40
- 1 - IUFM DE BOURGOGNE Professeur certifié. Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez des élèves de troisième ? Melle GIRARD Isabelle Lettres classiques. Mémoire rédigé sous la direction de Mme Anne-Marie Achard Année 2004. Numéro de dossier de stagiaire : 03STA16034

Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

  • Upload
    others

  • View
    17

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 1 -

IUFM DE BOURGOGNE

Professeur certifié.

Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez des

élèves de troisième ?

Melle GIRARD Isabelle Lettres classiques. Mémoire rédigé sous la direction de Mme Anne-Marie Achard Année 2004. Numéro de dossier de stagiaire : 03STA16034

Page 2: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 2 -

SOMMAIRE

INTRODUCTION

I- CONSTATS DE DEPART.

A- La classe. 1- Des élèves surtout motivés par les notes.

2- Des élèves rebutés par certains textes.

a- Les textes et leur contenu.

b- Le rôle de la présentation des textes.

3- Les élèves ne perçoivent pas toujours l’intérêt d’analyser un texte.

B- Les difficultés que je rencontre. 1- Une difficulté à maîtriser la méthode et les objectifs de la lecture

analytique.

2- Un rythme trop régulier à l’intérieur de la séance.

3- Une voix à travailler pour dynamiser la séance.

4- Un manque de confiance et de spontanéité de ma part.

C- Objectifs. 1- Dynamiser la séance.

2- Amener les élèves à s’interroger sur un texte et à formuler des

éléments d’analyse.

II- ELEMENTS DE SOLUTIONS.

A- Choix des textes et mise en contexte. 1- Choix des textes.

2- Cohérence et mise en relation des textes à l’intérieur de la séquence.

3- La mise en contexte.

4- Les prolongements.

Page 3: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 3 -

B- La diversification des approches et des démarches. 1- L’approche du texte.

2- L’alternance entre écrit et oral.

a- La synthèse finale.

b- L’élaboration d’une synthèse au fur et à mesure du cours.

c- La prise de notes selon le plan du texte.

d- Travail collectif / travail individuel.

3- Le questionnement.

a- Les premières questions.

b- Questionner avant la lecture.

c- Privilégier une lecture active des élèves.

d- Comment varier le questionnement ?

C- Le dynamisme du professeur. 1- Le choix des textes.

2- Le travail préparatoire.

3- La sollicitation des élèves.

III- EVALUATION DES RESULTATS. A- Mise en relation et contexte.

B- La diversification des approches. 1- L’approche par l’image.

2- Le bon déroulement de la séquence « poésie lyrique » : pourquoi ?

C- Le rythme, la voix.

1- Un travail permanent. 2- La solution de l’humour.

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES

Page 4: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 4 -

INTRODUCTION

Quand je suis arrivée en septembre 2003 au collège Clos de Pouilly à Dijon, j’ai tout de suite remarqué que l’atmosphère était agréable, y compris dans la classe qui m’a été confiée. C’est une classe de 3ème composée de 22 élèves, 14 filles et 8 garçons. Ce nombre limité d’élèves est un avantage : la classe est soudée, d’autant plus que la plupart viennent de la même classe de 4ème, et il est plus facile de prendre chacun en compte, pour les faire participer par exemple. En revanche, il existe aussi un inconvénient : la classe s’est vue à plusieurs reprises modifiée par le départ et l’arrivée d’élèves. Cependant, il règne en général dans la classe une atmosphère de travail et de respect de la parole d’autrui car les élèves présentent une certaine maturité, bien que ce climat se soit périodiquement dégradé, notamment à certains moments de fatigue générale, comme au mois de décembre.

La classe de 3ème 5 est donc relativement volontaire et en accord avec un système scolaire dont elle a intégré les exigences. C’est une classe sérieuse, qui désire obtenir de bons résultats. Cependant, j’ai pu remarquer une certaine lassitude et un manque d’intérêt de la part des élèves pour une activité en particulier : la lecture analytique. Cela se traduit soit par une inertie de l’élève, soit par des bavardages, soit encore par des manifestations directes de lassitude face à l’exercice. Cela se caractérise par des interrogations de l’élève quant à l’utilité de la lecture analytique.

En effet, cette activité du cours de français un l’objet de perpétuelles interrogations, y compris de la part des professeurs : ses objectifs et ses méthodes, voire son nom sont toujours remis en cause. Moi-même, en tant que professeur débutant, je me suis beaucoup interrogée sur la lecture analytique en me demandant comment choisir les textes, comment intégrer cet exercice dans les séquences, ou comment mener cette étude avec les élèves et j’ai éprouvé des difficultés à mettre en oeuvre de façon correcte cet exercice. C’est donc cette double interrogation : celle des élèves et la mienne qui m’a poussée à vouloir travailler cette activité particulière du cours de français. En effet, il se révélait nécessaire d’approfondir ce questionnement et d’y apporter des éléments de réponse, afin de redonner, aux yeux des élèves, de l’intérêt et du sens à cette façon de lire des textes.

Il s’agira donc pour moi dans ce mémoire de me demander tout d’abord quelles sont les causes de la lassitude des élèves pour la lecture analytique et des difficultés que je rencontre pour rendre cet exercice attrayant. Il sera ensuite nécessaire que je cherche des éléments de solution à ce problème et que je les analyse afin de voir ce qui pourra être mis en œuvre dans ma classe. Enfin viendra le temps d’évaluer les résultats de ces différentes actions.

Page 5: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 5 -

I- CONSTATS DE DEPART.

A- La classe. 1- Des élèves surtout motivés par les notes.

La classe de 3e5 est principalement composée d’un groupe d’élèves sérieux et calmes,

voire réservés. Ce sont des élèves très organisés qui savent se motiver pendant les évaluations. Ils sont en revanche désorientés et peu autonomes devant un texte à étudier, ce qui est normal à ce stade de leur scolarité. Mon travail consiste à leur permettre de franchir cet obstacle. Mes élèves ont notamment besoin de développer leur sens critique car ils sont restés très sérieux et organisés mais manquent de spontanéité. Ils ont perpétuellement en tête le fait qu’ils sont à l’école et font attention à leurs résultats mais ont du mal à se laisser aller à la découverte d’un texte. Cela se traduit par une certaine inertie pendant la découverte du texte à l’oral. A l’écrit en revanche, lors des évaluations de fin de séquence, certains élèves sont capables de répondre assez finement à des questions posées à propos d’un texte. Mais cette réserve pendant la lecture analytique dépend aussi des textes étudiés.

2- Des élèves rebutés par certains textes.

a- Les textes et leur contenu. Les textes dont le sens paraît trop évident à la première lecture ont tendance à décourager

les élèves qui se lancent alors difficilement dans une approche plus détaillée. En effet, ils n’en ressentent pas le besoin. Les textes abordant des problèmes ou des réflexions qui peuvent concerner les élèves suscitent un certain intérêt, comme certains textes autobiographiques relatifs à l’enfance que nous avons étudiés. Ce fut le cas par exemple avec un extrait de W ou le souvenir d’enfance. Le passé difficile dont l’auteur faisait part dans le texte a tout de suite sensibilisé les élèves qui se sont alors livrés à des analyses psychologiques assez fines. Le fait que l’autobiographie raconte des faits réels a aussi participé à cette implication des élèves. Les élèves ont du mal à comprendre que même une fiction parle de la réalité. J’ai vu des élèves insensibles au sort de Gervaise parce que pour eux c’était uniquement un personnage de roman. Cela m’a fait comprendre qu’un de mes objectifs devait être de rendre abordables et intéressants des textes d’époques diverses et traitant de thèmes variés, même apparemment lointains des préoccupations des élèves.

b- Le rôle de la présentation des textes.

J’ai également remarqué que l’aspect purement matériel du texte était essentiel aux yeux

des élèves. Je crois notamment avoir décelé chez certains élèves un manque d’intérêt face aux extraits que je tirais directement des œuvres ou que je puisais dans des manuels autres que le leur. Or, je suis convaincue que ce manque d’intérêt pour les textes photocopiés ou tapés par traitement de texte ne vient pas du contenu du texte. J’ai déduit de l’attention que les élèves portaient aux textes de leur manuel que c’était justement le manuel qui les rassurait. L’élève de collège se trouve souvent face à la question de l’utilité d’étudier un texte en classe car à ses yeux cet exercice n’a pas de résultat immédiat en terme de note. Or, il

Page 6: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 6 -

semble que la présence d’un texte dans un manuel scolaire soit pour certains une justification et une raison en soi d’étudier ce texte. Tout se passe comme si les élèves avaient une confiance aveugle en leur manuel. Le manuel est rassurant car c’est un attribut constant et stable de l’école et les élèves aiment avoir des points de repère. Ils se disent que puisqu’un texte figure dans le manuel, ils doivent l’étudier.

De plus, dans ces ouvrages, la présentation des textes est souvent très soignée et accompagnée d’images qui rendent les textes plus palpables et plus attrayants. A cette présentation agréable s’ajoute l’ensemble du questionnement qui accompagne le texte et qui est lui aussi présenté de façon claire et attrayante, comme dans le Texto collège, manuel utilisé dans ma classe. Or, la présence même de ces questions semble rassurer les élèves. Elle matérialise le travail qu’ils ont à effectuer, leur indique ce qui est à étudier dans le texte. Les questions constituent à leurs yeux une sorte de programme plus tangible que les objectifs que le professeur exprime en début de séance, objectifs dont ils ont besoin mais qui sont encore trop généraux pour ceux des élèves qui demandent le plus de points de repère possible. Les questions du manuel ramènent le texte dans un cadre très scolaire auquel les élèves sont habitués, ce qui les rassure. D’ailleurs c’est bien la seule présence du questionnement qui rassure les élèves et non pas leur utilisation car la séance de lecture analytique ne repose pas sur la recherche systématique des réponses aux questions qui font suite au texte. En revanche, il m’arrive d’utiliser une question du manuel, souvent en guise de conclusion à l’étude du texte, par exemple pour l’étude d’« Ode à Cassandre », j’ai utilisé une question qui visait à donner le ton du poème en proposant plusieurs choix : moqueur, ironique, polémique, grave, tendre, galant… ce qui constituait une bonne base de réflexion pour évoquer le sens global et la visée du poème. Or, si les réflexions des élèves sur un texte rejoint le sens des questions posées dans le manuel, elles n’en dépendent pas d’une façon rigide.

Je pense donc que l’intérêt des élèves pour les textes du manuel n’est pas une coïncidence et que l’utilisation de cet outil est vraiment rassurante pour les élèves. Cependant, cela met en évidence un défaut de ma part : celui de ne pas suffisamment justifier le choix des textes dans la séquence, de ne pas insister assez sur la formulation des objectifs et de ne pas assez situer les textes choisis. J’en conclus qu’il ne faut pas hésiter à utiliser le manuel lorsque les textes qui y figurent correspondent bien aux objectifs de la séquence que l’on a construite. D’autre part, cette attitude des élèves met en évidence leur besoin de cadrage, de points de repère et de liens entre les activités, ce qui correspond à un besoin normal que les élèves ont de comprendre le but de ce qu’on les invite à faire.

3- Les élèves ne perçoivent pas toujours l’intérêt d’analyser un texte.

Les élèves ont souvent l’impression que si à la première ou à la deuxième lecture ils ont à peu près compris le sens explicite du texte tout le travail est fait. Pour eux l’étude d’un texte consiste en la compréhension première de ce qui est donné à lire. Je souhaite leur montrer qu’il est intéressant de regarder le texte de plus près pour saisir les intentions de l’auteur en faisant preuve de sens critique et pour voir quels sont les moyens dont dispose l’auteur pour donner du sens à son texte. Par exemple, j’ai voulu amener les élèves à comprendre avec un texte de Flaubert extrait de Madame Bovary la subtilité de la position du narrateur par rapport à l’héroïne. Le texte paraissait simple : Emma se rend chez la nourrice pour voir sa fille, mais en chemin elle rencontre Léon et ne pense plus alors qu’à écourter sa visite chez la nourrice pour pouvoir être seule avec le jeune homme. Je voulais amener les élèves à voir que la nourrice mais aussi Emma étaient plus ou moins ridicules dans ce passage qui tournait presque à la farce. Il a été difficile d’amener les élèves à percevoir l’aspect ironique de la scène et la distanciation de l’auteur par rapport à ses personnages. J’ai

Page 7: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 7 -

notamment eu droit à un « Qu’est-ce qu’on s’en fout ! » de la part de Pierre. Comme je lui demandais ce qui le gênait il m’a répondu : « Mais on fait toujours des textes ! » Je me suis alors demandé ce qu’il fallait que je change dans ma façon de leur faire aborder des textes. J’ai essayé de limiter le nombre de textes dans les séquences, mais le problème est plus profond que cela. La gêne de Pierre et de quelques autres élèves disparaît d’ailleurs lorsque nous étudions une œuvre complète. J’en déduis que le problème réside dans le choix des textes, dans la façon dont ils s’intègrent dans la séquence et dans ma façon de mener la séance de lecture analytique. Ce problème de perte de sens de la lecture analytique aux yeux des élèves semble d’ailleurs un problème non spécifique à ma classe, mais ressenti chez tous les élèves qui mettent à distance ce qu’on leur propose, donc peut-être surtout chez les élèves qui ont une certaine habitude des enseignements du collège : les troisièmes par exemple.

B- Les difficultés que je rencontre.

1- Une difficulté à maîtriser la méthode et les objectifs de la lecture analytique.

Dans leur ouvrage L’Enseignement du français au collège, Katherine Weinland et Janine Puygrenier-Renault soulignent cette difficulté de mener à bien une étude analytique : « l’explication de texte au collège tend à devenir un exercice aux multiples objectifs et aux démarches imprécises […] qui ne satisfait pas les professeurs et que les élèves acceptent de moins en moins. » Elles relèvent en effet trois objectifs qu’il appartient au professeur de concilier :

- Initier au patrimoine littéraire en choisissant de nombreux extraits d’auteurs représentatifs.

- Mettre en place des méthodes permettant l’étude des textes. - Développer le goût de la lecture et pour cela choisir des extraits attrayants et

mener des explications alertes, orientées vers le plaisir du texte. Le deuxième objectif et le troisième nécessitent de mettre en œuvre des procédés

pédagogiques ingénieux et efficaces car il est difficile de faire adopter aux élèves des méthodes de lecture active et de leur faire éprouver le plaisir de découvrir un texte.

2- Un rythme trop régulier à l’intérieur de la séance.

En observant l’attitude des élèves en classe et d’après ce qu’ont pu me dire les personnes qui ont assisté à mes cours, je me suis rendu compte que le rythme que j’instaurais était beaucoup trop régulier, ce qui provoquait chez les élèves une baisse d’attention. Cela est notamment dû à des préparations trop rigides où quasiment chaque question est prévue et à un manque de capacité à faire parler les élèves entre eux à propos du texte. Mon mode de fonctionnement est encore trop fondé sur un échange entre moi et l’élève qui prend la parole, alors qu’il faudrait davantage inviter les élèves à rebondir eux-mêmes sur les éléments de réponse de leurs camarades. Comme quelques élèves donnent en général des réponses assez intéressantes, j’ai tendance à ne pas inciter les autres à approfondir ce qui a été dit. Cette alternance trop systématique entre les questions et les réponses donne au cours un rythme trop régulier. Il faudrait aussi que j’approfondisse certains éléments de l’explication qui le méritent et passer assez vite sur d’autres pour varier le rythme et maintenir ainsi davantage l’intérêt des élèves.

Page 8: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 8 -

3- Une voix à travailler pour dynamiser la séance.

Ma tendance naturelle est de me montrer assez calme, ce qui entraîne une certaine

monotonie pendant mes cours. J’ai tendance à m’exprimer toujours sur le même ton, surtout lorsque je réfléchis à ce que je suis en train de dire, c’est-à-dire quand je ne suis pas à l’aise avec le texte ou quand je ne sais pas d’une façon assez précise vers quoi je veux emmener mes élèves. En effet, lorsque je pense trop à ce que je dis, mon débit se ralentit et ma voix est moins expressive puisque je parle à ce moment-là de façon presque automatique ou mécanique. Ce manque de confiance et de spontanéité m’empêche de mettre de la conviction dans mes paroles puisque justement je ne suis pas à l’aise par rapport au contenu de ces paroles. Le débit, le ton et peut-être aussi une certaine gestuelle sont donc à travailler.

4- Un manque de confiance et de spontanéité de ma part.

Mon manque de dynamisme a donc sans doute pour origine un manque de réelle préparation ou du moins de familiarisation avec les textes mais aussi une trop grande timidité qui m’empêche souvent de paraître sûre de moi. En effet, je pense que quelqu’un qui sait adopter un ton convaincant sera dans tous les cas plus intéressant et plus enrichissant que quelqu’un qui doute, à contenu égal. On ne convainc un auditoire que si l’on se montre soi-même convaincu. C’est donc une capacité à communiquer et à mettre en valeur le contenu de mon cours qu’il faut que je développe.

C- Les objectifs.

1- Dynamiser la séance.

Mon objectif est que les élèves qui lors de la séance de lecture analytique baissent

facilement leur attention, qu’ils discutent ou qu’ils rêvent, soient toujours maintenus en alerte, et ceci par les changements de rythme, les variations dans le volume et l’intonation de ma voix ou dans mon débit. Le but est de créer un climat favorable à la réflexion et à l’apprentissage. En mobilisant l’intérêt des élèves je diminuerai les bavardages. Tout le monde tirera ainsi davantage profit de la séance de lecture analytique. Je compte aussi obtenir des participations orales mieux réparties entre les élèves.

2- Amener les élèves à s’interroger sur un texte et à formuler des éléments d’analyse.

Si les élèves s’intéressent peu à l’étude des textes ou sont découragés après une première lecture, c’est peut-être qu’ils n’ont pas les outils nécessaires à leur analyse. Mon objectif est de leur donner les moyens d’entrer dans un texte et d’exercer leur sens critique. Ceci passe notamment par la mise en contexte, par le souci d’unité des textes et par le réinvestissement des connaissances d’un texte à l’autre.

Page 9: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 9 -

II- ELEMENTS DE SOLUTIONS.

D- Choix des textes et mise en contexte.

1- Choix des textes.

Le choix des textes à étudier en lecture analytique est important et n’est pas évident à opérer, c’est ce que j’ai pu remarquer à plusieurs reprises cette année. Par exemple, les textes doivent être assez riches, car la recherche de sens ou d’effets motive les élèves, sans être pour autant trop obscurs. Un texte riche doit être relativement court et un texte assez simple doit avoir une certaine longueur. Le texte doit présenter de la matière. Je me suis parfois trompée dans le choix des textes à étudier en lecture analytique. Des textes que je trouvais intéressants et dont je pensais qu’ils plairaient aux élèves soit pour les thèmes abordés, soit pour la façon dont ils étaient écrits n’ont pas forcément captivé l’attention des élèves. Par exemple, dans une séquence fondée sur la lecture de textes autobiographiques, j’avais choisi cinq extraits dans les œuvres suivantes ( cf annexe 1 ) :

- Georges Perec, W ou le souvenir d’enfance. - Anny Duperey, Le Voile noir. - Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions. - Jules Vallès, L’enfant. - André Gide, Si le grain ne meurt.

J’avais notamment choisi le début de L’Enfant parce que je trouvais intéressant ce texte

plein d’humour et d’ironie qui aborde d’une façon touchante le thème de l’enfance difficile. Mais j’aurais davantage dû penser aux outils d’analyse à employer pour ce texte ou à la façon dont j’allais amener les élèves à apprécier le travail d’écriture de l’auteur. L’intérêt des élèves pour le texte a été assez limité, ce qui me fait penser qu’un texte plaisant ne conduit pas forcément à une étude intéressante. Finalement l’étude a été assez rapide : nous avons vu l’aspect théâtral et comique du texte puis nous nous sommes demandés pourquoi l’auteur ressentait le besoin de parler de cette façon-là de son enfance. Nous avons notamment vu que l’humour était une façon pour Jules Vallès de dédramatiser, tout en la dénonçant, l’absence de tendresse de la part de sa mère. Mais je n’ai pas remarqué d’enthousiasme particulier chez les élèves pour ce texte. Peut-être était-il trop simple et trop court pour mobiliser la réflexion des élèves. Je pense aussi que je ne me suis pas assez appuyée sur des outils précis d’analyse, par exemple pour ce texte sur l’effet produit par l’utilisation du présent de narration.

En revanche l’étude de l’extrait des Confessions a intéressé les élèves. Ils ont semblé apprécier notre méthode d’analyse. En effet, nous avons étudié ce passage, dans lequel Rousseau s’efforce de présenter à son avantage l’épisode du vol du ruban, de façon à mettre en avant les stratégies qu’utilise l’auteur pour attirer la compassion des lecteurs. Cela a donné une certaine unité au texte. Cela a aussi permis aux élèves de mieux comprendre un texte dont la langue leur avait paru difficile. Les élèves ont finement analysé le texte parce qu’ils utilisaient des outils assez précis ( vocabulaire péjoratif ou mélioratif, arguments plus ou moins convaincants…) et que cela les aidait et les rassurait. J’en déduis que les élèves aiment étudier des textes relativement complexes du moment qu’on leur en donne les moyens et que l’étude, elle, est claire. C’est alors un réel plaisir pour eux de découvrir le sens d’un texte qu’ils croyaient obscur. C’est pourquoi je fais à présent attention de choisir des textes non pas uniquement en fonction de leur aspect attrayant, mais aussi en pensant à l’étude qui va

Page 10: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 10 -

pouvoir en être faite, en me demandant notamment si je vais pouvoir donner aux élèves les moyens d’en faire une étude intéressante et claire.

2- Cohérence et mise en relation des textes à l’intérieur des séquences.

J’ai remarqué qu’il était vraiment nécessaire de bien définir les objectifs d’une séquence. Cela permet de conférer une unité à l’étude des textes choisis et donc de lui donner du sens. Parfois cette unité est simple à mettre en place, elle peut même être suggérée par les programmes. Dans une séquence, on peut par exemple étudier la poésie du point de vue du lyrisme. Les textes seront d’époques et de styles différents, mais les élèves auront des points de repère pour chaque texte puisqu’ils retrouveront certains thèmes communs ou certaines caractéristiques propres au lyrisme. En revanche, à l’intérieur de ma séquence « autobiographie », mes objectifs étaient relativement imprécis : analyser les différentes raisons qui créent le besoin d’écrire son autobiographie et aborder les stratégies et les principaux problèmes qui régissent l’écriture de soi. De ce fait, si certains textes se sont fait écho, d’autres semblaient isolés et ont dérouté les élèves.

Par exemple, durant l’étude du texte 2, l’extrait du Voile noir d’Anny Duperey, les élèves ont pu réinvestir ce qui avait été vu à propos du texte de Georges Perec, puisque les deux textes mettent en évidence la difficulté du souvenir et de l’évocation d’un passé douloureux, marqué par la disparition des parents. Ils ont même deviné les raisons de la difficulté d’écrire chez Anny Duperey à la lumière de ce que nous avions étudié chez Georges Perec. En revanche, un texte surtout a dérouté les élèves, celui d’André Gide. Dans cet extrait, l’auteur évoquait d’une façon presque poétique une promenade dans la nature, au crépuscule, en compagnie de ses parents. Je voulais montrer aux élèves comme le souvenir pouvait être magnifié par l’écriture jusqu’à devenir quasiment un prétexte à l’écriture d’un beau texte. Or cette problématique était trop excentrée par rapport à celles qui régissaient la séquence. Nous avions surtout abordé le problème de la mémoire et celui de la sincérité, mais peu celui des rapports entre fiction, littérature et écriture de soi. Il a donc été difficile de faire entrer les élèves dans le texte. Je pense qu’il vaut mieux sélectionner des textes variés mais mettant tout de même en jeu des problématiques proches, afin que les élèves réinvestissent au fur et à mesure ce qu’ils ont vu. Cela facilite leur apprentissage, leur réflexion et même leur mémoire : je suis certaine qu’ils se souviennent du texte de Perec et non de celui de Gide. De plus, les élèves aiment constater qu’ils connaissent déjà certaines choses et se sentent valorisés lorsqu’on fait appel à leurs connaissances. Cela donne du sens à la lecture analytique. C’est ce qu’énoncent Daniel Fernandez et Bernard Meyer dans leur ouvrage Enseigner le français au collège: « le regroupement thématique ne permet que trop malaisément le transfert des acquisitions […] aussi préférera-t-on le plus souvent les regroupements dits problématiques qui mettent en valeur une structure, c’est-à-dire un problème d’écriture. »

C’est également ce qui est préconisé par les accompagnements des programmes du cycle central : « [le groupement de textes] constitue une unité d’apprentissage autour d’une notion littéraire, culturelle ou fonctionnelle. Les élèves, que le professeur rend conscients de la cohérence de l’ensemble, établissent des relations d’un texte à l’autre, réinvestissent dans les recherches, dans les activités et les lectures afférentes à chaque texte les acquis mis en place lors de l’étude des textes précédents, rapprochent en distinguant, sont sensibles aux similitudes et aux différences, mesurent la spécificité de chaque élément au sein de la totalité. »

Un bon moyen de permettre aux élèves d’effectuer des relations entre les textes étudiés est de choisir à dessein deux textes qui pourront être comparés. C’est ce que j’ai envisagé de

Page 11: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 11 -

mettre en place à l’intérieur de la séquence 5 : « Présenter un point de vue argumenté. ». Cette séquence dont un des objectifs est de repérer et d’analyser des procédés d’argumentation regroupe quatre textes :

- Un extrait de la brochure publicitaire l’Amateur de thé. - Un article de presse : « Moins fort les baladeurs ! » extrait de

L’express. - Un extrait de récit tiré de Candide. ( cf annexe 2) - L’article « Traite des nègres » de l’Encyclopédie, écrit par le

chevalier de Jaucourt. ( cf annexe 2 ) Le groupement est de type problématique puisqu’il est axé autour d’un problème

d’écriture, à savoir comment écrire une argumentation. Deux textes ont le même thème : ils dénoncent l’esclavage. Cependant mon objectif, dans la confrontation de ces deux textes, reste de type problématique puisqu’il s’agit de comparer deux façons différentes de réaliser une argumentation plus que de comparer la façon dont le thème de l’esclavage est abordé. En effet Voltaire et Le chevalier de Jaucourt utilisent presque les mêmes arguments : l’égalité entre les hommes et le droit naturel niés dans l’esclavage ainsi que l’inhumanité que représente le trafic d’êtres humains et la non validité de l’argument économique présenté par les colons. Ce que je voulais que les élèves voient ce sont les différences qui résident dans les moyens d’exprimer ces arguments contre l’esclavage.

J’ai choisi de faire lire aux élèves en premier l’article de l’Encyclopédie parce qu’il présentait une forme d’argumentation peut-être plus proche de la représentation qu’un élève se fait de l’argumentation et en tout cas plus semblable à ce qui précède dans la séquence, c’est-à-dire une argumentation fondée sur le raisonnement alors que le texte de Voltaire contient une argumentation qui passe par le récit et la description : « il manquait à ce pauvre homme la jambe gauche et la main droite », et par les paroles rapportées, ce qui marque d’autant plus le lecteur.

La démarche consiste d’abord à repérer dans le premier texte quels sont les arguments principaux et à remarquer que le texte repose sur un raisonnement en termes de droits, sauf à la fin du texte où l’auteur se livre à une dénonciation sur le mode de l’émotion ( questions rhétoriques, exclamations). Les élèves repèrent les liens logiques qui président à la réflexion de l’auteur et sont amenés à remarquer que cet article de l’Encyclopédie ressemble beaucoup, d’un point de vue stylistique, à la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qu’ils ont étudiée en Histoire en classe de 4ème. Puis, il s’agit pour les élèves de lire le deuxième texte et de dire quelles différences ils remarquent par rapport au premier. Or, cette comparaison va déboucher sur une réelle analyse de l’extrait de Candide parce qu’elle nous amènera à prendre en considération beaucoup de procédés d’écriture en les reliant au sens.

Cette approche des textes par la comparaison peut susciter l’intérêt des élèves et faciliter leur entrée dans les textes puisque cela leur fournit des pistes d’étude. En effet, chaque élève sait ce qu’il doit chercher dans le texte, et les premières remarques peuvent ainsi survenir assez facilement.

Il est donc possible de travailler la mise en relation des textes de façon à intéresser les élèves à l’exercice que constitue la lecture analytique.

3- La mise en contexte.

Pour que les élèves apprécient un texte il est bon de leur montrer que ce texte n’est pas un objet isolé, détaché de tout contexte. Une façon d’attirer leur attention est d’éclairer un texte

Page 12: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 12 -

en le replaçant dans son contexte historique et social, ou même en apportant des éléments de biographie de l’auteur. Une brève digression pour expliquer tel fait historique ou telle réalité sociale montre aux élèves que les textes sont ancrés dans la réalité et ne sont pas de pures fictions totalement coupées de la vie réelle, ce qu’ils ont parfois tendance à penser.

De même, il peut être intéressant de replacer un extrait dans le contexte de l’œuvre de laquelle il est tiré, ne serait-ce qu’en expliquant son titre. A la suite d’une visite, ma tutrice m’a fait remarquer que durant mon explication de l’extrait de W ou le souvenir d’enfance je n’avais ni expliqué ni commenté le titre, ce qui aurait pourtant apporté un éclairage intéressant sur l’extrait choisi. Dans leur ouvrage L’Enseignement du français au collège, au chapitre « la lecture d’extraits », Katherine Weinland et Janine Puygrenier-Renault nous rappellent même que la liaison entre les extraits et les œuvres intégrales est un des moyens, avec la méthode-même de l’explication, de mobiliser l’intérêt des élèves pour la lecture analytique.

Au début de l’année scolaire, pour le premier texte étudié en classe : l’incipit de La Nuit du renard de Mary Higgins Clark, j’ai ressenti le besoin de faire lire à un élève le roman afin qu’il raconte la suite de l’histoire aux autres, ce qui a été fait par une élève volontaire. En effet, l’incipit de ce roman policier restait très mystérieux et notamment en ce qui concerne le personnage principal du roman, ce qui est d’ailleurs un des buts recherchés par l’auteur. Il était donc presque naturel que les élèves soient déroutés et veuillent connaître la suite de l’histoire. Cependant, même si j’ai conscience qu’un tel exercice est profitable, faute de temps et parce que les élèves ont déjà beaucoup de travail, c’est quelque chose qui ne s’est pas souvent répété dans le cours de l’année. L’objectif reste cependant d’amener les élèves, par l’étude d’extraits, à améliorer leurs compétences de lecture afin d’en faire le plus possible des lecteurs indépendants et ceci pour tout type de textes : textes courts, presse, oeuvres entières… Il s’agit donc de mettre la lecture analytique au service de la lecture cursive et donc d’établir des rapports entre les extraits et les œuvres intégrales.

4 - Les prolongements.

Une des raisons pour lesquelles la lecture analytique apparaît aux élèves comme un exercice inutile et non justifié c’est qu’elle est isolée et pas assez reliée aux autres activités du cours de français. C’est ce que mettent en évidence les auteurs de l’ouvrage Lectures pour les collèges. Quels livres ? Pour quel usage ?. La mise en relation de la lecture analytique avec les autres activités du cours de français leur semble être un des remèdes à apporter au désintéressement des élèves : « Cet exercice[la lecture expliquée] n’a pas toujours bonne réputation dans les classes. Pourtant si l’on veille à ce qu’il s’agisse réellement de morceaux de choix, dont on articulera l’analyse aux autres activités du français, si l’on y associe des exercices d’expression écrite, on multipliera les chances d’intéresser les élèves à sa maîtrise. »

En effet, les élèves n’ont pas toujours conscience que le but principal de la lecture analytique est de leur faire acquérir une façon d’interroger les textes, c’est-à-dire une méthode transférable à tout type de lecture. Un autre but est culturel, il s’agit de faire connaître aux élèves quelques textes choisis pour leur apport culturel. Il s’agit également de donner envie de lire, notamment des oeuvres complètes. Or, on a vu précédemment qu’il n’était pas toujours facile de faire déboucher la lecture analytique sur la lecture cursive. Il est possible du moins de limiter l’impression qu’ont les élèves de se livrer à un exercice isolé en ménageant des prolongements à la lecture analytique des textes.

On peut par exemple prolonger l’étude d’un texte par un exercice d’expression écrite afin que le texte n’apparaisse pas comme un objet isolé, abandonné aussitôt qu’il a été analysé. Il s’agit par exemple de faire écrire la suite d’un texte, ou de faire réécrire le texte selon un autre point de vue, ou encore de faire réécrire un texte selon les lois d’un autre genre littéraire. Le

Page 13: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 13 -

texte peut être également le support d’une dictée. Le prolongement peut aussi se faire sur le mode oral : il peut engendrer un débat, un exposé oral sur un thème abordé par le texte et peut même être appris afin d’être récité. Il en découle une plus grande familiarité avec le texte. Le texte est ainsi retravaillé et les élèves en tirent un grand profit : ils approfondissent la compréhension du texte en le relisant sous un angle différent et le garderont en mémoire d’une façon plus efficace. Dans son ouvrage Enseigner le français, pour qui ? comment ?, Gilberte Niquet souligne l’importance de cette étape qui consiste à « exploiter le texte de façon périphérique » en insistant sur le fait que cela permet de travailler un des objectifs qu’elle attribue à la lecture analytique, l’objectif « expressionnel ». Gilberte Niquet parle d’objectif « expressionnel » car étudier un texte doit permettre aux élèves de progresser dans la maîtrise des discours étant donné que c’est pour eux l’occasion de s’exprimer à l’oral en faisant des remarques justifiées sur le texte mais aussi d’améliorer leur expression écrite dans la mesure où l’étude du texte donne lieu à des moments de travaux d’écriture. C’est pourquoi elle privilégie le travail de recherche sur un thème, le débat et l’exercice d’expression écrite. En effet ces exercices amènent les élèves à s’exprimer avec de plus en plus d’aisance.

J’ai pour ma part décidé de mettre en œuvre la dictée, en faisant réécrire le poème de Verlaine « Après trois ans », que les élèves avaient étudié sous forme d’entraînement à l’évaluation finale. En début d’heure j’ai annoncé aux élèves que nous allions faire une dictée préparée à partir du sonnet de Verlaine étudié la fois précédente. Nous avons repéré les difficultés lexicales et d’accords puis les élèves ont pu relire le texte une ou deux fois. Après avoir rangé le poème, les élèves l’ont écrit sous ma dictée. Mon objectif était que les termes difficiles comme « tonnelle », « sempiternelle », « lys orgueilleux », vus à l’occasion de l’étude du texte soient mémorisés par les élèves. Je voulais aussi que les six élèves qui ont vraiment des difficultés en orthographe fassent l’effort de mémoriser des mots et des terminaisons de verbes conjugués. Cet exercice assez facile a donné lieu à de très bonnes notes, mais pas seulement chez les élèves qui avaient un bon niveau en orthographe depuis le début de l’année. Personne n’a obtenu une note inférieure à 11. Alaïs a obtenu un 19 alors qu’à la dictée précédente sa note avait été de 7. Pierre est passé de 6 à 16, Jérémy de 11,5 à 19, Mourad de 7 à 12,5, Stéphanie de 6 à 11. Je n’envisage bien sûr pas de procéder ainsi tout le temps mais cet exercice a permis de montrer aux élèves fâchés avec l’orthographe qu’ils étaient capables de mémoriser l’orthographe des mots et qu’il fallait donc qu’ils travaillent dans ce sens. De plus, cet exercice avait pour but de prolonger la familiarisation des élèves avec la poésie lyrique dans la mesure où ils ont pu s’approprier davantage le poème en le relisant avant la dictée et enfin en l’écrivant. Ils ont également été sensibilisés d’une manière moins habituelle à la disposition spécifique du sonnet et de la poésie en général puisqu’ils ont dû faire attention à la présentation, en allant à la ligne à la fin de chaque alexandrin et en sautant une ligne entre chaque strophe. C’était donc une façon de terminer la séquence consacrée à la poésie lyrique en préparant les élèves à l’évaluation finale.

Une autre façon de prolonger l’étude d’un texte est la récitation, activité que j’ai notamment mise en œuvre durant la séquence consacrée à la poésie lyrique. Comme avec la dictée, un des buts est d’approfondir la familiarisation des élèves avec les textes, tout en travaillant plus spécifiquement la diction et la mise en valeur des poèmes par le travail oral. La récitation permet un retour au texte réel et enrichissant puisqu’il est nécessaire de prendre en compte le rythme du poème et de comprendre quels sentiments y sont exprimés afin de les rendre sensibles durant la récitation.

Enfin, j’ai mis en œuvre l’exercice écrit du changement de point de vue, exercice proposé par le manuel Texto collège à partir d’un extrait du roman de Stendhal, Lucien Leuwen. Il s’agissait de modifier un extrait de récit écrit en focalisation interne en faisant porter celle-ci non plus sur le personnage de Lucien mais sur celui de la jeune femme à sa fenêtre. Cet exercice nécessite une bonne compréhension du texte puisque la difficulté réside dans le fait

Page 14: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 14 -

qu’il est bon de respecter les informations contenues dans le texte tout en sachant s’en éloigner suffisamment. Cet exercice implique des relectures du texte et une meilleure compréhension de celui-ci. Les élèves se sentent plus à l’aise avec ce genre de récit lorsqu’ils ont dû s’y confronter en écrivant eux-même une version de l’épisode narré.

Tous ces prolongements constituent donc une bonne façon de rendre les élèves plus proches des textes. La lecture analytique acquiert du sens, la compréhension des textes est réinvestie dans d’autres exercices et le cours de français retrouve ainsi une certaine unité, ce qui lui fait parfois défaut.

B- La diversification des approches et des démarches.

1- L’approche du texte.

Pour rompre la monotonie de la séance de lecture analytique et surprendre les élèves, quelques activités peuvent être proposées avant même la lecture du texte. C’est ce que Gilberte Niquet appelle « mettre les élèves en condition ». Cela peut prendre différentes formes. Cette mise en condition peut passer par l’immersion des élèves dans l’atmosphère du texte qu’ils vont lire. Le professeur peut amener les élèves à s’imaginer qu’ils sont dans la situation du héros du récit qu’ils vont lire. Gilberte Niquet donne l’exemple d’une classe de 6ème avec qui le professeur va lire un extrait de Vendredi ou la vie sauvage. Le professeur demande aux élèves de s’imaginer qu’ils sont sur un bateau, qu’ils font naufrage et qu’ils réussissent à rejoindre une île déserte. Il leur demande ensuite ce qu’ils feraient s’ils étaient dans ce cas. Les élèves font des propositions. La lecture du texte se trouve alors motivée puisqu’il s’agira de voir ce que le héros, lui, a fait dans la même situation. La mise en condition des élèves a suscité de l’intérêt et de la curiosité pour le texte, ce qui n’est pas négligeable.

La mise en condition peut aussi passer par un tableau ou une musique en rapport avec l’époque. Cependant cette phase, qui ne dure pas plus de cinq minutes, ne peut pas être systématique, sinon elle perdrait tout intérêt, le but étant justement de briser la monotonie du déroulement de la séance de lecture analytique.

Pour ma part j’ai envisagé pour l’étude du texte d’Anny Duperey Le Voile noir, dans la séquence 3 « Pourquoi et comment écrire son autobiographie », une approche par l’image. Cette approche est suggérée par l’œuvre elle-même puisque l’image en question est une photographie qui accompagne le texte. Cela permet aux élèves de se livrer à de nombreuses hypothèses de lectures ce qui leur donne une certaine curiosité par rapport au texte. Ils ont envie de le découvrir afin de voir ce que l’auteur en dit. Ils peuvent notamment vérifier leurs hypothèses de lecture. L’image est donc un moyen de susciter de l’intérêt pour un texte.

2- L’alternance entre écrit et oral.

La séquence de lecture analytique s’organise autour de deux pôles : la découverte orale du sens du texte par les élèves que guident le professeur et la trace écrite qui va matérialiser ce travail. Cette répartition entre échanges oraux et passages à l’écrit doit faire l’objet d’une attention particulière car elle contribue en grande partie à la création d’une dynamique à l’intérieur de la séance. Or, l’écrit peut s’envisager de diverses façons, selon le texte étudié et l’objectif de la séance. Dans le cours de l’année j’ai envisagé plusieurs méthodes concernant cet aspect du travail de lecture analytique. L’écrit sert à ce que les élèves aient des points de

Page 15: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 15 -

repères, saisissent quel est l’essentiel du texte étudié et se repèrent par rapport à une progression. Mais cet écrit est aussi destiné à être réutilisé, pour une synthèse répondant de façon globale à la problématique d’une séquence par exemple. Selon le but privilégié, l’élaboration de la trace écrite diffère.

Au début de l’année, je ne savais pas mener une séance de lecture analytique. Pour réaliser ma première séquence, je me suis beaucoup appuyée sur le manuel Texto collège à la fois en ce qui concerne les objectifs de la séquence et pour la façon d’aborder les textes proposés. Dans le manuel il s’agissait de la séquence 2 intitulée « Le récit : temps et point de vue. ». Mes objectifs de séances étaient surtout axés sur la compréhension de procédés d’écriture tels que les points de vue et la façon non chronologique de relater des faits. Cela m’a conduite à interroger les élèves par le biais des questions accompagnant les textes du manuel. Par exemple pour un extrait de Tristan et Iseut les élèves ont répondu à des questions comme : « Quelles journées le narrateur ne raconte-t-il pas ? Quelle journée se contente-t-il de résumer, pourquoi ? », d’où une prise de notes constituée essentiellement par la réponse à ces questions. ( cf annexe 3.1)

Mais, au fur et à mesure que je comprenais mieux les buts et les méthodes de la lecture analytique, j’ai pu peu à peu envisager une trace écrite davantage réfléchie et diversifiée.

a- La synthèse finale.

Ce type de synthèse se justifie pour un texte difficile qui nécessite un grand travail de

compréhension et de justification des hypothèses à l’oral. J’ai par exemple privilégié cette approche pour le poème de Verlaine « Nevermore » ( cf annexe 3.4) car il m’est apparu nécessaire, dès le début du cours de laisser dans un premier temps s’exprimer les élèves afin de vérifier les premières hypothèses de lectures. En effet, le poème est assez complexe puisqu’il contient en quelques sortes trois strates : tout d’abord la première phrase : « souvenir, souvenir, que me veux-tu ? » correspond au moment où le poète écrit, le présent est un présent d’énonciation. Puis le poète se livre à l’évocation d’un premier souvenir : c’est l’automne, le poète se promène avec la femme aimée et se livre avec elle à une rêverie. Enfin, un deuxième souvenir est évoqué : les vieux amants repensent à leur jeunesse, à l’époque où l’amour était pour eux un sentiment neuf. Or, cette complexité liée à l’enchâssement des époques évoquées n’est pas saisissable dès la première lecture et les élèves émettent des hypothèses intéressantes car leur vérification va en fait mener à l’explication du poème.

Par exemple, un doute plane sur la question « Quel fut ton plus beau jour ? », posée par la femme au poète. Les élèves, n’ayant pas à ce stade de l’explication les moyens de savoir que la question se pose entre des amants dont la relation est assez ancienne, pensent que la réponse implicite est « aujourd’hui ». Ce n’est que le deuxième tercet qui permet de remettre en cause cette hypothèse. En effet, dans cette dernière strophe, l’assimilation des premières amours à la saison du printemps fait comprendre a posteriori que l’évocation des amants dans un paysage d’automne se justifie par l’ancienneté de leur relation. Les élèves comprennent le rôle symbolique des saisons. De plus, l’attitude du poète envers la femme, qui tient de la vénération et de l’amour platonique fait comprendre aux élèves que le sentiment amoureux a évolué et a perdu de sa vivacité. Les élèves peuvent alors rectifier leur impression première : le plus beau jour évoqué par la femme dans la deuxième strophe est plutôt le jour de leur rencontre, ou plus précisément du premier aveu de leur amour. La richesse du poème vient de cette ambiguïté, de cet implicite du souvenir et c’est donc la démarche de compréhension du texte qui justifie la forme que peut prendre la synthèse écrite, une synthèse finale plutôt, pour laquelle les élèves devront récapituler ce qu’ils ont saisi du poème : les différentes strates du souvenir, le rôle symbolique des saisons et le paysage état d’âme…La synthèse est donc finale

Page 16: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 16 -

car le texte nécessite une plage assez importante de découverte orale. Cependant quelques pauses destinées à récapituler sont ménagées.

Mais face à un tel texte la phase d’oral peut être relativement longue sans susciter la lassitude des élèves car ceux-ci sont actifs, ils se livrent à une réelle recherche d’indices qui leur fassent construire le sens d’un texte qui a donné lieu à des hypothèses diverses. Les élèves sont curieux et veulent comprendre le texte lorsque celui-ci nécessite une réelle construction du sens, ce qui permet un peu plus de liberté et de spontanéité dans la séance.

b- L’élaboration d’une synthèse au fur et à mesure du cours .

Continuons la comparaison de la prise de la trace écrite avec un texte de la même

séquence « Poésie lyrique ». J’ai voulu aborder l’élaboration de la synthèse écrite d’une toute autre façon en ce qui concerne le poème de Rimbaud « Ma Boème » (cf annexe 3.5). Encore une fois, c’est le texte même qui guide la démarche. En effet, c’est la double lecture qui peut être faite du texte qui a motivé l’élaboration de la trace écrite. Ce que les élèves remarquent en premier c’est que dans le poème le poète parle d’une promenade ou d’un certain vagabondage. Je dirige alors leur réflexion en leur demandant qu’elle image le poète donne de lui-même, ce qui fait évoquer par les élèves le champ lexical du voyage et d’autre part celui du dénuement. Un élève remarque ensuite que le poète est rêveur et cherche à s’échapper de cette pauvreté par la poésie. Les élèves relèvent en effet un certain nombre de termes appartenant au champ lexical de la poésie : « Muse », « rimes », « lyre »… Cette première lecture au premier degré s’accompagne d’une prise de notes : champs lexicaux, explicitation du vocabulaire de la poésie (muses, lyre) … ce qui constitue une première grande partie.

Puis j’incite les élèves à regarder le poème de plus près en relevant ce qui leur semble bizarre. Des expressions sont alors citées comme « écouter les étoiles », « un pied contre mon cœur », la rosée comme « vin de vigueur », ... Une élève explique alors que le vin est dit « de vigueur » parce qu’il inspire le poète. J’en profite pour guider les élèves vers une deuxième lecture, plus symbolique : celle du texte en tant que poème sur l’inspiration. On envisage alors l’hypothèse d’une promenade qui est aussi symbolique : une promenade dans l’imaginaire nécessaire à la création poétique. Une élève explique d’ailleurs très bien le sens de « fantastique » dans l’expression « ombres fantastiques » comme quelque chose venant de l’imaginaire. La deuxième partie de la synthèse découle alors naturellement de la deuxième lecture.

Puis vient en guise de conclusion une troisième partie où j’invite les élèves à réfléchir sur la question de la modernité du poème. Les élèves peuvent alors réinvestir ce qu’ils savent du sonnet ( le deuxième poème que nous avons étudié est un sonnet de Du Bellay ) et voient par ailleurs le mélange entre vocabulaire trivial, moderne et les termes classiques en poésie qui relèvent d’un niveau de langue soutenu comme « féal »…ce que nous relions au sens du poème : le poète s’échappe d’une réalité triviale et pauvre par un recours au rêve et à la poésie. La prise de note se fait alors de façon régulière ; les phases d’oral et les phases d’écrit alternent assez régulièrement. De plus, ceci reste naturel puisque loin de découper artificiellement le texte, la prise de note sous forme d’axes directeurs respecte la lecture naturelle que les élèves font du texte et qui va de la saisie de l’explicite à une lecture plus symbolique du poème. La prise de note accompagne parfaitement la découverte du texte et ne constitue pas une entrave à celle-ci.

c- La prise de note selon le plan du texte.

En revanche les textes plus anciens semblent nécessiter une prise de notes qui suive

davantage la construction du texte lui-même. Lors de l’étude du poème de Ronsard « Ode à

Page 17: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 17 -

Cassandre » et pour celle du poème de Du Bellay « Heureux qui comme Ulysse » (cf annexes 3.2 et 3.3) la prise de note a suivi l’ordre du texte. En effet, les poèmes classiques, contrairement au poème « Nevermore » par exemple, sont travaillés par le poète de telle sorte que les strophes constituent chacune une unité. Dans le poème de Ronsard il est intéressant d’effectuer une prise de note strophe par strophe car cela permet de voir l’évolution du poème et la stratégie de Ronsard qui maîtrise bien l’art de la persuasion, se livrant à une leçon très bien construite. Ce procédé permet de voir que l’on passe de l’invitation à aller voir si la rose est toujours aussi belle ( 1er sixain), au constat que la rose a effectivement fané pendant la journée et que les créatures de la nature sont bien éphémères (2ème sixain) à l’injonction finale : Cassandre doit en tirer une leçon et profiter de sa jeunesse. Cette étude presque linéaire a cependant un axe directeur : la comparaison de la rose et de la femme. Il s’agit de voir comment le poète se sert de cette comparaison pour complimenter Cassandre en mettant en évidence sa beauté mais aussi pour lui donner une leçon sur la brièveté de la jeunesse.

Cette découverte strophe par strophe met en valeur la stratégie du poète et notamment le renversement de positon dans la comparaison : c’est tout d’abord la rose qui est comparée à Cassandre ( « son teint au votre pareil »), puis la leçon se fait plus explicite lorsque c’est Cassandre qui est comparée à la rose (« comme à cette fleur »). Un autre avantage de cette façon de travailler est de faire ressortir une démarche, en début de séquence, et que les élèves pourront réutiliser, la démarche d’interprétation des faits stylistiques. Les élèves visualisent la démarche qui consiste à relier l’utilisation de la métaphore, de l’allitération, de la rime, à une signification. De plus en 3ème les élèves doivent s’habituer à la prise de notes et la façon dont nous avons travaillé leur a montré comment l’on pouvait se livrer à une réelle prise de notes. En effet, les élèves ont à la fois besoin d’avoir des phrases correctement rédigées dans les synthèses et un exemple de prise de notes. Mais le réel avantage est que jusqu’à la fin les élèves se livrent à une découverte du texte sans être coupés dans leur élan par la récapitulation et c’est une démarche que les élèves semblent apprécier car la séance a été dynamique et plaisante.

d- travail collectif / travail individuel.

Une autre question se pose, quels que soient la forme adoptée pour la trace écrite et les

moments de sa rédaction : en effet il s’agit de savoir ce qui va être noté au tableau par le professeur suite à des remarques d’élèves, ce qui va être écrit au tableau par le professeur mais formulé par les élèves ou encore ce qui va être formulé par écrit et individuellement par les élèves. Là encore, l’alternance entre moments de travail collectif et moments de travail individuel participe au maintient de l’attention et de l’intérêt des élèves durant la séance de lecture analytique.

C’est le texte lui-même et la forme adoptée pour la synthèse qui vont guider le choix. Pour une notation des remarques au fur et à mesure du texte comme il a été fait pour « Ode à Cassandre » c’est le travail oral et collectif qui va primer. Une synthèse finale permettra davantage de faire reformuler oralement par les élèves ce qui a été dit ; c’est ce qui a été effectué pour l’étude de « Nevermore » par exemple. Les moments de formulation écrite et individuelle peuvent intervenir à différents stades de la séance. L’écrit individuel peut apparaître au cours de l’explication, voire plutôt au début afin que les élèves gagnent en concentration et que ceux qui se sont un peu dispersés s’impliquent davantage. On peut alors demander aux élèves de relever un champ lexical ou de répondre à une question par écrit. Ce procédé relance la dynamique de l’explication. Cette phase d’écrit peut aussi intervenir à la fin de la séance pour que les élèves participent activement à la synthèse écrite de l’étude du texte. L’essentiel est de varier les démarches afin de surprendre les élèves, donc de les maintenir attentifs tout en rompant un rythme trop régulier.

Page 18: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 18 -

3- Le questionnement. a- Les premières questions.

Le questionnement est un élément décisif pour le déroulement de la séance de lecture

analytique. Il doit être élaboré de façon à piquer la curiosité des élèves et de plus il doit être varié afin de ne pas engendrer l’ennui. Ce sont ces deux aspects qui vont dynamiser la séance.

Ce sont notamment les premières questions qui sont importantes, celles qui font directement suite à la lecture silencieuse des élèves. En effet elles sont essentielles car, comme le souligne Gilberte Niquet, « si elles suscitent des réponses, le professeur va pouvoir appuyer sur cette première perception du texte une problématique qui va justifier la suite de l’activité ». C’est cette justification de l’explication par les propos des élèves qui est importante parce que cela permet aux élèves d’être impliqués dans l’activité, sans quoi l’explication du texte est pour eux un exercice imposé et inutile.

D’ailleurs les accompagnements des programmes du cycle central soulignent cette importance des hypothèses de lecture, c’est-à-dire des premières impressions que les élèves expriment suite à une première lecture silencieuse. En effet le retour au texte sera justifié par le besoin de vérifier ces hypothèses : « Les élèves de 5ème ou de 4ème découvrent souvent avec intérêt, voire curiosité, le texte qui leur est proposé. Ils ne ressentent pas véritablement la nécessité de l’étudier, sinon pour se faire expliquer des passages qui leur paraissent obscurs. Il est donc nécessaire de montrer l’utilité de l’étude des textes : ainsi, les élèves proposent, après la lecture, des hypothèses d’interprétation qui, parce qu’elles sont souvent contradictoires, justifient le retour à un examen réfléchi du texte susceptible de les valider ou non. »

C’est donc parce que des réponses sont nécessaires que les premières questions doivent être suffisamment précises. Gilberte Niquet donne plusieurs exemples de questions propres à engendrer une problématique. On peut donner aux élèves à choisir entre plusieurs propositions un titre pour le texte. L’expérience montre qu’une vérification des hypothèses est alors justifiée puisque le choix des élèves est en général différent après l’explication. Le professeur peut aussi demander aux élèves de choisir un adjectif pour qualifier l’atmosphère d’un texte, ou encore de dire quelle couleur représenterait le mieux ce dernier. L’explication consistera par conséquent entre autres à voir si la première impression est justifiée et surtout à regarder comment l’auteur s’y prend pour donner cette impression.

Les premières questions doivent donc être suffisamment ouvertes sans être vagues. Par « suffisamment ouvertes » je veux dire que la question ne doit pas sembler imposer une réponse qui est celle que le professeur veut absolument faire dire à ses élèves. Un cadre trop rigide, un jeu trop systématique de questions/réponses n’est par pour capter l’intérêt des élèves. Les premières questions doivent pouvoir amener chaque élève à avoir sa propre réponse. Dans son ouvrage Lire et comprendre : l’itinéraire de lecture. , Elizabeth Calaque souligne cette difficulté que représente l’élaboration d’un bon questionnement : « Si le questionnaire qui accompagne habituellement l’exercice constitue une aide pour le lecteur, il est également une contrainte puisqu’il reflète inévitablement l’analyse de celui qui questionne. […] L’explication de texte apparaît comme une aide indispensable à la compréhension des œuvres, mais aussi comme un discours susceptible de faire écran entre l’élève et le texte. » Sans pour autant toujours procéder sous forme d’itinéraire de lecture, exercice qui consiste pour l’élève à souligner, dans un texte un peu long, ce qui lui paraît essentiel puis à justifier ce choix et à le comparer avec celui des autres, activité qui effectivement prend en compte la singularité de l’élève, on peut tirer de ces propos la leçon

Page 19: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 19 -

suivante : il faut être le plus neutre possible dans le questionnement. En effet, c’est l’élève qui doit être actif et chercher dans le texte des informations qu’il interprètera pour bâtir un sens, un but essentiel de la lecture analytique étant de former chez l’élève un certain nombre de réflexes pour qu’il acquière une façon active de lire les textes.

b- Questionner avant la lecture.

Pour former des lecteurs actifs, une autre possibilité est à envisager, celle de donner

quelques questions avant que les élèves ne lisent le texte. Ainsi, au lieu de chercher à tout retenir durant la lecture en vue des questions qui vont suivre, l’élève apprend à lire selon des axes essentiels. Cette possibilité est mise en avant par Daniel Fernandez et Bernard Meyer dans l’ouvrage intitulé Enseigner le français au collège. Cette démarche est intéressante lorsqu’un texte abonde en détails et peut être déstabilisant. Aussi ai-je voulu l’appliquer à l’étude de la scène 1 de l’acte I de Cyrano de Bergerac afin de guider un peu les élèves dans leur lecture. Je leur ai notamment demandé de lire la scène et de faire attention à tout ce qui évoque l’atmosphère d’un théâtre en 1640, en s’appuyant sur la description du lieu et sur les activités des personnages. Aux yeux des élèves la lecture du texte s’est trouvée motivée par la recherche de ces informations. Le fait de poser quelques questions avant la lecture donne du sens à cette activité. Je pense cependant qu’il ne faut pas toujours poser des questions préalables aussi précises sous peine d’enlever aux élèves le plaisir d’une découverte complète du texte. Il faudra privilégier des questions plus générales comme : qui raconte ? qui voit ?

c- Privilégier une lecture active des élèves.

L’essentiel, dans la démarche de questionnement ne repose pas sur le contenu de la

réponse mais sur l’acquisition par la classe d’une « méthodologie intellectuelle durable », comme le précisent Daniel Fernandez et Bernard Meyer dans Enseigner le français au collège. Or, en analysant ma propre pratique et d’après ce qu’ont pu remarquer les différents observateurs de mon cours, j’ai constaté que mes préoccupations, en début d’année surtout, relevaient pour une grande part du contenu de l’explication qui allait être faite du texte. En effet, sortant de l’université où l’on est jugé sur la capacité à réaliser une bonne analyse littéraire d’un texte, capacité difficile à mettre en oeuvre et toujours remise en question, comment être sûre de soi ? Or, s’il est vrai que les textes proposés aux élèves doivent avoir fait l’objet d’une étude sérieuse de la part du professeur, la façon dont ce texte sera donné à découvrir aux élèves est extrêmement importante. Il faut garder à l’esprit plusieurs réalités.

Tout d’abord, il faut perpétuellement penser au fait que les élèves, contrairement au professeur, découvrent un texte nouveau pour eux, il ne faut donc pas les brusquer mais leur laisser le temps de se l’approprier. Les auteurs d’Enseigner le français au collège remarquent en effet cette tendance du jeune professeur à vouloir aller trop vite dans l’analyse d’un texte : « Trop souvent, lors d’une lecture expliquée notamment, le professeur pose des questions et y répond lui-même si aucun retour ne lui parvient en deux à trois secondes. Or, chercher des idées, trouver les mots pour les formuler, oser se décider à les dire devant les autres demande un peu de temps que de longues secondes de silence doivent octroyer à l’élève. ». Il faut donc toujours se raisonner et ne pas se montrer trop pressé de faire passer son savoir aux élèves. L’important est que les élèves cherchent leur propre réponse à des questions que soulève le texte. Daniel Fernandez et Bernard Meyer définissent alors la position du professeur en séance de lecture analytique comme proche de celle d’animateur de groupe, puisque par ses questions il relance la réflexion des élèves mais il ne leur impose pas sa propre interprétation d’un texte. Il faut garder en mémoire que l’on fait le cours pour les élèves et non pas pour se prouver que l’on sait analyser un texte, ce qui pour ma part est un travail constant puisque le

Page 20: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 20 -

passage de l’université à l’enseignement est plus difficile qu’il n’y paraît. Les auteurs d’Enseigner le français au collège soulignent d’emblée cette difficulté : « il faudra apprendre à ne pas tout dire, à laisser des pans entiers de savoirs dans l’ombre, en se contentant d’une approche incomplète et partielle. » Mon travail de toute l’année va donc être en priorité de réfléchir à mon questionnement afin qu’il ne soit pas trop directif et de laisser le temps aux élèves de s’exprimer.

d- Comment varier le questionnement ?

Si la façon de questionner est importante, le fait de varier ce questionnement est lui aussi

essentiel pour notre objectif qui est de dynamiser la lecture analytique afin de susciter et maintenir l’intérêt des élèves.

Il existe plusieurs types de questions que Daniel Fernandez et Bernard Meyer classent ainsi :

- La question fermée : proche du QCM, elle tend à vérifier la compréhension du texte et favorise la participation puisqu’elle rassure les élèves en balisant le champ des réponses. Cependant, elle ne peut pas être utilisée en exclusivité.

- La question ouverte : elle commence par « comment ? » ou « pourquoi ? » et demande davantage de réflexion de la part de l’élève, qui pense prendre alors plus de risques en répondant.

- La question-miroir : elle consiste à renvoyer à l’élève sa propre question afin qu’il essaie lui-même d’y répondre.

- La question-relai : elle consiste à prendre comme point de départ une remarque formulée par un élève et en extraire une problématique que l’on renvoie au groupe.

- La question-relance : il s’agit de reformuler une question non comprise. - La réponse à la réponse : il est demandé à un élève qui a répondu de justifier sa

réponse. Ces différentes sortes de questions sont elles-mêmes classées en deux grandes familles

selon que l’élément recherché figure directement dans le texte ou qu’il faille effectuer un travail d’inférences à partir du texte. Dans ce cas les informations sont données de façon implicite dans le texte.

L’intérêt de cette classification est double. Elle fait tout d’abord ressortir certains types de questions propres à créer une réelle dynamique dans la classe : ce sont toutes les questions qui tendent à faire communiquer les élèves entre eux alors que le professeur s’efface pour faire primer le rapport des élèves au texte. Il s’agit notamment des questions-relai. C’est ce type de questions que je dois développer dans mon cours. Le deuxième intérêt de cette classification est de montrer qu’il est possible de diversifier les types de questions.

Il est donc possible de varier le questionnement et pour cela ce questionnement peut être préparé. Dans son ouvrage Enseigner le français, pour qui ? comment ?, Gilberte Niquet montre qu’il est possible de prévoir son questionnement afin de mieux veiller à la diversité des types de questions. Elle propose la démarche suivante : il s’agit de repérer tout d’abord dans le texte les informations qui doivent être comprises, puis de relever les procédés qui dans le texte permettent d’évoquer ces informations. Le troisième volet de cette démarche consiste à élaborer pour chaque élément un dispositif pédagogique ( questions/consignes) pour amener les élèves à découvrir l’information et le procédé qui permet de l’évoquer. Cette démarche aboutit au tableau suivant :

Page 21: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 21 -

Partie du texte Informations qui doivent

être comprises Procédés évocateurs de ces informations

Dispositif pédagogique utilisé pour la découverte des infos et procédés

Ce tableau, utilisé pendant la séance de lecture analytique conjointement à un texte annoté

permet de formuler un questionnement efficace et varié. Entre autres un dispositif pédagogique évoqué par Gilberte Niquet et auquel je ne pensais

pas assez souvent m’a semblé intéressant : il s’agit de la substitution. Cela consiste pour le professeur à changer oralement soit le temps d’un verbe, soit un mot ou une expression du texte puis à demander aux élèves si l’effet produit est différent et pourquoi. Ce procédé a l’avantage de faire sentir aux élèves l’effet spécifique produit par le choix d’un mot. De plus, cette pratique est assez ludique et peut susciter l’intérêt des élèves. Un autre procédé peut être intéressant : il s’agit de lire à voix haute une phrase pour en faire apprécier les effets sonores.

Voici par exemple le début du tableau que j’ai pu réaliser pour l’extrait de l’incipit de L’Enfant (cf annexe 1); j’ai pu utiliser la substitution pour faire découvrir l’effet produit par l’utilisation du présent dans un récit et la recherche d’information d’après la lecture à voix haute d’un passage.

Partie du texte Informations qui doivent être comprises

Procédés évocateurs de ces informations

Dispositif pédagogique utilisé pour la découverte de ces infos et de ces procédés

§1

Enfance malheureuse caractérisée par le manque de tendresse de la part de la mère Une certaine légèreté dans l’écriture qui traduit l’amertume

Nombreuses phrases interrogatives Nombreuses phrases négatives Accumulation de termes proches par la sonorité, accompagnée d’une forte opposition : « dorloté, tapoté, baisoté » : suffixe en –oté =tendresse en opposition à fouetté.

Quels types de phrases trouve-t-on dans ce début d’autobiographie ? Qu’en déduisez-vous quant à l’enfance du narrateur ? Relecture à voix haute de la fin de la phrase :Ecoutez la fin de la phrase et dites ce que vous remarquez. Quel effet cela produit-il ?

Page 22: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 22 -

§2

Accusation de la mère Souvenir très vivant

Insertion de paroles rapportées dans le récit qui souligne le comportement irraisonné et excessif de la mère Les paroles de la mère reposent sur une litote, ce qui accentue le décalage entre les paroles et les actes. Utilisation du présent de l’indicatif

Par quel moyen l’auteur souligne-t-il le décalage entre les paroles de la mère et ses actes ? Dans le 2ème §, remplacez les présents par des imparfaits. L’effet produit est-il le même ?

C- Le dynamisme du professeur.

Nous avons vu que pour casser un rythme trop régulier et monotone il était possible de diversifier les approche des textes, d’alterner les phases d’écrit et celles d’oral, de travail individuel et de travail collectif et de varier les types de questions. Il s’agit maintenant de voir comment travailler le dynamisme de la voix, les variations dans les intonations. Il est apparu qu’une des meilleures solutions résidait dans le choix des textes et la préparation du cours.

1- Le choix des textes. La question du choix des textes a déjà été évoquée mais il s’agit ici de la considérer sous

un autre aspect. Il convient de choisir un texte non seulement en fonction des objectifs de la séquence, du travail qui va pouvoir être fait par les élèves et des liens qui vont pouvoir être tissés entre les textes d’un même groupement, comme il a été vu, mais selon ses propres goûts. En effet, les textes qui vont susciter le plus d’enthousiasme chez les élèves sont aussi ceux qui ont suscité l’enthousiasme du professeur car cela se traduira dans les intonations de ce dernier, d’où la difficulté de choisir des textes, surtout si l’on veut utiliser un manuel.

2- Le travail préparatoire.

Par ailleurs la préparation du cours par le professeur est essentielle. Il s’agit non seulement de prévoir le questionnement, la trace écrite, la part de travail écrit qui sera demandé aux élèves, mais aussi de se livrer à une véritable étude littéraire du texte. Plus on maîtrise le texte et plus le cours est dynamique puisque l’on peut anticiper et accélérer le commentaire du texte ou au contraire approfondir un aspect, ce qui rompt la monotonie de la séance. Si le

Page 23: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 23 -

professeur n’est pas sûr de la marche du cours, celle-ci va être laborieuse. Pour cela il faut le moins possible se servir des questionnements des manuels et se livrer à sa propre recherche sur le texte. Il sera plus facile ainsi de faire faire aux élèves ce que l’on a fait soit-même.

Par ailleurs, si les questions peuvent être préparées sous forme du tableau que l’on a vu, il apparaît nécessaire de ne pas se montrer trop rigide dans ce questionnement et favoriser les questions qui découlent des remarques des élèves : cela évite de briser l’élan qui naît de la participation des élèves. L’essentiel est de bien connaître le texte afin d’amener quand même les élèves à remarquer ce qui est essentiel dans le texte. Il faut d’abord penser à ce qui doit être vu avant d’élaborer les questions qui vont y mener. J’ai en effet remarqué que ce sont les textes qui me semblaient difficiles à expliquer qui ont donné lieu à des séances vivantes de lecture analytique. Les textes pour lesquels j’ai beaucoup réfléchi avant de trouver des éléments intéressants à faire découvrir aux élèves sont ceux qui les ont le plus motivés. Cela a par exemple été le cas avec la poésie ou avec des extraits de Cyrano de Bergerac, texte qui nécessite beaucoup d’attention si l’on veut découvrir toutes ses richesses. C’est donc en me livrant à une étude très détaillée des textes que j’ai davantage réussi à intéresser les élèves car ceux-ci sont demandeurs d’une certaine richesse d’analyse. Ils apprécient que le professeur leur fasse comprendre des procédés d’écriture complexe, cela les valorise.

3- La sollicitation des élèves.

Les différentes personnes qui ont observé mes séances de lecture analytique m’ont fait remarquer que je pouvais me montrer plus dynamique en faisant davantage circuler la parole. Il s’agit par exemple d’interroger rapidement un élève précis afin que tous se sentent concernés par la séance, soient attentifs. En effet par le biais d’un questionnement alerte qui sollicite le plus grand nombre d’élèves possible, le professeur peut maintenir l’attention des élèves car ceux-ci s’attendent en permanence à être sollicités. De même, un élève qui vient d’être interrogé, même s’il n’a pas su répondre, va être plus attentif dans les minutes qui suivent, son attention va être relancée. Cet élève se sentira intégré au groupe que forme la classe. Par conséquent, lorsqu’une question a été posée, il est bon de solliciter par son prénom un élève en particulier au lieu de poser la question d’une façon générale à l’ensemble de la classe. Cela permet également de faire parler les élèves qui ne prennent pas spontanément la parole y compris lorsqu’ils ont une réponse. Il s’agit ensuite de faire circuler la parole, c’est-à-dire de demander à un autre élève soit d’aider le premier qui a été interrogé, soit de compléter sa réponse. Il pourra aussi donner une réponse totalement différente, le tout étant que le professeur impose le moins possible sa réponse et donc laisse le temps à un maximum d’élèves de s’exprimer.

Il est par exemple facile de s’interdire de fournir la définition d’un mot difficile avant d’avoir vérifié qu’aucun élève ne pouvait en donner une explication. C’est cette capacité du professeur à susciter un enchaînement de réponses provenant de divers élèves qui va rendre la séance plus dynamique. Les prises de paroles du professeur seront moins régulières et moins prévisibles, donc moins pesantes pour les élèves. Leur rôle sera plutôt un rôle structurant dans une séance où ce sont les élèves qui s’expriment. La sollicitation dynamique des élèves est donc un des moyens que je dois travailler pour rendre la séance de lecture analytique plus intéressante.

Page 24: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 24 -

III- EVALUATION DES RESULTATS.

A-Mise en relation et en contexte.

Comme cela a déjà été évoqué, il apparaît que la mise en contexte et aussi la mise en relation des textes à l’intérieur d’une séquence est un élément qui motive les élèves. La mise en relation des deux textes du 18ème siècle relatifs à l’esclavage s’est révélée être un bon moyen de faire parler les élèves. Ils ont tout de suite vu les différences de moyens utilisés pour argumenter. Ils ont également été à même de porter un jugement sur l’efficacité de ces procédés : tous ont été d’accord pour affirmer que le texte de Voltaire les avait plus touchés parce qu’il était plus facile à comprendre et plus direct. Le fait de faire parler directement l’esclave leur a paru plus efficace. Le but a donc été atteint puisqu’il s’agissait de faciliter la prise de parole des élèves et en même temps de relancer leur intérêt par une approche un peu différente des textes.

De même la mise en contexte est essentielle pour captiver l’attention des élèves et donner du sens à un texte en montrant qu’il s’insère dans une réalité historique ou sociale. J’ai remarqué que certains élèves s’intéressaient beaucoup plus au texte lorsque j’en faisais sentir la dimension historique ou sociale. Cette mise en contexte s’est notamment montrée pertinente dans le cadre de la séquence consacrée à l’autobiographie, avec le texte de Georges Perec extrait de W ou le souvenir d’enfance, par exemple, qui a donné lieu à des éclaircissements sur la notion de judaïsme, les élèves ne comprenant pas entre autres que le fait d’être juif n’a rien à voir avec la nationalité. La mise en contexte s’est également montrée intéressante dans le cadre de l’étude des deux textes du 18ème siècle relatifs à l’esclavage. Les élèves ont été interpellés par le temps qui s’est écoulé entre ces textes et la date officielle de l’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises, c’est-à-dire presque cent ans. Ces mises au point historiques ou biographiques sont donc un bon moyen de rendre intéressés le plus possible d’élèves. Cela permet entre autres d’attirer l’attention de certains élèves qui croient ne pas être intéressés par la littérature mais qui sont très curieux de l’histoire du genre humain et en général du monde qui les entoure. Notamment dans ma classe quelques garçons réagissent tout de suite aux textes qui mobilisent des connaissances historiques ou qui ont trait à des faits de société. Ce sont des élèves qui participent beaucoup lorsque l’on étudie des images publicitaires ou des textes argumentatifs. La contextualisation est donc un bon moyen d’augmenter le niveau d’intérêt de son auditoire.

B-La diversification des approches.

a. L’approche par l’image. Dans le cadre de la séquence 3 consacrée à l’autobiographie, la confrontation du texte

« Les maillots qui grattent », tiré du Voile noir d’Anny Duperey, avec la photographie prise par sa mère et la représentant en vacances avec son père, s’est révélée être une bonne approche puisque les élèves ont été intrigués et ont émis de nombreuses hypothèses sur le texte grâce à la photographie. Il s’agissait tout d’abord de faire des hypothèses à propos de

Page 25: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 25 -

celle-ci. Les élèves ont tout de suite deviné qui était photographié et par qui. Ils ont ensuite pu analyser les sentiments des deux personnes grâce à leurs gestes et à l’expression de leur visage. Ils ont par exemple vu que la petite fille était heureuse et fière de poser aux côtés de son père et que le père avait un geste protecteur envers sa fille. La démarche consistait ensuite à lire le texte pour voir notamment ce que la photographie évoquait chez l’auteur. Les élèves ont pu noter alors que le sentiment de protection et de tendresse dont ils avaient remarqué l’importance dans la photographie était également ce sur quoi l’auteur mettait l’accent. Il s’agissait aussi de se demander pourquoi Anny Duperey avait besoin d’une photographie pour se souvenir de ce moment passé avec ses parents. Certains élèves ont alors émis l’hypothèse de la mort de ses parents qui aurait pu rendre difficile le travail de la mémoire, ce qui est vrai, comme j’ai pu le montrer aux élèves en leur lisant un autre extrait du Voile noir. Les élèves ont donc semblé intéressés par cette démarche, ce qui s’est traduit par une bonne participation à l’oral d’une grande part des élèves. J’en conclus qu’il est bon de diversifier les approches des textes dès que cela est possible.

b. Le bon déroulement de la séquence « Poésie lyrique » : pourquoi ? J’ai effectivement remarqué que cette séquence s’est déroulée de façon relativement

satisfaisante en ce qui concerne la lecture analytique. Il s’agit de la séquence numéro 6 effectuée au mois de février, donc assez tardivement. J’ai pu ainsi appliquer dans cette séquence des éléments de réponse au problème du manque d’intérêt des élèves pour l’exercice que constitue la lecture analytique. Je pense qu’il y a plusieurs facteurs auxquels est lié le bon déroulement de ces cours.

Tout d’abord, ayant remarqué que l’intérêt des élèves pour le cours dépendait aussi de l’horaire, je me suis débrouillée pour que les séances de lecture analytique, qui demandent un effort d’investissement important de la part des élèves se déroulent de préférence le matin, moment où les élèves sont davantage disposés à travailler : le mardi de 10h30 à 11h30 ou le vendredi de 9h30 à 10h30, ce qui s’est révélé efficace.

Par ailleurs, la diversité dans la trace écrite et dans la façon de prendre des notes a évité qu’une certaine lassitude ne s’installe.

Ensuite, il apparaît que le texte poétique comporte des avantages pour la lecture analytique avec les élèves :

- C’est une forme d’écriture qui ne laisse pas indifférent : certains élèves disent aimer la poésie, d’autres affirment ne pas la comprendre et la trouver inutile voire inintéressante. Cependant même ces élèves-ci ont fini par s’interroger sur les textes et ont cherché à les comprendre, je pense même que les étudier a changé leur point de vue. - Un poème représente un texte relativement court, ce qui aide les élèves à mieux trouver les informations, et bien délimité, ayant sa propre unité, ce qui permet aux élèves de pouvoir cerner le texte dans son ensemble. - Par ailleurs, la poésie favorise les activités de prolongement : ainsi les élèves ont tous récité un poème, ce qui leur a permis de se sentir plus impliqués dans cette séquence. - La poésie concentre le sens par un travail important sur les mots, ce qui confère aux poèmes une certaine richesse. Cela rend intéressante la lecture analytique car le travail d’explication prend tout son sens. - De plus, l’élève dispose de moyens bien définis pour analyser le texte. Il peut utiliser d’un poème à l’autre les mêmes outils d’analyse : disposition en strophes, sonorités, rythme, images, champs lexicaux … ce qui permet à l’élève d’avoir des repères. Trois poèmes sur les quatre étudiés pendant notre séquence étant des sonnets, les élèves ont pu appuyer leurs analyses sur l’évolution du sonnet qu’ils ont très bien perçue. Ils ont pu

Page 26: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 26 -

remarquer qu’alors que Du Bellay respecte une séparation très nette entre les deux quatrains et les tercets, Verlaine pratique des enjambements entre les strophes, y compris entre les quatrains et les tercets, ce qui contribue à l’effet de flou et de mélancolie qui règne dans ses poèmes. - Enfin, comme un texte poétique n’est pas toujours simple à comprendre et à analyser, cela m’a obligée à me plonger dans les textes et à en faire une étude la plus précise possible. La conséquence en a été une meilleure prise en main du cours, un meilleur questionnement et un certain enthousiasme de ma part et de la part des élèves, lié à la satisfaction d’avoir prise sur des textes à la fois beaux et en apparence difficiles à appréhender.

Il apparaît que la poésie est un bon terrain d’apprentissage et que les méthodes que l’on applique à son étude devraient enrichir l’étude des autres textes.

C-Le rythme, la voix.

1- Un travail permanent. Dynamiser une séance de lecture analytique est un travail constant. Cela peut être facilité

par le choix d’un texte qui nous plaît et peut plaire aux élèves, par un bon travail de préparation, par la diversification de travailler, voire par l’utilisation dynamique du tableau. Cependant la bonne marche d’une telle séance dépend de réalités plus aléatoires et plus triviales, comme l’heure à laquelle se déroule le cours, l’état de fatigue des élèves, ou même du professeur. Paraître enthousiaste et dynamique, et transmettre cet état aux élèves, demande donc un travail permanent sur soi-même. Cependant il apparaît que si les différents éléments que j’ai mentionnés ci-dessus sont travaillés consciencieusement, cet effort de communication est facilité. En règle générale j’ai pu améliorer la communication dans la classe en me montrant plus spontanée, plus dynamique et en sollicitant davantage les élèves.

2- La solution de l’humour. Il est également possible de varier les intonations de sa voix en pratiquant l’humour, ce

qui rend l’élocution plus naturelle. Il s’agit de savoir répondre avec légèreté aux réactions des élèves, ce qui de plus évite de travailler dans une atmosphère tendue et facilite la prise de parole des élèves. J’ai par exemple saisi l’occasion de l’étude de la comédie héroïque Cyrano de Bergerac, pour utiliser l’humour, notamment en ce qui concerne les scènes comiques puisque cela s’y prêtait bien. L’intérêt de l’utilisation de l’humour est multiple : cela met en valeur le texte étudié lorsqu’il est drôle et cela surprend les élèves donc rompt la monotonie du cours. L’humour reste tout à fait possible et efficace dans une classe comme la mienne puisque les élèves sont assez matures et sérieux pour que ces moments plus détendus ne dégénèrent pas.

Page 27: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 27 -

CONCLUSION

Il apparaît donc, suite aux différentes réflexions que j’ai menées, que le problème du manque d’intérêt des élèves pour la lecture analytique, accompagné d’une certaine lassitude au cours de ces séances, pouvait être résolu par différents moyens, mais surtout par la diversification de ces moyens. Un travail constant doit être réalisé pour la préparation des séances de lecture analytique et pour l’effort de communication en classe, mais que ce soit dans le choix des textes, dans leur approche, dans le questionnement et la prise de note, c’est la surprise, donc la variété, qui donne de bons résultats. Il faut sans cesse renouveler sa pratique afin de ne pas faire de la lecture analytique un exercice stérile aux yeux des élèves.

De plus, pour rendre une séance de lecture analytique attrayante, outre cette diversification de la pratique, il faut mettre en œuvre tous les moyens qui peuvent dynamiser le cours. En effet tout être humain et a fortiori un jeune adolescent ne peut être totalement concentré pendant cinquante-cinq minutes : on observe obligatoirement des baisses d’attention. C’est pourquoi il faut varier les activités au cours d’une séance mais aussi solliciter son public pour qu’il reste attentif. C’est ainsi que je me suis efforcée d’avoir une attitude plus vivante, notamment en donnant le plus possible la parole aux élèves et en faisant circuler celle-ci. Le tout est de rompre la monotonie, de surprendre les élèves aussi bien par l’approche des textes que par une attitude et une prise de parole dynamique. Face à des élèves habitués à consommer des émissions de télévisions par exemple, il est important de présenter les choses sous un angle attrayant. En effet l’élève ne fera pas l’effort de s’intéresser à ce qui lui semble inutile ou inintéressant, accoutumé qu’il est à changer d’activité dès qu’il s’en est lassé.

Page 28: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 28 -

BIBLIOGRAPHIE

Enseigner le français, pour qui ? comment ? Gilberte Niquet. Collection « Pédagogies

pour demain, didactiques second degré ». Hachette Education, 1991.

Enseigner le français au collège. Daniel Fernandez et Bernard Meyer.

Armand Colin, 1995.

Lectures pour les collèges. Quels livres ? Pour quel usage ? collectif « lire au collège »

sous la direction de Nicole Schneegans. Collection 36. CRDP de Grenoble. 1995

Lire et comprendre : « l’itinéraire de lecture ». Elisabeth Calaque. Collection 36.

CRDP de Grenoble, 1995.

L’Oral au collège. Jean-Jacques Besson. Collection 36. CRDP de Grenoble et Delagrave.

1999.

Accompagnements aux programmes du cycle central.

Page 29: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 29 -

ANNEXES

Page 30: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 30 -

Annexe 1

Page 31: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 31 -

Annexe 2

Page 32: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 32 -

Annexe 3.1

Page 33: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 33 -

Annexe 3.2

Page 34: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 34 -

Annexe 3.3

Page 35: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 35 -

Annexe 3.3 suite

Page 36: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 36 -

Annexe 3.4

Page 37: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 37 -

Annexe 3.5

Page 38: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 38 -

Annexe 3.5 suite

Page 39: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 39 -

Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez des élèves de troisième ?

La question de l’intérêt des élèves pour les matières enseignées au collège se pose souvent

et ce qui ressort de cette interrogation c’est en général le constat suivant : beaucoup d’élèves s’ennuient pendant les cours.

Le français est une matière qui n’est pas épargnée par ce manque d’intérêt de la part des élèves. De plus, parmi les différentes activités qui constituent le cours de français, il apparaît que la lecture analytique est un exercice qui rebute de nombreux élèves.

Ce problème conduit le professeur, et surtout le professeur débutant, à s’interroger sur sa propre pratique, dans le cadre d’un exercice où il a tendance à être trop directif, alors qu’il s’agit de permettre aux élèves de construire eux-mêmes le sens des textes.

Or, il semble que pour donner aux élèves l’envie de se livrer à cet exercice il est important de lui donner du sens et de varier ses approches, tout en maintenant les élèves dans une attitude active.

Mots-clés :

lecture analytique – intérêt – contextualisation - diversification des approches – dynamisation de la séance.

Collège Clos de Pouilly Classe de 3ème.

Page 40: Comment susciter l’intérêt pour la lecture analytique chez ... · a- Les textes et leur contenu. b- Le rôle de la présentation des textes. 3- Les élèves ne perçoivent pas

- 40 -