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COMMENT FREINER LA DÉSINDUSTRIALISATION ? Henri Lachmann Editions Choiseul | Géoéconomie 2014/1 - n° 68 pages 27 à 36 ISSN 1284-9340 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-geoeconomie-2014-1-page-27.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Lachmann Henri, « Comment freiner la désindustrialisation ? », Géoéconomie, 2014/1 n° 68, p. 27-36. DOI : 10.3917/geoec.068.0027 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Editions Choiseul. © Editions Choiseul. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 21/03/2014 02h13. © Editions Choiseul Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 21/03/2014 02h13. © Editions Choiseul

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COMMENT FREINER LA DÉSINDUSTRIALISATION ? Henri Lachmann Editions Choiseul | Géoéconomie 2014/1 - n° 68pages 27 à 36

ISSN 1284-9340

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-geoeconomie-2014-1-page-27.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Lachmann Henri, « Comment freiner la désindustrialisation ? »,

Géoéconomie, 2014/1 n° 68, p. 27-36. DOI : 10.3917/geoec.068.0027

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Distribution électronique Cairn.info pour Editions Choiseul.

© Editions Choiseul. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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Comment freiner la désindustrialisation ?

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Ancien président de Schneider Electric, Henri Lachmann est une des grandes figures de l'industrie française.

Pas de politique sociale sans économie puissante (c’est l’économique qui doit financer le social), pas d’économie

puissante sans industrie forte et pas d’industrie forte sans investissement dans la recherche et développement et sans usine sur le territoire. J’ajoute qu’une économie forte ne peut pas être fondée sur l’immatériel et encore moins le virtuel. Elle doit aussi avoir une véritable utilité sociale.

Malheureusement nous constatons aujourd’hui une désindustrialisation de la France : l’industrie (hors services à l’industrie) ne représente que 16 % du PIB contre 22 % en 1998, 30 % en Allemagne et 22 % dans la zone Euro. Avec près de 2 millions d’emplois perdus dans l’industrie manufacturière en presque 30 ans, l’industrie française connaît actuellement l’une de ses phases les plus sombres. Ce phénomène se conjugue aujourd’hui avec la perte de la compétitivité de l’économie française et donc la perte de parts de marché tant dans la zone Euro que dans le reste du monde. Repenser l’industrie française pour freiner la désindustrialisation est donc vitale à la relance globale de l’économie.

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la désindustrialisation en france

Même si la crise de 2008 fut un accélérateur de cette tendance, la désindustrialisation a commencé à prendre corps dans les années 1980, particulièrement dans l’industrie manufacturière : sur les quelques 2 millions d’emplois perdus dans l’industrie depuis 1980, près de 96 % sont issus de l’industrie manufacturière, et depuis 2009, ce sont 121 946 emplois qui ont été détruits dans ce secteur !

Ce mouvement a fortement contribué à l’augmentation du chômage, mais également à la fragilisation du potentiel d’innovation (85 % de l’effort de R&D fait partie du domaine de l’industrie), ainsi qu’à l’augmentation du déficit et de la dette publique de la France.

Ce déclin industriel majeur a également des effets néfastes sur les grands équilibres sociaux et économiques de la France : perte d’emplois industriels, baisse de la contribution de l’industrie en termes de valeur ajoutée à la formation du PIB et augmentation des importations. Les importations de produits manufacturés connaissent une croissance très vive notamment en compensation du recul de la production industrielle et aggravant par la même le solde du commerce extérieur des produits industriels. Cette tendance des échanges de la France dominée par les importations a également contribué à la destruction d’emplois.

En parallèle, et depuis plus de dix ans, la compétitivité de l’industrie n’a cessé de régresser. Sur la période 2000-2011, la part de marché (exportations) de la France dans la zone Euro a diminué de 3,4 % (elle est passée de 12,7 % à 9,3 %), alors que celle de l’Allemagne a atteint en 2011 les 22,4 % avec une progression sur la même période de plus de 1 %.

L’industrie se trouve donc au centre de tous les enjeux économiques et sociaux de notre pays en ce début de XXIe siècle. Le phénomène de désindustrialisation que nous vivons actuellement n’est néanmoins pas une fatalité et peut malgré tout être freiné si l’on s’accorde tous sur ses causes et sur les moyens et outils à développer

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pour contribuer à son redressement. Et il y a urgence ! De nombreux acteurs doivent dès maintenant agir dans ce sens si nous ne voulons pas voir notre rang, notre compétitivité, notre économie et notre tissu socio-économique éclater.

les facteurs de la désindustrialisation

Plusieurs éléments contextuels et dépassant le cadre de la France peuvent êtres avancés pour expliquer en partie ce phénomène de désindustrialisation.

Il y a tout d’abord et surtout la montée en puissance des pays émergents, tels que la Chine, le Brésil, la Russie, dont les faibles coûts de productions et l’étendue de la gamme de produits fabriqués ont fortement dégradé la place de la France sur le marché international.

Il y a également la présence et les contraintes du droit de la concurrence communautaire et du marché unique qui entrent souvent en contradiction avec les politiques industrielles intérieures qui sont elles-mêmes contraire aux intérêts stratégiques communautaires.

Les délocalisations de compétitivité ont, quant à elles, aussi contribué au recul de l’industrie (et aux ruptures de filières industrielles), à la destruction des emplois industriels et à l’aggravation du déficit budgétaire.

Les contraintes nationales en termes de coûts et d’exigences réglementaires (impôts, salaires, durcissement du cadre réglementaire, etc.) qui incitent les entreprises industrielles à délocaliser à l’étranger pour trouver plus de flexibilité dans des pays où l’environnement économique, social et réglementaire, est plus favorable.

Mais ces éléments objectifs et connus de tous ne sauraient à eux seuls expliquer le déclin de l’industrie française

De mon point de vue, issue essentiellement de mon expérience, j’estime que le phénomène de désindustrialisation en France est dû à neuf facteurs principaux.

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1. Les Français n’aiment pas leur industrie

Les Français aiment et apprécient les bons produits mais n’aiment pas ceux qui les conçoivent et les fabriquent. Ils ne comprennent pas son utilité voire sa nécessité. Ils ne voient pas son évolution : l’industrie n’est plus synonyme de travail pénible ou de pollution de toute nature. Ce n’est pas ou plus Zola. Dans la plupart des entreprises industrielles, la majorité des collaborateurs sont maintenant des « cols blancs ».

2. Un droit du travail très peu malléable

Les rigidités du droit du travail et l’anachronisme du dialogue social constituent un frein à la réindustrialisation de notre territoire et accélèrent l’implantation d’établissements industriels en dehors de la France. Il appartient aux entreprises, soutenues par les pouvoirs publics, d’établir un nouveau dialogue social avec les partenaires sociaux, mais aussi avec les autres parties prenantes. Flexibilité n’est pas synonyme de précarité et rigidité n’est pas synonyme de sécurité. C’est en faisant la pédagogie des faits que nous progresserons dans un nouveau contrat social, plus moderne et plus adapté à la réalité de notre monde. De plus, en France, nous faisons trop appel aux intérimaires et aux CDD pour se donner une flexibilité que le droit du travail ne permet pas. Cet abus, qui est une réponse tactique à un problème structurel, ne favorise pas le lien social entre le salarié et l’entreprise industrielle.

3. Le manque de collaboration

Aucun pays n’a construit des murs aussi étanches que la France : mur entre le secteur public et le secteur privé, mur entre Paris et le reste du territoire, mur entre les grandes entreprises (en fait le CAC 40 qui est le plus grand succès de l’Entreprise France) et les PME (dont le trop petit nombre constitue la grande faiblesse de l’Entreprise France), mur entre le monde de l’université, de la recherche, de l’éducation et le monde de l’entreprise. Nous ne savons pas ou ne voulons pas travailler ensemble. Il y a un vrai déficit de collectif et de collaboration active et concrète entre tous ces acteurs.

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4. Un système éducatif en échec

Notre système de formation est en échec. Le monde nous envie la formation de nos élites, en fait nos grandes écoles, mais nous oublions que sur une génération de 800 000 jeunes, 150 000 sortent tous les ans du système éducatif sans qualification ou diplôme. L’industrie ne peut se construire et se développer qu’en s’appuyant sur des hommes et des femmes qualifiés. Ce sont elles et eux qui constituent la ressource stratégique majeure d’une entreprise. Ce n’est pas la finance. La formation par alternance doit devenir une nouvelle priorité dans notre système éducatif, pour nos entreprises. Nous avons environ 400 000 apprentis, quand l’Allemagne en compte 1,5 million. Chez nous l’apprentissage est la filière de l’échec, alors que c’est un véritable mode de formation qualifiant à un métier. Nous sommes la lanterne rouge de l’Europe en matière de chômage des jeunes, nous n’accordons pas suffisamment d’importance à la qualification, nous parlons et pensons toujours en terme de diplôme et pas assez en terme de métier. J’ajoute que nous formons insuffisamment d’ingénieurs et que malheureusement un trop grand nombre d’entre eux, une fois formés et diplômés, n’exercent pas le métier d’ingénieur. Ils partent vers la finance, pour élaborer des modèles financiers et faire des algorithmes.

5. La financiarisation

La financiarisation de l’économie et la financiarisation des entreprises constituent une nuisance pour l’industrie et pour l’économie réelle au service de l’ensemble de la société. C’est d’ailleurs, la finance et sa spéculation qui ont déclenché la crise économique, ce n’est pas l’économie qui a créé la crise financière. Cette financiarisation développe un rapport avec le temps qui n’a rien à voir avec le temps réel de l’entreprise, voire avec le temps de la vie tout court : on a déménagé les ordinateurs d’Euronext de Paris à Londres pour gagner quelques nano secondes dans les transactions. Le virtuel l’emporte sur le réel économique : il y a 38 fois plus de

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transactions sur les matières premières que de consommation de matières premières, sur cent transactions financières deux sont fondées ou basées sur des transactions économiques réelles. Ces transactions, souvent pour compte propre, ne servent ni l’économie ni la société. Le monde financier a une efficacité d’influence et de lobbying très forte auprès du monde public et des médias. Combien d’énarques et d’inspecteurs des finances sont dirigeants de banque ou de compagnie d’assurance ? Les institutions financières n’investissent pas suffisamment, elles spéculent. Le financement de l’économie et donc de l’industrie, plus particulièrement par le crédit, doit redevenir leur première raison d’être.

6. L’économie française versus le Mittelstand allemand

Cette financiarisation de l’économie et des entreprises ainsi que la mauvaise utilisation des formidables nouvelles technologies de l’information ont fait que nous avons développé de mauvais rapports avec le temps. Tout relève du court terme : la réflexion, l’action, la mesure de la performance. Et comme la mesure induit les comportements, les dirigeants et leurs collaborateurs privilégient trop le court terme et trop exclusivement la performance financière au détriment des performances économiques, sociales et environnementales.

Le Mittelstand allemand, grande force de l’économie allemande, se conduit très différemment : les objectifs d’une PME allemande sont à long terme. Elle investit beaucoup dans la recherche et le développement, ses critères de performance sont économiques et sociaux. L’objectif de son propriétaire et dirigeant est de transmettre à la prochaine génération une entreprise plus forte et plus saine que celle qui lui a été transférée. En France trop souvent la PME n’a pas le temps de devenir une entreprise de taille intermédiaire. Son propriétaire dirigeant la vend à un grand groupe ou à un investisseur financier. La dynamique propre à la PME insufflée par un entrepreneur propriétaire est ainsi arrêtée.

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7. Les entreprises allemandes chassent en meute

Les entreprises allemandes ont su créer puis développer un écosystème de croissance où chaque entreprise grande et petite contribue à enrichir l’autre. Leurs relations s’inscrivent dans le long terme et sont de nature partenariale. Nos grandes entreprises françaises dont le nombre et la performance sont très supérieures en proportion à notre puissance économique n’ont pas voulu et ou n’ont pas su développer de telles relations avec nos PME. Les PME sont des sous-traitants, ce ne sont souvent pas des fournisseurs et encore moins des partenaires. La grande entreprise est donneur d’ordres. Le prix ponctuel est un critère de compétitivité trop exclusif : la compétitivité devrait aussi s’inscrire dans le temps et s’exprimer aussi beaucoup en termes de qualité, de services et de performance du produit. Cette absence de collaboration entre les grandes entreprises et les entreprises indépendantes moins grandes a contribué à la désindustrialisation de notre pays.

8. Des ressources non exploitées

Nos entreprises (grandes et moins grandes) consacrent insuffisamment de ressources (temps et argent) à la recherche, au développement et à l’innovation. Elles collaborent de manière insuffisante entre elles et avec les universités et les centres de recherche. Et pourtant c’est pour nos produits et leur performance que nos clients nous font confiance. Les pôles de compétitivité constituent une opportunité de travailler ensemble et de redonner à la recherche et au développement leur place prioritaire : sans innovation, il n’y a pas d’entreprise. Nous devons faire de l’innovation et du changement le moteur de développement de l’industrie. Le changement est permanent et nous n’avons que le choix entre le changement que nous initions et le changement que nous subissons. L’innovation, la recherche, le développement doivent devenir la priorité de l’industrie d’où la nécessité d’avoir une vision et une stratégie à long terme et une certaine prise de risque et d’y consacrer plus de ressources.

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9. Le développement d’une politique industrielle

Enfin au niveau des États et aussi de l’Europe, nous avons besoin d’une véritable politique industrielle. Il nous faut des politiques publiques fortes pour appuyer et soutenir la compétitivité et le développement de notre industrie. Le crédit impôts recherche et le soutien aux pôles de compétitivité en sont de bons exemples. Le grand emprunt constitue aussi pour partie une étape dans ce sens. Ces politiques sont de plusieurs natures. Elles touchent de nombreux domaines. J’en citerai deux :

- une nouvelle politique de soutien à la recherche et au développement. Les États et l’Europe doivent contribuer à son financement. Ils devront encourager la collaboration de tous les acteurs et de toutes les parties prenantes : laboratoires, universités, instituts de recherche, entreprises grandes et moins grandes ;

- une nouvelle politique de la concurrence qui actuellement sous prétexte de protéger le consommateur se révèle souvent être un frein voire un handicap au renforcement et au développement de notre industrie et de nos entreprises.

conclusion

La désindustrialisation de la France n’est pas une fatalité. Le développement de notre industrie ou son redéveloppement doit devenir une priorité et nous avons les atouts pour le faire. Aimons notre industrie. Prenons l’initiative d’un nouveau dialogue social. Abattons les murs entre les différentes cellules et secteurs de notre société. Formons et qualifions mieux nos jeunes. Dénonçons puis réduisons l’excessive financiarisation de notre économie et de nos entreprises. Arrêtons de privilégier le court terme. Développons puis mettons en œuvre des stratégies long terme. Travaillons plus et mieux ensemble et construisons cet écosystème de croissance (public, privé, universités, grandes entreprises, PME). Consacrons plus de ressources à l’innovation et au changement et enfin développons des politiques

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publiques, nationales et européennes, ambitieuses au service d’une grande et puissante industrie pour la France et pour l’Europe. L’Allemagne a su le faire pour son industrie. Sans la prendre pour modèle, nous pourrions nous en inspirer. L’Allemagne est forte grâce à son Mittelstand qui est aimé et respecté par la société allemande. Il a une vision et des stratégies à long terme. Il est focalisé sur l’excellence de ses produits et de son service. Il consacre beaucoup de ressources à la recherche et au développement. Il fait partie intégrante de l’écosystème de croissance Deutchland GMBH. Et enfin, il a su créer (notamment par la formation par alternance) puis conserver même pendant la crise économique récente ce lien social indispensable à la santé et au développement des entreprises : pendant la crise la variable d’ajustement des coûts au niveau des ventes n’a pas été les effectifs mais les coûts salariaux. L’Allemagne a ainsi su faire de son industrie la force de son économie et asseoir sa place dans le monde. Inspirons-nous des fondamentaux qui ont construit ce succès. Enfin, dans un pays où les coûts salariaux sont élevés et les prestations sociales généreuses (et il faut en être fier), il faut concevoir, développer et produire des produits haut de gamme.

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Résumé

Avec près de 2 millions d’emplois perdus dans l’industrie manufacturière en presque 30 ans, l’industrie française connaît actuellement l’une de ses phases les plus sombres. Ce phénomène se conjugue aujourd’hui avec la perte de la compétitivité de l’économie française et donc la perte de parts de marché tant dans la zone Euro que dans le reste du monde. Repenser l’industrie française pour freiner la désindustrialisation est donc vital à la relance globale de l’économie. De nombreux acteurs doivent dès maintenant agir dans ce sens si nous ne voulons pas voir notre rang, notre compétitivité, notre économie et notre tissu socio-économique éclater.

Pour l'auteur, l'un des plus grands représentants et acteurs de l'industrie française, neuf facteurs principaux à ce phénomène peuvent être avancés, qu'il s'agirait donc de repenser rapidement sur le modèle, par exemple, de l'Allemagne.

Abstract

With nearly 2 million jobs lost in manufacturing in almost 30 years, the French industry is currently experiencing one of its darkest phases. This phenomenon is combined today with the loss of competitiveness of the French economy and thus the loss of market share in both the euro area and the rest of the world. Rethinking the French industry to curb deindustrialization is vital to the overall economic recovery. Many players now must act in this way if we do not want to see our rank, our competitiveness, our economy and socio-economic fabric burst.

For the author, one of the greatest actors and representatives of the French industry, nine major factors to this phenomenon can be advanced. Factors that we must quickly rethink on the example of Germany .

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