

UnsoiravecChristianquidevaitavoir17ans,ilsrevenaienttouslesdeuxdelafêteduvillageetsonjeuneamiavaitbuplusquederaison.Ilétaitmaletilavaitvoulusavoirpourquoi.CefutalorsqueChristianluiavaitavouélavérité.Ilsepensaitmalade,fou.Ilenvisageaitmêmedepartirtrèsloin,pournepasfairehonteàsessœurschéries.

Loind’êtrechoqué,àl’armée,ilavaiteudéjàaffaireàdeshommespréférantd’autreshommes,ilavaitessayédelerassurer.Illuiavaitditquecelan’enlevaitrienàcequ’ilétait.Qu’ildevaitjusteresterdiscretetnepasfaireétalagedesespulsions.Christianl’avaitalorsregardéavecespoir,pensantquelui-mêmepouvaitêtreattiréparlui.Ill’avaittoutdesuitedétrompéenriant.Lejeunehommeavaitcompris,etiln’avaitplusjamaisessayédeserapprocherdeluiainsi.

Lelendemain,ensachantdansquelétatilallaitêtre,ilétaitarrivédebonneheurechezluietilsavaientànouveaudiscuté,maiscettefoissanslesinhibitionsquel’alcooldonnait.Gênéaudébut,Christianl’avaitécoutérépétercequ’illuiavaitditlaveille.Leuramitiés’enétaitretrouvéerenforcée.Ilsn’enavaientplusjamaisdiscutédepuis.

Etdevantleregarddepropriétairequelançaitleducàsonami,iln’eutaucundoutequ’ilsavaientaplanibiendeschoses.IlsouritalorsfranchementàCharles.

—Jevousremercie,répondit-ilàCharles.Christian,tuvasfaireuntourdechevalàcejeunehomme?

—Oui,etensuite,jepensaisallerfaireunpetitpique-nique,situveuxtejoindreànousavectafemmeettesenfants.

—Ilsenserontravis.MafemmeahâtedeterevoiretmesfilsmeparlenttoutletempsdeleurtontonChristian.Nousnousretrouvonsdansuneheure,ici?

—D’accord,approuva-t-il,àtoutàl’heure.

Ilspassèrentleurjournéeensemble,avecÉloïse,HansetMariequisejoignirentàeux.LepetitChristianaprèssabaladeàchevalfutravidejoueravecdesgarçonsplusâgésquelui.Ilspique-niquèrentauborddel’étang,àl’endroitoùilss’étaientbattusetouleurscorpss’étaientreconnuspourlapremièrefois.

Lesoirarrivarapidement.Ilsrentrèrentetchacunrejoignitsesappartementspoursechanger.

Exceptionnellement,Christianallaitdormirauchâteau.Sesaffairesl’attendaientsagementsursonlit.Toutétaitneuf,etilsoupiraenpensantqu’ilallaitêtreengoncétoutelasoirée.

Quandildescendit,leducvintl’accueillirlui-même,alorsqu’ilfranchissaitlesportesdelasalleàmanger.Christianlelaissalemeneràlatabled’honneur.Assis,avecàsadroiteladuchesseetàsagauche,lamèredeCharles,quiluiadressaungrandsouriredebienvenu,ilsedemandaitpourquoiilétaitlà.Cefutalorsqu’ilreconnutencherchantsessœursdesyeux,lecomtedeSaxeassisdixplacesplusloin.Lefilsaînéduducetsafemme,Yvanetlasienne,etmêmeledeuxièmefils,étaitprésent.D’autrespersonnes,queChristianconnaissaitetqu’ilappréciait.IlrencontralesyeuxdeCharles,quinel’avaitpasquittédepuissonarrivée.Illuimontradelatêtetoutescespersonnesethaussalessourcilsensigned’interrogation.Charlesluifitundouxsourireetenneremuantqueleslèvresluidit«attends».

Quandtouslesconvivesfurentinstallésàtable,leducseleva,tapotasursonverrepourfairerevenirlesilence.IllançaunregardàCharles,quiselevaetallalerejoindre.

—Bonsoir,noussommestousiciafindepouvoirrendrejusticeàunhommeaccuséàtortilyadixansetàsesenfantsiciprésents.Christian,Éloïse,Marie,veneznousrejoindre.

LestroisenfantsducomtedeSaxes’approchèrentd’eux.Lesdeuxfillesentourantleurfrèreetluidonnantlamain.

—Charles,àvousl’honneur.

—Bonsoir,Christian,Éloïse,Marie.J’ai,commevouslesavez,rouvertl’enquêtesurlemeurtredemapremièreépouse.Jedoistoutd’abordvousprésentermesplushumblesexcuses,pourlemalquejevousaifait.Sij’avais,ilyadixans,agicommejel’aifaitmaintenant,toutcequivousestarrivé,lamortdevotrepèreainsiquevotrebannissementdevosterresneseraientpasarrivés.J’auraistoujourscetteénormeerreuraufonddemoncœur.J’airetrouvélevéritableassassin.Ilaétéarrêtéetilareconnulesfaits.Jenem’appesantiraipassurlepourquoidesesactes,c’estuneaffaireprivée.J’aiunelettredenotreroipourvous.Ilvousprésenteluiaussisesexcusesetvousdemandedeluipardonner.

IltenditlecourrieràChristian.

—JedoiségalementvousdirequeleroivousrendvotretitredecomtedeSaxe,Christian.Lechâteau,lesterres,toutvousrevient.Votrepetit-cousin,l’actuelcomteaacceptédevousrestituersontitre.

Ilregardalecomte,quihochalatêteensigned’assentiment.

—Jecroisqu’iln’enajamaisvoulu.

Re-hochementdelatêtedelapartducomte.

—Voilà,Christian,vousallezpouvoirrentrerchezvous.Touslesmembresdevotrepersonnelonthâtedevousrevoir.Ilssontplusintelligentsquemoiouqueleroi,ilsn’ontjamaiscruenlaculpabilitédevotrepère.

Christiann’enrevenaitpas.Lebonheuretladouleursemélangeaientenluidansunmaelströmd’émotions.

Lebonheurdesevoirreconnu,desavoirquesonpèreétaitinnocentauxyeuxdetous,quesessœurspouvaientyallerlatêtedroite.Etladouleurdepenserquesileschosesavaientétébienfaitesdèsledébut,sonpèreseraitvivant,luietsessœursseraientchezeux,dansleurchâteau.Iln’auraitpaspassédesnuitsentièresàsetourmenterpourleuravenir,pourlesienégalement.

ÉloïseetMariefondirentenlarmesdanslesbrasdelafemmequiétaitdevenueleurmère.ChristianfutsoutenuparleducetparYvanquiétaitvenulerejoindre.

Charlesn’osaitpass’approcherdelui.Lesréactionsdujeunehommepouvaientêtreimprévisibles,quandsesémotionsétaientàfleurdepeau.

CefutChristianquivintverslui.

Devanttoutel’assemblée,illepritdanssesbrasetseserracontrelui.Leducvintdiscrètementsemettredevanteux,nevoulantpasquequiconquesefassed’idée.

—MerciCharles.Tum’avaisditquetufaisaisquelquechose,maisjenepensaispasquecelairaitsivite,luidit-il,labouchecolléeàsonoreille.

—C’estmoiquiteremercied’êtreceluiquetues.J’avaispeurquetunem’enveuillespournerienavoirfaitavant.

—Jet’enveux,necroispaslecontraire,maisjet’aimeplusquejenet’enveux.Jecomprendsmaintenanttesparolesmystérieusesdetoutàl’heure.Tuserastoujourslebienvenuchezmoi,monduc.

—J’ycomptebien.Installe-moiunechambre,pastroploindelatienne,d’accord?

—Jetedonnerailachambreduroi,ellecommuniquedirectementaveclachambredumaître.

Charlessemitàrireetsedétachadujeunehomme.Leduclesvoyantseséparer,s’écarta.Christianallaversl’anciencomtepourluiserrerlamain.

—Jesuisdésolépourvous,luidit-il.

—Nelesoyezpas,Christian.Sivoussaviezcombienjenevoulaispasdecetitre.Toutcequejeveuxmoi,c’estfairemesrecherches,mesexpériences.J’auraisjusteunerequête.Mepermettriez-vousderesterauchâteau?Jenesuisplustoutjeune,etj’apprécietouteslesmodificationsquej’yaifaites.Etjecroissavoircommentmonterl’eauchaudedirectementdanslessallesd’eau,auxétages.

—Considérez-vousauchâteaucommechezvous.Jeseraistrèshonoréquevousrestiezàmescôtés.Vousm’aiderez.Parceque,àpartleschevaux,jen’aijamaiseubesoindegérerquoiquecesoitd’autre.

—C’estd’accordpourmoi,etvousmelaisserezfairemespetitesexpériences?

—Sielleneprésenteaucundangerpourpersonne,aucunproblème.

Ilsseserrèrentlamain.Unpactevenaitd’êtreconclu.

Lejourdumariage,Christian,trèsému,conduisitsasœurjusqu’àsonfuturépoux.Avantdeluilâcherlebras,ilsepenchaversHans.

—Tuasintérêtàfaireattentionàelle,sinon…

—Net’enfaispas,Christian,luiréponditlejeunehomme,pasvraimentimpressionné.J’aitrouvéuntrésor,jevaisenprendresointoutemavie.

SaréponsedutsatisfaireChristianquilâchaÉloïse.Ellelevalesyeuxauciel,maisrejoignitsonfuturépoux,ungrandsourireauxlèvres.

ChristianpritplacesurunbancàcôtédeCharles.

Celui-cisepenchaverslui.

—Tuluiasditquoi?

—C’estprivé,monduc.Maistupourrastoujoursessayerdemefaireparler,situveux.

—Comptebienlà-dessus,répondit-il.Tuaspenséquepuisquetuescomte,ilvatefalloirtemariertoiaussi,pourdonnerunhéritieràtontitre?

Christianleregarda,horrifié.

—Jenevaissûrementpasmemarierpouravoirunenfant.Jen’enaipasvraimentledésir.ÉloïseetHansvonttravaillerpourmoi,leurfilsaînéseramonhéritier.

—Tasœurestaucourant?

—Pasencore.Jeneveuxpaslastresseravecça.Etçaneteferaitrientoi,quejememarie?

—Tuplaisantes?!Siceladevaitarriver,jecroisquejemeterreraisdansmonbureauetquejen’ensortiraisplusjamais.

—Alors,net’enfaitpas,celan’arriverapas.Tiens,c’estpourtoi,ouvre-lediscrètement,luiditChristian,enluipassantunpaquetdanslamain.

Charlescommençaàl’ouvrirsousleregardscrutateurdesonamant.Leduc,quiétaitplacéàcôtédelui,essayaitdevoircequ’ilfaisait.

Charlesrestasansvoix,quandildécouvritlamerveilleusechevalièrequevenaitdeluioffrirsonamant.

—Christian,c’est…

—Jen’aipasl’intentiondememarierunjouravecunefemme,luiexpliqua-t-il.Laseulepersonnequejevoudraisépouser,c’esttoi.Nousn’auronsjamaislapossibilitédevivreensemblecommeuncouple,maisjeveuxquetusaches,quandturegarderascettebague,quejesuisàtoi,commetoi,tuesàmoi.Alors,CharlesdeChanoine,meferez-vousl’honneurdem’épouser,danslesecretdenoscœurs?

—Tun’aspaspeurdetefairebrûlervifparlacolèredeDieu?

—Dieusavaittrèsbiencequej’allaisfaire,enentrantdanscetteégliseetjesuistoujourslà.Alors,Charles?

—J’acceptedet’épouser,Christian.

Christianluirepritlachevalière,etlapassaàsondoigt.

—Moi,ChristiandeSaxe,jeteprendstoi,CharlesdeChanoine,pourépoux.Jetejureamouretfidélité.Etjeprometsderesterprèsdetoi,lerestantdemavie

—Jetefaislamêmepromesse,Christian.Mais,jen’airienpourtoi.

—Tueslà,avecmoi,c’estleprincipal.

Leducsepenchaalorsverseux.Ilsl’avaientcomplètementoublié.

—FélicitationsMessieurs,leurdit-il,etsoyezheureux.

ÉPILOGUE

—Christian,quefais-tuici?

—Jeviensvoirpapa,celafaittroisjoursqu’iln’estpasrentréàlamaison

—IlestavecChristian,ilssontpartisfaireunecourseenvillepournotrebricoleur.Tuesvenucomment?

—AvecGeorges.Ilcommençaitluiaussiàs’ennuyer.Iln’étaitpascontentquepaparesteautantdetemps.Iln’arrêtaitpasdedire,quesanslui,unjour,ilsallaientsefaireprendre.Qu’est-cequ’ilvoulaitdire,Marie?

—Jet’expliqueraispeutêtreunjour,quandtuserasplusgrand.

—Turestesencorecombiendetemps?

—Jusqu’àdimanchematin,mesparentsviennentmechercher.

—Ohdommage!J’auraisvouluqueturestesunpeuplusetquetuviennesunpeuàlamaison.

—Lamaison?Votreimmensechâteau?Laprochainefois,jeviendraicheztoi,promis.

—Laprochainefois,tuseraspeut-êtremariée.

—Sûrementpas.Mesparentsm’obligentàlessuivrepourlasaison,maisjen’aipasl’intentiondememariertoutdesuite.Ettoi,quandrevienttonpercepteurpourtesleçons?

—Dansunmois.Grand-mèrevoulaitquej’ailledansunpensionnat,maispapaetChristiandisentqu’àhuitansetdemi,jesuistropjeunepourpartir.

—Ilsontraison.Tut’ennuieraislà-bas.Tiens!Lesvoilà.

ChristianetCharlesrevenaientdansunecharretteempliedematérieldivers.Christianseprécipitadèsqu’ilss’arrêtèrent.

—Papa,c’estpourquoifairetoutça?

—Jen’ensaisrien.Quefais-tuici?

—Çafaittroisjoursquetuesparti,jecommençaisàm’ennuyer.

—Troisjoursdéjà,jenemesuispasrenducompte.Pardonne-moi,mongarçon.Tuasbienfaitdevenirmerejoindre.Christian,appelledumondepourdéchargertoutça.Jenesaispascequ’ilvafaireavec,maismonsieurbricoleuraintérêtànousconcocteruntrucvraimentrévolutionnaire.

—Çava,Christian?demandasonhomonymeadulteàl’enfant.

—Çava.Jepeuxresterunpeuavecvous?Auchâteaugrand-mèreestinsupportable.Elleesttoujourssurmondosetpuis,jem’ennuie.

—Biensûrquetupeuxrester.Tonpèrenevapasrepartirtoutdesuitedetoutefaçon.N’est-cepas,Monsieurleduc?

—Jesuislàpouraumoinscinqjoursencore.Jesuisenvacances.

—Tuessouventenvacancesalors.Mamieditquetupassesplusdetempsici,quecheznous.

—Mamien’apastort,ditChristian,jedevraistedemanderunepension.Vousdevriezrentrerlesenfants,ilvapleuvoir.Marie,emmènedoncChristianvoirl’ascenseurdemonsieurlabricole,jesuissûrqueçavaluiplaire.Toi,Monsieurleduc,suismoi,j’aienviedevoiravectoicommenttuvaspouvoirmepayertapension.

—Etvoilàcommentonsedébarrassedesenfants,ditMarieàChristianqu’elleavaitprisparlamain.

—Commentpapava-t-ilpayersapension?demandal’enfant.Iln’ajamaisd’argentsurlui.

—Net’inquiètepaspourça,Christ,jesuissûrquemonfrèrevatrouverunesolution.

Lesdeuxhommeslesregardèrentpartir.Charless’approchadesonhomme.

—Alors,jelapaiecommentmapension,monpetit?

—Tuvastoutdesuitecomprendre.

Ill’entraînadanssonbureau,dontilfermalaporteàclé.

—Tum’asallumésurlarouteavectespetitsmassages,ilvafalloirquetuéteigneslefeu.Allez,mets-toiàgenoux.

Ildescenditsonpantalonetluiprésentasonsexe,déjààdemidressé.

—Tuesprêt,jesensquejenevaispastenirtrèslongtemps.

—Plusqueprêt,luiréponditCharlesenluiattrapantsonpénis,qu’ilcommençaàmasturber.Tutesenscapabledetenirquandmêmeunpeu?

—Vas-y,nousverronsbien.Etsituessage,etquetufaisçabien,jet’emmèneensuitedansnotrepetitboudoirpersonnel.

Charlessesentitfrissonnerd’envie.

—Tun’asjamaiseuàteplaindre,jusqu’àprésent.Maisjevaism’appliquerencoreplus,j’adorenospetitsjeux,danslesecretdenotrepièce.

—Jesais,monange.Ilgémitquandilsesentitengloutiraufonddelagorgedesonamant.C’estbonCharles…continuecommeça…tul’aurasbienmérité…tafessée.

FIN