4
1 FICHES PRATIQUES : LA FILIÈRE MUSICALE EN AFRIQUE DE L’OUEST Thématique A : Organisation et production de concerts / spectacles Fiche A6 FICHE A6 COMMERCIALISATION ET DIFFUSION DUN SPECTACLE LE MONTAGE DUNE TOURNEE On parle de « tournée » lorsque des artistes se déplacent pour présenter leur spectacle dans plusieurs lieux de façon consécutive (les spectacles espacés d’un mois, par exemple, ne sauraient constituer une tournée). La notion de « tournée » implique généralement un déplacement de l’artiste et de son équipe sur une durée relativement longue à travers les salles et les lieux d’un secteur géographique donné (région, pays, sous-région, continent, monde). Ceci nécessite la définition d’un cahier des charges à mettre en œuvre. La tournée peut être montée soit par le producteur ou le manager de l’artiste, soit par un « tourneur » dont le travail consiste en la vente des spectacles, la préparation et le montage de la tournée. Ce dernier doit en maîtriser toute l’organisation : trouver des dates et des lieux qui doivent se succéder avec une logique géographique (monter un circuit raisonnable en termes de temps et de distances), évaluer la faisabilité budgétaire et les conditions financières de la tournée, coordonner les aspects techniques (matériel), organiser la logistique (déplacements, hébergement, restauration), assurer la promotion de la tournée (communication sur l’ensemble des dates et sur chaque date si les lieux ne s’en chargent pas). Le tourneur coordonne une équipe qui travaille en amont sur la production de la tournée et sollicite du personnel engagé pour toute la durée de l’opération. L’équipe est plus ou moins importante selon la notoriété de l’artiste et le degré de complexité technique du spectacle. Il peut s’appuyer sur des promoteurs locaux qui organisent le spectacle pour son compte et limiter son travail à la vente du spectacle aux organisateurs et diffuseurs, en assurant uniquement le déplacement de l’équipe d’un lieu à un autre. La prospection C’est, en amont, la tâche essentielle du tourneur ou de la personne chargée d’organiser une tournée. Il s’agit de démarcher les acheteurs (dits aussi « programmateurs ») potentiels : salles, organisateurs et promoteurs locaux, collectivités locales, festivals et, plus largement, tous les lieux où l’artiste peut se produire. Ce travail nécessite une approche organisée reposant – compte tenu de la multiplicité des interlocuteurs – sur l’exploitation d’un fichier. On y indiquera tous les lieux de diffusion avec les informations utiles : jauge (capacité de la salle), genres musicaux programmés, conditions d’accueil, infrastructures techniques, coordonnées complètes, nom et contact du programmateur, etc. Ne pas oublier qu’un fichier, quel qu’il soit, n’a d’intérêt que s’il est actualisé et développé régulièrement. La constitution d’un fichier et la connaissance des lieux de diffusion, des programmateurs et des réseaux sont les outils de travail fondamentaux du tourneur (ou du manager qui souhaite monter lui-même la tournée de ses artistes). Les guides et annuaires existants sont très utiles pour créer ou compléter un fichier. Pour le reste, les méthodes de prospection sont multiples. Il appartient à chacun de choisir la sienne en fonction de ses moyens et de ses objectifs. Le tourneur peut convier les organisateurs à venir voir le spectacle dans les lieux où il est diffusé pour les inciter à le programmer à leur tour, voire – si le spectacle est nouveau – organiser lui-même des représentations à cet effet. Les festivals les plus emblématiques sont par exemple une occasion pour les organisateurs de venir faire leur « marché ». Quoi qu’il en soit, les rencontres directes restent le meilleur moyen de décrocher des « dates », d’où l’importance du relationnel. On n’oubliera pas l’envoi de documents aux programmateurs ciblés : CD, démos, vidéos (extraits de spectacle, clips), dossiers de presse, biographies des artistes et toute information utile à propos du spectacle. L’utilisation d’Internet est aujourd’hui un moyen rapide et peu coûteux de communiquer auprès des interlocuteurs visés (emails, réseaux sociaux, liens vers les sites des

Commercialisation Et Diffusion Dun Spectacle

Embed Size (px)

DESCRIPTION

ced

Citation preview

1 FICHES PRATIQUES : LA FILIÈRE MUSICALE EN AFRIQUE DE L’OUEST

Thématique A : Organisation et production de concerts / spectacles Fiche A6

FICHE A6 COMMERCIALISATION ET DIFFUSION D’UN SPECTACLE

LE MONTAGE D’UNE TOURNEE On parle de « tournée » lorsque des artistes se déplacent pour présenter leur spectacle dans plusieurs lieux de façon consécutive (les spectacles espacés d’un mois, par exemple, ne sauraient constituer une tournée). La notion de « tournée » implique généralement un déplacement de l’artiste et de son équipe sur une durée relativement longue à travers les salles et les lieux d’un secteur géographique donné (région, pays, sous-région, continent, monde).

Ceci nécessite la définition d’un cahier des charges à mettre en œuvre. La tournée peut être montée soit par le producteur ou le manager de l’artiste, soit par un « tourneur » dont le travail consiste en la vente des spectacles, la préparation et le montage de la tournée. Ce dernier doit en maîtriser toute l’organisation :

trouver des dates et des lieux qui doivent se succéder avec une logique géographique (monter un circuit raisonnable en termes de temps et de distances),

évaluer la faisabilité budgétaire et les conditions financières de la tournée,

coordonner les aspects techniques (matériel),

organiser la logistique (déplacements, hébergement, restauration),

assurer la promotion de la tournée (communication sur l’ensemble des dates et sur chaque date si les lieux ne s’en chargent pas).

Le tourneur coordonne une équipe qui travaille en amont sur la production de la tournée et sollicite du personnel engagé pour toute la durée de l’opération. L’équipe est plus ou moins importante selon la notoriété de l’artiste et le degré de complexité technique du spectacle.

Il peut s’appuyer sur des promoteurs locaux qui organisent le spectacle pour son compte et limiter son travail à la vente du spectacle aux organisateurs et diffuseurs, en assurant uniquement le déplacement de l’équipe d’un lieu à un autre.

La prospection

C’est, en amont, la tâche essentielle du tourneur ou de la personne chargée d’organiser une tournée. Il s’agit de démarcher les acheteurs (dits aussi « programmateurs ») potentiels : salles, organisateurs et promoteurs locaux, collectivités locales, festivals et, plus largement, tous les lieux où l’artiste peut se produire.

Ce travail nécessite une approche organisée reposant – compte tenu de la multiplicité des interlocuteurs – sur l’exploitation d’un fichier. On y indiquera tous les lieux de diffusion avec les informations utiles : jauge (capacité de la salle), genres musicaux programmés, conditions d’accueil, infrastructures techniques, coordonnées complètes, nom et contact du programmateur, etc. Ne pas oublier qu’un fichier, quel qu’il soit, n’a d’intérêt que s’il est actualisé et développé régulièrement. La constitution d’un fichier et la connaissance des lieux de diffusion, des programmateurs et des réseaux sont les outils de travail fondamentaux du tourneur (ou du manager qui souhaite monter lui-même la tournée de ses artistes). Les guides et annuaires existants sont très utiles pour créer ou compléter un fichier.

Pour le reste, les méthodes de prospection sont multiples. Il appartient à chacun de choisir la sienne en fonction de ses moyens et de ses objectifs. Le tourneur peut convier les organisateurs à venir voir le spectacle dans les lieux où il est diffusé pour les inciter à le programmer à leur tour, voire – si le spectacle est nouveau – organiser lui-même des représentations à cet effet. Les festivals les plus emblématiques sont par exemple une occasion pour les organisateurs de venir faire leur « marché ». Quoi qu’il en soit, les rencontres directes restent le meilleur moyen de décrocher des « dates », d’où l’importance du relationnel.

On n’oubliera pas l’envoi de documents aux programmateurs ciblés : CD, démos, vidéos (extraits de spectacle, clips), dossiers de presse, biographies des artistes et toute information utile à propos du spectacle. L’utilisation d’Internet est aujourd’hui un moyen rapide et peu coûteux de communiquer auprès des interlocuteurs visés (emails, réseaux sociaux, liens vers les sites des

2 FICHES PRATIQUES : LA FILIÈRE MUSICALE EN AFRIQUE DE L’OUEST

Thématique A : Organisation et production de concerts / spectacles Fiche A6

artistes ou leur page MySpace…), de façon personnalisée ou en tir groupé (méthode moins efficace). Cette prospection, par voie postale ou Internet, sera nécessairement suivie d’une relance téléphonique auprès des organisateurs pour s’assurer que les documents ont bien été reçus et lus, pour recueillir leurs avis et les convaincre.

La budgétisation

Comme dans tout projet, le budget prévisionnel est une étape incontournable et déterminante. Il doit prendre en compte tous les postes de dépenses :

les frais fixes de fonctionnement de la structure (loyer des bureaux, électricité, téléphone, personnel permanent…) : ils sont comptabilisés sur une année et, à partir de l’évaluation du nombre de dates pour les tournées prévues dans l’année, une part de ce coût de fonctionnement sera répercuté sur le prix de vente de chaque spectacle ;

les frais variables : il s’agit des coûts liés à l’artiste qui part en tournée (travail de préparation, de prospection et de promotion) sont à évaluer impérativement ; ces coûts diffèrent selon les artistes (un artiste de forte notoriété engendre moins de frais de prospection qu’un artiste en développement).

les frais artistiques : ce sont les dépenses directement liées à la production du spectacle (salaires des artistes et des équipes techniques, location de véhicules, location de matériel, mise à disposition d’affiches, de matériel de promotion…) ; elles sont directement indexées au spectacle en tournée.

Une fois tous les postes budgétisés, le tourneur ajoute un pourcentage de valeur ajoutée (marge) lui permettant d’assurer le développement de sa structure, de prendre des risques et de compenser les surcoûts imprévus qui peuvent survenir sur certaines dates.

Le budget prévisionnel permet au tourneur de fixer le prix auquel le spectacle peut se négocier et de déterminer précisément la latitude dont il dispose dans la négociation financière qui va s’engager avec les diffuseurs. Il faut que la vente du spectacle couvre les dépenses engagées (une mauvaise appréciation de celles-ci est toujours préjudiciable) mais il est fréquent que l’équilibre d’un budget de tournée ne puisse se réaliser qu’avec des aides financières extérieures (apports de partenaires privés, subventions).

La négociation

Le tourneur ou la personne en charge de la négociation doit connaître le coût de chaque spectacle et disposer de budgets prévisionnels solides. En fonction de ces éléments, trois options s’offrent à lui :

Proposer le spectacle au prix fort, à un tarif englobant toutes les dépenses et sa marge. C’est l’objectif à atteindre. Dans les faits, ce n’est pas toujours facile, la somme demandée pouvant paraître dissuasive à certains.

Proposer le spectacle à un tarif auquel il n’ajoute pas sa marge. C’est donc une opération « blanche » ou neutre. Il ne perd pas d’argent sur ce spectacle mais n’en gagne pas non plus. Il atteint juste son seuil d’équilibre.

Proposer le spectacle en dessous du tarif qui prend en compte les frais fixes ou les frais de structure. Il travaille alors à perte, ce qui peut mettre la structure en péril et peut, dans certains pays, s’avérer illégal (dumping) pour une société commerciale, par rapport aux règles de la concurrence.

Dans le montage d’une tournée, le tourneur peut jongler avec les deux premières options. Il peut être pertinent, par exemple, de placer le spectacle sur une date qui ne rapporte pas d’argent sur des jours « off » (les journées sans spectacle dans une tournée, qui génèrent des frais supplémentaires en matière de rémunération, d’hébergement et de restauration des artistes et de l’équipe). De même, la vente d’un spectacle à perte peut s’avérer stratégique si elle est compensée par des marges plus importantes réalisées par ailleurs et si elle contribue à la promotion du spectacle auprès d’acheteurs potentiels. La rentabilité globale de la tournée importe plus que celle de chaque date prise séparément. Et c’est dans cette optique que doit travailler le tourneur.

3 FICHES PRATIQUES : LA FILIÈRE MUSICALE EN AFRIQUE DE L’OUEST

Thématique A : Organisation et production de concerts / spectacles Fiche A6

LES LIEUX DE DIFFUSION On soulignera au préalable la grande diversité des lieux susceptibles d’accueillir des spectacles ou d’en produire (sans parler des lieux occasionnels). Ils peuvent être très différents les uns des autres en termes de capacité d’accueil, d’équipement, de programmation, de statut, de sources de financements et de modes de fonctionnement.

Typologie des lieux de diffusion

lieux dédiés : salles de concerts, théâtres, scènes publiques…

lieux festifs : bars (et piano-bars), maquis, bars dancing, clubs et discothèques…

lieux de plein air : chapiteaux, stades, parcs, théâtres de verdure…

festivals

centres culturels, maisons des jeunes, espaces associatifs…

lieux atypiques et occasionnels

Organisation des lieux de diffusion

L’organigramme de l’équipe du site peut varier considérablement d’un lieu à l’autre. On rencontre deux extrêmes. D’une part, les lieux qui ne sont pas conçus pour accueillir régulièrement des spectacles n’ont, la plupart du temps, pas de personnel spécifique affecté à cette activité ; d’autre part, les lieux importants, exclusivement dédiés aux spectacles et qui proposent une programmation régulière, regroupent l’ensemble des qualifications nécessaires en termes de personnel :

l’administration (gestion financière, comptabilité, gestion du personnel, recherche de financements, relation avec les prestataires de service, billetterie, accueil du public),

l’artistique (programmation, contrats, accueil des artistes, organisation des déplacements, de l’hébergement et de la restauration),

la technique (directeur technique, régisseur général, régisseur son, régisseur lumière, régisseur plateau, backliner, électricien, techniciens),

la communication (chargé de communication, attaché de presse, responsable des relations publiques).

Ces différences devront être prises en compte dans le montage de la tournée.

LA PROGRAMMATION Le programmateur est la personne en charge de la programmation d’un lieu ou d’un festival. Selon les lieux et leur importance, il peut être assisté par un chargé de production et il peut y avoir plusieurs programmateurs.

Le programmateur est en relation constante avec les réseaux de diffusion, les tourneurs, les maisons de disques, les agents, les managers, voire avec les artistes eux-mêmes. Il doit se tenir informé en permanence de la production artistique de son secteur d’activité, être en phase avec les évolutions et les tendances artistiques qu’il programme, suivre l’évolution des artistes et pressentir ceux qui seront les artistes de demain, en n’hésitant pas à découvrir, sortir et voir les spectacles qu’il peut être susceptible de programmer.

Au-delà de ce rôle, le programmateur doit veiller à accueillir les artistes dans les conditions les meilleures et les plus professionnelles possibles. Ses choix et son degré de professionnalisme se répercutent sur l’image du lieu à l’extérieur, qui doit être positive et inciter les tourneurs et managers à sélectionner la salle pour les tournées futures.

Comment fonctionne le programmateur ?

Il est la personne clé dans le monde du spectacle. Il est évidemment courtisé et sollicité de toutes parts. Bien souvent, sur son bureau s’accumulent des piles de disques, de vidéos, de dossiers, de

4 FICHES PRATIQUES : LA FILIÈRE MUSICALE EN AFRIQUE DE L’OUEST

Thématique A : Organisation et production de concerts / spectacles Fiche A6

demandes. Il ne pourra donc pas répondre à toutes les propositions et devra opérer des choix. Les paramètres qu’il est amené à prendre en compte sont les suivants :

le cahier des charges du lieu qu’il programme (un établissement public ou une structure privée n’ont pas les mêmes missions),

le public ou les différents publics auxquels il s’adresse,

la « ligne éditoriale » de la programmation (large et diversifiée, ou concentrée sur certains courants artistiques),

la cohérence d’ensemble (s’il s’agit d’une programmation à l’année ou d’un festival),

l’actualité artistique (quels sont les spectacles et artistes disponibles à la date à laquelle le programmateur veut accueillir le spectacle ?),

sans oublier, inéluctablement, les contraintes budgétaires et techniques du lieu.

Le programmateur doit composer avec la marge de manœuvre dont il dispose, entre sa sensibilité artistique, ses propres goûts, les paramètres évoqués ci-dessus et les axes de programmation imposés ou souhaités par sa direction.

Entre une programmation sans prise de risque (ne retenant que des artistes de notoriété qui rempliront facilement la salle et assureront le succès économique du spectacle) et une programmation « découverte » (pour mettre en avant des nouveaux talents, des artistes émergents dont certains seront les stars de demain), beaucoup plus valorisante, il faut réussir un habile dosage. Les premières parties sont un moyen efficace de concilier les deux approches.

Le programmateur peut aussi rechercher une valeur ajoutée en proposant une programmation singulière, originale, qui se distingue de ce qu’offrent les autres lieux ou festivals. Cet exercice est difficile. Les artistes, managers et tourneurs se fixant souvent comme objectif de faire la saison des festivals, on retrouve les mêmes affiches un peu partout, ce qui homogénéise les programmations. D’où l’intérêt, pour le programmateur, de chercher à proposer des affiches différentes, des axes thématiques ou événementiels.

Dans tous les cas, la qualité des spectacles est déterminante. Les programmateurs sont en contact avec leurs confrères avec lesquels ils échangent des informations qui pourront servir ou desservir la promotion du spectacle.

Fiche conçue en 2010 dans le cadre du programme ARPEM (Appui au Réseau ouest-africain de Pépinières d’Entreprises de la filière de la Musique) par Culture et développement en partenariat avec le Nzassa (Abidjan – Côte d’Ivoire) et GL Connection, et avec le soutien du Programme d’appui UE-ACP aux industries culturelles ACP, de l’UNESCO (Alliance globale pour la diversité culturelle) et du ministère espagnol des Affaires étrangères et de la coopération.