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Tous droits réservés © Éditions Continuité, 2011 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation des services d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d’utilisation que vous pouvez consulter en ligne. https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit. Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. https://www.erudit.org/fr/ Document généré le 24 mars 2020 11:33 Continuité Cinémas d’après-guerre Pierre Pageau La culture mise en scène Numéro 129, été 2011 URI : https://id.erudit.org/iderudit/64383ac Aller au sommaire du numéro Éditeur(s) Éditions Continuité ISSN 0714-9476 (imprimé) 1923-2543 (numérique) Découvrir la revue Citer cet article Pageau, P. (2011). Cinémas d’après-guerre. Continuité, (129), 40–44.

Cinémas d’après-guerre - Érudit...Paradiso. Elle est presque toujours une entreprise familiale, particulièrement en après-guerre Construction du Cinéma Caribou de Sainte-Anne-des-Monts,

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Page 1: Cinémas d’après-guerre - Érudit...Paradiso. Elle est presque toujours une entreprise familiale, particulièrement en après-guerre Construction du Cinéma Caribou de Sainte-Anne-des-Monts,

Tous droits réservés © Éditions Continuité, 2011 Ce document est protégé par la loi sur le droit d’auteur. L’utilisation desservices d’Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politiqued’utilisation que vous pouvez consulter en ligne.https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/

Cet article est diffusé et préservé par Érudit.Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé del’Université de Montréal, l’Université Laval et l’Université du Québec àMontréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche.https://www.erudit.org/fr/

Document généré le 24 mars 2020 11:33

Continuité

Cinémas d’après-guerrePierre Pageau

La culture mise en scèneNuméro 129, été 2011

URI : https://id.erudit.org/iderudit/64383ac

Aller au sommaire du numéro

Éditeur(s)Éditions Continuité

ISSN0714-9476 (imprimé)1923-2543 (numérique)

Découvrir la revue

Citer cet articlePageau, P. (2011). Cinémas d’après-guerre. Continuité, (129), 40–44.

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par Pierre Pageau�

Pourquoi un boom de construc-tion de salles de cinéma entre1945 et 1960 ? D’abord, men-tionnons le simple besoin de sedivertir, la télévision n’ayant pasfait son apparition dans les

foyers québécois avant 1952. Cette année-là, on comptait presque 59 millions d’en-trées en salle au Québec, ce qui necomprenait pas les projections dans lessalles paroissiales et le réseau scolaire.

Avec quatre millions d’habitants dans laprovince, c’est comme si chaque Québé-cois, incluant les nouveau-nés, était allé aucinéma au moins 14 fois cette année-là ! En1963, le nombre d’entrées avait chuté à 22 millions et des poussières.Le boom économique d’après-guerre explique aussi l’apparition de nombreusessalles. Le Québec vit alors le baby-boom, cequi entraîne un fort accroissement de la vieéconomique (construction, éducation, ser-vices publics). Une liberté et une certainemodernité d’après-guerre encouragent aussi

Cinémas d’a

Après l’essor des « palaces » dans les principales villes du Québec au début du XXe siècle,

de nombreuses salles de cinéma plus modestes naissent entre 1945 et 1960.

Plus petites, peu luxueuses, dotées d’un seul écran mais très confortables, elles ont constitué

l’essentiel des lieux de projection jusqu’à l’arrivée des multiplex.

Avec sa marquise et sa section de restauration, le Cinéma Rex de Sherbrooke représente bien les sallesconstruites entre 1945 et 1960 dans la tradition des « palaces ».

Source : Pierre Pageau

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de nombreux entrepreneurs à se lancer dansla construction de salles de cinéma.Ce boom est amplifié par une présence deplus en plus grande du cinéma « parlant fran-çais ». France-Film en fait une large promo-tion à partir de son réseau des Cinémas deParis : Montréal, Québec, Trois-Rivières, sonvaisseau amiral demeurant le Saint-Denis.Dans les régions, Léo Choquette, proprié-taire d’un réseau de 25 salles, fait la mêmechose mais, en 1965, il doit vendre toutes sessalles à France-Film.Les salles construites entre 1945 et 1960cherchent à conserver les principaux attri-buts des palaces : guichet central unique,marquise proéminente et très lumineuse,sans oublier toutes les photos et affiches defilms (lobby cards) à l’extérieur et à l’intérieur.Elles n’ont généralement qu’un seul étageet offrent de 500 à 1000 places, en plus desections de restauration très développées.Le modèle architectural le plus souventchoisi en région est de type quonset hut. Ils’agit d’une baraque en tôle ondulée préfa-briquée de forme cylindrique. Certains délaissent la tôle en faveur d’autres maté-riaux, mais la forme du bâtiment demeuretoujours la même. L’entrée a généralementla forme d’une boîte. On trouve des sallesde ce type un peu partout : le Garden de

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Laval, le Lux de Varennes, le Vimy deFerme-Neuve, le Bryson en Outaouais,L’Érable de Sainte-Émilie-de-l’Énergie.Après 1945, ces structures se vendront pour1000 $ comme maisons unifamiliales.Intimement liée à la vie sociale et culturelledu village ou du quartier et à ses habitants,la salle de ces années demeure proche deson public, à l’image de celle du film CinémaParadiso. Elle est presque toujours une entreprise familiale, particulièrement en

après-guerre

Construction du Cinéma Caribou de Sainte-Anne-des-Monts, selon un modèle architectural de style quonset hut très répandu en région

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région. Les parents dirigent la salle, et la famille habite généralement à l’étage. Lepère est propriétaire, gérant et projection-niste ; la mère travaille au guichet ou aucomptoir à friandises. Dès qu’un enfant estassez vieux pour les aider, il le fait, ce quiengendre des situations cocasses. Par exem-ple, certains enfants travaillent dans un ci-néma alors qu’ils n’ont pas l’âge requis pourassister à la projection.

Cinéma Champlain, à Montréal : l'équipe estfin prête à accueillir les spectateurs.

Les soirées de type Foto-Nite sont extrême-ment populaires durant ces années, principalement en Abitibi, dans le Bas-Saint-Laurent et dans Chaudière-Appalaches. Cessoirées hybrides comprennent des specta-cles amateurs (avec remise de prix, aussibien pour les concurrents que pour les spec-tateurs) et la projection d’au moins un longmétrage. Elles sont souvent organisées encollaboration avec un poste de radio ou desmarchands locaux.

À MONTRÉAL

Depuis 1915, pratiquement tout le centre-ville de Montréal est contrôlé par FamousPlayers, avec les plus beaux et gros « pa-laces» (Loew’s, Capitol, Palace), tous situésrue Sainte-Catherine Ouest (avec une capa-cité de 2500 à 3000 places chacun). Cepen-dant, pour les amateurs qui refusent de serendre au centre-ville, des entrepreneurs et des architectes inventent la salle de banlieue.La compagnie United Amusement, deGeorge Ganetakos, sera le propriétaire in-dépendant le plus important des « palacesde quartier » (jusqu’à ce que cette compa-gnie soit totalement absorbée par FamousPlayers en 1959). Durant la période 1945-1960, United fait construire le CinémaAhuntsic, l’Avenue Theatre à Westmount,le Cinéma Normandie (qui deviendra le Lu-cerne) à Ville Saint-Laurent ainsi qu’un der-nier « mini-palace », le Van Horne. Ces sallesont en moyenne 600 places, une marquiseverticale très visible et une façade entière-ment vitrée pour permettre aux passants debien voir le lobby. Elles ouvrent de plus enplus loin du centre-ville, dans ce qui devientla nouvelle banlieue de Montréal.La compagnie britannique Odéon ne craintpas de faire son entrée au Québec en ache-tant un circuit de neuf salles, dont sept à Montréal : Beaubien, Electra, Midway, salle Perron, Verdun Palace, Kent, Villeray.Odéon tente de se rapprocher de la clientèle francophone avec l’ouverture du Crémazie en 1947 (au nord de la rue Saint-Denis), puis du Mercier et du Champlain,rue Sainte-Catherine Est, en 1948. Avecl’ouverture du Champlain, les distributeursaméricains trouvent un débouché en orpour leurs versions françaises. Odéon lesprésente aussi parce qu’elle ne peut pas obtenir facilement les films en primeur, quidemeurent l’apanage de Famous Players.

À QUÉBEC

La télévision n’offrant pas encore une concurrence réelle au cinéma dans la

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capitale, il y a peu de changements dans lerépertoire des salles entre 1945 et 1960, dumoins en ce qui a trait à leur nom et à leuremplacement. Elles demeurent toutescentralisées (rue Saint-Jean pour la haute-ville, rue Saint-Joseph pour la basse-ville).Plusieurs salles changent de mains, ce quientraîne une francisation des écrans.En 1948, France-Film entreprend la re-construction du Cinéma de Paris, avec1150 places. Il présente les grands succèsdu cinéma commercial québécois des années 1945-1950. Cette très grande sallese distingue de son concurrent voisin, le Cinéma Capitol, qui ne présente que du cinéma en anglais. Sur le chemin Sainte-Foy, le Cinéma Classic, propriété de Famous Players depuis 1920, est acheté parFrance-Film en 1955 et rebaptisé CinémaBijou en 1965. Ses 648 places sont consa-crées uniquement au cinéma de languefrançaise.Sur la rue Saint-Vallier, le Théâtre français,en activité depuis les années 1920, est in-cendié en 1948, et devient le Cinéma Lau-rier l’année suivante (500 places). Alex

Reconstruit en 1948, le Cinéma de Paris, à Québec, présente les grands succès du cinéma commercial québécois des années1945-1950, tandis que son concurrent voisin,le Cinéma Capitol, ne présente que des filmsen anglais.

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3e Avenue, dans la paroisse Saint-Fidèle àLimoilou. Ses 842 places en font unegrande salle de quartier, de telle sortequ’elle sert aussi pour des spectacles de va-riétés. Le Lairet présente des reprises defilms américains et français.

HORS DES GRANDS CENTRES

En région, l’arrivée de la télévision est plustardive, ce qui permet la création et la sur-vie de plusieurs petites salles. Elles naissentgénéralement dans des secteurs limitrophesdes villes, vers de nouveaux quartiers. C’estle cas du Cinéma Montcalm (1947) àRouyn ; du Figaro (1947), qui devient unCinéma de Paris (1948), à Hull ; du CinémaAuditorium (1946) à Rimouski. Ces salles comptent en moyenne 400 ou500 places et se distinguent par une archi-tecture générale très simple, soit de stylequonset hut, soit de type « boîte carrée », dis-posant toujours d’une entrée et d’une mar-quise originales et invitantes. Ces sallesprojettent des films sept jours par semaineet ont une programmation bilingue. Nepouvant affronter France-Film pour obtenir

des copies de films venues de France, ellesdoivent se contenter de second runs, les pri-meurs ou les exclusivités leur échappant.Durant la période 1945-1960, la plupart desvillages ont au moins deux salles de cinéma.Polyvalentes, elles offrent diverses formesde spectacle (du cinéma d’abord, mais aussidu théâtre, du vaudeville, de la musique populaire, de la lutte, sans oublier les Foto-Nite). Il s’agit habituellement desplus grandes salles du village avec l’égliselocale, avec laquelle elles sont souvent enconcurrence. Pour survivre dans les années 1970 et 1980,les mini-palaces des villes comme des vil-lages devront adapter leur programmation enprésentant des films de répertoire ou du ci-néma érotique. Jusqu’à ce que l’arrivée desmultiplex sonne le glas de leur popularité...�

Pierre Pageau est professeur de cinéma à la retraite et auteur de l’ouvrage Les salles de cinéma au Québec 1896-2008.

Le Cinéma Ritz de Granby, preuve que l’onfait encore de superbes marquises entre1945 et 1960.

Les anciens numéros du magazine Continuité sontmaintenant disponibles en ligne librement etgratuitement.La numérisation rétrospective de cette collection a été réalisée aucours de l’année 2010 par Érudit (Centre d’édition numérique del’Université de Montréal), firme mandatée par la SODEP dans le cadre d’un projet de valorisation des publications québécoises sou-tenu par Patrimoine canadien.Le magazine Continuité publie quatre numéros par année depuis bientôt 30 ans.Nous vous invitons à profiter de cette source d’information unique surle patrimoine en consultant le site www.erudit.org/culture/continuite

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