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BANQUE DE LA REPUBLIQUE DU BURUNDI Les effets de la politique budgétaire sur la conduite et sur le mécanisme de transmission de la politique monétaire au Burundi. Par Joseph Martin Busogoro

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BANQUE DE LA REPUBLIQUEDU BURUNDI

Les effets de la politique budgétaire sur la conduite et sur le mécanisme de

transmission de la politique monétaire au Burundi.

Par

Joseph Martin Busogoro

Octobre, 2015

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Contenu0. Introduction....................................................................................................................................4

1. Revue de la littérature et cadre conceptuel...................................................................................4

1.1. L’approche néoclassique........................................................................................................5

1.2. L’approche keynésienne.........................................................................................................6

2. La politique budgétaire au Burundi................................................................................................7

2.1. Les composantes du budget de l’Etat.....................................................................................8

2.2. Les modes de financement des déficits budgétaires............................................................10

2.2.1. Augmentation des impôts et taxes...............................................................................10

2.2.2. Emprunt intérieur.........................................................................................................10

2.2.3. Emprunt extérieur........................................................................................................12

2.3. Le budget et l’extérieur........................................................................................................13

3. La politique monétaire au Burundi...............................................................................................14

3.1. Cadre de politique monétaire de la BRB...............................................................................15

3.2. Instruments de politique monétaire de la BRB.....................................................................16

3.2.1. Réserves obligatoires....................................................................................................16

3.2.2. Appels d’offres de liquidité...........................................................................................16

3.2.3. Facilité de prêt marginal...............................................................................................17

3.3. Performance de la politique monétaire................................................................................17

3.4. Mécanisme de transmission de la politique monétaire de la BRB........................................19

3.4.1. Le canal de taux d’intérêt.............................................................................................19

3.4.2. Le canal du crédit bancaire...........................................................................................20

3.4.3. Le canal du taux de change...........................................................................................21

4. La nécessité de coordination des politiques budgétaire et monétaire au Burundi.......................22

4.1. Cohérence des normes budgétaires et des objectifs monétaires.....................................23

4.2. Coordination des instruments monétaires et budgétaires...............................................24

5. Vérification empirique de l’interaction entre les politiques monétaire et budgétaire.................25

5.1. Impact de la politique budgétaire sur la conduite de la politique monétaire.......................25

5.2. Effets de la politique budgétaire sur les canaux de transmission de la politique monétaire.28

5.2.1. Spécification du modèle...............................................................................................28

5.2.2. Données utilisées..........................................................................................................30

5.2.3. Ordre d’intégration du VAR..........................................................................................30

5.2.4. Détermination du nombre de retards du modèle.........................................................30

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5.2.5. Stabilité du VAR(1)........................................................................................................31

5.2.6. Analyse des fonctions de réponses impulsionnelles.....................................................31

6. Conclusion générale.....................................................................................................................33

7. Bibliographie................................................................................................................................35

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0. Introduction.

Les politiques budgétaire et monétaire ont en commun les atouts d’agir sur la

demande globale. Ce sont des politiques dites de gestion de la demande. La gestion

de la demande globale est aujourd’hui devenue une préoccupation des théoriciens et

des praticiens de la macroéconimie. En effet, il est admis qu’une demande globale

trop élevée crée de l’inflation et qu’une demande trop faible entraîne une récession.

Face à ce dilemme, les gestionnaires des économies doivent s’assurer qu’une

croissance économique forte et stable est garantie. L’action sur l’offre globale ne

pouvant être envisagée que dans le temps, un contrôle permanent et efficace de la

demande globale s’impose pour s’assurer de l’équilibre entre l’offre et la demande.

Pour atteindre cet objectif, les décideurs politiques s’appuient notamment sur les

politiques budgétaire et monétaire. La politique budgétaire jongle entre les dépenses

de l’État (une des injections du circuit économique) et les impôts et les taxes (jouant

le rôle de ponction du circuit économique). La politique monétaire s’exprime, quant à

elle, par le choix de l’offre de monnaie ou du taux d’intérêt. Quoique ces politiques

utilisent des instruments distincts, elles ont des interactions entre elles basées

surtout sur les modes de financement du déficit budgétaire.

Pour analyser les effets de la politique budgétaire sur la conduite et le mécanisme de

transmission de la politique monétaire, les deux sections de ce chapitre examinent

tour à tour la façon dont ces deux les politiques sont conçues et menées.

1. Revue de la littérature et cadre conceptuel

Le développement de la science économique s’est construit de façon séquentielle selon les problèmes économiques qui surgissent et leurs solutions. Au départ, les économistes classiques se sont surtout préoccupés des moyens d’éviter les récessions sans trop s’inquiéter des prix. Avant la crise de 1929, le pouvoir d’intervenir sur l’économie était confié aux banques centrales qui agissaient sur leurs

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taux d’escompte pour influer sur les investissements. Certains auteurs affirmaient déjà que les cycles économiques constatés étaient d’origine monétaire( Wicksell, Schumpeter et Keynes dans une certaine mesure). C’était la politique monétaire qui était privilégiée.

L’apparition de la crise des années 30 est venue prouver que l’économie ne peut pas s’ajuster par la simple manipulation des taux d’intérêt. C’est alors que les gouvernements, en s’appuyant sur la pensée de Keynes, décidèrent d’intervenir en accroissant la dépense publique. Ce fût le début de la politique budgétaire.

Keynes opposait à l’influence des taux d’intérêt sur la demande globale notamment l’inélasticité-intérêt de l’investissement. En effet, il avançait que les facteurs d’incertitude affectant l’efficacité marginale du capital l’emportent en cas de faible niveau de taux d’intérêt ne permettant pas un arbitrage entre investissement et placement.

Deux grands courants de pensée et leurs pendants ont dominé les débats. Il s’agit de l’école des néoclassiques et des keynésiens.

1.1. L’approche néoclassique

Les économistes néoclassiques sont des monétaristes jurés. Ils affirment que

l'augmentation de la quantité de monnaie en circulation dans l'économie n'a aucune

incidence sur l'économie puisque, en situation de plein emploi, les capacités de

production sont pleinement utilisées et l'accroissement de la masse monétaire se

traduira par plus d'inflation. L'intervention de l'État serait inefficace pour relancer

l'activité économique. En effet, les politiques économiques ne servent à rien puisque

c'est le marché qui doit assurer le retour au plein emploi. L'État ne doit intervenir que

pour assurer le fonctionnement correct du marché, c'est-à-dire pour assurer le libre

jeu de la concurrence.

Au sujet de la politique budgétaire, les économistes libéraux considèrent que, dans le

cas d’une politique budgétaire pure : le déficit budgétaire provoquerait un effet

d’éviction, cette éviction d'origine financière revêt un double aspect :

- Un effet direct : cet effet peut jouer lorsque l'encaisse de spéculation

(thésaurisation) est nulle (ce qui correspond dans le modèle IS LM à la zone dite

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"classique"), dans ce cas les agents privés achètent des titres publics avec de

l'épargne initialement destinée à des dépenses d'investissement ou de

consommation privée (encaisse de transaction). La politique budgétaire n'est efficace

que lorsque les agents privés achètent des titres publics avec de l'argent oisif

(encaisse de spéculation), il y a alors déthésaurisation (donc injection monétaire), ce

qui stimule l'activité économique.

- Un effet indirect : l'augmentation de la demande de fonds prêtables entraîne une

hausse du taux d'intérêt qui conduit à une diminution des projets d'investissements

privés. Plus les investissements privés sont élastiques au taux d'intérêt, moins la

politique budgétaire est efficace.

Dans le cas d’une politique budgétaire financée par création monétaire le déficit

aurait un effet inflationniste.

Les économistes de l’offre considèrent que trop d’impôts découragent les agents

économiques (Courbe de Laffer) : retrait de certains salariés sur le marché du travail

(substitution du loisir au travail), moins de créations d’entreprises.

Au niveau de la politique monétaire, les théoriciens des anticipations rationnelles,

considèrent que la politique monétaire est inefficace à court et à long terme. En effet,

dès l’annonce d’une politique monétaire expansionniste, les salariés par exemple

anticipent une hausse des prix, et réclameront donc immédiatement une hausse des

salaires.

1.2. L’approche keynésienne

Pour les adeptes keynésiens, la monnaie doit répondre aux besoins de l'économie réelle. Quand la demande d'investissement est élevée et que l'épargne est insuffisante la monnaie doit prendre le relais. Elle constitue une avance sur la production qui sera récupérée ex post. L’État doit intervenir par le biais des politiques économiques puisque l’équilibre économique n’est plus réalisé automatiquement, et

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que sans l’intervention de l’État le chômage menace de s'installer en permanence. L'État doit tout mettre en œuvre pour rétablir le plein emploi.

Au sujet de la politique budgétaire, le déficit budgétaire permet de relancer l’économie par le mécanisme du multiplicateur des dépenses publiques.

Pour la politique fiscale, l’Impôt progressif sur le revenu n’aura pas d’effet négatif sur le niveau de la consommation.

Parlant de la politique monétaire, les keynésiens considèrent que l’augmentation de l’offre de monnaie par la Banque centrale fait baisser le taux d’intérêt. Les agents économiques peuvent emprunter plus facilement ce qui devrait encourager la consommation et l’investissement.

2. La politique budgétaire au Burundi

La politique budgétaire est basée sur la détermination de la structure et l’exécution

du budget de l’Etat. Le budget de l’Etat désigne un document comptable qui reprend

un plan d’actions dans le domaine financier. La détermination du budget de l’Etat a

pour principal objectif la stabilisation macroéconomique. En effet, elle est utilisée

pour freiner l’activité en cas de déséquilibre des échanges extérieurs et d’inflation

comme elle est utilisée pour dynamiser une économie dépressive. Le budget de l’Etat

est donc un acte par lequel le parlement autorise le Gouvernement de lever les

impôts et taxes en vue d’exécuter des tâches prédéfinies et d’effectuer des dépenses

y relatives.

Etant basée sur le budget, la conduite de la politique budgétaire se fait à travers les

prélèvements fiscaux, l’orientation des dépenses publiques et les modes de

financement d’un éventuel gap. Lorsque le Gouvernement dépense plus que les

recettes collectées, le déficit est financé soit en rehaussant les impôts, soit en

recourant aux emprunts intérieur ou extérieur. Le déficit est donc un indicateur

central de la politique budgétaire. Le budget de l’Etat est ainsi considéré comme

l’outil de politique économique le plus important dont dispose le gouvernement dans

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la mesure où il expose de façon complète les priorités de l’Etat et permet d’atteindre

les objectifs de développement économique et sociale.

Pour comprendre davantage la politique budgétaire du Burundi, il est impérieux de

faire le point sur l’évolution des composantes du budget.

2.1. Les composantes du budget de l’Etat

Le budget comprend trois parties portant respectivement sur les ressources(les

recettes) dont disposera l’Etat en vue de réaliser ses ambitions, sur l’évaluation des

besoins retenus pour financement (les dépenses à effectuer) et sur les modes de

financement d’un déficit éventuel.

Tableau 1 : Opérations financières de l’Etat

Année 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014Recettes et dons 279,7 287,6 363,3 397,7 408,9 631,2 678,9 705,7 841,7 877,0 Recettes 176,7 183,0 201,6 260,2 302,1 393,2 474,5 550,8 567,0 663,2 Dons 103,0 104,6 161,7 137,5 106,8 238,1 204,4 154,9 274,7 213,8

Dépenses et prêts nets 299,1 318,6 393,2 438,2 537,4 673,5 769,0 825,4 953,8 1 059,3 Dépenses courantes 221,3 227,1 265,0 361,6 432,3 491,9 554,1 591,9 689,1 721,6 Dépenses en capital et prêts nets 77,9 91,5 128,1 76,7 105,1 181,6 214,9 233,5 264,7 337,7

Solde global (base droits constatés)Dons inclus -19,5 -31,0 -29,9 -40,5 -128,5 -42,3 -90,1 -119,7 -112,1 -182,3 Hors dons -122,5 -135,6 -191,6 -178,1 -235,3 -280,4 -294,4 -274,6 -386,8 -396,1

Variation des arriérés -14 900,0 10 673,8 -51 718,8 896,3

Financement 19,5 31,0 29,9 40,5 128,5 42,3 90,1 119,7 112,1 182,3 Extérieur net 14,1 19,4 9,3 14,3 77,6 89,8 54,0 99,8 5,9 58,4 Intérieur net 3,7 37,2 4,0 33,2 85,8 39,7 72,7 34,0 106,8 155,1 Système bancaire 16,4 51,1 -5,2 20,2 81,2 33,5 54,4 13,0 45,9 147,0 Autres( + erreurs et omissions pour certaines dates)-12,7 -13,9 9,2 13,0 4,6 6,2 18,4 21,0 60,9 8,1 Erreurs et omissions 1,7 -25,7 16,6 -6,9 -34,9 -87,1 -36,7 -14,1 -0,6 -31,2

Opérations de l'administration centrale (en milliards de BIF)

Les ressources sont constituées des recettes fiscales et non fiscales, des dons

courants et en capital mais aussi des recettes exceptionnelles. Les prévisions des

recettes nationales ou recettes courantes hors dons et intérêts sont basées sur les

relations entre les recettes antérieures provenant de chaque type d’impôt et celle de

la base imposable en relation avec la croissance du PIB. Elles se réfèrent en outre sur

les tendances passées des recettes, complétées des informations spécifiques sur

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chaque sources de recettes, la variation de la structure douanière et surtout la

politique en vigueur du gouvernement et son effet sur l’évolution du PIB.

Les dépenses de l’Etat sont réparties dans deux grandes catégories à savoir les

dépenses courantes et les dépenses en capital. Les dépenses courantes portent sur

les dépenses sur biens et services, les subventions et autres transferts, les paiements

d’intérêts et les dépenses sur fonds spéciaux.

Le budget de l’Etat n’est que rarement équilibré et il n’est même pas nécessaire qu’il

le soit chaque année. Ce qui est important c’est qu’il soit structurellement équilibré ;

c’est-à-dire que les années de déficits soient suivies des années d’excédents

budgétaires. Ces excédents serviront notamment à régler les dettes contractées pour

financer les déficits. C’est pour cette raison que les déficits et les excédents sont

tolérés pour respectivement la relance économique et la stabilisation en cas de

surchauffe de l’économie.

A travers le tableau ci-dessus, on constate que le budget du Burundi est

structurellement déficitaire. Il faut remonter à l’année 1977 pour trouver un budget

excédentaire. Cette situation s’explique par le fait qu’à l’époque, les cours du café

avaient connu un boom et les recettes publiques avaient subi la même tendance.

Même si les dépenses de fonctionnement et d’investissements avaient été revues à la

hausse, elles ne sont pas parvenues à absorber les recettes additionnelles qui

découlaient de cette situation.

Pour réaliser ses ambitions en matière de politique budgétaire étant donné les

moyens financiers limités, l’Etat a régulièrement associé différents modes de

financement du déficit budgétaire. Or,chaque mode de financement a ses avantages

et ses inconvénients.

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2.2. Les modes de financement des déficits budgétaires

Outre le financement du déficit par l’augmentation des prélèvements fiscaux à

travers la révision budgétaire, l’Etat recourt régulièrement à l’endettement intérieur

et extérieur à des degrés divers.

2.2.1. Augmentation des impôts et taxes

Dans le souci d’augmenter les recettes en vue de couvrir les dépenses prévues dans

le budget, l’Etat peut, dans la révision budgétaire, procéder à l’augmentation du taux

d’imposition ou à l’assiette fiscale. Quoique présentant un avantage de ne pas

rembourser dans l’avenir, cette mesure comporte un coût social élevé parce qu’elle

est de nature à décourager la production et les investissements. Elle peut aussi

entraîner la baisse de la consommation consécutive à la hausse des prix. Au bout

d’une certaine limite, les recettes peuvent baisser car, en matière fiscale dit-on, les

gros taux tuent les totaux. Cette baisse des recettes provoque un approfondissement

du déficit.

L’augmentation du taux d’imposition provoque des effets immédiats sur les prix. Elle

va dans le sens contraire à l’objectif de la politique monétaire. Toutefois, elle permet

de retirer, du moins temporairement, la liquidité du système bancaire si on admet

que tous les fonds collectés sont versés sur le compte général du Trésor. C’est au

moment du paiement des fournisseurs et des créanciers de l’Etat que l’argent

collecté sous forme d’impôt sera reversé dans le système bancaire.

2.2.2. Emprunt intérieur

La dette intérieure d'un pays est l'ensemble des engagements contractés par l'Etat

auprès d'acteurs résidents dans le pays et exprimés en monnaie locale. L’Etat dispose

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de deux moyens majeurs pour accéder à l’emprunt intérieur. Il peut soit émettre des

titres publics auxquels peuvent souscrire les banques commerciales, les entreprises

parapubliques ou les particuliers. Il peut aussi recourir à l’endettement auprès de la

Banque Centrale.

Tableau 2 : Structure du financement intérieur du budget2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

2. FINANCEMENT INTERIEUR NET 4 019,4 33 165,7 85 795,5 39 651,7 72 722,4 34 058,0 106 895,8 155 146,4 a. Secteur bancaire -5 202,5 20 180,0 81 182,9 33 485,0 54 352,5 13 029,5 45 926,0 147 023,0 B.R.B. -27 340,8 -11 711,7 70 283,6 -7 761,3 82 745,9 51 339,5 2 762,6 69 567,2 Banques commerciales 20 635,8 28 193,5 8 239,5 37 845,4 -26 160,2 -36 506,1 40 504,9 77 997,8 CCP 1 502,5 3 698,2 2 659,8 3 400,9 -2 233,2 -1 803,9 2 658,5 -542,0 b. Secteur non bancaire 9 221,9 12 985,7 4 612,6 6 166,7 18 369,9 21 028,5 60 969,8 8 123,4 Etabl issements financiers -318,2 833,8 - - - 833,8 - - Secteur non financier 9 540,1 12 151,9 4 612,6 6 166,7 18 369,9 21 028,5 61 803,6 8 123,4 Source : MFPDE

a. Emission des titres publics

A travers l’émission des titres publics, l’Etat peut trouver les ressources nécessaires

pour financer le déficit budgétaire. Ce mode de financement incarne deux atouts

majeurs d’incitation à l’épargne et d’indépendance économique. Chaque médaille

ayant son revers, ce mode de financement a aussi ses inconvénients s’il est

fréquemment utilisé. En effet, il peut assécher le marché financier et, à travers la

hausse des taux d’intérêt, induire la baisse des investissements privés. C’est le

résultat d’un phénomène par lequel l’Etat s’accapare des ressources financières

(épargne) de telle sorte que les autres agents à besoin de financement ne trouvent

plus de ressources en quantité suffisante et à un taux d’intérêt qui ne grève pas la

rentabilité de leurs projets. Pour qu’un agent économique parvienne à assécher le

marché financier, il faut qu’il assure aux agents à capacité de financement détenant

l’épargne une rémunération attrayante c’est-à-dire des taux d’intérêts élevés. Cela

grève le processus de formation des taux d’intérêt du système bancaire et du marché

financier et handicape de fait les effets de la politique monétaire axée sur les taux

d’intérêt.

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b. Création monétaire

L’Etat peut aussi emprunter auprès de la Banque Centrale à travers les avances. C’est

la monétisation de la dette publique car la Banque met ainsi en circulation de la

monnaie sans contrepartie. Ce mode de financement constitue pour l’Etat un bon

palliatif au manque de financement car son créancier, qui est pour le moment la

Banque Centrale, va lui offrir de meilleures conditions de remboursement.

Ce mode de financement a des retombées inflationnistes dans l’économie car au

bout du compte on va se retrouver avec « trop de monnaie courant derrière trop peu

de biens ». Ceci entrave la réussite de la politique monétaire dont l’objectif principale

est d’assurer la stabilité des prix. Même au niveau de la conduite de la politique

monétaire, la Banque Centrale sera obligée d’injecter trop de monnaie par rapport à

la quantité prévue compatible avec l’activité économique. Ne pouvant ne plus

abandonner sa mission de stabilité des prix qui justifie sa raison d’être, la banque

centrale sera, d’un autre côté, tenue de stériliser la liquidité supplémentaire à travers

les opérations de reprise de liquidité. La Banque va se retrouver en train de jouer un

jeu étrange d’injection et de reprise de liquidité. Ce mode de financement du déficit

entrave ainsi la conduite de la politique monétaire.

2.2.3. Emprunt extérieur

En cas de déficit de l’épargne intérieure pour financer les dépenses budgétaires, l’Etat

peut recourir à l’épargne extérieure à travers la contraction des dettes.

Tableau 3 : Financement extérieur du budget2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

1. FINANCEMENT EXTERIEUR 9 332,7 14 317,4 77 608,4 89 758,8 54 036,2 100 484,8 5 906,1 60 495,0 Tirages 35 368,9 11 414,9 30 154,0 42 752,6 27 010,6 64 156,8 13 860,4 67 359,2 Moins amort. de la dette extérieure -28 164,2 -87 411,9 -1 094 028,2 -62 281,9 -4 559,4 -7 524,4 -7 954,3 -6 864,2 Variation des arriérés -51 718,8 896,3 - - - - - - Allègement de la dette 53 846,8 89 418,1 1 141 482,6 109 288,1 31 584,9 43 852,4 0,0 0,0 Source : MFPDE

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Ce mode de financement est nanti d’un avantage de court terme de procurer des

devises à l’économie et ainsi d’améliorer la situation de la balance des paiements. A

long terme par contre, ce mode a la faiblesse d’accroître la dépendance vis-à-vis du

monde car le pays bénéficiaire devra s’acquitter du service de la dette en devise, ce

qui présente aussi le risque de change.

Les devises acquises sous ce mode de financement peuvent servir dans la conduite de

la politique monétaire, notamment quand la Banque centrale veut stériliser la

liquidité bancaire. Elle peut s’en servir pour retirer de la liquidité du système bancaire

quand elle les vend aux banques commerciales.

2.3. Le budget et l’extérieur

L’élaboration et l’exécution du budget sont largement tributaires aux relations entre

l’Etat et le reste du monde. Cela ressort du tableau qui montre la part des dons dans

les recettes du budget et celle de la dette extérieure dans la dette publique totale.

Tableau 4 : Relation de l’Etat avec l’étranger

2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

Recettes 176658,2 183029 201614,6 260160,2 302130 393170,1 474526,7 550780 566995,8 663211,9787Dons 103000 104612,5 161664,8 137534,5 106751,4 238073,1 204362,7364 154949,5305 274662 213828,5171Recettes et dons 279658,2 287641,5 363279,4 397694,7 408881,4 631243,2 678889,4364 705729,5305 841657,8 877040,4958

Recettes 63,2 63,6 55,5 65,4 73,9 62,3 69,9 78,0 67,4 75,6Dons 36,8 36,4 44,5 34,6 26,1 37,7 30,1 22,0 32,6 24,4Recettes et dons 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

DETTE INTERIEURE 193 066,9 230 472,2 241 179,0 272 437,6 366 046,1 427 102,6 464 027,7 539 599,5 597 961,8 730 117,7DETTE EXTERIEURE 1 244 659,2 1 325 323,9 1 530 542,8 1 567 958,7 561 392,0 494 683,4 485 081,1 607 681,4 615 707,6 656 563,7TOTAL 1 437 726,1 1 555 796,1 1 771 721,8 1 840 396,3 927 438,1 921 786,0 949 108,8 1 147 280,9 1 213 669,4 1 386 681,4

DETTE INTERIEURE 13,4 14,8 13,6 14,8 39,5 46,3 48,9 47,0 49,3 52,7DETTE EXTERIEURE 86,6 85,2 86,4 85,2 60,5 53,7 51,1 53,0 50,7 47,3TOTAL 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0

Source :Auteur (tableau élaboré sur base des données des rapports annuel de la BRB)

Dett e par part

Recettes et dons par part

Dett e publique

Il ressort de ce tableau que le budget de l’Etat a été financé par l’épargne extérieure.

En effet, la part moyenne des dons dans les recettes du budget s’est élevée à 32.5%

sur la période retenue. Cette part est toutefois généralement en baisse quoiqu’il y ait

des hauts et des bas. La dette extérieure a quant à elle représenté en moyenne 66,0%

sur la même période. Sa part est aussi en baisse, comparée aux années précédentes.

Page 14: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Ces deux faits conjugués montrent en suffisance combien le budget de l’Etat dépend

de l’épargne extérieure.

2.4. Performance de la politique budgétaire

Comme nous l’avons vu dans les développements qui précèdent, l’augmentation du

déficit budgétaire devrait se traduire par une augmentation du PIB.

Graphique N°1 : Evolution des taux de croissance du déficit budgétaire et du PIB

0

1

2

3

4

5

6

7

-100

-50

0

50

100

150

200

250

2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

VAR_DEF VAR_PIBR

GD

P gr

owth

rate

DEFIC

IT growth rate

Ce graphique nous montre qu’il y a une période où les deux taux étaient positivement

corrélés et une autre leur évolution était opposée. Ceci ne nous permet pas de

conclure que la politique fiscale a été performante.

3. La politique monétaire au Burundi

La Banque de la République du Burundi gère la politique monétaire nationale depuis

plus de cinquante ans dans le souci d’influencer la sphère réelle et financière. Ce

privilège lui est actuellement conféré par la loi N°1/34 du 02 décembre 2008 portant

statuts de la Banque de la République du Burundi surtout en son article 6. Pour que

l’efficacité de sa politique monétaire soit assurée, celle-ci doit être coordonnée avec

Page 15: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

les autres politiques de gestion de la demande et surtout la politique budgétaire.Pour

assurer avec succès cette coordination, les relations et les interactions entre ces deux

politiques doivent être clairement définies.

En vue d’appréhender les effets de la politique budgétaire sur la politique monétaire,

nous décrivons préalablement le processus de conduite de la politique monétaire et

le fonctionnement de ses canaux de transmission.

3.1. Cadre de politique monétaire de la BRB

Le cadre de politique monétaire de la BRB est basé sur le ciblage des agrégats

monétaires. En effet, la base monétairejoue le rôle d’objectif opérationnel, la masse

monétaire comme objectif intermédiaire et la stabilité des prix comme objectif final.

Sans porter préjudice à cet objectif ultime de stabilité des prix, il a été conféré à la

BRB la latitude d’assurer la stabilité du système financier et le développement

économique.

Ce processus suppose que la transmission des impulsions monétaires se fait

séquentiellement sur la base monétaire qui, de son côté, influence la masse

monétaire dont les variations affectent le niveau général des prix à court terme et

éventuellement la production. Pour agir dans ce circuit, la BRB définit un programme

monétaire compatible avec le programme économique et financier du pays. A cet

effet, elle fixe des niveaux de base monétaire qu’elle doit respecter pour maintenir la

croissance de la masse monétaire dans les limites conciliables avec les objectifs de

prix et de production. Le niveau de la base monétaire fixé est contrôlé à travers la

maîtrise de ses contreparties qui apparaissent comme des objectifs quantitatifs

d’avoirs intérieurs et extérieurs nets.

Il est évident que la conduite de la politique monétaire basée sur ce cadre est

naturellement influencée par la nature de la politique budgétaire. En effet, les modes

de financement du budget de l’Etat ont des effets certains sur la base monétaire et la

Page 16: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Banque centrale doit adapter la conduite de sa politique monétaire en conséquence.

Elle le fait à travers la gestion d’une panoplie d’instruments qui sont à sa disposition.

3.2. Instruments de politique monétaire de la BRB

Pour conduire sa politique monétaire, la BRB utilise ses instruments indirects agissant

principalement sur les contreparties de la base monétaire ou sur le multiplicateur de

monnaie.

3.2.1. Réserves obligatoires

La BRB impose aux banques commerciales la constitution des réserves obligatoires

sur tous les dépôts. Les réserves obligatoires sont séparément constituées en BIF, en

Dollars Américains (USD) et en Euros(EUR) selon que l’assiette est exprimée dans ces

monnaies. Les réserves obligatoires en USD sont majorées de la contrevaleur des

réserves obligatoires exprimées dans d’autres monnaies autres que le BIF et l’Euro.Le

coefficient des réserves obligatoires s’élève actuellement à 3%.

Dans le maniement de cet instrument, la Banque Centrale peut agir soit sur le

coefficient, soit sur l’assiette ou tout simplement redéfinir la période de constitution

des réserves obligatoires. Cet instrument est utilisé en cas d’abondance ou de déficit

structurel de la liquidité bancaire. Or, le budget de l’Etat joue le rôle de taille dans

l’apparition de cette situation. Cet instrument affecte surtout le comportement de

prêt des banques et modifie le multiplicateur de monnaie.

3.2.2. Appels d’offres de liquidité

Ce système permet à la Banque Centrale de gérer la liquidité bancaire tout en

assurant un suivi permanent du programme monétaire. A cet effet, la Banque

Page 17: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Centrale contrôle la liquidité bancaire à travers les opérations d’appels d’offres

normaux d’apport ou de reprise de liquidité qui agissent sur les avoirs intérieurs nets.

Cet instrument permet de contrôler les effets, sur la base monétaire, des fuites ou

des injections du circuit monétaire provoquées par les opérations du budget de l’Etat.

3.2.3. Facilité de prêt marginal

Contrairement aux autres modes de refinancement qui sont de l’initiative de la

Banque Centrale, la facilité de prêt marginal relève de l’initiative des banques

commerciales. Le taux de la facilité de prêt marginal est supposé être le taux de

référence de la Banque Centrale. Or, il est reçu par majoration de 3 points de

pourcentage au taux mayen pondéré sur les Bons du Trésor à 13 semaines de

l’émission précédente.

Cet instrument est le complément de l’instrument des appels d’offre et le taux qui en

est issu est plutôt tributaire des conditions financières du Trésor. Le taux des bons du

Trésor est ainsi un taux de référence dans la détermination des autres taux.

Ces instruments produisent des effets dans le secteur réel à travers un mécanisme de

transmission dont l’efficacité est sensible aux opérations budgétaires.

3.3. Performance de la politique monétaire

Cette performance est mesurée par le degré de corrélation positive du taux de

croissance de la masse monétaire et de l’inflation. Ceci traduit que si la banque

centrale parvient à maîtriser la croissance de la masse monétaire, elle va à coup sûr

contrôler l’inflation.

Graphique N°2 : Evolution des taux de croissance de la masse monétaire et des prix

Page 18: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

(5.0)0.0 5.0

10.0 15.0 20.0 25.0 30.0 35.0

(5.0)0.0 5.0 10.0 15.0 20.0 25.0 30.0 35.0 40.0 45.0

Inflation VariationM2

A travers ce graphique, nous constatons qu’à l’exception de la période allant

d’octobre 2009 à juin 2013, l’inflation est généralement corrélée avec le taux de

croissance de la masse monétaire. Toutefois, cette corrélation n’est pas parfaite. Cet

état de fait peut être imputable aux autres facteurs jouant dans la détermination de

l’inflation.

Aussi, pour évaluer le niveau de maîtrise de la politique monétaire de la Banque

Centrale, nous pouvons vérifier le degré de liaison entre la base monétaire et la

masse monétaire.

Graphique N° 3 : Evolution des taux de croissance de la masse et de la base monétaires

janv.-

06

juin-06

nov.-06

avr.-0

7

sept.-0

7

févr.-

08juil.-

08

déc.-08

mai-09

oct.-09

mars-10

août-1

0

janv.-

11

juin-11

nov.-11

avr.-1

2

sept.-1

2

févr.-

13juil.-

13

déc.-13

mai-14

oct.-14

mars-15(5.0)

5.0

15.0

25.0

35.0

45.0

VariationM2 VariationBM

Au regard de ce graphique, nous constatons que les deux grandeurs évoluent dans le

même sens mais que leur taux de croissance s’écarte de temps en temps. Ceci peut

être justifié par la probable instabilité du multiplicateur de monnaie qui les lie.

Graphique N°4 : Evolution du multiplicateur de monnaie

Page 19: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

janv.-

06mai-

06

sept.-0

6

janv.-

07mai-

07

sept.-0

7

janv.-

08mai-

08

sept.-0

8

janv.-

09mai-

09

sept.-0

9

janv.-

10mai-

10

sept.-1

0

janv.-

11mai-

11

sept.-1

1

janv.-

12mai-

12

sept.-1

2

janv.-

13mai-

13

sept.-1

3

janv.-

14mai-

14

sept.-1

4

janv.-

15mai-

152.0 2.2 2.4 2.6 2.8 3.0 3.2 3.4 3.6

Multiplicateur-M2

Ce graphique traduit une relative instabilité du multiplicateur de monnaie dans le

temps. Ceci met à mal la maîtrise de la masse monétaire à travers le contrôle de la

monnaie de base. Le cadre de politique monétaire sous lequel agit la Banque Centrale

est sujet à caution.

3.4. Mécanisme de transmission de la politique monétaire de la BRB.

La force et le temps de réaction des mesures de politique monétaire dépendent du

comportement qu’adoptent les différents agents économiques. Inversement, le

comportement des agents économiques dont l’Etat influence la conduite et la

transmission de la politique monétaire. En effet, l’impact des décisions de politique

monétaire sur l’économie réelle emprunte différents canaux de transmission

sensibles aux opérations du Gouvernement.

3.4.1. Le canal de taux d’intérêt.

La modification du taux d’intérêt de la Banque Centrale influe sur le comportement

des établissements de crédit en matière de formation des taux d’intérêt et d’octroi

des crédits. Avec le changement des conditions d’accès au crédit, les agents

économiques(ménages, entreprises et Etat) modifient la structure de leurs dépenses.

C’est principalement les dépenses de consommation et d’investissement qui sont

affectées.

Page 20: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Comme nous l’avons vu précédemment, la Banque centrale n’a pas de taux directeur.

Le taux qui peut servir de référence est le taux sur les bonds du Trésor à 13 semaines

dont le niveau dépend des conditions financières de la Trésorerie de l’Etat. La

politique budgétaire qui définit le niveau du déficit et les modes de son financement

affecte ainsi le fonctionnement de ce canal de transmission.

3.4.2. Le canal du crédit bancaire.

Les banques commerciales jouent un rôle de premier plan dans le processus de

financement par l'intermédiaire de l'octroi de crédits. A cet effet, le système bancaire

n'est plus neutre dans la transmission de la politique monétaire.

Les besoins d’emprunt de l’Etat auprès du secteur bancaire pour financer son déficit

budgétaire aboutissent sur l’augmentation de la demande de crédit net. Pour

satisfaire son besoin d’emprunt, l’Etat offre des conditions plus favorables par

rapport aux autres agents à besoin de financement. Ce comportement de l’Etat sur le

marché des fonds prêtables provoque naturellement la hausse des taux d’intérêt.

Ainsi, les crédits qui auraient été alloués au secteur privé pour financer les

investissements s’amenuisent pour deux raisons. D’une part, le montant disponible

est partagé entre le secteur privé et le géant du marché qui est l’Etat. D’autre part,

les conditions du marché ne sont plus favorables aux particuliers et aux PME. C’est

l’éviction du secteur privé.

Dans ces conditions, le canal du crédit bancaire ne fonctionne plus de façon optimale.

En effet, le recours excessif de l’Etat à l’endettement auprès du secteur bancaire

risque d’évincer le secteur privé.

Graphique 5 : Taux de croissance des crédits au secteur privé et à l’Etat

Page 21: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

-80

-40

0

40

80

120

160

200

240

I II III IV I II III IV I II III IV I II III IV I II III IV I II III IV

2009 2010 2011 2012 2013 2014

TX_CE TX_CSP

Pério

de de

carre

nce d

e liqu

idité

banc

aire

Janv à décembre 2012

A travers ce graphique, nous constatons que les risques d’éviction du secteur privé

par l’endettement de l’Etat sont réels. En effet, les taux de croissance du crédit au

secteur privé et celui du crédit à l’Etat évoluent dans des sens opposés à l’exception

de la période particulière de l’année 2012 caractérisée par une baisse exceptionnelle

de la liquidité bancaire. Pour cette période, ces taux de croissance des crédits ont

tous baissé.

Le Gouvernement devrait alors repenser à son programme d’endettement pour

éviter les risques d’éviction du secteur privé. Il devrait à cet effet intervenir sur le

marché de manière ponctuelle et limitée. Sa présence permanente dans le secteur

bancaire constitue un frein à la réussite de la politique monétaire.

3.4.3. Le canal du taux de change.

Le taux de change joue un rôle primordial dans la transmission de la politique

monétaire surtout sous le régime de change flottant. Toutefois, le fonctionnement de

ce canal dépend aussi du niveau du déficit budgétaire. En effet, les déficits

budgétaires s’accompagnent des déficits du compte courant provoquant ainsi la

dépréciation de la monnaie nationale. Or, la stabilité de la valeur de la monnaie

nationale est une préoccupation de la Banque centrale.

Page 22: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Dans les pays en développement, la dépréciation de la monnaie nationale n’exerce

pas d’effet favorable en améliorant la compétitivité de leurs produits face aux

importations inchangées. Par contre, elle provoque une hausse des prix des

importations. Ceci aura pour effet des tensions inflationnistes par le biais des biens et

services importés. La politique budgétaire affecte ainsi le fonctionnement de ce canal

de transmission de la politique monétaire.

4. La nécessité de coordination des politiques budgétaire et monétaire au Burundi

Quoiqu’elles utilisent des instruments de nature distincte, les politiques budgétaire et

monétaire ont des interactions entre elles dues au fait que leurs instruments jouent

tous entre injections et fuites des moyens de paiement du circuit économique. Dans

la plupart des cas, des difficultés de mise en œuvre empêchent l'orientation

budgétaire de converger avec les objectifs monétaires et vice versa.

Tableau 5 : Evolution du déficit budgétaire et de la masse monétaire2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

A. RECETTES ET DONS 363 279,4 397 694,7 408 881,4 631 243,2 678 889,4 705 729,5 841 657,8 877 040,5B. DEPENSES 393 193,6 438 236,2 537 419,8 673 537,5 768 962,4 827 237,0 953 819,7 1 059 286,0SOLDE GLOBAL DONS COMPRIS (base droits const.) -29 914,2 -40 541,5 -128 538,4 -42 294,3 -90 073,0 -121 507,4 -112 161,9 -182 245,5Masse monétaire M2 330 079,1 443 117,8 530 770,3 597 009,8 636 400,0 708 053,0 801 728,3 883 059,6

Taux de croissance du déficit budgétaire en % 35,5 217,1 -67,1 113,0 34,9 -7,7 62,5Taux de croissance de la masse monétaire M2 34,2 19,8 12,5 6,6 11,3 13,2 10,1

Source : MFPDE

Une augmentation inadéquate des dépenses publiques se traduit par une croissance

excessive de la masse monétaire avec tous ses effets inflationnistes. Pourtant, si on

analyse les taux de croissance du défit budgétaire et de la masse monétaire, on

constate que le Burundi a tendance à pratiquer simultanément le laxisme budgétaire

et la rigueur monétaire car le taux de croissance des déficits budgétaires est dans la

plupart des cas supérieur au taux de croissance de la masse monétaire. En fait, la

conjonction de déficits budgétaires élevés et des mesures de restriction monétaire a

entrainé une croissance rapide de la dette publique comme le montre le tableau ci-

dessous.

Page 23: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Tableau 6 : Evolution du taux de croissance de la dette2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014

DETTE INTERIEURE 193 066,9 230 472,2 241 179,0 272 437,6 366 046,1 427 102,6 464 027,7 539 599,5 597 961,8 730 117,7DETTE EXTERIEURE 1 244 659,2 1 325 323,9 1 530 542,8 1 567 958,7 561 392,0 494 683,4 485 081,1 607 681,4 615 707,6 656 563,7TOTAL 1 437 726,1 1 555 796,1 1 771 721,8 1 840 396,3 927 438,1 921 786,0 949 108,8 1 147 280,9 1 213 669,4 1 386 681,4

DETTE INTERIEURE (3,7) 19,4 4,6 13,0 34,4 16,7 8,6 16,3 10,8 22,1DETTE EXTERIEURE (14,6) 6,5 15,5 2,4 (64,2) (11,9) (1,9) 25,3 1,3 6,6TOTAL (13,3) 8,2 13,9 3,9 (49,6) (0,6) 3,0 20,9 5,8 14,3 Source :BRB et MFPDE

Taux de croissance de la dette

Il ressort de ce tableau qu’à l’exception de l’année 2005 qui a été simultanément

caractérisée par le plus bas déficit budgétaire et la baisse de la dette publique totale,

le reste de la période retenu a été marquée par une croissance continue de la dette

intérieure. La dette extérieure a aussi chuté en 2009 grâce à la remise de dette sous

le programme PPTE (Pays Pauvres Très Endettés). Cette dette a connu un rebond

deux ans après pour enregistrer un taux de croissance de 25,3%.

Cette combinaison de croissance des déficits budgétaires, de la masse monétaire et

de la dette publique prouve l’interaction entre les politiques monétaire et budgétaire.

Or, l’interaction entre les deux politiques doit garantir une croissance allant de pair

avec la stabilité des prix. Pour arriver à cette ambition, certains principes

fondamentaux doivent être observés.

4.1. Cohérence des normes budgétaires et des objectifs monétaires.

Le budget de l’Etat ne doit pas être nécessairement régulièrement équilibré.

Toutefois, l’évolution des déficits budgétaires doit systématiquement tenir compte

des contraintes liées au financement des opérations des administrations publiques.

En effet, un conflit persistant entre le déficit budgétaire et l’orientation de la

politique monétaire peut engendrer des problèmes de financement. Un pays qui veut

réduire sa dépendance de l’extérieur limite son déficit budgétaire au même niveau

que la formation de l’épargne privée sinon il va faire recours à l’épargne extérieure.

Page 24: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

A cet effet, la stratégie en matière de finances publiques peut être fondée sur une

règle de stabilité budgétaire se traduisant concrètement par un déficit du budget

compatible, sur le long terme, avec une augmentation déterminée de la quantité de

monnaie. La persistance du déficit budgétaire est incompatible avec la maîtrise à

moyen terme de l’expansion monétaire.

4.2. Coordination des instruments monétaires et budgétaires

De nos jours, la régulation de la demande globale ne repose plus uniquement sur les

stabilisateurs budgétaires automatiques. Elle s'appuie aussi sur les objectifs

monétaires dont la mise en œuvre dépend de l'efficacité des techniques utilisées à

cet effet. Ces deux politiques se caractérisent par un ensemble interdépendant

d’objectifs, d’instruments, et d’outils de contrôle d’où la nécessité de leur

coordination. Si seule la politique monétaire avait un effet sur l’inflation, il n’en

résulterait aucun besoin de coordination. Or, les politiques budgétaires nationales

affectent les prix nationaux. Toute politique inflationniste dans un pays est

susceptible d’avoir un impact sur la politique monétaire nationale.

Pour permettre à la Banque centrale de résorber avec succès tous les chocs issus des

autres politiques économiques, Barro et Gordon (1983) prêchent pour son

indépendance. Ils mettent en avant les avantages de cette indépendance du point de

vue de la crédibilité de la politique anti-inflationniste. Or, l'indépendance de la

banque centrale, si elle n’est pas bien dosée, entraîne la perte d'un instrument de

politique économique. En effet, l’octroi de l’indépendance à la banque centrale la

rend autonome des autorités monétaires. Ainsi, tous les instruments à la disposition

de la banque centrale sont orientés vers un seul objectif de lutte contre l’inflation,

même en période de faible inflation et de récession économique.

Page 25: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

5. Vérification empirique de l’interaction entre les politiques monétaire et budgétaire

Ce travail va se faire en deux étapes. La première phase va consister à analyser les

effets qu’exerce la politique budgétaire sur la conduite de la politique monétaire. La

seconde phase traitera de l’impact de la politique budgétaire sur les canaux de

transmission de la politique monétaire.

5.1. Impact de la politique budgétaire sur la conduite de la politique monétaire.

Comme nous l’avons vu à travers les développements des chapitres précédents, les

politiques budgétaire et monétaire ont le même champ d’action –demande globale-

et utilisent des instruments qui exercent des interactions entre eux. A cet effet, la

politique budgétaire affecte la conduite de la politique monétaire à travers un certain

nombre de voies. Théoriquement, nous avons vu tout un processus à travers lequel la

conduite de l’une affecte celle de l’autre.

Dans ce chapitre, le travail consiste à analyser les données statistiques qui sont à

notre disposition pour appréhender cette liaison entre les deux politiques. Les

données qui ont été analysées ont été collectées dans les bulletins mensuels de la

Banque. Les séries portent sur la période allant de janvier 2005 à juin 2015.

Les variables qui ont retenues pour des fins de cette analyse sont :DEP_TOT: les dépenses totales du budget de l’Etat

AVANCES: les avances de la Banque centrale à l’Etat

IPC : l’indice des prix à la consommation

DETTE_EXT : la dette extérieure de l’Etat

ENCOURS_BT : l’encours des titres publics détenus par les banques commerciales

CSP : les crédits au secteur privé

TX_BT: le taux sur les Bons du Trésor à 13 semaines

TX_CHG : le taux de change nominal du BIF/USD

RECETTES : les recettes fiscales du budget de l’Etat

TXDB: le taux débiteur moyen

Les résultats de l’analyse de la relation de causalité entre les variables retenues sont

repris dans le tableau en bas.

Page 26: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Tableau 7 : Analyse de la causalité au sens de Granger Pairwise Granger Causality TestsDate: 10/11/15 Time: 11:59Sample: 2005M01 2015M06Lags: 2

NullHypothesis: Obs F-Statistic

Prob.

DEP_TOT_ does not Granger Cause AVANCES 124 3.81957 0.0255 AVANCES does not Granger Cause IPC 2.87776 0.0613 RECETTES does not Granger Cause IPC 124 0.00244 0.9976 DETTE_EXT_ does not Granger Cause CSP 124 4.21426 0.0170 TX_BT does not Granger Cause TXDB 2.53680 0.0834 TX_BT does not Granger Cause CSP 124 0.66391 0.5167 DEP_TOT_ does not Granger Cause TX_BT 0.56284 0.5711 DEP_TOT_ does not Granger Cause ENCOURS_BT 3.76788 0.0259 TX_BT does not Granger Cause ENCOURS_BT 124 6.08727 0.0030 ENCOURS_BT does not Granger Cause TX_BT 0.14626 0.8641 DETTE_EXT_ does not Granger Cause TX_CHG 1.07671 0.3440 TX_CHG does not Granger Cause IPC 124 4.96277 0.0085 IPC does not Granger Cause TX_CHG 4.98496 0.0083 TXDB does not Granger Cause IPC 124 3.32002 0.0395 IPC does not Granger Cause TXDB 2.02009 0.1372

A travers ces résultats, nous constatons que les dépenses totales du budget de l’Etat

causent les avances de la Banque centrale au sens de Granger. C’est-à-dire que si les

dépenses s’accroissent, elles entrainent un recours aux avances par l’Etat pour

financer son déficit budgétaire. Les dépenses du budget étant un instrument de

politique budgétaire, cette liaison montre combien la politique budgétaire affecte la

conduite de la politique monétaire. Mais, contrairement à nos attentes, les avances

de la Banque Centrale ne cousent pas significativement le niveau général des prix.

Cela est dû au fait que les prix sont influencés par beaucoup de facteurs et que la

contribution des avances de la Banque centrale n’est pas perceptible sur base de la

séries retenue. Cela vaut aussi pour les recettes fiscales.

La dette extérieure de l’Etat cause les crédits au secteur privé au sens de Granger. La

lecture que nous pouvons faire de cette relation est que si l’Etat contracte des dettes

à l’Etranger, il reçoit les devises qui pour être dépensées doivent être converties en

monnaie locale et augmentent de fait le niveau de la Base monétaire et partant le

niveau de la liquidité des banques. A leur tour, les banques accordent davantage de

Page 27: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

crédit au secteur privé. La contraction d’une dette extérieure est donc susceptible

d’influencer l’objectif opérationnel de la politique monétaire et affecte ainsi sa

conduite.

Le taux sur les bons du Trésor à 13 semaines ne cause pas le taux débiteur alors que

la relation était sensée prévaloir. En effet, le taux de la facilité de prêt marginal de la

BRB est déterminé en ajoutant 3 points de pourcentage au taux moyen des bons du

Trésor à 13 semaines. Par conséquent, il y a absence de causalité entre le taux sur les

bons du Trésor et les crédits au secteur privé. En outre, les dépenses totales de l’Etat

ne causent pas le niveau des bons du Trésor à 13 semaines. C’est-à-dire que même en

cas de besoin pressant de financement du déficit de l’Etat, les banques préfèrent

prêter leurs fonds à des taux stables pour profiter du caractère sans risque de l’agent

Etat. La politique budgétaire ne peut donc pas affecter la conduite de la politique

monétaire à travers les taux d’intérêt.

Même si l’Etat n’influence pas les taux d’intérêt sur les bons du Trésor, il profite des

conditions du marché pour s’endetter. En effet, nous constatons que les dépenses

totales causent l’encours des titres publics détenus par les banques commerciales.

Cela est aussi corroboré par la présence de la causalité unidirectionnelle qui va des

taux sur les Bons du Trésor vers l’encours des bons du trésor. Puisque la politique

monétaire a le rôle de réguler la quantité de crédit accordé par le système bancaire,

elle est affectée par la présence de l’Etat sur ce marché des fonds prêtables.

Nous pouvons aussi observer une causalité croisée entre le taux de change et

l’inflation. Or, le taux de change est une affaire de la Banque centrale au moment où

les actions de l’Etat sont de nature à influencer l’inflation.

Dans notre analyse, nous avons constaté qu’il y a aussi une causalité unidirectionnelle

qui va du taux moyen débiteur vers l’indice des prix à la consommation. Cela signifie

Page 28: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

que les taux débiteurs affectent le niveau général des prix mais qu’inversement, les

taux d’intérêt ne sont pas constamment indexés au niveau général des prix.

En conclusion, la politique budgétaire n’est pas neutre sur la conduite de la politique

monétaire. Le maniement des instruments de la politique budgétaire affecte

l’orientation et la conduite de la politique monétaire. La politique monétaire peut

toujours être adaptée à la nature de la politique budgétaire. Dans ce cas, pour éviter

que les efforts la de Banque centrale ne soient pas vains, il faut se rassurer que la

politique budgétaire n’affectent pas les canaux de transmission de la politique

monétaire.

5.2. Effets de la politique budgétaire sur les canaux de transmission de la politique monétaire.

Nous utilisons un modèle VAR (CectorAutoRegressive) pour appréhender les effets de

la politique budgétaire sur les canaux de transmission de la politique monétaire. Pour

cela, nous faisons des simulations de chocs aléatoires sur le déficit budgétaire (qui est

un indicateur du genre de politique monétaire) et nous observons la réaction des

canaux de transmission de la politique monétaire.

5.2.1. Spécification du modèle

Comme indiqué ci-dessus, nous avons choisi d’étudier plus particulièrement les effets de la politique monétaire au Burundi sur le secteur réel (activité et prix). C’est pourquoi le modèle retenu va comporter 5 variables que sont le PIB (y), le taux d’intérêt débiteur (TD), la masse monétaire au sens large (M2), le niveau des prix à la consommation (P) et le taux de change nominal (E) du Bif par rapport au USD avec cotation à l’incertain. Pour appréhender le canal du crédit, on pourra remplacer la masse monétaire par le crédit au secteur privé (CR). Nous estimons la représentation VAR structurelle suivante :

A(L)Xt = µt

Page 29: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

(1) µ est le vecteur des aléas structurels orthogonaux et non corrélés entre eux évoqués auparavant1 :

µ = [µy, µp, µtd, µm, µe] ’ (2)

Afin de calculer les fonctions de réponses aux chocs et la décomposition de la variance des erreurs de prévision, le modèle VAR peut être réécrit sous la forme moyenne mobile :Xt = B(L) µt (3)A partir des données, nous estimons la représentation vectorielle autorégressive de la forme réduite :

C(L)Xt = αt (4)

ou sa représentation moyenne mobile :Xt = D(L) αt (5)La matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires des chocs structurels affectant le système. Ceci revient à supposer qu’il existe une matrice S de plein rang de dimension (5,5) telle que :

α = Sµ (6)D’après les équations (2), (4) et (5), nous pouvons écrire :

B(L) = D (7)

Ainsi, il est facile de retrouver la représentation VAR structurelle à partir des équations (1), (3) et (5) grâce à la relation suivante :

A(L) = S-1 C(L) (8)

Si nous appelons Ω la matrice de variance-covariance des innovations, la représentation structurelle du modèle est obtenue grâce au calcul des 25 éléments de la matrice S. L’hypothèse d’orthogonalité des chocs structurels (E(µµ’) = I2 )- qui permet de les distinguer les uns des autres- et de linéarité des relations entre les chocs structurels et les innovations nous permet d’écrire

SS’ = Ω (9)

1 µt représente le choc sur une variable donnée.

Page 30: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Comme Ω est une matrice symétrique de dimension (5,5), on doit alors imposer n(n-1)/2 restrictions supplémentaires à la matrice des coefficients où n est le nombre de variable dans le modèle. Alors, 25 éléments de la matrice S peuvent être identifiés à partir de l’équation précédente. Il est donc nécessaire d’introduire 10 contraintes supplémentaires pour que le modèle structurel soit juste identifié.

D’amblée, nous estimons la forme réduite du modèle VAR par le calcul de la factorisation de Cholesky. Selon lui, l’ordre des variables dans le modèle VAR importe beaucoup. Il admet qu’une variable n’a pas d’effet immédiat sur la variable suivante.

5.2.2. Données utilisées

Nous utilisons les données trimestrielles allant du premier trimestre 2005 au

deuxième trimestre 2015.Le modèle VAR retenu utilise cinq variables :

DFB : déficit budgétaire ;

CSP : crédits au secteur privé ;

IPC : indice des prix à la consommation ;

TXC : taux de change, et

ETX : écart de taux d’intérêt

Les variables DFB, CSP, IPC et TCG sont exprimé en logarithme.

5.2.3. Ordre d’intégration du VAR

Pour déterminer l’ordre d’intégration du VAR, nous utilisons le test courant de Dickey

Fuller Augmenté. Les résultats de ce test sont repris dans le tableau ci-après :

LDFB LTXC LCSP LIPC ETXI(1) I(1) I(1) I(1) I(1)

Il ressort de ce tableau que toutes les variables sont intégrées d’ordre 1. Les

paramètres du modèle peuvent donc être estimés sur des séries en différence

première.

5.2.4. Détermination du nombre de retards du modèleVAR Lag Order Selection CriteriaEndogenous variables: LDFB ETX LCSP LTXC LIPC

Page 31: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

Exogenous variables: CDate: 10/08/15 Time: 10:55Sample: 2005Q1 2015Q2Included observations: 39

Lag LogL LR FPE AIC SC HQ

0 -2.994282 NA 1.04e-06 0.409963 0.623240 0.4864851 190.7171 327.8193* 1.83e-10* -8.241904* -6.962241* -7.782772*2 209.0082 26.26413 2.77e-10 -7.897857 -5.551809 -7.0561153 230.4049 25.23711 3.98e-10 -7.713072 -4.300637 -6.488720

* indicates lag order selected by the criterion LR: sequential modified LR test statistic (each test at 5% level) FPE: Final predictionerror AIC: Akaike information criterion SC: Schwarz information criterion HQ: Hannan-Quinn information criterion

Il ressort de ce tableau que le retard 1 minimise tous les critères retenus. Nous

concluons donc que le nombre de retard optimal pour notre modèle VAR est 1. Avant

d’utiliser un modèle, il faut se rassurer qu’il est stable.

5.2.5. Stabilité du VAR(1)

-1.5

-1.0

-0.5

0.0

0.5

1.0

1.5

-1.5 -1.0 -0.5 0.0 0.5 1.0 1.5

Inverse Roots of AR Characteristic Polynomial

Le modèle est stable car tous les points sont à l’intérieur du cercle unitaire.

5.2.6. Analyse des fonctions de réponses impulsionnelles

Les graphiques ci-dessous représentent les réponses des variables du système au

choc sur les résidus structurels de la variable déficit budgétaire. Pour cette variable, le

Page 32: cmi.comesa.int · Web viewLa matrice B(0) est égale à la matrice identité I et α est le vecteur des innovations. Nous supposons que les innovations sont des combinaisons linéaires

choc est égal à l’écart-type de ses résidus. L’horizon temporel des réponses qui

représente le délai nécessaire pour que les effets du choc s’estompent entièrement

est fixé à 10 trimestres.

-.020

-.015

-.010

-.005

.000

.005

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Response of D(LTXC) to D(LDFB)

-.004

-.003

-.002

-.001

.000

.001

.002

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Response of D(LCSP) to D(LDFB)

-.10

-.05

.00

.05

.10

.15

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Response of D(ETX) to D(LDFB)

-.004

.000

.004

.008

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Response of D(LIPC) to D(LDFB)

Response to Cholesky One S.D. Innovations

Un choc positif sur le déficit budgétaire se traduit par :

Un effet négatif durable sur le taux de change qui devient maximal à la fin du

2ème trimestre. L’effet s’estompe progressivement pour s’annuler au 7ème

trimestre.

Un effet positif transitoire sur le crédit au secteur privé qui devient maximal au

troisième trimestre et qui pourtant change de sens pour atteindre le minimum

après une année. L’effet s’annule complètement au bout de deux ans et un

trimestre.

Un effet négatif transitoire sur l’écart des taux qui devient maximal au

deuxième trimestre et qui atteint son point positif maximum après le 3ème

trimestre. L’effet s’annule ensuite au bout du d’une année et demi.

Un effet positif et transitoire sur l’inflation qui devient maximale au bout de

deux trimestres. L’effet devient négatif par après et la variable retrouve son

niveau de long terme après le 9ème trimestre

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Le déficit budgétaire n’est donc pas sans effet sur les canaux de transmission de la

politique monétaire, ce qui renforce le besoin de coordination entre les deux

politiques. Les deux politiques peuvent donc être en phase si la conduite de la

politique monétaire est adaptée à la politique budgétaire. En effet, elles interagissent

beaucoup aussi bien au niveau de la conception et de la conduite qu’au niveau de la

transmission.

6. Conclusion générale

Le but ultime des politiques budgétaire et monétaire est d’adapter la demande

globale au niveau de l’offre globale. Puisque ces deux politiques sont gérées par deux

entités distinctes ayant chacune ses propres objectifs, instruments et contraintes, il

est indispensable d’atteindre un certain niveau de coordination entre ces deux

décideurs sous peine d’arriver à des résultats divergents. En effet, nous avons vu au

cours des développements précédents que l'orientation de la politique budgétaire est

davantage déterminée par la procédure budgétaire elle-même que par les objectifs

de la politique monétaire. La rigidité observée du déficit du budget peut impliquer

une certaine autonomie dans la conduite de la politique budgétaire.

A cet effet, le financement du déficit budgétaire et ses conséquences sur la gestion

monétaire constituent les piliers de l’interaction entre les deux politiques. La

stratégie de financement du Gouvernement aura certes une incidence sur

l’orientation de la politique monétaire d’où une incontestable nécessité de

coordination des deux politiques. Cette coordination devra se faire à deux

niveaux portant sur les aspects institutionnel et opérationnel.

Le Burundi n’est pas une économie de marché. Il y a absence totale de marché des

capitaux et les taux d’intérêt ne jouent pas le rôle prépondérant dans l’allocation des

ressources. C’est une économie d’endettement où les marchés sont sous-développés.

Dans ces conditions, l’octroi d’une indépendance totale à la Banque centrale

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« divorce accompli » pourrait entraver la mise en œuvre des politiques budgétaires

expansionnistes car tous les instruments sont orientés vers un seul objectif qui est la

stabilité des prix et la Banque n’accorde point de crédit à l’Etat même en

temporairement. Dans un tel contexte, le comité de coordination doit adopter un

programme de travail bien serré pour que les deux politiques soient harmonisées et

se renforcent mutuellement.

Au niveau opérationnel, étant donné que la politique monétaire est basée sur le

ciblage des agrégats monétaires, la gestion de la liquidité à travers les instruments

d’open market constitue un instrument privilégié. A cet effet, la mise en place d’un

cadre approprié pour la prévision des soldes de trésorerie qui sont une composante

importante des conditions de liquidité dans le système est un impératif. La

coordination à ce niveau appelle le partage d’informations pour permettre à la

Banque centrale de garder le plein contrôle sur l’évolution globale des liquidités dans

le système à travers sa capacité de les influencer au moyen des instruments qui sont

à sa disposition. Aussi, la période de prévision de la Trésorerie de l’Etat et celle des

liquidités doivent être harmonisées pour éviter l’absence d’informations.

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